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COUR ADMINISTRATIVE D'APPEL DE LYON, 6ème chambre - formation à 3, 17/01/2019, 17LY02008, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Lyon de condamner l'Etat à lui verser la somme de 85 500 euros en réparation des préjudices subis résultant de la manipulation d'une grenade en Tunisie en 1943. Par un jugement n° 1403856 du 9 mars 2017, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Procédure devant la cour Par une requête enregistrée le 4 mai 2017, M.A..., représenté par MeC..., demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du 9 mars 2017 du tribunal administratif de Lyon ; 2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme globale de 85 500 euros en réparation des préjudices subis du fait de la manipulation d'une grenade en Tunisie en 1943 ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - sa requête est recevable dès lors qu'il a formé une réclamation préalable le 21 octobre 2016 qui a fait l'objet d'une décision implicite de rejet ; - l'Etat ne saurait lui opposer la prescription de son action compte tenu de ce que l'expert a relevé que la consolidation de son état de santé est fixée au 31 mai 2012, date à laquelle il a bénéficié d'un appareillage auditif ; - la grenade a été découverte non pas à l'occasion de combats entre les forces en présence mais alors qu'elle était abandonnée ; les opérations militaires ne sont pas visées dans le présent recours mais le terrain juridique invoqué est le risque encouru par les populations tunisiennes ; le principe de la responsabilité sans faute de l'Etat a vocation à s'appliquer ; - les dommages subis sont en lien direct avec le risque encouru ; - le déficit fonctionnel temporaire total sera évalué à 3 000 euros et le déficit fonctionnel temporaire partiel sera évalué à 4 500 euros ; le déficit fonctionnel permanent sera évalué à 23 000 euros ; les souffrances endurées seront évaluées à 15 000 euros ; le préjudice esthétique sera évalué à 5 000 euros ; le préjudice professionnel sera évalué à 50 000 euros ; Par un mémoire enregistré le 5 juin 2018, le ministre des armées conclut au rejet de la requête. Il soutient que : - il est de jurisprudence constante que la responsabilité de la puissance publique ne peut être engagée du fait de dommages dont le fait générateur se rattache à la conduite de la guerre ou à des opérations de guerre ; en 1943, les Alliés étaient en conflit avec l'Allemagne et l'Italie et des combats se sont déroulés sur le territoire tunisien ; la France ne peut être tenue pour responsable des conséquences dommageables liées à ces affrontements militaires ; - à titre subsidiaire, la demande de M. A...devant le tribunal administratif était irrecevable dès lors que M. A...a présenté une demande d'indemnisation le 16 février 2011 qui a fait l'objet d'une décision implicite de rejet ; M. A...a directement saisi le tribunal d'un recours en indemnisation sans avoir lié le contentieux ; - si l'expert a fixé la date de consolidation des blessures de M. A...au 31 mai 2012, il ne s'agit que de séquelles auditives ; il ne s'est pas prononcé sur la consolidation des autres lésions ; les autres séquelles ont été consolidées au plus tard trois ans après l'accident, soit en 1946 ; la créance est donc prescrite depuis le 1er janvier 1951 conformément à l'article 148 de la loi n° 45-0195 du 31 décembre 1945 ; - aucune pièce du dossier ne permet d'établir les circonstances exactes de l'accident ayant causé les blessures de M.A.... Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - la loi n° 46-1117 du 20 mai 1946 portant remise en vigueur, modifications et extensions de la loi du 24 juin 1919 sur les réparations à accorder aux victimes civiles de la guerre ; - la loi n° 45-0195 du 31 décembre 1945 portant fixation du budget général pour l'exercice 1946 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Caraës, - les conclusions de Mme Vigier-Carrière, rapporteur public, - et les observations de MeC..., représentant M.A.... 1. Considérant qu'au printemps 1943, M. B...A..., né le 12 mars 1937 en Tunisie, a été, selon ses dires, victime de l'explosion d'une grenade qu'il manipulait et qui aurait été abandonnée à la suite de la bataille de Tunisie qui s'est déroulée entre le 17 novembre 1942 et le 13 mai 1943 ; que, le 16 avril 1951, M. A...a demandé l'attribution d'une pension militaire d'invalidité en qualité de victime civile de guerre ; que, le 29 juin 1964, le ministre des anciens combattants et des victimes de guerre a rejeté sa demande ; que la légalité de cette décision a été confirmée par un jugement du tribunal départemental des pensions militaires des Bouches-du-Rhône le 20 février 1969 ; que M. A...a présenté une nouvelle demande qui a donné lieu à un jugement de rejet rendu le 5 novembre 1998 par le tribunal départemental des pensions militaires des Bouches-du-Rhône le 5 novembre 1998, confirmé par la cour régionale des pensions militaires d'Aix-en- Provence le 7 mars 2003 ; qu'il a formé le 16 février 2011 une nouvelle demande d'indemnisation fondée sur le risque, que le ministre de la défense a implicitement rejetée ; que, par ordonnance du 3 mai 2013, le juge des référés du tribunal administratif de Lyon, saisi par M.A..., a désigné le professeur Malicier en qualité d'expert ; que celui-ci a remis son rapport le 28 mars 2014 ; que M. A...relève appel du jugement du 9 mars 2017 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'indemnisation, sur le fondement de la responsabilité sans faute, des préjudices subis du fait de l'explosion dont il aurait été victime ; 2. Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 16 juin 1966, repris à l'article L. 733-1 du code de la sécurité intérieure, " les travaux de détection, d'enlèvement, de neutralisation, de stockage et de destruction des explosifs et pièges de guerre ont le caractère de travaux publics. La présente disposition s'applique aux dommages causés par les travaux postérieurs au 31 décembre 1961 " ; que, par cette disposition, le législateur a notamment entendu étendre les règles applicables à l'indemnisation des dommages de travaux publics aux dommages causés aux personnes et aux biens par la présence ou l'explosion d'engins explosifs postérieurement au 31 décembre 1961 ; 3. Considérant que, pour les dommages causés aux personnes par les explosions d'engins antérieurement au 31 décembre 1961, les règles d'indemnisation des victimes relèvent de la législation des victimes civiles de guerre issue de la loi n° 46-1117 du 20 mai 1946 portant remise en vigueur, modifications et extensions de la loi du 24 juin 1919 sur les réparations à accorder aux victimes civiles de la guerre qui a été reprise dans le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; qu'en application de l'article L. 711-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, les contestations individuelles auxquelles donne lieu l'application des dispositions du livre Ier et des titres Ier, II et III du livre II sont jugées en premier ressort par le tribunal des pensions et en appel par la cour régionale des pensions ; 4. Considérant que M. A...entend se prévaloir devant la juridiction administrative de droit commun du régime jurisprudentiel de responsabilité fondée sur l'existence d'un risque excédant les limites de ceux qui résultent normalement du voisinage ; que, toutefois, il n'établit ni les circonstances exactes de l'accident dont il indique avoir été victime, notamment la date exacte des faits, ni même leur matérialité en se bornant à produire un document intitulé " rapport de la gendarmerie française du 8 septembre 1944 à Monsieur le juge de tribunal des victimes de guerre ", dont la valeur probante apparaît faible ; que, dès lors, M. A...n'est pas fondé à demander la condamnation de l'Etat à l'indemniser des préjudices subis ; 5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir tirée de l'irrecevabilité de la requête et sur l'exception de prescription opposées par le ministre, que M. A...n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ; DECIDE : Article 1er : La requête de M. A...est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A..., à la caisse primaire d'assurance maladie du Rhône et au ministre des armées. Délibéré après l'audience du 6 septembre 2018, à laquelle siégeaient : M. Pommier, président de chambre, M. Drouet, président assesseur, Mme Caraës, premier conseiller. Lu en audience publique le 17 janvier 2019. 2 N° 17LY02008
Cours administrative d'appel
Lyon
CAA de PARIS, 8ème chambre, 20/12/2018, 18PA00572, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A...C...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'opposition à tiers détenteur adressée le 20 mai 2015 à la caisse d'allocations familiales de Paris par le Trésorier principal de Paris Centres Hospitaliers spécialisés, en vue du recouvrement de cinq titres de recettes émis à son encontre par l'établissement public de santé Maison-Blanche, pour un montant total de 1 039,50 euros. Par un jugement n° 1509188/6-3 du 6 juillet 2017, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête, enregistrée le 19 février 2018, M.C..., représenté par Me B..., demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement n° 1509188/6-3 du 6 juillet 2017 du Tribunal administratif de Paris ; 2°) d'annuler l'opposition à tiers détenteur adressée le 20 mai 2015 à la caisse d'allocations familiales de Paris par le Trésorier principal de Paris Centres Hospitaliers spécialisés, en vue du recouvrement de cinq titres de recettes émis à son encontre par l'établissement public de santé Maison-Blanche, pour un montant total de 1 039,50 euros. 3°) de mettre à la charge de l'établissement public de santé Maison-Blanche le versement à M. C...de la somme de 20 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. 4°) de mettre à la charge de l'établissement public de santé Maison-Blanche le versement à MeB..., sur le fondement de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, de la somme de 1 000 euros. Il soutient que : - son hospitalisation au sein de l'établissement public de santé Maison-Blanche n'était ni justifiée, ni régulière ; - dès lors qu'il résulte de l'arrêté du 27 décembre 2004 fixant les montants du forfait journalier hospitalier prévu à l'article L. 174-4 du code de la sécurité sociale pour les années 2005, 2006 et 2007 qu'à compter du 1er janvier 2007 le montant du forfait journalier en cas d'hospitalisation dans un service de psychiatrie d'un établissement de santé s'élevait à la somme de 12 euros, son hospitalisation du 23 janvier au 13 mars 2014, soit pendant cinquante jours, aurait dû conduire à une facturation (au titre des frais hospitaliers) à hauteur de 600 euros, et non de 675 euros. Une mise en demeure a été adressée le 18 juin 2018 au Trésorier principal de Paris Centres Hospitaliers spécialisés en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative. Par une décision du 24 novembre 2017, le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris a accordé l'aide juridictionnelle totale à M.C.... Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de la santé publique, - le code général des collectivités territoriales, - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, - l'arrêté du 23 décembre 2009 fixant les montants du forfait journalier hospitalier prévu à l'article L. 174-4 du code de la sécurité sociale, - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Luben, - et les conclusions de Mme Bernard, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. Par le jugement du 6 juillet 2017 dont il est relevé appel, le Tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de M. C...tendant à l'annulation de l'opposition à tiers détenteur, adressée le 20 mai 2015 à la caisse d'allocations familiales de Paris par le Trésorier Principal de Paris Centres Hospitaliers spécialisés, en vue du recouvrement de cinq titres de recettes émis à son encontre par l'établissement public de santé Maison-Blanche, pour un montant total de 1 039,50 euros. Sur les conclusions tendant à l'annulation de l'opposition à tiers détenteur et à la décharge de l'obligation de payer : 2. Il ressort des pièces du dossier que M. C...a été hospitalisé d'office à l'établissement public de santé Maison-Blanche à deux reprises, du 7 décembre 2013 au 2 janvier 2014 et du 23 janvier 2014 au 13 mars 2014. Il a bénéficié d'une prise en charge à 100 % du ticket modérateur mais est resté redevable des sommes dues au titre du forfait journalier, dont les frais correspondants lui ont été facturés par l'établissement public de santé. Il est constant que M. C... n'a pas contesté devant le juge compétent la légalité de la décision d'hospitalisation d'office. Par suite, s'il soutient que son hospitalisation d'office n'était ni justifiée, ni régulière, et qu'elle a été provoquée par une machination orchestrée par son frère, ces allégations, qui concernent la légalité de la décision d'hospitalisation d'office, sont sans incidence sur l'obligation de rembourser les frais exposés par l'établissement public de santé au cours de cette hospitalisation, correspondant au forfait journalier, qui sont dus en tout état de cause. Par suite, c'est à bon droit que le tribunal administratif a rejeté sa demande d'annulation. 3. En second lieu, aux termes de l'article L. 174-4 du code de la sécurité sociale : " Un forfait journalier est supporté par les personnes admises dans des établissements hospitaliers ou médico-sociaux, à l'exclusion des établissements mentionnés à l'article L. 174-6 du présent code et au 6° du I de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles. Ce forfait n'est pas pris en charge par les régimes obligatoires de protection sociale, sauf dans le cas des enfants et adolescents handicapés hébergés dans des établissements d'éducation spéciale ou professionnelle, des victimes d'accidents du travail et de maladies professionnelles, des bénéficiaires de l'assurance maternité et des bénéficiaires de l'article L. 115 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, ainsi que des donneurs d'éléments et produits du corps humain mentionnés à l'article L. 1211-2 du code de la santé publique. / Le forfait journalier peut être modulé dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, en fonction de l'un ou de plusieurs des critères suivants : catégorie de l'établissement, nature du service, durée du séjour. Ses différents montants sont fixés par arrêté. (...) ". Aux termes de l'article 2 de l'arrêté du 23 décembre 2009 fixant les montants du forfait journalier hospitalier prévu à l'article L. 174-4 du code de la sécurité sociale, applicable à la période d'hospitalisation de M. C...à l'établissement public de santé Maison-Blanche : " Le montant du forfait journalier en cas d'hospitalisation dans un service de psychiatrie d'un établissement de santé est fixé à 13,5 euros à compter du 1er janvier 2010. ". 4. M. C...n'est pas fondé à soutenir que le tarif du forfait journalier fixé par l'arrêté du 27 décembre 2004 pris pour l'application de l'article L. 174-4 du code de la sécurité sociale aurait dû lui être appliqué, dès lors qu'il n'était pas applicable à la date des faits en litige, ni, par voie de conséquence, fondé à soutenir que les titres de recette en cause, qui indiquent un forfait journalier de 13,50 euros, seraient entachés d'une erreur de calcul. 5. Il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 6 juillet 2017, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'opposition à tiers détenteur adressée le 20 mai 2015 à la caisse d'allocations familiales de Paris par le Trésorier principal de Paris Centres Hospitaliers spécialisés, en vue du recouvrement de cinq titres de recettes émis à son encontre par l'établissement public de santé Maison-Blanche, pour un montant total de 1 039,50 euros. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et celles présentées par son avocat sur le fondement de la loi susvisée du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. C...est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C...et au ministre de l'action et des comptes publics. Copie en sera adressée à l'Hôpital de Maison Blanche et au Trésorier principal de Paris Centres Hospitaliers spécialisés. Délibéré après l'audience du 6 décembre 2018, à laquelle siégeaient : - M. Lapouzade, président, - M. Luben, président assesseur, - Mme Larsonnier, premier conseiller. Lu en audience publique, le 20 décembre 2018. Le rapporteur, I. LUBENLe président, J. LAPOUZADELe greffier, C. POVSELa République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 5 N° 18PA00572
Cours administrative d'appel
Paris
CAA de DOUAI, 1ère chambre - formation à 3, 13/12/2018, 16DA02353, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme D... B...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 26 novembre 2014 par laquelle le Premier ministre a refusé de lui accorder le bénéfice de l'aide financière instituée par le décret du 27 juillet 2004 au profit des orphelins dont les parents ont été victimes d'actes de barbarie durant la Deuxième Guerre mondiale. Par un jugement n° 1500886 du 7 octobre 2016, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire ampliatif, enregistrés le 12 décembre 2016 et le 3 janvier 2017, et un mémoire, enregistré le 23 novembre 2018, Mme B..., représentée par la SCP Dablemont-E..., demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler pour excès de pouvoir cette décision ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; - le décret n° 2004-751 du 27 juillet 2004 ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Michel Richard, président-assesseur, - les conclusions de Mme Amélie Fort-Besnard, rapporteur public, - et les observations de Me C...E..., représentant MmeB.... Considérant ce qui suit : 1. Mme D... B...relève appel du jugement du 7 octobre 2016 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 26 novembre 2014 par laquelle le Premier Ministre a rejeté sa demande tendant au bénéfice de l'aide financière instaurée par le décret du 27 juillet 2004. 2. Aux termes de l'article 1er du décret du 27 juillet 2004 : " Toute personne, dont la mère ou le père, de nationalité française ou étrangère, a été déporté, à partir du territoire national, durant l'Occupation pour les motifs et dans les conditions mentionnées aux articles L. 272 et L. 286 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, et a trouvé la mort en déportation, a droit à une mesure de réparation, conformément aux dispositions du présent décret, si elle était mineure de vingt et un ans au moment où la déportation est intervenue. / Ce régime bénéficie également aux personnes, mineures de moins de vingt et un ans au moment des faits, dont le père ou la mère, de nationalité française ou étrangère, a, durant l'occupation, été exécuté dans les circonstances définies aux articles L. 274 et L. 290 du même code / (...) ". 3. Le décret du 27 juillet 2004, dont la légalité est contestée par voie d'exception, institue une mesure d'aide financière, d'une part en faveur des orphelins dont la mère ou le père a été déporté à partir du territoire national durant l'Occupation soit comme déporté résistant au sens de l'article L. 272 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, soit comme déporté politique au sens de l'article L. 286 de ce même code et a trouvé la mort en déportation, et, d'autre part, en faveur des orphelins dont le père ou la mère a été arrêté et exécuté comme interné résistant ou interné politique au sens respectivement des articles L. 274 et L. 290 de ce même code. L'objet de ce texte est ainsi d'accorder une mesure de réparation destinée aux seuls orphelins des victimes d'actes de barbarie durant la période de l'Occupation, suite au décès en déportation ou à l'exécution sommaire de leur parent, à l'exclusion des orphelins des personnes mortes après leur retour de déportation, en temps de paix. Compte-tenu tenu de cet objet, et au regard de la situation différente dans laquelle se trouvent ces deux catégories de personnes en raison des conditions dans lesquelles le décès de leur parent est intervenu et de celles dans lesquelles elles-mêmes se trouvaient à la date de ce décès, cette différence de traitement n'apparaît pas manifestement disproportionnée. Dans ces conditions et compte tenu de la nature des crimes commis à l'égard des victimes, le décret contesté n'est entaché ni de méconnaissance du principe d'égalité, ni d'une discrimination illégale au regard des stipulations combinées de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 1er de son premier protocole additionnel, en n'accordant une mesure de réparation particulière qu'à leurs seuls orphelins et en excluant, comme le conteste la requérante, les orphelins des déportés morts postérieurement à leur retour de déportation. 4. Il est constant que M. A... B..., père de Mme B..., est décédé à Auby le 23 décembre 1973, soit vingt-huit ans après sa libération du camp de concentration de Dachau dans lequel il avait été déporté et interné de 1942 à 1945. Par suite, et alors même que la réalité des souffrances endurées par M. B... n'est pas contestable et qu'il est effectivement mort des suites de sa déportation, les circonstances de son décès n'entrent pas dans les prévisions des dispositions du décret du 27 juillet 2004 qui réservent le bénéfice de la mesure de réparation qu'elles instituent aux personnes dont le père ou la mère a trouvé la mort en déportation. 5. Il ressort des termes de la décision en litige que pour refuser à Mme B... le bénéfice de l'aide institué par le décret du 27 juillet 2004, le Premier ministre s'est uniquement fondé sur la circonstance que son père est décédé après son retour de déportation. Le moyen tiré de ce que les dispositions de ce décret, applicables aux seules personnes mineures de vingt et un ans au moment où la déportation du parent est intervenue, serait entachée de discrimination illégale sur ce point est en tout état de cause inopérant à l'encontre de la décision attaquée et doit, par suite, être écarté. 6. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées. DÉCIDE : Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D...B...et au Premier ministre et à Me C...E.... N°16DA02353 3
Cours administrative d'appel
Douai
Conseil d'État, 2ème chambre, 31/12/2018, 416891, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : M. B...A...a demandé au tribunal des pensions de Nanterre d'annuler la décision du 9 janvier 2012 par laquelle le ministre de la défense a refusé de faire droit à sa demande de pension et de lui reconnaître droit à pension pour des infirmités d'acouphènes gauches permanents, d'hypoacousie de perception gauche et de perte auditive moyenne de l'oreille gauche. Par un jugement n° 12/00016 du 8 juillet 2016, le tribunal des pensions lui a accordé une pension au taux de 20 % pour acouphènes gauches permanents à compter du 7 septembre 2009. Par un arrêt n° 16/04153 du 24 octobre 2017, la cour régionale des pensions de Versailles a rejeté l'appel formé par le ministre de la défense contre ce jugement. Par un pourvoi, enregistré le 27 décembre 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de la défense demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler cet arrêt ; 2°) statuant au fond, de faire droit à son appel. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Louise Bréhier, auditrice, - les conclusions de Mme Sophie Roussel, rapporteur public, La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Gadiou, Chevallier, avocat de M. A...; 1. Considérant qu'il résulte des dispositions des articles L. 2 et L. 3 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, dans leur rédaction applicable au litige, que le demandeur d'une pension, s'il ne peut prétendre au bénéfice de la présomption légale d'imputabilité au service, doit rapporter la preuve de l'existence d'un fait précis ou de circonstances particulières de service à l'origine de l'affection qu'il invoque ; que cette preuve ne saurait résulter de la seule circonstance que l'infirmité soit apparue durant le service, ni d'une hypothèse médicale, ni d'une vraisemblance, ni d'une probabilité, aussi forte soit-elle ; 2. Considérant que, pour reconnaître l'imputabilité à un fait précis de service de l'infirmité dite " acouphènes gauches permanents " dont souffre M.A..., la cour régionale des pensions s'est uniquement fondée sur les termes d'un rapport établi le 19 mars 2004 faisant état du survol à très basse altitude d'un avion de combat lors d'une mission à Djibouti " le 13 juin 2002 " ; que si la cour a estimé que ce document ne se bornait pas à reprendre les propos de l'intéressé, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'il a été établi longtemps après le fait indiqué sans qu'aucune pièce versée au dossier ne fasse état d'une enquête qui aurait été effectuée à ce propos ; que la cour a relevé que la date du 13 juin 2002 indiquée par le rapport procédait d'une erreur manifeste, cette date correspondant au début de la mission de l'intéressé à Djibouti, sans retenir aucune autre date pour la survenance du fait en cause ; que, dans ces conditions, en jugeant que M. A...rapportait la preuve, qui lui incombe, de l'existence d'un fait précis de service à l'origine de l'affection qu'il invoque, pour l'application de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, la cour régionale des pensions a dénaturé les faits de l'espèce ; que, par suite, la ministre des armées est fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque ; 3. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ; 4. Considérant que si M. A...soutient, pour rattacher au service l'affection dont il souffre, que, lors d'une mission à Djibouti entre le 13 juin au 29 octobre 2002, il a été surpris par le survol d'un avion de combat à très basse altitude, il n'indique pas la date de cet incident ; que les mentions portées au livret médical le 21 janvier 2003 se bornent à transcrire les déclarations de l'intéressé ; que le rapport établi le 19 mars 2004 ne peut être regardé, en raison de ses imprécisions et de la date à laquelle il a été établi, comme rapportant la preuve de l'existence d'un fait précis de service à l'origine de l'affection en cause ; que, dans ces conditions, la preuve de l'imputabilité de l'affection pour laquelle a été formée la demande de pension à un fait précis ou à des circonstances particulières de service, comme l'exige l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, n'est pas rapportée ; 5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la ministre des armées est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal des pensions de Nanterre a accordé à M. A...une pension au taux de 20 % pour des " acouphènes gauches permanents " ; D E C I D E : -------------- Article 1er : L'arrêt du 24 octobre 2017 de la cour régionale des pensions de Versailles et le jugement du 8 juillet 2016 du tribunal des pensions de Nanterre sont annulés. Article 2 : La demande présentée par M. A...devant le tribunal des pensions de Nanterre est rejetée. Article 3 : La présente décision sera notifiée à la ministre des armées et à M. B...A....ECLI:FR:CECHS:2018:416891.20181231
Conseil d'Etat
CAA de BORDEAUX, 6ème chambre - formation à 3, 12/12/2018, 16BX03817, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme A...F...épouse D...E...a demandé au tribunal administratif de Toulouse de condamner la commune de Tarascon-sur-Ariège à lui verser une somme qu'elle a chiffré à 93 069,15 euros dans le dernier état de ses écritures, en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis à la suite de l'accident de service dont elle a été victime le 23 juin 2009. Par un jugement n° 1305685 du 25 octobre 2016, le tribunal administratif de Toulouse a condamné la commune de Tarascon-sur-Ariège à lui verser la somme de 60 623,70 euros en réparation de préjudice ainsi que la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et rejeté le surplus de sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés les 1er décembre 2016 et 20 mars 2017, la commune de Tarascon-sur-Ariège, représentée par la Scp Goguyer Lalande et Degioanni, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du 25 octobre 2016 du tribunal administratif de Toulouse ; 2°) de débouter Mme A...F...de l'ensemble de ses demandes ; 3°) " de dire et juger n'y avoir lieu à application à 1'encontre de la commune de Tarascon-sur-Ariège des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ". Elle soutient que : - s'agissant de la responsabilité, il est pour le moins surprenant que, pour reconnaître l'existence d'une faute de la commune, le tribunal administratif ait estimé connaître les circonstances exactes de l'accident de l'intéressée alors que ces dernières sont demeurées floues tout le long de l'instruction du dossier, Mme F...ayant changé de version à plusieurs reprises, indiquant tantôt avoir été heurtée par l'échelle qui aurait chuté puis, dans un second temps, que l'échelle se trouvait au sol, de sorte qu'il est impossible de déterminer comment son accident a eu lieu ; - à cet égard, l'attestation de M.C..., qui n'était d'ailleurs pas l'ancien responsable technique du centre culturel de la commune mais agent technique, se borne à indiquer que l'échelle était souvent retirée des coulisses et placée dans le hall principal afin de libérer de la place pour les artistes en représentation, ce qui confirme que l'échelle était toujours rangée dans les coulisses pour des raisons de sécurité, de sorte que Mme F...ne peut en déduire que l'échelle était laissée à l'abandon ou affectée d'un quelconque vice ; - en réalité, diverses hypothèses peuvent être envisagées et, tout particulièrement, une mauvaise manipulation de l'échelle par l'agent, voire un manque de prudence ou d'attention de sa part, ce fait de la victime devant être pris en considération afin de limiter ou exclure la responsabilité de la commune ; - s'agissant du lien de causalité entre l'accident de service et les préjudices dont l'intéressée fait état, le rapport de l'expert souligne, d'une part, que ce n'est qu'à la suite de l'intervention chirurgicale du 17 février 2010 que des complications sont apparues, consistant en une algodystrophie ainsi que des phénomènes douloureux neuropathiques et, d'autre part, que le problème à la marche rencontré par l'intéressée a été majoré depuis un accident survenu chez son dentiste, à l'origine d'une entorse interne remontant à la fin du mois de novembre 2012 ; - or, conformément à la théorie de la causalité adéquate, seules les conséquences normales et directes de l'acte fautif de la commune, au demeurant non établi, peuvent être mises à sa charge ; - à titre subsidiaire, si la cour devait entraîner en voie de condamnation, les prétentions indemnitaires de l'intéressée devront être réduites ; - en effet, à la suite de l'accident, l'intéressée a continué de percevoir la prime de fin d'année, versée en deux fois (juin/novembre) ainsi que l'indemnité d'exercice de mission, jusqu'à son départ à la retraite depuis le 1er septembre 2016, de sorte que le tribunal ne pouvait prononcer aucune condamnation à ce titre, et ce jusqu'en 2022, date prévisible de son départ à la retraite ; - il convient de préciser sur ce point que, contrairement à ce que fait valoir l'agent, le montant de la prime de fin d'année n'est pas de 720 euros mais de 432,36 euros, ainsi que cela ressort de ses bulletins de salaire, soit une somme totale de 2 594,16 euros sur une période de six ans ; - de même, le montant dû au titre de l'indemnité d'exercice des missions ne saurait excéder 8 872,24 euros, à calculer sur la base d'une moyenne mensuelle de 116,74 euros ; - en l'absence de faute de la collectivité, les seuls postes de préjudice indemnisables sont ceux relatifs aux souffrances physiques et morales, au préjudice esthétique et au préjudice d'agrément, qui ont été chiffrés par l'expert et pour lesquels la commune entend s'en remettre à la sagesse de la cour en ce qui concerne leur évaluation ; - il convient de relever toutefois qu'en l'absence de preuve de l'existence d'un préjudice d'agrément et d'un préjudice sexuel, Mme F...a seulement droit à la réparation des souffrances endurées et du préjudice esthétique, qui devra donner lieu à un partage de responsabilité dès lors que l'intéressée, employée depuis 2001 en qualité d'agent d'entretien, ne pouvait ignorer la présence de l'échelle à son emplacement habituel et a donc concouru à la réalisation de l'accident et de son propre dommage ; - les nouvelles demandes présentées par l'intéressée, tendant au paiement des sommes de 87 697,16 euros et 33 672 euros au titre de la perte de gains professionnels futurs, sont irrecevables dès lors que, conformément à la règle suivant laquelle il n'est dévolu qu'autant qu'il a été jugé en premier ressort, le chiffrage de l'indemnité ne peut pas être majoré en appel ; - à cet égard, l'arrêt du Conseil d'Etat n° 278905, du 31 mai 2007, Herbeth, dont Mme F... se prévaut, rappelle qu'une des conditions de recevabilité d'une demande d'indemnisation de nouveaux chefs de préjudice réside dans le fait que les prétentions de la victime demeurent...,15 euros tous préjudices confondus, demande désormais en plus la somme de 131 369,16 euros au titre de la perte de gains professionnels ; - d'ailleurs, une telle demande indemnitaire est d'autant plus irrecevable que l'intéressée ayant été mise à la retraite à compter du 1er septembre 2016, elle pouvait en faire état devant les premiers juges, sachant qu'elle n'avait jamais procédé auparavant au chiffrage d'un tel poste de préjudice ; - la demande de remboursement de frais de taxi, à hauteur de 241 euros, devra être rejetée, dès lors qu'outre le fait que rien n'établit que l'intéressée en ait obtenu le remboursement par sa mutuelle, le transport en taxi ne s'avérait peut être pas nécessaire, étant donné qu'elle aurait pu se faire conduire à cette expertise par un proche. Par un mémoire en défense et un mémoire complémentaire enregistrés les 1er mars et 10 avril 2017, MmeF..., représentée par MeB..., conclut à la réformation du jugement attaqué en tant qu'il a rejeté le surplus de sa demande et à ce que la commune de Tarascon-sur-Ariège soit condamnée à lui verser une somme totale de 218 396,51 euros ainsi que la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle fait valoir que : - ainsi que l'a relevé le tribunal, la responsabilité pour faute de la commune doit être reconnue dans la survenance de l'accident, dès lors qu'elle avait alerté la mairie depuis 2004 sur le manque d'entretien et de sécurité des locaux dans lesquels elle travaillait et qu'en l'espèce, l'échelle qui a chuté sur elle alors qu'elle exerçait ses missions, provoquant un traumatisme de sa rotule droite, avait été laissée à l'abandon dans le hall d'entrée des locaux en dépit de sa dangerosité ; - contrairement à ce que persiste à soutenir la commune, son problème de marche n'a pas été majoré depuis un accident chez le dentiste mais résulte uniquement de l'accident du travail dont elle a été victime ; - s'agissant du préjudice, elle endure des souffrances importantes et chroniques depuis 2009, tant sur un plan physique que psychologique, décrites dans les différents rapports d'expertise, se déplace difficilement et fréquemment avec des cannes anglaises, et ne peut plus conduire, jardiner et se déplacer, ni s'occuper de ses petits-enfants ou rester assise plus de vingt minutes ; - dès lors, elle est en droit de demander une juste indemnisation de son préjudice corporel et, notamment, les frais de santé restés à sa charge à ce jour (360,50 euros), la perte de la prime de fin d'année (5 040 euros) et de l'indemnité d'exercice des missions (9 477,20 euros) qu'elle aurait dû percevoir jusqu'à son départ à la retraite prévu en 2022, les dépenses liées à la perte d'autonomie (15 000 euros), qui doit se faire au regard de la justification des besoins et non au regard de la justification de la dépense, les frais constitués par les honoraires de son médecin-conseil qu'elle a dû consulter à trois reprises (4 743,20 euros) ainsi que les frais de transport en taxi pour l'expertise médicale judiciaire du 18 juin 2014 (241 euros) ; - contrairement à ce qu'a estimé le tribunal, elle a droit au paiement de la somme de 10 908,65 euros au titre des frais de logement adapté, dès lors qu'elle ne peut plus dormir avec son époux du fait de ses insomnies récurrentes résultant des douleurs chroniques, ce qui les a conduit à transformer le garage en chambre à coucher ; - au titre du pretium doloris, son préjudice peut être estimé à 10 000 euros dans la mesure où l'expert judiciaire a évalué ses souffrances à 4 sur une échelle de 1 à 7, au regard de ses douleurs profondes et du fait qu'elle marche avec une boiterie importante ; - elle sollicite également la somme de 3 000 euros au titre du préjudice esthétique temporaire, la somme de 3 000 euros au titre du préjudice esthétique permanent, évalué à 2/7 et la somme de 15 000 euros au titre du préjudice d'agrément, dès lors qu'elle ne peut plus pratiquer certaines activités comme le vélo, la randonnée, l'aquagym et l'ULM ; - au titre du préjudice sexuel et dans la mesure où elle ne peut plus dormir avec son mari, elle a droit à la somme de 5 000 euros ; - son préjudice moral peut être évalué à la somme de 20 000 euros, ayant développé un état dépressif important confirmé par l'expert ; - au titre de la perte de gains professionnels futurs, elle sollicite désormais la somme totale de 121 369,16 euros correspondant, d'une part, aux revenus qu'elle n'a pu percevoir du fait de sa mise à la retraite pour invalidité sachant qu'elle ne perçoit plus qu'une pension brute de 344 euros (87 697,16 euros) et, d'autre part, la différence entre le montant de la retraite qu'elle aurait dû percevoir jusqu'à son décès, si elle avait pu prendre sa retraite à 62 ans et le montant de la retraite qu'elle perçoit actuellement (33 672 euros). Par un mémoire enregistré le 6 juin 2017, la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de l'Ariège, dûment mise en cause, a informé la cour de ce qu'elle n'avait pas de créance à faire valoir. Par ordonnance du 1er juin 2018, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 18 juin 2018. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée ; - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Axel Basset, - les conclusions de Mme Béatrice Molina-Andréo, rapporteur public ; - et les observations de MeB..., représentant Mme D...-E.... Considérant ce qui suit : 1. Le 23 juin 2009, Mme A...F...épouse D...E..., fonctionnaire titulaire du grade d'adjoint technique principal de 2ème classe employée depuis 2000 par la commune de Tarascon-sur-Ariège en qualité d'agent d'entretien, a été victime d'un accident alors qu'elle effectuait le ménage dans les locaux du centre multimédia de la commune, à l'origine d'un traumatisme important de son genou droit, compliqué par la suite par une algodystrophie et des douleurs neuropathiques. Placée en arrêt de travail de manière continue depuis cette date, l'intéressée a fait l'objet d'un suivi psychologique et psychiatrique à compter d'octobre 2012 puis a été déclarée inapte de manière totale et définitive à son poste ainsi qu'à toutes fonctions par la commission de réforme, réunie le 6 juin 2013. Après avoir adressé à la commune de Tarascon-sur-Ariège une réclamation du 12 décembre 2013 tendant à la réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait de la survenance de cet accident, qui a été implicitement rejetée, Mme F...a saisi le tribunal administratif de Toulouse aux fins d'obtenir la condamnation de la collectivité territoriale à lui verser une somme chiffrée à 93 069,15 euros dans le dernier état de ses écritures. Saisi concomitamment par l'intéressée, le juge des référés de ce tribunal a ordonné, le 6 février 2014, une expertise médicale, au terme de laquelle l'expert a rendu son rapport le 18 juillet 2014. La commune de Tarascon-sur-Ariège relève appel du jugement du 25 octobre 2016 par lequel le tribunal administratif de Toulouse l'a condamnée à verser à Mme F... la somme de 60 623,70 euros. MmeF..., placée à la retraite pour invalidité depuis le 1er septembre 2016 par arrêté du 10 août précédent, demande, par la voie de l'appel incident, la réformation de ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus de sa demande. Sur la fin de non-recevoir opposée par la commune de Tarascon-sur-Ariège : 2. La personne qui a demandé en première instance la réparation des conséquences dommageables d'un fait qu'elle impute à une administration est recevable à détailler ces conséquences devant le juge d'appel, en invoquant le cas échéant des chefs de préjudice dont elle n'avait pas fait état devant les premiers juges, dès lors que ces chefs de préjudice se rattachent au même fait générateur. Cette personne n'est toutefois recevable à majorer ses prétentions en appel que si le dommage s'est aggravé ou s'est révélé dans toute son ampleur postérieurement au jugement qu'elle attaque. Il suit de là qu'il appartient au juge d'appel d'évaluer, à la date à laquelle il se prononce, les préjudices invoqués, qu'ils l'aient été dès la première instance ou le soient pour la première fois en appel, et de les réparer dans la limite du montant total demandé devant les premiers juges, sauf à ce que le dommage se soit aggravé ou révélé dans toute son ampleur postérieurement au jugement attaqué. 3. Il ressort de l'examen du dossier de première instance que le montant total de l'indemnisation sollicitée devant le tribunal administratif de Toulouse par Mme F...s'élevait à 93 069,15 euros et que l'intéressée n'a pas invoqué le chef de préjudice correspondant à la perte de gains professionnels futurs liée à sa mise à la retraite pour invalidité consécutive à son accident de service. Si ce nouveau chef de préjudice, que Mme F... chiffre en appel à la somme de 121 369,16 euros, se rapporte au même fait générateur que ses autres réclamations indemnitaires, les conclusions de l'intéressée, présentées pour la première fois en appel et tendant à l'indemnisation de celui-ci, ont pour effet, dès lors que l'intimée n'a pas réduit devant la cour le montant de ses autres demandes, de porter à 218 396,51 euros le montant de l'indemnisation totale sollicitée, excédant le quantum total indiqué en première instance. En outre, Mme F... ayant été mise à la retraite pour invalidité à compter du 1er septembre 2016, soit avant l'audience publique fixée par le tribunal le 4 octobre 2016, il lui était loisible de faire état devant les premiers juges de ce chef de préjudice, lequel ne peut, dès lors, être regardé comme étant apparu postérieurement au jugement contesté. Il s'ensuit qu'ainsi que le fait valoir à juste titre la commune de Tarascon-sur-Ariège, les conclusions de Mme F..., présentées pour la première fois en appel, et tendant au paiement de la somme de 121 369,16 euros, ne sont pas recevables et doivent être rejetées. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : En ce qui concerne l'étendue du droit à réparation de MmeF... : 4. Les dispositions précitées des articles L. 27 et L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite qui instituent, en faveur des fonctionnaires victimes d'accidents de service ou de maladies professionnelles, une rente viagère d'invalidité en cas de mise à la retraite et une allocation temporaire d'invalidité en cas de maintien en activité doivent être regardées comme ayant pour objet de réparer les pertes de revenus et l'incidence professionnelle résultant de l'incapacité physique causée par un accident de service ou une maladie professionnelle. Les dispositions instituant ces prestations, si elles déterminent forfaitairement la réparation à laquelle les fonctionnaires concernés peuvent prétendre, au titre de ces chefs de préjudice, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions, ne font en revanche obstacle ni à ce que le fonctionnaire qui subit, du fait de l'invalidité ou de la maladie, des préjudices patrimoniaux d'une autre nature, tels que les dépenses de santé restées à sa charge ou les frais divers liés à l'invalidité, ou des préjudices personnels, et notamment des souffrances physiques ou morales ainsi que des préjudices esthétiques ou d'agrément, obtienne de la personne publique qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice ni à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre la collectivité, dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager sa responsabilité. Compte tenu des conditions posées à son octroi et de son mode de calcul, la rente viagère d'invalidité et l'allocation temporaire d'invalidité doivent être regardées comme ayant pour objet de réparer les pertes de revenus et l'incidence professionnelle résultant de l'incapacité physique causée par un accident de service ou une maladie professionnelle. 5. En premier lieu, pour solliciter la réparation intégrale du préjudice qu'elle estime avoir subi consécutivement à son accident du 23 juin 2009, Mme F...s'est prévalue devant les premiers juges de ce qu'elle avait été heurtée ce jour-là au genou droit par une échelle entreposée dans le hall d'accueil du centre multimédia de la commune de Tarascon-sur-Ariège. Toutefois, l'intéressée, qui a d'ailleurs indiqué de manière contradictoire, da ns un premier temps, que l'échelle en cause était tombée sur elle puis, dans un second temps, que ladite échelle se trouvait posée à même le sol, ne fournit, par ses seules allégations, pas d'élément factuel suffisamment probant de nature à établir les circonstances précises dans lesquelles l'accident dont elle a été victime est intervenu. A cet égard, ni la fiche individuelle de notation de Mme F... établie au titre de l'année 2004, d'ailleurs antérieure de quatre ans et demi aux faits litigieux et dans laquelle l'intéressée avait seulement déploré que le bâtiment de la régie culturelle ne soit pas assez sécurisé à défaut de mise en place d'une alarme et de la fermeture systématique de la porte, ni le formulaire de rapport hiérarchique d'accident de service de la CNRACL établi par l'intéressée et le maire le 6 juillet 2009, qui mentionne seulement " la chute d'une échelle sur le genou droit de l'agent ", ni l'attestation établie le 30 avril 2014 par un ancien agent technique du centre culturel, qui se borne à relever que l'échelle en cause, habituellement entreposée derrière les tentures des coulisses en vue d'éviter toute gêne et tout accident aux artistes en représentation, est souvent retirée des coulisses et placée dans le hall principal, ne suffisent pas à établir que l'accident du 23 juin 2009 serait imputable à une carence de la collectivité territoriale à assurer la protection de ses agents et, partant, se rattacherait à un comportement fautif de nature à engager sa responsabilité. Dans ces conditions, Mme F...est seulement fondée, en l'absence de faute de la commune appelante, à demander la réparation de ses préjudices personnels et des préjudices patrimoniaux d'une autre nature que ceux couverts par une rente viagère ou une allocation temporaire d'invalidité. Dès lors, c'est à tort que le tribunal a condamné la commune à verser à son agent la somme de 19 440 euros à titre de remboursement de la prime de fin d'année et de l'indemnité d'exercice des missions, lesquelles, au demeurant, avaient été intégralement versées chaque mois à Mme F...par la commune jusqu'à son départ à la retraite, le 1er septembre 2016. 6. En second lieu, il ne résulte pas de l'instruction qu'ainsi que la soutient la commune de Tarascon-sur-Ariège, Mme F...aurait elle-même adopté le jour des faits litigieux un comportement imprudent de nature à exonérer la collectivité territoriale, fût-ce de manière partielle, de sa responsabilité. En ce qui concerne l'évaluation des préjudices de Mme F...: S'agissant des préjudices patrimoniaux d'une autre nature : 7. En premier lieu, Mme F...a sollicité devant le tribunal administratif, au titre des frais liés aux dépenses de santé restées à sa charge et à son invalidité, d'une part, la somme de 15 000 euros, incluant, selon ses propres indications chiffrées fournies dans ses écritures de première instance, les honoraires de son médecin conseil (4 743,20 euros) et, d'autre part, la somme de 360,50 euros. La commune appelante ne conteste ni l'existence ni le quantum de ces deux chefs de préjudice. Dès lors, il y a lieu de mettre à sa charge la somme totale de 15 360,50 euros. 8. En second lieu, en revanche, si Mme F...demande la condamnation de la collectivité territoriale à lui rembourser la somme de 10 908,65 au titre des frais d'aménagement de son garage et, pour la première fois en appel, la somme de 241 euros au titre des frais de déplacement en taxi, elle ne démontre pas que son accident du 23 juin 2009 aurait rendu nécessaires de telles dépenses. Dès lors, ces réclamations indemnitaires doivent être rejetées. S'agissant des préjudices personnels : 9. En premier lieu, il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse, que Mme F...souffre, depuis son accident de service du 23 juin 2009, d'une boiterie importante la conduisant à se déplacer souvent à l'aide de cannes et que ses séquelles physiques, qui lui occasionnent des douleurs, notamment à la marche, ont conduit à l'apparition d'un état dépressif majeur venant interférer avec la focalisation des souffrances décrites sur l'articulation de son genou droit, en considération desquelles l'expert a chiffré à 4 sur une échelle de 1 à 7 le préjudice lié aux souffrances endurées. En outre, ce même rapport relève que l'intéressée a subi un préjudice esthétique temporaire et permanent évalué par l'expert à 2 sur une échelle de 1 à 7. En reproduisant, dans sa quasi-totalité, ses écritures de première instance, Mme F...n'établit ni même n'allègue qu'en lui allouant les sommes de 6 000 euros et 2 000 euros à ce titre, les premiers juges auraient fait une appréciation insuffisante de ces deux chefs de préjudice. 10. En deuxième lieu, le préjudice d'agrément vise à indemniser l'impossibilité pour la victime de pratiquer régulièrement une activité spécifique sportive ou de loisirs. Il résulte sur ce point de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert désigné par le président du tribunal administratif, ainsi que plusieurs attestations de proches, que Mme F...ne peut plus, depuis son accident du 23 juin 2009, pratiquer diverses activités comme le vélo, les randonnées ainsi que l'ULM. Dès lors, et contrairement à ce que soutient la commune appelante, l'existence de ce chef de préjudice est suffisamment établie. Compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de ce que Mme F...a subi par ailleurs des complications médicales consécutivement à une intervention chirurgicale le 17 février 2010 (arthroscopie) et un accident chez son dentiste en novembre 2012, il sera fait une juste appréciation du préjudice d'agrément de l'intéressée résultant de son accident du 23 juin 2009 en lui accordant une indemnité de 2 000 euros, que la commune de Tarascon-sur-Ariège devra être condamnée à lui verser. 11. En troisième lieu, en se bornant à faire état de ce qu'elle ne peut plus dormir avec son mari la nuit en raison des douleurs dont elle souffre, Mme F...n'établit pas avoir subi, consécutivement à son accident de service du 23 juin 2009, un préjudice sexuel, que l'expert désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse ne mentionne d'ailleurs pas dans son rapport définitif du 18 juillet 2014. Dès lors, et contrairement à ce qu'ont relevé les premiers juges, elle n'est pas fondée à obtenir une quelconque indemnité à ce titre. 12. En quatrième et dernier lieu, il résulte de ce qui a déjà été au point 9 que, pour fixer à 4 sur une échelle de 1 à 7 le préjudice lié aux souffrances endurées par Mme F..., l'expert désigné par le président du tribunal administratif a tenu compte de ce qu'elle souffrait d'un état dépressif majeur venant interférer avec la focalisation des souffrances physiques. En se bornant à faire état, en des termes non circonstanciés, de l'existence de cet état dépressif, l'intimée n'établit pas avoir subi un préjudice moral distinct des souffrances psychiatriques précédemment réparées. 13. Il résulte de tout ce qui précède que l'ensemble des préjudices subis par Mme F... consécutivement à son accident de service du 23 juin 2009 doivent seulement être évalués à la somme totale de 25 365,50 euros (soit 2 000 euros + 6 000 euros + 2 000 euros + 15 000 euros + 360,50 euros). Dès lors, la commune de Tarascon-sur-Ariège est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse l'a condamnée à verser à Mme F...la somme globale de 60 623,70 euros et à demander la réformation du jugement dans cette mesure. Par voie de conséquence, les conclusions d'appel incident de Mme F...ne peuvent être accueillies. Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Tarascon-sur-Ariège, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, une quelconque somme à verser à Mme F... au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme F...la somme que la commune appelante demande sur le fondement de ces mêmes dispositions. DECIDE : Article 1er : La somme de 60 623,70 euros que la commune de Tarascon-sur-Ariège a été condamnée à verser à Mme F...en réparation des préjudices résultant de son accident de service du 23 juin 2009 est réduite à 25 365,50 euros. Article 2 : Le jugement n° 1305685 du 25 octobre 2016 du tribunal administratif de Toulouse est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt. Article 3 : Les conclusions d'appel de Mme F...sont rejetées. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Tarascon-sur-Ariège et Mme A...F...épouse D...E.... Copie en sera transmise au préfet de l'Ariège. Délibéré après l'audience du 19 novembre 2018 à laquelle siégeaient : M. Pierre Larroumec, président, M. Pierre Bentolila, président assesseur, M. Axel Basset, premier conseiller. Lu en audience publique, le 12 décembre 2018. Le rapporteur, Axel BassetLe président, Pierre LarroumecLe greffier, Cindy Virin La République mande et ordonne au préfet de l'Ariège et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition certifiée conforme. Le greffier, Cindy Virin 4 N° 16BX03817
Cours administrative d'appel
Bordeaux
CAA de MARSEILLE, 8ème chambre - formation à 3, 20/11/2018, 17MA02779, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédures contentieuses antérieures : M. C...E...a demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner solidairement l'Etat et la région Provence-Alpes-Côte d'Azur à lui verser la somme de 411 438 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait de la maladie professionnelle dont il est atteint. Par un jugement nos 1405635, 1409312 du 28 avril 2017, le tribunal administratif de Marseille a condamné l'Etat à lui verser la somme de 89 000 euros au titre de ses préjudices personnels et des préjudices patrimoniaux non réparés forfaitairement. Procédure devant la Cour : Par une requête, enregistrée le 30 juin 2017, M.E..., représenté par MeB..., demande à la Cour : 1°) de réformer le jugement du 28 avril 2017 en tant qu'il n'a pas fait droit à ses demandes fondées sur la responsabilité pour faute de l'Etat et de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur ; 2°) de condamner solidairement l'Etat et la région Provence-Alpes-Côte d'Azur à lui verser la somme de 411 438 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait de la maladie professionnelle dont il est atteint ; 3°) de mettre solidairement à la charge de l'Etat et de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur les dépens ainsi que la somme de 10 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - son employeur a méconnu son obligation de sécurité dès lors qu'il n'a mis en oeuvre aucune mesure de prévention en vue d'éviter les risques de contamination à la silice et que les risques liés à la vétusté et à la non-conformité des installations dans les ateliers de prothèse dentaire étaient connus ; - la région a également commis une faute en s'abstenant, alors qu'elle était informée des risques liés à la vétusté et à la non-conformité des installations, d'entretenir et de mettre en conformité les locaux, ainsi que cela lui incombait en application des articles L. 214-6 et suivants du code de l'éducation ; les laboratoires de prothèses dentaires sont soumis à des règles de fabrication et des conditions d'hygiène et de sécurité depuis la directive européenne 93-42 applicable au 14 juin 1998 ; ils sont également soumis aux règles d'hygiène et de sécurité reprises à l'article L. 231 du code du travail ; - le lien de causalité entre ses conditions de travail au lycée professionnel Léonard de Vinci et la pathologie dont il est désormais atteint est établi, son dossier médical auprès de son précédent employeur ne révélant aucune lésion ; - il est en droit d'obtenir la somme de 60 000 euros au titre des pertes de rémunération subies de 2012 à 2016, la somme de 169 230 euros au titre de son préjudice patrimonial depuis le 1er janvier 2015, la somme de 32 208 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire, la somme de 30 000 euros au titre des souffrances endurées, la somme de 2 000 euros au titre du préjudice esthétique temporaire, la somme de 80 000 euros au titre du déficit fonctionnel permanent, la somme de 30 000 euros au titre du préjudice d'agrément, la somme de 4 000 euros au titre du préjudice esthétique ainsi que la somme de 4 000 euros au titre du préjudice sexuel. Par des mémoires en défense, enregistrés le 10 août 2018 et le 29 octobre 2018, la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, représentée par MeA..., conclut : - à titre principal, au rejet de la requête ou à l'exonération totale de sa responsabilité et à ce qu'il soit mis à la charge de M. E...la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; - à titre subsidiaire, à l'exonération partielle de sa responsabilité et à ce que l'indemnité devant être allouée soit réduite à de plus justes proportions. Elle soutient que : - elle n'a commis aucune faute ; - l'Etat et la victime ont commis une faute exonératoire de responsabilité ; - l'appréciation des préjudices doit être minorée. Par un mémoire en défense, enregistré le 12 octobre 2018, le ministre de l'éducation nationale conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que les moyens soulevés par M. E...ne sont pas fondés. Par lettre du 18 octobre 2018, la Cour a informé les parties, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la décision à intervenir est susceptible d'être fondée sur un moyen soulevé d'office tiré de ce que la responsabilité sans faute de la Région Provence-Alpes-Côte d'Azur est susceptible d'être engagée pour défaut d'entretien normal du lycée professionnel Léonard de Vinci à Marseille dont elle a la charge. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de l'éducation ; - le code de la sécurité sociale ; - le code du travail ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - le décret n° 82-453 du 28 mai 1982 ; - le code de justice administrative. La présidente de la Cour a désigné M. d'Izarn de Villefort en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Tahiri, - les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public, - et les observations de MeB..., représentant M. E.... Considérant ce qui suit : 1. M.E..., né en 1952, a enseigné la profession de prothésiste dentaire à compter de 1997 au sein du lycée professionnel Léonard de Vinci à Marseille. La silicose dont il est atteint, diagnostiquée en 2011, a été reconnue comme une maladie professionnelle par décision du 4 juillet 2014. M. E...a recherché la responsabilité pour faute de l'Etat et de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur afin d'obtenir réparation de l'intégralité des préjudices subis du fait de cette maladie. Par un jugement du 28 avril 2017, le tribunal administratif de Marseille estimant qu'aucune faute n'était imputable à ces deux administrations, a condamné l'Etat, en tant qu'employeur de M.E..., à verser à ce dernier la somme de 89 000 euros au titre de ses préjudices non patrimoniaux. M. E...demande la réformation de ce jugement en tant qu'il n'a pas fait droit à ses demandes fondées sur la responsabilité pour faute ainsi que la condamnation solidaire de l'Etat et de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur à lui verser la somme de 411 438 euros en réparation des préjudices subis. Sur la responsabilité : 2. En vertu des articles L. 27 et L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite, les fonctionnaires civils de l'Etat qui se trouvent dans l'incapacité permanente de continuer leurs fonctions en raison d'infirmités résultant de blessures ou de maladies contractées ou aggravées en service peuvent être radiés des cadres par anticipation et ont droit au versement d'une rente viagère d'invalidité, cumulable avec la pension rémunérant les services. Compte tenu des conditions posées à leur octroi et de leur mode de calcul, la rente viagère d'invalidité et l'allocation temporaire d'invalidité doivent être regardées comme ayant pour objet de réparer les pertes de revenus et l'incidence professionnelle résultant de l'incapacité physique causée par un accident de service ou une maladie professionnelle. Les dispositions, rappelées précédemment, qui instituent ces prestations, déterminent forfaitairement la réparation à laquelle les fonctionnaires concernés peuvent prétendre, au titre de ces chefs de préjudice, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions. Ces dispositions ne font en revanche obstacle ni à ce que le fonctionnaire qui subit, du fait de l'invalidité ou de la maladie, des préjudices patrimoniaux d'une autre nature ou des préjudices personnels, obtienne de la personne publique qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice, ni à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre la personne publique, dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette personne ou à l'état d'un ouvrage public dont l'entretien lui incombait. En ce qui concerne la responsabilité de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur : 3. Aux termes de l'article L. 214-6 du code de l'éducation, dans sa rédaction applicable au litige : " La région a la charge des lycées, des établissements d'éducation spéciale et des lycées professionnels maritimes. Elle en assure la construction, la reconstruction, l'extension, les grosses réparations, l'équipement et le fonctionnement, à l'exception, d'une part, des dépenses pédagogiques à la charge de l'Etat dont la liste est arrêtée par décret et, d'autre part, des dépenses de personnels prévues à l'article L. 211-8 sous réserve des dispositions de l'article L. 216-1. / La région assure l'accueil, la restauration, l'hébergement ainsi que l'entretien général et technique, à l'exception des missions d'encadrement et de surveillance des élèves, dans les établissements dont elle a la charge. ". 4. Il résulte de ces dispositions que la région Provence-Alpes-Côte d'Azur avait à sa charge l'équipement et le fonctionnement du lycée professionnel Léonard de Vinci à Marseille, incluant les ateliers de prothèse dentaire au sein desquels M. E...assurait ses fonctions. Sa responsabilité est par suite susceptible d'être recherchée, en qualité de gestionnaire de l'ouvrage public que constitue le lycée Léonard de Vinci et à l'égard de M. E...qui avait la qualité d'usager de cet ouvrage, sur le terrain de la responsabilité sans faute pour défaut d'entretien de cet ouvrage. 5. Il appartient à l'usager, victime d'un dommage survenu à l'occasion de l'utilisation d'un ouvrage public, de rapporter la preuve du lien de causalité entre l'ouvrage public dont il était usager et le dommage dont il se plaint. La collectivité en charge de l'ouvrage public doit alors, pour que sa responsabilité ne soit pas retenue, établir que l'ouvrage public faisait l'objet d'un entretien normal ou que le dommage est imputable à la faute de la victime ou à un cas de force majeure. 6. Il résulte de l'instruction que M. E...a assuré depuis 1997 des enseignements en tant que prothésiste dentaire au sein du lycée professionnel Léonard de Vinci à Marseille. Il est atteint d'une silicose diagnostiquée en 2011 et reconnue comme maladie professionnelle par décision du 4 juillet 2014, cette pathologie pulmonaire étant provoquée par une exposition prolongée ou répétée aux poussières de silice cristalline lesquelles peuvent être produites lors de la fabrication des prothèses dentaires et inhalées par les personnes exposées. M. E...produit son dossier médical auprès de son précédent employeur, lequel ne comporte, de 1994 à 2000, aucune anomalie y compris sur le plan pulmonaire. Par suite, le lien de causalité entre le fonctionnement de l'ouvrage public en litige et les dommages subis par M. E...est établi. Il résulte en outre de l'instruction, notamment des contrôles réalisés par le médecin de prévention du rectorat en novembre 2012 puis par le comité d'hygiène et de sécurité en 2013 ainsi que du rapport établi par l'Area à la demande de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, que l'exposition aux poussières de silice dans les ateliers dentaires ne résulte pas seulement de dysfonctionnements des extracteurs installés au droit des machines utilisées dans ces ateliers ou du manque d'étanchéité de certaines d'entre elles mais plus généralement du fonctionnement du réseau d'extraction des polluants et de distribution de l'air lequel, dès lors qu'il est incorporé à l'ouvrage public que constitue le lycée professionnel Léonard de Vinci, présente un caractère immobilier. La région Provence-Alpes-Côte d'Azur, par les pièces qu'elle produit, n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, d'un entretien normal de l'ouvrage dont elle a la charge. Sa responsabilité est ainsi engagée. 7. Contrairement à ce qu'indique la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, M. E...n'a pas reconnu dans ses écritures s'être abstenu de porter les masques mis à sa disposition par l'Etat mais a reproché à son employeur de s'être " contenté de distribuer des masques qui constituent les plus mauvaises protection ". En l'espèce, la Région, à qui incombe la charge de la preuve de la faute de la victime qu'elle invoque, ne produit aucun élément probant de la réalité des carences dont s'agit par le requérant qui serait de nature à l'exonérer totalement ou partiellement de sa responsabilité à l'égard de M.E.... 8. Enfin, si la région Provence-Alpes-Côte d'Azur allègue que l'Etat aurait commis une faute en s'abstenant de contrôler le fonctionnement des équipements du lycée Léonard de Vinci et de l'aviser des éventuelles irrégularités constatées, cette circonstance, qui résulte du fait d'un tiers, n'est pas de nature à l'exonérer en tout ou partie de sa responsabilité à l'égard de M. E.... 9. Dans ces conditions la responsabilité de région Provence-Alpes-Côte d'Azur dans la silicose contractée par M. E...est engagée pour défaut d'entretien de l'ouvrage public que constitue le lycée Léonard de Vinci. En ce qui concerne la responsabilité pour faute imputée à l'Etat : 10. Aux termes de l'article 2 du décret du 28 mai 1982 dans sa rédaction alors en vigueur : " (...) les locaux doivent être aménagés, les équipements doivent être installés et tenus de manière à garantir la sécurité des agents (...) Les locaux doivent être tenus dans un état constant de propreté et présenter les conditions d'hygiène et de salubrité nécessaires à la santé des personnes (...) ". 11. Pour établir que l'Etat a méconnu son obligation de mettre à la disposition de ses agents des locaux présentant des conditions d'hygiène et de sécurité garantissant la santé des personnes, M. E...produit notamment le compte rendu du comité d'hygiène et de sécurité de l'établissement mentionnant le 21 février 2005 que les deux aspirations en atelier de prothèse dentaire qui ne fonctionnaient plus étaient désormais conformes aux normes de sécurité, celui du 12 juin 2006 mentionnant un problème du système d'aspiration en prothèse dentaire, celui du 21 septembre 2009 indiquant que l'air est vicié par les produits utilisés, un questionnaire renseigné par l'établissement destiné à la délégation académique Sécurité, Hygiène et Conditions de Travail du rectorat d'Aix-Marseille signalant que les utilisateurs du laboratoire de prothèse dentaire respirent des poussières ainsi qu'une attestation établie le 22 mai 2017 par MmeG..., ancienne chef établissement de 2005 à 2010, mentionnant que le problème récurrent de l'évacuation des poussières laissait à désirer et s'agissant des travaux projetés que " l'importance des besoins a généré des devis de gros montants peu compatibles avec les crédits disponibles ". M. E...se prévaut également des contrôles réalisés par le médecin de prévention du rectorat en novembre 2012 puis par le comité d'hygiène et de sécurité en 2013, à la suite de sa demande de reconnaissance de maladie professionnelle, constatant des déficiences des systèmes de ventilation et d'aération des ateliers de prothèses dentaires. Ces pièces établissent, pendant la période au cours de laquelle M. E...a exercé ses fonctions au sein du lycée professionnel Léonard de Vinci, l'insuffisance des installations d'évacuation des poussières au sein des ateliers de prothèses dentaires. L'Etat ne verse aucun élément de nature à remettre en cause les pièces produites et notamment aucune pièce démontrant que, nonobstant l'insuffisance de ces installations, les concentrations de poussières dans l'air seraient demeurées en deçà des seuils de nocivité ou que la mise à disposition de masques aurait été suffisante afin de limiter la concentration de poussières inhalées par un enseignant pendant ses journées de travail. Par suite, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, l'Etat a commis une faute de nature à engager sa responsabilité. L'Etat n'ayant pas présenté d'appel en garantie à l'encontre de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, il ne peut utilement se prévaloir de la faute éventuellement commise par cette dernière, qui a concouru avec la sienne aux dommages subis par M.E..., pour s'exonérer de sa responsabilité. 12. Il résulte de ce qui précède que la responsabilité sans faute de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur et la responsabilité pour faute de l'Etat sont engagées du fait des dommages subis par M. E...à la suite de la silicose dont il est atteint. Ces collectivités publiques ayant concouru aux mêmes dommages, M. E...est fondé à demander leur condamnation solidaire à l'indemniser des préjudices subis. Sur les préjudices : En ce qui concerne les préjudices patrimoniaux : 13. Il y a lieu d'indemniser de manière distincte la perte de revenus subie jusqu'à l'âge auquel, en l'absence de maladie professionnelle, M. E...aurait pris sa retraite ainsi que le préjudice patrimonial subi, le cas échéant, au cours de la période ultérieure, en raison notamment d'une perte éventuelle de droits à pension. L'âge auquel l'intéressé aurait pris sa retraite est, en principe, celui auquel il aurait pu prétendre à une pension à taux plein, à moins que l'instruction ne fasse ressortir qu'il l'aurait prise à un âge différent. S'agissant des pertes de rémunération : 14. M. E...réclame la somme de 60 000 euros au titre des rémunérations perdues entre 2012 et 2016 dans le cadre de son activité accessoire au sein du CFA interprofessionnel éducation nationale de Marseille. Il justifie avoir exercé cette activité depuis 1998 et avoir bénéficié, de la part de son employeur principal, chaque année d'une non opposition au cumul d'activités. Il résulte de l'instruction que M. E...a perçu, au titre de ces activités annexes, une somme annuelle d'environ 9 000 euros. Il y a lieu de lui allouer à ce titre la somme totale de 45 000 euros. S'agissant des gains futurs : 15. Si M. E...sollicite le versement d'une somme de 169 230 euros au titre d'une perte de chance de percevoir les revenus issus de son activité accessoire après 2016, ce préjudice présente un caractère purement éventuel et ne peut donc donner lieu à indemnisation. 16. En outre, il résulte de l'instruction et notamment du titre de pension civile d'invalidité produit que M. E...perçoit, depuis le 1er janvier 2015, une pension et une rente viagère d'invalidité d'un montant brut mensuel de 1 811,68 euros. Le ministre de l'éducation nationale fait valoir sans être contredit que la pension de retraite de M. E...ayant été assortie d'une surcote, il bénéficie de la pension maximale à laquelle il aurait pu prétendre s'il était resté en activité, en l'absence de maladie professionnelle. Par suite, M. E...n'est pas fondé à solliciter l'allocation d'une indemnité en réparation d'une perte de droits à pension. En ce qui concerne les préjudices patrimoniaux : S'agissant du déficit fonctionnel temporaire : 17. Il résulte de l'instruction, notamment du rapport établi le 1er septembre 2015 par le Dr F... et de la réponse aux dires du 29 mars 2016, que M. E... a présenté un déficit fonctionnel temporaire au taux de 60 % pendant 280 jours, entre le 12 décembre 2012 et le 18 décembre 2013, puis au taux de 50 % jusqu'à la date de la consolidation de son état de santé, le 1er septembre 2015, soit pendant 713 jours. Il y a lieu de confirmer la somme de 10 000 euros accordée en première instance au titre de ce chef de préjudice. S'agissant des souffrances endurées : 18. Les souffrances endurées par M. E...du fait de la silicose dont il est atteint ont été estimées par l'expert médical à 5 sur une échelle de 7. Le tribunal n'a pas fait une insuffisante appréciation de ce chef de préjudice en lui allouant la somme de 12 000 euros. S'agissant du préjudice esthétique temporaire : 19. M. E...a subi un préjudice esthétique temporaire réduit, qui a été évalué à 1 sur une échelle de 1 à 7 par l'expert. Il y a lieu de confirmer la somme de 500 euros accordée en première instance au titre de ce chef de préjudice. S'agissant du déficit fonctionnel permanent : 20. Il résulte de l'instruction, notamment du rapport établi le 1er septembre 2015 par le Dr F... et de la réponse aux dires du 29 mars 2016, que M. E...conserve, depuis la consolidation de son état de santé intervenue le 1er septembre 2015 alors qu'il était âgé de 62 ans, un déficit fonctionnel permanent de 40 %. Les premiers juges ont fait une juste appréciation de ce chef de préjudice en l'estimant à la somme de 60 000 euros. S'agissant des troubles dans les conditions d'existence : 21. M. E... justifie d'un préjudice d'agrément, étant désormais notamment dans l'impossibilité de pratiquer ainsi qu'il le faisait habituellement le bricolage, le vélo et la promenade. Le préjudice sexuel a été évalué à " léger " par l'expert. Dans ces conditions, la somme de 6 000 euros accordée par les premiers juges en raison des troubles de toute nature ainsi subis par M. E...dans ses conditions d'existence, laquelle inclut la réparation du préjudice d'agrément et du préjudice sexuel, doit également être maintenue. S'agissant du préjudice esthétique : 22. Le préjudice esthétique permanent de M. E...a été évalué par l'expert à 1 sur une échelle allant de 1 à 7. Le tribunal n'a pas fait une insuffisante appréciation de ce chef de préjudice en lui allouant la somme de 500 euros. 23. Il résulte de ce qui précède que M. E...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a limité à 89 000 euros le montant de l'indemnité que l'Etat a été condamné à lui verser et a rejeté sa demande de condamnation solidaire de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur à l'indemniser des préjudices résultant de sa maladie professionnelle. Il y a lieu de porter à 134 000 euros l'indemnité allouée à M. E...et de prononcer la condamnation solidaire de l'Etat et de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur à lui verser cette somme. Sur les frais d'expertise : 24. Les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 500 euros doivent, dans les circonstances de l'espèce, être mis à la charge définitive solidaire de l'Etat et la région Provence-Alpes-Côte d'Azur. Sur les frais liés à l'instance : 25. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de M.E..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la région Provence-Alpes-Côte d'Azur demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge solidaire de l'Etat et de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur une somme de 2 000 euros à verser à M. E...au titre des frais de cette nature. DECIDE : Article 1er : L'indemnité que l'Etat a été condamné à verser à M.E..., par le jugement du tribunal administratif de Marseille du 28 avril 2017, est portée à 134 000 euros. La région Provence-Alpes-Côte d'Azur est condamnée solidairement avec l'Etat à verser cette somme à M.E.... Article 2 : Les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 500 euros, sont mis à la charge définitive solidaire de l'Etat et de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur. Article 3 : Les articles 1 et 2 du jugement du tribunal administratif de Marseille du 28 avril 2017 sont réformés en ce qu'ils ont de contraire au présent arrêt. Article 4 : L'Etat et la région Provence-Alpes-Côte d'Azur verseront solidairement à M. E... la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. E...et les conclusions présentées par la région Provence-Alpes-Côte d'Azur sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés. Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...E..., au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse et à la région Provence-Alpes-Côte d'Azur. Copie en sera adressée au DrF..., expert. Délibéré après l'audience du 6 novembre 2018, où siégeaient : - M. d'Izarn de Villefort, président, - M. D...et Mme Tahiri, premiers conseillers. Lu en audience publique le 20 novembre 2018. 2 N° 17MA02779
Cours administrative d'appel
Marseille
CAA de DOUAI, 3e chambre - formation à 3, 06/12/2018, 17DA02218, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La commune de Châteauneuf-en-Thymerais a demandé au tribunal administratif de Rouen de condamner le syndicat mixte pour l'étude et le traitement des ordures ménagères (SETOM) de l'Eure à lui verser, d'une part, la somme de 146 817,92 euros augmentée des intérêts au taux légal, correspondant aux traitements versés à M. H...A..., son agent, du 16 mars 2007 au 8 juillet 2007, puis du 14 novembre 2008 au 31 décembre 2013, ainsi que le montant des traitements restant à verser à l'intéressé jusqu'à la date de sa mise à la retraite, son reclassement ou sa reprise d'activité, d'autre part, la somme de 8 240,41 euros augmentée des intérêts au taux légal, correspondant aux frais médicaux remboursés à M. H...A...du 16 mars 2007 au 8 juillet 2007, puis du 14 novembre 2008 au 31 décembre 2013, ainsi que le montant des frais médicaux restant à exposer pour l'intéressé, enfin, la somme de 6 000 euros augmentée des intérêts au taux légal correspondant aux autres dépenses qu'elle a exposées, et de mettre à la charge du SETOM de l'Eure la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n° 1200240 du 25 mars 2014, le tribunal administratif de Rouen a, d'une part, condamné le SETOM de l'Eure à verser à la commune de Châteauneuf-en-Thymerais la somme correspondant aux traitements versés à M. H...A...pour les périodes du 16 mars 2007 au 6 juillet 2007 et du 14 novembre 2008 au 8 août 2009, assortie des intérêts au taux légal à compter du 9 novembre 2011, et renvoyé la commune devant le SETOM de l'Eure pour qu'il soit procédé à la liquidation et au paiement des sommes qui lui sont dues, d'autre part, mis à la charge du SETOM de l'Eure la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, enfin, rejeté le surplus des conclusions de la demande de la commune de Châteauneuf-en-Thymerais. Par un arrêt n° 14DA00880 du 17 décembre 2015, la cour administrative d'appel de Douai a, en premier lieu, condamné le SETOM de l'Eure à verser à la commune de Châteauneuf-en-Thymerais les sommes correspondant aux traitements servis à M. H... A...durant la période du 8 août 2009 au 17 décembre 2015, augmentées des intérêts au taux légal, et renvoyé la commune devant le SETOM de l'Eure pour qu'il soit procédé à la liquidation et au paiement de ces sommes, en deuxième lieu, condamné le SETOM de l'Eure à verser à la commune de Châteauneuf-en-Thymerais la somme de 2 795,29 euros correspondant aux dépenses médicales exposées dans l'intérêt de M. H... A...durant la période couvrant l'année 2014 et celle s'étendant du 1er janvier au 30 octobre 2015, augmentée des intérêts au taux légal et, en troisième lieu, réformé le jugement du tribunal administratif en ce qu'il avait de contraire à son arrêt. Par une décision n° 397227 du 24 novembre 2017, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a annulé l'arrêt n°14DA00880 en tant qu'il a condamné le SETOM de l'Eure à verser à la commune de Châteauneuf-en-Thymerais les sommes correspondant aux traitements servis à M. H... A...durant la période du 8 août 2009 au 17 décembre 2015 et a renvoyé, dans cette mesure, l'affaire à la cour. Procédure devant la cour : Par de nouveaux mémoires, enregistrés les 6 février 2018 et 30 mars 2018, la commune de Châteauneuf-en-Thymerais, représentée par Me E...F..., demande, dans le dernier état de ses écritures, de condamner le SETOM de l'Eure à lui verser la somme de 189 893,39 euros correspondant aux traitements et frais médicaux versés à M. H...A...du 8 août 2009 au 1er mars 2016. -------------------------------------------------------------------------------------------------------- Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Valérie Petit, président-assesseur, - les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public, - et les observations de Me G...D..., représentant la commune de Chateauneuf-en-Thymerais et Me C...B..., représentant le SETOM de l'Eure. Considérant ce qui suit : 1. M. H...A..., adjoint technique territorial, a été victime le 13 mars 2002, alors qu'il était employé par le syndicat mixte pour l'étude et le traitement des ordures ménagères (SETOM) de l'Eure, d'un accident reconnu imputable au service. Il a ensuite été recruté le 9 octobre 2006 par la commune de Châteauneuf-en-Thymerais (Eure-et-Loir) et placé en congé de maladie du 16 mars 2007 au 8 juillet 2007, puis à compter du 14 novembre 2008. La commune de Châteauneuf-en-Thymerais, estimant que les arrêts de travail de M. H... A...étaient imputables à l'accident de service survenu le 13 mars 2002, a demandé au tribunal administratif de Rouen de condamner le SETOM de l'Eure à lui verser le montant des traitements et des frais médicaux versés ou à verser à M. H... A..., d'une part entre le 16 mars 2007 et le 8 juillet 2007, d'autre part, à compter du 14 novembre 2008 jusqu'à la date de sa mise à la retraite, son reclassement ou sa reprise d'activité, ainsi que le montant des autres dépenses qu'elle a exposées à la suite des procédures contentieuses engagées. Par un jugement du 25 mars 2014, le tribunal administratif de Rouen a condamné le SETOM de l'Eure à verser à la commune de Chateauneuf-en-Thymerais la somme correspondant aux traitements versés à M. H... A...pour les périodes du 16 mars au 6 juillet 2007 et du 14 novembre 2008 au 8 août 2009 et a rejeté le surplus de la demande de la commune. Par un arrêt du 17 décembre 2015, la cour administrative d'appel de Douai a, en premier lieu, condamné le SETOM de l'Eure à verser à la commune de Châteauneuf-en-Thymerais les sommes correspondant aux traitements servis à M. H... A...durant la période du 8 août 2009 au 17 décembre 2015, augmentées des intérêts au taux légal, et renvoyé la commune devant le SETOM de l'Eure pour qu'il soit procédé à la liquidation et au paiement de ces sommes, en deuxième lieu, condamné le SETOM de l'Eure à verser à la commune de Châteauneuf-en-Thymerais la somme de 2 795,29 euros correspondant aux dépenses médicales exposées dans l'intérêt de M. H... A...durant la période couvrant l'année 2014 et celle s'étendant du 1er janvier au 30 octobre 2015, augmentée des intérêts au taux légal et, en troisième lieu, réformé le jugement du tribunal administratif en ce qu'il avait de contraire à son arrêt. Par une décision n° 397227 du 24 mars 2017, le Conseil d'Etat a annulé cet arrêt en tant qu'il a condamné le SETOM de l'Eure à verser à la commune de Châteauneuf-en-Thymerais les sommes correspondant aux traitements servis à M. H... A...durant la période du 8 août 2009 au 17 décembre 2015 et a renvoyé, dans cette mesure, l'affaire à la cour. Sur la prise en charge des traitements versés à M. H...A... : 2. D'une part, aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " Le fonctionnaire en activité a droit : / (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants (...) / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident. (...) La collectivité est subrogée dans les droits éventuels du fonctionnaire victime d'un accident provoqué par un tiers jusqu'à concurrence du montant des charges qu'elle a supportées ou supporte du fait de cet accident. Elle est admise à poursuivre directement contre le responsable du dommage ou son assureur le remboursement des charges patronales afférentes aux rémunérations maintenues ou versées audit fonctionnaire pendant la période d'indisponibilité de celui-ci (...) ". 3. D'autre part, aux termes de l'article 81 de la même loi : " Les fonctionnaires territoriaux reconnus, par suite d'altération de leur état physique, inaptes à l'exercice de leurs fonctions peuvent être reclassés dans les emplois d'un autre cadre d'emploi ou corps s'ils ont été déclarés en mesure de remplir les fonctions correspondantes. / Le reclassement est subordonné à la présentation d'une demande par l'intéressé ". Aux termes de l'article 30 du décret du 26 décembre 2003 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la caisse nationale de retraites des agents des collectivités territoriales : " Le fonctionnaire qui se trouve dans l'impossibilité définitive et absolue de continuer ses fonctions par suite de maladie, blessure ou infirmité grave dûment établie peut être admis à la retraite soit d'office, soit sur demande. / Lorsque l'admission à la retraite pour invalidité intervient après que les conditions d'ouverture du droit à une pension de droit commun sont remplies par ailleurs, la liquidation des droits s'effectue selon la réglementation la plus favorable pour le fonctionnaire. / La mise en retraite d'office pour inaptitude définitive à l'exercice de l'emploi ne peut être prononcée qu'à l'expiration des congés de maladie, des congés de longue maladie et des congés de longue durée dont le fonctionnaire bénéficie en vertu des dispositions statutaires qui lui sont applicables, sauf dans les cas prévus à l'article 39 si l'inaptitude résulte d'une maladie ou d'une infirmité que son caractère définitif et stabilisé ne rend pas susceptible de traitement. En aucun cas, elle ne pourra avoir une date d'effet postérieure à la limite d'âge du fonctionnaire sous réserve de l'application des articles 1er-1 à 1er-3 de la loi du 13 septembre 1984 susvisée ". Aux termes de l'article 36 du même décret : " Le fonctionnaire qui a été mis dans l'impossibilité permanente de continuer ses fonctions en raison d'infirmités résultant de blessures ou de maladies contractées ou aggravées, soit en service, soit en accomplissant un acte de dévouement dans un intérêt public, soit en exposant ses jours pour sauver la vie d'une ou plusieurs personnes, peut être mis à la retraite par anticipation soit sur sa demande, soit d'office, à l'expiration des délais prévus au troisième alinéa de l'article 30 et a droit à la pension rémunérant les services prévue au 2° de l'article 7 et au 2° du I de l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite (...) ". 4. En application de ces dispositions, la collectivité au service de laquelle se trouvait l'agent lors de l'accident de service doit supporter les conséquences financières de la rechute consécutive à cet accident, alors même que cette rechute est survenue alors qu'il était au service d'une nouvelle collectivité. La collectivité qui employait l'agent à la date de l'accident doit ainsi prendre en charge non seulement les honoraires médicaux et les frais exposés par celui-ci qui sont directement entraînés par la rechute mais aussi le remboursement des traitements qui lui ont été versés par la collectivité qui l'emploie à raison de son placement en congé de maladie ordinaire, de congé de longue maladie ou de congé de longue durée, dès lors que ce placement a pour seule cause la survenue de la rechute consécutive à l'accident de service. Si la collectivité qui l'emploie est tenue de verser à son agent les traitements qui lui sont dus, elle est cependant fondée à demander à la collectivité qui l'employait à la date de l'accident, par une action récursoire, le remboursement de ceux de ces traitements qui sont liés à la rechute ainsi que des éventuels honoraires médicaux et frais qu'elle aurait pris en charge du fait de cette rechute. Cette action récursoire ne peut être exercée, s'agissant des traitements, qu'au titre de la période qui est raisonnablement nécessaire pour permettre la reprise par l'agent de son service ou, si cette reprise n'est pas possible, son reclassement dans un emploi d'un autre corps ou cadre d'emplois ou encore, si l'agent ne demande pas son reclassement ou si celui-ci n'est pas possible, pour que la collectivité qui l'emploie prononce sa mise d'office à la retraite par anticipation. 5. Il résulte également des dispositions combinées citées aux points 2 et 3, que le fonctionnaire dont les blessures ou la maladie proviennent d'un accident de service, d'une maladie contractée ou aggravée en service ou de l'une des autres causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, et qui se trouve dans l'incapacité permanente de continuer ses fonctions au terme d'un délai de douze mois à compter de sa mise en congé de maladie, sans pouvoir bénéficier d'un congé de longue maladie ou d'un congé de longue durée, doit bénéficier de l'adaptation de son poste de travail ou, si celle-ci n'est pas possible, être mis en mesure de demander son reclassement dans un emploi d'un autre corps ou cadre d'emplois, s'il a été déclaré en mesure d'occuper les fonctions correspondantes. S'il ne demande pas son reclassement ou si celui-ci n'est pas possible, il peut être mis d'office à la retraite par anticipation. L'administration a l'obligation de maintenir l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre le service ou jusqu'à sa mise à la retraite. 6. En premier lieu, il résulte de l'instruction que M. H...A...a été placé sans discontinuité en congé de maladie pour accident de service à compter du 14 novembre 2008 au 1er mars 2016, date de sa mise à la retraite pour invalidité, son inaptitude définitive ayant été constatée. En novembre 2009, à l'issue des douze mois consécutifs de congés maladie dont M. H... A...a bénéficié en application du 2° de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984, et jusqu'au début de l'année 2015, la commune n'a engagé aucune procédure et n'a sollicité l'avis d'aucune instance consultative, ni d'un médecin expert quant à la situation administrative et médicale de son agent. En sa qualité d'employeur, il lui appartenait de placer l'intéressé dans une position statutaire régulière. Elle ne peut dès lors utilement se prévaloir du contentieux l'opposant au SETOM de l'Eure pour justifier n'avoir procédé à l'engagement de la procédure de mise à la retraite de M. H...A...qu'à compter du 27 janvier 2015, date à laquelle elle a demandé à l'intéressé de prendre rendez-vous avec un médecin agréé. 7. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction que dans son avis du 30 juin 2009, la commission départementale de réforme avait indiqué, outre le taux d'IPP de M. H...A..., que l'intéressé était inapte à la fonction de chauffeur de véhicule. Cinq mois plus tard, par un avis du 2 novembre 2009, dont les conclusions sont reprises dans le rapport du médecin agréé ayant examiné M. H...A...le 27 février 2015 et dont la teneur ainsi rapportée n'est pas contestée par les parties, le médecin de prévention a émis un avis très favorable à la mise à la retraite pour invalidité en indiquant qu'aucun reclassement dans un autre emploi n'était envisageable. Eu égard à la teneur de ces deux avis, il appartenait à la commune de Chateauneuf-en-Thymerais de faire examiner M. H...A...par un médecin agrée puis de saisir le comité médical pour avis pour établir l'aptitude de M. A...à exercer ses fonctions et d'examiner s'il pouvait, le cas échéant, bénéficier de l'adaptation de son poste de travail ou, si celle-ci n'était pas possible, être mis en mesure de demander son reclassement dans un emploi d'un autre corps ou cadre d'emplois, s'il était déclaré en mesure d'occuper les fonctions correspondantes. Cette recherche devait pouvoir, en l'espèce, être raisonnablement menée au plus tard au 31 décembre 2010. Dans l'hypothèse où M. H...A...n'aurait pas demandé son reclassement ou si celui-ci n'est pas possible, l'administration aurait pu mettre l'intéressé d'office à la retraite par anticipation. Une telle procédure, qui en l'espèce est finalement intervenue au cours de l'année 2015, pouvait raisonnablement être menée au plus tard en décembre 2011. 8. Il suit de là que la commune de Châteauneuf-en-Thymerais est fondée à demander que les traitements qu'elle justifie avoir versés à M. H...A...durant la période d'arrêt de travail du 8 août 2009 au 31 décembre 2011 soient mis à la charge du SETOM de l'Eure. La commune de Châteauneuf-en-Thymerais a droit, à compter du 9 novembre 2011, date de réception de sa réclamation préalable, aux intérêts sur les traitements servis à son agent avant cette date et, pour la période postérieure à cette date, à ceux qui courent à compter de la date d'échéance de chaque paiement mensuel. 9. Il résulte de ce qui précède que la commune de Châteauneuf-en-Thymerais est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 25 mars 2014, le tribunal administratif de Rouen a rejeté les conclusions de sa demande tendant à ce que les traitements versés à M. H...A...durant la période du 8 août 2009 au 31 décembre 2011 soient mis à la charge du SETOM de l'Eure. Sur les conclusions à fin d'injonction, sous astreinte : 10. Si le SETOM de l'Eure soutient qu'il y a lieu d'enjoindre, sous astreinte, à la commune de Châteauneuf-en-Thymerais de lui rembourser le trop-perçu des sommes déjà versées en application de l'arrêt du 17 décembre 2015, compte tenu de l'arrêt à intervenir, de telles conclusions qui sont relatives à l'exécution du présent arrêt ne peuvent qu'être rejetées en l'absence de litige né et actuel. Sur les frais liés à l'instance : 11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de la commune de Châteauneuf-en-Thymerais, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, au titre des frais exposés par le SETOM de l'Eure et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, en application des mêmes dispositions et dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de ce dernier une somme au titre des frais exposés par la commune de Châteauneuf-en-Thymerais et non compris dans les dépens. DÉCIDE : Article 1er : Le SETOM de l'Eure versera à la commune de Châteauneuf-en-Thymerais les sommes correspondant aux traitements servis à M. H...A...durant la période du 8 août 2009 au 31 décembre 2011. Ces sommes porteront intérêts au taux légal, à compter du 9 novembre 2011, sur les traitements servis à son agent avant cette date et, pour la période postérieure à cette date, à compter de la date d'échéance de chaque paiement mensuel. Article 2 : La commune de Châteauneuf-en-Thymerais est renvoyée devant le SETOM de l'Eure pour qu'il soit procédé à la liquidation et au paiement des sommes qui lui sont dues en application de l'article 1er du présent arrêt. Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Rouen du 25 mars 2014 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt. Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Châteauneuf-en-Thymerais et au syndicat mixte pour l'étude et le traitement des ordures ménagères (SETOM) de l'Eure. 1 7 N°17DA02218
Cours administrative d'appel
Douai
CAA de MARSEILLE, 8ème chambre - formation à 3, 27/11/2018, 17MA03749, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. C... F...a demandé au tribunal administratif de Toulon de condamner la commune de Sanary-sur-Mer à lui verser la somme à parfaire de 160 000 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis à la suite de l'accident de service dont il a été victime le 6 octobre 2000. Par un jugement n° 1404201 du 30 juin 2017, le tribunal administratif de Toulon a condamné la commune de Sanary-sur-Mer à lui verser la somme de 32 647 euros en réparation des préjudices subis. Procédure devant la Cour : Par une requête, enregistrée le 29 août 2017, la commune de Sanary-sur-Mer, représentée par Me H..., demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 30 juin 2017 ; 2°) à titre principal de rejeter les demandes de M. F... et, à titre subsidiaire, de limiter à 5 715 euros le montant des indemnités accordées ; 3°) de mettre à la charge de M. F... la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : * il n'est pas établi que la minute du jugement a été signée conformément aux prescriptions de l'article R. 741-1 du code de justice administrative ; * le jugement n'est pas suffisamment motivé en ce qu'il retient des motifs contradictoires en admettant l'identité de la symptomatologie de l'affection présentée par M. F... tout en écartant l'absence d'aggravation ; * les demandes de ce dernier étaient prescrites, compte tenu de la date de consolidation qui doit rester fixée au 15 juin 2001 ; * le lien de causalité entre les préjudices allégués par M. F... et son accident de service n'est pas établi ; * s'agissant de l'incapacité permanente partielle, compte tenu de la date de consolidation et du taux de 6 % retenu à cette date, l'indemnité allouée à M. F... ne pourra excéder 5 715 euros ; * s'agissant du préjudice esthétique temporaire, son existence n'avait pas été retenue à la première date de consolidation et l'expert judiciaire n'a pas explicité les motifs l'ayant conduit à retenir un taux de 2 sur 7 ; * s'agissant des frais d'expertise, compte tenu des circonstances, il n'apparaît pas inéquitable de les mettre à la charge de M. F....engagée au titre de l'accident de service dont ce dernier a été victime le 6 octobre 2000 Par un mémoire, enregistré le 25 août 2018, M. F..., représenté par Me J..., demande à la Cour : 1°) de rejeter la requête ; 2°) par la voie de l'appel incident : * de réformer le jugement par lequel le tribunal administratif de Toulon a limité à 32 647 euros l'indemnité au versement de laquelle il a condamné la commune de Sanary-sur-Mer en réparation du préjudice que M. F... a subi ; * de porter à la somme de 160 000 euros le montant de cette indemnité. 3°) de mettre à la charge de la commune de Sanary-sur-Mer la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il fait valoir que : * les moyens soulevés par la commune de Sanary-sur-Mer ne sont pas fondés ; * il est en droit d'obtenir la somme de 45 000 euros au titre de son incapacité permanente partielle dont le taux a été fixé par l'expert à 25%, 5 000 euros pour son préjudice esthétique estimé par l'expert à 2/7, 10 000 euros pour son préjudice d'agrément et 100 000 euros au titre de son préjudice moral. M. F... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle par une décision du 21 novembre 2018 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Marseille. Vu les autres pièces du dossier. Vu : * le code des pensions civiles et militaires de retraite ; * la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; * le code de justice administrative. La présidente de la Cour a désigné M. d'Izarn de Villefort en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : * le rapport de Mme Tahiri, * les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public, * et les observations de Me I..., substituant Me H..., représentant M. F... Une note en délibéré présentée pour M. F... a été enregistrée le 9 novembre 2018. Considérant ce qui suit : 1. M. F..., né en 1942, a été victime le 6 octobre 2000, alors qu'il était employé par la commune de Sanary-sur-Mer en tant qu'agent d'entretien, d'un accident reconnu imputable au service. Il a recherché la responsabilité de la commune de Sanary-sur-Mer afin d'obtenir réparation des préjudices non patrimoniaux subis du fait de cet accident. La commune de Sanary-sur-Mer relève appel du jugement du 30 juin 2017 par lequel le tribunal administratif de Toulon a partiellement fait droit aux demandes de M. F... en la condamnant à lui verser la somme de 32 647 euros en réparation des préjudices subis. M. F... par la voie de l'appel incident, demande que la somme mise à la charge de la commune de Sanary-sur-Mer soit portée à 160 000 euros. Sur la régularité du jugement : 2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience. ". Si la commune de Sanary-sur-Mer soutient que le jugement qui lui a été notifié ne comporte pas les signatures requises, il ressort des pièces du dossier de première instance que la minute du jugement est, conformément aux exigences des dispositions précitées de l'article R. 741-7, revêtue de la signature du président de la formation de jugement, de celle du rapporteur et de celle du greffier d'audience. 3. En second lieu, si la commune de Sanary-sur-Mer fait valoir que le jugement serait entaché de contradiction de motifs, un tel moyen, qui affecte le cas échéant le bien-fondé du jugement, est sans incidence sur sa régularité. 4. Il résulte de ce tout ce qui précède que la commune de Sanary-sur-Mer n'est pas fondée à soutenir que le jugement serait entaché d'irrégularité. Sur le bien-fondé du jugement : En ce qui concerne l'exception de prescription quadriennale : 5. Aux termes de l'article 7 de la loi du 31 décembre 1968 susvisée : " L'administration doit, pour pouvoir se prévaloir, à propos d'une créance litigieuse, de la prescription prévue par la présente loi, l'invoquer avant que la juridiction saisie du litige au premier degré se soit prononcée sur le fond (...). ". Par suite, l'administration, qui a opposé la prescription quadriennale pour la première fois en appel, n'est pas recevable à l'invoquer. En ce qui concerne la responsabilité de la commune de Sanary-sur-Mer : 6. Les dispositions des articles L. 27 et L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite et pour les fonctionnaires affiliés à la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales, le II de l'article 119 de la loi du 26 janvier 1984 et les articles 30 et 31 du décret du 9 septembre 1965, qui instituent, en faveur des fonctionnaires victimes d'accidents de service ou de maladies professionnelles, une rente viagère d'invalidité en cas de mise à la retraite et une allocation temporaire d'invalidité en cas de maintien en activité doivent être regardées comme ayant pour objet de réparer les pertes de revenus et l'incidence professionnelle résultant de l'incapacité physique causée par un accident de service ou une maladie professionnelle. Ces dispositions déterminent forfaitairement la réparation à laquelle les fonctionnaires concernés peuvent prétendre, au titre de ces chefs de préjudice, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions. Elles ne font en revanche obstacle ni à ce que le fonctionnaire qui subit, du fait de l'invalidité ou de la maladie, des préjudices patrimoniaux d'une autre nature ou des préjudices personnels, obtienne de la personne publique qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice, ni à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre la personne publique, dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette personne ou à l'état d'un ouvrage public dont l'entretien lui incombait. 7. Dans son rapport en date du 26 mai 2012, le collège d'expert, comprenant un médecin gérontologue et un psychologue, désigné par le tribunal dans le cadre d'une procédure de référé expertise initiée par M. F..., rappelle les circonstances de l'accident du 6 octobre 2000 dont ce dernier a été victime, à la suite de la chute d'un appareil sur son coude droit alors qu'il portait une charge, lui occasionnant " une douleur avec impotence fonctionnelle du tendon épicondylien du coude droit ". Il rappelle également les conclusions de la première expertise réalisée en septembre 2001 par le Dr E... relevant un tableau d'épicondylite droite invalidante non évolutif au jour de l'expertise et admettant une date de consolidation au 15 juin 2001. Pour retenir une date de consolidation au 28 janvier 2008, date à laquelle il a procédé à l'examen de M. F..., le collège d'expert s'est fondé, d'une part, sur le certificat établi par le Dr A... le 28 janvier 2008 regardé comme constatant " une aggravation de la pathologie par rapport à l'état antérieur du fait de sa possible évolutivité empêchant une consolidation reportée à cette date " et, d'autre part, sur l'absence de pièce médicale communiquée couvrant la période du 28 janvier 2008 au 8 mars 2012, date à laquelle le Dr G... faisait état d'une chronicisation des troubles. Toutefois, l'aggravation avec report de la date de consolidation en 2008 retenue par les experts n'est pas corroborée par le certificat du Dr A... du 28 janvier 2008 sur lequel ils se fondent et produit pour la première fois par la commune en appel. Ce certificat, outre qu'il fait état de dates erronées concernant l'accident de service et la date de consolidation initialement retenue, mentionne une date de consolidation du " 6 janvier 2002 alors que [la] pathologie était toujours évolutive " et indique seulement que M. F... " est repassé à cette date dans le cadre du régime normal de sécurité sociale et qui de ce fait et des problèmes financiers qu'il avait à l'époque n'ont pas permis qu'il puisse se soigner correctement (absence de mutuelle). De ce fait, la pathologie s'est aggravée. Il est actuellement dans l'incapacité totale de reprendre une activité quelconque du fait des séquelles et du retentissement psychologique lié à cette situation ". Dans ces conditions, les séquelles de l'accident survenu le 6 octobre 2000 doivent être regardées comme consolidées à la date du 15 juin 2001, comme l'indiquait le rapport d'expertise établi en septembre 2001 et les troubles somatiques postérieurs ne peuvent être regardés comme une aggravation de l'état de santé de M. F... imputable à l'accident de service. 8. Par ailleurs, en dépit des conclusions du collège d'expert exprimées au conditionnel, les troubles anxio-dépressifs présentés par M. F... n'apparaissent pas comme une aggravation liée à l'accident de service du 6 octobre 2000 mais comme la résultante d'un contexte conflictuel antérieur avec son employeur, ainsi que l'avait relevé le Dr D... en 2002 et ainsi que cela ressort des propres explications de M. F... lors de son examen par le collège d'expert, centrées sur un désir de réparation et un " ressentiment personnel éprouvé à l'endroit du maire de Sanary-sur-Mer présenté comme se trouvant à l'origine de tous ses maux ". En ce qui concerne les préjudices : 9. En premier lieu, il résulte de l'instruction, notamment du rapport établi par le Dr E..., que M. F... conserve, depuis la consolidation de son état de santé intervenue le 15 juin 2001, alors qu'il était âgé de 59 ans, un déficit fonctionnel permanent de 6%. Ainsi qu'il a été dit au point 7, il ne résulte pas de l'instruction que l'aggravation de son état de santé postérieurement au 15 juin 2001 serait imputable à son accident de service. Il y a lieu de ramener à 5 800 euros la somme allouée par le tribunal à ce titre à M. F....engagée au titre de l'accident de service dont ce dernier a été victime le 6 octobre 2000 10. En deuxième lieu, M. F... a subi un préjudice esthétique réduit, qui a été évalué à 2 sur une échelle de 1 à 7 par le collège d'expert et qui n'est contredit par aucune pièce du dossier puisque, contrairement à ce que soutient la commune de Sanary-sur-Mer, le Dr E... ne s'est pas prononcé en 2001 sur l'existence d'un tel préjudice. Il y a lieu de confirmer la somme de 1 850 euros accordée en première instance au titre de ce chef de préjudice. 11. En troisième lieu, si M. F... soutient qu'il a perdu la possibilité d'exercer toutes les activités dont il avait l'habitude, il ne produit aucune justification à l'appui de ses allégations et aucune des expertises dont il a fait l'objet n'a retenu un préjudice d'agrément. Par suite, cette demande ne peut qu'être rejetée. 12. Enfin, ainsi qu'il a été dit au point 8, les troubles anxio-dépressifs dont reste atteint M. F... n'apparaissent pas comme une aggravation liée à l'accident de service du 6 octobre 2000. Il sera fait une juste appréciation des troubles dans les conditions d'existence et du préjudice moral subis par ce dernier du seul fait de son accident de service en les évaluant à un montant total de 2 000 euros. 13. Il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu de ramener à 9 650 euros le montant de l'indemnité due par la commune de Sanary-sur-Mer à M. F..., de réformer en ce sens le jugement attaqué du tribunal administratif de Toulon et de rejeter le recours incident exercé par M. F....engagée au titre de l'accident de service dont ce dernier a été victime le 6 octobre 2000 Sur les frais d'expertise : 14. Aux termes de l'article R. 761-1 du CJA : " Les dépens comprennent les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'État. / Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties. ". 15. Il y a lieu, en l'absence de circonstance particulière de l'affaire, de laisser la charge des frais d'expertise à la commune de Sanary-sur-Mer dès lors qu'elle conserve dans la présente instance la qualité de partie perdante vis-à-vis de M. F..., sa responsabilité demeurant....engagée au titre de l'accident de service dont ce dernier a été victime le 6 octobre 2000 Sur les frais liés à l'instance : 16. Dans les circonstances de l'espèce, il ne paraît pas inéquitable de laisser à chacune des parties à l'instance la charge des frais qu'elles ont exposés et non compris dans les dépens. D É C I D E : Article 1er : La somme de 32 647 euros que la commune de Sanary-sur-Mer a été condamnée à verser à M. F... par le jugement du tribunal administratif de Toulon du 30 juin 2017 est ramenée à 9 650 euros. Article 2 : L'article 1er du jugement du tribunal administratif de Toulon du 30 juin 2017 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt. Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la commune de Sanary-sur-Mer et les conclusions de M. F... sont rejetés. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... F... et à la commune de Sanary-sur-Mer. Copie en sera adressée aux Drs Jean-Jacques Portier et Cédric Meillac. Délibéré après l'audience du 6 novembre 2018, où siégeaient : * M. d'Izarn de Villefort, président, * M. B... et Mme Tahiri, premiers conseillers. Lu en audience publique le 27 novembre 2018. N° 17MA03749 2
Cours administrative d'appel
Marseille
Conseil d'État, 7ème - 2ème chambres réunies, 19/11/2018, 412837
Vu la procédure suivante : Mme A...C...a demandé au tribunal administratif de Nantes, en premier lieu, d'annuler les titres de pension de réversion n° B 13 551304 H du 4 septembre 2013 et n° B 14 550615 C du 27 janvier 2014 en tant qu'ils ne prennent pas en compte toutes les majorations et bonifications de pension auxquelles son défunt époux pouvait prétendre et qu'ils n'appliquent pas la capitalisation des intérêts retenue pas le tribunal administratif de Poitiers dans son jugement n° 0900372 en date du 27 juin 2013 et, en deuxième lieu, d'enjoindre au ministre de la défense et à la direction générale des finances publiques de réexaminer sa situation, de procéder à une nouvelle liquidation de la pension et de lui délivrer un nouveau titre de pension. Par un jugement n°s 1400950, 1404434 du 12 juillet 2017, le tribunal administratif de Nantes a, après avoir estimé qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions tendant à l'annulation du premier titre de pension, annulé le titre de pension n° B 14 550615 C du 24 mars 2014 en tant qu'il ne prend pas en compte les services " harkis " accomplis par M. C... du 1er août 1958 au 2 juillet 1962 et a enjoint au ministre de l'action et des comptes publics ainsi qu'à la ministre des armées de réexaminer la situation de Mme C...et de procéder, sous un délai de deux mois, à une nouvelle liquidation de sa pension en prenant en compte les services accomplis du 1er août 1958 au 2 juillet 1962. Par un pourvoi, enregistré le 27 juillet 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'action et des comptes publics demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler ce jugement en tant, d'une part, qu'il a annulé le titre de pension de réversion de Mme C...en tant qu'il ne prend pas en compte des services accomplis par son mari et, d'autre part, qu'il lui a enjoint de réexaminer la situation de Mme C...et de procéder à une nouvelle liquidation de sa pension ; 2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter les demandes de MmeC.... Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - la loi n° 48-1450 du 20 septembre 1948 ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - l'ordonnance n° 62-801 du 16 juillet 1962 ; - le décret n° 51-590 du 23 mai 1951 ; - le décret n° 76-1111 du 29 novembre 1976 ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Marc Pichon de Vendeuil, maître des requêtes, - les conclusions de M. Olivier Henrard, rapporteur public. La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Baraduc, Duhamel, Rameix, avocat de Mme C...;1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. B...C..., né le 4 mai 1900 en Algérie, a été rayé, le 22 juillet 1940, des cadres de l'armée française, au sein de laquelle il détenait le grade de sergent-chef, et a bénéficié, par arrêté du 6 février 1953, d'une pension de retraite proportionnelle ; qu'il est décédé le 10 août 1985 ; que, le 18 avril 2007, sa veuve, MmeC..., a sollicité du ministre de la défense le bénéfice d'une pension de réversion ; qu'au cours des procédures gracieuses puis contentieuses engagées par MmeC..., celle-ci a été destinataire de plusieurs titres de pension dont le dernier, émis le 24 mars 2014 sous le n° B 14 550615 C, fait état d'un indice brut 332 et d'une part payable de 50 % ; que le ministre de l'action et des comptes publics se pourvoit en cassation contre le jugement du 12 juillet 2017 par lequel le tribunal administratif de Nantes a, d'une part, annulé ce titre de pension en tant qu'il ne prend pas en compte les services accomplis par M. C...dans les formations supplétives en Algérie du 1er août 1958 au 2 juillet 1962 et, d'autre part, enjoint au ministre de l'action et des comptes publics et à la ministre des armées, chacun pour ce qui le concerne, de réexaminer la situation de Mme C... afin de procéder à une nouvelle liquidation de sa pension en prenant en compte ces services ; 2. Considérant, d'une part, qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 1 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " La pension est une allocation pécuniaire personnelle et viagère accordée aux fonctionnaires civils et militaires et, après leur décès, à leurs ayants cause désignés par la loi, en rémunération des services qu'ils ont accomplis jusqu'à la cessation régulière de leurs fonctions " ; qu'aux termes de l'article L. 38 du même code : " Les conjoints d'un fonctionnaire civil ont droit à une pension de réversion égale à 50 % de la pension obtenue par le fonctionnaire ou qu'il aurait pu obtenir au jour de son décès (...) " ; 3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 53 de la loi du 20 septembre 1948 portant réforme du régime des pensions civiles et militaires, qui a été codifié à l'article 77 du code des pensions par le décret du 23 mai 1951 portant codification des textes législatifs concernant les pensions civiles et militaires de retraite et qui était en vigueur à la date à laquelle a été liquidée la pension de M. C...: " La pension et la rente viagère d'invalidité peuvent être révisées à tout moment en cas d'erreur ou d'omission quelle que soit la nature de celles-ci. Elles peuvent être modifiées ou supprimées si la concession en a été faite dans des conditions contraires aux prescriptions du présent code " ; qu'aux termes de l'article 2 de la loi du 26 décembre 1964 portant réforme du code des pensions civiles et militaires de retraite : " Les dispositions du code annexé à la présente loi, à l'exception de celles du titre III du livre II, ne sont applicables qu'aux fonctionnaires et militaires et à leurs ayants cause dont les droits résultant de la radiation des cadres ou du décès s'ouvriront à partir de la date d'effet de la présente loi " ; qu'ainsi, les dispositions de l'article L. 55 du code des pensions civiles et militaires de retraite, lui-même introduit par la loi du 26 décembre 1964, qui ont pour objet de limiter dans le temps la faculté de demander la révision de la pension en cas d'erreur de droit, ne sont pas applicables aux pensions concédées antérieurement à l'entrée en vigueur de la loi du 26 décembre 1964 ; 4. Considérant qu'il résulte de la combinaison des dispositions précitées que le caractère personnel d'une pension de retraite ne s'oppose pas à ce que le titulaire d'une pension de réversion se prévale, à l'appui d'un recours contre cette pension ou d'une demande de révision, d'une illégalité entachant le calcul de la pension de son conjoint que celui-ci n'a pas contestée, lorsque cette pension ne peut être regardée comme définitive en raison, soit de ce qu'elle est encore susceptible de recours, soit de ce qu'une demande de révision peut encore être adressée à l'administration dans les conditions posées par l'article L. 55 du code des pensions civiles et militaires de retraite pour les pensions concédées après l'entrée en vigueur de la loi du 26 décembre 1964 ; que pour les pensions concédées avant l'entrée en vigueur de cette loi, aucun délai ne peut en revanche être opposé à une demande de révision ; que par suite, aucun délai n'était opposable à la demande de révision de la pension de réversion de Mme C...dès lors que la pension de son mari lui avait été concédée avant l'entrée en vigueur de la loi du 26 décembre 1964 ; que, dans ces conditions, la demande de Mme C...pouvait notamment être fondée sur la prise en compte des dispositions de l'ordonnance du 16 juillet 1962 édictant des dispositions en faveur des personnels en service dans les makhzen d'Algérie et du décret du 29 novembre 1976 pris pour l'application de cette ordonnance ; que, dès lors, le tribunal administratif de Nantes n'a pas commis d'erreur de droit en estimant que Mme C...pouvait, à l'appui de sa demande de révision de la pension de réversion dont elle est titulaire, se prévaloir d'une illégalité entachant la pension de son conjoint en raison d'une non prise en compte des services accomplis comme " harki " en Algérie, alors même que ses recours en ce sens ont été formés au plus tôt le 6 novembre 2013 ; 5. Considérant, enfin, que dès lors que la demande de Mme C...ne se fondait pas sur le fait que la pension de son époux aurait encore été susceptible de recours, le ministre ne peut utilement soutenir que le principe de sécurité juridique, qui implique que ne puissent être remises en cause sans condition de délai des situations consolidées par l'effet du temps, faisait obstacle à ce que puisse être contestée indéfiniment une décision administrative individuelle qui a été notifiée à son destinataire ou dont il est établi, à défaut d'une telle notification, que celui-ci a eu connaissance ; 6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le pourvoi du ministre de l'action et des comptes publics doit être rejeté ; 7. Considérant que Mme C...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP Baraduc, Duhamel, Rameix, avocat de MmeC..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à la SCP Baraduc, Duhamel, Rameix ;D E C I D E : -------------- Article 1er : Le pourvoi du ministre de l'action et des comptes publics est rejeté. Article 2 : L'Etat versera à la SCP Baraduc, Duhamel, Rameix, avocat de MmeC..., une somme de 3 000 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette société renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat. Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'action et des comptes publics et à Mme A...C.... Copie en sera adressée à la ministre des armées.ECLI:FR:CECHR:2018:412837.20181119
Conseil d'Etat
CAA de NANCY, 1ère chambre - formation à 3, 13/12/2018, 18NC01165, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 10 décembre 2015 par lequel le ministre de la justice l'a titularisé dans le corps des surveillants pénitentiaires en tant que cet arrêté limite sa reprise d'ancienneté à trois mois et neuf jours, ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux. Par un jugement n° 1600954 du 13 février 2018, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et des mémoires, enregistrés les 9 avril, 2 mai et 22 août 2018, M. B..., représenté par MeC..., demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 13 février 2018 ; 2°) d'annuler l'arrêté du 10 décembre 2015 par lequel le ministre de la justice l'a titularisé dans le corps des surveillants pénitentiaires en tant que cet arrêté limite sa reprise d'ancienneté à 3 mois et 9 jours ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux ; 3°) d'enjoindre au ministre de la justice de reconstituer sa carrière en prenant en compte les 10 années de services accomplis en qualité de militaire sous contrat ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. M. B...soutient que : - en sa qualité d'ancien militaire, bénéficiaire de la procédure d'accès aux emplois réservés, il avait droit, conformément à l'article L. 4139-3 du code la défense, à la reprise de la durée de ses services effectifs accomplis en qualité de militaire sous contrat lors de sa titularisation dans le corps des surveillants pénitentiaires ; - l'arrêté contesté méconnaît le principe d'égalité dès lors que d'anciens militaires placés dans la même situation que lui ont bénéficié de la reprise d'ancienneté qui lui a été refusée. Par un mémoire en défense, enregistré le 26 septembre 2018, la garde des sceaux, ministre de la justice conclut au rejet de la requête. La ministre soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés. Par ordonnance du 30 août 2018, la clôture d'instruction a été fixée au 27 septembre 2018. Un mémoire présenté par M. B...a été enregistré le 18 octobre 2018. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de la défense ; - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Laubriat, premier conseiller, - les conclusions de M. Favret, rapporteur public, - et les observations de MeC..., pour M.B.... Une note en délibéré présentée par M. B...a été enregistrée le 27 novembre 2018. Considérant ce qui suit : 1. M. B...a été nommé le 22 septembre 2013 dans un emploi réservé aux militaires et anciens militaires en qualité d'élève à l'Ecole nationale de l'administration pénitentiaire. Nommé stagiaire le 2 juin 2014, il a été titularisé par un arrêté du 10 décembre 2015 et classé à compter du 2 septembre 2015, date de sa titularisation, au 2ème échelon du grade de surveillant pénitentiaire du corps des personnels d'encadrement et d'application des personnels de surveillance de l'administration pénitentiaire avec une ancienneté conservée de trois mois et neuf jours. Par un courrier du 22 janvier 2016, M. B...a contesté cet arrêté devant la directrice de l'administration pénitentiaire en demandant à ce que la durée de ses services accomplis en qualité de militaire sous contrat entre 2000 et 2010 soit reprise en totalité pour le calcul de son ancienneté dans le corps des surveillants pénitentiaires. M. B...fait appel du jugement du 13 février 2018 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 10 décembre 2015 en tant que cet arrêté a limité sa reprise d'ancienneté à trois mois et neuf jours, ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux. 2. En premier lieu, d'une part, aux termes de l'article L. 397 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, alors applicable : " Les emplois réservés sont également accessibles, dans les conditions d'âge et de délai fixées par décret en Conseil d'Etat : 1° Aux militaires, autres que ceux mentionnés à l'article L. 394 ; 2° Aux anciens militaires, autres que ceux mentionnés à l'article L. 394, à l'exclusion, d'une part, de ceux qui ont fait l'objet d'une radiation des cadres ou d'une résiliation de contrat pour motif disciplinaire et, d'autre part, de ceux qui sont devenus fonctionnaires civils ". Aux termes de l'article R. 396 du même code, alors en vigueur : " Le candidat aux emplois réservés bénéficiaire des dispositions des articles L. 397 et L. 398 doit : -remplir les conditions d'âge fixées par le statut particulier des corps et cadres d'emplois d'accueil, à la date fixée, le cas échéant, par le statut d'accueil ou, à défaut, au 1er janvier de l'année au titre de laquelle il postule ; - avoir accompli au moins quatre années de services militaires effectifs à la date d'inscription sur la liste d'aptitude prévue à l'article L. 401. / L'ancien militaire doit, en outre, avoir quitté les armées depuis moins de trois ans ". 3. D'autre part, aux termes de l'article L. 4139-3 du code de la défense : " Le militaire, à l'exception de l'officier de carrière et du militaire commissionné, peut se porter candidat pour l'accès aux emplois réservés, sur demande agréée, dans les conditions prévues par le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre. / En cas d'intégration ou de titularisation, la durée des services effectifs du militaire est reprise en totalité dans la limite de dix ans pour l'ancienneté dans le corps ou le cadre d'emploi d'accueil de catégorie C. Elle est reprise pour la moitié de la durée des services effectifs dans la limite de cinq ans pour l'ancienneté dans le corps ou le cadre d'emploi de catégorie B ". Aux termes du premier alinéa de l'article L. 4139-4 du même code : " Durant le détachement prévu aux articles L. 4139-1 à L. 4139-3, le militaire perçoit une rémunération au moins égale à celle qu'il aurait perçue s'il était resté en position d'activité au sein des armées, dans des conditions fixées par décret. Aucune promotion n'est prononcée durant ce détachement et le militaire est radié des cadres ou rayé des contrôles de l'armée active à la date de son intégration ou de sa titularisation dans le corps ou le cadre d'emploi d'accueil ". En application de l'article L. 4139-14 de ce code : " La cessation de l'état militaire intervient d'office dans les cas suivants : (...) / 8° Lors de la titularisation dans une fonction publique, ou dès la réussite à un concours de l'une des fonctions publiques pour les militaires ne bénéficiant pas du détachement prévu au premier alinéa de l'article L. 4139-1, dans les conditions prévues à la section 1 du présent chapitre ". 4. Ces dispositions doivent être interprétées comme réservant le droit de bénéficier d'une reprise d'ancienneté au militaire qui, après avoir réussi les épreuves organisées pour l'accès aux emplois réservés, a été placé en position de détachement dans l'attente de son intégration ou de sa titularisation et a ainsi conservé la qualité de militaire jusqu'à la date à laquelle celle-ci a été prononcée. En revanche, elles n'ont ni pour objet ni pour effet d'ouvrir cette possibilité de reprise d'ancienneté à l'agent qui, avant son intégration ou sa titularisation, a, faute d'avoir sollicité son détachement, cessé d'être militaire et a pu, de ce fait, s'il remplissait les conditions d'ancienneté et de service, bénéficier d'une pension militaire de retraite. 5. Il ressort des pièces du dossier que M.B..., militaire engagé par contrat le 29 août 2000, a été radié des cadres de l'armée le 29 août 2010. Eu égard à la cessation de son état militaire, l'intéressé a été nommé élève surveillant le 22 septembre 2013 sans être placé en position de détachement dans l'attente de son intégration ou de sa titularisation dans le corps des personnels d'encadrement et d'application des personnels de surveillance de l'administration pénitentiaire. Ainsi, il ne peut bénéficier des dispositions de l'article L. 4139-3, citées au point 3, qui réservent toute reprise d'ancienneté au seul militaire placé en position de détachement dans l'attente de sa titularisation. Par suite, il n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté du 10 décembre 2015 limitant la reprise de son ancienneté à trois mois et neuf jours, correspondant aux trois quarts de la durée de ses services effectués entre janvier et septembre 2012 en qualité d'adjoint de sécurité auprès du ministère de l'intérieur, méconnaîtrait ces dispositions. 6. En second lieu, la circonstance, à la supposer établie, que des collègues de M.B..., également anciens militaires, auraient bénéficié d'une reprise d'ancienneté lors de leur nomination dans le corps des surveillants pénitentiaires est sans incidence sur la légalité des décisions contestées qui ont été prises conformément aux dispositions légales et réglementaires précitées. Dès lors, le moyen tiré d'un prétendu manquement au principe d'égalité entre fonctionnaires ne peut qu'être écarté. 7. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et à la garde des sceaux, ministre de la justice. 2 N° 18NC01165
Cours administrative d'appel
Nancy