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Conseil d'État, 7ème - 2ème chambres réunies, 27/07/2022, 451756
Vu la procédure suivante : M. D... B... a demandé au tribunal administratif de Rennes de condamner l'Etat à lui verser la somme de 74 173,20 euros en réparation des préjudices qu'il a subis du fait de l'accident dont il a été victime le 10 juillet 2013. Par un jugement n° 1605549 du 4 avril 2019, le tribunal administratif de Rennes a condamné l'Etat à verser à M. B... la somme de 23 129 euros, assortie des intérêts légaux, et rejeté le surplus de cette demande. Par un arrêt n° 19NT02469 du 16 février 2021, la cour administrative d'appel de Nantes a, sur appel de la ministre des armées, annulé ce jugement et rejeté la demande de M. B.... Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 16 avril et 16 juin 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler cet arrêt ; 2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la loi n° 91-1389 du 31 décembre 1991 ; - la loi n° 96-370 du 3 mai 1996 ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. François Lelièvre, maître des requêtes, - les conclusions de M. A... C... de Vendeuil, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, au Cabinet Rousseau, Tapie, avocat de M. B... ;Considérant ce qui suit : 1. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que M. B..., sergent-chef de l'armée de terre, s'est blessé le 10 juillet 2013 en effectuant, en qualité de sapeur-pompier volontaire, un exercice organisé par le service départemental d'incendie et de secours (SDIS) des Yvelines. A la suite de cet accident, il a été placé par le ministère de la défense en congé de maladie imputable au service puis en congé de longue maladie, et une pension militaire d'invalidité au taux de 20% lui a été concédée. M. B... a demandé au tribunal administratif de Rennes de condamner l'Etat à réparer les préjudices qu'il a subis à la suite de cet accident. Par un jugement du 4 avril 2019, le tribunal administratif a condamné l'Etat à lui verser une somme de 23 139 euros et rejeté le surplus de sa demande. M. B... se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 16 février 2021 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a annulé ce jugement et rejeté sa demande de première instance ainsi que son appel incident. 2. Aux termes de l'article 1-5 de la loi du 3 mai 1996 relative au développement du volontariat dans les corps de sapeurs-pompiers : " Une protection sociale particulière est garantie au sapeur-pompier volontaire par la loi n° 91-1389 du 31 décembre 1991 relative à la protection sociale des sapeurs-pompiers volontaires en cas d'accident survenu ou de maladie contractée en service ". Aux termes de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1991 relative à la protection sociale des sapeurs-pompiers volontaires en cas d'accident survenu ou de maladie contractée en service, dans sa rédaction applicable au litige : " Le sapeur-pompier volontaire victime d'un accident survenu ou atteint d'une maladie contractée en service ou à l'occasion du service a droit, dans les conditions prévues par la présente loi : / 1° Sa vie durant, à la gratuité des frais médicaux, chirurgicaux, pharmaceutiques et accessoires ainsi que des frais de transport, d'hospitalisation et d'appareillage et, d'une façon générale, des frais de traitement, de réadaptation fonctionnelle et de rééducation professionnelle directement entraînés par cet accident ou cette maladie ; / 2° A une indemnité journalière compensant la perte de revenus qu'il subit pendant la période d'incapacité temporaire de travail ; / 3° A une allocation ou une rente en cas d'invalidité permanente. (...) ". L'article 19 de la même loi dispose, dans sa version applicable au litige, que : " Les sapeurs-pompiers volontaires qui sont fonctionnaires, titulaires ou stagiaires, ou militaires bénéficient, en cas d'accident survenu ou de maladie contractée dans leur service de sapeur-pompier, du régime d'indemnisation fixé par les dispositions statutaires qui les régissent. / Les intéressés peuvent toutefois demander, dans un délai déterminé à compter de la date de l'accident ou de la première constatation médicale de la maladie, le bénéfice du régime d'indemnisation institué par la présente loi s'ils y ont intérêt. /(...) ". 3. Ces dispositions déterminent forfaitairement la réparation à laquelle les sapeurs-pompiers volontaires victimes d'un accident de service ou d'une maladie professionnelle peuvent prétendre de la part de la collectivité publique qui est leur employeur, au titre des préjudices liés aux pertes de revenus et à l'incidence professionnelle résultant de l'incapacité physique causée par cet accident ou cette maladie. Le sapeur-pompier volontaire qui subit, du fait de l'invalidité ou de la maladie, des préjudices patrimoniaux d'une autre nature ou des préjudices personnels peut obtenir de la personne publique auprès de laquelle il est engagé en tant que sapeur-pompier volontaire, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice, ou engager contre cette personne publique une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage, dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette personne ou à l'état d'un ouvrage public dont l'entretien lui incombait. 4. Il résulte de ce qui a été dit au point précédent que si M. B... avait la possibilité d'obtenir, sur le fondement de la responsabilité sans faute, la réparation des préjudices patrimoniaux d'une autre nature que ceux couverts par la pension militaire d'invalidité qui lui a été concédée et de ses préjudices personnels, son action en responsabilité devait être dirigée contre la personne publique auprès de laquelle il était engagé en tant que sapeur-pompier volontaire lors de la survenance de l'accident en litige. Il suit de là que la cour administrative d'appel de Nantes n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que la circonstance qu'il bénéficiait du régime d'indemnisation fixé par les dispositions statutaires qui régissent les militaires, pour lequel il avait opté sur le fondement des dispositions précitées de l'article 19 de la loi du 31 décembre 1991, et percevait à ce titre des prestations versées par l'Etat, son employeur en sa qualité de militaire, n'était pas de nature à lui permettre de diriger son action indemnitaire contre une autre personne publique que le SDIS des Yvelines. 5. Enfin, la cour n'ayant pas méconnu la portée des conclusions de M. B... en relevant qu'elles étaient exclusivement dirigées contre l'Etat, elle n'a pas commis d'erreur de droit en ne les regardant pas comme dirigées contre le SDIS des Yvelines et en n'appelant pas celui-ci en la cause. 6. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque et que, par suite, ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées. D E C I D E : -------------- Article 1er : Le pourvoi de M. B... est rejeté. Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. D... B... et au ministre des armées. Délibéré à l'issue de la séance du 5 juillet 2022 où siégeaient : Mme Christine Maugüé, présidente adjointe de la section du contentieux, présidant ; M. Nicolas Boulouis, M. Olivier Japiot, présidents de chambre ; M. Olivier Rousselle, Mme Anne Courrèges, M. Benoît Bohnert, M. Gilles Pellissier, M. Jean-Yves Ollier, conseillers d'Etat et M. François Lelièvre, maître des requêtes-rapporteur. Rendu le 27 juillet 2022. La présidente : Signé : Mme Christine Maugüé Le rapporteur : Signé : M. François Lelièvre La secrétaire : Signé : Mme Nadine PelatECLI:FR:CECHR:2022:451756.20220727
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 2ème chambre, 21/07/2022, 459116, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Par une lettre enregistrée le 10 novembre 2021 au secrétariat de la section du rapport et des études du Conseil d'Etat, M. A... B... a demandé au Conseil d'Etat de prononcer une astreinte à l'encontre de l'Etat, en application de l'article L. 911-5 du code de justice administrative, afin d'obtenir le versement d'une pension à laquelle il estime avoir droit en exécution d'un jugement du tribunal départemental des pensions du Gard du 16 décembre 1997 qui lui a reconnu un taux d'invalidité de 20 % et qui l'a renvoyé devant l'administration afin que ses droits soient appréciés en fonction de ce taux d'invalidité. Par une décision du 16 novembre 2021, la présidente de la section du rapport et des études du Conseil d'Etat a classé la demande de M. B.... Par une lettre enregistrée le 3 décembre 2021 au secrétariat de la section du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... conteste ce classement. Par une ordonnance n° 459116 du 20 décembre 2021, le président de la section du contentieux a décidé l'ouverture d'une procédure juridictionnelle. Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Clément Tonon, auditeur, - les conclusions de M. Philippe Ranquet, rapporteur public, Considérant ce qui suit : 1. Aux termes de l'article R. 931-3 du code de justice administrative : " Les demandes présentées sur le fondement de l'article R. 931-2 ou renvoyées au Conseil d'Etat par un tribunal administratif ou une cour administrative d'appel en application de l'article R. 921-3 sont enregistrées par la section du rapport et des études. / (...) / Lorsque le président de la section du rapport et des études estime que la demande n'est pas fondée ou que la décision juridictionnelle en cause a été exécutée, il en informe le demandeur et procède au classement administratif de la demande. Le cas échéant, il en informe également le président de la juridiction ayant renvoyé la demande au Conseil d'Etat ". Aux termes de l'article R. 931-4 du même code : " (...) Lorsque le président de la section du rapport et des études fait usage des dispositions du premier alinéa, ou lorsque le demandeur conteste devant le président de la section du contentieux la décision de classement prévue au dernier alinéa de l'article R. 931-3 dans le mois qui suit la notification de cette décision, ou, en tout état de cause, à l'expiration d'un délai de six mois à compter de la saisine du Conseil d'Etat, le président de la section du contentieux ouvre par ordonnance une procédure juridictionnelle ". Enfin, aux termes de l'article R. 931-5 du même code : " Après l'ouverture de la procédure juridictionnelle prévue à l'article R. 931-4, et sous réserve des pouvoirs conférés par le dernier alinéa de l'article L. 911-5 au président de la section du contentieux, qui statue par ordonnance motivée, l'affaire est instruite par une chambre conformément aux dispositions régissant la procédure devant le Conseil d'Etat statuant au contentieux (...) ". 2. Il résulte de l'instruction que M. B... a sollicité auprès du ministre de la défense le bénéfice d'une pension d'orphelin majeur infirme au titre des dispositions de l'article L. 57 du code des pensions militaires d'invalidité des victimes de la guerre. Cette demande a été rejetée par une décision du ministre de la défense. Saisi par M. B... d'un recours contre cette décision, le tribunal départemental des pensions du Gard a, par un jugement en date du 16 décembre 1997, fixé à 20 % le taux d'invalidité de M. B... et l'a renvoyé devant l'administration pour que ses droits soient appréciés au vu de ce taux. Par un courrier du 9 juin 1998, le ministre de la défense a informé M. B... du refus de faire droit à sa demande de pension. Saisi par M. B... d'un recours contre cette décision, le tribunal des pensions du Vaucluse l'a, par un jugement en date du 7 septembre 2009, renvoyé devant l'administration pour faire valoir ses droits, ce jugement ayant été confirmé par un arrêt du 24 mars 2014 rendu par la cour régionale des pensions de Nîmes. Par une décision du 17 avril 2015, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux a annulé cet arrêt et ce jugement, et a rejeté la demande présentée par M. B... devant le tribunal des pensions du Vaucluse. Le 10 novembre 2021, M. B... a saisi la section du rapport et des études du Conseil d'Etat d'une demande tendant à ce que le Conseil d'Etat ordonne au ministère des armées de lui verser, sous astreinte, la pension à laquelle il estime avoir droit en exécution du jugement rendu par le tribunal départemental des pensions du Gard le 16 décembre 1997. Le 16 novembre 2021, la présidente de la section du rapport et des études a estimé que, par sa décision du 9 juin 1998, le ministre de la défense avait entièrement exécuté ce jugement et a procédé au classement administratif de la demande de M. B.... L'intéressé a toutefois contesté cette décision 3 décembre 2021 devant le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat qui a ordonné, le 20 décembre 2021, l'ouverture d'une procédure juridictionnelle. 3. D'une part, dans son jugement du 16 décembre 1997, le tribunal départemental des pensions du Gard, s'il a fixé à 20 % le taux d'invalidité de M. B..., l'a renvoyé devant l'administration pour qu'elle procède à une nouvelle appréciation de ses droits au vu de ce taux. Par sa décision du 17 avril 2015, le Conseil d'Etat statuant au contentieux, a jugé que ce jugement devait être regardé comme se bornant à renvoyer le demandeur devant l'administration pour un nouvel examen de son dossier, sans se prononcer sur son droit à pension. 4. D'autre part, il ressort également des pièces du dossier que, par une lettre en date du 9 juin 1998, le ministre de la défense a informé M. B... de son refus de faire droit à sa demande de pension. 5. Il résulte de tout ce qui précède que le jugement du tribunal départemental des pensions du Gard en date du 16 décembre 1997 a été entièrement exécuté et que la demande de M. B... tendant à ce que le Conseil d'Etat prononce une astreinte à l'encontre de l'Etat en vue d'assurer l'exécution de ce jugement ne peut dès lors qu'être rejetée.D E C I D E : -------------- Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. A... B... et au ministre des armées.ECLI:FR:CECHS:2022:459116.20220721
Conseil d'Etat
CAA de NANTES, 6ème chambre, 19/07/2022, 21NT00025, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme C... B... a demandé au tribunal administratif de Caen de condamner la commune de ... à lui verser une somme de 116 216,46 euros assortie des intérêts et de leur capitalisation en réparation des préjudices résultant de la maladie professionnelle et de l'accident de service dont elle a été victime le 13 janvier 2014. Par un jugement n° 1800266 du 5 novembre 2020, le tribunal administratif de Caen a condamné la commune de ... à verser à Mme B... la somme de 65 240 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 24 octobre 2017 et de leur capitalisation à chaque échéance annuelle à compter du 24 octobre 2018. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés les 5 janvier et 26 août 2021, la commune de ..., représentée par Me Gorand, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Caen du 5 novembre 2020 ; 2°) de rejeter la demande présentée devant le tribunal administratif de Caen par Mme B... ainsi que ses conclusions incidentes présentées en appel ; 3°) à titre subsidiaire, de réduire le montant de ses indemnités ; 3°) de mettre à la charge de Mme B... le versement de la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - il apparaît injustifié de la condamner à réparer l'intégralité des préjudices de Mme B... alors qu'ils n'ont pas pour seule origine les tâches réalisées à la cantine scolaire ; - ses préjudices doivent en tout état de cause être réduits ; - la responsabilité sans faute en cas d'accident imputable au service implique uniquement l'indemnisation des souffrances physiques et morales et des préjudices d'agrément et esthétique ; - elle ne permet pas l'indemnisation du déficit fonctionnel temporaire (DFT) ; en tout état de cause, la date de consolidation de son épaule gauche doit être fixée au 25 novembre 2016 et non au 14 juin 2017 ; - la responsabilité sans faute ne permet pas davantage l'indemnisation du déficit fonctionnel permanent (DFP) ; en outre, la rente viagère d'invalidité perçue du fait de l'admission de Mme B... à la retraite pour invalidité imputable au service a pour objet de réparer son DFP ; en tout état de cause, la somme allouée par le tribunal administratif est excessive ; de plus cette indemnité, qui ne peut dépasser 42 000 euros, doit être réduite de moitié pour tenir compte de son état antérieur ; - l'évaluation de ses souffrances endurées est excessive dès lors que l'état de santé de l'intéressée ne nécessité plus de soins depuis 2016 et qu'elle n'a pas recours de façon systématique aux antalgiques ; cette indemnité doit en outre être diminuée de moitié pour tenir compte de son état antérieur ; - le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté l'indemnisation des préjudices financiers, d'agrément et moral ainsi que les troubles dans ses conditions d'existence subis par Mme B.... Par des mémoires, enregistrés les 21 avril et 29 août 2021, Mme B..., représentée par Me Launay, conclut au rejet de la requête de la commune, à la réformation du jugement attaqué en tant qu'il a limité le montant de l'indemnisation de ses préjudices à 65 240 euros, à ce que cette somme soit portée à 116 216,46 euros, à ce qu'elle soit assortie des intérêts et de leur capitalisation et à ce que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge de la commune de ... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que les moyens soulevés par la commune de ... ne sont pas fondés et ajoute que : - en n'assurant pas avec la régularité requise sa surveillance médicale périodique et particulière la commune a commis une faute ; - qu'en lui confiant des tâches imposant des gestes répétés, identiques à celles ayant causé sa maladie professionnelle, la commune a également commis une faute ; - elle est fondée à solliciter le versement de l'indemnité d'administration et de technicité qu'elle percevait depuis 2010 au titre des années 2013 à 2018 pour un montant de 2 734,26 euros ; - son DFT sera évalué à 38 532,20 euros ; - son DFP sera évalué à 57 950 euros ; - ses souffrances endurées justifient une indemnité de 12 000 euros ; - elle est fondée à solliciter la somme de 5 000 euros au titre de son préjudice moral et des troubles dans ses conditions d'existence. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme A..., - les conclusions de Mme Malingue, rapporteure publique ; - et les observations de Me Launay, représentant Mme B.... Considérant ce qui suit : 1. Mme B... a été recrutée à compter du 1er septembre 2008 par la commune de ... en qualité d'adjointe technique pour exercer les fonctions de cuisinière à la cantine scolaire. A compter du 27 août 2012, l'intéressée a été placée en arrêt de maladie pour une tendinopathie de l'épaule droite, laquelle a été reconnue imputable au service. Le 13 janvier 2014, alors qu'elle manipulait un panier d'assiettes pour le placer dans le lave-vaisselle, Mme B... a ressenti une vive douleur. Elle a été arrêtée pour une enthésopathie de la face profonde du supra-épineux avec rupture non transfixiante de la face superficielle du supra-épineux de l'épaule gauche. Cet accident a été reconnu imputable au service. La rupture de la coiffe des rotateurs constatée le 22 janvier 2014 au niveau de son épaule droite a également été reconnue imputable au service. Mme B... a été placée à la retraite pour invalidité à compter du 1er avril 2018. Le 23 octobre 2017, l'intéressée a présenté une réclamation préalable auprès de la commune aux fins d'obtenir la réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis à raison de ces maladies et accident de service. La commune relève appel du jugement du 5 novembre 2020, par lequel le tribunal administratif de Caen l'a condamné à verser à Mme B... la somme de 65 240 euros assortie des intérêts et de leur capitalisation. Mme B... présente des conclusions d'appel incident et demande à la cour de porter cette somme à 116 216,46 euros. Sur la responsabilité pour faute : 2. Il résulte des différentes pièces médicales produites au dossier, que Mme B... souffre d'une tendinite à l'épaule droite depuis le printemps 2012 et que le médecin de prévention a été consulté par la commune le 24 mai 2012. A cette date il a estimé que l'intéressée était apte à reprendre son activité professionnelle. S'il a évoqué la possibilité d'une infiltration destinée à soulager ses douleurs, il n'a émis aucune réserve quant aux gestes qu'elle devait accomplir dans le cadre de ses fonctions. L'intéressée a ensuite été placée en arrêt de travail à compter du 27 août 2012. Le 21 novembre 2012, elle a sollicité la reconnaissance de sa maladie professionnelle. La commune a saisi le médecin de prévention le jour même. Le 26 novembre 2012, ce dernier a émis un avis d'inaptitude temporaire en soulignant la relation de causalité entre les gestes répétés qu'elle effectue et sa pathologie. L'avis de la commission de réforme a été sollicité par la commune le 15 janvier 2013. Si dans le courrier de saisine de cette instance, le maire a indiqué qu'il n'entendait pas répondre favorablement à la demande de Mme B..., le 23 janvier 2013 il a diligenté une expertise afin d'évaluer son état de santé. Au vu du rapport de ce médecin du 29 janvier 2013 et de l'avis émis le 24 janvier 2013 par la commission de réforme, le maire a, par un arrêté du 7 février 2013, reconnu l'imputabilité au service de cette pathologie. Mme B... a repris son activité le 3 septembre 2013 après avoir soldé ses congés annuels. L'intéressée reproche à la commune de ne pas avoir sollicité l'avis du médecin de prévention avant cette date. Il résulte toutefois de l'instruction que la commune a saisi le médecin de prévention dès le 6 septembre 2013, soit trois jours seulement après sa reprise et sur la base d'une nouvelle fiche de poste. Au vu de ce document, signé le 23 août 2013 par Mme B..., sa durée de travail a été réduite de 2 heure 50 par semaine. Par ailleurs, alors qu'initialement elle était chargée de l'élaboration des menus et de la préparation des commandes, de la réception des marchandises, de la réalisation des plats, du service en salle et de l'entretien général de la cuisine, ses nouvelles tâches comprenaient l'aide à la préparation des repas et des tables, l'aide au service, le ménage du réfectoire et la vaisselle, le ménage du gymnase intercommunal, de salles communales ainsi que l'entretien général suivant les besoins du service. Ainsi qu'elle le souligne, à compter de la rentrée scolaire 2012/2013 la commune a en effet eu recours à un prestataire de service extérieur pour la préparation et la livraison des repas des enfants. L'intéressée fait valoir qu'elle devait néanmoins procéder à la réception des repas préparés, les réchauffer dans le four situé à une hauteur d'environ 1,50 m et manipuler des plats lourds. Toutefois, dans son avis du 20 septembre 2013, le médecin du travail a conclu à son aptitude à reprendre ses fonctions à l'essai sur la base de la fiche de poste du 23 août 2013. Il a seulement ajouté qu'en cas de rechute avec arrêt de travail un mi-temps thérapeutique devra être envisagé, ce que l'intéressée a exclu. Par suite, aucune recommandation du médecin de prévention n'a été méconnue par la commune. La circonstance que Mme B... a de nouveau été victime d'un accident du travail au niveau de l'épaule gauche et d'une nouvelle maladie professionnelle au niveau de l'épaule droite au cours du mois de janvier 2014 ne suffit pas à établir l'existence d'une faute de la commune. Enfin, si Mme B... se prévaut de la remarque d'un expert indiquant qu'au mois de septembre 2013 elle pouvait reprendre avec 2 h de moins et " sur un autre poste " comprenant du ménage et sa participation au lavage de la vaisselle de la cantine, cet avis, émanant d'un médecin qui n'avait pas une connaissance précise du poste de travail de l'intéressée, n'a été formulé que le 25 novembre 2016, de sorte qu'il ne peut justifier un quelconque manquement de la commune lors de la reprise de son travail le 3 septembre 2013. Par suite, Mme B... n'est pas fondée à soutenir qu'en n'assurant pas avec la régularité requise sa surveillance médicale et en lui confiant des tâches imposant des gestes répétés identiques à ceux qui avaient causé sa maladie professionnelle initiale, la commune, qui a toujours suivi les avis de la commission de réforme reconnaissant l'imputabilité au service de ces maladies et accident professionnelles, aurait commis une faute de nature à engager sa responsabilité. Elle n'est en conséquence pas fondée à solliciter la réformation du jugement attaqué sur ce point. Sur la responsabilité sans faute : 3. Les dispositions qui instituent, en faveur des fonctionnaires victimes d'accidents de service ou de maladies professionnelles, une rente viagère d'invalidité en cas de mise à la retraite et une allocation temporaire d'invalidité en cas de maintien en activité doivent être regardées comme ayant pour objet de réparer les pertes de revenus et l'incidence professionnelle résultant de l'incapacité physique causée par un accident de service ou une maladie professionnelle. Ces dispositions déterminent forfaitairement la réparation à laquelle les fonctionnaires concernés peuvent prétendre, au titre de ces chefs de préjudice, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions. Elles ne font en revanche obstacle ni à ce que le fonctionnaire qui subit, du fait de l'invalidité ou de la maladie, des préjudices patrimoniaux d'une autre nature ou des préjudices personnels, obtienne de la collectivité qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice, ni à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre cette personne publique, dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette personne ou à l'état d'un ouvrage public dont l'entretien lui incombait. 4. Ainsi qu'il a été dit ci-dessus, Mme B... a ressenti ses premières douleurs au niveau de l'épaule droite au cours du printemps de l'année 2012. La commune fait cependant valoir qu'elle a exercé entre 1976 et 2002 une activité de restauratrice, qu'elle a travaillé en qualité d'ouvrière-pâtissière dans une boulangerie de 2001 à 2003 et que, durant les cinq années qui ont précédé son recrutement en qualité de cuisinière de la cantine scolaire, elle exerçait les fonctions d'aide à domicile. Elle considère que ces emplois ont pu contribuer à l'évolution des pathologies de l'épaule après une latence de plusieurs années. Si les experts ont rappelé ces différents métiers, aucun d'entre eux n'a retenu d'état antérieur susceptible d'atténuer la part de responsabilité de la commune. Par suite, cette dernière n'est pas fondée à soutenir que les activités professionnelles de Mme B... antérieures à 2008 seraient également à l'origine de ses pathologies. 5. Il est constant que Mme B... a été victime de deux maladies professionnelles de l'épaule droite les 27 août 2012 et 22 janvier 2014 et d'un accident de service le 13 janvier 2014, à l'origine d'un traumatisme de l'épaule gauche. Au vu des conclusions des experts et des avis de la commission de réforme, la commune a reconnu l'imputabilité au service de ces pathologies et accident. Par suite, et en dépit de la circonstance qu'elle perçoit, depuis sa mise à la retraite à compter du 1er avril 2018 une rente viagère d'invalidité, Mme B... peut prétendre à la réparation par la commune, même en l'absence de faute de cette dernière, de ses préjudices patrimoniaux autre que ses pertes de revenus et l'incidence professionnelle qui en résulte, ainsi que de ses préjudices personnels. En revanche, la responsabilité pour faute de la commune étant écartée, Mme B... n'est pas fondée à solliciter la réparation de ses éventuels préjudices financiers qui résulteraient de la perte du bénéfice de l'indemnité d'administration et de technicité qu'elle percevait depuis 2010 et de l'incidence professionnelle des maladies et accident professionnels sur sa carrière. Sur l'évaluation de ses préjudices : 6. L'un des experts qui a examiné Mme B... le 25 novembre 2016, a estimé que son état de santé était consolidé pour son épaule gauche à cette date et qu'elle conservait un taux d'incapacité permanente partielle (IPP) de 15 %. Il a considéré que la date de consolidation de son épaule droite devait être fixée au 22 juin 2015 avec un taux d'IPP de 20 %. Lors d'une expertise qui s'est déroulée le 14 juin 2017, un nouvel expert a confirmé ces taux d'IPP mais a repoussée la date de consolidation des blessures occasionnées à son épaule droite à la date de cette expertise afin de prendre en considération les arrêts et soins prodigués à l'intéressée depuis le 25 novembre 2016 et qui étaient en relation avec l'accident du 13 janvier 2014. Par suite, la commune n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a retenu une date de consolidation de l'épaule droite de Mme B... au 14 juin 2017. En ce qui concerne les préjudices avant consolidation : 7. Il est constant que les pathologies développées par Mme B... au niveau de ses deux épaules ont nécessité deux interventions chirurgicales réalisées les 24 juin 2014 et 17 novembre 2015. L'intéressée justifie à ce titre d'un déficit fonctionnel temporaire (DFT) total de deux jours. Mme B... a, en outre, subi des troubles dans ses conditions d'existence durant ses arrêts de maladie, lesquels ont perduré jusqu'aux dates de consolidation mentionnées au point 6. A ce titre, l'intéressée est en droit d'être indemnisée d'un DFT partiel, qui demeurait cependant réduit dès lors qu'il n'est pas établi qu'elle était dans l'incapacité totale d'accomplir tout acte de la vie quotidienne avant la date de consolidation. Par suite, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif, en fixant l'indemnisation de son DFT à la somme de 8 000 euros, a fait une inexacte appréciation de ce chef de préjudice. 8. Le 29 janvier 2013, l'expert qui a examiné Mme B... a indiqué qu'elle présentait " un fond douloureux permanent ", surtout la nuit, justifiant une prescription médicamenteuse de plusieurs molécules associées. Le 25 novembre 2016, un autre expert a précisé que son état avait nécessité une prise en charge par un centre antidouleur et qu'à cette date elle se plaignait encore de douleurs quasi permanentes à l'épaule droite y compris la nuit et prenait un médicament anti-inflammatoire à la demande. Il ajoutait que les mêmes douleurs étaient ressenties par l'intéressée au niveau de l'épaule gauche avec une intensité plus forte. Compte tenu de leur caractère localisé aux membres supérieurs et non généralisé à tout le corps, Mme B... doit être regardée comme ayant éprouvées des souffrances physiques et psychiques " modérées ", justement évaluées par le tribunal administratif a la somme de 4 000 euros. En ce qui concerne les préjudices après consolidation : 9. Ainsi qu'il a été dit, les deux experts consultés ont évalué le déficit fonctionnel permanent (après consolidation) de Mme B... à 20 % pour son épaule droite, et à 15 % pour son épaule gauche. Contrairement à ce que soutient la commune, la rente viagère perçue par Mme B... à compter de sa mise à la retraite, n'est pas de nature à réparer ce préjudice. Compte tenu de son âge aux dates de consolidation retenues, la somme de 53 240 euros allouée par les premiers correspond à la juste appréciation de ce préjudice, lequel englobe la réparation de son préjudice moral et des troubles dans ses conditions d'existence après sa consolidation. 10. Mme B... indique qu'elle a dû interrompre les activités de loisirs qu'elle pratiquait et sollicite à ce titre une somme de 5 000 euros. Elle n'apporte toutefois aucun élément de nature à établir qu'elle pratiquait certaines activités sportives ou récréatives particulières avant ses accidents. Par suite, elle n'est pas fondée à demander la réparation de préjudices moral, d'agrément après consolidation et de troubles dans les conditions d'existence. 11. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de ... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen l'a condamnée à verser à Mme B... la somme de 65 240 euros assortie des intérêts et de leur capitalisation. Compte tenu de ce qui a été dit ci-dessus, les conclusions d'appel incident de l'intéressée doivent également être rejetées. Sur les frais liés au litige : 12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de Mme B..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à la commune de ... de la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. En revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de ... le versement à Mme B..., qui n'est pas partie perdante pour l'essentiel, d'une somme de 1 500 euros au titre des mêmes frais. DÉCIDE : Article 1er : La requête de la commune de ... est rejetée. Article 2 : Les conclusions d'appel incident présentées par Mme B... sont rejetées. Article 3 : La commune de ... versera à Mme B... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de ... et à Mme C... B.... Délibéré après l'audience du 8 juillet 2022, à laquelle siégeaient : - M. Gaspon, président de chambre, - M. Coiffet, président-assesseur, - Mme Gélard, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 19 juillet 2022. La rapporteure, V. GELARDLe président, O. GASPON La greffière, I. PETTON La République mande et ordonne à la ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui la concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21NT00025
Cours administrative d'appel
Nantes
CAA de LYON, 7ème chambre, 13/07/2022, 21LY00382, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 27 juillet 2018 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande d'allocation de pension militaire d'invalidité. Par un jugement n° 1908935 du 9 décembre 2020, le tribunal a rejeté sa demande. Procédure devant la cour Par une requête et un mémoire enregistrés les 8 février 2021 et 26 aout 2021, Mme B..., représentée par Me Moumni, demande à la cour, le cas échéant, après avoir ordonné une expertise : 1°) d'annuler ce jugement et la décision susmentionnée ; 2°) d'enjoindre au ministre des armées de la rétablir dans ses droits, dans le délai de deux mois à compter de l'arrêt et sous astreinte de 500 euros par jour de retard ; 3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 4 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Elle soutient que : - la comitialité avec crises généralisées récidivantes résulte d'agressions sexuelles subies pendant son service depuis 2009 ; - les séquelles d'entorse récidivante de la cheville droite sont imputables à des blessures subies en service le 3 puis le 6 avril 2009 ; l'absence d'une deuxième entorse sur le livret médical et de rapport circonstancié ne saurait faire présumer qu'elle a été contractée hors du service. Par des mémoires enregistrés les 26 juillet 2021 et 7 avril 2022 (ce dernier non communiqué), la ministre des armées conclut au rejet de la requête. Elle soutient qu'aucun moyen de la requête n'est fondé. Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 19 mai 2021. Par une ordonnance du 18 mars 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 8 avril 2022. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Djebiri, première conseillère ; - et les conclusions de M. Chassagne, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. Mme A... B..., née en 1983, s'est engagée dans la gendarmerie nationale, le 3 mars 2009. Le 20 mai 2016, elle a sollicité le bénéfice d'une pension militaire d'invalidité pour, d'une part, des séquelles d'entorse récidivante de la cheville droite caractérisées par une diminution modérée de la flexion dorsale et un appui douloureux à la marche, d'autre part, une maladie épileptique. Mme B... relève appel du jugement du 9 décembre 2020 qui a rejeté sa demande d'annulation du refus que lui a opposé la ministre des armées, le 27 juillet 2018. 2. Aux termes de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, applicable à la date de la demande de Mme B... : " Ouvrent droit à pension : 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; 2° Les infirmités résultant de maladies contractées par le fait ou à l'occasion du service (...) ". Aux termes de l'article L. 3 du même code : " Lorsqu'il n'est pas possible d'administrer ni la preuve que l'infirmité ou l'aggravation résulte d'une des causes prévues à l'article L. 2, ni la preuve contraire, la présomption d'imputabilité au service bénéficie à l'intéressé (...) La présomption définie au présent article s'applique exclusivement aux constatations faites (...) soit au cours d'une expédition déclarée campagne de guerre, soit pendant le service accompli par les militaires pendant la durée légale (...) ". Aux termes de l'article L. 4 : " Les pensions sont établies d'après le degré d'invalidité. / Sont prises en considération les infirmités entraînant une invalidité égale ou supérieure à 10 % (...) ". 3. La situation de Mme B... ne relevant pas de l'un des cas de présomption d'imputabilité envisagés par l'article L. 3 précité, le lien de causalité entre ses infirmités et le service doit être prouvé. Sur l'infirmité résultant des blessures à la cheville droite : 4. Il résulte de l'instruction que Mme B... a contracté deux entorses, l'une en service, le 6 avril 2009, lors d'une séance d'entraînement, l'autre en dehors du service, en septembre 2009. Dès lors qu'est rapportée la preuve de l'imputabilité au service de la blessure initiale, la part de cause étrangère au service, à savoir celle de septembre 2009, ne permet d'écarter l'imputabilité au service que si cette cause étrangère a été déterminante dans l'apparition de la pathologie dont il est demandé l'indemnisation des séquelles. Or, aucun élément du rapport d'expertise médicale ne permet d'attribuer les séquelles imputables respectivement à chacune de ces accidents, dont les effets cumulés aboutissent à la préconisation d'un taux d'invalidité non contesté de 10 %. Il suit de là que la part imputable au second accident ne peut être regardée comme ayant eu un effet déterminant dans l'apparition de l'infirmité dont souffre Mme B... et que doit lui être attribué de ce chef un taux de 10 % ouvrant droit à pension en vertu de l'article L. 4 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre et du guide-barème désormais inséré à l'annexe 2 de ce code. Sur l'infirmité résultant de l'épilepsie : 5. En deuxième lieu, il ressort de l'avis rendu le 20 juin 2018 par la commission consultative médicale, que Mme B... a présenté une crise d'épilepsie inaugurale de type tonico-clonique le 19 octobre 2012. Le guide-barème, prévu à l'article L. 125-3 du code des pension militaires d'invalidité et des victimes de guerre, et désormais codifié à l'annexe 2 de ce code, distingue trois catégories d'épilepsie : crise généralisée, crise unilatérale et crise partielle ou à prédominance unilatérale. Il résulte de l'instruction, notamment des compte-rendu médicaux établis par des praticiens en décembre 2018 que Mme B... souffre d'une épilepsie généralisée d'origine idiopathique, donc étrangère à tout traumatisme. Ainsi, en l'absence de preuve de lien entre l'apparition ou l'aggravation de cette maladie et les sévices sexuelles dont l'intéressée soutient avoir été victime en service, cette infirmité ne saurait donner lieu à l'attribution d'un taux d'invalidité en application de la rubrique du guide-barème inséré à l'annexe 2 du code, consacrée à l'épilepsie généralisée. 6. Il résulte de ce qui précède que Mme B... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté sa demande d'attribution de pension militaire d'invalidité au titre des séquelles affectant sa cheville droite. En revanche, elle n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal a rejeté le surplus de sa demande. Il y a donc lieu d'annuler dans cette mesure, le jugement attaqué et la décision de refus de pension du 20 mai 2016 et d'enjoindre au ministre des armées d'attribuer à Mme B..., dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, une pension militaire d'invalidité au taux de 10 % à compter du 20 mai 2016 et de liquider le rappel de ses droits. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de prononcer d'astreinte. 7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, de mettre à la charge de l'État le versement à Me Moumni d'une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, sous réserve qu'il renonce à percevoir la part contributive de l'État à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement n° 1908935 du 9 décembre 2020 du tribunal administratif de Lyon est annulé en tant qu'il a rejeté la demande d'annulation de la décision ministérielle du 27 juillet 2018 refusant une pension militaire d'invalidité à Mme B... au taux de 10 % pour son infirmité à la cheville droite. Article 2 : La décision du 27 juillet 2018 par laquelle la ministre des armées a refusé une pension militaire d'invalidité à Mme B... est annulée en tant qu'elle refuse à Mme B... l'attribution d'une pension au taux de 10 % au titre de son infirmité à la cheville droite. Article 3 : Il est enjoint au ministre des armées d'attribuer à Mme B... une pension militaire d'invalidité au taux de 10 % à compter du 20 mai 2016 et de liquider le rappel de ses droits, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Article 4 : L'État versera à Me Moumni une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve qu'il renonce à percevoir la part contributive de l'État à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée. Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté. Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre des armées. Délibéré après l'audience du 23 juin 2022 à laquelle siégeaient : M. Arbaretaz, président ; M. Seillet, président assesseur ; Mme Djebiri, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 juillet 2022. La rapporteure, C. Djebiri Le président, Ph. Arbaretaz La greffière, A. Le Colleter La République mande et ordonne au ministre des armées, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition, La greffière, N° 21LY00382 2 al
Cours administrative d'appel
Lyon
CAA de MARSEILLE, 4ème chambre, 12/07/2022, 21MA04316, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision du 18 mars 2019 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande de pension militaire d'invalidité pour l'infirmité dénommée " acouphènes avec altérations auditives suite à un foudroiement de l'avion en vol, au cours d'une mission de guerre le 3 février 1962, et crises de vertiges postérieures à 1989, avant et après la retraite militaire ", et d'ordonner à la ministre des armées la communication au tribunal, en application de l'article 11 du code de procédure civile, de son livret médical militaire, sous astreinte de 100 euros par jour de retard. Par un jugement n° 1911516 du 21 septembre 2021, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de M. C.... Procédure devant la Cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés le 4 novembre 2021 et le 4 avril 2022, M. C..., représenté par Me Fontes, demande à la Cour : 1°) de lui accorder l'aide juridictionnelle ; 2°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 21 septembre 2021 ; 3°) d'annuler la décision du 18 mars 2019 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande de pension militaire d'invalidité pour l'infirmité dénommée " acouphènes avec altérations auditives suite à un foudroiement de l'avion en vol, au cours d'une mission de guerre le 3 février 1962, et crises de vertiges postérieures à 1989, avant et après la retraite militaire " ; 4°) d'ordonner une expertise médicale pour déterminer si les troubles auditifs qu'il présente sont en lien avec le service ; 5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens. Il soutient que : - il prouve l'imputabilité au service de son infirmité en ce qu'il a consulté un médecin dès le 2 décembre 1980 pour des problèmes auditifs et le 7 juillet 2011 pour des vertiges ; - son affection nécessite une expertise médicale qu'il plaira au juge d'ordonner. M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 24 juin 2022. Par un mémoire en défense, enregistré le 17 juin 2022, le ministre des armées conclut au rejet de la requête, en faisant valoir que les moyens de M. C... ne sont pas fondés. Par ordonnance du 16 mai 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 17 juin 2022 à 12 heures. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - le code de justice administrative. La présidente de la Cour a désigné M. Michaël Revert, président assesseur, pour présider la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. A..., - et les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. M. C..., né le 31 janvier 1938, s'est engagé le 9 août 1957 et a été rayé des cadres le 1er février 1990. Il a demandé le 23 août 2017 le bénéfice d'une pension militaire d'invalidité pour l'infirmité dénommée " acouphènes avec altérations auditives suite à un foudroiement de l'avion en vol, au cours d'une mission de guerre le 3 février 1962, et crises de vertiges postérieures à 1989, avant et après la retraite militaire ". Par un jugement du 21 septembre 2021, dont M. C... relève appel, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 18 mars 2019 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande de pension militaire d'invalidité. 2. Aux termes de l'article L. 121-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, en vigueur à la date de la demande de pension : " Ouvrent droit à pension : / 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service (...) ". Aux termes de l'article L. 121-2 du même code : " Lorsque la preuve que l'infirmité ou l'aggravation résulte d'une des causes mentionnées à l'article L. 121-1 ne peut être apportée, ni la preuve contraire, la présomption d'imputabilité au service bénéficie à l'intéressé à condition : 1° S'il s'agit de blessure, qu'elle ait été constatée : a) Soit avant la date du renvoi du militaire dans ses foyers ; b) Soit, s'il a participé à une des opérations extérieures mentionnées à l'article L. 4123-4 du code de la défense, avant la date de son retour sur son lieu d'affectation habituelle ; 2° S'il s'agit d'une maladie, qu'elle ait été constatée après le quatre-vingt-dixième jour de service effectif et avant le soixantième jour suivant l'une des dates mentionnées au 1°. (...) La présomption définie au présent article s'applique exclusivement, soit aux services accomplis en temps de guerre, au cours d'une expédition déclarée campagne de guerre ou en opération extérieure, soit au service accompli par les militaires pendant la durée légale du service national, les constatations étant faites dans les délais prévus aux précédents alinéas. Dans tous les cas, la filiation médicale doit être établie entre la blessure ou la maladie ayant fait l'objet de la constatation et l'infirmité invoquée. ". Et aux termes de l'article L. 121-2-3 de ce code : " (...) la filiation médicale doit être établie entre la blessure ou la maladie ayant fait l'objet de la constatation et l'infirmité invoquée. ". Pour l'application de ces dispositions, une infirmité doit être regardée comme résultant d'une blessure lorsqu'elle trouve son origine dans une lésion soudaine, consécutive à un fait précis de service, constatée dans les conditions qu'elles prévoient. 3. D'une part, il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise médicale établi le 23 octobre 2018 par le médecin oto-rhino-laryngologiste mandaté par l'administration, que M. C... présente une hypoacousie bilatérale et des acouphènes permanents, qu'il impute au foudroiement de l'avion le transportant le 3 février 1962 au départ d'Alger. Mais si l'extrait du carnet de vol produit au dossier d'instance mentionne ce foudroiement de l'avion le 3 février 1962, ni cette pièce ni aucun autre élément du dossier militaire de M. C... ne constatent un traumatisme sonore avant le renvoi du militaire dans ses foyers ou dans les conditions temporelles prévues au 2° de l'article L. 121-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre. Il suit de là que M. C... n'est pas fondé à se prévaloir de la présomption d'imputabilité au service prévue à l'article L. 121-2 du code, et doit donc apporter la preuve de l'existence d'une relation directe et certaine entre l'origine de l'infirmité qu'il invoque et une blessure reçue, un accident ou une maladie contractée par le fait du service. 4. D'autre part, si, ainsi qu'il a été dit au point précédent, l'avion dans lequel avait pris place M. C... le 3 février 1062 a subi un foudroiement en vol lors d'une mission de guerre, il n'a fait valoir ou constater, auprès de sa hiérarchie ou des services médicaux, aucun traumatisme sonore après cet événement, son livret militaire médical ne faisant apparaître aucune inscription de traumatisme sonore identifié, ni aucun constat de perte auditive. L'allégation de M. C... selon laquelle, dès après l'accident de 1962, il a souffert d'acouphènes mais s'est abstenu sciemment d'en faire état à sa hiérarchie, afin d'éviter sa réforme en qualité de pilote, n'est assortie d'aucun commencement de preuve, alors que son bilan oto-rhino-laryngologique du 22 novembre 1970 ne révélait aucune anomalie. En affirmant prouver l'imputabilité au service de ses infirmités, par le fait qu'il a consulté un médecin dès le 2 décembre 1980 pour des problèmes auditifs et le 7 juillet 2011 pour des vertiges, sans même d'ailleurs alléguer qu'à ces occasions auraient été diagnostiqués une hypoacousie et des acouphènes, M. C... ne rapporte pas la preuve, qui pourtant lui incombe, par ces seules consultations médicales, réalisées respectivement 18 ans et 49 ans après les circonstances que l'intéressé présente comme le fait générateur, d'une relation directe et certaine entre ce fait de service et ces infirmités. 5. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'ordonner une mesure d'expertise, M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande. Sa requête d'appel doit donc être rejetée, y compris les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. D É C I D E : Article 1er : La requête de M. C... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C..., à Me Fontes et au ministre des armées. Délibéré après l'audience du 5 juillet 2022, où siégeaient : - M. Revert, président, - M. Ury, premier conseiller, - Mme Renault, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 12 juillet 2022. N° 21MA043162
Cours administrative d'appel
Marseille
CAA de LYON, 7ème chambre, 13/07/2022, 20LY03466, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler la décision du 28 septembre 2018, par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande de révision de la pension militaire d'invalidité qui lui est attribuée. Par un jugement n° 1902159 lu le 1er octobre 2020, le tribunal a rejeté sa demande. Procédure devant la cour Par une requête et un mémoire enregistrés les 26 novembre 2020 et 25 juin 2021, M. B..., représenté par Me Nury, demande à la cour, le cas échéant, après avoir ordonné une expertise : 1°) d'annuler ce jugement et la décision susmentionnée ; 2°) de rappeler à l'administration son droit à l'attribution d'un taux de 55 % conformément à ce qui a été jugé par tribunal des pensions militaires, le 16 juillet 2015 ; 3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - la décision est erronée quant au taux qui continuera de lui être servi (50 %) alors que le taux a été révisé à 55 % suite au jugement du 16 juillet 2015 ; - la décision ne se fonde que sur sa seconde pathologie à la jambe, alors que sa demande n'était pas restreinte à celle-ci et que sa colopathie devait être prise en compte pour déterminer l'aggravation de ses séquelles. Par des mémoires enregistrés les 3 mai et 8 septembre 2021, la ministre des armées conclut au rejet de la requête. Elle soutient qu'aucun moyen de la requête n'est fondé. M B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 12 mai 2021. Par une ordonnance du 8 septembre 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 15 octobre 2021. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Djebiri, première conseillère ; - et les conclusions de M. Chassagne, rapporteur public ; Considérant ce qui suit : 1. M. B..., qui a servi dans l'armée de terre du 7 janvier 1958 au 16 mai 1960, a contracté une colopathie et a été blessé par balle à la jambe au cours de son service en Algérie. Par jugement du tribunal des pensions militaires de Clermont-Ferrand du 16 juillet 2015, le taux de sa pension militaire d'invalidité a été fixé 55% et au visa de ce jugement, la ministre des armées lui a, par arrêté du 9 novembre 2015, attribué une pension, à titre principal, pour une colopathie au taux de 40 % et, à titre secondaire, pour les séquelles d'une plaie à la cuisse droite, au taux de " 10 + 5 % ". Le 20 décembre 2016, il a demandé la révision de cette pension en raison d'une aggravation de son état rendant difficile la station debout. Par décision du 28 septembre 2018, la ministre des armées a rejeté sa demande. Il relève appel du jugement par lequel le tribunal a rejeté sa demande d'annulation de cette décision. 2. En premier lieu, dans sa décision du 28 septembre 2018, la ministre des armées s'est bornée à rappeler le taux de sa pension militaire d'invalidité fixée au taux de 50 %, le 9 novembre 2015. Cette mention est sans incidence sur la décision de refus de révision de la pension, seule en litige. Le moyen tiré de la violation de l'autorité de chose jugée doit, dès lors, être écarté comme inopérant. 3. En second lieu, le droit à pension est destiné à réparer toutes les conséquences des faits de service dommageables telles qu'elles se révèlent par suite de l'évolution physiologique, pour autant qu'aucune cause étrangère, telle qu'une affection distincte de l'affection pensionnée, ne vienne, pour sa part, aggraver l'état de l'intéressé. 4. D'une part, aux termes de l'article L. 121-4 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " Les pensions sont établies d'après le taux d'invalidité résultant de l'application des guides barèmes mentionnés à l'article L. 125-3 ". Aux termes de l'article L. 121-5 : " La pension est concédée : 1° Au titre des infirmités résultant de blessures, si le taux d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse 10 % ; 2° Au titre d'infirmités résultant de maladies associées à des infirmités résultant de blessures, si le taux global d'invalidité atteint ou dépasse 30 % ; 3° Au titre d'infirmités résultant exclusivement de maladie, si le taux d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse : a) 30 % en cas d'infirmité unique ; b) 40 % en cas d'infirmités multiples. / Aucune pension n'est concédée en deçà d'un taux d'invalidité de 10 % " 4. D'autre part, aux termes de l'article L. 125-3 du même code : " Le taux de la pension définitive ou temporaire est fixé, dans chaque grade, jusqu'au taux de 100 %, par référence au taux d'invalidité apprécié de 5 en 5 (...) L'indemnisation des infirmités est fondée sur le taux d'invalidité reconnu à celles-ci en application des dispositions d'un guide-barème portant classification des infirmités d'après leur gravité (...) ". Le guide-barème auquel se réfère l'article L. 125-3 précité du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre est désormais inséré à l'annexe 2 de ce code. 5. Or, la rubrique amibiase du titre XVI du guide-barème, qui attribue au grade intermédiaire qui est celui de M. B..., un taux compris entre 40 et 60 %, recense parmi les symptômes caractérisant cette affection un état de faiblesse générale de l'organisme, non pas des douleurs articulaires ou orthopédiques qui rendraient la station debout pénible, ce symptôme étant également absent du tableau clinique de la rubrique dédiée au grade supérieur. Il suit de là qu'en admettant même, ainsi que le soutient M. B..., qu'il ait entendu demander une révision de sa pension à raison de l'évolution de son infirmité principale, les symptômes dont il fait état ne sauraient s'y rattacher et ouvrir droit à révision, tandis qu'il résulte de l'expertise médicale du 28 février 2018, non sérieusement contestée, que les séquelles de la blessure à la jambe n'ont pas évolué, ce qui exclut toute révision de ce chef. 6. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise, M. B... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté sa demande d'annulation de la décision ministérielle du 28 septembre 2018 ayant rejeté sa demande de révision de pension militaire d'invalidité. Il suit de là que les conclusions de sa requête tendant aux mêmes fins doivent être rejetées ainsi que, par voie de conséquence, les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre des armées. Délibéré après l'audience du 23 juin 2022 à laquelle siégeaient : M. Arbarétaz, président de chambre ; M. Seillet, président assesseur ; Mme Djebiri, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 juillet 2022. La rapporteure, C. DjebiriLe président, Ph. Arbarétaz La greffière, A. Le Colleter La République mande et ordonne au ministre des armées, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition, La greffière, N° 20LY03466 2 al
Cours administrative d'appel
Lyon
CAA de BORDEAUX, 2ème chambre, 07/07/2022, 19BX04082, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : M. C... B... a contesté devant le tribunal des pensions militaires de la Vienne la décision du 12 octobre 2017 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande de pension militaire d'invalidité pour l'infirmité " arthrose fémoro-tibiale du genou gauche : flexion complète impossible, amyotrophie, pas d'hydarthrose ". Par un jugement avant dire droit du 11 février 2019, le tribunal des pensions militaires de la Vienne a ordonné une expertise médicale. Par un arrêt du 10 juillet 2019, la cour régionale des pensions de Poitiers a réformé ce jugement en ce qui concerne la définition de la mission d'expertise. Par une ordonnance n° 1902722 du 2 mars 2020, le président du tribunal administratif de Poitiers a transmis à la cour administrative d'appel de Bordeaux le dossier de la demande de M. B.... L'expert a déposé son rapport le 16 décembre 2021. Par un mémoire enregistré le 16 février 2022, M. B..., représenté par la SCP KPL Avocats, demande à la cour : 1°) d'annuler la décision de la ministre des armées du 12 octobre 2017 ; 2°) d'enjoindre à la ministre des armées de procéder à la liquidation de ses droits à pension en tenant compte de son infirmité au taux de 10 % à compter du 21 juillet 2014, avec intérêts au taux légal à compter de cette date, dans un délai de trois mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir. Il soutient que l'expert a conclu que la chondropathie fémoro-tibiale débutante qu'il présentait antérieurement à son accident de service du 9 janvier 2014 a été dolorisée et objectivement aggravée par la lésion ligamentaire consécutive à cet accident, et a retenu un taux de 15 % dont 10 % imputables à l'accident de service. Ainsi, il a droit à une pension au taux de 10 % avec intérêts au taux légal à compter du 21 juillet 2014, date de réception de sa demande. Par ordonnance du 21 février 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 21 avril 2022. Un mémoire présenté par la ministre des armées a été enregistré le 22 avril 2022. M. B... a été admis à l'aide juridictionnelle totale par une décision du 2 septembre 2021. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code civil ; - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 ; - le décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme A..., - et les conclusions de Mme Gallier, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. M. B..., entré dans la gendarmerie le 23 avril 1991 et radié des contrôles le 1er août 2014 au grade de gendarme, a présenté le 21 juillet 2014 une demande de pension militaire d'invalidité pour l'infirmité " arthrose fémoro-tibiale du genou gauche : flexion complète impossible, amyotrophie, pas d'hydarthrose ". Par une décision du 12 octobre 2017, la ministre des armées a rejeté cette demande au motif que le taux d'invalidité de 15 % de l'infirmité était imputable à hauteur de moins de 10 % à un accident survenu en service le 9 janvier 2014. M. B... a contesté cette décision devant le tribunal des pensions de la Vienne, lequel a ordonné une expertise par un jugement avant dire droit du 11 février 2019. La ministre des armées a relevé appel de ce jugement et M. B... a présenté un appel incident relatif à la mission d'expertise. Par un arrêt du 10 juillet 2019, la cour régionale des pensions de Poitiers a réformé ce jugement en modifiant la mission d'expertise. L'affaire a été transférée à la juridiction administrative en application de la loi du 13 juillet 2018 susvisée. Par une ordonnance du 2 mars 2020, le président du tribunal administratif de Poitiers a, sur le fondement des dispositions de l'article R. 351-3 du code de justice administrative, transmis le dossier de la demande de M. B... à la cour. Cette ordonnance n'ayant pas été contestée, la cour est saisie de l'ensemble du litige. 2. Aux termes de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, applicable à la date de la demande de pension : " Ouvrent droit à pension : 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; / (...). " Aux termes de l'article L. 4 du même code : " Les pensions sont établies d'après le degré d'invalidité. Sont prises en considération les infirmités entraînant une invalidité égale ou supérieure à 10 %. Il est concédé une pension : / ° 1° Au titre des infirmités résultant de blessures, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse 10 % ; / (...). " 3. Il résulte de l'instruction que le 9 janvier 2014, M. B..., qui présentait une arthrose débutante du genou gauche sous forme de chondropathie diagnostiquée en 2011, a été victime d'un traumatisme en torsion du genou gauche dans les escaliers en quittant son logement de service pour se rendre sur son lieu de travail. Cet accident a été à l'origine d'une lésion ligamentaire qui a laissé comme séquelle, en l'absence d'immobilisation initiale, une laxité sans ressaut se traduisant par une instabilité du genou. L'expert précise que la chondropathie fémoro-tibiale interne du genou gauche constitutive d'un état antérieur a été dolorisée et objectivement aggravée par la lésion ligamentaire. Il évalue à 10 % le taux d'invalidité correspondant à la laxité ligamentaire chronique consécutive à l'accident du 9 janvier 2014, et à 5 % le taux imputable à l'état antérieur. Par suite, M. B... est fondé à demander l'annulation de la décision de la ministre des armées du 12 octobre 2017. 4. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. / La juridiction peut également prescrire d'office cette mesure. " Il résulte de ce qui a été dit au point précédent que le ministre des armées est tenu de faire droit à la demande de M. B... tendant à la prise en compte de l'infirmité afférente au genou gauche au taux de 10 % à compter du 21 juillet 2014, date d'enregistrement de la demande. Par suite, il y a lieu de lui enjoindre de procéder à la liquidation des droits à pension correspondants dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt, y compris les intérêts au taux légal à compter de la même date. 5. Les frais d'expertise, liquidés et taxés à la somme de 960,50 euros par une ordonnance de la présidente de la cour du 19 janvier 2022, doivent mis à la charge définitive de l'Etat. DÉCIDE : Article 1er : La décision du 12 octobre 2017 par laquelle la ministre des armées a rejeté la demande de pension militaire d'invalidité de M. B... est annulée. Article 2 : Il est enjoint au ministre des armées de procéder à la liquidation des droits à pension de M. B... au titre de l'infirmité du genou gauche au taux de 10 % à compter du 21 juillet 2014, avec les intérêts au taux légal à compter du 21 juillet 2014. Article 3 : Les frais d'expertise, liquidés et taxés à la somme de 960,50 euros, sont mis à la charge définitive de l'Etat. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre des armées. Copie en sera adressée à l'expert. Délibéré après l'audience du 28 juin 2022 à laquelle siégeaient : Mme Catherine Girault, présidente, Mme Anne Meyer, présidente-assesseure, Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 juillet 2022. La rapporteure, Anne A... La présidente, Catherine GiraultLa greffière, Virginie Guillout La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. 2 N° 19BX04082
Cours administrative d'appel
Bordeaux
CAA de BORDEAUX, 6ème chambre, 13/07/2022, 20BX00089, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 24 septembre 2014 par lequel le directeur chargé de la direction des résidents à l'étranger et des services généraux l'a admis à faire valoir ses droits à la retraite pour invalidité, en tant qu'il ne reconnaît pas l'imputabilité au service de sa maladie. Par un jugement n° 1801616 du 27 novembre 2019, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 3 janvier 2020, M. D..., représenté par Me Rabbé, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 27 novembre 2019 ; 2°) d'annuler l'arrêté du 24 septembre 2014 en tant que son invalidité n'a pas été reconnue imputable au service ; 3°) d'enjoindre au ministre de l'économie et des finances de reconnaître l'imputabilité au service de sa mise à la retraite pour invalidité et de lui verser une rente viagère d'invalidité avec effet rétroactif à compter de sa mise à la retraite, dans un délai d'un mois sous astreinte de 150 euros par jour de retard ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 950 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les dépens. Il soutient que l'arrêté est entaché d'une erreur d'appréciation. Par un mémoire en défense, enregistré le 5 novembre 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête. Il fait valoir, en se référant à ses écritures de première instance, à titre principal, que la demande de M. D... est tardive et que les conclusions à fin d'injonction sont irrecevables, et à titre subsidiaire, qu'aucun des moyens soulevés par M. D... n'est fondé. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. C... B..., - les conclusions de M. Axel Basset, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. M. D..., agent administratif principal des finances publiques, a été placé en congé de longue durée entre janvier 2009 et janvier 2014 et a demandé, en décembre 2013, à être admis à faire valoir ses droits à la retraite pour invalidité. Par arrêté du 24 septembre 2014, il a été radié des cadres à compter du 16 janvier 2014 et admis à la retraite pour invalidité. Par un jugement du 27 novembre 2019 dont M. D... relève appel, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de cet arrêté en tant qu'il ne reconnaît pas l'imputabilité au service de la maladie le mettant dans l'incapacité d'exercer ses fonctions. 2. L'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite dispose : " Le fonctionnaire civil qui se trouve dans l'incapacité permanente de continuer ses fonctions en raison d'infirmités résultant de blessures ou de maladie contractées ou aggravées (...) en service (...) et qui n'a pu être reclassé dans un autre corps en application de l'article 63 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précitée peut être radié des cadres par anticipation soit sur sa demande, soit d'office à l'expiration d'un délai de douze mois à compter de sa mise en congé si cette dernière a été prononcée en application des 2° et 3° de l'article 34 de la même loi ou à la fin du congé qui lui a été accordé en application du 4° du même article. (...) ". 3. Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service. 4. Il ressort des pièces du dossier que M. D... a été placé en congé de longue durée du 16 janvier 2009 au 15 janvier 2014. Lors de sa mise à la retraite pour invalidité, il a demandé que cette invalidité soit reconnue imputable au service. Sollicitée à deux reprises, la commission départementale de réforme a conclu, les 20 juin 2014 et 27 février 2015, au vu à chaque fois d'un rapport d'expertise, que la pathologie de M. D... n'était pas imputable au service. 5. M. D..., qui souffre d'un état dépressif majeur d'intensité sévère avec délire de persécution, soutient qu'il a connu en 2008 des conflits relationnels et a été victime de faits de harcèlement de la part de deux collègues qui n'ont fait l'objet d'aucune sanction alors que lui-même a été muté. Toutefois, les certificats du médecin psychiatre qui le suit depuis 2009 et qui se bornent à faire état des dires de l'intéressé ne sont pas suffisants pour établir un contexte professionnel pathogène et les affirmations de l'intéressé ne sont corroborées par aucun autre élément. Par suite, le directeur chargé de la direction des résidents à l'étranger et des services généraux a pu légalement estimer que l'affection dont souffrait M. D... ne présentait pas un lien direct avec l'exercice de ses fonctions ou avec ses conditions de travail. 6. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir opposées en défense, que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 septembre 2014 en tant qu'il ne reconnaît pas l'imputabilité au service de sa maladie. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, d'astreinte ainsi que celles tendant, d'une part, au paiement des dépens du procès, lequel au demeurant n'en comporte aucun, et, d'autre part, à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées. DECIDE : Article 1er : La requête de M. D... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Délibéré après l'audience du 4 juillet 2022 à laquelle siégeaient : Mme Karine Butéri, présidente, M. Olivier Cotte, premier conseiller, Mme Caroline Gaillard, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 13 juillet 2022. Le rapporteur, Olivier B... La présidente, Karine Butéri La greffière, Catherine Jussy La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 20BX00089
Cours administrative d'appel
Bordeaux
CAA de LYON, 7ème chambre, 13/07/2022, 21LY03885
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du 3 juillet 2018 par laquelle le ministre de la défense a rejeté sa demande d'allocation de pension militaire d'invalidité. Par jugement n° 1907313 du 18 novembre 2021, le tribunal a rejeté sa demande. Procédure devant la cour Par requête, enregistrée le 6 décembre 2021, M. B..., représenté par Me Berlioux, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement et la décision susmentionnée ; 2°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - il a été victime civile des deux guerres de Tchétchénie et les pathologies dont il souffre ont été causées par ces actes de guerre et remplit les conditions de l'article L. 113-13 du code des pensions militaires d'invalidité pour obtenir une pension ; - dès lors que la qualité de réfugié lui a été reconnue, il doit être assimilé dans ses droits à un français en application de l'article 24 de la convention de Genève et de son protocole additionnel, sans que puisse lui être opposée l'antériorité de son infirmité à l'égard de sa qualité ou de sa demande de reconnaissance de la qualité de réfugié. Par mémoire, enregistré le 1er avril 2022, la ministre des armées conclut au rejet de la requête. Elle soutient qu'aucun moyen de la requête n'est fondé. M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 6 avril 2022. Par ordonnance du 18 mars 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 8 avril 2022. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la convention de Genève du 28 juillet 1951 et son protocole additionnel ; - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - la loi n° 86-1020 du 9 septembre 1986 relative à la lutte contre le terrorisme ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Djebiri, première conseillère ; - et les conclusions de M. Chassagne, rapporteur public ; Considérant ce qui suit : 1. M. B..., né en 1993 en Russie, est arrivé en France en 2010 et y a obtenu le statut de réfugié. Victime civile d'actes de guerre et de terrorisme au cours des deux conflits de Tchétchénie, de 1994 et 2006, ainsi que de violences policières en 2008, il a demandé l'allocation d'une pension d'invalidité à raison des infirmités subies dans son pays d'origine. M. B... relève appel du jugement du 18 novembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande d'annulation de la décision du ministre des armées du 3 juillet 2018 lui refusant cette pension. 2. D'une part, aux termes de l'article L. 113-13 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " Les personnes mentionnées à l'article 9 de la loi n° 86-1020 du 9 septembre 1986 (...) ont droit à pension dans les conditions prévues pour les victimes civiles de guerre. Les présentes dispositions sont applicables aux actes de terrorisme commis depuis le 1er janvier 1982 ". Aux termes de l'article 9 de la loi n° 86-1020 : " Les victimes d'actes de terrorisme commis sur le territoire national et les personnes de nationalité française ayant leur résidence habituelle en France, ou résidant habituellement hors de France et régulièrement immatriculées auprès des autorités consulaires, victimes à l'étranger d'un acte de terrorisme, sont indemnisées dans les conditions définies au présent article (...) ". 3. D'autre part, aux termes de l'article 24 de la convention de Genève susvisée : " 1. Les États contractants accorderont aux réfugiés résidant régulièrement sur leur territoire le même traitement qu'aux nationaux en ce qui concerne les matières suivantes (...) b) La sécurité sociale (les dispositions légales relatives (...) à l'invalidité (...), ainsi qu'à tout autre risque qui, conformément à la législation nationale, est couvert par un système de sécurité sociale) (...) ". 4. En vertu de ces dispositions combinées, un réfugié ayant obtenu ce statut en France et y résidant habituellement est éligible, comme tout ressortissant français, à une pension d'invalidité s'il a été victime d'actes de terrorisme commis à l'étranger et en a gardé des infirmités. Toutefois, le caractère recognitif du statut de réfugié ne confère rétroactivement les droits attachés à ce statut qu'à la date d'arrivée de l'intéressé sur le territoire français. Cet effet recognitif ne saurait, en conséquence, ouvrir de droits au titre d'évènements survenus antérieurement à ladite date. 5. Or, les exactions qui ont provoqué les infirmités dont souffre M. B... ont été perpétrées antérieurement à l'arrivée en France de celui-ci en tant que demandeur d'asile. Il suit de là que l'effet recognitif qui s'attache à sa qualité de réfugié ne couvre pas les conséquences des violences qu'il a subies en 1994, 2006 et 2008. Ainsi, la ministre des armées a pu, sans méconnaître les dispositions citées aux points 2 et 3, lui refuser l'allocation d'une pension. 6. Enfin, le protocole additionnel dont se prévaut M. B... ne fait qu'ouvrir le statut de réfugié aux victimes de traitements inhumains survenus avant le 1er janvier 1957, date d'entrée en vigueur de la convention de Genève. Il est, en revanche, sans incidence sur l'étendue de l'effet recognitif du statut, une fois celui-ci obtenu. 7. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Il suit de là que les conclusions de sa requête tendant aux mêmes fins doivent être rejetées ainsi que, par voie de conséquence, les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre des armées. Délibéré après l'audience du 23 juin 2022 à laquelle siégeaient : M. Arbaretaz, président de chambre ; M. Seillet, président assesseur ; Mme Djebiri, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 juillet 2022. La rapporteure, C. Djebiri Le président Ph. Arbaretaz La greffière, A. Le Colleter La République mande et ordonne au ministre des armées, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition, La greffière, N° 21LY03885 2 ap
Cours administrative d'appel
Lyon
CAA de NANTES, 6ème chambre, 12/07/2022, 21NT03574, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du 28 juillet 2021 par laquelle la commission de recours de l'invalidité a rejeté sa demande d'attribution d'une pension militaire d'invalidité. Par une ordonnance n° 2104855 du 29 novembre 2021, le président du tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 16 décembre 2021, M. B..., représenté par Me Lizano, demande à la cour : 1°) d'annuler cette ordonnance du président du tribunal administratif de Rennes du 29 novembre 2021 ; 2°) d'ordonner une expertise judiciaire et de désigner un expert spécialisé en neurochirurgie aux fins de déterminer l'origine de l'hydrocéphalie dont il souffre ainsi que le taux d'invalidité résultant de cette pathologie ; 3°) à titre subsidiaire, de lui attribuer une pension militaire d'invalidité pour cette infirmité ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - ses moyens nouveaux sont recevables en appel ; - il n'existe aucune expertise judiciaire au dossier, de sorte qu'une telle mesure présente un caractère utile ; - l'hydrocéphalie constitue une évolution possible et classique de la méningite alors qu'aucune autre cause n'explique l'apparition de cette pathologie ; - en tout état de cause la méningite a joué un rôle essentiel dans la décompensation de l'hydrocéphalie dont il souffre de sorte qu'il est fondé à solliciter une pension militaire d'invalidité au titre de cette infirmité au regard des dispositions de l'article L. 121-2-1 du code des pensions militaires. Par un mémoire en défense, enregistré le 25 mars 2022, la ministre des armées conclut au rejet de la requête. Il soutient que la requête présentée en appel par M. B... est irrecevable. Vu les autres pièces du dossier. Vu le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme A..., - et les conclusions de Mme Malingue, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. Le 17 février 1962, alors qu'il accomplissait son service militaire, M. B... a contracté une méningite purulente aigue. En 2012, l'intéressé, alors âgé de 72 ans, a présenté des troubles de la marche. Opéré d'un schwannome en 2013, ses troubles neurologiques ont persisté. Le 8 décembre 2015, il a subi une dérivation ventriculo péritonéale afin de traiter l'hydrocéphalie chronique de l'adulte qui lui avait été diagnostiquée. A la suite de cette intervention, M. B... a retrouvé ses capacités à la marche mais conserve des troubles neurocognitifs et vésico-sphinctériens. Estimant que cette pathologie et ses conséquences invalidantes constituaient une complication cérébro-spinale de la méningite contractée en 1962, l'intéressé a présenté, le 2 novembre 2018, une demande de pension militaire d'invalidité au titre de cette infirmité. Par une décision du 18 février 2021, la ministre des armées a rejeté sa demande. Sur recours administratif préalable obligatoire, la commission de recours de l'invalidité a confirmé, le 28 juillet 2021, le rejet de sa demande de pension. M. B... relève appel de l'ordonnance du 29 novembre 2021, par laquelle le président du tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande pour irrecevabilité manifeste sur le fondement du 4° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative. Sur les conclusions de M. B... : 2. Le requérant sollicite à titre principal qu'une expertise judiciaire soit ordonnée. Il se prévaut des conclusions d'un neurologue qui, en 2014, s'était interrogé sur le fait qu'il avait pu développer insidieusement un tableau d'hydrocéphalie à la suite de la méningite contractée en 1962. Pour sa part, l'expert neurologue, désigné par la sous-direction des pensions, a écarté, dans son rapport du 12 novembre 2020, le lien entre l'hydrocéphalie chronique de l'adulte diagnostiquée en 2014 et le schwannome opéré en 2013, tout en évoquant, soit une hydrocéphalie primitive sans cause décelable, soit une " évolution possible, classique " de la méningite. Il a expressément indiqué qu'aucun élément ne pouvait formellement orienter, ni éliminer cette dernière hypothèse et que le lien entre ces deux pathologies était possible " sans certitude ". Pour justifier de la nécessité d'ordonner une nouvelle expertise, M. B..., n'apporte aucun autre élément, alors que cette pathologie peut résulter d'une simple évolution physiologique liée à l'âge. Par suite, le requérant n'établit pas l'utilité de l'expertise complémentaire qu'il sollicite. 3. M. B... demande, à titre subsidiaire, l'attribution d'une pension militaire d'invalidité au titre des infirmités qu'il a développées. Le requérant, à qui incombe la charge de la preuve, n'établit toutefois ni avoir conservé des séquelles de la méningite qu'il a contractée au cours de son service militaire en 1962, ni le lien entre l'hydrocéphalie diagnostiquée en 2014 et cette pathologie. Par suite, ces conclusions ne peuvent qu'être écartées. 4. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée par la ministre des armées, que M. B... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par l'ordonnance attaquée, le président du tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Sur les frais liés au litige : 5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à M. B... de la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre des armées. Délibéré après l'audience du 24 juin 2022, à laquelle siégeaient : - M. Gaspon, président de chambre, - M. Coiffet, président-assesseur, - Mme Gélard, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 12 juillet 2022. La rapporteure, V. GELARDLe président, O. GASPON La greffière, I. PETTON La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21NT03574
Cours administrative d'appel
Nantes