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CAA de LYON, , 30/09/2022, 22LY02046, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure Mme C... A... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Lyon, sur le fondement des dispositions de l'article R. 532-1 du code de justice administrative, de désigner un expert chargé de donner son avis sur l'imputabilité ou non au service de la pathologie initiale dont elle souffre au genou gauche et d'évaluer les préjudices résultant, d'une part, de la maladie professionnelle dont elle souffre au genou droit, d'autre part, de la pathologie dont elle souffre au genou gauche et, enfin, de l'accident de service dont elle a été victime le 14 janvier 2022 . Par une ordonnance n° 2203009 du 27 juin 2022, le juge des référés du tribunal administratif de Lyon a désigné comme expert le docteur D... B..., et lui a confié pour missions de : 1° - prendre connaissance des dossiers médicaux et de tous documents concernant Mme A..., détenus ou produits par les Hospices civils de Lyon et par l'intéressée ; convoquer et entendre les parties et tout sachant ; procéder à l'examen sur pièces du dossier médical de Mme A..., ainsi qu'à son examen clinique ; 2° - décrire l'état de santé de Mme A... en lien avec sa maladie professionnelle et son accident de service du 14 janvier 2022, faire l'historique de son évolution, préciser les causes de cet état de santé et dire si une pathologie préexistait à la maladie professionnelle ou à l'accident survenu le 14 janvier 2022 ; 3° - reprendre le dossier de Mme A... et recenser l'ensemble de celles par lesquelles les Hospices civils de Lyon ont admis l'imputabilité au service de la pathologie dont elle souffre au genou droit et de l'accident dont elle a été victime ; 4° - tant pour la maladie professionnelle que pour l'accident de service, proposer une date de consolidation de l'état physique de Mme A..., et évaluer l'importance et la durée du déficit fonctionnel temporaire, des souffrances physiques ou mentales endurées, du déficit fonctionnel permanent, du préjudice d'agrément et du préjudice sexuel, ou de tout autre préjudice extrapatrimonial dont celle-ci ferait état ; 5° - préciser le montant des dépenses de santé et des frais divers supportés jusqu'à la date de consolidation et évaluer la nature et le montant des dépenses de santé futures, le cas échéant, indiquer quels seront les besoins d'adaptation du logement et du véhicule de Mme A..., dire dans quelle mesure elle aura besoin de l'assistance d'une tierce personne ; indiquer dans quelle mesure ces soins sont imputables à sa maladie professionnelle ou à son accident de service du 14 janvier 2022 ; en cas de pluralité de causes, déterminer la part d'imputabilité de chacune ; 6° - évaluer chacun de ces préjudices, même en l'absence de lien de causalité, y compris partiel, avec la maladie professionnelle ou l'accident de service ; pour chacun d'entre eux, distinguer la part imputable à la maladie professionnelle ou l'accident de service de celle ayant pour origine toute autre cause ou pathologie, eu égard, notamment aux antécédents médicaux de l'intéressée ; 7° - de manière générale, donner toutes précisions et informations utiles permettant au tribunal de se prononcer sur l'importance du préjudice, ainsi que toute information utile à la solution du litige ; 8° - tenter de parvenir à un accord entre les parties, si possible. Procédure devant la cour Par une requête enregistrée le 8 juillet 2022, les Hospices civils de Lyon, représentés par Me Walgenwitz (SELARL Jean-Pierre et Walgenwitz), demandent à la cour : 1°) de réformer cette ordonnance ; 2°) d'impartir à l'expert une nouvelle mission ; 3°) de suspendre l'exécution de cette ordonnance. Ils soutiennent que : - il est nécessaire d'apprécier dans sa globalité la pathologie des deux genoux dont souffre Mme A... ; c'est à tort que le juge des référés a refusé de confier pour mission à l'expert de se prononcer sur l'imputabilité au service, ou non, de la pathologie au genou gauche, et l'évaluation des préjudices, au motif qu'il appartient le cas échéant au juge du fond de prononcer une mesure d'expertise avant-dire-droit ; la mesure d'expertise prononcée ne peut présenter un caractère d'utilité certaine pour les litiges en cours et à naître, et en particulier l'action indemnitaire en réparation des préjudices extrapatrimoniaux consécutifs à l'ensemble des pathologies, que si la mission de l'expert porte sur les pathologies des deux genoux ; ils risquent d'être condamnés au paiement d'une somme qu'ils ne doivent pas ; - en confiant à l'expert, au point 5 de son ordonnance, la mission de fixer l'ensemble des préjudices patrimoniaux de Mme A..., le juge des référés a commis une erreur de droit ; - compte tenu du risque de condamnation au paiement de sommes non dues, il y a lieu de faire application des dispositions de l'article R. 533-2 du code de justice administrative. Par un mémoire en défense enregistré le 27 septembre 2022, Mme C... A..., représentée par Me Bracq (SELARL Asterio), conclut : 1°) au rejet de la requête ; 2°) à la condamnation des Hospices civils de Lyon à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la demande est irrecevable concernant l'extension de la mission au genou gauche, qui a été rejetée par le juge des référés, conformément aux souhaits des Hospices civils de Lyon ; la pathologie au genou droit a été reconnue par l'administration comme maladie professionnelle, ainsi que l'accident de service du 14 janvier 2022 ; le juge des référés a fait droit à la demande des Hospices civils de Lyon concernant l'état antérieur, dont l'expert pourra tenir compte pour l'évaluation des préjudices ; - la demande n'est pas fondée ; les Hospices civils de Lyon ne sauraient remettre en cause la reconnaissance en tant que maladie professionnelle de la pathologie au genou droit ; la mission confiée à l'expert est habituelle et régulière. Vu l'ordonnance attaquée et les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ; - la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ; - le code de justice administrative. Considérant ce qui suit : Sur les conclusions des Hospices civils de Lyon tendant à la réformation de l'ordonnance litigieuse : 1. Aux termes de l'article R. 532-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, sur simple requête et même en l'absence d'une décision administrative préalable, prescrire toute mesure utile d'expertise ou d'instruction (...) ". 2. L'utilité d'une mesure d'instruction ou d'expertise qu'il est demandé au juge des référés d'ordonner sur le fondement des dispositions précitées doit être appréciée, d'une part, au regard des éléments dont le demandeur dispose ou peut disposer par d'autres moyens et, d'autre part, bien que ce juge ne soit pas saisi du principal, au regard de l'intérêt que la mesure présente dans la perspective d'un litige principal, actuel ou éventuel, auquel elle est susceptible de se rattacher. 3. Il résulte de l'instruction que par décision du 1er février 2021, non contestée et devenue définitive, le directeur général des Hospices civils de Lyon a reconnu imputable au service la pathologie au genou droit dont est atteinte Mme A..., aide-soignante principale. Par décision du 14 décembre 2021, la même autorité a refusé de considérer que la pathologie au genou gauche dont est atteinte l'intéressée soit reconnue comme maladie professionnelle. Mme A... a formé un recours au fond devant le tribunal administratif de Lyon, toujours pendant, afin de contester le rejet de sa demande de reconnaissance de l'imputabilité au service de cette seconde pathologie. Par décision du 17 février 2022, Mme A... a été placée en congé d'invalidité temporaire imputable au service suite à l'accident dont elle a été victime le 14 janvier 2022. 4. En premier lieu, s'agissant de la demande portant sur l'imputabilité ou non au service de la pathologie dont souffre Mme A... au genou gauche, et l'évaluation des préjudices en résultant, c'est à bon droit que le juge des référés a rejeté pour défaut d'utilité la demande sur ce point, après avoir considéré que, compte tenu des éléments d'ores et déjà en sa possession, et en particulier des certificats médicaux dont elle se prévaut, l'intéressée était en mesure de faire valoir ses prétentions devant le juge du fond et qu'aucune circonstance particulière ne conférerait à la mesure d'expertise sollicitée un caractère d'utilité différent de celui que le même juge pourra décider, le cas échéant, dans l'exercice de ses pouvoirs de direction et d'instruction. Si les Hospices civils de Lyon, qui s'étaient au demeurant opposés à cette demande devant le juge des référés du tribunal administratif de Lyon, soutiennent désormais en appel qu'il faudrait que l'expert se prononce, dans le cadre de la mission qui lui a été confiée par l'ordonnance litigieuse, sur l'imputabilité au service de cette pathologie, les éléments qu'ils invoquent ne permettent pas d'établir l'utilité de l'extension de la mission ainsi sollicitée. 5. En deuxième lieu, c'est sans commettre d'erreur de droit que le juge des référés du tribunal administratif de Lyon a fait droit à la demande de Mme A... concernant l'évaluation de l'ensemble des préjudices résultant de la maladie professionnelle et de l'accident de service dont elle a été victime, et défini les missions confiées à l'expert, à qui il appartient notamment de distinguer, pour chacun des préjudices en cause, la part imputable à la maladie professionnelle et à l'accident de service, de celle ayant d'autres origines, en particulier liées aux antécédents médicaux de l'intéressée. 6. Il résulte de ce qui précède que les Hospices civils de Lyon ne sont pas fondés à demander la réformation de l'ordonnance n° 2203009 du 27 juin 2022 du juge des référés du tribunal administratif de Lyon. Par voie de conséquence, leurs conclusions tendant à la suspension de l'exécution de cette ordonnance doivent également être rejetées. Sur les frais liés au litige : 7. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ". 8. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge des Hospices civils de Lyon, partie perdante à la présente instance, la somme de 1 500 euros, à verser à Mme A... sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. ORDONNE : Article 1er : La requête des Hospices civils de Lyon est rejetée. Article 2 : Les Hospices civils de Lyon verseront à Mme A... la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée aux Hospices civils de Lyon et à Mme C... A.... Copie en sera adressée au docteur D... B.... Fait à Lyon, le 30 septembre 2022. Le président, juge des référés, Jean-Yves Tallec La République mande et ordonne au préfet du Rhône en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition, La greffière, N° 22LY020462
Cours administrative d'appel
Lyon
CAA de NANTES, 6ème chambre, 11/10/2022, 21NT00280, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Par l'effet de la loi du 13 juillet 2018, le contentieux des pensions militaires d'invalidité a été transféré aux tribunaux administratifs. La requête de M. A... C... a été transférée et enregistrée au tribunal administratif de Rennes le 1er novembre 2019 sous le numéro 1905773. Par une saisine et un mémoire, enregistrés le 21 février 2018 et le 18 février 2020, M. C... a demandé à ce tribunal l'annulation de la décision du 20 octobre 2017 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande tendant à la révision de sa pension militaire d'invalidité. Par un jugement n°1905773 du 30 novembre 2020, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 1er février 2021, M. C..., représenté par Me Lemasson de Nercy, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rennes du 30 novembre 2020 ; 2°) d'annuler la décision du 20 octobre 2017 de la ministre des armées ; 3°) d'ordonner une nouvelle expertise médicale ; 4°) de revaloriser sa pension militaire au taux de 65 % ; 5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros, sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991. Il soutient que l'aggravation de son état de santé est imputable à son accident de service survenu le 20 juin 1957 et non à l'accident vasculaire cérébral dont il a été victime au cours du mois de mai 1995 et que les conclusions erronées de l'expertise médicale réalisée le 31 mars 2017 entachent d'illégalité la décision contestée. Par un mémoire en défense, enregistré le 17 mai 2021, la ministre des armées conclut au rejet de la requête. Elle soutient que la requête d'appel est irrecevable, et à titre subsidiaire, s'en rapporte à ses écritures de première instance. Par un courrier du 2 février 2021, M. C... a été invité à produire à la cour sous 15 jours le justificatif du dépôt de son dossier d'aide juridictionnelle. Ce courrier est resté sans réponse. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; - la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme B..., - les conclusions de Mme Malingue, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. Le 20 juin 1957, M. C... a été victime d'un accident de parachute lors de son service militaire en Algérie. Il s'est vu concéder, par un arrêté du 12 avril 1994, le bénéfice d'une pension militaire d'invalidité au taux de 55 % en raison d'un " syndrome douloureux vertébral dorsolombaire et cervical. Scoliose convexité gauche. Raideur du segment cervical. Limitation douloureuse de l'extension, mouvements de latéroflexion et rotation presque impossible. Arthrose vertébrale étagée. Rétrécissement des trous de conjugaison au niveau cervical. " Le 4 décembre 2015, M. C... a sollicité la révision de cette pension au motif que son état de santé s'était aggravé. Par une décision du 20 octobre 2017, la ministre des armées a rejeté sa demande en estimant que cette aggravation était en relation avec l'accident vasculaire cérébral dont il avait été victime au mois de mai 2015 et non avec l'accident de service survenu en 1957. M. C... a saisi le tribunal des pensions militaires d'Ille-et-Vilaine, lequel a transféré sa requête au tribunal administratif de Rennes devenu compétent. L'intéressé relève appel du jugement du 30 novembre 2020 par lequel le tribunal administratif a rejeté sa demande. Sur les conclusions à fin d'annulation : 2. Aux termes de l'article L. 154-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " Le titulaire d'une pension d'invalidité concédée à titre définitif peut en demander la révision en invoquant l'aggravation d'une ou plusieurs des infirmités en raison desquelles cette pension a été accordée. / Cette demande est recevable sans condition de délai. / La pension ayant fait l'objet de la demande est révisée lorsque le pourcentage d'invalidité résultant de l'infirmité ou de l'ensemble des infirmités est reconnu supérieur de 10 points par rapport au pourcentage antérieur./ Toutefois, l'aggravation ne peut être prise en considération que si le supplément d'invalidité est exclusivement imputable aux blessures et aux maladies constitutives des infirmités pour lesquelles la pension a été accordée./ La pension définitive révisée est concédée à titre définitif. ". 3. D'une part, s'il ne peut prétendre au bénéfice de la présomption légale d'imputabilité, le demandeur de la pension doit apporter la preuve de l'existence d'une relation certaine et directe de cause à effet entre l'aggravation qu'il invoque et les circonstances particulières du service à l'origine de l'affection. Cette preuve ne saurait résulter de la seule circonstance que l'infirmité soit apparue durant le service, ni d'une hypothèse médicale, ni d'une vraisemblance, ni d'une probabilité, aussi forte soit-elle, ni des conditions générales de service partagées par l'ensemble des militaires servant dans la même unité. 4. D'autre part, le droit à pension est destiné à réparer toutes les conséquences des faits de service dommageables telles qu'elles se révèlent par suite de l'évolution physiologique, pour autant qu'aucune cause étrangère, telle qu'une affection distincte de l'affection pensionnée, ne vienne, pour sa part, aggraver l'état de l'intéressé. Ainsi l'aggravation de l'infirmité initiale, si elle est seulement due au vieillissement, peut justifier une révision du taux de la pension. En revanche, si le vieillissement cause une nouvelle infirmité, distincte de l'infirmité pensionnée, qui contribue à l'aggravation de celle-ci, les dispositions précitées de l'article L. 154-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre font obstacle à cette révision, dès lors que l'aggravation est due à une cause étrangère à l'infirmité pensionnée. 5. En premier lieu, pour examiner la demande de révision de la pension militaire d'invalidité de M. C..., une nouvelle expertise médicale a été menée à bien. Le 31 mars 2017, l'expert a constaté que le syndrome vertébral dorso-lombaire et cervical de l'intéressé était " sans aggravation significative ", dès lors que l'examen clinique était superposable avec celui de la précédente expertise effectuée le 18 avril 1996. Cet expert a souligné l'existence d'une pathologie " intercurrente " survenue en mai 2015, responsable d'une altération motrice et d'une dépendance majorée de l'intéressé. Au vu de ce constat, l'expert a conclu à l'absence de lien entre la dégradation de l'état de santé de M. C... et son accident initial et a proposé de maintenir le taux de d'invalidité de cette infirmité à 55%. 6. Pour contester cette expertise, le requérant se prévaut d'un certificat médical du généraliste qui le suivait, daté du 1er décembre 2015, qui indique que le patient présente une aggravation des douleurs et des mouvements, sans aucune autre précision. M. C... se prévaut également de trois certificats médicaux datés des 24 novembre 2015, 7 mars 2017 et 25 juillet 2017 qui attestent de ses troubles actuels de la marche, notamment, sans pour autant établir un lien direct et certain avec son accident de service initial. Il produit enfin un certificat daté du 3 mai 2018 de son médecin traitant, indiquant que l'état de santé de l'intéressé semble s'aggraver, en dépit de la poursuite de son traitement antalgique et des séances de kinésithérapie qui lui sont dispensées. Ces seuls justificatifs ne suffisent pas à établir que, contrairement à ce qu'a estimé l'expert médical, l'aggravation de l'état de santé de M. C... serait liée à son accident survenu au cours de son service militaire en Algérie. Ils ne permettent pas d'émettre un doute sur les conclusions émises par cet expert, lequel rendrait nécessaire une nouvelle expertise médicale. Par suite, le requérant n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, d'une aggravation de ses douleurs et infirmités en lien avec cet accident de service. 7. En second lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 6 du présent arrêt, l'aggravation de l'état de santé de M. C... n'étant pas seulement due à l'infirmité initiale, il ne pourra se voir attribuer une révision du taux de sa pension militaire d'invalidité au motif du vieillissement. 8. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre des armées, que la demande de M. C... doit être rejetée. Sur les frais liés au litige : 9. Les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. C... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. C... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre des Armées. Délibéré après l'audience du 23 septembre 2022, à laquelle siégeaient : - M. Gaspon, président, - M. Coiffet, président-assesseur, - Mme Gélard, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 octobre 2022. La rapporteure, V. GELARDLe président, O. GASPON La greffière, I. PETTON La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21NT00280
Cours administrative d'appel
Nantes
Conseil d'État, 7ème - 2ème chambres réunies, 04/10/2022, 466254, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : M. B... D... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 8 juin 2020 par laquelle le ministre de l'action et des comptes publics a rejeté sa demande tendant à la révision du montant de sa pension et d'enjoindre au ministre chargé des retraites de procéder à la liquidation de sa pension de retraite à l'indice 1518 dans un délai de deux mois suivant la notification du jugement du tribunal. Par un jugement n° 2012066 du 1er juin 2022, le tribunal administratif de Paris a refusé de transmettre la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par M. D... et a rejeté sa demande. Par un pourvoi, enregistré le 1er août 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. D... demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ; - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Frédéric Gueudar Delahaye, conseiller d'Etat, - les conclusions de M. Marc Pichon de Vendeuil, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de M. D... ;Considérant ce qui suit : 1. Par un jugement du 1er juin 2022, le tribunal administratif de Paris a, d'une part, refusé de transmettre au Conseil d'Etat la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des dispositions de l'article L. 55 du code des pensions civiles et militaires de retraite et, d'autre part, rejeté la demande de M. D... relative à la révision du montant de sa pension. M. D... se pourvoit en cassation contre ce jugement. A l'appui de son pourvoi, par un mémoire intitulé " question prioritaire de constitutionnalité ", il demande au Conseil d'Etat de transmettre au Conseil constitutionnel la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des dispositions de l'article L. 55 de ce même code. Sur la question prioritaire de constitutionnalité : 2. Aux termes de l'article 23-1 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : " Devant les juridictions relevant du Conseil d'Etat ou de la Cour de cassation, le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution est, à peine d'irrecevabilité, présenté dans un écrit distinct et motivé (...) ". Aux termes de l'article 23-2 de la même ordonnance : " (...) Le refus de transmettre la question ne peut être contesté qu'à l'occasion d'un recours contre la décision réglant tout ou partie du litige ". Aux termes du premier alinéa de l'article 23-5 de cette ordonnance : " Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé (...) à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat (...) ". Aux termes du premier alinéa de l'article R. 771-16 du code de justice administrative : " Lorsque l'une des parties entend contester devant le Conseil d'Etat, à l'appui d'un appel ou d'un pourvoi en cassation formé contre la décision qui règle tout ou partie du litige, le refus de transmission d'une question prioritaire de constitutionnalité précédemment opposé, il lui appartient, à peine d'irrecevabilité, de présenter cette contestation avant l'expiration du délai de recours dans un mémoire distinct et motivé, accompagné d'une copie de la décision de refus de transmission ". Aux termes de l'article R. 771-17 du même code : " Lorsqu'une question prioritaire de constitutionnalité est posée à l'appui d'un pourvoi en cassation, le Conseil d'Etat se prononce sur le renvoi de cette question au Conseil constitutionnel sans être tenu de statuer au préalable sur l'admission du pourvoi ". 3. Il résulte de ces dispositions que, lorsqu'une juridiction statuant en dernier ressort a refusé de transmettre au Conseil d'Etat la question prioritaire de constitutionnalité qui lui a été soumise, il appartient à l'auteur de cette question de contester ce refus, à l'occasion du pourvoi en cassation formé contre la décision qui statue sur le litige, dans le délai de recours contentieux et par un mémoire distinct et motivé, que le refus de transmission précédemment opposé l'ait été par une décision distincte, dont il joint alors une copie, ou directement par cette décision. Les dispositions de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 n'ont ni pour objet ni pour effet de permettre à celui qui a déjà présenté une question prioritaire de constitutionnalité devant une juridiction statuant en dernier ressort de s'affranchir des conditions, définies par les dispositions citées plus haut de la loi organique et du code de justice administrative, selon lesquelles le refus de transmission peut être contesté devant le juge de cassation. Elles lui permettent, en revanche, de former directement devant le Conseil d'Etat une question prioritaire de constitutionnalité portant sur les mêmes dispositions, mais comportant des moyens nouveaux. 4. Par suite, d'une part, il n'y a lieu d'examiner la question de la conformité aux droits et libertés garanties par la Constitution de l'article L. 55 du code des pensions civiles et militaires de retraites soulevée par M. D..., qu'en tant qu'elle est fondée sur le moyen qui n'a pas déjà été soulevé devant le tribunal administratif, tiré de ce que ces dispositions méconnaissent le principe d'égalité devant la loi et le principe d'égalité devant la justice et, d'autre part, contrairement à ce que soutient le ministre, il y a lieu d'examiner cette question préalablement à la décision sur l'admission du pourvoi. 5. Il résulte des dispositions de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 que le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux. 6. Aux termes de l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, la loi est " la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse ". Son article 16 dispose que : " Toute société dans laquelle la garantie des droits n'est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n'a point de Constitution ". 7. Aux termes de l'article L. 55 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " (...) la pension et la rente viagère d'invalidité sont définitivement acquises et ne peuvent être révisées ou supprimées à l'initiative de l'administration ou sur demande de l'intéressé que dans les conditions suivantes : / A tout moment en cas d'erreur matérielle ; / Dans un délai d'un an à compter de la notification de la décision de concession initiale de la pension ou de la rente viagère, en cas d'erreur de droit. / (...) ". Ces dispositions prévoient, dans les relations entre les pensionnés et l'administration, un droit à révision des pensions concédées dans le cas où la liquidation de celles-ci est entachée d'une erreur de droit, ouvert dans les mêmes conditions de délai aux pensionnés et à l'administration, le délai de révision ainsi prévu bénéficiant aussi bien aux pensionnés, dont les droits à pension sont définitivement acquis au terme de ce délai, qu'à l'administration qui est, postérieurement à l'expiration de ce même délai, mise à l'abri de contestations tardives. M. D... n'est, par suite, pas fondé à soutenir qu'elles méconnaîtraient le principe d'égalité devant la loi ni, en tout état de cause, le principe d'égalité devant la justice. 8. Il résulte de ce qui précède qu'il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question de constitutionnalité invoquée, qui n'est pas nouvelle et ne présente pas un caractère sérieux. Sur l'autre moyen du pourvoi : 9. Aux termes de l'article L. 822-1 du code de justice administrative : " Le pourvoi en cassation devant le Conseil d'Etat fait l'objet d'une procédure préalable d'admission. L'admission est refusée par décision juridictionnelle si le pourvoi est irrecevable ou n'est fondé sur aucun moyen sérieux ". 10. Pour demander l'annulation du jugement qu'il attaque, M. D... soutient, en outre, que le tribunal administratif de Paris a entaché son jugement d'insuffisance de motivation et d'erreur de droit en rejetant sa demande sans rechercher si les conditions dans lesquelles l'administration pouvait procéder au retrait de la décision litigieuse en application des dispositions de l'article L. 242-4 du code des relations entre le public et l'administration étaient remplies. 11. Ce moyen n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi.D E C I D E : -------------- Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par M. D.... Article 2 : Le pourvoi de M. D... n'est pas admis. Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. B... D.... Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel, à la Première ministre et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Délibéré à l'issue de la séance du 19 septembre 2022 où siégeaient : Mme Christine Maugüé, présidente adjointe de la section du contentieux, présidant ; M. Nicolas Boulouis, M. Olivier Japiot, présidents de chambre ; M. Géraud Sajust de Bergues, Mme Anne Courrèges, M. Benoît Bohnert, M. Gilles Pellissier, M. Jean-Yves Ollier, conseillers d'Etat et M. Frédéric Gueudar Delahaye, conseiller d'Etat-rapporteur. Rendu le 4 octobre 2022. La présidente : Signé : Mme Christine Maugüé Le rapporteur : Signé : M. Frédéric Gueudar Delahaye La secrétaire : Signé : Mme Nadine PelatECLI:FR:CECHR:2022:466254.20221004
Conseil d'Etat
CAA de NANTES, 6ème chambre, 11/10/2022, 21NT00889, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du 27 juin 2017 par laquelle le ministre de la défense a rejeté sa demande tendant à l'octroi d'une pension militaire d'invalidité, subsidiairement d'ordonner une expertise médicale. Par un jugement n° 1905736 du 1er février 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 31 mars 2021 M. C..., demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 1er février 2021 ; 2°) à titre principal, de réformer la décision du 27 juin 2017 en fixant son taux d'invalidité à 20% et en lui attribuant une pension militaire d'invalidité ; 3°) à titre subsidiaire, d'ordonner une expertise pour indiquer si son infirmité est imputable au service et, le cas échéant, en fixer le taux ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Moumni d'une somme de 3 000 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique. Il soutient que : - la décision du 27 juin 2017 est insuffisamment motivée ; - elle est entachée d'une erreur de fait, de droit et d'appréciation dès lors que les lombalgies dont il souffre sont imputables au service ; Par un mémoire en défense, enregistré le 16 novembre 2021, la ministre des armées conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés. M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 10 mars 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - le code de la défense ; - la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. A..., - les conclusions de Mme Malingue, rapporteure publique, - et les observations de Me Mougin, représentant M. C.... Considérant ce qui suit : 1. M. C..., premier maître fusilier-marin, victime d'un accident durant son service, a présenté, le 5 mai 2014, une demande de pension militaire d'invalidité pour l'infirmité " douleurs lombo-sacrées avec irradiation sciatique et déficit du releveur du pied gauche en relation avec des discopathies lombaires étagées ". Par décision du 27 juin 2017, le ministre de la défense a rejeté cette demande. Il relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Sur les conclusions à fin d'annulation : 2. Aux termes de l'article L. 25 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, dans sa rédaction alors applicable : " (...) Toute décision comportant rejet de pension doit être également motivée et faire ressortir qu'il n'est pas établi que l'infirmité provient de l'une des causes indiquées à l'article L. 2, ou, lorsque l'intéressé a droit à la présomption, les faits, documents ou raisons d'ordre médical dont résulte la preuve contraire détruisant cette présomption. (...). ". 3. La décision contestée vise les dispositions des articles L. 4 et L. 5 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, applicables à la date de la demande, ainsi que le constat provisoire des droits, elle mentionne l'infirmité de M. C..., son évaluation au taux global de 20% résultant pour partie d'accidents sans lien avec le service et pour partie de l'accident de service du 20 janvier 2014 dont les séquelles entrainent un degré d'invalidité inférieur à 10 %, lequel est le minimum requis pour la prise en considération de l'infirmité. Le moyen tiré de ce que cette décision serait insuffisamment motivée doit être écarté. 4. Aux termes de l'article L. 3 du même code, dans sa rédaction applicable : " Lorsqu'il n'est pas possible d'administrer ni la preuve que l'infirmité ou l'aggravation résulte d'une des causes prévues à l'article L. 2, ni la preuve contraire, la présomption d'imputabilité au service bénéficie à l'intéressé à condition : / 1° S'il s'agit de blessure, qu'elle ait été constatée avant le renvoi du militaire dans ses foyers ; / 2° S'il s'agit d'une maladie, qu'elle n'ait été constatée qu'après le quatre-vingt-dixième jour de service effectif et avant le soixantième jour suivant le retour du militaire dans ses foyers ; (...). / La présomption définie au présent article s'applique exclusivement aux constatations faites, soit pendant le service accompli au cours de la guerre 1939-1945, soit au cours d'une expédition déclarée campagne de guerre, soit pendant le service accompli par les militaires pendant la durée légale, compte tenu des délais prévus aux précédents alinéas. (...). ". Aux termes de l'article L. 4 de ce code : " Les pensions sont établies d'après le degré d'invalidité. / Sont prises en considération les infirmités entraînant une invalidité égale ou supérieure à 10 %. / Il est concédé une pension : / 1° Au titre des infirmités résultant de blessures, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse 10 % ; (...) ". 5. Il résulte de ces dispositions que la présomption d'imputabilité au service s'applique exclusivement aux constatations faites, dans certains délais, pendant le service accompli par les militaires intéressés dans l'une des situations définies par l'article L. 3 et par l'article L. 4123-4 du code de la défense. Ainsi, les constatations visées à l'article L. 3 doivent s'entendre de constatations contemporaines des faits et émanant de l'autorité militaire qui était, à l'époque de la constatation, compétente pour y procéder. 6. Le taux d'invalidité de M. C... a été évalué à 20% par l'administration pour des douleurs lombo-sacrées et seuls 5% de cette invalidité ont été attribués à l'accident de service dont M. C... a été victime, le 20 janvier 2014 à l'occasion de la " récupération de colis par LPA ". Si M. C... soutient que la présomption d'imputabilité aurait dû lui permettre de bénéficier d'un taux de validité de 20% exclusivement imputable à l'accident du 20 janvier 2014 ainsi que le retient l'avis médical du 11 avril 2017, il résulte cependant de l'instruction, et notamment du livret médical de M. C..., que celui-ci a connu de très nombreux épisodes de lombalgie depuis 1997 ; ces épisodes ne faisant mention d'aucun fait précis pouvant être rattaché à la survenue des douleurs dorsales de l'intéressé, à l'occasion du service, antérieurement à l'accident de service du 20 janvier 2014. Le compte-rendu de l'IRM pratiqué le 3 novembre 2011 mentionne également " une relative étroitesse congénitale " du canal lombaire. Il n'est enfin pas contesté que les douleurs résultant d'un accident de tondeuse sont sans lien avec le service. Dans ces conditions, alors que les affirmations de M. C... selon lesquelles l'accident de service de janvier 2014 serait seul à l'origine de son infirmité sont contredites par les éléments mentionnés dans son livret médical, c'est à juste titre, et sans que la charge de la preuve de l'imputabilité au service n'ait été inversée, au regard des conditions posées par l'article L. 3 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, que le ministre de la défense a retenu que l'infirmité " douleurs lombo-sacrées avec irradiation sciatique et déficit du releveur du pied gauche en relation avec des discopathies lombaires étagées " résultait, d'une part, d'accidents sans lien avec le service et, d'autre part, pour 5%, de l'accident de service constaté le 20 janvier 2014. 7. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise, que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Ses conclusions tendant à ce que la cour lui attribue une pension militaire d'invalidité doivent, par voie de conséquence, également être rejetées. Sur les frais liés au litige : 8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement au conseil de M. C... de la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. C... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre des armées. Délibéré après l'audience du 23 septembre 2022, à laquelle siégeaient : - M. Gaspon, président de chambre, - M. Coiffet, président-assesseur, - M. Giraud, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 11 octobre 2022. Le rapporteur, T. A...Le président, O. GASPON La greffière, I. PETTON La République mande et ordonne au ministre des armées, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21NT00889
Cours administrative d'appel
Nantes
CAA de NANCY, 3ème chambre, 27/09/2022, 18NC03349, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Mme C... D... a demandé au tribunal administratif de Besançon de condamner le centre hospitalier régional universitaire (CHRU) de Besançon à l'indemniser de l'intégralité des préjudices qu'elle estime avoir subis à la suite de l'accident dont elle a été victime le 5 novembre 2012 et d'ordonner, au besoin, une expertise sur les conditions de survenance de l'accident et sur ses préjudices. Elle a également demandé à ce tribunal d'annuler la décision du CHRU de Besançon du 4 janvier 2017 en ce qu'elle porte refus de l'indemniser de l'intégralité de ses préjudices et de prendre en charge les frais qu'elle a exposés en lien avec son accident de service. Enfin Mme D... a sollicité qu'il soit enjoint au centre hospitalier régional universitaire de Besançon de prendre en charge les frais qu'elle a exposés sur le fondement de l'article 41 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986. Par un jugement n° 1700395 du 18 octobre 2018, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande. Par un arrêt du 9 juillet 2020, la cour a annulé le jugement n° 1700395 du 18 octobre 2018 du tribunal administratif de Besançon en tant qu'il a omis de statuer sur le fondement de la responsabilité sans faute et a reconnu l'existence d'une faute du CHRU de Besançon dans la survenance de l'accident du 5 novembre 2012, ainsi qu'une faute d'imprudence de Mme D... devant exonérer le CHRU à concurrence de 30 % des préjudices subis. La cour a également ordonné une expertise médicale en vue de déterminer l'étendue des préjudices de Mme D... et a enfin sursis à statuer sur les autres conclusions des parties. Le rapport d'expertise a été enregistré au greffe de la cour le 16 mars 2021. Par cinq mémoires complémentaires, enregistrés le 19 mai 2021, le 2 juin 2021, le 14 octobre 2021, le 8 novembre 2021 et le 22 juillet 2022, Mme D..., représentée par Me Bocher-Allanet, demande à la cour dans le dernier état de ses écritures : 1°) de surseoir à statuer sur ses conclusions tendant à l'indemnisation de la perte de gains professionnels futurs ou, à titre subsidiaire, de réserver expressément l'évaluation de ce préjudice ; 2°) de condamner, en tout cas, le CHRU de Besançon à lui verser la somme de 392 882,14 euros, assortie des intérêts à compter du 2 novembre 2016 et de la capitalisation des intérêts ; 3°) d'annuler la décision du 4 janvier 2017 du CHRU de Besançon refusant de prendre en charge les frais qu'elle a exposés et qui sont directement en lien avec l'accident du 5 novembre 2012 ; 4°) d'enjoindre au CHRU de Besançon de prendre en charge à l'avenir l'intégralité des honoraires médicaux en lien avec l'accident du 5 novembre 2012 ; 5°) de mettre à la charge du CHRU de Besançon une somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi qu'une somme de 4 447,75 euros au titre des frais d'expertise. Elle soutient que : - par son arrêt du 9 juillet 2020, la cour administrative d'appel a reconnu l'existence d'une faute imputable au CHRU de Besançon et elle doit donc bénéficier de l'indemnisation de ses différents préjudices en lien avec cette faute ; - son reclassement n'a toujours pas été concrètement envisagé, de sorte qu'elle n'a pu former une demande d'allocation temporaire d'invalidité et qu'elle n'est pas, non plus, à la retraite ; il doit être sursis à statuer dans l'attente de l'évolution de sa situation professionnelle ; - elle sollicite, s'agissant de ses préjudices extrapatrimoniaux temporaires, 20 000 euros au titre des souffrances qu'elle a endurées, ainsi que la somme de 19 460,25 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire, calculé sur la base de 27 euros par jour de déficit total ; - s'agissant des préjudices extrapatrimoniaux permanents, elle sollicite 115 625 euros au titre du déficit fonctionnel permanent, estimé à 37 %, 2 000 euros au titre du préjudice esthétique et, enfin, 1 500 euros au titre du préjudice d'agrément ; - elle ne formule pas de demandes au titre de ses dépenses de santé avant consolidation ; - elle a droit, s'agissant des préjudices patrimoniaux temporaires, à 26 432 euros au titre de l'assistance par tierce personne, mais aussi à 1 139 euros en raison de l'achat d'un auto-cuiseur et, enfin, à 5 708,75 euros en raison de l'absence de perception de ses primes de service depuis son accident ; - s'agissant des préjudices patrimoniaux permanents, elle maintient qu'elle a droit à la somme de 200 euros au titre des frais de soins réalisés au sein du centre de rééducation des Salins de Bregille et cette somme est sans lien avec sa faute d'imprudence ; elle doit également bénéficier d'une indemnisation à hauteur de 484 euros en raison des frais engendrés pour se préparer et passer l'examen technique lui permettant de pouvoir utiliser son véhicule aménagé en toute légalité, 8 024,24 euros au titre des primes non perçus, 15 429,34 euros pour les frais d'aménagement de son domicile, 1 346,62 euros au titre des frais de renouvellement des différents ustensiles rendus nécessaires par l'accident, 16 022,35 euros au titre des frais capitalisés d'aménagement de véhicule, 287 805,95 euros pour l'assistance par tierce personne, 30 000 euros au titre du préjudice professionnel et 10 000 euros au titre du préjudice de formation ; elle précisera son préjudice lié à la perte de revenus dès qu'elle aura les éléments nécessaires pour le faire ; - en imputant à ces sommes le taux exonératoire de 30 % lié à son imprudence fautive, à l'exclusion des frais de rééducation qui sont sans lien avec son imprudence, le CHRU doit lui verser la somme de 392 882,14 euros ; - le CHRU de Besançon ne pouvait refuser de faire droit à sa demande de prise en charge des frais médicaux qu'elle a exposés à la suite de l'accident du 5 novembre 2012, de sorte que la décision du CHRU de Besançon refusant de faire droit à sa demande en ce sens doit être annulée. Par un mémoire complémentaire enregistré le 28 juillet 2021, le CHRU de Besançon, représenté par Me Lesné, demande à la cour : 1°) de rejeter la demande de sursis à statuer ; 2°) de constater qu'il n'y a plus lieu de statuer sur la demande de prise en charge des dépenses de santé en lien avec l'accident du 5 novembre 2012 ou, à défaut de rejeter cette demande comme irrecevable ; 3°) de rejeter la demande indemnitaire de Mme D... ou, à défaut de ramener les sommes demandées par Mme D... à de plus justes proportions en accordant la somme de 111 438, 53 euros ; 4°) de mettre à la charge des deux parties, pour moitié chacune, les frais d'expertise judiciaire. Il fait valoir que : - le CHRU s'est acquitté de la somme de 200 euros sollicitée par Mme D... au titre des frais de soins réalisés au sein du centre de rééducation des Salins de Bregille et a également réglé la somme de 2 634,44 euros au titre des frais de déplacements demandés, de sorte qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ces conclusions ; les conclusions relatives à ces frais de soins sont, en tout cas, irrecevables, dès lors qu'elles n'ont pas été précédées d'une demande indemnitaire ; - le préjudice lié au déficit fonctionnel temporaire doit être ramené à une somme de 7 215 euros, tandis que le préjudice lié au déficit fonctionnel permanent ne saurait excéder 55 000 euros ; - le préjudice lié aux souffrances endurées ne pourra excéder la somme de 7 500 euros au regard des indications du référentiel de l'ONIAM ; - le préjudice esthétique ne pourra être qu'indemnisé à hauteur de 800 euros au vu du référentiel de l'ONIAM ; - Mme D... ne démontrant pas l'effectivité de sa pratique sportive, sa demande au titre du préjudice d'agrément ne pourra qu'être rejetée ; - Mme D... ne forme justement aucune demande d'indemnisation au titre de ses dépenses de santé ; - le préjudice, dont Mme D... sollicite l'indemnisation au titre de l'assistance par tierce personne, doit être ramené à de plus justes proportions dès lors qu'elle n'a eu besoin que d'une assistance à hauteur de 5 heures par semaines jusqu'à la consolidation de son état et ne nécessite qu'une assistance à raison de 4 heures depuis sa consolidation : le taux horaire doit être arrêté à 10,25 euros ; il ne pourra ainsi être accordé qu'une somme de 10 660 euros pour l'assistance exigée jusque la consolidation de l'état de Mme D... et une somme de 68 722,90 euros au titre de l'assistance exigée depuis la consolidation ; - Mme D... a choisi le modèle d'auto-cuiseur le plus cher du marché et ne doit bénéficier que d'une indemnisation à hauteur de 300 euros, correspondant au coût d'un modèle moins cher ; - le préjudice lié à la perte de prime de service ne saurait être indemnisé, dès lors que l'octroi futur d'une allocation temporaire d'invalidité couvrira ce préjudice ; - aucune adaptation du logement n'a été retenue par l'expert judiciaire et Mme D... a exprimé le fait qu'il n'était pas nécessaire de procéder à des aménagements ; il n'y a donc pas d'indemnisation à retenir à ce titre ; - Mme D... n'est pas fondée à demander une somme correspondant à un renouvellement des ustensiles nécessaires à la suite de son accident dès lors qu'une telle demande n'est justifiée ni dans son principe, ni dans son quantum ; - le permis de Mme D... est valide, elle n'est pas fondée à demander l'indemnisation de frais liés à la prise d'heures de conduites ou pour repasser son permis ; - les sommes demandées au titre des frais de véhicule adapté doivent être ramenées à la somme de 1 000 euros dès lors que Mme D... ne saurait solliciter l'achat d'un nouveau véhicule, mais uniquement la réalisation de quelques adaptations sur son véhicule ; - l'octroi prochain d'une allocation temporaire d'invalidité couvrira le préjudice de perte de gains professionnels futurs et d'incidence professionnel, en tout cas, il ne pourrait pas être accordé plus de 8 000 euros à Mme D... au titre du préjudice d'incidence professionnelle ; - Mme D... n'a connu aucun préjudice de formation ; - Mme D... a commis une faute d'imprudence justifiant qu'il soit exonéré à hauteur de 30 % de ces différents préjudices. Par un mémoire enregistré le 4 avril 2022, la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Saône, agissant pour le compte de la caisse primaire d'assurance maladie du Doubs, a indiqué qu'elle n'entendait pas intervenir dans l'instance. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code civil ; - le code de la santé publique ; - le code du travail ; - le code de la sécurité sociale ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ; - l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 modifiée ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. B..., - les conclusions de M. Barteaux, rapporteur public, - et les observations de Me Bocher-Allanet pour Mme D... et de Me Laurent pour le CHRU de Besançon. Considérant ce qui suit : Sur les conclusions aux fins de sursis à statuer sur les conclusions tendant à l'indemnisation du préjudice de perte de gains professionnels futurs : 1. Mme D... sollicite qu'il soit sursis à statuer sur ses conclusions tendant à l'indemnisation du préjudice de perte de gains professionnels futurs dans l'attente de son éventuel reclassement ou de sa mise à la retraite. S'il résulte des dernières pièces produites que la procédure de reclassement de la requérante est toujours en cours, Mme D..., dont il est constant qu'elle continue à percevoir l'intégralité de son traitement, aura la possibilité, en cas de reclassement ou de mise à la retraite entraînant de nouveaux préjudices, d'introduire une nouvelle demande concernant ces préjudices. Les conclusions à fin de sursis doivent donc, en tout état de cause, être rejetées. Sur l'exception de non-lieu à statuer : 2. Le CHRU de Besançon soutient qu'il n'y aurait plus lieu de statuer sur la demande de versement de la somme de 200 euros au titre des frais d'hospitalisation au sein du centre de rééducation des Salins de Bregille le 25 septembre 2020 et de la somme de 2 634,44 euros représentant des frais de déplacements. Si Mme D... a explicitement abandonné sa demande d'indemnisation relative aux dépenses de déplacements, elle a maintenu sa demande concernant les frais d'hospitalisation et justifie, par la production d'une facture, qu'elle s'est effectivement acquittée, le 3 mars 2021, d'une somme de 200 euros. Or, si le CHRU de Besançon établit avoir payé une telle somme au centre de rééducation en juin 2021, il ne justifie pas que Mme D... ait reçu le remboursement de cette somme par le centre de rééducation ou par lui-même. L'exception de non-lieu à statuer doit donc être écartée. Sur les conclusions indemnitaires : En ce qui concerne la recevabilité de ces conclusions : 3. En premier lieu, à la suite du dépôt du rapport de M. A..., expert désigné par l'ordonnance du 21 juillet 2020 de la présidente de la cour administrative d'appel de Nancy, Mme D... a chiffré, ainsi qu'elle pouvait le faire, les préjudices qu'elle estime avoir subis à la suite de l'accident du 5 novembre 2012. Par suite, la fin de non-recevoir tirée de ce que les conclusions indemnitaires de Mme D... ne sont pas chiffrées doit être écartée. 4. En deuxième lieu, la circonstance que les frais de 200 euros pour l'hospitalisation de Mme D..., le 25 septembre 2020, ne soient pas mentionnés dans la demande indemnitaire préalable du 2 novembre 2016 est sans incidence sur la recevabilité des conclusions visant à l'indemnisation de ces frais dès lors que ce dommage a été causé par le même fait générateur que celui évoqué dans la demande indemnitaire préalable et qu'il n'est né que postérieurement à la décision du 4 janvier 2017 rejetant cette demande préalable. La fin de non-recevoir tirée de l'absence de liaison des conclusions relatives à ces frais d'hospitalisation doit donc être écartée. La requérante ayant renoncé à ses conclusions indemnitaires relatives aux frais de transport exposés, la fin de non-recevoir tirée de l'absence de liaison de ces conclusions ne peut également qu'être écartée. En ce qui concerne les conclusions indemnitaires présentées sur le fondement de la responsabilité pour faute du CHRU de Besançon : 5. Par son arrêt du 9 juillet 2020, la cour administrative d'appel de Nancy a reconnu l'existence de plusieurs manquements imputables au CHRU de Besançon, employeur de l'intéressée, et étant à l'origine de l'accident dont a été victime Mme D.... Si, par cet arrêt, la cour a retenu que Mme D... est fondée à demander l'indemnisation de l'ensemble de ses préjudices causés par l'accident du 5 novembre 2012, elle a également précisé que la requérante avait, dans la cadre de l'accident, commis une faute d'imprudence exonérant le CHRU de Besançon à concurrence de 30 %. S'agissant des préjudices patrimoniaux temporaires : Quant à l'assistance par une tierce personne : 6. Lorsque le juge administratif indemnise dans le chef de la victime d'un dommage corporel la nécessité de recourir à l'aide d'une tierce personne, il détermine le montant de l'indemnité réparant ce préjudice en fonction des besoins de la victime et des dépenses nécessaires pour y pourvoir. Il doit, à cette fin, se fonder sur un taux horaire déterminé, au vu des pièces du dossier, par référence, soit au montant des salaires des personnes à employer augmenté des cotisations sociales dues par l'employeur, soit aux tarifs des organismes offrant de telles prestations, en permettant le recours à l'aide professionnelle d'une tierce personne d'un niveau de qualification adéquat et sans être lié par les débours effectifs dont la victime peut justifier. Il n'appartient notamment pas au juge, pour déterminer cette indemnisation, de tenir compte de la circonstance que l'aide a été ou pourrait être apportée par un membre de la famille ou un proche de la victime. 7. Il résulte de l'instruction et en particulier du rapport de l'expert mandaté par la cour administrative d'appel, ainsi que du rapport d'expertise en ergothérapie que Mme D... a, en raison des conséquences directes de l'accident du 5 novembre 2012, eu besoin de l'assistance d'une tierce personne à raison, en moyenne, de 8 heures par semaine jusqu'à la consolidation totale de son état de santé, soit le 7 juillet 2017, date à laquelle ses enfants étaient encore mineurs. Le préjudice indemnisable doit, en l'espèce, être déterminé sur la base d'un montant horaire de 14 euros et d'une année de 412 jours pour tenir compte des congés payés et des jours fériés. Ainsi, le préjudice de Mme D..., pour la période comprise entre le 8 novembre 2013 et la date de consolidation, s'établit, en prenant en compte sa part de responsabilité dans la réalisation de l'accident, à 21 517,01 euros. Quant à l'achat d'un autocuiseur : 8. Il ne résulte pas des différents rapports d'expertise et notamment pas du rapport d'expertise en ergothérapie que l'achat d'un autocuiseur ait été rendu nécessaire par les conséquences pour Mme D... de l'accident du 5 novembre 2012. Par suite, la requérante n'est pas fondée à demander l'indemnisation du coût d'achat d'un tel matériel. Quant aux pertes de revenus liées aux primes : 9. Si l'accident de Mme D... a été reconnu imputable au service par une décision du CHRU de Besançon du 4 décembre 2012, il résulte de l'instruction que la requérante a, à la suite de cet accident, continué à percevoir un plein traitement jusqu'à la date de la mise à disposition du présent arrêt. Ce plein traitement était cependant amputé de la prime annuelle de service, versée chaque année au titre de l'année précédente, dont Mme D... bénéficiait préalablement. En raison de l'absence de perception des primes de service en 2014, 2015, 2016 et 2017, Mme D... a subi une perte de revenu, la perception d'une allocation temporaire d'invalidité restant, en tout état de cause, purement éventuelle à la date du présent arrêt. A raison d'une prime annuelle devant être évaluée à la somme de 1 200 euros nets, la perte de revenu de Mme D... est de 4 800 euros, dont il faut déduire la part de responsabilité de la requérante dans la réalisation de l'accident, soit 30 %, de sorte qu'il sera attribué à cette dernière la somme de 3 360 euros au titre de ce préjudice. S'agissant des préjudices patrimoniaux permanents : Quant aux dépenses de santé après consolidation : 10. Il résulte de l'instruction que l'hospitalisation de Mme D... le 25 septembre 2020 au sein du centre de rééducation des Salins de Bregille est en lien avec la faute imputable au CHRU de Besançon, de sorte que la requérante est fondée à solliciter le versement, après prise en compte de sa part de responsabilité dans la réalisation de l'accident, d'une somme de 140 euros représentant la part de ces frais restée à sa charge. Quant au renouvellement des ustensiles : 11. Il résulte de l'instruction qu'en accord avec les préconisations du rapport d'expertise en ergothérapie, le CHRU de Besançon a indemnisé Mme D... à hauteur de 414,70 euros pour l'achat de différents ustensiles liés aux troubles à la main et au bras gauche résultant de l'accident du 5 novembre 2012. Du fait de l'usure nécessaire de ces différents ustensiles dans le temps, Mme D... est fondée à demander à être indemnisée des frais liés à leur renouvellement futur. En prenant en compte la nécessité de renouveler ces équipements tous les 10 ans et du coefficient de 37,944 mentionné par le barème de la Gazette du Palais de 2020 pour une femme âgée de 48 ans, soit l'âge de Mme D... au jour de la mise à disposition de l'arrêt, il y a lieu d'accorder à Mme D..., en prenant en compte le taux d'exonération liée à l'imprudence fautive de la requérante, la somme de 1 101,48 euros au titre de ce préjudice. Quant aux frais d'aménagement du domicile : 12. Il résulte de l'instruction que les conséquences de l'accident du 5 novembre 2012 impliquent, afin d'adapter le lieu de vie aux difficultés de mobilité de la main et du bras gauche de la requérante, la surélévation de l'électroménager et l'organisation de rangements dans la cuisine à des hauteurs permettant à Mme D... E... les utiliser sans douleur. Ainsi, quand bien même Mme D... a indiqué avoir pu vivre sans ces aménagements jusque-là, la requérante a droit à l'indemnisation des coûts d'adaptation de son logement aux séquelles de l'accident du 5 novembre 2012. Pour autant, si la requérante fournit un devis pour le réaménagement de sa cuisine, il n'y a lieu d'indemniser que les frais permettant la surélévation de l'électroménager et l'organisation de rangements dans la cuisine à des hauteurs permettant à Mme D... E... les utiliser sans douleur, le lien entre les autres prestations mentionnées dans ce devis et la faute du CHRU n'étant pas établi. Ainsi, il doit être alloué la somme de 7 998,53 euros au titre de l'achat d'un meuble de cuisine permettant un rehaussement des différents appareils et ustensiles, la somme de 330 euros pour la livraison et enfin la somme de 1 393,80 euros pour la pose du meuble et de l'électronique, ainsi que pour les travaux d'installation. En déduisant la part de responsabilité de la requérante dans la réalisation de l'accident, soit 30 %, Mme D... doit se voir accorder la somme de 6 805,63 euros au titre des frais de logement adapté. Quant aux frais liés à la conduite d'un véhicule : 13. En premier lieu, il résulte de l'instruction qu'en conséquence de l'accident du 5 novembre 2012, Mme D... est privée d'une utilisation normale de sa main gauche et est plus généralement handicapée dans l'utilisation de son bras gauche. Cet état de santé impose l'adaptation de son véhicule par la mise en place d'une boîte automatique et la pose d'une télécommande multifonction sur le volant. Au regard des éléments versés par la requérante pour évaluer le surcoût lié à l'achat d'un véhicule à boîte de vitesse automatique par rapport à un véhicule à boîte de vitesse manuelle, ainsi que le coût moyen d'une télécommande multifonction, Mme D... est fondée à soutenir que le préjudice d'adaptation de son véhicule s'élève à un montant de 2 975 euros et doit ainsi bénéficier d'une indemnité correspondant à 70 % de ce surcoût, soit 2 082,50 euros. 14. En deuxième lieu, en raison du besoin de renouvellement de ce véhicule tous les 7 ans et du coefficient de capitalisation de 37,944 mentionné par le barème de la Gazette du Palais de 2020 pour une femme âgée de 48 ans, soit l'âge de Mme D... au jour de la mise à disposition de l'arrêt, il y a lieu d'accorder à Mme D..., en prenant en compte le taux d'exonération liée à l'imprudence fautive de la requérante, la somme de 11 288,34 euros au titre des frais futurs d'aménagement de son véhicule. 15. En troisième lieu, Mme D... indique que son accident lui impose de suivre dix heures de conduite auprès d'une auto-école, ainsi qu'une heure de présentation pratique pour bénéficier d'une régularisation de son permis de conduire. Toutefois, l'arrêté du 28 mars 2022 fixant la liste des affections médicales incompatibles ou compatibles avec ou sans aménagements ou restrictions pour l'obtention, le renouvellement ou le maintien du permis de conduire ou pouvant donner lieu à la délivrance de permis de conduire de durée de validité limitée, n'impose pas de telles exigences pour le maintien du droit de conduire dans la situation de santé de Mme D.... Il ne résulte ainsi notamment pas de l'instruction que Mme D... ait besoin d'une heure de présentation pratique pour pouvoir bénéficier d'une régularisation de son permis de construire. Eu égard néanmoins au fait, d'une part, que Mme D... n'a, à la suite de l'accident, pas pu conduire depuis 2012 et, d'autre part, qu'elle devra apprendre à conduire en utilisant une seule main pleinement fonctionnelle et à utiliser la télécommande multifonction, Mme D... est fondée à obtenir une indemnisation équivalente à cinq heures de conduite. A raison d'un taux horaire de 44 euros, tel qu'il est mentionné dans le devis fourni par Mme D..., cette dernière doit bénéficier d'une somme de 154 euros après prise en compte du taux d'exonération de 30 %. Quant aux frais de tierce assistance : 16. Il résulte de l'instruction et en particulier du rapport de l'expert mandaté par la cour administrative d'appel que Mme D... a, en raison des conséquences directes de l'accident du 5 novembre 2012 et en dépit du fait qu'elle ait jusqu'alors assuré par elle-même son habillement, besoin de l'assistance d'une tierce personne. Au regard de l'âge plus avancé de ses enfants, ce besoin peut être évalué à partir de la date de consolidation et pour le futur à sept heures par semaine. Sur la base d'un montant horaire de 14 euros et au regard d'une année de 412 jours pour tenir compte des congés payés et des jours fériés, le préjudice de Mme D..., pour la période comprise entre le 7 juillet 2017 et la date de mise à disposition du présent arrêt, s'établit à 30 135,82 euros, dont il faut toutefois déduire la part de responsabilité dans la réalisation de l'accident, pour ainsi retenir la somme de 21 095,07 euros. 17. Pour l'avenir, il y a lieu de condamner le CHRU de Besançon à verser une rente à Mme D.... Compte tenu de ce qui précède, le montant de cette rente s'établit, en prenant en compte le taux d'exonération de 30 %, à 4 326 euros par an. Cette rente sera revalorisée par application des coefficients prévus à l'article L. 434-17 du code de la sécurité sociale. La rente sera versée à chaque trimestre échu après qu'il aura été déduit, le cas échéant, le montant éventuellement perçu de la prestation de compensation du handicap ou de toute autre allocation ayant le même objet. Cette rente ne sera toutefois payée à l'intéressée qu'en l'absence de perception par elle d'une allocation temporaire d'invalidité ou d'une rente viagère d'invalidité. Quant aux pertes de revenus liées aux primes : 18. Ainsi qu'il a été précisé en amont, Mme D... a, jusqu'au jour de la mise à disposition du présent arrêt, continué à percevoir un plein traitement amputé de la prime de service, versée chaque année au titre de l'année précédente, dont elle bénéficiait préalablement. En raison de l'absence de perception des primes de service en 2018, 2019, 2020, 2021 et 2022, Mme D... a subi une perte de revenu. La prime annuelle devant être évaluée à la somme de 1 200 euros net, Mme D... est fondée à soutenir qu'elle a subi un préjudice de perte de revenus depuis la date de consolidation de son état de santé, pour un montant de 6 000 euros. Il faut néanmoins déduire sa part de responsabilité dans la réalisation de l'accident, soit 30 %, pour obtenir le montant de l'indemnité due, de sorte qu'il lui sera attribué la somme de 4 200 euros au titre de ce préjudice. Quant à l'incidence professionnelle : 19. Il résulte de l'instruction que le handicap entraîné par l'accident du 5 novembre 2012 affecte lourdement la mobilité de la main gauche de Mme D..., alors que cette dernière est gauchère et qu'elle exerçait des fonctions impliquant un travail manuel. De plus, Mme D... justifie qu'elle venait, peu de temps avant son accident, d'être admise au concours d'assistante ingénieure en chimie analytique, de sorte que l'accident, dont il n'est pas contesté qu'il lui empêche l'exercice de cet emploi, lui a fait perdre des chances de progression professionnelle. Dans ces conditions, il sera fait une juste appréciation du préjudice d'incidence professionnelle en accordant à Mme D... la somme de 12 000 euros, soit 8 400 euros après prise en compte de la part de responsabilité de la requérante dans la survenance de l'accident. Quant au préjudice de formation : 20. Mme D... soutient avoir subi un préjudice de formation, dès lors qu'elle a été admise au concours d'assistante ingénieure en chimie analytique peu de temps avant son accident. Pour autant, la requérante ayant été admise à ce concours avant l'accident, son admission marquait la fin de sa période de préparation à ce concours et de formation qu'elle a pu mener jusqu'à son terme. La perte de chance de progression professionnelle ainsi engendrée relève de l'incidence professionnelle et a été indemnisée à ce titre. Si, de plus, Mme D... soutient être privée de la possibilité de réaliser une formation d'infirmière, elle n'apporte aucun élément justifiant qu'elle ait envisagé une telle reconversion préalablement à l'accident. Dans ces conditions, le préjudice de formation n'est pas établi. S'agissant des préjudices extrapatrimoniaux temporaires : 21. En premier lieu, il résulte de l'instruction que l'accident du 5 novembre 2012 a engendré des conséquences physiques, mais également psychologiques et ont ainsi induit, jusqu'à consolidation totale de ces différents troubles, des périodes de déficit fonctionnel temporaire total de 104 jours, ainsi que des périodes de déficit fonctionnel de 50 % du 10 février 2014 au 7 juillet 2017, soit 1 150 jours en retirant les jours d'hospitalisation impliquant un déficit fonctionnel total, et enfin des périodes de déficit fonctionnel de 25 % du 9 novembre 2012 au 10 février 2014, soit 446 jours en soustrayant ici également les jours d'hospitalisation impliquant un déficit fonctionnel total. Il sera fait une juste appréciation du préjudice subi par Mme D... en l'évaluant à 20 euros par jour de déficit total, de sorte que la somme que le CHRU de Besançon est condamné à lui verser à ce titre doit être de 15 810 euros, dont il faut soustraire la part liée à l'imprudence fautive de la requérante, pour ainsi obtenir la somme de 11 067 euros. 22. En second lieu, les souffrances endurées avant consolidation ont été évaluées par l'expert mandaté par la cour à 4,5 sur une échelle de 7. Il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en le fixant à 7 500 euros, réduit de 30 %, de sorte que Mme D... est fondée à solliciter que le CHRU de Besançon lui verse la somme de 5 250 euros en réparation de son pretium doloris imputable à l'accident du 5 novembre 2012. S'agissant des préjudices extrapatrimoniaux permanents : 23. En premier lieu, il résulte de l'instruction que Mme D... subit, en raison des conséquences de l'accident du 5 novembre 2012, d'importantes conséquences non seulement physiques, mais également psychologiques, de sorte que son déficit fonctionnel permanent peut être évalué, ainsi que le retient l'expert mandaté par la cour administrative d'appel, à 37 %, correspondant à une réparation de 60 000 euros eu égard notamment à l'âge de la victime à la date de consolidation de son état de santé. Compte tenu néanmoins de sa part de responsabilité dans la réalisation de l'accident du 5 novembre 2012, Mme D... est uniquement fondée à solliciter une somme de 42 000 euros au titre de l'indemnisation du préjudice lié à son déficit fonctionnel permanent. 24. En deuxième lieu, Mme D... n'établit pas qu'elle aurait, avant l'accident, exercé une activité sportive ou de loisir dans des conditions telles qu'elle justifierait d'un préjudice spécifique non indemnisé au titre du déficit fonctionnel permanent. Mme D... n'est ainsi pas fondée à solliciter l'indemnisation de son préjudice d'agrément. 25. En troisième lieu, il ressort des éléments versés au dossier, notamment l'expertise ordonnée par la cour administrative d'appel, que l'accident du 5 novembre 2012 entraîne le maintien de la main gauche de Mme D... dans une position disgracieuse. Ce préjudice doit, ainsi que l'a retenu cette expertise, être évalué à 1 sur une échelle de 7. Il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en le fixant à la somme de 1 000 euros, qui doit être diminuée de 30 %, de sorte que Mme D... est fondée à solliciter que le CHRU de Besançon lui verse la somme de 700 euros en réparation du préjudice esthétique. En ce qui concerne les conclusions indemnitaires présentées sur le fondement de la responsabilité pour risque du CHRU de Besançon : 26. Il ne résulte pas de l'instruction que Mme D... pourrait, sur le fondement de la responsabilité pour risque, obtenir une indemnisation complémentaire à celle déjà obtenue au titre de la responsabilité pour faute du CHRU. Par suite, ces conclusions indemnitaires subsidiaires ne peuvent qu'être rejetées. 27. Il résulte de ce qui précède que Mme D... est seulement fondée, outre la rente mentionnée au point 17 du présent arrêt, à demander à ce que le CHRU de Besançon soit condamné à lui verser la somme de 139 161,03 euros en réparation des préjudices liés à l'accident qu'elle a subi le 5 novembre 2012. Sur les intérêts et la capitalisation : 28. Il résulte de l'instruction que la demande de réclamation préalable de Mme D... a été reçue le 7 novembre 2016 par le CHRU de Besançon. Par suite, Mme D... a droit aux intérêts de la somme mentionnée au point précédent à compter de cette date. 29. La capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond, même si, à cette date, les intérêts sont dus depuis moins d'une année. Cette demande prend toutefois effet au plus tôt à la date à laquelle elle est enregistrée. La capitalisation des intérêts a été demandée pour la première fois par Mme D... dans son mémoire enregistré à la cour le 19 mai 2021. Il y a lieu de faire droit à cette demande à cette date, ainsi qu'à chaque échéance annuelle ultérieure. Sur les conclusions à fin d'annulation : 30. Aux termes de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie (...) si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à sa mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident ". Les dispositions précitées de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 permettent au fonctionnaire, victime d'un accident de service, de prétendre au remboursement des frais directement entraînés par cet accident, indépendamment d'une éventuelle faute de la collectivité qui employait le fonctionnaire à la date de l'accident. Ce droit au remboursement porte non seulement sur les honoraires médicaux, mais également sur l'ensemble des frais réels exposés par les fonctionnaires et directement entraînés par un accident reconnu imputable au service. Ce droit est subordonné au caractère d'utilité directe de ces frais pour parer aux conséquences de l'accident et il appartient donc aux intéressés de justifier leur montant. 31. Mme D... a sollicité par une demande au CHRU de Besançon du 2 novembre 2016 que cet établissement prenne en charge, sur le fondement de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986, ses frais futurs de tierce-assistance, ainsi les coûts d'acquisition de différents ustensiles et de divers aménagements. Si la demande ne chiffrait pas ces frais, Mme D... versait en annexe de son courrier un devis du 20 février 2014 pour l'acquisition d'ustensiles, ainsi qu'un devis du 8 mars 2014 pour une assistance par une tierce personne à raison de six heures par semaine. Il ressort de l'expertise ordonnée par la cour administrative d'appel et de l'expertise d'ergothérapie que ces frais ont été directement entraînés par l'accident de service de Mme D... et que la requérante devait donc en obtenir la prise en charge. En refusant de prendre en charge les frais futurs de tierce-assistance et les frais d'acquisition d'ustensiles, le CHRU a dès lors méconnu les dispositions de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986. En revanche, Mme D... n'apportait aucun élément justifiant l'ampleur des aménagements nécessaires et le montant de ces aménagements, de sorte qu'elle n'est pas fondée à soutenir que le CHRU ne pouvait refuser de prendre en charge ces frais. La décision du 4 janvier 2017 doit ainsi être annulée seulement en tant qu'elle refuse de prendre en charge les frais d'acquisition d'ustensiles et de tierce-assistance. Sur les conclusions à fin d'injonction : 32. L'annulation de la décision du 4 janvier 2017, qui n'a pas pour objet de refuser la prise en charge d'honoraires médicaux, n'implique pas qu'il soit enjoint au CHRU de Besançon de prendre en charge les honoraires médicaux en lien avec l'accident de service du 5 novembre 2012. Les conclusions à fin d'injonction de Mme D... doivent dès lors être rejetées. Il incombe cependant au CHRU de Besançon, par application des dispositions de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 précitées, de continuer à prendre en charge l'intégralité des frais directement entraînés par l'accident de service, sous condition toutefois de la production par Mme D... des justificatifs des dépenses exposées et dans la limite, pour les dépenses déjà indemnisées au titre de l'action en responsabilité pour faute, des 30 % non encore indemnisés. Sur les frais d'expertise : 33. Dans les circonstances de l'espèce, les frais de l'expertise ordonnée par la cour, taxés et liquidés à la somme de 2 370 euros, ainsi que les frais de l'expertise ordonnée par le juge des référés du tribunal administratif de Besançon, taxés et liquidés à la somme de 2 077,75 euros, sont mis à la charge du CHRU de Besançon, qui est la partie perdante. Sur les frais liés à l'instance : 34. Il y a lieu de mettre à la charge du CHRU de Besançon une somme de 2 000 euros à verser à Mme D... sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D E C I D E : Article 1er : Le CHRU de Besançon est condamné à verser à Mme D... la somme de 139 161,03 euros avec intérêts aux taux légal à compter du 7 novembre 2016. Les intérêts échus à la date du 19 mai 2021 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés. Article 2 : Le CHRU de Besançon est condamné à verser à Mme D... la rente prévue au point 17 du présent arrêt. Article 3 : La décision du 4 janvier 2017 du CHRU de Besançon est annulée en tant qu'elle refuse de prendre en charge les frais futurs de tierce assistance et les frais d'acquisition d'ustensiles. Article 4 : Les frais de l'expertise ordonnée par la cour, taxés et liquidés à la somme de 2 370 euros, ainsi que les frais de l'expertise ordonnée par le juge des référés du tribunal administratif de Besançon, taxés et liquidés à la somme de 2 077,75 euros sont mis à la charge du CHRU de Besançon. Article 5 : Le CHRU de Besançon versera la somme de 2 000 euros à Mme D... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 6 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté. Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... D..., au centre hospitalier régional universitaire de Besançon et à la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Saône. Délibéré après l'audience du 6 septembre 2022, à laquelle siégeaient : - M. Wurtz, président de chambre - M. Meisse, premier conseiller, - M. Marchal, conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 septembre 2022. Le rapporteur, Signé : S. B... Le président, Signé : Ch. WURTZLe greffier, Signé : F. LORRAIN La République mande et ordonne au ministre de la santé et de la prévention, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, Le greffier : F. LORRAIN N° 18NC03349 2
Cours administrative d'appel
Nancy
CAA de BORDEAUX, 2ème chambre, 22/09/2022, 20BX01441
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler la décision du 1er février 2018 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande de pension militaire d'invalidité. Par un jugement n° 1902693 du 5 mars 2020, le tribunal a annulé la décision du 1er février 2018 et a renvoyé M. B... devant l'administration pour qu'il soit procédé à la détermination du taux d'invalidité. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 27 avril 2020 et un mémoire enregistré le 14 octobre 2020, la ministre des armées demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) de rejeter la demande présentée par M. B... devant le tribunal. Elle soutient que : - le tribunal, estimant qu'il devait se prononcer à la date à laquelle il statuait, a fait application des dispositions du 3° de l'article L. 121-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre dans leur rédaction issue de la loi du 13 juillet 2018, laquelle ne prévoit pas leur entrée en vigueur rétroactive ou leur application à des situations constituées avant leur entrée en vigueur ; - en l'espèce, il appartient à M. B... d'apporter la preuve de l'imputabilité de l'infirmité à un fait précis de service ou à des conditions particulières de service, ce qui n'est pas le cas dès lors que le rapport circonstancié du 29 août 2017 et celui du 5 décembre 2017 font référence à des conditions de service communes à tous les musiciens militaires ; ainsi, l'apparition de l'infirmité n'est pas rattachable au service ; - M. B... ne peut prétendre à la présomption définie à l'article L. 121-2, applicable à des cas limitativement énumérés dont il ne relève pas. Par un mémoire en défense enregistré le 1er juillet 2020, M. B..., représenté par la SELARL Jouteux, Carré-Guillot, Pilon, conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que : - c'est à bon droit que le tribunal a fait application de l'article L. 212-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre dans sa rédaction issue de la loi du 13 juillet 2018 ; - le syndrome du canal carpien dont il est atteint est imputable à l'exercice de ses fonctions de clarinettiste au sein de la Musique de la Garde républicaine, ainsi qu'il résulte notamment de l'arrêté de radiation des cadres du 10 juin 2020 ; - le caractère professionnel de sa maladie n'est pas contesté ; A titre subsidiaire : - l'interdiction du port de gants l'a contraint à jouer en soliste avec un instrument nécessitant une grande dextérité, par des températures négatives, ce qui n'a pu qu'aggraver une éventuelle pathologie préexistante ; - si la cour estimait que la preuve de la contraction de la maladie par le fait ou à l'occasion du service n'est pas apportée et écartait la présomption d'imputabilité, il conviendrait d'ordonner une expertise afin de déterminer l'imputabilité au service. M. B... a été maintenu de plein droit au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 29 octobre 2020. Par ordonnance du 28 février 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 29 mars 2022. Par lettre du 4 août 2022, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrégularité du jugement en tant qu'il a renvoyé M. B... devant l'administration pour la détermination du taux d'invalidité en application des dispositions du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre. Des observations à ce moyen d'ordre public ont été présentées pour M. B... le 16 août 2022 et par le ministre des armées le 26 août 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - le code de la sécurité sociale ; - la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme A..., - et les conclusions de Mme Gallier, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. M. B..., engagé dans la gendarmerie en 2002, était maréchal des logis chef affecté à la Musique de la Garde républicaine en qualité de clarinettiste depuis le 4 avril 2005. Il a présenté une demande de pension militaire d'invalidité, reçue par l'administration le 11 décembre 2017, pour l'infirmité d'impotence fonctionnelle des mains, qui a été rejetée par une décision du 1er février 2018 aux motifs que la preuve d'imputabilité n'était pas établie en l'absence de fait de service légalement constaté, que la présomption d'imputabilité ne pouvait s'appliquer, l'infirmité n'ayant pas été constatée pendant une période ouvrant droit à ce bénéfice, et que les circonstances d'apparition de l'infirmité relevaient des conditions générales de service. M. B... a contesté cette décision devant le tribunal administratif de Poitiers, lequel, par un jugement du 5 mars 2020, l'a annulée en retenant une présomption d'imputabilité au service, et a renvoyé l'intéressé devant l'administration pour la détermination du taux d'invalidité. La ministre des armées relève appel de ce jugement. Sur la régularité du jugement : 2. L'article L. 121-5 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre prévoit qu'une infirmité résultant exclusivement de maladie ouvre droit à pension si le taux d'invalidité atteint ou dépasse 30 % en cas d'infirmité unique. Lorsqu'il est saisi d'un litige en matière de pensions militaires d'invalidité, il appartient au juge administratif, en sa qualité de juge de plein contentieux, de se prononcer lui-même sur les droits de l'intéressé sauf à renvoyer à l'administration compétente, et sous son autorité, le règlement de tel aspect du litige dans des conditions précises qu'il lui appartient de fixer. Ce renvoi ne saurait toutefois porter sur les conditions d'ouverture du droit à pension. 3. Il résulte de ce qui précède qu'en renvoyant M. B... devant l'administration afin que celle-ci détermine le taux d'invalidité de son infirmité, taux qui conditionne l'ouverture de son droit à pension en application de l'article L. 121-5 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, le tribunal a méconnu son obligation d'épuiser son pouvoir juridictionnel. Par suite, le jugement est irrégulier et doit être annulé. 4. Il y a lieu pour la cour d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande de M. B.... Sur la présomption d'imputabilité au service : 5. Aux termes de l'article L. 121-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, dans sa rédaction applicable à la date de la demande de pension : " Ouvrent droit à pension : / (...) / 2° Les infirmités résultant de maladies contractées par le fait ou à l'occasion du service (...) ". L'article L. 121-2 définit un régime de présomption, lequel prévoyait seulement, à la date de la demande présentée le 11 décembre 2017 par M. B..., qu'il s'appliquait exclusivement, soit aux services accomplis en temps de guerre, au cours d'une expédition déclarée campagne de guerre ou en opération extérieure, soit au service accompli par les militaires pendant la durée légale du service national, les constatations étant faites dans les délais prévus aux précédents alinéas. Cette présomption a été modifiée par la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018, l'article L. 121-2 disposant désormais que : " Est présumée imputable au service : / (...) / 3° Toute maladie désignée par les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1, L. 461-2 et L. 461-3 du code de la sécurité sociale et contractée dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le militaire de ses fonctions dans les conditions mentionnées à ces tableaux ." Le syndrome du canal carpien, lequel peut notamment être provoqué par des travaux comportant de façon habituelle, soit des mouvements répétés ou prolongés d'extension du poignet ou de préhension de la main, soit un appui carpien, soit une pression prolongée ou répétée sur le talon de la main, figure au tableau n° 57 des maladies professionnelles annexé au livre IV du code de la sécurité sociale relatif aux affections périarticulaires provoquées par certains gestes et postures de travail. 6. Il appartient au juge de plein contentieux, lorsqu'il est saisi d'une demande dirigée contre une décision refusant une pension, de rechercher si les dispositions législatives et réglementaires en vigueur à la date de son jugement sont susceptibles de créer des droits au profit de l'intéressé. 7. La présomption d'imputabilité au service des maladies, instituée par la loi du 13 juillet 2018 s'applique, en l'absence de précision contraire du texte, à compter de l'entrée en vigueur de celui-ci. Il ne résulte ni du texte de la loi ni des travaux parlementaires que le législateur ait entendu rendre ce dispositif applicable à des personnes dont les droits à pension étaient déjà ouverts à cette date. L'article L. 151-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre fixe l'entrée en jouissance de la pension à la date du dépôt de la demande, de sorte que la pension ne peut être allouée qu'au regard des règles applicables à cette date. Par suite, la ministre des armées est fondée à soutenir que la présomption prévue par la rédaction de l'article L. 121-2 issue de la loi du 13 juillet 2018 n'est pas applicable à la demande déposée le 11 décembre 2017 par M. B.... Sur la preuve de l'imputabilité au service : 8. En vertu de L. 151-6 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, lorsque le demandeur de pension ne peut bénéficier de la présomption légale d'imputabilité et que cette imputabilité est niée par l'administration, la décision juridictionnelle lui attribuant pension doit faire ressortir les faits et documents ou les raisons d'ordre médical établissant que l'infirmité provient d'une maladie contractée par le fait ou à l'occasion du service. Si cette preuve ne peut résulter de la seule circonstance que l'infirmité est apparue durant le service, ni d'une probabilité même forte, d'une vraisemblance ou d'une simple hypothèse médicale, les dispositions susmentionnées n'interdisent pas au juge des pensions, faisant usage de son pouvoir souverain d'appréciation, de puiser dans l'ensemble des renseignements contenus au dossier une force probante suffisante pour former sa conviction et décider en conséquence que la preuve de l'imputabilité doit être regardée comme apportée. 9. Le rapport circonstancié établi le 16 octobre 2017 par le chef de la Musique de la Garde républicaine, qui précise que les musiciens doivent exercer leurs missions quelles que soient les conditions climatiques et que la bonne pratique de la clarinette exclut le port de gants et demande des mouvements de mains rapides et répétés, décrit l'évolution des douleurs ressenties par M. B... depuis plusieurs années, d'abord lors des services réalisés à l'extérieur par temps froid, puis par tout temps et en intérieur. Il indique qu'au début de l'année 2017, l'intéressé ne pouvait plus pratiquer son instrument du fait de l'intensité des douleurs, et qu'il a été placé en congé de maladie à compter du 27 février 2017, avec des prolongations régulières après consultation de spécialistes et différentes opérations. Le compte-rendu établi le 28 août 2017 par M. B..., joint à ce rapport, explique que les premières douleurs survenaient après avoir forcé la mobilité des doigts raidis par le froid, que depuis deux ans, un raidissement des doigts est ressenti, ainsi qu'un engourdissement pendant la pratique instrumentale, et qu'en dernier lieu, des douleurs intenses sont apparues sur la face dorsale du poignet droit. Il est ensuite relaté que des kystes synoviaux ont été diagnostiqués aux deux mains, qu'une opération du canal carpien réalisée à gauche le 4 juillet 2017 n'a pas supprimé les fourmillements, et qu'une autre à droite est prévue le 2 octobre 2017. Selon une lettre du chef du service de médecine physique et de réadaptation de l'hôpital d'instruction des armées Robert Picqué du 13 avril 2018, les douleurs devenues chroniques subsistant après la seconde intervention, même sans information nociceptive, peuvent s'expliquer par un exercice professionnel musical intensif, par tous les temps et sur des instruments particulièrement exigeants tels qu'une petite clarinette en mi bémol, dite " piccolo " que M. B... était seul à pratiquer dans sa formation. Le ministre de l'intérieur a retenu l'imputabilité au service de cette pathologie pour accorder un congé de longue maladie à M. B... à compter du 18 août 2017, puis, après épuisement des droits à ce congé et constat médical de l'inaptitude à la reprise du service, l'a radié des cadres " par suite d'infirmités survenues du fait de ses fonctions " à compter du 18 août 2020, par un arrêté du 10 juin 2020. Eu égard à ces éléments précis et concordants, l'imputabilité au service de l'infirmité d'impotence fonctionnelle des mains, d'ailleurs admise par le ministre de l'intérieur, doit être regardée comme établie, sans que la ministre des armées puisse utilement faire valoir que M. B... aurait été exposé aux conditions générales de service qui s'imposent à l'ensemble des musiciens militaires. 10. Le dossier ne permet pas d'apprécier si la maladie imputable au service est à l'origine d'un taux d'invalidité ouvrant droit à pension. Par suite, il y a lieu d'ordonner une expertise aux fins et dans les conditions prévues par le dispositif du présent arrêt. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Poitiers n° 1902693 du 5 mars 2020 est annulé. Article 2 : Avant de statuer sur le droit à pension de M. B..., il sera procédé à une expertise médicale contradictoire par un chirurgien orthopédiste spécialisé en chirurgie de la main, en présence de M. B... et du ministre des armées. Article 3 : L'expert aura pour mission : 1°) de prendre connaissance du dossier médical, et d'examiner M. B... ; 2°) en se plaçant à la date du 11 décembre 2017, de décrire la pathologie des deux mains dont M. B... est atteint et d'expliciter les incapacités fonctionnelles qui en résultent. 3°) de fixer le taux d'invalidité correspondant à cette pathologie, à la date du 11 décembre 2017, au regard du guide barème des invalidités applicable au titre du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre. Article 4 : Pour l'accomplissement de sa mission, l'expert pourra se faire remettre, en application de l'article R. 621-7-1 du code de justice administrative, tous documents utiles, et notamment tous ceux relatifs aux examens et soins pratiqués sur l'intéressé. Article 5 : L'expert sera désigné par le président de la cour. Après avoir prêté serment, il accomplira sa mission dans les conditions prévues par les articles R. 621-2 à R. 621-14 du code de justice administrative. Article 6 : Conformément aux dispositions du premier alinéa de l'article R. 621-9 du code de justice administrative, l'expert déposera son rapport au greffe sous forme dématérialisée dans le délai fixé par le président de la cour dans la décision le désignant. Il en notifiera une copie à chacune des parties intéressées. Avec l'accord de ces dernières, cette notification pourra s'opérer sous forme électronique. Article 7 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'en fin d'instance. Article 8 : Le présent arrêt sera notifié au ministre des armées et à M. C... B.... Délibéré après l'audience du 30 août 2022 à laquelle siégeaient : Mme Catherine Girault, présidente, Mme Anne Meyer, présidente-assesseure, M. Olivier Cotte, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 septembre 2022. La rapporteure, Anne A... La présidente, Catherine GiraultLa greffière, Virginie Guillout La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 20BX01441
Cours administrative d'appel
Bordeaux
CAA de NANTES, 6ème chambre, 27/09/2022, 21NT00581, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du 19 juin 2017 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande de revalorisation de sa pension militaire d'invalidité. Par un jugement n° 1905697 du 4 janvier 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire enregistrés les 3 mars et 25 novembre 2021, M. C..., représenté par Me Bihan, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 4 janvier 2021 ; 2°) d'annuler la décision du 19 juin 2017 ; 3°) de revaloriser sa pension militaire d'invalidité à la date du 28 juin 1988 ou subsidiairement au 1er janvier 2014 sur la base de l'indice 172,1 applicable pour un militaire de la marine nationale ayant un grade équivalent au sien ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil, qui renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, d'une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - le jugement attaqué est insuffisamment motivé ; les premiers juges ont omis de se prononcer sur la primauté du principe de sécurité juridique sur celui d'égalité ; - sa demande est recevable dès lors que les dispositions de l'article 5 du décret du 20 février 1959, qui limite le délai de contestation de la pension à six mois à compter de son attribution, n'a pas vocation à s'appliquer ; en tout état de cause, ce délai ne pourrait courir qu'à compter de la décision contestée ; en outre, il appartient à l'administration d'établir que la décision du 7 juin 1988 comportait la mention de l'indice servant au calcul de sa pension militaire d'invalidité ainsi que les voies et délais de recours ; - il est fondé à solliciter la revalorisation de sa pension militaire d'invalidité sur le fondement des articles 13 et 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du principe de valeur constitutionnel d'égalité ; - sa demande n'a pas pour objet de contester la décision initiale lui concédant une pension militaire d'invalidité mais de revaloriser sa pension sur la base d'une évolution normative intervenue en 2010 pour mettre un terme à une situation discriminatoire ; - qu'en toute hypothèse, il ne serait pas porté atteinte au principe de sécurité juridique dès lors que la revalorisation aurait une portée rétroactive limitée à 3 ans à compter de sa demande ; - il est fondé à solliciter une revalorisation à compter du 28 juin 1988, à tout le moins au 1er janvier 2014. Par un mémoire en défense, enregistré le 27 octobre 2021, la ministre des armées, conclut au rejet de la requête. Elle soutient que la requête est tardive et par suite irrecevable, et à titre subsidiaire, que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés. M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 12 juillet 2021. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; - le décret n° 59-327 du 20 février 1959 ; - le décret n° 2010-473 du 10 mai 2010 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme A..., - les conclusions de Mme Malingue, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. M. C..., adjudant-chef dans l'armée de terre, bénéficie d'une pension militaire d'invalidité au taux de 30 % qui lui a été concédée, à titre définitif, par un arrêté du 7 juin 1988. Le 23 janvier 2017, l'intéressé a présenté une demande de revalorisation de cette pension. Il souhaite un alignement de l'indice servant au calcul de sa pension sur celui dont bénéficient les militaires de la marine nationale. Par une décision du 19 juin 2017, la ministre des armées a rejeté sa demande au motif que le décret du 10 mai 2010 relatif à la détermination des indices des pensions et accessoires de pensions alloués aux invalides, aux conjoints survivants et aux orphelins au titre du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, qui a supprimé les différences de traitement entre les différents corps d'armée pour le calcul des pensions militaires d'invalidité, ne s'appliquait que pour les pensions concédées après sa publication. M. C... a saisi le tribunal des pensions militaires qui a transmis ce dossier au tribunal administratif de Rennes, devenu compétent. Il relève appel du jugement du 4 janvier 2021 par lequel les premiers juges ont rejeté sa requête pour tardiveté. Sur la régularité du jugement attaqué : En ce qui concerne la motivation du jugement attaqué : 2. Le tribunal administratif a estimé qu'eu égard au principe de sécurité juridique, M. C... n'avait pas introduit sa demande dans un délai raisonnable. Sa requête étant jugée tardive et par suite irrecevable, les premiers juges n'avaient pas à répondre aux moyens de fond présentés par l'intéressé, et notamment à celui tiré de ce que la décision contestée du 19 juin 2017 serait contraire au principe d'égalité. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que par le jugement attaqué, qui est suffisamment motivé, le tribunal administratif aurait omis de se prononcer sur la primauté du principe de sécurité juridique sur celui d'égalité. Contrairement à ce que soutient le requérant, le jugement attaqué n'est pas entaché d'irrégularité à raison de ce motif. En ce qui concerne la recevabilité de la requête présentée par M. C... : 3. Aux termes de l'article 78 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, repris à l'article L. 154-4 du même code, en vigueur à la date du 23 janvier 2017 : " I- Les pensions définitives ou temporaires attribuées au titre du présent code peuvent être révisées dans les cas suivants : 1° Lorsqu'une erreur matérielle de liquidation a été commise ; 2° Lorsque les énonciations des actes ou des pièces au vu desquels l'arrêté de concession a été pris sont reconnues inexactes, ou bien en ce qui concerne le grade ou les circonstances du décès, ou bien en ce qui concerne l'état des services, ou bien en ce qui concerne l'état civil ou la situation de famille, ou bien en ce qui concerne le droit au bénéfice d'un statut légal générateur de droits. / Dans tous les cas, la révision a lieu sans condition de délai, dans les mêmes formes que la concession, sur l'initiative du ministre chargé du budget ou du ministre chargé des anciens combattants et victimes de guerre ou à la demande des parties, par voie administrative si la décision qui a alloué la pension définitive ou temporaire ne faisait pas suite à une procédure contentieuse. / Dans le cas contraire, la demande en révision est portée devant la juridiction qui avait rendu la décision attaquée. Elle en est saisie dans les formes indiquées au livre VII.(...)". 4. M. C... ne conteste ni une erreur matérielle de liquidation de sa pension, ni une erreur dans les faits ayant conduit à ce que cette pension lui soit concédée. Par suite, il n'entre pas dans les prévisions de l'article 154-4 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre permettant de solliciter la révision d'une pension militaire d'invalidité sans condition de délai. 5. Par ailleurs, aux termes de l'article 5 du décret du 20 février 1959 relatif aux juridictions des pensions, dans sa rédaction en vigueur à la date du 23 janvier 2017 : " Les décisions prises par le ministre de la défense ou le ministre chargé du budget en application des dispositions des articles L. 115, L. 128 et R. 19 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre sont susceptibles, dans le délai de six mois à compter de leur notification, de recours devant le tribunal des pensions. ". La demande présentée par le titulaire d'une pension militaire d'invalidité, concédée à titre temporaire ou définitif sur la base du grade que l'intéressé détenait dans l'armée de terre, l'armée de l'air ou la gendarmerie, tendant à la revalorisation de cette pension en fonction de l'indice afférent au grade équivalent applicable aux personnels de la marine nationale, doit être formée dans le délai de six mois fixé par ces dispositions. Toutefois, aux termes de l'article R. 421-5 du code de justice administrative : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision ". 6. Il est constant que M. C... s'est vu attribuer à titre définitif une pension militaire d'invalidité au taux de 30 % par un arrêté du 7 juin 1988. Il aurait donc dû solliciter la révision de sa pension dans les six mois suivant la notification de cette décision. Toutefois, si le ministre a produit en première instance un document daté du 28 juin 1988 signé par M. C... attestant qu'il a eu connaissance de cette décision, laquelle indiquait l'indice sur la base duquel sa pension était calculée, aucune pièce du dossier ne permet d'établir qu'à cette date il aurait été régulièrement informé des voies et délais de recours lui permettant de contester notamment l'indice retenu par l'administration. Par suite, M. C... est fondé à soutenir que les dispositions précitées ne lui étaient pas opposables, ainsi que l'a d'ailleurs jugé le tribunal administratif. 7. Toutefois, ainsi que l'a rappelé le tribunal administratif, le principe de sécurité juridique, qui implique que ne puissent être remises en cause sans condition de délai des situations consolidées par l'effet du temps, fait obstacle à ce que puisse être contestée indéfiniment une décision administrative individuelle qui a été notifiée à son destinataire, ou dont il est établi, à défaut d'une telle notification, que celui-ci a eu connaissance. En une telle hypothèse, si le non-respect de l'obligation d'informer l'intéressé sur les voies et les délais de recours, ou l'absence de preuve qu'une telle information a bien été fournie, ne permet pas que lui soient opposés les délais de recours fixés par le code de justice administrative, le destinataire de la décision ne peut exercer de recours juridictionnel au-delà d'un délai raisonnable. En règle générale et sauf circonstances particulières dont se prévaudrait le requérant, ce délai ne saurait, sous réserve de l'exercice de recours administratifs pour lesquels les textes prévoient des délais particuliers, excéder un an à compter de la date à laquelle une décision expresse lui a été notifiée ou de la date à laquelle il est établi qu'il en a eu connaissance. 8. Il ressort des pièces du dossier que l'administration a produit l'arrêté de concession définitive de la pension militaire d'invalidité de M. C... du 7 juin 1988 ainsi que la déclaration préalable à la mise en paiement de la pension. Celle-ci porte la signature de l'intéressé qui atteste l'avoir reçue le 28 juin 1988. Par suite, à compter de cette date, M. C... était en mesure de contester cette décision, ou les modalités de calcul de sa pension militaire d'invalidité, dont il avait alors eu connaissance. Les circonstances que le décret du 5 septembre 1956 relatif à la détermination des indices des pensions et accessoires de pensions alloués aux invalides au titre du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre a fixé les indices de la pension d'invalidité afférents aux grades des sous-officiers de l'armée de terre, de l'armée de l'air et de la gendarmerie à un niveau inférieur aux indices attachés aux grades équivalents dans la marine nationale en méconnaissance du principe d'égalité, et que le décret du 10 mai 2010 a procédé, pour les pensions concédées après sa publication, à un alignement des indices applicables à tous les militaires quel que soit leur corps d'armée pour le calcul des pensions militaires d'invalidité, ne peuvent être regardées comme l'ayant empêché d'exercer son recours devant l'administration avant le 23 janvier 2017, puis de saisir le tribunal des pensions militaires aux fins de révision de sa pension avant le 7 août 2017. Dans ces conditions, c'est à juste titre que les premiers juges ont estimé que le recours présenté par M. C... tendant à la revalorisation de sa pension militaire d'invalidité, alors même qu'il avait été introduit dans le délai de deux mois suivant la décision de la ministre du 19 juin 2017 rejetant sa demande, avait été présenté au-delà du délai raisonnable durant lequel il pouvait être exercé. 9. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Ses conclusions tendant à ce que la cour procède à la revalorisation de sa pension militaire d'invalidité doivent, par voie de conséquence, également être rejetées. Sur les frais liés au litige : 10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement au conseil de M. C... de la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. C... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre des armées. Délibéré après l'audience du 9 septembre 2022, à laquelle siégeaient : - M. Gaspon, président de chambre, - M. Coiffet, président-assesseur, - Mme Gélard, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 27 septembre 2022. La rapporteure, V. GELARDLe président, O. GASPON La greffière, S.PIERODE La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21NT00581
Cours administrative d'appel
Nantes
CAA de LYON, 3ème chambre, 28/09/2022, 20LY02547, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure Mme A... B... épouse C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision en date du 23 novembre 2018 par laquelle le maire de ... a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de sa pathologie. Par un jugement n° 1900639 du 24 juin 2020, le tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande. Procédure devant la cour Par une requête enregistrée le 1er septembre 2020 et un mémoire enregistré le 15 décembre 2021, ce dernier n'ayant pas été communiqué, Mme B... épouse C..., représentée par Me Gras (SELAS Agis), avocate, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 24 juin 2020 ; 2°) d'annuler la décision en date du 23 novembre 2018 par laquelle le maire de ... a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de sa pathologie ; 3°) d'enjoindre à la commune de ... de déclarer sa pathologie imputable au service et de lui verser l'intégralité de son traitement et le remboursement de l'ensemble de ses frais médicaux, du 1er décembre 2015 à ce jour, dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ; 4°) subsidiairement, d'ordonner la réalisation d'une expertise ; 5°) de mettre à la charge de la commune de ... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la décision litigieuse a été adoptée au terme d'une procédure irrégulière, aucun spécialiste de sa pathologie n'ayant participé à la séance de la commission de réforme préalablement consultée ; - elle méconnaît le 2° de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984, sa pathologie ayant une origine professionnelle. Par un mémoire en défense enregistré le 20 mai 2021, la commune de ..., représentée par Me Cottignies (SELARL Philippe Petit et associés), avocat, conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge de Mme C... la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle expose que les moyens soulevés ne sont pas fondés. Par ordonnance du 18 novembre 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 15 décembre 2021. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 ; - l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière ; - le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Sophie Corvellec, première conseillère ; - les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public ; - et les observations de Me Soalla, avocate, représentant Mme C..., et de Me Garaudet, avocate, représentant la commune de ... ; Considérant ce qui suit : 1. Mme B... épouse C..., alors adjointe territoriale au sein de la commune de ..., relève appel du jugement du 24 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du maire de la commune du 23 novembre 2018 refusant de reconnaître l'imputabilité au service de sa pathologie. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 2. En premier lieu, aux termes de l'article 31 du décret du 26 décembre 2003 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales : " Une commission de réforme est constituée dans chaque département pour apprécier la réalité des infirmités invoquées, la preuve de leur imputabilité au service, les conséquences et le taux d'invalidité qu'elles entraînent, l'incapacité permanente à l'exercice des fonctions. (...) La composition et le fonctionnement des commissions de réforme sont fixés par arrêté conjoint des ministres chargés de la sécurité sociale, des collectivités territoriales, de la santé et du budget, pris après avis du conseil supérieur compétent ". Aux termes de l'article 16 de l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière : " La commission de réforme doit être saisie de tous témoignages, rapports et constatations propres à éclairer son avis. Elle peut faire procéder à toutes mesures d'instructions, enquêtes et expertises qu'elle estime nécessaires. Dix jours au moins avant la réunion de la commission, le fonctionnaire est invité à prendre connaissance, personnellement ou par l'intermédiaire de son représentant, de son dossier, dont la partie médicale peut lui être communiquée, sur sa demande, ou par l'intermédiaire d'un médecin ; il peut présenter des observations écrites et fournir des certificats médicaux. La commission entend le fonctionnaire, qui peut se faire assister d'un médecin de son choix. Il peut aussi se faire assister par un conseiller ". En vertu des dispositions de l'article 3 du même arrêté, la commission de réforme comprend : " 1. Deux praticiens de médecine générale, auxquels est adjoint, s'il y a lieu, pour l'examen des cas relevant de sa compétence, un médecin spécialiste qui participe aux débats mais ne prend pas part aux votes (...) ". 3. Il résulte des dispositions citées au point précédent que, dans le cas où il est manifeste, eu égard aux éléments dont dispose la commission de réforme, que la présence d'un médecin spécialiste de la pathologie invoquée par un agent est nécessaire pour éclairer l'examen de son cas, l'absence d'un tel spécialiste est susceptible de priver l'intéressé d'une garantie et d'entacher ainsi la procédure devant la commission d'une irrégularité justifiant l'annulation de la décision litigieuse. 4. Il ressort des pièces du dossier qu'en se prévalant d'un certificat médical du Dr M. daté du 4 juin 2018, Mme C... a sollicité la reconnaissance de l'imputabilité au service d'une arthropathie acromio-claviculaire et d'une tendinopathie de la coiffe des rotateurs de son épaule droite. Pour émettre un avis sur cette demande, la commission de réforme disposait notamment d'un avis rendu le 12 juillet 2018, après examen de l'intéressée, par le Dr M., rhumatologue. Mme C... ne démontre nullement que cet avis, rendu par un spécialiste de sa pathologie, était insuffisant pour éclairer la commission de réforme, en se prévalant uniquement de certificats émanant d'un médecin généraliste et d'un certificat établi par un rhumatologue, dépourvu de tout caractère affirmatif quant à l'origine de sa pathologie. Ainsi, il n'est pas manifeste que la participation d'un rhumatologue à la séance du 6 novembre 2018 aurait été nécessaire. Par suite, l'absence d'un tel médecin spécialiste n'a pas été de nature à entacher la procédure suivie devant la commission de réforme d'irrégularité. 5. En second lieu, aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale dans sa rédaction alors applicable : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. (...) Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident, même après la date de radiation des cadres pour mise à la retraite. Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales (...) ". 6. Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service. 7. Il ressort des pièces du dossier que, pour rejeter la demande de Mme C..., le maire de ... a suivi l'avis émis par la commission de réforme le 6 novembre 2018, lui-même conforme à l'avis rendu par un médecin rhumatologue le 12 juillet 2018 et concluant à l'absence d'imputabilité au service de la pathologie de l'intéressée. Si Mme C... se prévaut de deux certificats en sens inverse du Dr M., généraliste, il n'est pas établi, contrairement à ce qu'affirment ces certificats, que le poste de secrétaire médicale qu'elle occupait depuis 2009, à la suite d'un reclassement, supposait la manipulation de lourds dossiers. Il n'est, en outre, pas contesté que, précédemment affectée à un poste d'agent d'entretien, Mme C... a bénéficié d'adaptations excluant le port de charges lourdes dès 1994 et, à l'exception de quelques mois en 2001, a cessé d'exercer ces fonctions dès 1999. Enfin, et comme indiqué précédemment, le certificat établi par un rhumatologue le 15 novembre 2018 dont Mme C... se prévaut est dépourvu de tout caractère affirmatif quant à l'origine de sa pathologie. Dans ces conditions, il n'est nullement établi que la tendinopathie de la coiffe des rotateurs de son épaule droite, diagnostiquée en 2015, de même que les cervicalgies, apparues antérieurement, seraient directement liées à l'exercice de ses fonctions. 8. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner la réalisation d'une expertise, que Mme B... épouse C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Sur les conclusions à fin d'injonction : 9. La présente décision rejetant les conclusions à fin d'annulation de Mme B... épouse C... et n'appelant, dès lors, aucune mesure d'exécution, ses conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées. Sur les frais liés au litige : 10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de ..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par Mme B... épouse C.... Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de cette dernière le paiement des frais exposés par la commune de ... en application de ces mêmes dispositions. DÉCIDE : Article 1er : La requête de Mme B... épouse C... est rejetée. Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de ... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... épouse C... et à la commune de .... Délibéré après l'audience du 13 septembre 2022, à laquelle siégeaient : M. Jean-Yves Tallec, président de chambre, M. Gilles Fédi, président-assesseur, Mme Sophie Corvellec, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 septembre 2022. La rapporteure, Sophie CorvellecLe président, Jean-Yves Tallec La greffière, Sandra Bertrand La République mande et ordonne au préfet du Rhône en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition, La greffière, 2 N° 20LY02547
Cours administrative d'appel
Lyon
CAA de NANTES, 6ème chambre, 27/09/2022, 21NT03104, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Rennes, tout d'abord, d'annuler la décision du 4 février 2019 par laquelle le recteur de l'académie de Rennes l'a admis à la retraite d'office pour invalidité à compter du 24 mai 2017, ensuite, d'enjoindre à l'État de le réintégrer dans l'éducation nationale avec effet rétroactif et d'évaluer le " choc que constitue cette procédure " depuis plus de dix ans et la " violence que représente la remise en cause répétée de sa rationalité ", enfin, d'ordonner une nouvelle expertise psychiatrique. Par un jugement n° 1902109 du 15 septembre 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 5 novembre 2021, M. A..., représenté par Me Collet, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 15 septembre 2021 ; 2°) d'annuler la décision du 4 février 2019 du recteur de l'académie de Rennes ; 3°) d'ordonner, à titre subsidiaire, une expertise ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - le jugement attaqué qui méconnait les dispositions de l'article R.741-7 du code de justice administrative est entaché d'irrégularité ; - sur le fond, c'est à tort que le tribunal a estimé que le recteur n'avait commis aucune erreur d'appréciation sur son état de santé alors qu'il est parfaitement apte à reprendre ses fonctions de professeur des écoles ; son état de santé ne relève nullement d'une inaptitude totale et définitive ; un avis médical du 11 février 2015 a en effet estimé que son état permettait, après un congé de longue durée d'office, une reprise à temps plein ; - l'arrêté contesté n'est pas motivé ; Par un mémoire en défense, enregistré le 15 mars 2022, le recteur de l'Académie de Rennes conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. B..., - et les conclusions de Mme Malingue, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. Par un arrêté du 4 février 2019, le recteur de l'académie de Rennes a, après avoir recueilli, lors d'une séance du 22 novembre 2018, l'avis de la commission de réforme, admis d'office M. A..., professeur des écoles, à la retraite pour invalidité à compter du 24 mai 2017, en raison de son incapacité définitive et absolue à exercer ses fonctions. Le 7 mars 2019, il a formé un recours gracieux qui a été rejeté implicitement. 2. M. A..., le 29 avril 2019, a alors saisi le tribunal administratif de Rennes d'une demande tendant à l'annulation de la décision du 4 février 2019 du recteur de l'académie de Rennes, à ce qu'il soit enjoint à l'État de le réintégrer dans l'éducation nationale avec effet rétroactif et d'évaluer le " choc que constitue la procédure " engagée depuis plus de dix ans et la " violence que représente la remise en cause répétée de sa rationalité ", enfin, à ce que soit ordonnée une nouvelle expertise psychiatrique. M. A... relève appel du jugement du 15 septembre 2021 par lequel cette juridiction a rejeté sa demande. Sur la régularité du jugement attaqué : 3. Aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ". Contrairement à ce qui est allégué par M. A..., il ressort des pièces du dossier que la minute du jugement attaqué est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier de l'audience. Le moyen tiré de l'irrégularité de ce jugement pour ce motif ne peut donc qu'être écarté. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 4. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " (...) doivent être motivées les décisions qui : (...) 4° Retirent ou abrogent une décision créatrice de droits (...) ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. " En application de ces dispositions, la décision qui, comme l'arrêté contesté, met fin avant son terme normal à la carrière d'un fonctionnaire, est au nombre de celles qui doivent être motivées. 5. L'arrêté portant admission à la retraite pour invalidité de M. A... vise les textes législatifs et réglementaires applicables à sa situation, en particulier le code des pensions civiles et militaires, notamment ses articles L.27, L.29 et L.3, la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, notamment son article 24, la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ainsi que l'avis en date du 22 novembre 2018 de la commission de réforme départementale dont il rappelle qu'elle a estimé que " l'intéressé est dans l'impossibilité définitive et absolue d'exercer ses fonctions " et l'avis conforme du ministre du budget. Par ailleurs, le recteur de l'académie de Rennes s'est expressément fondé, à l'article unique de l'arrêté contesté, sur cet avis de la commission de réforme du 22 novembre 2018, dont il s'est approprié les motifs, pour décider que M. C... A..., professeur des écoles de classe normale " était admis à la retraite pour invalidité à compter du 24 mai 2017, en raison de son incapacité définitive et absolue à exercer ses fonctions ". La décision contestée comporte ainsi l'énoncé des motifs de droit et des considérations de fait qui en constituent le fondement et satisfait aux exigences de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation doit être écarté. 6. En second lieu, d'une part, aux termes de l'article L. 29 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " Le fonctionnaire civil qui se trouve dans l'incapacité permanente de continuer ses fonctions en raison d'une invalidité ne résultant pas du service et qui n'a pu être reclassé dans un autre corps en application de l'article 63 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précitée peut être radié des cadres par anticipation soit sur sa demande, soit d'office ; dans ce dernier cas, la radiation des cadres est prononcée sans délai si l'inaptitude résulte d'une maladie ou d'une infirmité que son caractère définitif et stabilisé ne rend pas susceptible de traitement, ou à l'expiration d'un délai de douze mois à compter de sa mise en congé si celle-ci a été prononcée en application de l'article 36 (2°) de l'ordonnance du 4 février 1959 relative au statut général des fonctionnaires ou à la fin du congé qui lui a été accordé en application de l'article 36 (3°) de ladite ordonnance (...) ". 7. Aux termes, d'autre part, de l'article 47 du décret du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires : " Le fonctionnaire ne pouvant, à l'expiration de la dernière période de congé de longue maladie ou de longue durée, reprendre son service est soit reclassé dans un autre emploi (...), soit mis en disponibilité, soit admis à la retraite après avis de la commission de réforme (...) ". 8. M. A..., qui soutient à nouveau en appel qu'il est parfaitement apte à exercer ses fonctions de professeur des écoles, se prévaut exclusivement du rapport établi le 11 février 2015 par le docteur D..., expert désigné, qui avait alors estimé que " son état permettait, après un congé de longue durée d'office, une reprise à temps plein ". Toutefois, d'une part, il ressort des pièces du dossier qu'à cette date, la question posée n'était pas encore celle de " l'inaptitude de ce professeur à ses fonctions et à toutes fonctions " et que, d'ailleurs, après avis défavorable du 26 mars 2015 du comité médical départemental (CMD) qui avait été destinataire de ce rapport, le recteur de l'académie de Rennes a, par une décision définitive du 31 mars 2015 étrangère au présent litige, refusé de réintégrer l'intéressé et s'est prononcé pour une prolongation d'un an de son congé de longue durée à compter du 24 novembre 2014. L'invocation du rapport du 11 février 2015 demeure ainsi sans incidence sur l'appréciation de la situation de fait prise en compte par l'arrêté contesté. D'autre part, il est constant que postérieurement à cette décision, le CMD a, les 22 octobre 2015 et 25 août 2016, émis des avis favorables au renouvellement du congé de longue durée de l'agent, le comité en question émettant en dernier lieu un avis d'inaptitude totale à ses fonctions et à toutes fonctions à l'issue de ses droits à congé de longue durée, que le comité médical supérieur a, quant à lui, le 23 mai 2017, confirmé en tous points les conclusions de ces avis médicaux. Enfin, et surtout, ainsi qu'il a été rappelé au point 5, c'est en prenant en compte l'avis de la commission de réforme du 22 novembre 2018, intervenu plus de trois ans après l'avis dont se réclame M. A..., aux termes duquel " l'intéressé est dans l'impossibilité définitive et absolue d'exercer ses fonctions ", que l'arrêté contesté a été pris. Or, aucun élément du dossier ne permet de remettre en cause le bien-fondé de la décision du recteur de l'académie de Rennes prise au vu de l'avis de la commission de réforme, confirmant les avis du comité médical départemental et du comité médical supérieur, tous convergents, quant à l'inaptitude définitive et absolue de l'intéressé à l'exercice de toute fonction. Le moyen tiré de l'erreur d'appréciation sera écarté. 9. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise, que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du 4 février 2019 du recteur de l'académie de Rennes. Sur les frais liés au litige : 10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. A... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. DECIDE : Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et au recteur de l'académie de Rennes. Délibéré après l'audience du 9 septembre 2022, à laquelle siégeaient : - M. Gaspon, président de chambre, - M. Coiffet, premier conseiller, - Mme Gélard, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 27 septembre 2022. Le rapporteur, O. B... Le président, O. GASPON La greffière, S. PIERODE La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse en ce qui la concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. N°21NT03104 2
Cours administrative d'appel
Nantes
CAA de LYON, 7ème chambre, 22/09/2022, 21LY00596, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du 7 décembre 2017 par laquelle le ministre de la défense a rejeté sa demande de pension militaire d'invalidité au titre du syndrome post-traumatique. Par un jugement n° 1907311 du 28 décembre 2020, le tribunal a rejeté sa demande. Procédure devant la cour Par une requête enregistrée le 25 février 2021, Mme A..., représentée par Me Laborie, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement et la décision contestée ; 2°) d'ordonner une expertise à titre subsidiaire ; 3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la décision du 7 juillet 2008 ne mentionnait pas les délais et voies de recours ; la décision d'allocation d'une pension militaire d'invalidité pour pathologie cervicale ne peut valoir notification du rejet de sa demande de pension pour pathologie psychique ; - elle établit l'existence de circonstances particulières l'ayant empêchée de contester la décision du 7 juillet 2008 ; - la décision du 7 décembre 2017 n'est pas confirmative, sa demande du 30 mai 2017 étant relative à une infirmité nouvelle, liée au syndrome post-traumatique ; elle ne concernait pas la même pathologie que celle qui a fait l'objet de la décision du 7 juillet 2008 ; - le lien entre son traumatisme et ses fonctions militaires est indiscutable ; son taux de pension doit donc être réévalué. Par un mémoire enregistré le 18 novembre 2021, la ministre des armées conclut au rejet de la requête. Elle soutient qu'aucun moyen de la requête n'est fondé. Par une ordonnance du 18 mars 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 8 avril 2022. Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 10 février 2021. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018 ; - le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Djebiri, première conseillère ; -et les conclusions de M. Rivière, rapporteur public ; Considérant ce qui suit : 1. Mme A..., née en 1971, et engagée dans l'armée de terre le 1er juin 1993, a été victime le 12 juin 1997 d'un accident lors d'un match de volley-ball. En raison d'une atteinte aux cervicales consécutive à un accident survenu le 12 juin 1997, elle a obtenu par un jugement du 11 juin 2003 une pension militaire d'invalidité de 20 %. Le 7 juillet 2008, le versement d'une pension militaire d'invalidité au titre d'un " syndrome hyperalgique avec troubles de l'adaptation à symptomatologie mixte anxieuse. Contexte de personnalité psychotique ", qu'elle avait demandé le 3 janvier 2007, lui a été refusé. Le 7 décembre 2017 le ministre de la défense a rejeté une nouvelle demande que Mme A... avait formée le 16 mai 2017 pour obtenir le bénéfice d'une telle pension pour " syndrome post-traumatique hyperalgique avec des troubles de l'adaptation à réaction mixte anxieuse et dépressive ". Elle relève appel du jugement du 28 décembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande d'annulation de cette décision. 2. Aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. (...) " Aux termes de l'article R. 421-5 de ce code : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision. " 3. Le principe de sécurité juridique, qui implique que ne puissent être remises en cause sans condition de délai des situations consolidées par l'effet du temps, fait obstacle à ce que puisse être contestée indéfiniment une décision administrative individuelle qui a été notifiée à son destinataire, ou dont il est établi, à défaut d'une telle notification, que celui-ci a eu connaissance. En une telle hypothèse, si le non-respect de l'obligation d'informer l'intéressé sur les voies et les délais de recours, ou l'absence de preuve qu'une telle information a bien été fournie, ne permet pas que lui soient opposés les délais de recours fixés par le code de justice administrative, le destinataire de la décision ne peut exercer de recours juridictionnel au-delà d'un délai raisonnable. En règle générale et sauf circonstances particulières dont se prévaudrait le requérant, ce délai ne saurait, sous réserve de l'exercice de recours administratifs pour lesquels les textes prévoient des délais particuliers, excéder un an à compter de la date à laquelle une décision expresse lui a été notifiée ou de la date à laquelle il est établi qu'il en a eu connaissance. Cette règle, qui a pour seul objet de borner dans le temps les conséquences de la sanction attachée au défaut de mention des voies et délais de recours, ne porte pas atteinte à la substance du droit au recours, mais tend seulement à éviter que son exercice, au-delà d'un délai raisonnable, ne mette en péril la stabilité des situations juridiques et la bonne administration de la justice, en exposant les défendeurs potentiels à des recours excessivement tardifs. Il appartient dès lors au juge administratif d'en faire application au litige dont il est saisi, quelle que soit la date des faits qui lui ont donné naissance. 4. Mme A..., dont la demande de pension relative à sa pathologie psychiatrique date du 3 janvier 2007, mais dont la décision de refus du 7 juillet 2008 ne lui a pas été notifiée avec la mention des voies et délais de recours, a signé le 16 juillet 2008 une déclaration préalable à la mise en paiement de sa pension militaire d'invalidité relative uniquement aux séquelles d'une entorse cervicale. Il apparaît qu'elle a nécessairement eu connaissance, au plus tard à cette dernière date, que sa demande du 3 janvier 2007 avait été rejetée. Si Mme A... entend se prévaloir de ses hospitalisations en 2008, elle n'établit aucunement que, eu égard à leur caractère intermittent, elles seraient constitutives de circonstances particulières qui l'auraient empêchée d'exercer, dans un délai raisonnable d'un an, un recours contentieux contre le rejet de sa demande de prise en charge. De toutes les façons, et même en admettant que, compte tenu notamment d'hospitalisations qui se sont poursuivies jusqu'en 2013, ce délai raisonnable devait être reporté au-delà d'un an, il n'en reste pas moins que, lorsque lui a été opposée la décision contestée du 7 décembre 2017, le délai pour exercer un recours juridictionnel contre la décision rejetant sa demande du 3 janvier 2007 était expiré. Il apparaît par ailleurs que, comme l'a relevé le tribunal, les demandes de pension militaire d'invalidité formulées les 3 janvier 2007 et 16 mai 2017 sont relatives à la même pathologie psychiatrique quand bien même les termes utilisés ne seraient pas strictement identiques, évoquant pour la première un " syndrome hyperalgique avec troubles de l'adaptation à symptomatologie mixte anxieuse. Contexte de personnalité psychotique " et pour la seconde un " syndrome post-traumatique hyperalgique avec des troubles de l'adaptation à réaction mixte anxieuse et dépressive ". D'ailleurs, la décision du 7 décembre 2017 indique qu'elle concerne la même pathologie que celle qui a fait l'objet du refus du 7 juillet 2008. Dans ces circonstances, et en l'absence de toute modification dans les circonstances de fait ou de droit, la décision de rejet du 7 décembre 2017 constitue une décision purement confirmative de celle du 7 juillet 2008, portée à la connaissance de l'intéressée au plus tard le 16 juillet suivant, et n'est pas de nature à rouvrir le délai de recours contentieux. Il suit de là que la demande de première instance de Mme A... était tardive. 5. Il résulte de ce qui précède qu'elle n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Sa requête doit, dans l'ensemble de ses conclusions, être rejetée. DÉCIDE : Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre des armées. Délibéré après l'audience du 8 septembre 2022 à laquelle siégeaient : M. Picard, président de chambre ; M. Seillet, président assesseur ; Mme Djebiri, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 septembre 2022. La rapporteure, C. Djebiri Le président V.-M. Picard La greffière, A. Le Colleter La République mande et ordonne au ministre des armées, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition, La greffière, N° 21LY00596 2 al
Cours administrative d'appel
Lyon