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CAA de BORDEAUX, 2ème chambre, 03/10/2024, 22BX01884, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'ordonner une expertise avant dire droit, d'annuler la décision du 20 février 2019 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande de révision pour aggravation de sa pension militaire d'invalidité pour l'infirmité de séquelles d'entorses du genou droit, et d'enjoindre à la ministre de lui allouer une pension révisée au taux de 35 %. Après avoir ordonné une expertise par un jugement n° 1905570 du 23 février 2021, le tribunal, par un jugement du 3 mai 2022, a annulé la décision du 20 février 2019 en ce qu'elle ne retient aucune aggravation, et a fixé le taux de la pension militaire d'invalidité de M. C... à 35 % à compter du 10 novembre 2017. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 8 juillet 2022, le ministre des armées demande à la cour d'annuler le jugement du 3 mai 2022 et de rejeter la demande présentée par M. C... devant le tribunal. Il soutient que : - la décision de rejet du 20 février 2019 a été prise au constat de l'absence d'aggravation significative des séquelles fonctionnelles entre l'expertise du 25 septembre 2018 et celle du 28 avril 2011, conformément aux dispositions des articles L. 125-1, L. 125-3, L. 125-5 et L. 151-6 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - l'expert judiciaire a commis une erreur d'interprétation du guide-barème en retenant que celui-ci prévoyait un taux de 60 % pour une raideur en flexion entre 130° et 30° ; la situation clinique constatée lors de l'expertise réglementaire du 25 septembre 2018, une extension limitée entravant l'extension complète, justifie un taux de 10 à 30 % ; - compte tenu de l'état arthrosique du genou droit, le taux d'invalidité doit être maintenu à 20 %. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 ; - le décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme A..., - les conclusions de Mme Isoard, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. M. C..., engagé dans l'armée le 26 septembre 1973 et rayé des contrôles le 5 août 2004 au grade d'adjudant-chef, est titulaire depuis 2004 d'une pension militaire d'invalidité mixte, concédée en dernier lieu au taux de 20 % à titre définitif par arrêté du 13 février 2017, pour l'infirmité de séquelles d'entorses du genou droit imputables à cinq blessures reçues en service en 1976, 1983, 1984, 1985 et 1987. En 2011, il en avait sollicité la révision, mais l'expertise n'avait conclu qu'à une aggravation de 5 %. Le 10 novembre 2017, il en a à nouveau sollicité la révision pour aggravation. Par une décision du 20 février 2019, la ministre des armées a rejeté sa demande. M. C... a contesté cette décision devant le tribunal des pensions militaires de Bordeaux. En application de la loi du 13 juillet 2018 susvisée, la procédure a été transmise au tribunal administratif de Bordeaux, lequel a ordonné une expertise par un jugement du 23 février 2021, puis, par un jugement du 3 mai 2022 dont le ministre des armées relève appel, a annulé la décision du 20 février 2019 en ce qu'elle n'avait pas retenu d'aggravation, et a fixé le taux de la pension de M. C... à 35 % à compter du 10 novembre 2017. 2. Aux termes de l'article L. 154-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " Le titulaire d'une pension d'invalidité concédée à titre définitif peut en demander la révision en invoquant l'aggravation d'une ou plusieurs des infirmités en raison desquelles cette pension a été accordée. / Cette demande est recevable sans condition de délai. / La pension ayant fait l'objet de la demande est révisée lorsque le pourcentage d'invalidité résultant de l'infirmité ou de l'ensemble des infirmités est reconnu supérieur de 10 points par rapport au pourcentage antérieur. / Toutefois, l'aggravation ne peut être prise en considération que si le supplément d'invalidité est exclusivement imputable aux blessures et aux maladies constitutives des infirmités pour lesquelles la pension a été accordée. / La pension définitive révisée est concédée à titre définitif. " Aux termes de l'article L. 125-1 du même code : " Le taux d'invalidité reconnu à chaque infirmité examinée couvre l'ensemble des troubles fonctionnels et l'atteinte à l'état général. " 3. Dans son rapport du 25 septembre 2018, l'expert désigné par l'administration a retenu un taux d'invalidité de 30 % pour une gonarthrose et ses complications en relation directe et déterminante avec les cinq entorses du genou avec lésions méniscales du ligament croisé antérieur survenues dans le cadre du service, en décrivant comme signes fonctionnels une gêne à l'extension et surtout à la flexion de la jambe, un fond douloureux permanent avec un gonflement intermittent, et un flessum non réductible. Le médecin du service des pensions militaires d'invalidité a estimé que le taux de 20 % devait être maintenu car l'aggravation du déficit de flexion était minime par rapport à la précédente expertise du 28 avril 2011, et la commission consultative médicale a émis un avis favorable au maintien du taux de 20 % en retenant une absence d'aggravation des séquelles fonctionnelles. Toutefois, une IRM du 7 août 2017 avait mis en évidence une gonarthrose bi-compartimentale évoluée avec une chondropathie sévère, une chondrolyse quasi complète et une méniscopathie dégénérative, ce qui avait nécessité une intervention chirurgicale réalisée le 11 septembre 2017. L'expert judiciaire a expliqué que cet état arthrosique constitue l'évolution attendue d'une rupture du ligament croisé antérieur, et que l'aggravation de l'état ostéochondral du genou est continue. S'il a retenu à tort un taux d'invalidité de 35 % en se référant au barème applicable aux ankyloses complètes du genou, le guide-barème prévoit, comme le relève le ministre des armées, un taux de 10 % à 30 % pour une extension limitée entravant l'extension complète. Alors même que la limitation de l'amplitude de flexion du genou a peu évolué, l'aggravation de l'arthrose en lien avec les blessures reçues en service, qui s'accompagne d'un fond douloureux permanent, contribue à la perte de fonctionnalité du genou, et doit ainsi être prise en compte pour évaluer les troubles fonctionnels. Il y a donc lieu de retenir le taux de 30 % fixé par l'expert initialement missionné par l'administration. 4. Il résulte de ce qui précède que le ministre des armées est seulement fondé à demander la réformation du jugement du tribunal administratif de Bordeaux n° 1905570 du 3 mai 2022 en ce qu'il a fixé le taux de la pension militaire d'invalidité de M. C... à 35 % au lieu de 30 % à compter du 10 novembre 2017. DÉCIDE : Article 1er : Le taux de la pension militaire d'invalidité de M. C... est fixé à 30 % à compter du 10 novembre 2017. Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux n° 1905570 du 3 mai 2022 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt. Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête du ministre des armées est rejeté. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre des armées et des anciens combattants et à M. B... C.... Une copie en sera adressée au docteur D..., expert. Délibéré après l'audience du 10 septembre 2024 à laquelle siégeaient : Mme Catherine Girault, présidente, Mme Anne Meyer, présidente-assesseure, M. Antoine Rives, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 octobre 2024. La rapporteure, Anne A... La présidente, Catherine GiraultLa greffière, Virginie Guillout La République mande et ordonne au ministre des armées et des anciens combattants en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 22BX01884
Cours administrative d'appel
Bordeaux
CAA de LYON, 3ème chambre, 09/10/2024, 23LY00503, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du 7 septembre 2020 par laquelle le maire de la commune de Chambéry a refusé de retirer l'arrêté du 15 mai 2020 prononçant son admission à la retraite à compter du 1er octobre 2020. Par un jugement n° 2006579 du 13 décembre 2022, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande. Procédure devant la cour Par une requête enregistrée le 9 février 2023, M. B... A..., représenté par Me Adamo-Rossi, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 13 décembre 2022 ; 2°) d'annuler la décision du maire de la commune de Chambéry du 7 septembre 2020 ; 3°) de mettre à la charge de la commune de Chambéry une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - la décision du 7 septembre 2020, qui lui refusait un avantage, devait être motivée en vertu du 6° de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration ; - la décision attaquée a été prise en méconnaissance des dispositions de l'article L. 242-3 du code des relations entre le public et l'administration, dès lors que l'autorité communale était tenue de procéder au retrait de l'arrêté du 15 mai 2020, entaché d'illégalité ; en effet, sa demande d'admission à la retraite a été déposée sous la contrainte, et, alors que la décision ayant refusé de reconnaître l'imputabilité au service de sa maladie a été annulée avec effet rétroactif, les dispositions relatives à l'admission à la retraite pour invalidité ont été méconnues. Par un mémoire en défense enregistré le 7 mars 2024, la commune de Chambéry, représentée par la SELARL Cabinet Philippe Petit et Associés, agissant par Me Petit, conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge de M. A... une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 7 mars 2024, la clôture de l'instruction a été fixée, en dernier lieu, au 18 avril 2024. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code général de la fonction publique ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - le décret n°2003-1306 du 26 décembre 2003 ; - le code de justice administrative. Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Jean-Yves Tallec, président ; - les conclusions de Mme Bénédicte Lordonné, rapporteure publique ; - et les observations de Me Garaudet, représentant la commune de Chambéry. Considérant ce qui suit : 1. M. A..., ingénieur territorial principal placé en congé de maladie depuis le 21 septembre 2015, a présenté le 6 mai 2020 une demande d'admission à la retraite à compter du 1er octobre 2020. Par un arrêté du 15 mai 2020, le maire de la commune de Chambéry a fait droit à cette demande sous réserve de l'avis de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL). Le 5 juin suivant, ladite caisse a concédé une pension à l'intéressé. Toutefois, le tribunal administratif de Grenoble ayant annulé, par un jugement du 30 juin 2020, la décision du maire de la commune du 6 juin 2018 refusant de reconnaître l'imputabilité au service de sa maladie, M. A..., par un courrier du 22 juillet 2020, a sollicité le retrait de l'arrêté l'admettant à la retraite. Par une décision du 7 septembre 2020, le maire de la commune de Chambéry a refusé de procéder à ce retrait. M. A... relève appel du jugement du 13 décembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ce refus. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 2. En premier lieu, aux termes des dispositions de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. /A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) 6° Refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir (...) " 3. La décision litigieuse, qui rejette la demande de retrait de l'arrêté du maire de la commune de Chambéry admettant M. A... à la retraite, n'est pas au nombre des décisions qui doivent être motivées en application de ces dispositions, ni d'aucun autre principe ou disposition. Le moyen tiré de l'insuffisance de la motivation de cette décision doit dès lors être écarté comme inopérant. 4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 242-3 du code des relations entre le public et l'administration : " Sur demande du bénéficiaire de la décision, l'administration est tenue de procéder, selon le cas, à l'abrogation ou au retrait d'une décision créatrice de droits si elle est illégale et si l'abrogation ou le retrait peut intervenir dans le délai de quatre mois suivant l'édiction de la décision ". Aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. (...) Toutefois, si la maladie provient (...) d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. (...) ". Enfin, aux termes de l'article 30 du décret du 26 décembre 2003 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales : " Le fonctionnaire qui a été mis dans l'impossibilité permanente de continuer ses fonctions en raison d'infirmités résultant de blessures ou de maladies contractées ou aggravées, soit en service, soit en accomplissant un acte de dévouement dans un intérêt public, soit en exposant ses jours pour sauver la vie d'une ou plusieurs personnes, peut être mis à la retraite par anticipation soit sur sa demande, soit d'office, à l'expiration des délais prévus au troisième alinéa de l'article 30 et a droit à la pension rémunérant les services prévue au 2° de l'article 7 et au 2° du I de l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite. Par dérogation à l'article 19, cette pension est revalorisée dans les conditions fixées à l'article L. 341-6 du code de la sécurité sociale ". 5. D'une part, si M. A... se prévaut de ce que, par le jugement du 30 juin 2020 cité au point 1, le tribunal administratif de Grenoble a annulé la décision du maire de la commune de Chambéry ayant refusé de reconnaître l'imputabilité au service de la pathologie dont il souffrait, son placement rétroactif en congé de maladie imputable au service ne faisait pas obstacle à son admission à la retraite à l'âge révolu, ainsi qu'il l'avait lui-même demandée. Sur ce point, aucun des éléments versés au dossier ne permet d'établir que, contrairement à ce qu'il soutient, M. A... aurait été contraint par l'autorité communale de déposer sa demande d'admission à la retraite. 6. D'autre part, M. A..., qui n'a pas sollicité son admission à la retraite pour invalidité, ne peut utilement se prévaloir des règles régissant l'admission à la retraite pour ce motif, rappelées au point 4. 7. L'arrêté du 15 mai 2020 n'étant pas entaché d'illégalité, le maire de la commune de Chambéry n'était pas tenu de procéder à son retrait, et le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 242-3 du code des relations entre le public et l'administration ne peut en conséquence qu'être écarté. 8. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement contesté, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 7 septembre 2020. Sur les frais liés au litige : 9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Chambéry, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par M. A.... Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit à la demande de la commune de Chambéry présentée sur le fondement de ces mêmes dispositions. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Chambéry sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la commune de Chambéry. Délibéré après l'audience du 24 septembre 2024, à laquelle siégeaient : - M. Jean-Yves Tallec, président de chambre, - Mme Emilie Felmy, présidente-assesseure, - Mme Vanessa Rémy-Néris, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 octobre 2024. Le président rapporteur, Jean-Yves TallecLa présidente assesseure, Emilie Felmy La greffière, Michèle Daval La République mande et ordonne au préfet de la Savoie en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition, La greffière, 2 N° 23LY00503
Cours administrative d'appel
Lyon
Conseil d'État, 6ème chambre, 18/10/2024, 463148, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : M. B... A... a demandé au tribunal des pensions militaires de la Vienne d'annuler la décision du 27 janvier 2017 par laquelle le ministre de la défense a refusé de faire droit à sa demande de pension militaire d'invalidité. Par un jugement n° 18/04 du 24 septembre 2018, le tribunal des pensions militaires de la Vienne a annulé la décision du ministre de la défense du 27 janvier 2017 et reconnu à M. A... un droit à une pension militaire d'invalidité au taux de 30 %. Par un arrêt avant-dire droit du 10 juillet 2019, la cour régionale des pensions militaires de Poitiers, saisie par le ministre des armées, a ordonné une expertise médicale. Par un acte de transmission des dossiers, en application des dispositions du décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018 portant transfert de compétence entre juridictions de l'ordre administratif, la cour administrative d'appel de Bordeaux a été saisie de la requête du ministre des armées. Par un arrêt n° 19BX04095 du 3 février 2022, la cour administrative d'appel de Bordeaux a annulé le jugement du 24 septembre 2018 du tribunal des pensions de la Vienne et rejeté les conclusions d'appel de M. A.... Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'État les 13 avril et 13 juillet 2022, M. A... demande au Conseil d'État : 1°) d'annuler cet arrêt ; 2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel du ministre des armées ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois, Sebagh, son avocat, au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n°91-647 du 10 juillet 1991. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Stéphanie Vera, maîtresse des requêtes, - les conclusions de M. Frédéric Puigserver, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Bauer-Violas - Feschotte-Desbois - Sebagh, avocat de M. A... ;Considérant ce qui suit : 1. M. A... s'est engagé le 27 juillet 1982 dans le 8ème régiment de parachutistes d'infanterie de marine et a été rayé des cadres le 5 novembre 1982 pour inaptitude aux troupes aéroportées. Il a sollicité le 19 juin 1991 l'octroi d'une pension militaire d'invalidité au titre de lombalgies chroniques consécutives à un spondylolisthésis en L5-S1. Cette demande a été rejetée par une décision du ministre de la défense du 1er juin 1992 au motif que l'infirmité était antérieure à l'incorporation et que l'aggravation de cette infirmité à l'occasion du service, évaluée à 10 %, n'atteignait pas le taux de 30 % indemnisable. Par un jugement du 6 décembre 1994, devenu définitif, le tribunal des pensions des Deux-Sèvres, après avoir relevé un taux global d'invalidité de 30 % dont 10 % relatifs à l'état antérieur et 20 % résultant d'une aggravation au cours du service, a rejeté la demande d'annulation formée par M. A... contre cette décision au motif que le taux d'aggravation était inférieur à 30%. Par une demande du 27 octobre 2014, M. A... a sollicité l'octroi d'une pension militaire d'invalidité pour l'infirmité " Lombosciatalgies chroniques bilatérales : arthrodèse L3-L5, dysesthésies et hypoesthésie du membre inférieur gauche, raideur lombaire. Achilléen gauche aboli, marche talons-pointes impossible. Lasègue bilatéral ". Par une décision du 27 janvier 2017, le ministre de la défense a rejeté cette demande au motif que l'invalidité, évaluée globalement au taux de 40 %, résultait, à hauteur de 10 %, d'une infirmité antérieure au service et, à hauteur de 10 %, de " l'arthrodèse L3-L5 " postérieure au service, de sorte que les séquelles de la maladie contractée durant le service entraînaient un degré d'invalidité de 20 %, inférieur au minimum indemnisable de 30 %. Par un jugement du 24 septembre 2018, le tribunal des pensions de la Vienne a annulé la décision du ministre de la défense du 27 janvier 2017 et reconnu à M. A... un droit à une pension militaire d'invalidité au taux de 30 %. La ministre des armées a relevé appel de ce jugement. Par un arrêt du 10 juillet 2019, la cour régionale des pensions de Poitiers a ordonné avant-dire droit une expertise médicale, dont le rapport a été remis le 2 décembre 2019. Par un arrêt du 3 février 2022, la cour administrative d'appel de Bordeaux, compétente en application du décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018 a annulé le jugement du 24 septembre 2018 et rejeté les conclusions d'appel de M. A.... 2. Aux termes de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, applicable à la date de la demande de pension du 27 octobre 2014 : " Ouvrent droit à pension : / 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; / 2° Les infirmités résultant de maladies contractées par le fait ou à l'occasion du service ; / 3° L'aggravation par le fait ou à l'occasion du service d'infirmités étrangères au service (...) ". Aux termes de l'article L. 4 du même code : " Les pensions sont établies d'après le degré d'invalidité. / Sont prises en considération les infirmités entraînant une invalidité égale ou supérieure à 10 %. / Il est concédé une pension : / 1° Au titre des infirmités résultant de blessures, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse 10 % ; / 2° Au titre d'infirmités résultant de maladies associées à des infirmités résultant de blessures, si le degré total d'invalidité atteint ou dépasse 30 % ; / 3° Au titre d'infirmité résultant exclusivement de maladie, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse : / 30 % en cas d'infirmité unique ; / 40 % en cas d'infirmités multiples. / En cas d'aggravation par le fait ou à l'occasion du service d'une infirmité étrangère à celui-ci, cette aggravation seule est prise en considération, dans les conditions définies aux alinéas précédents. / Toutefois, si le pourcentage total de l'infirmité aggravée est égal ou supérieur à 60 %, la pension est établie sur ce pourcentage ". 3. Pour écarter le moyen présenté devant elle par M. A... et tiré de ce que sa pathologie ne constituait pas l'aggravation d'une infirmité étrangère au service, la cour administrative d'appel de Bordeaux s'est fondée sur l'autorité de la chose jugée attachée au jugement du 6 décembre 1994 du tribunal des pensions des Deux-Sèvres, lequel avait, selon la cour, retenu d'une part, que cette infirmité avait pour origine une maladie, d'autre part, que l'invalidité en résultant était imputable, à hauteur de 10 %, à un état antérieur. 4. Si M. A... soutient que la cour a méconnu la portée du jugement du 6 décembre 1994 dès lors que celui-ci ne se serait pas prononcé sur l'imputabilité au service ni par voie de conséquence, sur son état antérieur, il résulte toutefois de ce jugement que le tribunal des pensions des Deux-Sèvres a admis l'existence d'un état antérieur en s'appuyant sur la contre-expertise du docteur C... du 19 juin 1991 qui concluait à un taux global d'invalidité de 30 % dont 10 % relatifs à l'état antérieur. La question de l'imputabilité au service que le tribunal n'a pas jugé nécessaire de trancher ne concernait pas l'état antérieur mais l'aggravation de cet état dès lors que le taux de 20 % qui lui était affecté n'ouvrait en tout état de cause pas de droit à pension. Par suite, en jugeant comme elle l'a fait, la cour n'a pas méconnu le sens et la portée du jugement du 6 décembre 1994. Le moyen ne peut donc qu'être écarté, tout comme le moyen d'erreur de droit soulevé par voie de conséquence. 5. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque. Ses conclusions présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.D E C I D E : -------------- Article 1er : Le pourvoi de M. A... est rejeté. Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. B... A... et au ministre des armées. Délibéré à l'issue de la séance du 19 septembre 2024 où siégeaient : M. Cyril Roger-Lacan, assesseur, présidant ; M. Stéphane Hoynck, conseiller d'Etat et Mme Stéphanie Vera, maîtresse des requêtes-rapporteure. Rendu le 18 octobre 2024. Le président : Signé : M. Cyril Roger-Lacan La rapporteure : Signé : Mme Stéphanie Vera La secrétaire : Signé : Mme Angélique RajaonariveloECLI:FR:CECHS:2024:463148.20241018
Conseil d'Etat
CAA de DOUAI, 3ème chambre, 16/10/2024, 23DA01615, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 18 juin 2020 par lequel le maire de la commune de Cuincy a refusé de reconnaître l'imputabilité de sa maladie au service et la décision du 6 août 2020 par laquelle la même autorité lui a refusé l'octroi à titre provisoire d'un congé pour invalidité temporaire imputable au service, et d'enjoindre à la commune de Cuincy de procéder à la régularisation de sa situation, notamment financière. Par un jugement n° 2006144 du 8 juin 2023, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés le 8 août 2023 et le 15 mars 2024, Mme B..., représentée par Me Piret, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du 8 juin 2023 ; 2°) d'annuler l'arrêté du 18 juin 2020 et la décision du 6 août 2020 ; 3°) d'enjoindre à la commune de Cuincy de la placer en congé d'invalidité temporaire imputable au service ou, à défaut, de saisir le comité médical afin qu'il se prononce sur son taux d'incapacité temporaire et de procéder à la régularisation financière de sa situation incluant le règlement de cent-quatre-vingt-quinze heures de récupération non prises, seize jours de congés non pris et des frais de déplacement, les sommes versées étant assorties des intérêts, dans un délai de quinze jours sous astreinte de 100 euros par jour de retard ; 4°) de mettre à la charge de la commune de Cuincy une somme de 17 252,09 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - sa demande d'annulation de la décision du 6 août 2020 est recevable dès lors que cette décision constitue un refus de la placer en congé d'invalidité temporaire imputable au service à titre provisoire ; - l'arrêté du 18 juin 2020 a été pris au terme d'une procédure irrégulière dès lors que la commission de réforme ne s'était pas préalablement prononcée sur le taux de son incapacité permanente ; - cet arrêté est insuffisamment motivé ; - l'administration ne pouvait rejeter sa demande de congé pour invalidité temporaire imputable au service dès lors que le maire ne disposait pas du taux d'incapacité permanente partielle lui permettant de se prononcer sur sa demande ; - elle a droit au bénéfice d'un congé pour invalidité temporaire imputable au service dès lors, d'une part, qu'elle justifie d'un taux d'incapacité permanente supérieur à 25 % et, d'autre part, que sa pathologie résulte de façon directe et certaine du harcèlement moral et sexuel dont elle a été victime dans l'exercice de ses fonctions. Par un mémoire en défense, enregistré le 25 janvier 2024, et un mémoire enregistré le 6 mai 2024, qui n'a pas été communiqué, la commune de Cuincy, représentée par Me Beguin, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la requérante en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 9 avril 2024, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 6 mai 2024. Une note en délibéré présentée pour Mme B..., par Me Piret, a été enregistrée le 9 octobre 2024. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des relations entre le public et l'administration ; - le code de la sécurité sociale ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Guérin-Lebacq, président-assesseur, - les conclusions de M. Carpentier-Daubresse, rapporteur public, - et les observations de Me Piret, représentant Mme B..., et de Me Beguin, représentant la commune de Cuincy. Une note en délibéré, enregistrée le 9 octobre 2024, a été présentée pour Mme B.... Considérant ce qui suit : 1. Mme B..., adjointe territoriale principale d'animation de la commune de Cuincy (Nord), est chargée, au sein du service " éducation-jeunesse ", de l'accueil de loisirs sans hébergement (ALSH) et de la coordination des temps périscolaires pour les enfants de six à douze ans. Placée en congé de longue maladie du 20 mai 2019 au 19 mai 2020 pour un syndrome anxiodépressif, elle a demandé, le 22 juin 2019, la reconnaissance de l'imputabilité au service de sa pathologie. En dépit d'un avis favorable de la commission de réforme à cette demande, le maire de la commune de Cuincy a refusé, par un arrêté du 18 juin 2020, de reconnaître l'imputabilité au service de la pathologie de Mme B.... Par un courrier du 2 juillet 2020, l'intéressée a sollicité la communication du formulaire de déclaration d'accident ou de maladie nécessaire à la présentation d'une demande de congé pour invalidité temporaire imputable au service, dont elle réclamait, dans ce même courrier, le bénéfice avec un effet rétroactif. En réponse, le maire de la commune de Cuincy lui a adressé le 6 juillet 2020 une copie du formulaire de déclaration de maladie professionnelle complété par Mme B... le 22 juin 2019, en lui rappelant que sa demande d'imputabilité a été rejetée par un arrêté du 18 juin 2020. Mme B... a saisi le tribunal administratif de Lille d'une demande d'annulation de l'arrêté du 18 juin 2020 et du courrier du 6 août 2020, en sollicitant de la juridiction diverses mesures tendant à obtenir une régularisation financière de sa situation en conséquence de la reconnaissance du caractère professionnel de sa maladie. Par un jugement du 8 juin 2023, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Mme B... relève appel de ce jugement et réitère devant la cour l'ensemble de ses conclusions à fin d'annulation et d'injonction. Sur la légalité externe de l'arrêté du 18 juin 2020 : 2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques (...) ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) 6° Refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir (...) ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation (...) doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ". Aux termes de l'article L. 211-6 du même code : " Les dispositions du présent chapitre ne dérogent pas aux textes législatifs interdisant la divulgation (...) de faits couverts par le secret ". Aux termes de l'article L. 311-6 du même code : " Ne sont communicables qu'à l'intéressé les documents administratifs : / 1° Dont la communication porterait atteinte à la protection de la vie privée, au secret médical (...) Les informations à caractère médical sont communiquées à l'intéressé, selon son choix, directement ou par l'intermédiaire d'un médecin qu'il désigne à cet effet, dans le respect des dispositions de l'article L. 1111-7 du code de la santé publique ". Aux termes de l'article 26 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, dont les dispositions ont été reprises depuis à l'article L. 121-6 du code général de la fonction publique : " Les fonctionnaires sont tenus au secret professionnel dans le cadre des règles instituées dans le code pénal (...) ". 3. Il résulte de la combinaison des dispositions législatives précitées que le refus de reconnaître l'imputabilité au service d'un accident ou d'une maladie est au nombre des décisions qui doivent être motivées. Si le respect des règles relatives au secret médical ne peut avoir pour effet d'exonérer l'administration de l'obligation de motiver sa décision, dans des conditions de nature à permettre au juge de l'excès de pouvoir d'exercer son contrôle, elle ne peut divulguer des éléments couverts par le secret médical. 4. L'arrêté contesté vise les dispositions législatives et réglementaires dont elle fait application, notamment la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et le décret du 30 juillet 1987 relatif à l'organisation des comités médicaux, aux conditions d'aptitude physique et au régime de congé maladie des fonctionnaires territoriaux. Après avoir rappelé qu'une maladie qui n'est pas inscrite au tableau des maladies professionnelles doit, pour être reconnue imputable au service, être essentiellement et directement causée par l'exercice des fonctions et être susceptible d'entraîner une incapacité permanente de 25 %, ce même arrêté mentionne qu'aucun taux d'incapacité n'a été fixé dans les rapports d'expertise et que le comportement de Mme B... a entraîné plusieurs conflits au sein de la collectivité. Eu égard au nécessaire respect des règles relatives au secret médical, ces considérations sont suffisamment détaillées pour permettre au juge d'exercer son contrôle sur les motifs de la décision rejetant la demande d'imputabilité présentée par la requérante. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de cette décision doit être écarté. 5. En second lieu, aux termes de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, alors applicable : " I. - Le fonctionnaire en activité a droit à un congé pour invalidité temporaire imputable au service lorsque son incapacité temporaire de travail est consécutive à un accident reconnu imputable au service, à un accident de trajet ou à une maladie contractée en service définis aux II, III et IV du présent article. Ces définitions ne sont pas applicables au régime de réparation de l'incapacité permanente du fonctionnaire. / Le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident. La durée du congé est assimilée à une période de service effectif (...) / IV. - Est présumée imputable au service toute maladie désignée par les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale et contractée dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le fonctionnaire de ses fonctions dans les conditions mentionnées à ce tableau. / Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée par un tableau peut être reconnue imputable au service lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu'elle est directement causée par l'exercice des fonctions. Peut également être reconnue imputable au service une maladie non désignée dans les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu'elle est essentiellement et directement causée par l'exercice des fonctions et qu'elle entraîne une incapacité permanente à un taux déterminé et évalué dans les conditions prévues par décret en Conseil d'Etat (...) ". Aux termes de l'article 37-6 du décret du 30 juillet 1987 pris pour l'application de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif à l'organisation des comités médicaux, aux conditions d'aptitude physique et au régime des congés de maladie des fonctionnaires territoriaux, dans sa version applicable : " La commission de réforme est consultée par l'autorité territoriale : (...) / 3° Lorsque l'affection résulte d'une maladie contractée en service telle que définie au IV de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 précitée dans les cas où les conditions prévues au premier alinéa du même IV ne sont pas remplies ". Aux termes de l'article 37-8 du même décret, dans sa version applicable : " Le taux d'incapacité permanente servant de seuil pour l'application du troisième alinéa du même IV est celui prévu à l'article R. 461-8 du code de la sécurité sociale. / Ce taux correspond à l'incapacité que la maladie est susceptible d'entraîner. Il est déterminé par la commission de réforme compte tenu du barème indicatif d'invalidité annexé au décret pris en application du quatrième alinéa de l'article L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite ". Aux termes de l'article R. 461-8 du code de la sécurité sociale : " Le taux d'incapacité mentionné au septième alinéa de l'article L. 461-1 est fixé à 25 % ". 6. Il n'est pas contesté que le syndrome anxiodépressif dont souffre Mme B... ne relève pas des tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale. Par ailleurs, il résulte des dispositions précitées du IV de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 que la reconnaissance de l'imputabilité au service d'une maladie non désignée dans les tableaux de maladies professionnelles est subordonnée à la réalisation de deux conditions cumulatives, tenant, d'une part, à ce que la pathologie présente un lien essentiel et direct avec l'exercice des fonctions et, d'autre part, à ce qu'elle entraîne une incapacité correspondant à un taux déterminé par la commission de réforme qui doit être au moins égal à 25 %. Il ressort des pièces du dossier que, appelée à se prononcer sur le droit de Mme B... à obtenir un congé pour invalidité temporaire imputable au service dans les conditions prévues par le 3° de l'article 37-6 du décret du 30 juillet 1987, la commission de réforme a émis un avis favorable, estimant ainsi nécessairement que la pathologie de la requérante est essentiellement et directement causée par l'exercice de ses fonctions et est susceptible d'entraîner une incapacité permanente de 25 % au moins. Le maire de la commune de Cuincy s'est prononcé au vu de cet avis, lequel ne présente qu'un caractère consultatif, et n'a donc entaché sa décision d'aucun vice de procédure. Sur la légalité interne de l'arrêté du 18 juin 2020 : 7. Pour l'application des dispositions du troisième alinéa du IV de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983, citées au point 5, une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service. Il appartient au juge d'apprécier si les conditions de travail du fonctionnaire peuvent, même en l'absence de volonté délibérée de nuire à l'agent, être regardées comme étant directement à l'origine de la maladie dont la reconnaissance comme maladie professionnelle est demandée. 8. Mme B... impute son syndrome anxiodépressif, diagnostiqué en mai 2019, aux agissements de harcèlement sexuel et de harcèlement moral dont elle indique être victime. A supposer que ces agissements ne soient pas considérés comme constitutifs de harcèlement, elle soutient qu'ils se trouvent directement à l'origine de sa pathologie. 9. En premier lieu, aux termes de l'article 6 ter de la loi du 13 juillet 1983, alors applicable et dont les dispositions ont été reprises depuis aux articles L. 133-1 et suivants du code général de la fonction publique : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les faits : / a) Soit de harcèlement sexuel, constitué par des propos ou comportements à connotation sexuelle répétés qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante ; / b) Soit assimilés au harcèlement sexuel, consistant en toute forme de pression grave, même non répétée, exercée dans le but réel ou apparent d'obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l'auteur des faits ou au profit d'un tiers. / Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la formation, la notation, la discipline, la promotion, l'affectation et la mutation ne peut être prise à l'égard d'un fonctionnaire en prenant en considération : / 1° Le fait qu'il a subi ou refusé de subir les agissements de harcèlement de toute personne dont le but est d'obtenir des faveurs de nature sexuelle à son profit ou au profit d'un tiers ; / 2° Le fait qu'il a formulé un recours auprès d'un supérieur hiérarchique ou engagé une action en justice visant à faire cesser ces agissements / (...) ". Il résulte de ces dispositions que des propos, ou des comportements à connotation sexuelle, répétés ou même, lorsqu'ils atteignent un certain degré de gravité, non répétés, tenus dans le cadre ou à l'occasion du service, non désirés par celui ou celle qui en est le destinataire et ayant pour objet ou pour effet soit de porter atteinte à sa dignité, soit, notamment lorsqu'ils sont le fait d'un supérieur hiérarchique ou d'une personne qu'elle pense susceptible d'avoir une influence sur ses conditions de travail ou le déroulement de sa carrière, de créer à l'encontre de la victime, une situation intimidante, hostile ou offensante sont constitutifs de harcèlement sexuel et, comme tels, passibles d'une sanction disciplinaire. 10. Mme B... justifie à l'instance avoir reçu depuis le téléphone portable de son chef de service, entre les mois de juillet 2015 et avril 2017, des messages dont les termes ont été repris au point 9 du jugement attaqué et qui constituent des propos à connotation sexuelle répétés tenus dans le cadre du service sans être aucunement désirés par la requérante. Ces messages ont porté atteinte à sa dignité et créé à son encontre une situation intimidante et offensante, de sorte qu'ils constituent des agissements de harcèlement sexuel au sens des dispositions citées au point précédent. Toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que le supérieur hiérarchique de Mme B... aurait réitéré ses propos après avril 2017, alors que la pathologie de la requérante a été constatée pour la première fois le 20 mai 2019, deux ans plus tard. La requérante, qui n'en fait pas état dans sa demande d'imputabilité, a été examinée par deux experts psychiatres le 16 juillet 2019 et le 14 janvier 2020 qui reprennent ses déclarations dans leurs rapports sans mentionner les agissements de harcèlement sexuel dont elle a été victime entre juillet 2015 et avril 2017. Dans ces conditions, la pathologie déclarée en mai 2019 ne peut être regardée comme présentant un lien direct avec ces agissements subis deux ans plus tôt. 11. En second lieu, aux termes de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983, alors applicable : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. / Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la rémunération, la formation, l'appréciation de la valeur professionnelle, la discipline, la promotion, l'affectation et la mutation ne peut être prise à l'égard d'un fonctionnaire en prenant en considération : / 1° Le fait qu'il ait subi ou refusé de subir les agissements de harcèlement moral visés au premier alinéa ; / 2° Le fait qu'il ait exercé un recours auprès d'un supérieur hiérarchique ou engagé une action en justice visant à faire cesser ces agissements ; / 3° Ou bien le fait qu'il ait témoigné de tels agissements ou qu'il les ait relatés. / Est passible d'une sanction disciplinaire tout agent ayant procédé ou ayant enjoint de procéder aux agissements définis ci-dessus ". Il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement. Il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile. Pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'agent auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral. 12. Mme B... reproche à la commune de Cuincy l'absence d'entretien d'évaluation et de notation depuis 2008, le rejet de ses demandes de formation et le refus de la nommer dans un corps de catégorie supérieure. Si aucun entretien professionnel n'a été organisé entre 2008 et 2019, en méconnaissance des dispositions applicables en la matière aux fonctionnaires territoriaux, il n'est pas contesté que l'ensemble des agents municipaux se sont trouvés dans la même situation. Il n'est pas établi que l'absence fautive d'entretien professionnel a eu des répercussions sur l'évolution de la carrière de Mme B... qui, recrutée comme agent territorial d'animation de 2ème classe en 2007, a ensuite été promue au grade d'agent d'animation principal, ou sur son régime indemnitaire. Si l'administration n'a pas donné de suite favorable à sa demande de formation, présentée à plusieurs reprises, en vue de l'obtention du diplôme d'Etat professionnel jeunesse, éducation populaire et sport, il ne ressort pas des pièces du dossier et il n'est pas allégué que cette formation, d'un coût de 7 500 euros, constituerait un droit pour les agents. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que la formation litigieuse aurait répondu aux besoins de la commune de Cuincy. La circonstance que, en dépit de ses demandes, Mme B... n'a pas été nommée dans le corps de catégorie B des animateurs ne révèle pas de situation discriminatoire à son endroit, alors que le service était constitué d'agents de catégorie C à l'exception du chef de service et du responsable du service scolaire, lorsque la requérante a été placée en congé de maladie. Si deux collègues de Mme B... ont été nommées dans des emplois d'animateur à la fin de l'année 2020, il ressort du compte-rendu du comité technique du 15 décembre 2020 que ces nominations sont justifiées par une réorganisation des services. 13. Mme B... soutient faire l'objet d'un harcèlement moral de la part de son chef de service et de plusieurs agents municipaux, qui se sont ligués contre elle et ont provoqué une dégradation de ses conditions de travail ayant conduit à son arrêt pour maladie. Elle produit plusieurs attestations faisant état des absences répétées et de la désinvolture du chef de service, ainsi que de son comportement hautain et méprisant, notamment à l'égard du personnel féminin, et plusieurs messages de son supérieur hiérarchique la rappelant à l'ordre dans des termes peu aimables. Pour justifier de ses qualités professionnelles, la requérante, qui indique n'avoir jamais fait l'objet de recadrages ou de sanctions disciplinaires, produit de nombreuses attestations émanant de parents d'élèves louant son professionnalisme et d'anciens collègues décrivant la requérante comme très investie dans ses missions, ainsi qu'un rapport d'inspection établi en juin 2015 attestant de ses capacités, de la pertinence et de l'aspect novateur de sa pratique. Toutefois, la commune de Cuincy produit en défense de nombreuses attestations établies par la plupart de ses collègues du service éducation-jeunesse qui dénoncent son caractère directif, sa tendance à se positionner au-delà de ce qu'exige son niveau de responsabilité, son habitude à critiquer ouvertement et à plusieurs reprises les conditions dans lesquelles sont accomplies les missions du service, et son comportement incorrect à l'égard de ses collègues, qui font état de propos désobligeants, dévalorisants ou calomnieux, certaines attestations témoignant de son plaisir " à menacer, à rabaisser, à manipuler ". Le comportement de Mme B... dans l'exercice de ses fonctions a encore été relevé dans le cadre d'un partenariat intercommunal, au cours duquel sa posture considérée comme inadaptée et agressive a conduit à des récriminations de la part de la commune partenaire, quel que soit par ailleurs le bien fondé des critiques formulées par la requérante. Il ressort par ailleurs des pièces du dossier que Mme B... s'est à plusieurs reprises adressée à l'ensemble du service au moyen de la messagerie électronique, sans avoir consulté au préalable son supérieur hiérarchique, conduisant celui-ci à lui reprocher de façon récurrente de ne pas respecter la hiérarchie. Les collègues de Mme B... font état de ses demandes contradictoires ou peu explicites, de ses retards et de son habitude de mettre en cause ses collègues, qui perturbent l'activité du service et sont à l'origine d'une détérioration de l'ambiance professionnelle. Ce comportement a pu avoir des effets néfastes sur la santé et l'environnement de travail de ses collègues, certains témoignages indiquant qu'elle entretient une relation toxique au sein du service. Les menaces de mort dont Mme B... soutient avoir été l'objet de la part d'une des agentes du service en mai 2018 sont vivement contestées par la collègue ainsi mise en cause. Les témoignages établis par des tiers revêtent une faible valeur probante dès lors que les menaces alléguées ont été tenues au téléphone, entre Mme B... et sa collègue. Le courriel envoyé par la requérante et la déclaration de main courante du 15 décembre 2018, qui ne mentionnent pas de menaces de mort, révèlent seulement une altercation survenue entre les deux protagonistes dans le cadre professionnel fortement dégradé tel qu'il a été décrit plus haut. Les insultes reçues par Mme B... de la part d'une autre collègue du service, d'ailleurs reconnues par celle-ci excédée par le comportement de la requérante, sont révélatrices de cette ambiance délétère et non d'une volonté de la harceler. 14. Enfin, la requérante soutient avoir été mise à l'écart du service pour ne pas avoir été consultée sur certaines problématiques qu'elle avait l'habitude de prendre en charge. Toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que ses fonctions nécessitaient qu'elle participe aux réunions portant sur les sujets dont elle indique avoir été écartée. 15. Il résulte de ce qui précède, eu égard au comportement de Mme B... dans le cadre professionnel, que les faits qu'elle impute à son employeur ne font pas présumer des agissements constitutifs de harcèlement moral ou sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement moral. 16. En troisième lieu, dans leurs rapports des 17 novembre 2019 et 17 février 2020, les deux experts psychiatres relatent les faits rapportés par Mme B..., diagnostiquent son syndrome anxiodépressif et, après avoir relevé l'absence de tout antécédent sur ce point, en déduisent que la pathologie de la requérante présente un lien direct avec le service. Toutefois, il résulte de ce qui a été dit précédemment que cette pathologie est survenue dans un climat professionnel très conflictuel dont la requérante, par son comportement, est à l'origine. Il en résulte, alors même qu'elle ne présente aucun antécédent, que le syndrome anxiodépressif dont souffre Mme B... résulte d'un fait personnel conduisant à détacher la survenance de la maladie du service au sens des dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983. 17. En dernier lieu, il n'est pas contesté que, pour refuser de reconnaître l'imputabilité au service de la maladie de la requérante, le maire de la commune de Cuincy s'est fondé, d'une part, sur l'absence de taux d'incapacité permanente déterminé par les experts médicaux et la commission de réforme, et, d'autre part, sur les importantes difficultés comportementales de la requérante à l'origine de la dégradation des conditions de travail dont elle se plaint. Si Mme B... conteste le premier motif de refus au motif que le maire ne pouvait légalement fonder la décision contestée sur l'absence de taux d'incapacité permanente, il ressort des pièces du dossier que, retenant seulement l'autre motif, il aurait pris la même décision à son égard. Dès lors, le moyen tiré du caractère illégal du motif relatif à l'absence de taux d'incapacité ne peut qu'être écarté. 18. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Par suite, ses conclusions présentées à fin d'injonction ne peuvent qu'être rejetées. Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 19. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Cuincy, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme dont Mme B... demande le versement au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme B... la somme dont la commune demande le versement sur le fondement des mêmes dispositions. DÉCIDE : Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée. Article 2 : Les conclusions de la commune de Cuincy présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et à la commune de Cuincy. Délibéré après l'audience publique du 1er octobre 2024, à laquelle siégeaient : - Mme Marie-Pierre Viard, présidente de chambre, - M. Jean-Marc Guérin-Lebacq, président-assesseur, - M. Frédéric Malfoy, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 octobre 2024. Le président-rapporteur, Signé : J.-M. Guérin-LebacqLa présidente de chambre, Signé : M.-P. Viard La greffière, Signé : C. Huls-Carlier La République mande et ordonne au préfet du Nord en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme, Pour la greffière en chef, Par délégation, La greffière C. Huls-Carlier 2 N° 23DA01615
Cours administrative d'appel
Douai
CAA de TOULOUSE, 2ème chambre, 22/10/2024, 22TL22012, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédures contentieuses antérieures : M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse : - sous le n° 1926953, d'ordonner, avant dire-droit, une expertise médicale, d'annuler l'arrêté du 7 octobre 2019 par lequel le maire de Millau a refusé de reconnaître 1'imputabilité au service de l'accident dont il a été victime le 1er avril 2019 et l'a placé, à compter de cette date, en congé de maladie ordinaire et de mettre à la charge de la commune de Millau la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les dépens de l'instance ; - sous le n° 2024565, d'ordonner, avant dire-droit, une expertise médicale, d'annuler l'arrêté du 16 juillet 2020 par lequel le maire de Millau l'a placé en disponibilité d'office pour raisons de santé avec octroi d'un demi-traitement du 1er avril au 30 septembre 2020 et de mettre à la charge de la commune de Millau la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; - sous le n° 2120253, d'ordonner, avant dire-droit, une expertise médicale, d'annuler l'arrêté du 7 décembre 2020 par lequel le maire de Millau l'a maintenu en disponibilité d'office pour raisons de santé avec octroi d'un demi-traitement du 1er octobre 2020 au 31 mars 2021 et de mettre à la charge de la commune de Millau la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; - sous le n° 2125826, d'ordonner, avant dire-droit, une expertise médicale, d'annuler l'arrêté du 10 mai 2021 par lequel le maire de Millau l'a maintenu en disponibilité d'office pour raisons de santé avec octroi d'un demi-traitement du 1er avril au 30 septembre 2021 et de mettre à la charge de la commune de Millau la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; - et sous le n° 2220467, d'ordonner, avant dire-droit, une expertise médicale, d'annuler l'arrêté du 19 novembre 2021 par lequel le maire de Millau l'a maintenu en disponibilité d'office pour raisons de santé avec octroi d'un demi-traitement du 1er octobre 2021 au 31 mars 2022 et de mettre à la charge de la commune de Millau la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n°s 1926953, 2024565, 2120253, 2125826 et 2220467 du 18 juillet 2022, le tribunal administratif de Nîmes, auquel ces cinq requêtes avaient été attribuées, a annulé les arrêtés du maire de Millau des 7 octobre 2019, 16 juillet 2020, 7 décembre 2020, 10 mai 2021 et 19 novembre 2021, a mis à la charge de la commune de Millau le versement de la somme de 3 000 euros à M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus des conclusions des parties. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 23 septembre 2022, et des mémoires enregistrés le 10 février 2023 et le 19 juillet 2024, ce dernier n'ayant pas été communiqué, la commune de Millau, représentée par la SCP Bouyssou et associés agissant par Me Lecarpentier, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nîmes du 18 juillet 2022, en tant qu'il a fait droit aux conclusions de la demande de M. B... ; 2°) de rejeter les conclusions à fin d'annulation des demandes de M. B... ; 3°) de mettre à la charge de M. B... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - c'est à tort que le tribunal a jugé que l'accident survenu le 1er avril 2019 était imputable au service ; les conditions d'exercice de son activité professionnelle n'ont aucun lien avec le malaise vagal dont il a été victime ; M. B... prenait un traitement médicamenteux et n'a pas suivi les recommandations de ses collègues de ne pas prendre son service et d'aller voir un médecin, ce qui constitue un fait personnel de nature à détacher l'accident du service ; - M. B... est tombé sur le flanc gauche, de sorte que sa blessure à l'épaule droite est seulement due au coup de poing qu'il a donné dans la vitrine d'un magasin après s'être relevé de sa chute ; ce comportement violent constitue également un fait personnel de nature à détacher l'accident du service ; - les décisions litigieuses sont suffisamment motivées ; - une expertise serait superfétatoire. Par deux mémoires en défense, enregistrés le 17 janvier 2023 et le 24 juin 2023, M. B..., représenté par Me Slupowski, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la commune de Millau une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il fait valoir que : - le malaise dont il a été victime le 1er avril 2019 est intervenu pendant son service, de sorte que cet accident est présumé imputable au service ; - le traitement médicamenteux qu'il prenait au jour de l'accident et son comportement, qui n'est pas établi, ne sont pas de nature à détacher l'accident du service ; - l'arrêté du maire de Millau du 7 octobre 2019 est entaché d'une erreur de fait en ce qu'il retient à tort que son accident n'est pas imputable au service ; - cet arrêté est insuffisamment motivé ; - les autres arrêtés contestés ne peuvent qu'être annulés par voie de conséquence de l'annulation de l'arrêté du 7 octobre 2019. Par une ordonnance du 25 juin 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 19 juillet 2024. La demande d'exécution du jugement du tribunal administratif de Nîmes du 18 juillet 2022 présentée par M. B... le 16 décembre 2022 a fait l'objet d'un classement administratif le 22 mars 2024. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des relations entre le public et l'administration ; - la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n°84-53 du 26 janvier 1984 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Hélène Bentolila, conseillère, - les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique, - et les observations de Me Lecarpentier, représentant la commune de Millau et de Me Slupowski, représentant M. B.... Une note en délibéré présentée pour M. B... a été enregistrée le 12 octobre 2024. Considérant ce qui suit : 1. M. B..., adjoint technique territorial titulaire, exerçait les fonctions d'agent de surveillance de la voie publique au sein du service de la police municipale de la commune de Millau (Aveyron). Le 1er avril 2019, alors qu'il était en service, il a subi un malaise lipothymique avec perte de connaissance incomplète, qui l'a fait chuter, lui occasionnant des douleurs et des contusions au niveau de l'épaule droite et du genou et de la cheville gauches. Par un arrêté du 7 octobre 2019, le maire de Millau, suivant l'avis de la commission départementale de réforme du 26 septembre 2019, a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident du 1er avril 2019 et a placé l'agent, à compter de cette date, en congé de maladie ordinaire. Par quatre arrêtés successifs des 16 juillet 2020, 7 décembre 2020, 10 mai 2021 et 19 novembre 2021, le maire de Millau l'a ensuite placé puis maintenu en disponibilité d'office pour raisons de santé du fait de l'épuisement de ses droits à congés maladie ordinaire, avec octroi d'un demi-traitement, pour la période comprise entre le 1er avril 2020 et le 31 mars 2022. Par un jugement nos 1926953, 2024565, 2120253, 2125826, 2220467 du 18 juillet 2022, le tribunal administratif de Nîmes a annulé ces arrêtés des 7 octobre 2019, 16 juillet 2020, 7 décembre 2020, 10 mai 2021 et 19 novembre 2021, a mis à la charge de la commune de Millau une somme de 3 000 euros à verser à M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus des conclusions des parties. La commune de Millau relève appel de ce jugement en tant qu'il a annulé ces arrêtés et a mis à sa charge la somme de 3 000 euros à verser à M. B.... Sur le moyen d'annulation retenu par le tribunal administratif : 2. Aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, alors en vigueur : " Le fonctionnaire en activité a droit : / (...) / 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. (...) / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident, même après la date de radiation des cadres pour mise à la retraite. / (...) ". Aux termes du II de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, alors en vigueur : " Est présumé imputable au service tout accident survenu à un fonctionnaire, quelle qu'en soit la cause, dans le temps et le lieu du service, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le fonctionnaire de ses fonctions ou d'une activité qui en constitue le prolongement normal, en l'absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant l'accident du service. ". 3. Un accident survenu sur le lieu et dans le temps du service, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par un fonctionnaire de ses fonctions ou d'une activité qui en constitue le prolongement normal présente, en l'absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant cet évènement du service, le caractère d'un accident de service. Il appartient dans tous les cas au juge administratif, saisi d'une décision de l'autorité administrative compétente refusant de reconnaître l'imputabilité au service d'un tel événement, de se prononcer au vu des circonstances de l'espèce. 4. En l'espèce, le malaise lipothymique dont a été victime M. B... est survenu le 1er avril 2019 dans l'après-midi, alors qu'il était en patrouille sur la voie publique, de sorte que celui-ci est survenu sur le lieu et dans le temps du service. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que lors de sa prise de service, M. B... a indiqué à ses collègues ne pas se sentir bien, à tel point que ces derniers lui ont conseillé d'aller voir un médecin pour, le cas échéant, bénéficier d'un arrêt de travail. Il ressort des pièces du dossier, notamment des témoignages de collègues et des rapports établis par l'administration sur les circonstances de l'incident, qu'après avoir repris totalement connaissance, il a indiqué prendre plusieurs médicaments, dont de la morphine à raison de trois prises quotidiennes. Enfin, il n'est pas établi ni même allégué par M. B..., tant en première instance qu'en appel, que ce malaise trouverait son origine dans les conditions d'exercice de ses fonctions, que ce soit au jour de l'accident ou de manière plus générale. Dans ces conditions, le malaise dont a été victime M. B... le 1er avril 2019 ne saurait être regardé comme imputable au service. Dès lors, c'est à tort que les premiers juges ont retenu qu'en refusant de reconnaître cet évènement comme imputable au service, le maire de la commune de Millau avait entaché l'arrêté du 7 octobre 2019 d'une erreur d'appréciation. 5. Il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal s'est fondé sur ce motif pour annuler l'arrêté du 7 octobre 2019 par lequel le maire de la commune de Millau a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident dont M. B... a été victime le 1er avril 2019 ainsi que, par voie de conséquence, les arrêtés des 16 juillet 2020, 7 décembre 2020, 10 mai 2021 et 19 novembre 2021 le plaçant puis le maintenant en disponibilité d'office pour raisons de santé du fait de l'épuisement de ses droits à congés de maladie ordinaire. 6. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. B... tant en première instance qu'en appel. Sur les autres moyens invoqués par M. B... : 7. Aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration :" Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police ; / 2° Infligent une sanction ; / 3° Subordonnent l'octroi d'une autorisation à des conditions restrictives ou imposent des sujétions ; / 4° Retirent ou abrogent une décision créatrice de droits ; / 5° Opposent une prescription, une forclusion ou une déchéance ; / 6° Refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir ; / 7° Refusent une autorisation, sauf lorsque la communication des motifs pourrait être de nature à porter atteinte à l'un des secrets ou intérêts protégés par les dispositions du a au f du 2° de l'article L. 311-5 ; / 8° Rejettent un recours administratif dont la présentation est obligatoire préalablement à tout recours contentieux en application d'une disposition législative ou réglementaire ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ". 8. D'une part, l'arrêté du 7 octobre 2019 refusant de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident du 1er avril 2019 vise les textes dont il fait application ainsi que l'avis défavorable de la commission de réforme du 26 septembre 2019, l'enquête administrative du 3 avril 2019, les expertises médicales des 31 mai et 30 juillet 2019 et l'arrêté du 1er juillet 2019 plaçant M. B... en congé pour invalidité temporaire imputable au service dans l'attente de l'avis de la commission de réforme. Dès lors, cet arrêté comporte l'ensemble des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, de sorte que le moyen tiré de son insuffisante motivation doit être écarté. 9. D'autre part, les décisions plaçant d'office un fonctionnaire en disponibilité en raison de l'expiration de ses droits statutaires à congé de maladie ne relèvent d'aucune des catégories de décisions qui doivent être motivées en application des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration. M. B... ne peut donc utilement soutenir que les arrêtés des 16 juillet 2020, 7 décembre 2020, 10 mai 2021 et 19 novembre 2021 par lesquels le maire de Millau l'a placé puis maintenu en disponibilité d'office pour raisons de santé en raison de l'épuisement de ses droits à congé de maladie ordinaire seraient insuffisamment motivés. 10. Enfin, les moyens invoqués par M. B... selon lesquels l'ensemble des arrêtés attaqués seraient entachés d'erreur de fait en ce que l'accident survenu le 1er avril 2019 serait imputable au service se rapportent en réalité à l'appréciation portée par le maire sur l'imputabilité au service de cet évènement et doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 4 du présent arrêt. 11. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de faire droit à la demande d'expertise sollicitée par M. B... en première instance, que la commune de Millau est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a, aux articles 1er et 2 dudit jugement, annulé les arrêtés des 7 octobre 2019, 16 juillet 2020, 7 décembre 2020, 10 mai 2021 et 19 novembre 2021 et a mis à sa charge la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Sur les frais liés au litige : 12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Millau, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par M. B.... 13. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... une somme au titre des frais exposés par la commune de Millau et non compris dans les dépens. D E C I D E : Article 1er : Les articles 1er et 2 du jugement n°s 1926953, 2024565, 2120253, 2125826, 2220467 du tribunal administratif de Nîmes en date du 18 juillet 2022 sont annulés. Article 2 : Les demandes présentées par M. B... devant le tribunal administratif de Nîmes sont rejetées. Article 3 : Les conclusions présentées par la commune de Millau et par M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Millau et à M. A... B.... Délibéré après l'audience du 8 octobre 2024, à laquelle siégeaient : Mme Geslan-Demaret, présidente, Mme Teuly-Desportes, présidente-assesseure, Mme Bentolila, conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 octobre 2024. La rapporteure, H. Bentolila La présidente, A. Geslan-Demaret La greffière, M-M. Maillat La République mande et ordonne au préfet de l'Aveyron en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. N° 22TL22012 2
Cours administrative d'appel
Toulouse
CAA de TOULOUSE, 2ème chambre, 22/10/2024, 22TL00576, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B..., a demandé au tribunal administratif de Nîmes de condamner le département du Gard à lui verser la somme de 10 371 euros au titre du remboursement des dépenses directement entraînées par sa maladie professionnelle, de condamner le département du Gard à lui verser la somme de 75 000 euros au titre des souffrances physiques, des souffrances morales et du préjudice d'agrément qu'il a subis du fait de sa maladie professionnelle, de condamner solidairement le département du Gard et l'Etat à lui verser la somme de 30 000 euros au titre du préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence résultant des fautes commises dans le cadre de la procédure de reconnaissance de sa maladie professionnelle, de condamner solidairement ces mêmes personnes publiques à lui verser la somme de 6 290 euros au titre du préjudice fiscal résultant des fautes commises dans le cadre de la procédure de reconnaissance de sa maladie professionnelle, de les condamner à lui verser la somme de 30 000 euros au titre du préjudice moral et de ses troubles dans les conditions d'existence résultant des fautes commises dans le cadre de la procédure de mise en retraite pour invalidité imputable au service et de mettre à la charge solidaire du département du Gard et de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n°1903196 du 16 décembre 2021, le tribunal administratif de Nîmes a condamné le département du Gard à verser à M. B... la somme de 15 972 euros, a condamné l'Etat à verser à ce dernier la somme de 1 500 euros, a mis à la charge respective du département du Gard et de l'Etat la somme de 1 000 euros à verser à M. B... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus de la demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 16 février 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille sous le n° 22MA00576, puis le 1er mars 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n° 22TL00576 et des mémoires, enregistrés le 17 novembre 2022, le 27 octobre 2023 et les 8 mars et 14 juin 2024, M. A... B..., représenté par Me Krief, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures : 1°) d'annuler le jugement n° 1903196 du 16 décembre 2021 du tribunal administratif de Nîmes en tant qu'il a limité, d'une part, la condamnation du département du Gard au versement d'une indemnité de 15 972 euros et, d'autre part, la condamnation de l'Etat au versement d'une indemnité de 1 500 euros ; 2°) de condamner le département du Gard à lui verser une somme de 179 932 euros en réparation des préjudices résultant de sa maladie professionnelle ; 3°) de condamner solidairement le département du Gard et l'Etat à lui verser une somme de 36 290 euros en réparation des fautes commises dans la procédure de reconnaissance de sa maladie professionnelle ; 4°) de condamner l'Etat à lui verser à la somme de 30 000 euros en réparation des fautes commises dans la procédure de mise à la retraite pour invalidité imputable au service ; 5°) de mettre à la charge solidaire du département du Gard et de l'Etat la somme de 3 000 en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : Sur la régularité du jugement : - le jugement est affecté d'une erreur de droit et de dénaturation des pièces du dossier au regard du montant des préjudices retenus ; Sur la responsabilité : - la responsabilité du département du Gard au titre de la maladie professionnelle dont il est atteint mais également au titre des fautes commises au cours de la procédure de reconnaissance de sa maladie professionnelle sera confirmée ; - la responsabilité de l'Etat pour faute dans le cadre de la reconnaissance de la maladie professionnelle devra être retenue ; Sur les préjudices : - il n'entend pas contester les sommes de 7 632,30 euros et de 1 339,70 euros qui ont été fixées par le tribunal respectivement au titre du remboursement des dépenses dues à la maladie professionnelle et des préjudices matériels en résultant ; - le poste des souffrances physiques et morales endurées, qui n'ont pas été décrites de manière complète et précise, est sous-évalué et doit être déterminé à hauteur d'un montant total de 90 000 euros, dont une somme de 60 000 euros au titre des seules souffrances physiques ; - le préjudice d'agrément, retenu à hauteur de 500 euros, devra être porté à la somme de 15 000 euros ; - il est en droit de solliciter un préjudice moral distinct d'un montant de 30 000 euros à la charge solidaire du département du Gard et de l'Etat au titre de l'acharnement administratif dont il a été victime ; - les deux collectivités publiques seront également condamnées à réparer le préjudice fiscal qu'il a subi à hauteur de la somme de 6 290 euros ; - le préjudice de 1 500 euros lié à l'inertie de la commission de réforme dans la procédure liée à sa mise à la retraite pour invalidité imputable au service a été sous-évalué en première instance et sera porté à la somme de 30 000 euros. Par des mémoires en défense, enregistrés le 6 septembre 2022 et 10 octobre 2023, le département du Gard, représenté par Me Pouillaude, conclut au rejet de la requête et demande, par la voie de l'appel incident, de réduire la somme allouée à M. B... par le tribunal au titre du remboursement des dépenses dues à sa maladie professionnelle, ainsi que l'indemnité allouée au titre des souffrances physiques endurées, et de mettre à la charge de M. B... la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il fait valoir que : - il n'entend pas contester les montants auxquels il a été condamné respectivement au titre des souffrances morales, du préjudice d'agrément, des préjudices à caractère patrimonial, du préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence ; - l'indemnisation complémentaire sollicitée par l'appelant au titre des souffrances physiques est fondée sur une expertise médicale non contradictoire et ne peut être allouée ; - le montant de 7 632,30 euros au titre du remboursement des dépenses dues à la maladie professionnelle sera infirmé dans la mesure où ce préjudice n'est nullement justifié ; - au regard de l'absence de lien direct et certain avec la maladie professionnelle, c'est à tort que le tribunal a mis à sa charge la somme de 836,30 euros au titre des frais liés à l'hospitalisation de l'agent, à la consultation d'un chirurgien et à sa rééducation ; - l'indemnité de 3 500 euros retenue au titre des souffrances physiques et allouée par le tribunal sera ramenée à de plus justes proportions. La requête et la procédure ont été transmises au ministre des solidarités et de la santé qui n'a pas présenté d'observations en défense. Par une ordonnance du 13 mars 2024, la date de clôture d'instruction de l'affaire a été fixée au 11 avril 2024. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Delphine Teuly-Desportes, présidente-assesseure, - les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique, - les observations de Me Krief, représentant M. B..., - et les observations de Me Roux, représentant le département du Gard. Considérant ce qui suit : 1. M. B..., adjoint technique principal de deuxième classe au sein des services du département du Gard, a subi le 18 juin 2008 un traumatisme à l'épaule gauche dû à une chute dans le cadre du service. Par une décision du 30 septembre 2008, le président du conseil départemental du Gard a reconnu cet accident imputable au service. Le 31 mai 2010, l'intéressé a ressenti de nouveau une vive douleur à l'épaule droite à l'occasion d'une chute à son domicile. Le 25mars 2011, il a initié une procédure tendant à la reconnaissance de sa maladie professionnelle au terme de laquelle, postérieurement à des ordonnances rendues les 18 janvier et 27 mars 2012 par le juge des référés du tribunal administratif de Nîmes, le président du conseil départemental a, par une décision du 6 février 2013, reconnu l'origine professionnelle de sa maladie, sans limitation des séquelles. Le 26 février 2013, M. B... a sollicité son admission à la retraite pour invalidité imputable au service, demande qui a été acceptée le 17 novembre 2015 avec effet rétroactif à compter du 1er août 2015. Après avoir présenté, le 27 mai 2019, respectivement auprès du département du Gard et du préfet du Gard, une réclamation indemnitaire préalable, qui a été implicitement rejetée, M. B... a demandé au tribunal administratif de Nîmes de condamner le département du Gard à lui verser les sommes de 10 371 euros et 75 000 euros au titre, respectivement, des dépenses directement entraînées par sa maladie professionnelle et des préjudices physiques, moraux et d'agrément résultant de cette maladie, de condamner solidairement le département du Gard et l'Etat à l'indemniser à hauteur de 36 290 euros et de 30 000 euros au titre des fautes commises par le département du Gard et l'Etat dans le cadre, respectivement, de la procédure de reconnaissance de sa maladie professionnelle et de la procédure de mise à la retraite pour invalidité imputable au service. Par un jugement du 16 décembre 2021, le tribunal administratif de Nîmes a condamné le département du Gard à verser à M. B... la somme de 15 972 euros et l'Etat à lui verser la somme de 1 500 euros en réparations des préjudices qu'il a subis et a rejeté le surplus de ses conclusions indemnitaires. M. B... relève appel de ce jugement en tant qu'il a limité le montant de ces indemnisations à ces deux sommes, et demande la condamnation du département du Gard à lui verser la somme totale de 179 932 euros, la condamnation solidaire du département du Gard et de l'Etat à lui verser la somme de 36 290 euros, ainsi que la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 30 000 euros en réparation des préjudices subis. Par la voie de l'appel incident, le département du Gard demande la réformation du jugement et la réduction ou le rejet des demandes de M. B.... Sur la régularité du jugement attaqué : 2. Hormis dans le cas où le juge de première instance a méconnu les règles de compétence, de procédure ou de forme qui s'imposaient à lui et a ainsi entaché son jugement d'une irrégularité, il appartient au juge d'appel, non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels le juge de première instance s'est prononcé sur les moyens qui lui étaient soumis, mais de se prononcer directement sur les moyens dirigés contre la décision administrative contestée, dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. 3. D'une part, si M. B... soutient que le jugement attaqué est entaché d'une erreur de droit, ce moyen, qui relève du bien-fondé du jugement, est sans incidence sur sa régularité. D'autre part, s'il invoque également une dénaturation des faits et des pièces du dossier, ces moyens ne relèvent pas de l'office du juge d'appel mais de celui du juge de cassation. Par suite, ces moyens ne peuvent qu'être écartés. Sur l'appel principal : En ce qui concerne la responsabilité sans faute du département du Gard : 4. Les dispositions des articles L. 27 et L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite déterminent forfaitairement la réparation à laquelle un fonctionnaire victime d'un accident de service ou atteint d'une maladie professionnelle peut prétendre, au titre de l'atteinte qu'il a subie dans son intégrité physique, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions. Ces dispositions ne font cependant pas obstacle à ce que le fonctionnaire qui a enduré, du fait de l'accident ou de la maladie, des souffrances physiques ou morales et des préjudices esthétiques ou d'agrément, obtienne de la collectivité qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice, distincts de l'atteinte à l'intégrité physique. Elles ne font pas non plus obstacle à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre la collectivité, dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette collectivité ou à l'état d'un ouvrage public dont l'entretien incombait à celle-ci. 5. En application des principes énoncés au point précédent, le tribunal administratif de Nîmes a alloué une indemnité complémentaire pour réparer les préjudices matériels et personnels subis par M. B.... Ce dernier ne conteste que, d'une part, le montant retenu au titre des souffrances physiques et morales endurées et, d'autre part, celui retenu pour le préjudice d'agrément. 6. Il résulte de l'instruction que M. B... est atteint d'une périarthrite scapulo-humérale bilatérale reconnue comme maladie professionnelle, le 6 février 2013, avec persistance des douleurs au niveau des épaules, malgré l'amélioration de sa symptomatologie par l'effet des infiltrations et des séances de kinésithérapie. En outre, il a également développé un syndrome anxieux et dépressif en lien direct et certain avec sa maladie professionnelle. Le préjudice subi au titre des souffrances physiques et morales peut être évalué à la somme totale de 5 000 euros. Par suite, en allouant cette somme à M. B..., le tribunal n'a pas procédé à une inexacte évaluation de ce poste de préjudice. La circonstance que la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales a, par une décision en date du 13 novembre 2015, retenu un taux global d'invalidité définitive imputable au service de 58,15 % est par elle-même sans incidence sur l'appréciation de ce chef de préjudice alors que M. B... n'a jamais sollicité l'indemnisation d'un déficit fonctionnel temporaire ni permanent ni par là même de troubles dans ses conditions d'existence. 7. Le préjudice d'agrément subi par M. B..., qui est dans l'impossibilité de pratiquer régulièrement la moto ou des activités de loisirs comme le jardinage, est établi par les documents médicaux et les témoignages de proches versés aux débats en première instance. Il peut être évalué à la juste somme de 1 500 euros. 8. Compte tenu de ce qui a été dit aux points 5 à 7, l'appelant est fondé à demander que l'indemnité à laquelle le département du Gard a été condamné par les premiers juges en réparation des préjudices personnels en lien avec sa maladie professionnelle soit portée de la somme de 5 500 euros à celle de 6 500 euros. En ce qui concerne la responsabilité pour faute du département du Gard dans le cadre de la procédure de reconnaissance de sa maladie professionnelle : 9. Eu égard à l'illégalité des refus de reconnaissance de la maladie professionnelle opposés à M. B..., la responsabilité du département du Gard dans la procédure de reconnaissance de la maladie professionnelle de la maladie professionnelle a été retenue et n'est pas contestée. 10. D'une part, M. B... a subi des troubles de toute nature dans ses conditions d'existence et notamment des troubles psychologiques résultant des multiples démarches juridictionnelles et administratives qu'il a dû engager pour que l'origine professionnelle de sa maladie soit reconnue, alors que son employeur lui a opposé à quatre reprises, sur une période de l'ordre d'une année, des refus illégaux de reconnaissance de sa pathologie. Le tribunal administratif de Nîmes n'a pas fait une appréciation insuffisante de ce poste de préjudice en l'évaluant à la somme de 1 500 euros sans que le requérant soit fondé à invoquer un préjudice moral distinct lié à ce qu'il qualifie " d'acharnement administratif ". 11. D'autre part, le préjudice fiscal tiré de ce que l'appelant aurait subi un surcroît d'impôt sur le revenu du fait de la perception d'indemnités en une seule fois en lieu et place de l'étalement de leur versement n'est pas établi et n'a donc pas à être indemnisé. En ce qui concerne la responsabilité pour faute de l'Etat dans le cadre de la procédure de reconnaissance de sa maladie professionnelle : 12. La commission de réforme, ainsi qu'il a été dit au point 17 du jugement attaqué, est en matière de reconnaissance d'une maladie professionnelle, une instance consultative, dont les avis simples ne lient pas l'autorité compétente. Par suite, ainsi que l'ont retenu à bon droit les premiers juges, le requérant n'est pas fondé à rechercher la responsabilité de l'Etat au titre des avis défavorables rendus par cette commission dans le cadre de la procédure de reconnaissance de l'imputabilité au service de son affection. En ce qui concerne la responsabilité pour faute de l'Etat dans le cadre de la procédure de mise à la retraite pour invalidité imputable au service : 13. La responsabilité pour faute de l'Etat dans le cadre de la procédure de mise à la retraite de M. B... pour invalidité imputable au service a été reconnue et n'est pas contestée. 14. Il est établi que la carence fautive de la commission de réforme, qui disposait des expertises et documents médicaux depuis le mois de mai 2013, mais n'a rendu un avis sur la mise à la retraite de M. B... pour invalidité imputable au service, que le 8 décembre 2014, après avoir été relancée à quatre reprises par le département du Gard, a induit des troubles temporaires dans les conditions de l'existence de l'intéressé incluant, sur cette même période, des troubles psychologiques ayant nécessité un suivi par un médecin psychiatre. Le préjudice ainsi subi évalué à un montant de 1 500 euros doit être porté à 2 500 euros. Sur l'appel incident : 15. D'une part, les dispositions de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 comportent, pour les fonctionnaires territoriaux, le droit au remboursement non seulement des honoraires médicaux mais encore de l'ensemble des frais réels par eux exposés et directement entraînés par une maladie reconnue imputable au service. Il appartient aux intéressés de justifier tant du montant de ces frais que du caractère d'utilité directe que ceux-ci ont présenté pour parer aux conséquences de la maladie dont ils souffrent. 16. Contrairement à ce que soutient le département du Gard, les dépenses liées aux déplacements effectués par M. B... pour ses soins médicaux et paramédicaux sont justifiées, l'appelant ayant produit la liste de l'ensemble des déplacements effectués de 2010 à 2017 pour se rendre aux différentes consultations chirurgicales, médicales et aux séances de kinésithérapie, ainsi que la carte grise de son véhicule. Dans ces conditions, le département du Gard n'est pas fondé à soutenir que ce poste de préjudice n'aurait pas dû donner lieu à indemnisation. 17. D'autre part, ainsi qu'il a été dit au point 6, le préjudice subi au titre des souffrances physiques n'a pas fait l'objet d'une évaluation insuffisante. Ce montant de poste de préjudice, contrairement à ce qui est soutenu par le département du Gard, n'apparaît pas davantage comme relevant d'une évaluation excessive. 18. En conséquence, les conclusions d'appel incident présentées par le département du Gard, doivent être rejetées. 19. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... est seulement fondé à demander, d'une part, que la somme totale que le tribunal lui a allouée en réparation de ses préjudices personnels en lien direct avec la reconnaissance de sa maladie professionnelle soit portée à 16 972 euros et que la somme allouée en réparation de son préjudice en lien avec la procédure de mise à la retraite pour invalidité imputable au service soit portée à 2 500 euros. Sur les frais liés au litige : 20. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme demandée par le département du Gard au titre des frais exposés et non compris dans les dépens soit mise à la charge de M. B..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. En revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge solidaire du département du Gard et de l'Etat le versement à M. B... de la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D E C I D E : Article 1er : La somme de 15 972 euros que le département du Gard a été condamné à verser à M. B... par le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 27 décembre 2021 est portée à 16 972 euros. Article 2 : La somme de 1 500 euros que l'Etat a été condamné à verser à M. B... par le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 27 décembre 2021 est portée à 2 500 euros. Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 27 décembre 2021 est réformé en ce qu'il a de contraire aux articles 1 et 2 du présent arrêt. Article 4 : Le département du Gard et l'Etat verseront solidairement la somme de 1 500 euros à M. B... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté. Article 6 : Les conclusions d'appel incident et celles présentées en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par le département du Gard sont rejetées. Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., au département du Gard et au ministre des solidarités et de la santé. Délibéré après l'audience du 8 octobre 2024 à laquelle siégeaient : Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre, Mme Teuly-Desportes, présidente-assesseure, Mme Bentolila, conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 octobre 2024. La rapporteure, D. Teuly-Desportes La présidente, A. Geslan-Demaret La greffière, M-M. Maillat La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et au ministre des solidarités et de la santé, en ce qui les concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. 2 N° 22TL00576
Cours administrative d'appel
Toulouse
CAA de PARIS, 8ème chambre, 21/10/2024, 23PA03455, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 17 mars 2021 par laquelle la commission de recours de l'invalidité a rejeté son recours administratif préalable contre la décision du 3 août 2020 de la ministre des armées rejetant ses demandes tendant à la révision de sa pension militaire d'invalidité pour aggravation des infirmités pensionnées, infirmités nouvelles et majoration à titre d'allocation pour l'assistance constante d'une tierce personne, de lui attribuer la majoration de pension à titre d'allocation pour l'assistance constante d'une tierce personne et d'ordonner une expertise confiée à un chirurgien orthopédiste aux fins de déterminer si ses infirmités nouvelles sont imputables au service. Par un jugement n° 2111055/5-4 du 2 juin 2023, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 29 juillet 2023, M. A..., représenté par Me Haushalter, demande à la cour d'annuler ce jugement et de faire droit à sa demande. Il soutient que : - pour lui refuser l'attribution de la majoration de pension pour assistance d'une tierce personne, la commission de recours de l'invalidité s'est fondée sur un certificat médical incomplet et sur un avis de la commission consultative médicale erroné ; - eu égard aux blessures en service mentionnées dans son état des services et dans son livret médical, au certificat médical établi le 21 juin 2019 à l'appui de sa demande de pension pour infirmités nouvelles et au rapport de l'expertise réglementaire du 3 mars 2020, la commission de recours de l'invalidité ne pouvait s'en tenir à l'avis du médecin et de la commission consultative médicale pour rejeter sa demande sans demander un complément d'expertise. Par un mémoire en défense, enregistré le 9 avril 2024, le ministre des armées conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés. M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 14 décembre 2023 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Paris. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Vrignon-Villalba, - et les conclusions de Mme Bernard, rapporteure publique, Considérant ce qui suit : 1. M. C... A..., né le 12 août 1941, entré en service le 16 septembre 1960 et radié des contrôles le 13 juin 1987, a été affecté notamment au centre d'entraînement des réservistes parachutistes au titre du centre d'instruction des nageurs de combat à Ajaccio du 1er mars 1965 au 30 juin 1974 et au centre d'entraînement des réservistes parachutistes du 17 août 1981 au 3 février 1985. Il est titulaire d'une pension militaire d'invalidité définitive concédée le 27 décembre 2010 à compter du 24 novembre 2009 au taux global de 100 % + 3°, d'une part, pour les séquelles d'une chorio-rétinite bilatérale au taux de 100 % et, d'autre part, pour les séquelles d'un traumatisme du genou gauche au taux de 25 %. Le 19 novembre 2018, il a présenté une première demande de révision de sa pension pour aggravation de la chorio-rétinite bilatérale et majoration à titre d'allocation pour l'assistance constante d'une tierce personne. Le 6 août 2019, il a présenté une seconde demande de révision de sa pension pour aggravation des séquelles du traumatisme du genou gauche et infirmités nouvelles résultant d'une gonarthrose droite et de lombalgies avec fessalgie gauche. Par une décision du 3 août 2020, la ministre des armées a rejeté ses demandes. Le 1er décembre 2020, M. A... a formé un recours administratif préalable obligatoire contre cette décision en tant qu'elle porte sur la majoration à titre d'allocation pour l'assistance constante d'une tierce personne et sur les infirmités nouvelles. Par une décision du 17 mars 2021, la commission de recours de l'invalidité a rejeté ce recours. M. A... relève appel du jugement du 2 juin 2023 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 17 mars 2021, à ce que lui soit attribué la majoration de pension à titre d'allocation pour l'assistance constante d'une tierce personne et à ce que soit ordonnée, avant dire droit, une expertise confiée à un chirurgien orthopédiste aux fins de déterminer si ses infirmités nouvelles sont imputables au service. Sur les infirmités nouvelles : 2. Aux termes de l'article L. 121-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " Ouvrent droit à pension : / 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; / 2° Les infirmités résultant de maladies contractées par le fait ou à l'occasion du service ; / 3° L'aggravation par le fait ou à l'occasion du service d'infirmités étrangères au service ; / 4° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'accidents éprouvés entre le début et la fin d'une mission opérationnelle, y compris les opérations d'expertise ou d'essai, ou d'entraînement ou en escale, sauf faute de la victime détachable du service. ". Aux termes de l'article L. 121-2 du même code : " Est présumée imputable au service : / 1° Toute blessure constatée par suite d'un accident, quelle qu'en soit la cause, dans le temps et le lieu du service, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, en l'absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant l'accident du service ; / 2° Toute blessure constatée durant les services accomplis par un militaire en temps de guerre, au cours d'une expédition déclarée campagne de guerre, d'une opération extérieure mentionnée à l'article L. 4123-4 du code de la défense ou pendant la durée légale du service national et avant la date de retour sur le lieu d'affectation habituelle ou la date de renvoi dans ses foyers ; / 3° Toute maladie désignée par les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1, L. 461-2 et L. 461-3 du code de la sécurité sociale et contractée dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le militaire de ses fonctions dans les conditions mentionnées à ces tableaux ;/ 4° Toute maladie constatée au cours d'une guerre, d'une expédition déclarée campagne de guerre, d'une opération extérieure mentionnée à l'article L. 4123-4 du code de la défense ou pendant la durée légale du service national, à compter du quatre-vingt-dixième jour de service effectif et avant le soixantième jour suivant la date de retour sur le lieu d'affectation habituelle ou la date de renvoi du militaire dans ses foyers. En cas d'interruption de service d'une durée supérieure à quatre-vingt-dix jours, la présomption ne joue qu'à compter du quatre-vingt-dixième jour suivant la reprise du service actif. ". L'article L. 121-2-1 du même code dispose : " (...) / Peut également être reconnue imputable au service une maladie non désignée dans les tableaux précités lorsque le militaire ou ses ayants cause établissent qu'elle est essentiellement et directement causée par l'exercice des fonctions. ". 3. Il résulte de ces dispositions que lorsque la présomption légale d'imputabilité ne peut être invoquée, l'intéressé doit apporter la preuve de l'existence d'une relation directe et certaine entre l'infirmité et un fait précis ou des circonstances particulières de service. Cette relation de causalité est requise aussi bien en cas d'infirmité trouvant sa cause exclusive dans le service qu'en cas d'aggravation par le service d'une infirmité pré-existante ou concomitante au service et vaut pour toutes les affections y compris celles de nature psychologique. Enfin, l'existence d'une telle relation ne peut résulter de la seule circonstance que l'infirmité ou l'aggravation ait été révélée durant le service, ni d'une vraisemblance ou d'une hypothèse, ni des conditions générales du service. 4. Il ressort du rapport d'expertise du 3 mars 2020 du docteur D..., chirurgien orthopédiste désigné dans le cadre de la deuxième demande de révision présentée par M. A..., qu'à la date de cette demande, le 6 août 2019, celui-ci était atteint d'une gonarthrose droite et d'une discopathie protrusive étagée à l'origine de lombalgies avec fessalgie gauche. Le taux d'invalidité correspondant aux infirmités en résultant peut être fixé, respectivement, à 20 % et à 15 %. M. A..., qui se prévaut de l'état de ses services, de son livret médical, du certificat médical établi le 21 juin 2019 à l'appui de sa demande de pension pour infirmités nouvelles et du rapport d'expertise du 3 mars 2020, fait valoir qu'il a effectué de nombreux sauts en parachute et plongées sous-marines et qu'il a subi de nombreuses blessures en service entre 1963 et 1973. Il soutient que la commission des recours de l'invalidité ne pouvait conclure au défaut d'imputabilité de ces infirmités sans demander un complément d'expertise médicale et demande qu'une expertise confiée à un chirurgien orthopédiste soit ordonnée aux fins de déterminer si ses infirmités nouvelles sont imputables au service. 5. Toutefois, d'une part, il résulte de l'instruction que ni la gonarthrose droite ni la discopathie dont M. A... souffre n'ont été constatées par suite d'un accident de service ou d'une maladie contractée en service. Il n'est par ailleurs pas allégué que ces pathologies figurent sur les tableaux de maladies professionnelles de la sécurité sociale, visées au 3° de l'article L. 121-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre. Par suite, M. A... ne peut pas bénéficier de la présomption légale d'imputabilité au service. 6. D'autre part, il résulte également de l'instruction, notamment de l'avis rendu le 5 mai 2020 par le médecin conseil expert des pensions militaires d'invalidité, que les blessures reçues par M. A... et constatées en service, en particulier les entorses de la cheville droite subies en 1963, 1968, 1970 et 1971 et le traumatisme coccygien subi en 1971, n'avaient pas pour siège le genou droit ou la région lombaire et ne peuvent être regardées comme ayant causé cette gonarthrose droite et cette discopathie. Le médecin conseil estime par ailleurs, s'agissant de la gonarthrose droite, que " les dégâts traumatiques du genou gauche sont un facteur favorisant, mais ni déclenchant, ni aggravant " et, s'agissant de la lombalgie avec fessalgie, que " les discopathies avec canal secondaire étroit ne peuvent [pas] être rattachées [...] aux infirmités pensionnées ". Alors que ni le certificat médical du 21 juin 2019, non circonstancié sur ce point, ni le rapport d'expertise du 3 mars 2020, qui ne se prononce pas sur l'imputabilité des infirmités qui y sont décrites, ne sont de nature à établir l'imputabilité au service de ces pathologies, M. A... ne produit aucun élément susceptible de remettre en cause cette appréciation et de justifier qu'une expertise soit ordonnée sur ce point. Sur la majoration à titre d'allocation pour l'assistance constante d'une tierce personne : 7. Aux termes de l'article L. 133-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " Les invalides que leurs infirmités rendent incapables de se mouvoir, de se conduire ou d'accomplir les actes essentiels de la vie et qui, vivant chez eux, sont obligés de recourir d'une manière constante aux soins d'une tierce personne, ont droit, à titre d'allocation spéciale, à une majoration égale au quart de la pension. / (...) ". Aux termes de l'article R. 133-1 du même code : " Le droit à la majoration de pension mentionnée à l'article L. 133-1 est examiné par le service désigné par le ministre chargé des anciens combattants et victimes de guerre, soit au moment où il est statué sur le degré d'invalidité dont l'intéressé est atteint, soit à la demande de l'intéressé. / Il est révisable tous les trois ans, après examens médicaux, même lorsque la pension a un caractère définitif, si l'incapacité à se mouvoir, à se conduire ou à accomplir les actes essentiels de la vie n'a pas été reconnue définitive ". 8. D'une part, si ces dispositions ne peuvent être interprétées comme exigeant que l'aide d'un tiers soit nécessaire à l'accomplissement de la totalité des actes nécessaires à la vie courante, elles imposent toutefois que l'aide d'une tierce personne soit indispensable ou bien pour l'accomplissement d'actes nombreux se répartissant tout au long de la journée, ou bien pour faire face soit à des manifestations imprévisibles des infirmités dont le pensionné est atteint, soit à des soins dont l'accomplissement ne peut être subordonné à un horaire préétabli, et dont l'absence mettrait sérieusement en danger l'intégrité physique ou la vie de l'intéressé. D'autre part, si le bénéfice de ces dispositions en faveur des invalides que leurs infirmités rendent incapables de se mouvoir, de se conduire ou d'accomplir les actes essentiels à la vie ne peut être accordé que si la nécessité de l'aide constante d'une tierce personne est la conséquence directe et exclusive d'affections imputables au service, la nécessité d'une telle assistance peut résulter de l'ensemble des infirmités pensionnées, et pas seulement de l'une d'entre elles. 9. Il résulte de l'instruction, notamment de l'expertise médicale réalisée le 13 février 2020 par le professeur B..., médecin ophtalmologiste désigné dans le cadre de la première demande de révision présentée par M. A..., que celui-ci peut quitter son lit seul, se coucher seul, satisfaire seul ses besoins naturels, faire sa toilette seul, se vêtir seul totalement, se dévêtir seul totalement, manger et boire seul, marcher seul sans l'aide d'un tiers mais ne peut pas utiliser seul un moyen de transport individuel ou un moyen de transport collectif. Il en conclut que même si c'est de façon " précaire ", M. A... " est encore en possibilité d'accomplir les actes essentiels de la vie ". M. A... fait valoir qu'il ressort du rapport du professeur D... qu'il doit faire face à des manifestations imprévisibles au titre des séquelles de traumatisme du genou gauche, qui engendrent une " instabilité avec dérobement " et que cette constatation aurait également dû être prise en compte pour apprécier la nécessité d'une aide constante. Toutefois, d'une part, il résulte des dossiers de demande que M. A... n'a sollicité la majoration pour tierce personne qu'au titre de l'infirmité " séquelles d'une chorio-rétinite bilatérale ". De même, le certificat médical du 19 mars 2020 produit au dossier de l'instance par M. A... pour justifier la nécessité de la présence d'une tierce personne ne mentionne que son " état ophtalmologique ". D'autre part, les doléances de M. A... recueillies par le professeur D..., relatives à ses difficultés à marcher, ne contredisent pas les constatations opérées par le professeur B.... En tout état de cause, il résulte de l'expertise du docteur D... que les difficultés invoquées par M. A... résultent essentiellement des infirmités nouvelles dont il a été dit au point 6 qu'elles ne sont pas imputables au service, en particulier, s'agissant de la " sensation de jambes faibles à la marche (...) l'obligeant à se tenir à un appui ", de la discopathie protusive étagée. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir qu'il a droit au bénéfice des dispositions précitées de l'article L. 133-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre. 10. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. D É C I D E : Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et au ministre des armées et des anciens combattants. Délibéré après l'audience du 30 septembre 2024, à laquelle siégeaient : - Mme Menasseyre, présidente de chambre, - Mme Vrignon-Villalba, présidente assesseure, - Mme Collet, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 octobre 2024. La rapporteure, C. Vrignon-VillalbaLa présidente, A. Menasseyre Le greffier, P. Tisserand La République mande et ordonne au ministre des armées et des anciens combattants en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 23PA03455
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Paris