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CAA de MARSEILLE, 6ème chambre, 16/12/2019, 18MA00292, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme E... C... a demandé au tribunal administratif de Nice d'ordonner une expertise médicale relative aux conséquences de l'accident de service dont elle a été victime le 21 novembre 2013 puis d'annuler la décision du 15 mars 2017 par laquelle le recteur de l'académie de Nice a fixé la date de consolidation de ses blessures au 28 juillet 2014 avec un taux d'incapacité permanente partielle de 10 % imputable à l'accident de service et de 6 % non imputable au service, la décision implicite de rejet opposée par le même recteur à sa demande du 15 mai 2015 tendant à la communication du procès-verbal de la commission de réforme et à son placement en congé de maladie à plein traitement du 21 juin au 1er septembre 2014, ainsi que l'arrêté du 7 février 2014 par lequel le recteur de l'académie de Nice l'a admise à faire valoir ses droits à la retraite par anticipation à compter du 1er septembre 2014. Par un jugement n° 1503743 du 21 novembre 2017, le tribunal administratif de Nice a, d'une part, annulé la décision implicite de refus opposée par le recteur à la demande de Mme C... présentée le 15 mai 2015 tendant à son placement en congé de maladie imputable au service du 21 juin au 31 août 2014 ainsi que sa décision du 15 mars 2017 fixant la date de consolidation et le taux d'incapacité permanente partielle, d'autre part, rejeté le surplus de la demande de Mme C.... Procédure devant la Cour : Par une requête enregistrée le 21 janvier 2018, Mme C..., représentée par Me B..., demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du recteur de l'académie de Nice du 7 février 2014 ; 2°) d'enjoindre au recteur de convoquer une nouvelle commission de réforme en vue d'examiner sa situation, de la placer en congé de maladie à plein traitement du 21 novembre 2013 au 31 août 2014 et de l'admettre à faire valoir ses droits à une pension de retraite pour invalidité ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à lui verser sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - elle a présenté, le 22 mai 2015, un recours gracieux à l'encontre de l'arrêté rectoral du 7 février 2014 et sollicité à cette occasion sa mise à la retraite sur le fondement des dispositions de l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ; - elle était recevable à demander à tout moment le retrait de cet arrêté dont elle est bénéficiaire ; - il incombait à l'autorité administrative de réexaminer sa demande en tenant compte de la décision du recteur du 27 mai 2015 ; - elle est fondée à demander sa mise à la retraite sur le fondement des dispositions de l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ; - le rectorat a manqué de diligence dans l'édiction de l'arrêté contesté ; - la décision du recteur du 15 mars 2017 est entachée d'un vice de procédure ; - elle était fondée à solliciter le bénéfice des dispositions du 2ème alinéa du 2° de l'article 34 de la loi du 11 juillet 1984. Par un mémoire en défense enregistré le 1er mars 2019, le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse conclut au rejet de la requête. Il soutient que : - la demande de Mme C... devant le tribunal administratif était tardive ; - les moyens qu'elle soulève ne sont pas fondés. Par ordonnance du 25 mars 2019, la clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 15 avril suivant. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. A... Gautron, rapporteur ; - et les conclusions de M. D... Thiele, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. Mme C... a été recrutée en qualité d'infirmière par le rectorat de Nice au cours de l'année 2002 et a exercé ses fonctions au sein du lycée professionnel Paul Valéry de Menton à partir de l'année 2005. Elle a sollicité, le 3 septembre 2013, sa mise à la retraite par anticipation. Le 21 novembre 2013, elle a été victime, sur son lieu de travail, d'un accident reconnu imputable au service par une décision du recteur de l'académie de Nice du 18 mars 2015 faisant suite à un avis en ce sens de la commission de réforme départementale des Alpes-Maritimes du 20 février précédent. Par un arrêté du 1er février 2014, le recteur avait toutefois déjà fait droit à la demande de mise à la retraite anticipée présentée par l'intéressée le 3 septembre 2013. Mme C... a contesté cet arrêté, parmi d'autres mesures, et relève appel du jugement du tribunal administratif de Nice du 21 novembre 2017 en tant qu'il a rejeté ses conclusions dirigées contre lui. Sur la légalité de l'arrêté du recteur de l'académie de Nice du 1er février 2014 : 2. En premier lieu, la circonstance, à la supposer établie, que le courrier adressé le 22 mai 2015 par Mme C... au recteur de l'académie de Nice puisse être regardé, comme elle le prétend, comme un recours gracieux formé à l'encontre de l'arrêté du 1er février 2014 et non à l'encontre de la seule décision du même recteur du 18 mars 2015 se prononçant sur les conséquences de l'accident dont elle a été victime le 21 novembre 2013, est, en tout état de cause, sans incidence sur la légalité de cet arrêté. 3. En deuxième lieu, si la requérante soutient que le même courrier avait notamment pour objet de la faire bénéficier des dispositions de l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, il est constant que l'arrêté contesté, antérieur de plus d'un an à ce courrier, n'a pu, en tout état de cause, avoir pour objet ou pour effet de statuer sur cette prétendue demande. Dès lors, Mme C... ne saurait utilement se prévaloir de ce courrier à l'encontre dudit arrêté. 4. En troisième lieu, si, comme le fait valoir la requérante, il lui était légalement possible de demander à tout moment le retrait de l'arrêté du 1er février 2014, lequel n'a créé de droits qu'à son profit, cette circonstance demeure, en toute hypothèse, sans incidence sur la légalité de cet arrêté. 5. En quatrième lieu, à supposer même qu'il ait incombé à l'autorité administrative de procéder d'office au réexamen de la situation personnelle de Mme C..., s'agissant en particulier de ses droits à retraite, à la suite de la décision du 18 mars 2015 mentionnée au point 1, la requérante ne saurait utilement, là encore, se prévaloir de cette circonstance à l'appui de conclusions dirigées contre l'arrêté du 1er février 2014 lui-même. 6. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " I. - La liquidation de la pension intervient : (...) 5° Un décret fixe les conditions dans lesquelles l'âge d'ouverture du droit à pension est abaissé, par rapport à un âge de référence de soixante ans, pour les fonctionnaires handicapés qui totalisent, alors qu'ils étaient atteints d'une incapacité permanente d' au moins 50 %, une durée d'assurance au moins égale à une limite fixée par ce décret, tout ou partie de cette durée ayant donné lieu à versement de retenues pour pensions. (...) " Selon l'article L. 27 du même code, dans sa rédaction applicable au présent litige : " Le fonctionnaire civil qui se trouve dans l'incapacité permanente de continuer ses fonctions en raison d'infirmités résultant de blessures ou de maladie contractées ou aggravées soit en service, soit en accomplissant un acte de dévouement dans un intérêt public, soit en exposant ses jours pour sauver la vie d'une ou plusieurs personnes et qui n'a pu être reclassé dans un autre corps en application de l'article 63 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précitée peut être radié des cadres par anticipation soit sur sa demande, soit d'office à l'expiration d'un délai de douze mois à compter de sa mise en congé si cette dernière a été prononcée en application des 2° et 3° de l'article 34 de la même loi ou à la fin du congé qui lui a été accordé en application du 4° du même article. / L'intéressé a droit à la pension rémunérant les services prévue au 2° du I de l'article L. 24 du présent code. Par dérogation à l'article L. 16 du même code, cette pension est revalorisée dans les conditions fixées à l'article L. 341-6 du code de la sécurité sociale. " 7. Il n'est pas contesté que, dans sa demande du 3 septembre 2013 sur laquelle se prononce l'arrêté contesté, Mme C... n'a pas sollicité le bénéfice des dispositions précitées de l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite. Il ne résulte pas davantage des termes de cet arrêté que son auteur ait entendu examiner d'office sa situation au regard de ces mêmes dispositions, le recteur s'y étant borné à faire état de la qualité invoquée de " travailleur handicapé ", laquelle relève des dispositions du 5° du I de l'article L. 24 du même code. Par suite, Mme C... ne peut se prévaloir, à l'encontre de cet arrêté, des dispositions de l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite. 8. En dernier lieu, si Mme C... fait valoir que les services du rectorat de Nice auraient manqué de diligence dans l'instruction de sa demande, ce qui aurait eu pour conséquence de retarder de plusieurs années son admission anticipée à la retraite, cette circonstance, qui n'intéresserait, le cas échéant, que la mise en jeu de la responsabilité de l'administration à raison des conséquences dommageables d'un tel retard, demeure sans incidence, en tout état de cause, sur la légalité de l'arrêté contesté. 9. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la recevabilité de sa demande devant le tribunal administratif, que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du recteur de l'académie de Nice du 1er février 2014. Sur les frais liés au litige : 10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative s'opposent à ce que la somme réclamée par Mme C... au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.D É C I D E :Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... C... et au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.Copie en sera adressée au recteur de l'académie de Nice. Délibéré après l'audience du 2 décembre 2019, à laquelle siégeaient : - M. David Zupan, président, - Mme F... G..., présidente assesseure, - M. A... Gautron, premier conseiller, Lu en audience publique le 16 décembre 2019. 4N° 18MA00292
Cours administrative d'appel
Marseille
CAA de BORDEAUX, 1ère chambre, 19/12/2019, 18BX00308, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme C... D... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler les décisions de refus de prise en charge de ses arrêts de maladie à compter du 8 septembre 2014 et d'octroi d'un congé de longue maladie, ainsi que la décision du 9 février 2015 par laquelle la rectrice de l'académie de Toulouse a rejeté sa demande tendant au paiement des éléments de rémunération relatif à son congé de maladie, et d'enjoindre à la rectrice de l'académie de Toulouse de régulariser sa situation administrative. Par un jugement n° 1500969 du 20 novembre 2017, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté cette demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 24 janvier 2018, Mme D..., représentée par Me A..., demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 20 novembre 2017 ; 2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - elle est fondée à se prévaloir d'un congé de maladie ordinaire accordé le 8 septembre 2014 et régulièrement renouvelé jusqu'au 7 septembre 2015 ; - une décision implicite de rejet de sa demande de congé de longue maladie est née à la suite de sa demande du 27 août 2015. Par un mémoire en défense, enregistré le 30 avril 2019, le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse conclut au rejet de la requête. Il soutient que : - les conclusions tendant à l'annulation des courriers adressés à la requérante le 15 octobre 2014 et le 19 décembre 2014 sont irrecevables dès lors que ceux-ci ne constituent pas des actes décisoires ; - les autres moyens invoqués ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - le décret n° 72-581 du 4 juillet 1972 ; - le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ; - le décret 94-874 du 7 octobre 1994 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le rapport de M. B... a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. A l'issue de son stage de formation d'un an effectué dans l'académie de Toulouse, Mme D..., professeure certifiée stagiaire d'économie et de gestion, a fait l'objet d'un refus de titularisation et n'a pas été autorisée à effectuer une seconde année de stage. En conséquence, par un arrêté du 29 août 2014, le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche a prononcé son licenciement à compter de la date de notification de l'arrêté, intervenue le 15 septembre 2014. Mme D... a sollicité un congé de maladie pour la période du 8 septembre 2014 au 7 octobre 2014, période prolongée à plusieurs reprises jusqu'au 7 septembre 2015. Le 19 décembre 2014, en réponse à un courrier électronique par lequel elle transmettait la troisième prolongation de son arrêt de travail, il lui était indiqué qu'en raison de son licenciement le 15 septembre 2014, il n'était plus nécessaire de transmettre ces documents. En réponse à une demande émanant du secrétaire académique du syndicat Force ouvrière des lycées et collèges auquel Mme D... avait fait appel, la rectrice de l'académie de Toulouse indiquait, le 15 octobre 2014, que la demande de Mme D... relevait du bureau de l'indemnisation du chômage. Le 14 décembre 2014, Mme D... a demandé à la rectrice de l'académie de Toulouse, par l'intermédiaire de son conseil, de lui verser les éléments de rémunération concernant la période afférente à son congé de maladie. Cette demande a été rejetée par une décision de la rectrice du 9 février 2015. Mme D... relève appel du jugement du 20 novembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions portant refus d'attribution d'un congé de maladie puis d'un congé de longue maladie et de la décision du 9 février 2015. 2. Aux termes de l'article 24 du décret du 7 octobre 1994 fixant les dispositions communes applicables aux stagiaires de l'Etat et de ses établissements publics : " Sauf dans le cas où il se trouve placé dans l'une des positions de congé que prévoient les articles 18, 19, 19 bis, 20, 21, 21 bis et 23 du présent décret, le fonctionnaire stagiaire a droit au congé de maladie, au congé de longue maladie et au congé de longue durée mentionnés à l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée ainsi qu'au congé pour invalidité temporaire imputable au service mentionné à l' article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 susvisée , dans les conditions qui sont fixées par la législation et la réglementation applicables aux fonctionnaires titulaires en activité (...) ". Aux termes de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat : " Le fonctionnaire en activité a droit : / (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. Le bénéfice de ces dispositions est subordonné à la transmission par le fonctionnaire, à son administration, de l'avis d'arrêt de travail justifiant du bien-fondé du congé de maladie, dans un délai et selon les sanctions prévus en application de l'article 35. / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident ; / 3° A des congés de longue maladie d'une durée maximale de trois ans dans les cas où il est constaté que la maladie met l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, rend nécessaire un traitement et des soins prolongés et qu'elle présente un caractère invalidant et de gravité confirmée (...) ". Aux termes de l'article 24 du décret du 14 mars 1986 relatif, notamment, au régime de congés de maladie des fonctionnaires : " Sous réserve des dispositions de l'article 27 ci-dessous, en cas de maladie dûment constatée et mettant le fonctionnaire dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, celui-ci est de droit mis en congé de maladie ". Enfin, aux termes de l'article 24 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " La cessation définitive de fonctions qui entraîne radiation des cadres et perte de la qualité de fonctionnaire résulte : / 3° Du licenciement (...) ". 3. Il résulte des dispositions de l'article 24 de la loi du 13 juillet 1983 précitées que le licenciement de Mme D... par l'arrêté du 29 août 2014 a entraîné sa radiation des cadres et la perte de sa qualité de fonctionnaire. Par ailleurs, aucune disposition législative ou réglementaire ni aucun principe ne faisait obstacle à ce que le ministre prononçât le licenciement en fin de stage de Mme D... à la suite du refus de titularisation dont elle avait fait l'objet alors même qu'elle se trouvait, à la date de prise d'effet de cette décision, en congé de maladie. Par suite, à compter de la date d'effet de son licenciement, le 15 septembre 2014, Mme D... n'était plus en position d'activité et ne pouvait donc plus prétendre ni à l'octroi d'un congé de maladie ni au maintien du traitement auquel les dispositions de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 lui ouvraient antérieurement droit à ce titre. Dès lors, les moyens tirés de ce que la rectrice de l'académie de Toulouse aurait entaché ses décisions d'erreur de droit en refusant de lui octroyer un congé de maladie postérieurement au 15 septembre 2014, date de son licenciement, et de lui verser la rémunération afférente à ce congé au-delà de cette date, dès lors qu'elle bénéficiait d'un congé de maladie depuis le 8 septembre 2014, doivent être écartés. 4. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la recevabilité des conclusions de la requête, que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande. 5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demande la requérante au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. DECIDE : Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... D... et au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse. Délibéré après l'audience du 21 novembre 2019 à laquelle siégeaient : Mme Marianne Hardy, président, M. Didier Salvi, président-assesseur, M. David B..., premier conseiller. Lu en audience publique, le 19 décembre 2019. Le rapporteur, David B...Le président, Marianne Hardy Le greffier, Sophie Lecarpentier La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 4 N° 18BX00308
Cours administrative d'appel
Bordeaux
Conseil d'État, 4ème - 1ère chambres réunies, 20/12/2019, 408967
Vu la procédure suivante : Sous le n° 1401863, M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille, d'une part, d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 5 juin 2013 du ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie en tant qu'il fixe la date de son avancement au 9e échelon de son grade au 1er avril 2012, d'enjoindre au ministre de fixer la date de cet avancement au 1er février 2012 et de lui verser la somme correspondant aux rappels de traitements dus en raison de son droit à être avancé à compter de cette date et, d'autre part, d'annuler la décision implicite née le 18 février 2014 du silence gardé par le ministre de l'économie et des finances sur sa demande de révision de sa pension en conséquence de son changement de situation administrative, d'enjoindre à l'Etat de réviser sa pension et de le condamner à lui verser les arrérages correspondants. Sous le n° 1401866, M. B... a demandé à titre subsidiaire au même tribunal de condamner l'Etat à l'indemniser des préjudices ayant résulté pour lui des erreurs commises lors de la liquidation de sa pension. Par un jugement n°s 1401863, 1401866 du 7 novembre 2016, le tribunal administratif de Marseille, après avoir joint les deux demandes a, s'agissant de la demande enregistrée sous le n° 1401863, d'une part, constaté qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur les demandes relatives à l'arrêté du 5 juin 2013 dès lors que cet acte avait été retiré en cours d'instance par un arrêté du 4 juin 2014 donnant satisfaction à M. B... et, d'autre part, annulé la décision du 18 février 2014 du ministre de l'économie et des finances refusant de réviser sa pension et enjoint au ministre de procéder à cette révision et au rappel d'arrérages correspondants. Il a d'autre part rejeté les conclusions indemnitaires présentées sous le n° 1401866 dès lors que celles-ci n'étaient présentées par M. B... qu'à titre subsidiaire. Par une ordonnance n° 16MA04632 du 13 février 2017, enregistrée le 16 mars 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la présidente de la cour administrative d'appel de Marseille a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, le pourvoi, enregistrée le 14 décembre 2016 au greffe de cette cour, présenté par le ministre de l'économie et des finances. Par ce pourvoi, le ministre de l'économie et des finances demande au Conseil d'Etat d'annuler le jugement n°s 1401863, 1401866 du 7 novembre 2016 du tribunal administratif de Marseille en tant qu'il a, d'une part, annulé la décision du 18 février 2014 par laquelle il a refusé la révision de la pension de M. B... et, d'autre part, en tant qu'il lui enjoint de procéder à cette révision et au rappel des arrérages afférents. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - la loi n° 91-715 du 26 juillet 1991 ; - le décret n° 95-313 du 21 mars 1995 ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Olivier Fuchs, maître des requêtes, - les conclusions de M. Raphaël Chambon, rapporteur public. La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de M. A... B....Considérant ce qui suit : 1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que M. B..., attaché principal affecté à la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement de Provence-Alpes-Côte d'Azur, a été admis à faire valoir ses droits à la retraite à compter du 1er septembre 2012 alors qu'il avait atteint le 8ème échelon de son grade. Son titre de pension, calculé sur la base de cet échelon, lui a été notifié le 14 août 2012. Toutefois, par un arrêté du 5 juin 2013, le ministre chargé de l'écologie lui a accordé rétroactivement le bénéfice de 27 mois d'ancienneté au titre de l'avantage spécifique d'ancienneté, en application du décret du 21 mars 1995 relatif au droit de mutation prioritaire et au droit à l'avantage spécifique d'ancienneté accordés à certains agents de l'Etat affectés dans les quartiers urbains particulièrement difficiles, et l'a reclassé au 9ème échelon de son grade à compter du 1er avril 2012. Par un courrier du 17 décembre 2013, M. B... a demandé à ce que l'administration rectifie l'arrêté du 5 juin 2013, dès lors que, l'avantage spécifique d'ancienneté dont il pouvait bénéficier s'élevant à 29 mois et non à 27 mois, son avancement d'échelon devait prendre effet au 1er février 2012 et non au 1er avril 2012. Il a, d'autre part, demandé à ce que sa pension soit révisée pour tenir compte de sa nouvelle situation administrative. Par une décision implicite née le 18 février 2014, le ministre de l'économie et des finances a rejeté sa demande de révision de sa pension. M. B... a demandé au tribunal administratif de Marseille, par deux requêtes enregistrée le 11 mars 2014 au greffe de ce tribunal, d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 5 juin 2013 en tant qu'il était entaché d'une erreur sur la date d'effet de son reclassement, ainsi que la décision implicite du 18 février 2014 du ministre de l'économie et des finances et d'enjoindre à l'Etat de réviser sa pension en conséquence et, à titre subsidiaire, de l'indemniser du préjudice qu'il estimait avoir subi. Toutefois, par un arrêté du 4 juin 2014, le ministre chargé de l'écologie a retiré l'arrêté du 5 juin 2013 et modifié la date d'effet de l'avancement d'échelon de M. B... pour la fixer au 1er février 2012. Par un jugement du 7 novembre 2016, le tribunal administratif a, d'une part, constaté qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur la demande de M. B... tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 juin 2013 et à lui verser les rappels de traitements afférents, dès lors que cet acte avait été retiré par l'administration et a, d'autre part, annulé la décision du 18 février 2014 refusant de réviser la pension de M. B.... Il a, en conséquence, condamné l'Etat à réviser la pension de M. B... et à lui payer les arrérages afférents depuis le 1er août 2012 avec intérêts au taux légal. Le ministre de l'économie et des finances demande l'annulation de ce jugement dans cette mesure. 2. Aux termes de l'article du I de l'article L. 15 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " Aux fins de liquidation de la pension, le montant de celle-ci est calculé en multipliant le pourcentage de liquidation (...) par le traitement ou la solde soumis à retenue afférents à l'indice correspondant à l'emploi, grade, classe et échelon effectivement détenus depuis six mois au moins par le fonctionnaire ou militaire au moment de la cessation des services valables pour la retraite (...) ". Aux termes de l'article L. 55 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " (...) la pension et la rente viagère d'invalidité sont définitivement acquises et ne peuvent être révisées ou supprimées à l'initiative de l'administration ou sur demande de l'intéressé que dans les conditions suivantes : / A tout moment en cas d'erreur matérielle ; / Dans un délai d'un an à compter de la notification de la décision de concession initiale de la pension ou de la rente viagère, en cas d'erreur de droit ". Cette dernière disposition permet notamment, dans le délai d'un an, de redresser toute erreur de droit concernant la détermination de la situation administrative du fonctionnaire retraité au jour de son admission à la retraite et ayant eu une influence sur la liquidation de sa pension. Il appartient ainsi à l'autorité chargée de cette liquidation de vérifier, sous le contrôle du juge, l'existence et la portée des erreurs alléguées. Hors les cas prévus par ces dispositions de l'article L. 55 du code des pensions civiles et militaires de retraite, les intéressés ne peuvent se prévaloir de droits acquis qu'ils tiendraient d'actes intervenus postérieurement à la date de leur admission à la retraite et modifiant rétroactivement leur situation administrative à cette date, sauf s'il s'agit d'actes pris en exécution d'une loi, d'un règlement ayant légalement un effet rétroactif ou d'une décision du juge de l'excès de pouvoir. Il en va de même lorsque l'intéressé a formé un recours pour excès de pouvoir, recevable, contre un acte illégal de l'administration régissant sa situation administrative et qu'avant qu'il n'y soit statué, l'administration procède légalement à son retrait en vue de corriger cette illégalité. 3. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que par arrêté du 4 juin 2014 le ministre chargé de l'écologie, sur la demande de M. B..., a légalement retiré l'arrêté du 5 juin 2013 et a reclassé, avec effet rétroactif, l'intéressé au 9ème échelon de son grade à la date du 1er février 2012, alors que son recours tendant à l'annulation de cet arrêté était recevable et pendant devant le tribunal administratif. Il résulte de ce qui a été dit au point 2, ainsi que l'a jugé le tribunal administratif de Marseille, que M. B... pouvait, en conséquence, se prévaloir de l'arrêté du 4 juin 2014 pour obtenir une révision de sa pension afin que soit prise en compte une ancienneté de plus de six mois au 9ème échelon de son grade au moment de la cessation de ses services. Par suite, le ministre de l'économie et des finances n'est pas fondé à soutenir que ce faisant le tribunal administratif a commis une erreur de droit. 4. En second lieu, il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que le tribunal n'a pas plus commis d'erreur de droit en jugeant que M. B... pouvait se prévaloir de l'arrêté du 4 juin 2014 quand bien même celui-ci était intervenu au-delà du délai d'un an prévu par l'article L. 55 du code des pensions civiles et militaires de retraite cité au point 2, en raison de ce qu'il s'agissait d'une décision à effet rétroactif prise légalement par l'administration à sa demande et ayant pour effet de priver d'objet un litige porté devant le juge de l'excès de pouvoir. 5. Il résulte de tout ce qui précède que le pourvoi du ministre de l'économie et des finances doit être rejeté. 6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.D E C I D E : -------------- Article 1er : Le pourvoi du ministre de l'économie et des finances est rejeté. Article 2 : L'Etat versera à M. B... une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. A... B... et au ministre de l'action et des comptes publics.ECLI:FR:CECHR:2019:408967.20191220
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 7ème chambre, 27/11/2019, 426581, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Mme C... A..., née B..., a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler la décision du 9 octobre 2015 par laquelle le ministre de la défense a rejeté sa demande de pension militaire de réversion du chef de son époux décédé et de lui accorder le bénéfice de cette pension. Par un jugement n° 1600401 du 27 juin 2018, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande. Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 26 décembre 2018 et 26 mars 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme A... demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code civil ; - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 ; - le décret n° 2010-1691 du 30 décembre 2010 ; - l'arrêté interministériel du 30 décembre 2010 portant application du décret du 30 décembre 2010 ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Marc Pichon de Vendeuil, maître des requêtes, - les conclusions de Mme Mireille Le Corre, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Thouin-Palat, Boucard, avocat de Mme A... ;Considérant ce qui suit : 1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que M. A..., ressortissant algérien, a été rayé des contrôles de l'armée active française le 8 août 1941, qu'il a obtenu une pension proportionnelle mixte militaire de retraite, et qu'il est décédé le 5 août 1970. Mme A..., a demandé au tribunal administratif de Poitiers l'annulation de la décision du 9 octobre 2015 rejetant sa demande de pension de réversion présentée le 30 juin 2011 ainsi que le bénéfice d'une telle pension. Par un jugement du 27 juin 2018, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande. 2. Aux termes de l'article 211 de la loi du 29 décembre 2010 de finances pour 2011, applicable aux demandes de pension de réversion : " I. - (...) les pensions civiles et militaires de retraite et les retraites du combattant servies aux ressortissants des pays ou territoires ayant appartenu à l'Union française ou à la Communauté ou ayant été placés sous le protectorat ou sous la tutelle de la France sont calculées dans les conditions prévues aux paragraphes suivants. (...) / V. - Les demandes de pensions présentées en application du présent article sont instruites dans les conditions prévues par le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre et par le code des pensions civiles et militaires de retraite. (...) / VIII. - Un décret fixe les modalités d'application du présent article, notamment les mesures d'information des bénéficiaires ainsi que les modalités de présentation et d'instruction des demandes mentionnées aux III, IV et V./ (...) ". 3. Aux termes de l'article L. 39 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " Le droit à pension de veuve est subordonné à la condition : a) si le mari a obtenu ou pouvait obtenir une pension accordée dans le cas [de cessation d'activité pour départ en retraite], que depuis la date du mariage jusqu'à la cessation de l'activité du mari, celui-ci ait accompli deux années au moins de services valables pour la retraite, sauf si un ou plusieurs enfants sont issus du mariage antérieur à ladite cessation ; b) si le mari a obtenu ou pouvait obtenir une pension accordée dans le cas [de radiation pour invalidité], que le mariage soit antérieur à l'événement qui a amené la mise à la retraite ou la mort du mari. (...) Nonobstant les conditions d'antériorité prévues ci-dessus, le droit à pension de veuve est reconnu : 1° Si un ou plusieurs enfants sont issus du mariage ; 2° Ou si le mariage, antérieur ou postérieur à la cessation de l'activité, a duré au moins quatre années ". 4. Aux termes, enfin, de l'article 3 du décret du 30 décembre 2010, pris pour l'application des dispositions précitées de la loi de finances pour 2011 : " Un arrêté conjoint des ministres chargés de la défense, des affaires étrangères, des anciens combattants et du budget énumère les pièces justificatives à produire à l'appui de toute demande visée à l'article 1er ". L'annexe 3 de l'arrêté du 30 décembre 2010 pris pour l'application de ce décret cite, parmi les pièces exigées pour une demande de pension d'un ayant cause, " l'acte de mariage mentionnant la date de transcription sur les registres d'état-civil ". Aux termes de l'article 46 du code civil : " Lorsqu'il n'aura pas existé de registres, ou qu'ils seront perdus, la preuve en sera reçue tant par titres que par témoins ; et, dans ces cas, les mariages, naissances et décès pourront être prouvés tant par les registres et papiers émanés des pères et mères décédés, que par témoins ". L'article 47 du code civil dispose : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ". 5. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que, pour justifier de son mariage, Mme A... a produit une ordonnance rendue le 27 janvier 2006 par laquelle un tribunal tunisien avait ordonné la transcription sur les registres d'état-civil de son mariage avec M. A..., ainsi qu'une copie de l'acte de mariage extrait de ce registre et une copie intégrale de son acte de naissance comportant une mention marginale de ce mariage. En écartant le caractère probant de ces pièces au seul motif qu'un acte recognitif de mariage établi postérieurement au décès de l'ancien militaire ne suffisait pas à apporter la preuve de la célébration du mariage de la requérante, alors qu'aucune disposition citée au point 4 ne permettait de se fonder sur cette seule circonstance, le tribunal administratif de Poitiers a commis une erreur de droit. Mme A... est dès lors fondée, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, à demander l'annulation du jugement attaqué. 6. Mme A... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP Thouin-Palat, Boucard, avocat de Mme A..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à la SCP Thouin-Palat, Boucard.D E C I D E : -------------- Article 1er : Le jugement du 27 juin 2018 du tribunal administratif de Poitiers est annulé. Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de Poitiers. Article 3 : L'Etat versera à la SCP Thouin-Palat, Boucard, avocat de Mme A..., une somme de 3 000 euros en application des dispositions du deuxième alinéa des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette société renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat. Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme C... A..., née B..., à la ministre des armées et au ministre de l'action et des comptes publics. ECLI:FR:CECHS:2019:426581.20191127
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 7ème chambre, 27/11/2019, 428714, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse de condamner l'Etat à lui verser, d'une part, les sommes de 28 449,24 euros, 57 804,50 euros et 23 268,96 euros en réparation des pertes de rémunération qu'il a subies et, d'autre part, les sommes de 3 000 euros et 2 000 euros en réparation de ses préjudices moral et de carrière. Par un jugement n° 1304474 du 13 octobre 2016, ce tribunal a rejeté sa demande. Par un arrêt n° 16BX03933 du 31 décembre 2018, la cour administrative d'appel de Bordeaux a, sur appel de M. B..., annulé ce jugement et condamné l'Etat à lui verser une somme de 1 000 euros au titre de son préjudice moral et une indemnité au titre de ses pertes de rémunération dans la limite de 86 253,74 euros. Par un pourvoi et un mémoire en réplique, enregistrés les 11 mars et 22 juillet 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse demande au Conseil d'Etat d'annuler cet arrêt. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code de la défense, notamment son article L. 4139-3 ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - le décret n° 94-1020 du 23 novembre 1994 ; - le décret n° 2012-762 du 9 mai 2012 ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Marc Pichon de Vendeuil, maître des requêtes, - les conclusions de Mme Mireille Le Corre, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Marlange, de la Burgade, avocat de M. B... ;Considérant ce qui suit : 1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par un arrêté du recteur de l'académie de Toulouse du 11 juillet 2007, M. B..., alors militaire infirmier et technicien des hôpitaux des armées, a été nommé, à compter du 1er septembre 2007, infirmier de l'éducation nationale de classe normale stagiaire dans le cadre de la procédure des emplois réservés prévue par l'article L. 4139-3 du code de la défense. Par un arrêté du 20 octobre 2008, il a été titularisé à compter du 1er septembre 2008 et reclassé au quatrième échelon de son grade. Enfin, par un arrêté du 12 juillet 2012, M. B... a été intégré dans le corps des infirmiers de l'éducation nationale et de l'enseignement supérieur et classé au 4ème échelon du grade d'infirmier de classe normale en application des dispositions de l'article 22 du décret du 9 mai 2012 portant dispositions statutaires communes aux corps d'infirmiers de catégorie A des administrations de l'Etat. M. B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse de condamner l'Etat à lui verser la somme totale de 114 522,70 euros en réparation des préjudices matériel, moral et de carrière qu'il estimait avoir subis en raison de l'illégalité des arrêtés du 20 octobre 2008 et du 12 juillet 2012. Par un jugement du 13 octobre 2016, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande. Le ministre de l'éducation nationale se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 31 décembre 2018 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a, sur appel de M. B..., annulé ce jugement et condamné l'Etat à lui verser une somme de 1 000 euros au titre de son préjudice moral et une indemnité au titre de ses pertes de rémunération dans la limite de 86 253,74 euros. 2. Aux termes de l'article L. 4139-3 du code de la défense, dans sa rédaction applicable au litige : " Le militaire (...) peut se porter candidat pour l'accès aux emplois réservés, sur demande agréée, dans les conditions prévues par le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre./ En cas d'intégration ou de titularisation, la durée des services effectifs du militaire est reprise en totalité dans la limite de dix ans pour l'ancienneté dans le corps ou le cadre d'emploi d'accueil de catégorie C. Elle est reprise pour la moitié de la durée des services effectifs dans la limite de cinq ans pour l'ancienneté dans le corps ou le cadre d'emploi de catégorie B ". 3. Les dispositions de l'article L. 4139-3 du code de la défense fixent les modalités selon lesquelles la carrière antérieure du militaire qui devient fonctionnaire en étant recruté sur un emploi réservé est prise en considération pour déterminer l'ancienneté dont il bénéficie dans le corps qu'il rejoint lors de sa titularisation. Cette reprise d'ancienneté permet de déterminer, au regard des dispositions statutaires propres à chaque corps, l'échelon auquel il doit être reclassé et, par suite, l'indice qui en résulte. 4. Il suit de là qu'en estimant qu'il convenait, pour procéder au reclassement de M. B..., de faire application des dispositions du décret du 23 novembre 1994 fixant les dispositions statutaires communes applicables aux corps des infirmiers de l'éducation nationale, alors que seules celles de l'article L. 4139-3 du code de la défense étaient applicables s'agissant d'un recrutement d'un militaire sur emploi réservé, la cour administrative d'appel de Bordeaux a commis une erreur de droit. Son arrêt doit, dès lors, être annulé. 5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative. 6. Il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que le moyen tiré de ce que les arrêtés du 20 octobre 2008 et du 12 juillet 2012, par lesquels il a été procédé au reclassement de M. B..., seraient entachés d'illégalité pour avoir été pris sur le fondement des dispositions de l'article L. 4139-3 du code de la défense et non sur celui des dispositions du décret du 23 novembre 1994 ne peut qu'être écarté. Par ailleurs, dès lors que ces arrêtés se sont bornés à faire application des dispositions législatives du code de la défense, le requérant ne peut utilement invoquer à leur encontre une méconnaissance du principe d'égalité entre les agents d'un même corps. Il suit de là que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a écarté les moyens tirés de l'illégalité des arrêtés qui ont procédé à son reclassement et rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat. 7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.D E C I D E : -------------- Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 31 décembre 2018 est annulé. Article 2 : La requête présentée par M. B... devant la cour administrative d'appel de Bordeaux ainsi que ses conclusions présentées devant le Conseil d'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse et à M. A... B....ECLI:FR:CECHS:2019:428714.20191127
Conseil d'Etat
CAA de BORDEAUX, 3ème chambre, 29/10/2019, 17BX02489, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme F... E... a demandé au tribunal administratif de Limoges de condamner l'Etat à lui verser une indemnité de 30 500 euros en réparation des préjudices subis du fait de la gestion fautive de l'aménagement de son poste de travail. Par un jugement n° 141680 du 30 mai 2017, le tribunal administratif de Limoges a partiellement fait droit à sa demande en condamnant l'Etat à lui verser la somme de 5 000 euros en réparation des souffrances physique et morale endurées, assortie des intérêts au taux légal à compter du 20 mai 2014 ainsi que la capitalisation des intérêts, pour gestion fautive de l'aménagement de son poste de travail depuis le mois d'août 2013, illégalité fautive de la décision du 2 octobre 2012 par laquelle son employeur a refusé de reconnaître comme accident de service sa tentative de suicide survenue sur son lieu de travail le 17 janvier 2012, et pour agissement fautif de l'administration en privant l'intéressée, après son retour de congé après sa tentative de suicide, de tout aménagement de son poste de travail adapté à son handicap pendant une période de six mois. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés le 26 juillet 2017 et le 7 septembre 2017, Mme E..., représentée par Me H..., demande à la cour : 1°) de réformer ce jugement du tribunal administratif de Limoges en tant qu'il a limité à 5 000 euros l'indemnité mise à la charge de l'Etat en réparation de ses préjudices ; 2°) de porter à la somme de 23 500 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 20 mai 2014 et de leur capitalisation, le montant de cette indemnisation, dans le dernier état de ses écritures ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - le jugement attaqué est irrégulier car sa minute n'est pas revêtue de la signature du président, du rapporteur et du greffier de chambre, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative ; - le jugement attaqué est irrégulier dès lors que les premiers juges ont répondu à tort à un moyen qu'elle n'avait pas soulevé en première instance tiré de ce qu'elle s'estimerait victime de harcèlement moral ; - les premiers juges se sont livrés à une interprétation erronée des pièces du dossier sur la date à partir de laquelle l'administration engage envers elle sa responsabilité pour gestion fautive de l'aménagement de son poste de travail dès lors que sa responsabilité est engagée à compter du mois de juillet 2003, date de sa première alerte au ministre de l'économie et des finances, et non pas à compter du mois d'août 2013 ; en effet, les adaptations du poste qui ont été réalisées en 2007, puis en 2008, consistant en la pose de deux cloisons amovibles séparatives, ont été non seulement insuffisantes mais ont aggravé ses conditions de travail ; c'est à tort que l'administration s'est exclusivement appuyée sur l'appréciation erronée et biaisée du médecin de prévention, le Dr Ceolato, qui a toujours minimisé son handicap en niant la nécessité pour elle d'obtenir un bureau individuel et en considérant que les aménagements initiaux étaient suffisants ; l'administration ne pouvait ignorer la mésentente entre elle et le Dr Ceolato, de sorte qu'elle aurait dû organiser dès avant juillet 2013 une visite médicale avec un autre médecin de prévention ; - les premiers juges ont commis une erreur dans l'appréciation des préjudices subis ; en effet, la dégradation de ses conditions de travail liée à l'absence d'aménagement suffisant de son poste durant dix ans, a engendré d'importantes répercussions sur sa santé physique liées à une gêne quotidienne occasionnée par le bruit et une luminosité excessive, et psychique car elle a souffert de troubles anxiodépressifs en relation avec l'attitude de l'administration vis-à-vis de son handicap, ayant entraîné des arrêts de travail et des cures thermales ; - ses souffrances, tant physiques que psychiques, qui doivent être évaluées à 6 sur une échelle de 1 à 7, justifient une indemnisation à hauteur de 23 500 euros. Par un mémoire en défense, enregistré le 12 novembre 2018, le ministre de l'économie et des finances conclut, à titre principal, au rejet de la requête de Mme E..., par la voie de l'appel incident, à l'annulation du jugement du 30 mai 2017 du tribunal administratif de Limoges, et à ce qu'il soit mis à la charge de Mme E... la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il fait valoir que : - le jugement n'est pas irrégulier et le moyen tiré du défaut de signature du jugement manque en fait ; - la requérante n'est pas fondée à soutenir que les premiers juges auraient commis une erreur d'interprétation concernant le fondement juridique invoqué de l'inertie fautive de l'administration, constitutive d'une situation de harcèlement moral ; - il n'a pas méconnu les dispositions de l'article 6 sexies de la loi du 13 juillet 1983 dès lors qu'il a pris en charge les prothèses auditives de l'intéressée dès l'année 2002 et a procédé en 2007 à des aménagements de son poste de travail consistant en la pose de deux cloisons amovibles séparatives d'une hauteur de deux mètres afin de limiter les nuisances sonores, lesquels aménagements ont été déclarés conformes aux préconisations du médecin de prévention ; - si l'administration est tenue à l'égard de ses agents handicapés de trouver des solutions raisonnables et proportionnées ainsi que des modalités d'organisation du travail permettant à l'agent de poursuivre son activité professionnelle malgré son handicap, elle n'est tenue que d'une obligation de moyens et non pas de résultat ; en tout état de cause, l'administration ne pouvait, pour des raisons immobilières, logistiques et budgétaires, mettre un bureau individuel et isolé à la disposition de Mme E... ; - la requérante ne saurait se prévaloir utilement de la méconnaissance de l'article 23 de la loi du 13 juillet 1983. Par ordonnance du 13 novembre 2018, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 13 décembre 2018 à 12h00. Un mémoire a été produit pour Mme E... le 12 décembre 2018 qui n'a pas été communiqué. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ; - le décret n°82-453 du 28 mai 1982 relatif à l'hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu'à la prévention médicale dans la fonction publique ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme A... C..., - les conclusions de Mme Béatrice Molina-Andréo, rapporteur public, - et les observations de Me B..., représentant Mme E.... Considérant ce qui suit : 1. Mme E..., contrôleur des impôts titulaire depuis le 1er septembre 1993, a été affectée au centre des impôts d'Issoudun au 1er septembre 1995. Reconnue en tant que travailleur handicapé avec un taux d'invalidité de 35% par une décision de la commission technique d'orientation et de reclassement professionnel du 17 octobre 2002 en raison de problèmes auditifs liés à une hyperacousie, cette reconnaissance du statut de travailleur handicapé a été renouvelée à deux reprises les 31 octobre 2008 et 12 novembre 2013, son taux d'invalidité étant relevé entre 50% et 80%. Par un courrier en date du 17 mai 2014, Mme E... a adressé au ministre de l'économie et des finances une demande indemnitaire préalable tendant à la réparation des préjudices résultant pour elle du défaut d'aménagement de son poste de travail et de l'inaction de son employeur face à sa situation de personne handicapée. A la suite du rejet de sa réclamation préalable né du silence gardé par l'administration, Mme E... a demandé au tribunal administratif de Limoges de condamner l'Etat à lui verser une indemnité de 30 500 euros en raison des préjudices subis. Par un jugement n°141680 du 30 mai 2017, le tribunal administratif de Limoges a retenu la responsabilité de l'Etat pour gestion fautive de l'aménagement de son poste de travail et illégalité fautive du refus de reconnaître comme imputable au service la tentative de suicide de Mme E... et a condamné l'Etat à verser à cette dernière la somme de 5 000 euros au titre des souffrances physique et morale endurées, assortie des intérêts au taux légal à compter du 20 mai 2014 ainsi que la capitalisation de ces intérêts. Mme E... relève appel du jugement du 30 mai 2017 par lequel le tribunal administratif de Limoges a condamné l'Etat à lui verser une indemnité de 5 000 euros, qu'elle estime insuffisante, en réparation des souffrances physique et morale endurées. Le ministre de l'économie et des finances, par la voie de l'appel incident, demande l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il l'a condamné à verser une somme de 5 000 euros à Mme E.... Sur la régularité du jugement : 2. En premier lieu, aux termes des dispositions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ". En vertu de l'article R. 741-10 du même code : " La minute des décisions est conservée au greffe de la juridiction pour chaque affaire, avec la correspondance et les pièces relatives à l'instruction (...) ". 3. Mme E... soutient que le jugement attaqué est irrégulier dès lors que la copie qui lui a été transmise ne permet pas de s'assurer que sa minute comportait les signatures requises par les dispositions précitées de l'article R. 741-7 du code de justice administrative. Il résulte toutefois de l'examen du dossier de première instance que la minute du jugement attaqué comporte bien la signature du président de la formation de jugement, du rapporteur et du greffier d'audience. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance de ses dispositions ne peut qu'être écarté comme manquant en fait. 4. En second lieu, contrairement à ce que Mme E... prétend, elle a bien soutenu dans ses écritures présentées devant le tribunal administratif qu'elle avait été victime de harcèlement moral. Dans ces conditions, Mme E... n'est pas fondée à soutenir que le tribunal administratif aurait, à tort, examiné un moyen qu'elle n'aurait pas soulevé dans sa requête introductive d'instance. Par suite, le moyen tiré de ce que le jugement serait irrégulier pour ce motif doit être écarté. Sur le bien-fondé du jugement : En ce qui concerne la responsabilité : S'agissant de la gestion fautive de l'aménagement du poste de travail à partir du mois d'août 2013 : 5. D'une part, aux termes des dispositions de l'article 6 sexies de la loi du 13 juillet 1983 susvisée : " Afin de garantir le respect du principe d'égalité de traitement à l'égard des travailleurs handicapés, les employeurs visés à l'article 2 prennent, en fonction des besoins dans une situation concrète, les mesures appropriées pour permettre aux travailleurs mentionnés aux 1°, 2°, 3°, 4°, 9°, 10° et 11° de l'article L. 323-3 du code du travail d'accéder à un emploi ou de conserver un emploi correspondant à leur qualification, de l'exercer et d'y progresser ou pour qu'une formation adaptée à leurs besoins leur soit dispensée, sous réserve que les charges consécutives à la mise en oeuvre de ces mesures ne soient pas disproportionnées, notamment compte tenu des aides qui peuvent compenser en tout ou partie les dépenses supportées à ce titre par l'employeur. ". Ces dispositions imposent à l'autorité administrative de prendre tant les règlements spécifiques que les mesures appropriées au cas par cas pour permettre l'accès de chaque personne handicapée à l'emploi auquel elle postule sous réserve, d'une part, que ce handicap n'ait pas été déclaré incompatible avec l'emploi en cause et, d'autre part, que lesdites mesures ne constituent pas une charge disproportionnée pour le service. 6. D'autre part, aux termes des dispositions de l'article 23 de la même loi : " Des conditions d'hygiène et de sécurité de nature à préserver leur santé et leur intégrité physique sont assurées aux fonctionnaires durant leur travail. ". Aux termes des dispositions de l'article 26 du décret du 28 mai 1982 précité : " Le médecin de prévention est habilité à proposer des aménagements de poste de travail ou des conditions d'exercice de fonctions justifié par l'âge, la résistance physique ou l'état de santé des agents ". Il résulte de ces dispositions que les autorités administratives ont l'obligation de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et morale de leurs agents. 7. Il est constant que Mme E..., reconnue comme travailleur handicapé dont le dernier taux d'incapacité s'élève entre 50% et 80% et qui travaille dans une plate-forme technique en " open-space ", présente une surdité, une intolérance aux environnements bruyants, des troubles oculaires et une fatigue visuelle. 8. D'une part, Mme E... soutient qu'elle a alerté sa hiérarchie dès 2003 de sa situation de handicap et que les mesures d'aménagement de son poste de travail mises en place en 2007, consistant en la pose de deux cloisons amovibles séparatives, se sont révélées non seulement inutiles mais ont aggravé ses conditions de travail. L'administration fait valoir, sans être contredite, avoir financé les prothèses auditives de la requérante dès 2002 jusqu'en 2017, par l'intermédiaire de la cellule de recrutement et d'insertion des personnes handicapées du ministère des finances et des comptes publics. Conformément aux préconisations du médecin de prévention, le Dr Ceolato, de juillet 2007, deux cloisons amovibles séparatives en simple vitrage de deux mètres de hauteur, positionnées sur le devant et sur le côté gauche du bureau de l'intéressée, afin de limiter les nuisances sonores de l'espace de travail, ont été installées. Ces dispositifs ont été adaptés en novembre 2008 par l'aménagement d'un espace de travail isolé par la pose de parois en double vitrage ayant permis, après la réalisation de tests, d'améliorer la performance d'isolation phonique. Ces derniers aménagements ont ensuite été validés le 8 janvier 2009 par le médecin de prévention et par l'inspecteur en charge de l'hygiène et de la sécurité, qui, à la suite d'une visite sur les lieux, ont constaté au contradictoire de l'agent, que l'administration avait réalisé des " efforts significatifs " pour aménager le poste de travail de Mme E..., dont " le niveau de confort a été jugé " satisfaisant " par l'agent lui-même. En particulier, le cloisonnement du bureau par l'emploi d'une structure vitrée (...) a pour effet de neutraliser le dégagement sonore du plateau de travail du service. Dans ces conditions, l'aménagement réalisé ne nécessite ni modification, ni ajout d'équipement spécifique ". Mme E... a en outre bénéficié dans le cadre de l'aménagement de son poste de travail et de la surveillance médicale annuelle à l'égard des personnes handicapées, de visites médicales régulières avec le médecin de prévention, ce qu'elle ne conteste pas. Si Mme E... a toutefois continué à se plaindre et a refusé de rencontrer le Dr Ceolato à partir de 2010, l'administration a pris acte de ce refus en sollicitant une visite médicale auprès d'un médecin de prévention d'un autre département qui n'a pu se tenir, et en organisant des consultations avec deux médecins agréés, le Dr Lesage, médecin généraliste, et le Dr Ferron, médecin ORL, qui l'ont examiné les 22 et 23 juillet 2013, dont les conclusions font toutefois état de la nécessité de revoir les aménagements mis en place initialement et de mettre à la disposition de Mme E... un bureau individuel isolé. Par ailleurs, il ressort du compte rendu de la consultation s'étant tenue le 28 août 2014 avec le professeur Druet-Cabanac, du service de santé au travail du centre hospitalier universitaire de Limoges, que les dispositifs initiaux n'ont que momentanément amélioré la situation et que la mise à disposition d'un bureau isolé en dehors de l'open-space constituerait une meilleure solution. En se bornant à faire valoir que les préconisations médicales émises en 2013 sur la nécessité de mettre un bureau isolé et individuel à la disposition de l'intéressée ne pouvaient être suivies en l'absence de place disponible, l'administration n'établit pas que les charges consécutives à la mise en oeuvre de ces mesures prescrites auraient été disproportionnées eu égard aux aides qui peuvent compenser, en tout ou partie, les dépenses supportées à ce titre par le ministère de l'économie et des finances. Mme E... a ainsi été privée depuis août 2013, en méconnaissance des recommandations médicales prescrivant la mise à disposition à Mme E... d'un bureau individuel et isolé, d'aménagements appropriés de nature à limiter les nuisances sonores et visuelles auxquelles elle est particulièrement sensible. 9. Dans ces conditions, l'administration ne peut être regardée comme ayant pris, pour la période postérieure au mois d'août 2013, les mesures appropriées à l'exercice par Mme E... de ses fonctions et propres à garantir le respect du principe d'égalité de traitement à l'égard des personnes handicapées énoncé par l'article 6 sexies susvisé de la loi du 13 juillet 1983, et à lui assurer des conditions de travail compatibles avec son handicap dans un cadre respectueux de sa santé et de sa sécurité, au sens de l'article 23 susvisé de la même loi. L'Etat a ainsi manqué à ses obligations au regard de ces dispositions et commis une faute de nature à engager sa responsabilité. Par suite, le ministre de l'économie et des finances n'est pas fondé à soutenir, par la voie de l'appel incident, que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a déclaré l'Etat responsable des conséquences dommageables de l'absence de mesures appropriées à l'exercice par Mme E... de ses fonctions pour la période postérieure au mois d'août 2013. 10. D'autre part, si Mme E... soutient que son employeur n'a pas pris avant 2007 les mesures nécessaires visant à la protéger et à lui assurer des conditions de travail compatibles avec son handicap, en s'appuyant sur l'appréciation erronée et biaisée du médecin de prévention, le Dr Ceolato, en méconnaissance des dispositions précitées de l'article 23 de la loi du 13 juillet 1983, il est toutefois constant, compte-tenu de ce qui précède, que l'intéressée a bénéficié dès l'année 2002 de mesures de nature à la protéger et à lui assurer des conditions de travail compatibles avec son handicap. La circonstance invoquée qu'elle a rencontré des difficultés relationnelles avec le médecin de prévention est, en tout état de cause, sans incidence sur la responsabilité de l'administration. De même, le fait que plusieurs médecins, sollicités par Mme E..., ont ensuite insisté sur la nécessité de respecter les préconisations précédemment émises en ce qui concerne l'aménagement du poste de l'intéressée ne saurait suffire, à défaut de précision circonstanciée, à permettre de déduire que tel n'aurait pas été effectivement le cas. Dans ces conditions, la requérante n'est pas fondée à soutenir que son employeur n'aurait pas, à compter de l'année 2003, pris les mesures appropriées à son handicap et à la préservation de sa santé et ainsi méconnu les dispositions de l'article 26 du décret susvisé du 28 mai 1982. Par suite, Mme E... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Limoges a limité la mise en jeu de la responsabilité de l'administration à la période postérieure au mois d'août 2013 au regard de sa gestion fautive de l'aménagement de son poste de travail. S'agissant de l'illégalité fautive de la décision du 2 octobre 2012 refusant de reconnaître l'imputabilité au service de sa tentative de suicide : 11. La circonstance que Mme E... n'ait pas contesté par la voie d'un recours pour excès de pouvoir la légalité de la décision du 2 octobre 2012 refusant de reconnaître comme imputable au service sa tentative de suicide survenue le 17 janvier 2012 ne faisait pas obstacle à ce qu'elle invoque, devant les premiers juges, l'illégalité fautive de ces mesures, même devenues définitives, à l'appui de conclusions tendant à l'indemnisation de ses préjudices. Par suite, le ministre de l'économie et des finances n'est pas fondé à soutenir que la demande indemnitaire présentée devant le tribunal administratif fondée sur l'illégalité fautive de cette décision était irrecevable. 12. Aux termes des dispositions de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) / 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident ". 13. Un accident survenu sur le lieu et dans le temps du service, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par un fonctionnaire de ses fonctions ou d'une activité qui en constitue le prolongement normal présente, en l'absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant cet évènement du service, le caractère d'un accident de service. Il en va ainsi lorsqu'un suicide ou une tentative de suicide intervient sur le lieu et dans le temps du service, en l'absence de circonstances particulières le détachant du service. Il en va également ainsi, en dehors de ces hypothèses, si le suicide ou la tentative de suicide présente un lien direct avec le service. Il appartient dans tous les cas au juge administratif, saisi d'une décision de l'autorité administrative compétente refusant de reconnaître l'imputabilité au service d'un tel événement, de se prononcer au vu des circonstances de l'espèce. 14. Il résulte de l'instruction que le 17 janvier 2012, Mme E... a tenté sur son lieu de travail de mettre fin à ses jours par intoxication médicamenteuse, tentative dont son chef de service a été immédiatement informée par une collègue de travail de l'intéressée qui a été transportée le même jour au service des urgences du centre hospitalier de Châteauroux. Cette tentative de suicide est intervenue alors que Mme E... venait d'avoir avec son chef de service un entretien ayant trait aux difficultés relationnelles rencontrées par Mme E... dans ses rapports avec ses collègues de travail. La matérialité de ces faits n'est pas sérieusement contestée par l'administration. Mme E... a demandé, par un courrier du 6 mars 2012, la reconnaissance de sa tentative de suicide en accident de service ou en maladie professionnelle. Mme E... a ensuite été examinée le 15 mai 2012 par le Dr Baconnais, médecin psychiatre agréé par l'administration, dont le rapport du 13 juin 2012 conclut à la reconnaissance de l'imputabilité au service de sa tentative de suicide, compte tenu de son état dépressif et de l'intoxication médicamenteuse. Il ressort en particulier du rapport du Dr Baconnais que l'intéressée avait présenté un premier épisode dépressif en 2010 justifiant des cures de repos qu'elle impute aux difficultés qu'elle rencontre dans son travail en relation avec son sentiment que son handicap n'est pas pris en compte par son employeur. Le 25 septembre 2012, la commission de réforme a toutefois émis à un avis défavorable à cette reconnaissance. Dans ces conditions, alors que le ministre n'établit ni même n'allègue que la tentative de suicide, survenue sur le lieu et dans le temps du travail, trouverait son origine exclusive dans la personnalité de l'intéressée ou résulterait d'une pathologie antérieure dépourvue de tout lien avec le service, et nonobstant le fait que la requérante n'ait pas adressé à son employeur une déclaration formalisée d'accident de service, c'est à bon droit que les premiers juges ont considéré que la tentative de suicide de Mme E... doit être regardée comme imputable au service et que l'administration a commis à ce titre une faute de nature à engager sa responsabilité. S'agissant du défaut d'aménagement de son poste de travail à l'issue de son congé pour maladie après sa tentative de suicide : 15. Il résulte de l'instruction qu'après avoir proposé à Mme E..., par un courrier du 19 juin 2012, un poste d'enquêteur au centre des finances publiques de Châteauroux, par la voie du détachement, où elle serait dotée d'un bureau individuel mais non isolé, poste qu'elle a refusé le 2 juillet, son employeur lui a alors proposé un poste dans un autre service du centre des impôts d'Issoudun, étant prévu que son affectation serait assortie d'une " période d'essai " de six mois, comme l'atteste un courrier du directeur départemental des finances publiques de l'Indre du 25 juillet 2012. Par un compte-rendu d'entretien avec le directeur départemental des finances publiques s'étant tenu le 23 avril 2013, l'intéressée se voit confirmer dans son affectation à Issoudun. Pour contester sa responsabilité, le ministre de l'économie et des finances fait valoir que l'affectation provisoire a été prise dans l'intérêt du service et de l'agent afin de l'éloigner d'un climat professionnel conflictuel et que cette affectation, qui correspond à un emploi de son grade en application du décret n°2010-982 du 26 août 2010 portant statut particulier du corps des contrôleurs des finances publiques, ne portait atteinte ni à ses droits statutaires, ni à sa rémunération et n'a pas eu pour effet de dégrader ses conditions de travail. Toutefois, ainsi qu'en ont jugé à bon droit les premiers juges, l'administration ne pouvait sciemment subordonner la reprise du travail par Mme E... sur un poste à Issoudun à l'absence de tout aménagement de son poste en conformité avec son handicap, en méconnaissance des préconisations médicales, alors même qu'il était demandé à l'agent de faire ainsi les preuves, durant cette " période d'essai " de six mois, de sa capacité d'adaptation professionnelle. Par suite, le ministre de l'économie et des finances n'est pas fondé à soutenir, par la voie de l'appel incident, que c'est à tort que les premiers juges ont également retenu sa responsabilité fautive pour ce motif. S'agissant de l'inertie fautive de l'administration : 16. Enfin, en se bornant à faire référence au moyen exposé par elle en première instance tiré de ce qu'elle aurait été victime de faits de harcèlement moral, sans autre précision, Mme E... ne met pas le juge d'appel en mesure d'apprécier l'éventuel mal-fondé des motifs retenus par le tribunal administratif pour l'écarter. En ce qui concerne la réparation des préjudices : 17. Compte-tenu de son handicap, Mme E..., dont le taux d'invalidité a été en dernier lieu évalué entre 50% et 80%, souffre de surdité, d'intolérance aux bruits, de troubles oculaires et de fatigue visuelle. Il est, en outre, constant que les difficultés rencontrées par l'intéressée dans son environnement professionnel ont engendré des troubles anxiodépressifs pour lesquels elle bénéficie d'un suivi médical. Ainsi, en fixant à 5 000 euros le montant de l'indemnité mise à la charge de l'Etat en réparation des souffrances tant physiques que morales endurées par Mme E... du fait de l'absence d'aménagement adapté de son poste de travail après août 2013, les premiers juges ont fait une juste appréciation de ses préjudices. 18. Il résulte de tout ce qui précède que Mme E... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a fixé à 5 000 euros le montant de l'indemnité qu'il lui a allouée, et le ministre de l'économie et des finances n'est pas fondé à demander, par la voie de l'appel incident, l'annulation du jugement en tant qu'il condamne l'Etat à verser cette somme à Mme E.... Sur les frais d'instance : 19. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que Mme E... demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande présentée par le ministre de l'économie et des finances sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DECIDE : Article 1er : La requête de Mme E... et les conclusions d'appel incident du ministre de l'économie et des finances sont rejetés. Article 2 : Les conclusions du ministre de l'économie et des finances tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme F... E... et au ministre de l'économie et des finances. Délibéré après l'audience du 1er octobre 2019 à laquelle siégeaient : M. Dominique Naves, président, Mme D... G..., présidente-assesseure, Mme A... C..., conseiller, Lu en audience publique, le 29 octobre 2019. Le rapporteur, Agnès C...Le président, Dominique NAVESLe greffier, Christophe PELLETIER La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. 2 N° 17BX02489
Cours administrative d'appel
Bordeaux
CAA de MARSEILLE, 8ème chambre, 19/11/2019, 17MA02703, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. E... C... a demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner la commune de Gardanne à lui verser une somme de 267 940 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis en raison du non-respect de l'obligation de sécurité envers les agents. Par un jugement n° 1502354 du 31 mai 2017, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la requête de M. C.... Procédure devant la Cour : Par une requête enregistrée le 28 juin 2017 et deux mémoires, présentés le 17 mai 2019 et le 1er juillet 2019, M. C..., représenté par Me G..., dans le dernier état de ses écritures, demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 31 mai 2017 ; 2°) de condamner la commune de Gardanne à lui verser la somme de 267 940 euros en réparation des préjudices subis ; 3°) de condamner la commune de Gardanne à lui verser la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - le lien entre la maladie de Parkinson diagnostiquée le 9 juillet 2013 et les conditions d'exercice de son activité d'agent d'entretien des espaces verts est incontestable ; - la commune de Gardanne n'a pas respecté son obligation de sécurité envers ses agents ; - il justifie avoir exercé des fonctions ayant entraîné un risque spécial pour sa santé pour lequel la commune doit le dédommager ; - il est fondé à solliciter le versement de la somme de 30 000 euros au titre du préjudice matériel, la somme de 7 940 euros en raison de la perte de salaires, la somme de 200 000 euros pour le préjudice moral et la somme de 30 000 euros correspondant au préjudice d'agrément. Par deux mémoires en défense, enregistrés le 16 novembre 2018 et le 4 juin 2019, la commune de Gardanne, représentée par Me F..., conclut : 1°) au rejet de la requête ; 2°) à la condamnation de M. C... à payer les dépens ; 3°) à la condamnation de M. C... à lui verser la somme de 2 000 euros au titre des frais de justice. Elle soutient que: - à titre principal, les conclusions indemnitaires fondées sur le rejet de la demande de reconnaissance de la maladie de M. C... en maladie professionnelle sont irrecevables, faute pour le requérant d'avoir formé une demande préalable ; - et à titre subsidiaire, que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés. Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'engagement de la responsabilité sans faute de la commune de Gardanne. Les parties ont été avisées le 20 mai 2019, du renvoi de l'audience prévue le 21 mai 2019. Par ordonnance du 9 septembre 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 9 octobre 2019 à 12 h 00. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions civiles et militaires ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - le décret n° 85-603 du 10 juin 1985 ; - le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ; - le décret n° 2012-665 du 4 mai 2012 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. B..., - les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public, - et les observations de Me G..., représentant M. C..., et de Me A... D..., substituant Me F..., représentant la commune de Gardanne. Considérant ce qui suit : 1. M. C... a exercé les fonctions d'agent d'entretien des espaces verts de la commune de Gardanne depuis le 1er août 1981. Il a été diagnostiqué le 9 juillet 2013 qu'il était atteint de la maladie de Parkinson. Il a été placé en congé de longue maladie à compter du 19 juin 2013 jusqu'au 18 juin 2015, et a fait valoir ses droits à la retraite au 1er janvier 2016. M. C... relève appel du jugement du 31 mai 2017 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa requête tendant à faire condamner la commune de Gardanne à lui verser la somme de 276 940 euros en réparation des préjudices qu'il estimait avoir subis du fait de sa maladie de Parkinson. Sur les conclusions indemnitaires : En ce qui concerne la fin de non-recevoir opposée par la commune de Gardanne : 2. Conformément aux termes de sa réclamation préalable formée le 24 novembre 2014, M. C... a demandé au tribunal administratif la condamnation de la commune de Gardanne à réparer l'ensemble des préjudices consécutifs à la maladie de Parkinson qu'il estimait avoir contracté dans le cadre de l'exercice de ses fonctions auprès de la commune. Même s'il s'est alors uniquement prévalu de la responsabilité pour faute de la commune de Gardanne, M. C... doit être ainsi regardé s'étant nécessairement fondé sur l'imputabilité au service de sa maladie. Par suite, contrairement à ce que soutient la commune de Gardanne, M. C... n'invoque pas, en appel, un nouveau fait générateur par rapport à celui invoqué en première instance, en se prévalant désormais explicitement, par la voie de l'exception, de l'illégalité de la décision implicite par laquelle la commune a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de cette maladie. Par suite, la fin de non-recevoir opposée par la commune de Gardanne doit être écartée. En ce qui concerne l'imputabilité au service de sa maladie : 3. Aux termes de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2017-53 du 19 janvier 2017 : " I. - Le fonctionnaire en activité a droit à un congé pour invalidité temporaire imputable au service lorsque son incapacité temporaire de travail est consécutive à un accident reconnu imputable au service, à un accident de trajet ou à une maladie contractée en service définis aux II, III et IV du présent article. / (...) IV. - Est présumée imputable au service toute maladie désignée par les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale et contractée dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le fonctionnaire de ses fonctions dans les conditions mentionnées à ce tableau./ Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée par un tableau peut être reconnue imputable au service lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu'elle est directement causée par l'exercice des fonctions. / Peut également être reconnue imputable au service une maladie non désignée dans les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu'elle est essentiellement et directement causée par l'exercice des fonctions et qu'elle entraîne une incapacité permanente à un taux déterminé et évalué dans les conditions prévues par décret en Conseil d'Etat ". 4. En premier lieu, ces dispositions n'étaient pas applicables à la date à laquelle la maladie de Parkinson de M. C... a été diagnostiquée, soit le 9 juillet 2013, et à la date à laquelle une décision implicite a été opposée à ses demandes en date des 24 novembre 2014 et 25 mars 2015 tendant à la reconnaissance de l'imputabilité au service de sa maladie. En tout état de cause, ces dispositions ne rendent pas applicables aux fonctionnaires les présomptions d'imputabilité prévues en faveur des salariés et non-salariés agricoles par l'annexe II du livre VII du code rural et de la pêche maritime. En conséquence, le requérant n'est pas fondé à se prévaloir des dispositions du décret du 4 mai 2012 qui modifie cette annexe pour ajouter aux tableaux des maladies professionnelles en agriculture, le tableau n° 58 relatif à la maladie de Parkinson provoquée par les pesticides. 5. En second lieu, en l'absence d'une présomption légale d'imputabilité, une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service. Il appartient au juge d'apprécier si les conditions de travail du fonctionnaire peuvent, même en l'absence de volonté délibérée de nuire à l'agent, être regardées comme étant directement à l'origine de la maladie dont la reconnaissance de l'imputabilité au service est demandée. 6. Il résulte des termes du rapport d'expertise du 15 février 2016 du docteur Azais, que M. C... souffre de la maladie de Parkinson dite " idiopathique ", qu'il a contracté à l'âge de 59 ans, soit à un âge regardé comme " habituel " pour ce type de maladie. L'expert précise qu'il s'agit d'une maladie sans cause véritable connue et probablement multi-factorielle impliquant des facteurs génétiques, anatomiques et environnementaux. Parmi ces derniers, ainsi que le précise ce rapport et le rapport du 13 juin 2013 d'expertise collective de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) sur les effets des pesticides, biocides et produits phytopharmaceutiques sur la santé, des études épidémiologiques et toxicologiques témoignent de résultats en faveur d'un lien entre l'exposition aux pesticides et la maladie de Parkinson. Toutefois, en leur état actuel, les données scientifiques ne permettent ni de déterminer les mécanismes physiopathologiques impliqués dans la maladie de Parkinson, ni de préciser la durée des expositions et les relations dose-effet, selon la nature des produits en cause. Aussi, en l'absence d'une présomption légale telle que celle instituée en faveur des salariés et non-salariés agricoles mentionnée au point 5, l'imputabilité au service de la maladie de Parkinson contractée par un fonctionnaire qui a fait usage, dans le cadre de son service, de produits pesticides, ne peut être retenue, sous réserve d'un éventuel usage accidentel de tels produits, que s'il est établi que l'agent y a été exposé de manière particulière, par les conditions et la durée de l'exposition. 7. Il résulte de l'instruction que M. C... avait la responsabilité d'une équipe et d'un secteur dont il assurait la maintenance avec trois agents. Ses taches comportaient principalement le nettoyage général des espaces verts et le ramassage des feuilles en saison, les tontes avec tondeuses autotractées, l'entretien et la taille d'arbustes, l'arrosage et le désherbage qui pouvait être manuel à l'aide de rotofil ou chimique. M. C... soutient qu'il a ainsi été exposé à des produits phytosanitaires contenant du glyphosate et notamment les produits commercialisées sous les marques " Roundup " et " Gardenurs ". Il résulte, toutefois, de l'attestation de son chef de service que le désherbage chimique ne concernait que les massifs d'arbustes et les allées de parcs et jardins et qu'elle représentait seulement, par agent, une durée de 15 heures par an, l'usage des traitements insecticides et fongicides étant, quant à lui, exceptionnel. Si la fiche de prévention des expositions à certains facteurs de risques professionnels afférente à son poste de travail mentionne une durée d'exposition potentiellement plus longue, soit trois heures par jour du 2 avril au 15 juin, son exposition personnelle effective sur une telle durée, qui resterait, au demeurant, relativement modeste par rapport à la totalité de son service, n'est pas démontrée par les pièces versées au dossier ou même par des explications circonstanciées du requérant sur les conditions d'exercice de ses activités. Si le requérant soutient également ne pas avoir reçu en temps utile une formation spécifique concernant l'utilisation de produits phytosanitaires et conteste le caractère adapté des équipements de protection mis à sa disposition, ses allégations qui visent ainsi à démontrer les manquements que la commune aurait commis dans ses obligations de sécurité, ne permettent pas d'établir qu'il aurait effectivement manipulé ces produits dans des conditions non conformes aux préconisations de sécurité. Ainsi, dans les circonstances de l'espèce, un lien direct ne peut être regardé comme établi entre les différentes tâches accomplies par M. C... au cours de sa carrière, débutée en 1981, et la survenance du syndrome parkinsonien dont il souffre. 8. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner si la commune de Gardanne aurait méconnu ses obligations de sécurité envers ses agents, imposées notamment par le code du travail, que M. C... n'est pas fondé à se plaindre de ce que le tribunal administratif a rejeté ses conclusions tendant à la condamnation de la commune de Gardanne à réparer les conséquences dommageables de la maladie de Parkinson qu'il a contractée. Sur les dépens : 9. Il résulte du point 3 du jugement attaqué que les frais d'expertise, liquidés et taxés à la somme de 800 euros par ordonnance du président du tribunal administratif de Marseille du 7 avril 2016, ont été mis à la charge de M. C.... Par suite, il y a lieu de rejeter les conclusions de la commune de Gardanne tendant à ce que M. C... soit condamné à payer les frais en litige. Sur les frais de l'instance : 10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de la commune de Gardanne qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. C... la somme demandée par cette dernière au titre des mêmes dispositions. DECIDE : Article 1er : La requête de M. C... est rejetée. Article 2 : Les conclusions de la commune de Gardanne sur les dépens et l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... C..., à la commune de Gardanne et à la caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône. Délibéré après l'audience du 5 novembre 2019, où siégeaient : - Mme H..., présidente, - M. d'Izarn de Villefort, président assesseur, - M. B..., premier conseiller. Lu en audience publique, le 19 novembre 2019. N° 17MA027032 kp
Cours administrative d'appel
Marseille
Conseil d'État, 4ème chambre, 06/11/2019, 411420, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 23 juin 2014 par lequel le ministre des finances et des comptes publics a liquidé sa pension de retraite, en tant qu'il ne prend en compte dans la liquidation de sa pension, ni les services qu'il a accomplis en qualité d'agent contractuel au titre de la période comprise entre 1989 et 2006, ni l'ensemble de ses enfants, ni diverses " bonifications outre-mer ", et, d'autre part, d'enjoindre au ministre de procéder à une nouvelle liquidation de sa pension. Par un jugement n° 1403747 du 10 mars 2017, le tribunal administratif de Rennes a, en premier lieu, annulé l'arrêté du 23 juin 2014 en tant qu'il n'a pas été tenu compte, pour le calcul de la majoration de la pension de retraite de M. A..., de ses deux enfants et de l'indemnité temporaire prévue à l'article 137 de la loi du 30 décembre 2008, en deuxième lieu, enjoint au ministre de l'économie et des finances de procéder à une nouvelle liquidation de la pension de retraite de M. A... et, en troisième lieu, rejeté le surplus des conclusions de la demande. Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 12 juin et 12 septembre 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il rejette ses conclusions tendant à ce que, pour la liquidation de sa pension, les services qu'il a accomplis en qualité d'agent contractuel au titre de la période comprise entre 1989 et 2006 soient pris en compte et à ce que lui soit octroyée la bonification de dépaysement ; 2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - la loi n° 2001-616 du 11 juillet 2001 et notamment son article 64-1 ; - la loi n° 2003-660 du 21 juillet 2003 ; - la loi n° 2007-148 du 2 février 2007 ; - la loi n° 2008-1443 du 30 décembre 2008 ; - le décret n° 2009-114 du 30 janvier 2009 ; - le décret n° 2012-1256 du 13 novembre 2012 ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Yaël Treille, auditeur, - les conclusions de M. Raphaël Chambon, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de M. A... ;Considérant ce qui suit : 1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A... a été affilié au régime général de la sécurité sociale de 1976 au 16 octobre 1989, à la caisse de prévoyance sociale de Mayotte du 17 octobre 1989 au 31 décembre 2006 en tant qu'agent contractuel de la collectivité départementale de Mayotte, puis au régime des agents de l'Etat du 1er janvier 2007 au 2 décembre 2010 à la suite de sa titularisation le 1er janvier 2007 dans le corps des attachés de l'intérieur et de l'outre-mer. Une pension de retraite lui a été concédée par un arrêté du 23 juin 2014 au titre du code des pensions civiles et militaires de retraite, et elle a été liquidée sur la base de seize trimestres de cotisation au régime des pensions civiles de l'Etat. M. A... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 23 juin 2014 en tant qu'il ne prend pas en compte, dans la liquidation de sa pension, ses services accomplis en qualité d'agent contractuel entre le 17 octobre 1989 et le 31 décembre 2006 ainsi que diverses bonifications. Par un jugement du 10 mars 2017, le tribunal administratif de Rennes a annulé l'arrêté du 23 juin 2014 en tant seulement qu'il ne prend pas en compte, pour le calcul de la majoration de la pension de l'intéressé, ses deux enfants nés en 1981 et 1985 et qu'il ne lui accordait pas l'indemnité temporaire de retraite. M. A... se pourvoit en cassation contre ce jugement en tant qu'il rejette ses conclusions tendant à ce que, pour la liquidation de sa pension, les services qu'il a accomplis en qualité d'agent contractuel au titre de la période comprise entre 1989 et 2006 soient pris en compte et à ce que lui soit octroyée la bonification de dépaysement. Par la voie du pourvoi incident, le ministre de l'action et des comptes publics conclut à l'annulation de ce même jugement en tant qu'il reconnaît à M. A... le droit au bénéfice de l'indemnité temporaire de retraite. Sur le pourvoi principal : 2. Aux termes du II de l'article 64-1 de la loi du 11 juillet 2001 relative à Mayotte, " (...) Les agents titulaires, à la date de publication de la loi n° 2003-660 du 21 juillet 2003 de programme pour l'outre-mer, d'un emploi de la collectivité départementale, d'une commune ou d'un établissement public administratif de Mayotte sont intégrés au plus tard le 31 décembre 2010 :/- soit dans les corps de la fonction publique de l'Etat ; /- soit dans les cadres d'emplois de la fonction publique territoriale ; /- soit dans les corps de la fonction publique hospitalière ; /- soit dans des corps ou cadres d'emplois de la fonction publique de l'Etat, de la fonction publique territoriale ou de la fonction publique hospitalière créés le cas échéant à cet effet, à titre transitoire, pour l'administration de Mayotte. Ces corps et cadres d'emplois sont classés hors catégorie pour la fixation de leurs indices de traitement. Des décrets en Conseil d'Etat fixent les dispositions statutaires qui leur sont applicables ". Aux termes du III du même article : " Les agents non titulaires occupant, à la date de publication de la loi n° 2003-660 du 21 juillet 2003 précitée, un emploi permanent de la collectivité départementale, d'une commune ou d'un établissement public administratif de Mayotte ont vocation à être titularisés, sur leur demande, au plus tard le 31 décembre 2010 dans un des corps ou cadres d'emplois mentionnés au II, sous réserve :/1° D'être en fonction à la date mentionnée ci-dessus ou de bénéficier à cette date d'un congé régulièrement accordé en application de la réglementation en vigueur ; /2° D'avoir accompli, à la date du dépôt de leur candidature, des services effectifs d'une durée équivalente à deux ans au moins de services à temps complet dans un ou plusieurs des emplois susmentionnés ; /3° De remplir les conditions énumérées à l'article 5 du titre Ier du statut général des fonctionnaires. (...) ". Aux termes du VII du même article, introduit dans le même article par la loi du 2 février 2007 de modernisation de la fonction publique : " Les agents mentionnés aux II et III qui sont intégrés ou titularisés dans un des corps ou cadres d'emplois mentionnés au II demeurent assujettis pour les risques sociaux autres que la vieillesse et l'invalidité aux régimes de sécurité sociale auxquels ils sont affiliés à la date de publication de la loi n° 2003-660 du 21 juillet 2003 précitée. / Ils sont affiliés, au jour de leur intégration ou de leur titularisation et au plus tôt à compter du premier jour du sixième mois qui suit la publication de la loi n° 2007-148 du 2 février 2007 de modernisation de la fonction publique, au régime spécial de retraite correspondant au corps ou cadre d'emplois d'intégration ou de titularisation. / Les services effectués par ces agents sont pris en compte dans une pension unique liquidée comme suit : / - les services effectués antérieurement à l'affiliation au régime spécial précité sont pris en compte selon les règles applicables, au 1er janvier 2006, dans le régime de la caisse de retraite des fonctionnaires et agents des collectivités publiques de Mayotte en retenant les derniers émoluments soumis à retenue pour pension perçus par l'intéressé depuis six mois au moins avant l'affiliation au régime spécial de retraite / - les services effectués postérieurement à l'affiliation au régime spécial précité sont pris en compte selon les règles applicables dans ce régime. / L'ensemble des services effectués par ces agents sont pris en compte pour la constitution du droit à pension dans le régime de la caisse de retraite des fonctionnaires et agents des collectivités publiques de Mayotte et dans le régime spécial précité. / Ces agents conservent, à titre personnel, le bénéfice de l'âge auquel ils peuvent liquider leur pension et de la limite d'âge applicables antérieurement à leur affiliation au régime spécial précité sauf s'ils optent pour l'âge d'ouverture des droits et la limite d'âge de leurs corps d'intégration (.../... Un décret en Conseil d'Etat précise les modalités de mise en oeuvre de ces dispositions ". En vertu, enfin, de l'article 2 du décret du 13 novembre 2012 relatif au règlement des droits à pension de retraite des agents publics de Mayotte intégrés ou titularisés dans des corps ou cadres d'emplois des fonctions publiques pris pour l'application de ces dispositions : " (...) L'ensemble des services effectués par les intéressés durant leur affiliation, d'une part, au régime de la Caisse de retraites des fonctionnaires et agents des collectivités publiques de Mayotte, d'autre part, au régime spécial de retraite attaché à la fonction publique dans laquelle ils ont été intégrés ou titularisés, est pris en compte pour la constitution de ce droit ". 3. Il résulte de ces dispositions que les agents titulaires et contractuels dans une collectivité territoriale ou dans un établissement public administratif de Mayotte, qui ont été intégrés ou titularisés dans une des trois fonctions publiques, sont affiliés, le jour de leur intégration ou de leur titularisation, au régime spécial de retraite correspondant au corps ou cadre d'emplois d'intégration ou de titularisation. Les services qu'ils ont effectués antérieurement à cette affiliation ne sont pris en compte dans la liquidation de la pension unique que s'ils ont donné lieu à une affiliation à la caisse de retraite des fonctionnaires et des agents des collectivités publiques de Mayotte. Dans ce cas, ils sont pris en compte selon les règles applicables à ce régime au 1er janvier 2006, en retenant les derniers émoluments soumis à retenue pour pension perçus par l'intéressé depuis six mois au moins avant l'affiliation au régime spécial de retraite. Dans le cas inverse, ces services ne doivent être pris en compte, le cas échéant, que pour la liquidation d'autres pensions auprès des régimes auxquels l'intéressé était effectivement affilié. 4. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond et il n'est pas contesté que M. A... a exercé à Mayotte des fonctions d'agent contractuel au sein de la direction des affaires communales de la Représentation du Gouvernement entre le 17 octobre 1989 et le 31 décembre 2006 et qu'il était alors affilié à la caisse de prévoyance sociale de Mayotte. Il a été admis, à compter du 8 mai 2014, au bénéfice d'une pension civile de retraite au titre du code des pensions civiles et militaires de retraite pour les services accomplis entre le 1er janvier 2007 et le 2 décembre 2010 en qualité d'agent titulaire de la fonction publique d'Etat, affilié au régime de retraite des agents de l'Etat. Ainsi qu'il a été dit au point 3, les services que M. A... a effectués antérieurement à cette affiliation ne pouvaient être pris en compte pour la liquidation d'une pension unique que s'ils avaient donné lieu à une affiliation de l'intéressé à la caisse de retraite des fonctionnaires et des agents des collectivités publiques de Mayotte. Par suite, en jugeant que M. A... n'était pas fondé à soutenir que devaient être pris en compte, pour la constitution d'un droit à pension unique, les services qu'il avait accomplis en qualité d'agent contractuel entre le 17 octobre 1989 et le 31 décembre 2006, le tribunal administratif de Rennes n'a pas commis d'erreur de droit. 5. En second lieu, il ressort des termes mêmes du VII de l'article 64-1 de la loi du 11 juillet 2001 relative à Mayotte, cité au point 2, que seuls les agents affiliés à la caisse de retraite des fonctionnaires et des agents des collectivités publiques de Mayotte avant leur affiliation au régime de retraite des agents de l'Etat, à compter de leur titularisation en qualité d'agent titulaire de la fonction publique d'Etat, conservent, à titre personnel, le bénéfice de l'âge auquel ils peuvent liquider leur pension et de la limite d'âge applicables antérieurement à cette dernière affiliation. Dès lors, en jugeant que M. A... n'entrait pas dans le champ des dispositions ouvrant droit à un départ à la retraite et à la liquidation de la pension à l'âge de 60 ans, au motif de ce qu'il n'était pas affilié à la caisse de retraite des fonctionnaires et des agents des collectivités publiques de Mayotte au cours de la période précédant sa titularisation en qualité d'agent titulaire de la fonction publique d'Etat, le tribunal administratif de Rennes n'a pas commis d'erreur de droit. 6. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il rejette ses conclusions tendant à ce que, pour la liquidation de sa pension, les services qu'il a accomplis en qualité d'agent contractuel au titre de la période comprise entre 1989 et 2006 soient pris en compte et à ce que lui soit octroyée la bonification de dépaysement. Sur le pourvoi incident : 7. Aux termes de l'article 137 de la loi du 30 décembre 2008 de finances rectificative pour 2008 : " I. L'indemnité temporaire accordée aux fonctionnaires pensionnés relevant du code des pensions civiles et militaires de retraite majore le montant en principal de la pension d'un pourcentage fixé par décret selon la collectivité dans laquelle ils résident. / L'indemnité temporaire est accordée aux pensionnés qui justifient d'une résidence effective dans les collectivités suivantes : (...) Mayotte (...) / II. - A compter du 1er janvier 2009, l'attribution de nouvelles indemnités temporaires est réservée aux pensionnés ayants droit remplissant, à la date d'effet de leur pension, en sus de l'effectivité de la résidence, les conditions suivantes : / 1° a) Justifier de quinze ans de services effectifs dans une ou plusieurs collectivités mentionnées au I (...) / b) Ou remplir, au regard de la collectivité dans laquelle l'intéressé justifie de sa résidence effective, les critères d'éligibilité retenus pour l'octroi des congés bonifiés à leur bénéficiaire principal (...) ". Aux termes de l'article 1er du décret du 30 janvier 2009 relatif à l'indemnité temporaire accordée aux personnels retraités relevant du code des pensions civiles et militaires de retraite : " L'indemnité temporaire accordée aux pensionnés, fonctionnaires civils et militaires, titulaires de pensions concédées au titre du code des pensions civiles et militaires de retraite, prévue au I de l'article 137 de la loi de finances rectificative pour 2008, est égale à un pourcentage du montant en principal de la pension (...) ". 8. Il résulte de ces dispositions que l'indemnité temporaire de retraite est accordée aux fonctionnaires pensionnés relevant du code des pensions civiles et militaires de retraite et justifiant à ce titre de quinze ans de services effectifs dans une ou plusieurs collectivités mentionnées au I de l'article 137 de la loi du 30 décembre 2008 de finances rectificative pour 2008, au nombre desquelles figure la collectivité de Mayotte. Ces dispositions font obstacle à ce que les services accomplis en tant qu'agent contractuel dans une ou plusieurs de ces collectivités et effectués antérieurement à l'affiliation au régime spécial de retraite correspondant au corps d'intégration dans la fonction publique de l'Etat, soient pris en compte pour l'octroi de l'indemnité temporaire de retraite. Par suite, en jugeant que M. A... devait percevoir l'indemnité temporaire de retraite dès lors qu'il justifiait de plus de dix-sept ans de services effectifs accomplis, avant sa titularisation, en qualité d'agent contractuel au sein de la collectivité départementale de Mayotte, sans rechercher si ces services ouvraient droit à pension au titre du code des pensions civiles et militaires de retraite, le tribunal administratif de Rennes a commis une erreur de droit. 9. Il résulte de ce qui précède que le ministre de l'action et des comptes publics est fondé à demander l'annulation du jugement du tribunal administratif de Rennes en tant, d'une part, qu'il annule l'arrêté du 23 juin 2014 en ce qu'il n'a pas accordé l'indemnité temporaire de retraite à M. A... et, d'autre part, qu'il enjoint au ministre de l'économie et des finances de procéder à une nouvelle liquidation de la pension de retraite de M. A... pour que cette indemnité lui soit attribuée. 10. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative. 11. Il résulte de ce qui a été dit au point 8 que M. A... ne remplit pas les conditions prévues par l'article 137 de la loi du 30 décembre 2008 pour bénéficier de l'indemnité temporaire de retraite. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le ministre de l'économie et des finances a refusé de lui accorder le bénéfice de cette indemnité dans le cadre de la liquidation de sa pension. Il suit de là que les conclusions de M. A... tendant à l'annulation de l'arrêté du 23 juin 2014 en tant que celui-ci ne lui accorde pas le bénéfice de l'indemnité temporaire de retraite doivent être rejetées et que ses conclusions aux fins d'injonction doivent, par voie de conséquence, être également rejetées. 12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.D E C I D E : -------------- Article 1er : Le pourvoi de M. A... est rejeté. Article 2 : Le jugement du 10 mars 2017 du tribunal administratif de Rennes est annulé en tant que, d'une part, celui-ci a annulé l'arrêté du 23 juin 2014 en ce qu'il n'avait pas accordé l'indemnité temporaire de retraite à M. A... et, d'autre part, il a enjoint au ministre de l'économie et des finances de procéder à une nouvelle liquidation de la pension de retraite de M. A... pour que lui soit attribuée cette indemnité. Article 3 : Les conclusions de la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Rennes tendant à l'annulation de l'arrêté du 23 juin 2014 en ce que celui-ci ne lui accorde pas l'indemnité temporaire de retraite sont rejetées. Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. B... A... et au ministre de l'action et des comptes publics.ECLI:FR:CECHS:2019:411420.20191106
Conseil d'Etat
CAA de BORDEAUX, 3ème chambre, 29/10/2019, 17BX02464, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse de condamner La Poste à lui verser la somme totale de 286 967 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait de sa mise à la retraite pour invalidité. Par un jugement n° 1502665 du 24 mai 2017, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 25 juillet 2017, M. A..., représenté par Me G..., demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 24 mai 2017 ; 2°) de condamner La Poste à lui verser la somme totale de 304 319 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait de sa mise à la retraite pour invalidité, assortie de l'anatocisme ; 3°) de mettre à la charge de La Poste, la somme de 2 000 euros au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il soutient que : - La Poste a commis une faute en ne lui proposant pas de reclassement à la suite de son dernier congé de longue maladie alors qu'il n'était pas inapte à toute fonction mais seulement inapte à reprendre ses fonctions antérieures ainsi que cela est mentionné dans la concession de congé de longue maladie du 13 octobre 2010 et ainsi que l'a reconnu la MDPH en lui accordant la reconnaissance de qualité de travailleur handicapé ; - La Poste l'a contraint à demander sa retraite pour invalidité, cela ne résulte pas d'un choix de sa part ; - il a subi des préjudices résultant de la différence entre le montant de sa retraite pour invalidité et le montant des rémunérations qu'il aurait pu percevoir. Par un mémoire en défense, enregistré le 9 février 2018, La Poste, représentée par Me E..., conclut au rejet de la requête. Elle soutient que : - la requête est irrecevable car identique à la requête de première instance ; - aucun des moyens soulevés n'est fondé. M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 14 septembre 2017. Vu : - les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - la loi n°84-16 du 11 janvier 1984 ; - le décret n°84-1051 du 30 novembre 1984 ; - le décret n°86-442 du 14 mars 1986 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme D... F..., - les conclusions de Mme Béatrice Molina-Andréo, rapporteur public, - et les observations de Me C..., représentant La Poste. Considérant ce qui suit : 1. M. A..., agent professionnel qualifié de 2ème niveau de La Poste, a été placé en congé de longue maladie du 8 janvier 2008 au 7 janvier 2011. A l'occasion du dernier renouvellement de son congé de longue maladie, par courrier du 1er septembre 2010, M. A... a sollicité son admission à la retraite pour invalidité. Le 13 octobre 2010, la commission de réforme de La Poste a émis un avis favorable à cette demande. M. A... a donc été informé par courrier du 13 décembre 2010, de son admission à la retraite à compter du 8 janvier 2011. Estimant qu'il n'avait pas été informé de la possibilité d'obtenir un reclassement, il a demandé au tribunal administratif de Toulouse de condamner La Poste à lui verser la somme totale de 286 967 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis pour avoir été irrégulièrement mis à la retraite. Le tribunal administratif de Toulouse ayant rejeté sa demande par un jugement du 24 mai 2017, M. A... relève appel de ce jugement. Sur la responsabilité de La Poste : 2. Aux termes de l'article 63 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions de la fonction publique d'Etat : " Lorsque les fonctionnaires sont reconnus, par suite d'altération de leur état physique, inaptes à l'exercice de leurs fonctions, le poste de travail auquel ils sont affectés est adapté à leur état physique. Lorsque l'adaptation du poste de travail n'est pas possible, ces fonctionnaires peuvent être reclassés dans des emplois d'un autre corps s'ils ont été déclarés en mesure de remplir les fonctions correspondantes. (...)". Selon l'article 1er du décret du 30 novembre 1984 pris en application de l'article 63 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat en vue de faciliter le reclassement des fonctionnaires de l'Etat reconnus inaptes à l'exercice de leurs fonctions : " Lorsqu'un fonctionnaire n'est plus en mesure d'exercer ses fonctions, de façon temporaire ou permanente, et si les nécessités du service ne permettent pas un aménagement des conditions de travail, l'administration, après avis du médecin de prévention, dans l'hypothèse où l'état de ce fonctionnaire n'a pas rendu nécessaire l'octroi d'un congé de maladie, ou du comité médical si un tel congé a été accordé, peut affecter ce fonctionnaire dans un emploi de son grade, dans lequel les conditions de service sont de nature à permettre à l'intéressé d'assurer les fonctions correspondantes ". Aux termes de l'article 2 de même décret : " Dans le cas où l'état physique d'un fonctionnaire, sans lui interdire d'exercer toute activité, ne lui permet pas de remplir les fonctions correspondant aux emplois de son grade, l'administration, après avis du comité médical, invite l'intéressé à présenter une demande de reclassement dans un emploi d'un autre corps. ". Enfin l'article 27 du décret du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires : " (...) Lorsqu'un fonctionnaire a obtenu pendant une période de douze mois consécutifs des congés de maladie d'une durée totale de douze mois, il ne peut, à l'expiration de sa dernière période de congé, reprendre son service sans l'avis favorable du comité médical : en cas d'avis défavorable il est soit mis en disponibilité, soit reclassé dans un autre emploi, soit, s'il est reconnu définitivement inapte à l'exercice de tout emploi, admis à la retraite après avis de la commission de réforme (...) ". 3. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que lorsqu'un fonctionnaire est reconnu, par suite de l'altération de son état physique, inapte à l'exercice de ses fonctions, il incombe à l'administration de rechercher si le poste occupé par ce fonctionnaire ne peut être adapté à son état physique ou, à défaut, de lui proposer une affectation dans un autre emploi de son grade compatible avec son état de santé. Si le poste ne peut être adapté ou si l'agent ne peut être affecté dans un autre emploi de son grade, il incombe à l'administration de l'inviter à présenter une demande de reclassement dans un emploi d'un autre corps. Il n'en va autrement que si l'état de santé du fonctionnaire le rend totalement inapte à l'exercice de toute fonction. 4. M. A... soutient que La Poste ne l'a pas invité à demander son reclassement à l'issue de son congé de longue maladie et a ainsi commis une faute de nature à engager sa responsabilité. Toutefois, s'il résulte des dispositions précitées que l'administration est tenue, avant de procéder à la mise à la retraite pour invalidité d'un agent inapte à ses fonctions, d'inviter ce dernier à présenter une demande de reclassement, la circonstance que l'agent n'a pas été invité à demander un reclassement n'est pas fautif, ainsi que l'ont jugé à bon droit les premiers juges, lorsqu'il a été médicalement constaté que l'état de santé de l'intéressé le rend définitivement inapte à un reclassement sur quelque poste que ce soit. Et il résulte de l'instruction, que le 31 aout 2010 un médecin généraliste a estimé que M. A... était inapte à toute fonction et a noté que l'intéressé demandait sa retraite pour invalidité. Puis le 1er septembre 2010 un médecin spécialiste (orthopédie, traumatologie) a déclaré également que l'intéressé était inapte à toute activité professionnelle et a noté également qu'il demandait sa retraite pour invalidité. M. A... n'a d'ailleurs pas contesté cette inaptitude en demandant à La Poste, dès le 1er septembre 2010, sa mise à la retraite pour invalidité compte tenu de son inaptitude définitive à tout poste. En outre, le 22 septembre 2010 M. A... a été examiné, à la demande de La Poste, par un médecin rhumatologue agréé, lequel a constaté que l'intéressé bénéficiait d'un congé de longue maladie depuis le 8 janvier 2008 et était porteur de taux d'invalidité préexistants de ses trois infirmités de 28%, 20% et 5%, ce qui le rendait incapable d'occuper un poste proposé par son administration. L'absence de mention quant à une inaptitude définitive à tout poste portée sur la " concession de congés de longue maladie " du 13 octobre 2010, alors que le comité médical ne se prononçait que sur une prolongation du congé et non sur le caractère définitif de l'inaptitude de l'agent, ne saurait contredire ces constatations médicales sur l'état d'inaptitude définitive de M. A.... Enfin, la circonstance que M. A... aurait été un militant syndical à La Poste, au demeurant contredite par son employeur, n'est d'aucune incidence sur l'inaptitude définitive à tout poste de l'intéressé. Par suite, le moyen de M. A... tiré de ce que La Poste a commis une faute en ne l'invitant pas à demander son reclassement doit être écarté. 5. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la recevabilité de la requête, que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à la condamnation de La Poste. Sur les frais d'instance : 6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que La Poste, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse au conseil de M. A... une somme sur ce fondement combiné avec l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. DECIDE : Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à La Poste. Délibéré après l'audience du 1er octobre 2019 à laquelle siégeaient : M. Dominique Naves, président, Mme D... F..., présidente-assesseure, Mme Déborah de Paz, premier conseiller, Lu en audience publique, le 29 octobre 2019. La rapporteure, Fabienne F... Le président, Dominique NAVES Le greffier, Christophe PELLETIER La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. 2 N° 17BX02464
Cours administrative d'appel
Bordeaux
CAA de NANTES, 6ème chambre, 14/11/2019, 18NT00215, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. D... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du 21 décembre 2015 par laquelle la directrice des ressources humaines et des relations sociales et le directeur de l'économie RH et des ressources de La Poste ont rejeté son recours dirigé contre la décision implicite lui refusant le bénéfice de l'allocation spéciale de fin de carrière (ASFC) et de condamner La Poste à lui verser la somme de 29 900 euros assortie des intérêts. Par une seconde demande, il a sollicité l'annulation de la décision du 28 décembre 2015 par laquelle le directeur courrier Haute-Bretagne de La Poste a rejeté son recours dirigé contre la décision implicite lui refusant l'ASFC et la condamnation de La Poste à lui verser la somme de 29 900 euros. Par un jugement nos 1600846, 1600847 du 23 novembre 2017, le tribunal administratif de Rennes a annulé les décisions des 21 et 28 décembre 2015 et a renvoyé M. D... devant son employeur pour la liquidation de l'ASFC à laquelle il pouvait prétendre. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 18 janvier 2018, La Poste, représentée par Me E..., demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 23 novembre 2017 ; 2°) de rejeter la demande présentée devant le tribunal administratif de Rennes par M. D... ; 3°) de mettre à la charge de M. D... le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative. La Poste soutient que : - l'ASFC n'est ouverte qu'aux agents qui font valoir, à la date de leur demande, leurs droits à pension dans le cadre d'un départ en retraite anticipé au titre du service actif ; or M. D... a été placé en retraite pour invalidité à raison de son état de santé et non du fait de sa volonté ; l'objectif de ce dispositif est de compenser une décote subie par les agents partant volontairement à la retraite de manière anticipée sans bénéficier du taux plein, alors que M. D... ne s'est vu appliquer aucune décote ; - ce n'est qu'au titre des services accomplis avant 1993 classés dans la catégorie active que M. D... aurait pu faire valoir ses droits à retraite anticipée au titre du service actif dans la mesure où les services accomplis à compter du 30 décembre 1993 en qualité d'APN2 sont des services sédentaires au regard du code des pensions civiles et militaires ; l'intéressé a préféré demander le bénéfice d'une pension civile d'invalidité plutôt que de faire valoir ses droits à retraite anticipée au titre du service actif ainsi que le lui permettaient les dispositions de l'article 1.2 de la loi du 13 septembre 1984. Par un mémoire en défense, enregistré le 18 janvier 2019, M. A... D..., représenté par la SCP Verdier Martin, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de La Poste au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que les moyens soulevés par La Poste ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 ; - loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 ; - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - le code de la sécurité sociale ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme B..., - les conclusions de M. Lemoine, rapporteur public, - les observations de Me C..., substituant Me E... représentant La Poste, - et les observations de Me F..., représentant M. D.... Une note en délibéré, présentée pour M. D..., a été enregistrée le 22 octobre 2019. Une note en délibéré, présentée pour La Poste, a été enregistrée le 29 octobre 2019. Considérant ce qui suit : 1. M. D... a travaillé à La Poste à compter du mois d'août 1973. Lors du changement de statut de son employeur résultant de l'entrée en vigueur de la loi du 2 juillet 1990 visée ci-dessus, il a intégré le corps dits de " reclassification " d'agent de production de niveau 2 (APN2). En dernier lieu, il a exercé ses fonctions au centre de traitement du courrier de Saint-Brieuc puis à compter du 6 novembre 2012, à la plateforme de distribution du courrier de Guingamp Saint-Agathon. Le 25 août 2015, il a demandé le versement de l'allocation spéciale de fin de carrière (ASFC). Parallèlement, il a été placé à la retraite pour invalidité à compter du 11 octobre 2015, à l'issue d'une période de disponibilité d'office. Par deux décisions des 21 et 28 décembre 2015, La Poste a rejeté sa demande d'attribution de l'ASFC. Par un jugement du 23 novembre 2017, le tribunal administratif de Rennes a annulé ces deux décisions et a renvoyé M. D... devant son employeur pour la liquidation de cette allocation. La Poste relève appel de ce jugement. 2. D'une part, l'accord-cadre sur la qualité de vie au travail à La Poste signé le 22 janvier 2013 a institué l'ASFC. Ce dispositif, reconduit par les accords collectifs relatifs au contrat de générations à La Poste, a été retranscrit au bulletin des ressources humaines (BRH) 2015-0060 du 27 février 2015. Selon le point 2 de ce bulletin : " Le bénéfice de cette allocation (...) est ouvert pour toute l'année 2015 aux agents fonctionnaires bénéficiaires du service actif, âgés de 56 à 59 ans, qui prennent leur retraite sans avoir au préalable bénéficié d'un dispositif aménagé de fin d'activité tel que le temps partiel aménagé sénior (TPAS) ou tout autre dispositif antérieur équivalent (EGFA) ". Le point 3 dispose : " l'ASFC est modulée en fonction d'une part, du nombre de trimestres manquants par rapport à la durée d'assurance requise pour obtenir une pension à taux plein et d'autre part de l'âge de départ en retraite des agents concernés ". 3. D'autre part, aux termes de l'article L. 4 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " Le droit à la pension est acquis : 1° Aux fonctionnaires après une durée fixée par décret en Conseil d'Etat ; 2° Sans condition de durée de services aux fonctionnaires radiés des cadres pour invalidité résultant ou non de l'exercice des fonctions. ". Aux termes de l'article L. 24 du même code : " I. - La liquidation de la pension intervient : 1° Lorsque le fonctionnaire civil est radié des cadres par limite d'âge, ou s'il a atteint, à la date de l'admission à la retraite, l'âge mentionné à l'article L. 161-17-2 du code de la sécurité sociale, ou de cinquante-sept ans s'il a accompli au moins dix-sept ans de services dans des emplois classés dans la catégorie active./ Sont classés dans la catégorie active les emplois présentant un risque particulier ou des fatigues exceptionnelles. La nomenclature en est établie par décret en Conseil d'Etat ; 2° Lorsque le fonctionnaire est mis à la retraite pour invalidité et qu'il n'a pas pu être reclassé dans un emploi compatible avec son état de santé (...) ". 4. Si M. D..., qui est né le 6 novembre 1957, a occupé entre le 31 décembre 1993 et le 10 juillet 2015 un poste d'APN2 dit " sédentaire ", il ressort des pièces du dossier, et notamment de son titre de pension produit par La Poste, qu'il relevait, en revanche, de la catégorie du service dit " actif " pour les quinze années de services qu'il a effectuées entre le 9 novembre 1978 et le 30 décembre 1993. Il n'est par ailleurs pas contesté par La Poste que cet agent n'a bénéficié ni d'un temps partiel aménagé " sénior ", ni d'aucun autre dispositif aménagé au titre de la fin d'activité. Par suite, et alors même qu'il a été placé à la retraite pour invalidité à compter du 11 octobre 2015 à l'issue d'une période de congé de maladie puis de disponibilité d'office, l'intéressé remplissait l'ensemble des conditions mentionnées au point 2 pour bénéficier de l'ASFC. En outre, si La Poste fait valoir que l'objectif de cette allocation est de compenser la décote que subiraient les agents qui partiraient volontairement à la retraite sans bénéficier d'une retraite à taux plein, il ressort du titre de pension mentionné ci-dessus que M. D... ne totalisait que 151 trimestres, et non les 165 requis pour percevoir une retraite à taux plein. Dans ces conditions, La Poste ne pouvait lui refuser le bénéfice de l'ASFC. 5. Il résulte de ce qui précède, que La Poste n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a annulé ses décisions des 21 et 28 décembre 2015 et a renvoyé M. D... devant son administration pour le calcul de l'ASFC qui lui était due. Sur les frais liés au litige : 6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de M. D..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à La Poste de la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de La Poste le versement à M. D... d'une somme de 1 500 euros sur le même fondement. DECIDE : Article 1er : La requête de La Poste est rejetée. Article 2 : La Poste versera la somme de 1 500 euros à M. D... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à La Poste et à M. A... D.... Délibéré après l'audience du 11 octobre 2019, à laquelle siégeaient : - M. Lenoir, président de chambre, - M. Coiffet, président-assesseur, - Mme B..., premier conseiller. Lu en audience publique, le 14 novembre 2019. Le rapporteur, V. GELARDLe président, H. LENOIR La greffière, E. HAUBOIS La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 18NT00215
Cours administrative d'appel
Nantes