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CAA de NANCY, 2ème chambre, 09/06/2022, 20NC02192
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... F... a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler la décision du 15 juin 2018 par laquelle le président directeur général du centre national de la recherche scientifique a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de sa maladie et la décision rejetant implicitement le recours gracieux qu'il a exercé le 24 juillet 2018. Par un jugement n° 1802058 du 25 juin 2020, le tribunal administratif de Besançon a rejeté la demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés les 31 juillet 2020 et 18 février 2022, M. A... F..., représenté par Me Suissa, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du 25 juin 2020 ; 2°) d'annuler cette décision du 15 juin 2018 et la décision de rejet implicite de son recours gracieux ; 3°) de mettre à la charge du centre national de la recherche scientifique une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : Sur la régularité du jugement : - le jugement est entaché d'un défaut de motivation s'agissant du moyen tiré du vice de procédure ; - le jugement est entaché d'une erreur de droit et d'une erreur d'appréciation ; Sur les conclusions à fin d'annulation : - la procédure est irrégulière dès lors le dossier soumis à la commission de réforme ne comportait pas le rapport du Dr D... et eu égard aux conditions d'établissement du procès-verbal de cette commission ; ces irrégularités l'ont privé d'une garantie et ont eu une influence sur le sens de la décision ; - il ne peut être reconnu à son encontre de faute et la pathologie dont il souffre est en lien avec le service ; - à supposer même qu'une faute puisse être retenue, elle n'a pas vocation à détacher la maladie du service. Par des mémoires en défense, enregistrés les 1er février et 14 mars 2022, le centre national de la recherche scientifique, représenté par Me Peru, conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par M. F... ne sont pas fondés. Par une lettre du 12 mai 2022, la cour a informé les parties, qu'en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de de la méconnaissance du champ d'application de la loi, en raison de l'application des dispositions de l'article 21 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires à un fonctionnaire dont la pathologie a été diagnostiquée et les droits en matière d'imputabilité au service constitués avant le décret n°2019-122 du 21 février 2019, entré en vigueur depuis le 24 février 2019, et de ce que la cour est susceptible de substituer d'office aux dispositions précitées celles de l'article 34 de de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984. Par mémoire du 12 mai 2022, le centre national de la recherche scientifique a produit des observations. Par mémoire du 14 mai 2022, M. F... a produit des observations. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de la sécurité sociale ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ; - le décret n° 84-1185 du 27 décembre 1984 relatif aux statuts particuliers des corps de fonctionnaires du centre national de la recherche scientifique ; - le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme B..., - les conclusions de Mme Haudier, rapporteure publique, - et les observations de Me Naudin, représentant M. F... et de Me Astre, représentant le centre national de la recherche scientifique. Considérant ce qui suit : 1. M. F... a été titularisé dans le corps des ingénieurs de recherches et affecté au laboratoire de mathématiques du centre national de la recherche scientifique (CNRS) de Besançon en 2000. A compter du 9 février 2017, le fonctionnaire a été à plusieurs reprises en arrêts de travail. Estimant que son état dépressif était en lien avec le service, le 1er juin 2017, il a demandé que sa maladie soit reconnue imputable au service. Le 1er juin 2018, la commission de réforme a émis un avis défavorable à cette demande. Par une décision du 15 juin 2018, le président directeur général du CNRS a rejeté la demande d'imputabilité au service présentée par M. F.... Ce dernier a formé, le 24 juillet 2018, un recours gracieux contre cette décision qui a été implicitement rejeté. M. F... relève appel du jugement du 25 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision du 15 juin 2018 et de la décision rejetant son recours gracieux. Sur la régularité du jugement : 2. Il ressort des énonciations du jugement attaqué que les premiers juges n'ont pas répondu au moyen, qui n'était pas inopérant, tiré de l'impartialité de la commission de réforme, les représentants du personnel n'ayant pas assisté à tous les échanges des membres de la commission. Par suite, M. F... est fondé à soutenir que le jugement attaqué est entaché d'un défaut de réponse à un moyen et qu'il est, pour ce motif, irrégulier. 3. Il y a lieu de statuer immédiatement par la voie de l'évocation sur la demande de M. F.... Sur les conclusions à fin d'annulation : En ce qui concerne la légalité externe de la décision attaquée : 4. En premier lieu, aux termes de l'article 13 du décret du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires, dans sa rédaction applicable au litige : " La commission de réforme est consultée notamment sur : (...) 2. L'imputabilité au service de l'affection entraînant l'application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 34 (4°) de la loi du 11 janvier susvisée ; (...) ". Aux termes de l'article 12 de ce décret : " Dans chaque département, il est institué une commission de réforme départementale compétente à l'égard des personnels mentionnés à l'article 15. Cette commission, placée sous la présidence du préfet ou de son représentant, qui dirige les délibérations mais ne participe pas aux votes, est composée comme suit : (...) 4. Les membres du comité médical prévu à l'article 6 du présent décret (...) ". Aux termes du deuxième alinéa de l'article 5 de ce décret qui précise la composition du comité médical ministériel, auquel renvoie sur ce point le deuxième alinéa de l'article 6 relatif au comité médical départemental : " Ce comité comprend deux praticiens de médecine générale, auxquels est adjoint, pour l'examen des cas relevant de sa qualification, un spécialiste de l'affection pour laquelle est demandé le bénéfice du congé de longue maladie ou de longue durée prévu à l'article 34 (3e et 4e) de la loi du 11 janvier 1984 susvisée ". Enfin, aux termes de l'article 19 de ce décret : " La commission de réforme ne peut délibérer valablement que si la majorité absolue des membres en exercice assiste à la séance ; un praticien de médecine générale ou le spécialiste compétent pour l'affection considérée doit participer à la délibération. / Les avis sont émis à la majorité des membres présents. / Lorsqu'un médecin spécialiste participe à la délibération conjointement avec les deux praticiens de médecine générale, l'un de ces deux derniers s'abstient en cas de vote (...) ". 5. Si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de cette décision ou s'il a privé les intéressés d'une garantie. 6. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que doit être présent, au sein de la commission de réforme appelée à statuer sur l'imputabilité au service de la maladie contractée par un agent, en plus des deux praticiens de médecine générale, un médecin spécialiste de la pathologie invoquée par l'agent qui, s'il participe aux échanges de la commission, ne prend pas part au vote de son avis. 7. Il ressort des pièces du dossier, et notamment du procès-verbal de la séance de la commission de réforme du 1er juin 2018, que deux praticiens de médecine générale étaient présents. Il est indiqué que la commission de réforme a disposé de l'arrêt de travail initial du 9 février 2017, d'un certificat médical du médecin psychiatre consulté par M. F... du 11 mai 2017 et du compte-rendu d'examen médical du Dr C... du 28 février 2018. Dans ces conditions, la commission disposait d'un certificat médical rédigé par le médecin psychiatre que consulte régulièrement le fonctionnaire et d'un rapport d'expertise récent établi par un psychiatre ayant examiné l'agent en février 2018. Eu égard à ces circonstances, l'absence de médecin spécialiste en psychiatrie lors de la réunion du 1er juin 2018 au cours de laquelle la commission de réforme a examiné la situation de M. F... n'a pas effectivement privé l'intéressé de la garantie, qui résulte des textes cités au point précédent, que constitue pour l'agent le fait que la commission de réforme soit éclairée par un médecin spécialiste de sa pathologie. 8. En deuxième lieu, comme il vient d'être dit précédemment, la commission de réforme s'est prononcée sur la situation de M. F... à l'appui d'un certificat médical d'un spécialiste et d'un rapport d'examen médical, qui concluaient au demeurant tous deux à l'imputabilité au service de la pathologie dont souffre le requérant, de nature à éclairer suffisamment les membres de la commission. Par suite, la circonstance, à la supposer établie, que M. F... ait transmis au CNRS un rapport d'expertise réalisé par le Dr D... le 25 avril 2018, qui n'a pas été communiqué à la commission de réforme, ne l'a privé d'aucune garantie et n'a pas eu d'influence sur le sens de la décision attaquée. 9. En troisième lieu, le requérant soutient que les termes " rejet d'imputabilité " et le visa du rapport du Dr C... ont été ajoutés à l'avis de la commission de réforme en l'absence des représentants du personnel, membres de la commission. Toutefois, quand bien même ces mots auraient été ajoutés à l'issue de la réunion de la commission de réforme en l'absence de la majorité absolue de ses membres, le sens de l'appréciation portée par la commission n'en a pas été modifiée puisque que l'avis indiquait dans la version initiale, établie en présence de l'ensemble des membres, que " la preuve n'est pas apportée par le fonctionnaire d'un lien essentiel et direct avec la pathologie déclarée et l'exercice des fonctions ". Par suite, M. F... n'est pas fondé à soutenir que la procédure serait irrégulière sur ce point. 10. Il résulte de ce qui précède que la procédure suivie devant la commission de réforme n'est pas entachée d'irrégularité. En ce qui concerne la légalité interne de la décision attaquée : S'agissant du fondement légal : 11. Lorsqu'il constate que la décision contestée devant lui aurait pu être prise, en vertu du même pouvoir d'appréciation, sur le fondement d'un autre texte que celui dont la méconnaissance est invoquée, le juge de l'excès de pouvoir peut substituer ce fondement à celui qui a servi de base légale à la décision attaquée, sous réserve que l'intéressé ait disposé des garanties dont est assortie l'application du texte sur le fondement duquel la décision aurait dû être prononcée. Une telle substitution relevant de l'office du juge, celui-ci peut y procéder de sa propre initiative, au vu des pièces du dossier, mais sous réserve, dans ce cas, d'avoir au préalable mis les parties à même de présenter des observations sur ce point. 12. Aux termes de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, dans sa rédaction applicable au présent litige : " Le fonctionnaire en activité a droit : [...] / 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. Le bénéfice de ces dispositions est subordonné à la transmission par le fonctionnaire, à son administration, de l'avis d'arrêt de travail justifiant du bien-fondé du congé de maladie, dans un délai et selon les sanctions prévues en application de l'article 35. / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident [...] ". 13. Aux termes de l'article 21 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, créé par l'article 10 de l'ordonnance n° 2017-53 du 19 janvier 2017, en vigueur depuis le 21 janvier 2017, et désormais codifié à l'article L. 822-20 du code général de la fonction publique : " I. Le fonctionnaire en activité a droit à un congé pour invalidité temporaire imputable au service lorsque son incapacité temporaire de travail est consécutive à un accident reconnu imputable au service, à un accident de trajet ou à une maladie contractée en service définis aux II, III et IV du présent article. Ces définitions ne sont pas applicables au régime de réparation de l'incapacité permanente du fonctionnaire. (...) / IV. -Est présumée imputable au service toute maladie désignée par les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale et contractée dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le fonctionnaire de ses fonctions dans les conditions mentionnées à ce tableau. (...) / Peut également être reconnue imputable au service une maladie non désignée dans les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu'elle est essentiellement et directement causée par l'exercice des fonctions et qu'elle entraîne une incapacité permanente à un taux déterminé et évalué dans les conditions prévues par décret en Conseil d'Etat ". 14. Aux termes de l'article 22 du décret n° 2019-122 du 21 février 2019 : " Le fonctionnaire en congé à la suite d'un accident ou d'une maladie imputable au service continue de bénéficier de ce congé jusqu'à son terme. Toute prolongation de ce congé postérieure à l'entrée en vigueur du présent décret est accordée dans les conditions prévues au chapitre Ier. / Les conditions de forme et de délais prévues aux articles 47-2 à 47-7 du décret du 14 mars 1986 précité ne sont pas applicables aux fonctionnaires ayant déposé une déclaration d'accident ou de maladie professionnelle avant l'entrée en vigueur du présent décret. / Les délais mentionnés à l'article 47-3 du même décret courent à compter du premier jour du deuxième mois suivant la publication du présent décret lorsqu'un accident ou une maladie n'a pas fait l'objet d'une déclaration avant cette date ". 15. L'application des dispositions de l'article 21 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 résultant de l'ordonnance du 19 janvier 2017 étant manifestement impossible en l'absence d'un texte réglementaire fixant notamment les conditions de procédure applicables à l'octroi du nouveau congé pour invalidité temporaire imputable au service, ces dispositions ne sont donc entrées en vigueur, en tant qu'elles s'appliquent à la fonction publique de l'Etat, qu'à la date d'entrée en vigueur, le 24 février 2019, du décret n° 2019-301 du 21 février 2019, décret par lequel le pouvoir réglementaire a pris les dispositions réglementaires nécessaires pour cette fonction publique et dont l'intervention était, au demeurant, prévue, sous forme de décret en Conseil d'Etat, par le VI de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 résultant de l'article 10 de l'ordonnance du 19 janvier 2017. Il en résulte que les dispositions de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 dans leur rédaction antérieure à celle résultant de l'ordonnance du 19 janvier 2017 sont demeurées applicables jusqu'à l'entrée en vigueur du décret du 21 février 2019. 16. En outre, dès lors que les droits des agents en matière d'accident de service et de maladie professionnelle sont réputés constitués à la date à laquelle l'accident est intervenu ou la maladie a été diagnostiquée, la situation de M. F..., dont l'état dépressif a été diagnostiqué avant le 24 février 2019 et dont la demande de reconnaissance d'imputabilité au service a été présentée avant cette date, était exclusivement régie par les conditions de forme et de fond prévues avant l'entrée en vigueur des dispositions législatives et réglementaires relatives au nouveau congé pour invalidité temporaire imputable au service. 17. Il ressort notamment des motifs de la décision attaquée que le CNRS s'est fondé sur l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 résultant de l'article 10 de l'ordonnance du 19 janvier 2017 pour refuser de reconnaître l'imputabilité au service de la maladie invoquée par M. F.... Il résulte de ce qui vient d'être dit aux points 9 à 14 que la décision attaquée ne pouvait trouver son fondement dans ces dispositions auxquelles elle se réfère. Toutefois, le pouvoir d'appréciation dont dispose l'autorité administrative en vertu des dispositions de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 est le même que celui dont l'investissent les dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983. Les garanties dont sont assortis ces textes sont similaires. Dans ces conditions, et ainsi qu'en ont été informées les parties, il y a lieu de substituer ces dispositions à la base légale retenue par le CNRS. S'agissant de l'erreur d'appréciation commise par l'administration : 18. En application des dispositions rappelées au point 12, pour les maladies qui ont été diagnostiquées avant l'entrée en vigueur des nouvelles dispositions législatives et réglementaires relatives au congé pour invalidité temporaire imputable au service, en l'absence de présomption légale d'imputabilité, une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service. En outre, une maladie contractée par un fonctionnaire peut être regardée comme imputable au service sans qu'il soit nécessaire d'établir l'existence d'un incident survenu dans le cadre du service, ni celle d'un dysfonctionnement grave ou d'un comportement fautif de l'administration. 19. A l'appui de sa demande d'imputabilité au service de sa pathologie, M. F... se prévaut notamment de plusieurs éléments médicaux dont le rapport du Dr C..., médecin psychiatre agrée, du 28 février 2018, qui a réalisé l'expertise médicale demandée par la commission de réforme, lequel indique que l'état dépressif de M. F... " apparait bien comme la conséquence des conditions de travail et des difficultés vécues, l'événement du 8 février 2017 apparaissant comme le facteur déclenchant incontestable de la décompensation psychique ". Le Dr E... atteste, quant à lui, dans son certificat du 11 mai 2017 que M. F... est suivi en consultation psychiatrique depuis le 14 février 2017 " dans le cadre d'un épuisement moral avec dépression majeure d'intensité mélancolique en lien avec ce qu'il rapporte d'un harcèlement professionnel ". Le médecin de prévention, dans son rapport qui se prononce sur l'imputabilité au service de la maladie de M. F..., conclut que l'intéressé " présente un état anxio-dépressif grave qui semble résulter de la dégradation des conditions de vie au travail depuis 2013 ". A la suite d'un examen du 25 avril 2018, le Dr D..., médecin psychiatre agréé au centre hospitalier universitaire de Besançon, estime, après trois échanges avec M. F..., qu'il souffre d'une " symptomatologie dépressive sévère et réactionnelle à une situation de souffrance au travail s'étalant de 2013 à février 2017. ". 20. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que M. F..., ingénieur de recherche au laboratoire de mathématique du CNRS de Besançon depuis l'année 2000, a été le responsable du service ressources informatiques de ce laboratoire jusque fin 2015 et y a travaillé jusqu'à son arrêt de travail à compter du 9 février 2017. Le requérant soutient d'abord qu'à partir de 2013, les relations de travail avec le nouveau directeur ont été difficiles, jusqu'à la démission de ce dernier en janvier 2014. M. F... a produit, à cet égard, en première instance des courriers électroniques du directeur du laboratoire du 20 janvier 2014, qui annonce sa démission, et celui d'une membre du laboratoire de mathématiques du 27 mars 2014 qui informe ses collègues qu'elle quitte ses fonctions en raison de sa souffrance au travail. Ces échanges démontrent effectivement la dégradation des conditions de travail consécutive notamment aux méthodes managériales du directeur alors en place et sont corroborées par le médecin de prévention, qui indique dans son rapport, que l'intéressé lui a fait part de la dégradation de ses conditions de travail lors d'une visite médicale le 16 janvier 2014. Le praticien n'écrit toutefois pas qu'il a constaté, lors de cette visite, d'état pathologique particulier chez M. F.... Le médecin de prévention précise par contre qu'il adressé un mail au directeur du laboratoire de mathématiques le 12 décembre 2013 suite au " burn-out " d'un autre informaticien du service. Il indique, dans ce rapport rédigé en 2018, que la dégradation des conditions de travail " impacte " sept personnels techniques, sans préciser que M. F... en aurait été également victime avant 2017. Le requérant produit en outre un courrier électronique du 13 mai 2014 qu'il a adressé au nouveau directeur de laboratoire, motivé par son souhait de ne pas " voir le bateau couler sans réagir ", afin de l'alerter sur le manque de considération générale de l'institution à égard de certains personnels du laboratoire de mathématiques mais qui ne fait cependant état dans ce courrier d'aucune souffrance morale personnelle. Par ailleurs, l'intéressé se borne à soutenir, sans l'établir, que, de 2014 à 2016, il aurait informé à plusieurs reprises le nouveau directeur du laboratoire, la directrice des ressources humaines, la délégation régionale et le médecin du travail, de difficultés liées à la place des ingénieurs au sein du laboratoire et à la détérioration des conditions de travail. Le requérant ne fait pas davantage, sur ce point, état d'une éventuelle souffrance personnelle. Par ailleurs, le requérant soutient sans autre précision avoir mal vécu la réorganisation de service, qui a été menée à l'automne 2015 et qui a abouti à la nomination d'un des collaborateurs du service de ressources informatiques en tant que responsable du service. Si l'existence au cours de l'année 2013 de défaillances managériales et d'un contexte de travail dégradé au sein du laboratoire de recherche est ainsi avérée, le requérant ne produit en revanche aucune pièce relative à la période allant de 2014 à 2016 qui démontrerait la persistance de ces dysfonctionnements de management et les conséquences de conditions de travail sur son état de santé. M. F... n'établit pas notamment avoir consulté durant cette période un spécialiste ou avoir pris l'attache du médecin de prévention afin d'être aidé. Eu égard à l'ensemble de ces éléments et à la chronologie des faits, les tensions relationnelles au sein du laboratoire de mathématiques où était affecté M. F... et les méthodes managériales reprochées par le médecin de prévention ne sauraient à elles-seules caractériser l'existence d'un contexte professionnel pathogène qui serait directement à l'origine de la dépression sévère du requérant, faute notamment d'élément suffisant établissant l'existence, entre 2014 et 2017, d'un tel état dépressif . 21. En second lieu, il ressort également des pièces du dossier qu'à la suite de la découverte en décembre 2016 d'intrusions régulières de l'intéressé dans les sauvegardes de données personnelles de plusieurs utilisateurs du laboratoire de mathématiques entre novembre 2015 et décembre 2016, M. F... a été reçu à la délégation régionale de Nancy le 8 février 2017. Il a été informé lors de cet entretien qu'une procédure disciplinaire allait être engagée à son encontre à raison de ces faits. Le lendemain, M. F... s'était présenté aux urgences psychiatriques et a été hospitalisé en service de psychiatrie du 27 février au 4 avril 2017 en raison d'un risque de raptus suicidaire élevé. Il apparaît ainsi que cet entretien du 8 février 2017, au cours duquel M. F... a dû s'expliquer sur des faits d'intrusion dans des dossiers relatifs à la gestion du laboratoire, stockés dans des données personnelles notamment des directeurs successifs du laboratoire de mathématiques, a constitué l'élément déclencheur d'un stress post-traumatique consécutif à l'état de sidération subi lors de cet entretien comme cela ressort de plusieurs certificats médicaux, notamment ceux des Drs C..., D... et Musselin. Or, la circonstance que cet entretien du 8 février 2017 aurait été le facteur déclenchant de la maladie de M. F..., dont la préexistence depuis 2013 n'est pas démontrée ainsi qu'il a été dit précédemment, n'est pas, par elle-même, de nature à établir que sa pathologie serait imputable au service, ni d'ailleurs qu'il aurait été victime d'un accident de service. 22. Il s'ensuit que l'affection dont le requérant a souffert ne peut être regardée comme présentant un lien direct avec l'exercice de ses fonctions ou avec ses conditions de travail. M. F... n'est dès lors pas fondé à soutenir que le CNRS a commis une erreur d'appréciation en refusant de reconnaître l'imputabilité au service de sa pathologie. 23. Il résulte de tout ce qui précède que M. F... n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision attaquée du 15 juin 2018 et de la décision de rejet implicite de son recours gracieux. Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 24. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge du CNRS, qui n'a pas la qualité de partie perdante, la somme que réclame M. F... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. D E C I D E : Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Besançon du 25 juin 2020 est annulé. Article 2 : La demande présentée par M. F... devant le tribunal administratif de Besançon et le surplus des conclusions de sa requête présentée devant la cour sont rejetés. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... F... et au centre national de la recherche scientifique. Délibéré après l'audience du 19 mai 2022, à laquelle siégeaient : M. Martinez, président, M. Agnel, président-assesseur, Mme Lambing, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 juin 2022. La rapporteure, Signé : S. B... Le président, Signé : J. MARTINEZ La greffière, Signé : C. SCHRAMM La République mande et ordonne à la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, C. SCHRAMM 2 N° 20NC02192
Cours administrative d'appel
Nancy
CAA de NANCY, 4ème chambre, 14/06/2022, 19NC02006, Inédit au recueil Lebon
Vu les procédures suivantes : Procédures contentieuses antérieures : Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler la décision du 21 mars 2018 par laquelle le ... a décidé de ne pas reconnaître l'imputabilité au service de la maladie professionnelle qu'elle a déclarée et d'enjoindre, à titre principal, à l'Etat de lui attribuer un congé pour invalidité temporaire imputable au service à compter du 16 octobre 2017 dans un délai d'un mois à compter du jugement à intervenir . Par un jugement n° 1800836 du 26 avril 2019, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande. Par une seconde requête, Mme B... a demandé au même tribunal d'annuler la décision du 17 mai 2019 par laquelle le ... a refusé de lui accorder le bénéfice du congé pour invalidité temporaire imputable au service au titre d'un accident intervenu le 13 octobre 2017 et d'enjoindre à l'Etat de lui accorder le bénéfice d'un " congé pour invalidité " imputable au service à compter du 16 octobre 2017 dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement et, à défaut, de procéder au réexamen de sa demande dans un délai de deux mois à compter de cette notification. Par un jugement n° 1901268 du 19 mars 2020, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande. Procédures devant la cour : I. Par une requête enregistrée le 26 juin 2019, sous le n° 19NC02006, Mme B..., représentée par Me Komly-Nallier, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement n° 1800836 du 26 avril 2019 du tribunal administratif de Besançon ; 2°) d'annuler la décision du 21 mars 2018 du ... ; 3°) d'enjoindre à l'Etat de lui attribuer un congé pour invalidité temporaire imputable au service à compter du 16 octobre 2017 dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir ; 4°) à défaut, en cas d'annulation de la décision pour un motif de légalité externe, d'enjoindre à l'Etat de se prononcer de nouveau sur sa demande dans un délai de deux mois à compter de l'arrêt à intervenir ; 5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - le jugement est irrégulier en ce qu'il est entaché d'une omission à statuer : les premiers juges ne se sont pas prononcés sur la question de savoir si le nombre de médecins présents à la commission de réforme du 7 février 2018 était conforme aux dispositions de l'article 12 du décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ; - la procédure suivie devant la commission de réforme est irrégulière : - le principe du contradictoire a été méconnu par la transmission tardive de son rapport disciplinaire ; - la communication de ce rapport disciplinaire au médecin psychiatre ainsi qu'à la commission de réforme a été commise en violation du principe d'impartialité des procédures administratives ; - au regard des dispositions des articles 5, 6 et 12 du décret du 14 mars 1986, la composition de la commission de réforme était irrégulière en l'absence d'un médecin spécialiste à la séance de la commission de réforme ; - l'administration a bien commis une erreur d'appréciation en ne reconnaissant pas l'imputabilité au service de son état de santé. Par un mémoire en défense enregistré le 12 décembre 2019, la ministre de la transition écologique et solidaire conclut au rejet de la requête. Elle soutient que les moyens ne sont pas fondés et elle s'en remet également aux écritures de première instance du préfet de la région Bourgogne-Franche-Comté. Par une ordonnance du 1er avril 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 2 mai 2022 à 12h00. II. Par une requête enregistrée le 29 mai 2020, sous le n° 20NC01180, Mme B..., représentée par Me Komly-Nallier, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement n° 1901268 du 19 mars 2020 du tribunal administratif de Besançon ; 2°) d'annuler la décision du 17 mai 2019 du ... ; 3°) d'enjoindre à l'Etat de lui accorder le bénéfice d'un congé pour invalidité imputable au service à compter du 16 octobre 2017 dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt et, à défaut, en cas d'annulation de la décision pour un motif de légalité externe, de procéder au réexamen de sa demande dans un délai de deux mois à compter de cette notification ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - le jugement est irrégulier car les premiers juges ne se sont pas prononcés sur deux moyens : - celui tiré de ce que le médecin de prévention n'avait pas été informé de la tenue de la commission de réforme qui s'est réunie le 4 avril 2018 ; - celui tiré de l'erreur de droit entachant la décision attaquée dans la mesure où la ... avait fondé son refus sur la circonstance qu'elle n'avait pas présenté de déclaration d'accident de service ; - la décision attaquée est entachée de vices de procédure tirés de la méconnaissance des articles 18 et 19 du décret n° 86-442 du 14 mars 1986 : - le médecin de prévention n'a pas été informé de la tenue de la commission de réforme qui s'est réunie le 4 avril 2018 ; - la présence d'un médecin spécialiste à la séance de la commission de réforme était nécessaire pour éclairer de manière pertinente son cas médical ; - la décision attaquée est entachée d'une erreur de droit et d'une erreur dans la qualification juridique des faits : - le II du nouvel article 21 bis du statut général des fonctionnaires instaure une présomption d'imputabilité au service des accidents qui sont survenus dans le temps et sur le lieu de travail ; - la découverte du document à la photocopieuse lui a provoqué un choc psychologique ; elle a découvert de manière soudaine que sa direction allait lui retirer une partie de ses missions. La requête a été communiquée à la ministre de la transition écologique et solidaire qui n'a pas présenté de mémoire en défense. Par une ordonnance du 5 avril 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 2 mai 2022 à 12h00. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Roussaux, première conseillère ; - les conclusions de M. Michel, rapporteur public ; - et les observations de Me Komly-Nallier, représentant Mme B.... Considérant ce qui suit : 1. Mme B..., agente titulaire de la fonction publique d'Etat au grade d'ingénieur divisionnaire de l'agriculture et de l'environnement, exerçait les fonctions de chef de pôle " politique de l'eau " au sein du service eau biodiversité paysages de la .... Le vendredi 13 octobre 2017 au matin, elle a pris fortuitement connaissance d'un document, qui se trouvait sur la photocopieuse, établi par son supérieur hiérarchique (N+2). Ce document formalisait un échange qui avait eu lieu la veille entre la nouvelle cheffe du département " eau et milieux aquatiques ", affectée depuis le 1er septembre 2017, le chef du service " biodiversité eau patrimoine " et son adjoint. Il avait pour objet de reprendre l'ensemble des objectifs assignés au département " eau et milieux aquatiques " dont ceux assignés au pôle " politique de l'eau ", placé sous la responsabilité de Mme B.... Cette dernière interprétant ce document comme une réaffectation de ses propres missions à sa cheffe de département, s'est rendue dans le bureau de sa cheffe afin de lui demander des explications. Elle s'est ensuite dirigée vers le bureau du chef du service " biodiversité eau patrimoine ", dont celui-ci sortait. Mme B... l'a invectivé en lui adressant des reproches sur la gestion du service et le mépris dont faisaient preuve, selon elle, les responsables de pôle. Elle a manifesté sa colère et fait preuve d'un comportement agressif, donnant des coups de pieds dans les murs puis dans l'extincteur, elle a ensuite levé son casque de vélo en menaçant le chef de service avec son casque qu'elle a fini par taper contre le mur à la hauteur de la tête de son supérieur. Elle a ensuite quitté les locaux de la ..., puis réintégré son bureau vers 11h20, et a adressé un courriel à sa hiérarchie et aux organisations syndicales. La directrice adjointe du service a convenu d'un rendez-vous avec Mme B... le 16 octobre 2017. Cette dernière a été par la suite placée en congé de maladie pour motif de " burn-out " jusqu'au 7 janvier 2018. Mme B... a adressé le 22 novembre 2017 à son administration une demande tendant à ce que sa pathologie de " burn-out " soit reconnue comme une maladie professionnelle. Après un avis défavorable du 7 février 2018 de la commission de réforme, le directeur de la ... de ..., par une décision du 21 mars 2018, a opposé un refus à cette demande. Parallèlement, Mme B... a sollicité son administration le 16 mars 2018 afin que son accident du 13 octobre 2017 soit reconnu comme imputable au service. Par une décision du 19 avril 2018, après avis défavorable de la commission de réforme émis le 4 avril 2018, l'administration a rejeté cette demande. Par un jugement n° 1801002 du 26 avril 2019, le tribunal administratif de Besançon a annulé cette décision pour un motif de forme. En exécution de ce jugement, le directeur de la ... a, par une décision du 17 mai 2019, de nouveau rejeté la demande de l'intéressée. Par deux requêtes enregistrées à la cour sous les nos 19NC02006 et 20NC01180, qu'il y a lieu de joindre pour statuer par un seul arrêt, Mme B... relève appel, d'une part, du jugement n° 1800836 du 26 avril 2019 qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 21 mars 2018 du directeur de la ... qui a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de sa maladie professionnelle et, d'autre part, du jugement n° 1901268 du 19 mars 2020 qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 17 mai 2019 par laquelle le directeur de la ... a refusé de lui accorder le bénéfice du congé pour invalidité temporaire imputable au service au titre d'un accident intervenu le 13 octobre 2017. Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision du 21 mars 2018 : 2. Aux termes de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique d'Etat, alors applicable au litige : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...)2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. Le bénéfice de ces dispositions est subordonné à la transmission par le fonctionnaire, à son administration, de l'avis d'arrêt de travail justifiant du bien-fondé du congé de maladie, dans un délai et selon les sanctions, prévus en application de l'article 35. / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident ; (...) ". 3. Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service. 4. Il résulte de l'instruction que la ... de la région ... a connu depuis le 1er janvier 2016 des réorganisations successives des services résultant de la fusion des régions Bourgogne et Franche-Comté, laquelle a conduit à la suppression de certains des postes d'encadrement et à une réattribution des tâches. Le rapport annuel de 2017 du service médical relève chez les agents de la ... des troubles psychosociaux, avec notamment sur un plan clinique des manifestations d'anxiété généralisée observées lors des consultations. Il a été notamment constaté des troubles de l'adaptation bio-psychologique à des changements organisationnels, des conduites individuelles inappropriées et un défaut de communication. Ce contexte professionnel pathogène ressort également du compte-rendu de la réunion d'encadrement de la ... du 6 juin 2017. Mme B... a été affectée par la réorganisation des services puisqu'elle s'est vue attribuer d'autres tâches que celles dont elle avait la charge en perdant sa mission d'encadrement correspondant à son grade. Si la requérante a accepté la modification de son poste, les copies de courriels adressés à sa hiérarchie dès le début de l'année 2017 révèlent qu'elle souffrait de la charge importante de travail et alertait la direction sur son état d'épuisement et sur ses difficultés à absorber les reproches. Comme l'indique le certificat médical du médecin du travail du 21 décembre 2017, Mme B... lui a fait part de ses difficultés dans l'exercice de son métier et du mal-être au travail de plusieurs agents en raison notamment des changements organisationnels. C'est dans ce contexte de souffrance au travail que Mme B... s'est violement emportée le 13 octobre 2017, lors de la découverte d'un document qu'elle a interprété comme une nouvelle réattribution de ses missions. Le " burn out " qui a suivi a été considéré par l'expertise médicale du 20 décembre 2017, conduite par un médecin psychiatre, qui mentionne l'absence d'antécédent de nature dépressive, comme imputable au service. Ni la circonstance selon laquelle la requérante entretenait des liens compliqués avec sa hiérarchie, ni le fait que l'administration a accompagné l'intéressée dans sa prise de poste ne sont de nature à remettre en cause le lien entre la pathologie de la requérante et le service en l'absence de toute autre cause extérieure. Dans ces conditions, la maladie de Mme B... doit être regardée comme présentant un lien direct avec l'exercice de ses fonctions. Par suite, la décision du 21 mars 2018 portant refus de reconnaissance d'imputabilité au service de la maladie de Mme B... est entachée d'erreur d'appréciation. 5. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner le moyen tiré de l'irrégularité du jugement attaqué, ni de se prononcer sur les autres moyens soulevés par Mme B..., que la requérante est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement n° 1800836 attaqué du 26 avril 2019, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 21 mars 2018. Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision du 17 mai 2019 : 6. Aux termes de l'article 12 du décret n° 86-442 du 14 mars 1986, dans sa rédaction applicable au litige : " Dans chaque département, il est institué une commission de réforme départementale compétente à l'égard des personnels mentionnés à l'article 15. Cette commission, placée sous la présidence du préfet ou de son représentant, qui dirige les délibérations mais ne participe pas aux votes, est composée comme suit : (...) Les membres du comité médical prévu à l'article 6 du présent décret. /Le secrétariat de la commission de réforme départementale est celui du comité médical prévu à l'article 6 du présent décret. ". Aux termes de l'article 6 du même décret : " Dans chaque département, un comité médical départemental compétent à l'égard des personnels mentionnés à l'article 15 ci-après est constitué auprès du préfet. La composition de ce comité est semblable à celle du comité médical ministériel prévu à l'article 5. (...) ". Aux termes de cet article 5 : " (...) Ce comité comprend deux praticiens de médecine générale, auxquels est adjoint, pour l'examen des cas relevant de sa qualification, un spécialiste de l'affection pour laquelle est demandé le bénéfice du congé de longue maladie ou de longue durée prévu à l'article 34 (3e et 4e) de la loi du 11 janvier 1984 susvisée.(...) ". 7. Il est constant qu'aucun médecin spécialiste, dont la présence est requise en application des dispositions précitées indépendamment de l'objet de la demande, n'a siégé au sein de la commission de réforme qui s'est réunie le 4 avril 2018 alors qu'elle était saisie de la demande de reconnaissance d'imputabilité au service d'un accident survenu le 13 octobre 2017. Dès lors, alors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la commission de réforme qui s'est réunie le 4 avril 2018 ait été destinataire des mêmes informations que celle qui s'est tenue le 7 février 2018 pour l'appréciation de l'imputabilité au service de la maladie de Mme B..., l'absence d'un médecin psychiatre parmi les membres de la commission de réforme a entaché la composition de cette dernière d'irrégularité. Mme B... est donc fondée à soutenir que la décision du 17 mai 2019 a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière. 8. Par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens tirés de l'irrégularité du jugement attaqué, ni de se prononcer sur les autres moyens soulevés par la requérante, Mme B... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement n° 1901268 attaqué du 19 mars 2020, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 17 mai 2019. 9. Il résulte de tout ce qui précède que les jugements n° 1800836 du 26 avril 2019 et n° 1901268 du 19 mars 2020 ainsi que les décisions du directeur de la ... du 21 mars 2018 et du 17 mai 2019 doivent être annulés. Sur les conclusions à fin d'injonction : 10. Le motif d'annulation de la décision du 21 mars 2018 implique nécessairement, par application des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, d'enjoindre à la ..., dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, de reconnaître l'imputabilité au service de la pathologie de Mme B... à compter du 16 octobre 2017, date de son premier arrêt de travail et d'en tirer toutes les conséquences sur sa situation administrative. Du fait de cette injonction, l'annulation de la décision du 17 mai 2019 n'implique aucune mesure d'exécution. Les conclusions à fin d'injonction de la requête n° 20NC01180 doivent en conséquence être rejetées. Sur les frais liés aux instances : 11. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, partie perdante dans les présentes instances, la somme globale de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme B... et non compris dans les dépens. D E C I D E : Article 1er : Les jugements n° 1800836 du 26 avril 2019 et n° 1901268 19 mars 2020 du tribunal administratif de Besançon et les décisions des 21 mars 2018 et 17 mai 2019 du ... sont annulés. Article 2 : Il est enjoint à l'Etat de reconnaître l'imputabilité au service de la pathologie de Mme B... à compter du 16 octobre 2017, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et d'en tirer toutes les conséquences sur sa situation administrative. Article 3 : L'Etat versera à Mme B... la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête n° 20NC01180 est rejeté. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et à la ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Délibéré après l'audience du 17 mai 2022, à laquelle siégeaient : - Mme Ghisu-Deparis , présidente, -Mme Grossrieder, présidente assesseur - Mme Roussaux, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 juin 2022. La rapporteure, Signé : S. Roussaux La présidente, Signé : V. Ghisu-Deparis La greffière, Signé : N. Basso La République mande et ordonne à la ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, N. Basso 2 N° 19NC02006, 20NC01180
Cours administrative d'appel
Nancy
CAA de TOULOUSE, 2ème chambre, 07/06/2022, 21TL02288, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme A... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la décision du 9 avril 2019 par laquelle le directeur départemental des finances publiques de Lozère a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de son congé de longue durée et d'enjoindre à l'administration de procéder à la requalification de son congé de longue durée en congé de maladie professionnelle. Par un jugement n°1901870 du 13 avril 2021, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa requête. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 10 juin 2021, sous le n°21MA02288, au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, puis le 16 janvier 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n°21TL02288, Mme B... A..., représentée par la SELARL Heinrich avocats, agissant par Me Heinrich, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 13 avril 2021 ; 2°) d'annuler la décision du 9 avril 2019 par laquelle le directeur départemental des finances publiques de Lozère a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de son congé de longue durée ; 3°) d'enjoindre à la direction départementale des finances publiques de la Lozère d'une part, de prendre une décision la plaçant en congé d'invalidité temporaire imputable au service à compter du 4 janvier 2016 et jusqu'à ce qu'elle soit en état de reprendre son service et d'autre part, de reconstituer ses droits en lui versant le surplus de rémunération dont elle a été privée, en reconstituant ses droits auprès des organismes de retraite et lui remboursant les honoraires médicaux et frais directement entraînés par la maladie ou l'accident ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - l'aggravation importante de son état de santé est en lien avec l'épuisement professionnel engendré par ses fonctions au sein de la direction départementale des finances publiques de la Lozère, alors-même que la décompensation anxio-dépressive serait une rechute de troubles précédents de même nature ; - le stress induit par ses conditions de travail et son accident de trajet de 2013 sont à l'origine de l'aggravation de son état de santé. Par un mémoire en défense enregistré le 17 août 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête. Il entend se référer à ses écritures de première instance dont il produit une copie en appel. Par une ordonnance du 10 mars 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 12 avril 2022 à 12 heures. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Céline Arquié, première conseillère, - et les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. Mme A..., contrôleur des finances publiques affectée à la direction départementale des finances publiques de, a été placée en congé de longue durée à compter du 4 janvier 2016. Par une décision du 9 avril 2019, le directeur départemental des finances publiques de a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de la maladie dont elle souffre. Mme A... relève appel du jugement du 13 avril 2021 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision. Sur le bien-fondé du jugement: 2. Aux termes de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984, dans sa rédaction applicable au présent litige : " Le fonctionnaire en activité a droit :/ (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants (...)/ Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident ;/ (...) 4° A un congé de longue durée, en cas de tuberculose, maladie mentale, affection cancéreuse, poliomyélite ou déficit immunitaire grave et acquis, de trois ans à plein traitement et de deux ans à demi-traitement (...) ". 3. Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct, mais non nécessairement exclusif, avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service. 4. Il est constant que Mme A... a présenté au début de l'année 2012, avant d'exercer ses fonctions à la direction départementale des finances publiques de la Lozère, des troubles anxiodépressifs et des troubles fibromyalgiques reconnus le 20 janvier 2016 comme maladie professionnelle par le régime général de la sécurité sociale. Elle soutient que l'aggravation de son état de santé serait en relation directe avec les changements de poste qu'elle a connus depuis son affectation à la direction départementale des finances publiques de au mois de mai 2013, lesquels ont nécessité des efforts d'adaptation, la participation à de nombreuses formations, son affectation à mi-temps sur des fonctions d'agent commissionné et au sein du pôle recouvrement spécialisé, et plus généralement un manque de reconnaissance de sa hiérarchie au regard de ses efforts, du volume et de la qualité de son travail. 5. Pour justifier que la maladie dont elle souffre serait imputable au service, Mme A... produit des certificats médicaux qui attestent d'une décompensation anxio-dépressive importante dans un contexte d'épuisement professionnel et des conditions de travail qui ont pu favoriser l'aggravation de sa symptomatologie. Toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que sa charge de travail, dont le périmètre et les missions étaient répartis à 50% de son temps de travail sur des fonctions d'agent commissionné des finances publiques et à 50% de son temps de travail en tant qu'agent du pôle de recouvrement spécialisé, aurait été inadaptée ou aurait excédé les attributions qui pouvaient normalement lui être confiées. Le compte-rendu annuel d'entretien professionnel du 20 mars 2015 portant sur l'année 2014, rédigé par son supérieur hiérarchique, souligne effectivement que Mme A... a dû suivre des formations et qu'elle a déployé d'importants efforts pour prendre la mesure de ses nouveaux métiers. Il met également en avant la satisfaction du service devant l'investissement et la conscience professionnelle de Mme A..., de sorte que l'intéressée n'est pas fondée à invoquer un manque de reconnaissance de sa hiérarchie au regard de ses efforts, du volume et de la qualité de son travail. Mme A... y faisait part de son investissement afin de bénéficier de réductions d'ancienneté et de son absence de perspective de carrière en raison de son entrée tardive dans l'administration afin de justifier cette bonification, sans mentionner aucune surcharge ou difficulté particulière. Elle indiquait d'ailleurs poursuivre sa préparation pour présenter le concours d'inspecteur des finances publiques. Par ailleurs, si le travail de Mme A... donnait satisfaction, il ressort du rapport du 20 septembre 2018 du responsable du pôle recouvrement spécialisé que son pointillisme nuisait à l'efficacité de son travail. Enfin il est constant qu'à la suite d'une rupture du ligament faisant suite à un accident de trajet domicile-travail intervenu le 12 juin 2013, Mme A..., qui a subi le 3 février 2015 une intervention, a été placée en congé maladie du 3 février au 31 août 2015, puis en mi-temps thérapeutique du 1er septembre au 30 novembre et en congé ordinaire au mois de décembre 2015, de sorte que l'intéressée a été peu présente au cours de l'année 2015 précédant la période au cours de laquelle elle a été placée en congé de longue durée. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a estimé que la pathologie de Mme A... ou l'aggravation de celle préexistante n'était pas imputable au service. 6. Il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande. Sur les frais liés au litige : 7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à Mme A... de la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens D E C I D E : Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Délibéré après l'audience du 24 mai 2022 à laquelle siégeaient : Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre, Mme Blin, présidente assesseure, Mme Arquié, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 juin 2022. La rapporteure, C. Arquié La présidente, A. Geslan-Demaret La greffière, M-M. Maillat La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21TL02288
Cours administrative d'appel
Toulouse
Conseil d'État, 7ème chambre, 14/06/2022, 445971, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : M. E... C... a demandé au tribunal des pensions de Marseille d'annuler la décision du 21 décembre 2017 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande de pension militaire d'invalidité. Par un jugement n° 18/00020 du 31 janvier 2019, le tribunal des pensions militaires de Marseille a invité la ministre des armées, avant-dire-droit, d'une part, à se prononcer sur l'imputabilité au service des séquelles de fracture de la branche montante droite de la mandibule dont souffre M. C... et, d'autre part, à produire tout document relatif au suicide en septembre 2012 d'un légionnaire en charge d'une mission de surveillance dans le cadre du plan Vigipirate. Par un jugement n° 18/00020 du 8 août 2019, le tribunal des pensions militaires de Marseille a annulé partiellement la décision de la ministre des armées du 21 décembre 2017 et attribué à M. C... à compter du 27 juillet 2015 une pension militaire d'invalidité au titre, d'une part, d'un syndrome anxio-dépressif au taux de 30 %, dont 20 % imputable au service et, d'autre part, des séquelles de fracture de la branche montante droite de la mandibule aux taux de 20 %. Par un arrêt n°s 19MA04851, 19MA05730 du 6 octobre 2020, la cour administrative d'appel de Marseille a, sur l'appel de la ministre des armées, d'une part, annulé les jugements du tribunal des pensions de Marseille du 31 janvier et du 8 août 2019 et la décision de la ministre des armées du 21 décembre 2017 en tant qu'elle a refusé d'accorder à M. C... un droit à pension militaire d'invalidité pour l'infirmité " séquelles de fracture de la branche montante droite de la mandibule ", d'autre part, lui a reconnu le droit, à compter du 27 juillet 2015, à une pension militaire d'invalidité au titre de cette infirmité au taux de 20 %, et rejeté le surplus des conclusions de M. C.... Par un pourvoi, enregistré le 5 novembre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. C... demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler cet arrêt en tant qu'il a, d'une part, rejeté ses conclusions tendant à l'obtention d'une pension militaire d'invalidité au titre de son infirmité " syndrome anxio-dépressif ", d'autre part, annulé le jugement du tribunal des pensions du 31 janvier 2019 ; 2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de la ministre des armées ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; - la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 ; - le décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018 ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Frédéric Gueudar Delahaye, conseiller d'Etat, - les conclusions de M. A... D... de Vendeuil, rapporteur public ;Considérant ce qui suit : 1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. C..., ressortissant ukrainien, s'est engagé dans la légion étrangère en 2009. A la suite de sa radiation des cadres le 1er avril 2013, il a formé le 27 juillet 2015 une demande de pension militaire d'invalidité au titre d'un syndrome anxio-dépressif, des séquelles d'une scapulalgie droite et des séquelles d'une fracture de la branche montante droite de la mandibule. La ministre des armées a rejeté sa demande par une décision du 21 décembre 2017. Par un jugement avant-dire-droit du 31 janvier 2019, le tribunal des pensions de Marseille a, d'une part, invité la ministre des armées à se prononcer sur l'imputabilité au service de l'infirmité liée aux séquelles de la fracture de la mandibule dont souffre M. C..., d'autre part, ordonné à l'administration produire tout document relatif au suicide en septembre 2012 d'un légionnaire en charge d'une mission de surveillance dans le cadre du plan Vigipirate. Par un jugement du 8 août 2019, ce même tribunal a, d'une part, partiellement annulé la décision ministérielle du 21 décembre 2017 rejetant la demande de pension formée par M. C... le 27 juillet 2015, d'autre part, octroyé à M. C... une pension militaire d'invalidité au titre du syndrome anxio-dépressif et des séquelles de fracture de la mandibule. M C... se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 6 octobre 2020 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a, sur l'appel de la ministre des armées, d'une part, annulé les jugements du tribunal des pensions de Marseille du 31 janvier et du 8 août 2019, ainsi que la décision de la ministre des armées du 21 décembre 2017 en tant qu'elle a rejeté les conclusions de la demande de M. C... tendant à l'obtention d'une pension militaire d'invalidité pour l'infirmité " séquelles de fracture de la branche montante droite de la mandibule ", d'autre part, fait droit à sa demande de pension militaire d'invalidité, à compter du 27 juillet 2015, au titre de cette infirmité au taux de 20 % et rejeté le surplus de ses conclusions. 2. Aux termes de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, dans sa rédaction applicable à l'espèce : " Ouvrent droit à pension : / 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'évènements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; / 2° Les infirmités résultant de maladies contractées par le fait ou à l'occasion du service ; / 3° L'aggravation par le fait ou à l'occasion du service d'infirmités étrangères au service ; (...) ". Aux termes de l'article L. 4 du même code : " Les pensions sont établies d'après le degré d'invalidité. / Sont prises en considération les infirmités entraînant une invalidité égale ou supérieure à 10 %. / Il est concédé une pension : / 1° Au titre des infirmités résultant de blessures, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse 10 % ; 2° Au titre d'infirmités résultant de maladies associées à des infirmités résultant de blessures, si le degré total d'invalidité atteint ou dépasse 30 % ; 3° Au titre d'infirmité résultant exclusivement de maladie, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse : 30 % en cas d'infirmité unique ; 40 % en cas d'infirmités multiples. / En cas d'aggravation par le fait ou à l'occasion du service d'une infirmité étrangère à celui-ci, cette aggravation seule est prise en considération, dans les conditions définies aux alinéas précédents. / Toutefois, si le pourcentage total de l'infirmité aggravée est égal ou supérieur à 60 %, la pension est établie sur ce pourcentage ". Sur l'arrêt en tant qu'il a annulé le jugement avant-dire-droit du 31 janvier2019 : 3. En estimant, pour annuler le jugement avant-dire-droit du tribunal des pensions militaires de Marseille du 31 janvier 2019 ordonnant à l'administration de produire tout document relatif au suicide en septembre 2012 d'un légionnaire en charge d'une mission de surveillance dans le cadre du plan Vigipirate dont M. C... soutenait qu'il était en rapport avec son état anxio-dépressif, que cette mesure d'instruction était inutile dès lors que M. C... n'avait produit devant elle qu'un article de presse relatant cet événement, la cour administrative d'appel de Marseille s'est livrée à une appréciation souveraine exempte de dénaturation. M. C... n'est, par suite, pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué en tant qu'il a annulé le jugement avant-dire-droit du tribunal des pensions militaires de Marseille du 31 janvier 2019. Sur l'arrêt en tant qu'il se prononce sur le taux de la pension militaire d'invalidité : 4. Il résulte des dispositions de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre citées au point 2 que, d'une part, une infirmité doit être regardée comme résultant d'une blessure lorsqu'elle trouve son origine dans une lésion soudaine consécutive à un fait précis de service, d'autre part, pour que, dans le cas d'infirmités multiples résultant de maladie et de blessure, l'aggravation par le fait ou à l'occasion du service d'une infirmité étrangère à celui-ci ouvre droit à pension, le taux d'aggravation imputable au service doit atteindre à lui seul le minimum indemnisable de 10 % et le degré d'invalidité total entrainé par ces infirmités multiples doit être supérieur ou égal à 30 %. 5. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que la cour a fait droit à la demande de pension militaire d'invalidité de M. C... au titre de l'infirmité " séquelles de fracture de la branche montante droite de la mandibule " au taux de 20 % au motif qu'elle résultait d'une blessure imputable au service. Il suit de là qu'en se fondant, pour écarter la demande de M. C... au titre du " syndrome anxio-dépressif ", sur les dispositions du 3° de l'article L. 4 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre qui s'appliquent aux infirmités résultant exclusivement de maladies, et non sur celles du 2° de l'article L. 4 du même code relatives aux cas de cumul d'infirmités résultant de blessure et de maladie, la cour administrative d'appel a commis une erreur de droit. 6. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. C... est seulement fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque en tant qu'il a statué sur ses conclusions tendant à ce que lui soit reconnu un droit à pension au titre de l'infirmité " syndrome anxio-dépressif ". 7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler, dans cette mesure, l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative. 8. Selon l'article L. 9 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, applicable au litige : " (...) Le taux de la pension définitive ou temporaire est fixé, dans chaque grade, par référence au degré d'invalidité apprécié de 5 en 5 jusqu'à 100 %. / Quand l'invalidité est intermédiaire entre deux échelons, l'intéressé bénéficie du taux afférent à l'échelon supérieur (...) ". Aux termes de l'article L. 14 du même code : " Dans le cas d'infirmités multiples dont aucune n'entraîne l'invalidité absolue, le taux d'invalidité est considéré intégralement pour l'infirmité la plus grave et pour chacune des infirmités supplémentaires, proportionnellement à la validité restante. / A cet effet, les infirmités sont classées par ordre décroissant de taux d'invalidité. / Toutefois, quand l'infirmité principale est considérée comme entraînant une invalidité d'au moins 20 %, les degrés d'invalidité de chacune des infirmités supplémentaires sont élevés d'une, de deux ou de trois catégories, soit de 5, 10, 15 %, et ainsi de suite, suivant qu'elles occupent les deuxième, troisième, quatrième rangs dans la série décroissante de leur gravité ". 9. Il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise du docteur B..., médecin psychiatre, mandaté par l'administration pour se prononcer sur les troubles dont souffre M. C... depuis octobre 2012, que l'intéressé présente un " syndrome anxio-disthymique sur trouble de la personnalité et conduites addictives ", entraînant une invalidité globale de 30 % dont les deux tiers, soit 20 % doivent être regardés comme imputables au service, ce que la ministre des armées ne conteste pas sérieusement. Il suit de là que, dès lors que M. C... s'était déjà vu reconnaître un droit à pension militaire d'invalidité au titre des " séquelles de fracture de la branche montante droite de la mandibule " au taux de 20 %, le degré d'invalidité de l'infirmité résultant de son " syndrome anxio-dépressif " doit être augmenté de 5 %, soit un taux d'invalidité pour cette seconde infirmité de 25 % à appliquer proportionnellement à la validité restante s'élevant à 80 %, ce qui conduit à retenir un taux de 20 % à ce titre. Le degré d'invalidité résultant de ces deux infirmités s'établissant au total à 40 %, M. C... est fondé à demander l'annulation de la décision de la ministre des armées du 21 décembre 2017 rejetant sa demande de pension formée le 27 juillet 2015 et l'octroi, en application des dispositions combinées du 2° de l'article L. 4 et de l'article L. 9 du code du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, d'une pension militaire d'invalidité au taux de 40 %. 10. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à M. C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D E C I D E : -------------- Article 1er : L'arrêt du 6 octobre 2020 de la cour administrative d'appel de Marseille est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de la demande de M. C... tendant à l'obtention d'une pension militaire d'invalidité au titre de l'infirmité " syndrome anxio-dépressif ". Article 2 : La décision de la ministre des armées du 21 décembre 2017 est annulée. Article 3 : Il est attribué à M. C..., à compter du 27 juillet 2015, une pension militaire d'invalidité au taux de 40 % pour les infirmités " séquelles de fracture de la branche montante droite de la mandibule " et " syndrome anxio-dépressif ". Article 4 : Le surplus des conclusions du pourvoi est rejeté Article 5 : L'Etat versera à M. C... une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 6 : La présente décision sera notifiée à M. E... C... et au ministre des armées. Délibéré à l'issue de la séance du 17 mai 2022 où siégeaient : M. Gilles Pellissier, assesseur, présidant ; M. Benoît Bohnert, conseiller d'Etat et M. Frédéric Gueudar Delahaye, conseiller d'Etat-rapporteur. Rendu le 14 juin 2022. Le président : Signé : M. Gilles Pellissier Le rapporteur : Signé : M. Frédéric Gueudar Delahaye La secrétaire : Signé : Mme Corinne Sak ECLI:FR:CECHS:2022:445971.20220614
Conseil d'Etat
CAA de DOUAI, 3ème chambre, 09/06/2022, 21DA02109, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 10 avril 2019 par lequel le directeur territorial Nord-Picardie du Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (CEREMA) a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de la " rechute " déclarée le 5 avril 2018 de son accident du 7 juillet 2016 reconnu imputable au service ainsi que des arrêts de travail prescrits du 5 mars 2018 au 12 avril 2019, d'annuler l'arrêté du 4 mars 2021 du directeur général du CEREMA en tant qu'il fixe au 11 septembre 2020 la date de consolidation des conséquences de son accident du 7 juillet 2016 reconnu imputable au service et de mettre à la charge du CEREMA la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 7611 du code de justice administrative. Par un jugement n° 1908847 du 23 juin 2021, le tribunal administratif de Lille a estimé qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions à fin d'annulation dirigées contre l'arrêté du 10 avril 2019 et a rejeté le surplus de sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 25 août 2021, Mme B..., représentée par Me Legros, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler l'arrêté du 10 avril 2019 par lequel le directeur territorial Nord-Picardie du Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (CEREMA) a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de la " rechute " déclarée le 5 avril 2018 de l'accident du 7 juillet 2016 reconnu imputable au service ainsi que des arrêts de travail prescrits du 5 mars 2018 au 12 avril 2019 ; 3°) d'annuler l'arrêté du 4 mars 2021 du directeur général du CEREMA en tant qu'il fixe au 11 septembre 2020 la date de consolidation de l'accident du 7 juillet 2016 reconnu imputable au service ; 4°) de mettre à la charge du CEREMA la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 7611 du code de justice administrative. Elle soutient que les arrêtés des 10 avril 2019 et 4 mars 2021 sont entachés d'erreur d'appréciation. Par une ordonnance du 10 mars 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 8 avril 2022. Un mémoire pour le Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (CEREMA), représenté par la Selarl Centaure Avocats, a été produit le 3 mai 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Nil Carpentier-Daubresse, premier conseiller, - et les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. Mme A... B..., technicienne supérieure principale du développement durable, est affectée à la direction territoriale Nord-Picardie, devenue Hauts de France, du centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (CEREMA). Le 7 juillet 2016, elle a été victime d'un accident qui a été reconnu imputable au service. Par un arrêté du 10 avril 2019, le directeur territorial Nord-Picardie du CEREMA a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de la " rechute " qu'elle a déclarée le 5 avril 2018 de son accident de service et estimé que les arrêts de travail prescrits du 5 mars 2018 au 12 avril 2019 devaient être comptabilisés en congés de maladie ordinaire. Par un arrêté du 4 mars 2021, le directeur général du CEREMA a abrogé l'arrêté du 10 avril 2019, a placé Mme B... en congé pour invalidité temporaire imputable au service du 5 avril 2018 au 11 septembre 2020, a fixé la date de consolidation des conséquences de son accident de service du 7 juillet 2016 au 11 septembre 2020 et l'a rétablie dans ses droits statutaires au titre de la période du 5 avril 2018 au 11 septembre 2020. Mme B... relève appel du jugement du 23 juin 2021 par lequel le tribunal administratif de Lille a estimé qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions à fin d'annulation dirigées contre l'arrêté du 10 avril 2019 et a rejeté le surplus de sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 4 mars 2021 en tant qu'il fixe au 11 septembre 2020 la date de consolidation de son accident de service survenu le 7 juillet 2016. Sur la régularité du jugement : 2. Pour estimer qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 10 avril 2019, les premiers juges ont retenu que celui-ci avait été abrogé par un arrêté du 4 mars 2021, lequel reconnaissait l'imputabilité au service des arrêts de travail de Mme B... du 5 avril 2018 au 11 septembre 2020, et qu'il était constant que l'arrêté du 10 avril 2019 n'avait pas reçu d'exécution dès lors qu'il avait été suspendu par l'administration par une décision du 21 août 2019 indiquant maintenir sa rémunération. Il ne ressort pas des pièces du dossier, alors que l'intéressée ne conteste pas en appel le motif du non-lieu à statuer retenu par les premiers juges, que l'arrêté du 10 avril 2019 a reçu application. Dans ces conditions, eu égard à son abrogation par l'arrêté du 4 mars 2021 qui est, sur ce point, devenu définitif puisque l'appelante ne le conteste qu'en tant qu'il fixe la date de consolidation de son accident de service, c'est à bon droit que le tribunal administratif de Lille a estimé que les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 10 avril 2019 présentées par Mme B... étaient devenues sans objet et qu'il n'y avait, dès lors, pas lieu d'y statuer. Sur le bien-fondé du jugement : 3. Aux termes des dispositions de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, dans sa rédaction alors en vigueur : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. Le bénéfice de ces dispositions est subordonné à la transmission par le fonctionnaire, à son administration, de l'avis d'arrêt de travail justifiant du bien-fondé du congé de maladie, dans un délai et selon les sanctions prévus en application de l'article 35. / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident ". 4. La date de consolidation de l'état de santé d'un agent correspond, sauf en matière de pathologie évolutive, non à la date de la guérison, mais à celle à laquelle l'état de santé peut être considéré comme définitivement stabilisé. Le juge de l'excès de pouvoir exerce un contrôle normal sur la date de consolidation retenue par l'autorité administrative. 5. Il ressort des pièces du dossier qu'à la suite d'une chute survenue le 7 juillet 2016, Mme B... a fait l'objet d'un arrêt de travail de son médecin traitant à compter du lendemain qui relevait les symptômes suivants : " traumatisme de la cheville droite, entorse, douleur du tendon d'Achille droit, contusion du genou gauche, cervicalgies irradiant dans le membre supérieur gauche ". Elle a notamment fait l'objet d'une opération, le 26 juin 2018, pour des douleurs cervico-brachiales. Pour contester la date de consolidation du 11 septembre 2020 retenue par le directeur général du CEREMA dans l'arrêté du 4 mars 2021 en litige, Mme B... se borne à produire, pour la première fois en appel, une attestation de son médecin oto-rhino-laryngologiste du 17 août 2021 mentionnant la nécessité de poursuivre un traitement médicamenteux et une rééducation vestibulaire. Toutefois, cette circonstance est insuffisante, à elle seule, pour remettre en cause la date de consolidation du 11 septembre 2020 qui a été retenue au regard de l'expertise médicale circonstanciée établie le 21 décembre 2020 sur la base notamment de l'examen médical de l'intéressée le 24 novembre 2020, et en prenant en compte l'ensemble des résultats des examens médicaux réalisés en particulier en 2019 et 2020. 6. Dans ces conditions, il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a estimé qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions à fin d'annulation dirigées contre l'arrêté du 10 avril 2019 et a rejeté le surplus de sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 4 mars 2021 en tant qu'il fixe au 11 septembre 2020 la date de consolidation des conséquences de son accident du 7 juillet 2016 reconnu imputable au service. Sur les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge du centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (CEREMA) qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante au titre des frais exposés par Mme B... et non compris dans les dépens. DÉCIDE : Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (CEREMA). Délibéré après l'audience publique du 25 mai 2022 à laquelle siégeaient : - Mme Ghislaine Borot, présidente de chambre, - M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur, - M. Nil Carpentier-Daubresse, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 juin 2022. Le rapporteur, Signé : N. Carpentier-Daubresse La présidente de chambre, Signé : G. Borot La greffière, Signé : C. Huls-Carlier La République mande et ordonne à la ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme La greffière, C. Huls-Carlier 1 2 N° 21DA02109 1 3 N°"Numéro"
Cours administrative d'appel
Douai
CAA de TOULOUSE, 2ème chambre, 07/06/2022, 21TL02080, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la décision du 26 août 2019 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande de révision de sa pension d'invalidité et d'ordonner une expertise médicale. Par un jugement n° 1905798 du 16 avril 2021, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et des mémoires, enregistrés le 27 mai 2021 et le 8 novembre 2021 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille sous le n°21MA02080, puis le 1er mars 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n°21TL02080, et un mémoire en réplique enregistré le 9 mars 2022, M. B..., représenté par Me Efang, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du 16 avril 2021 ; 2°) d'annuler la décision du 26 août 2019 de la ministre des armées ; 3°) d'ordonner une nouvelle expertise médicale ; 4°) de statuer sur les dépens. Il soutient que : - l'expertise a été rendue seize mois après sa demande de révision de sa pension d'invalidité ; le temps ainsi écoulé lui permettait de se faire suivre médicalement ; - aucun des praticiens consultés n'a attribué les douleurs aigües ressenties à son âge avancé ; - le pincement en L5-S1 ainsi que le basculement du bassin de 18 mm caractérisent l'aggravation de son infirmité justifiant la révision de sa pension d'invalidité ; - il a bien été victime d'un accident de service dû à une chute en juillet 1962. Par un mémoire en défense, enregistré le 27 janvier 2022, la ministre des armées conclut au rejet de la requête. Elle fait valoir que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés. Par ordonnance du 27 décembre 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 27 mars 2022. M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 3 septembre 2021. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - la loi n° 97-641 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Anne Blin, présidente-assesseure, - et les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. M. B..., né le 4 janvier 1936, qui a servi dans l'armée de terre du 25 mars 1954 au 24 mars 1981, a été victime d'un accident de service le 29 juin 1962 lors de la guerre d'Algérie. Il a bénéficié d'une pension militaire d'invalidité révisée à compter du 18 février 2008, au taux global de 60%, au titre de l'infirmité " Lombosciatalgies chroniques gauches de type L5. Arthrodèse L4-L5 le 18 octobre 2005. Périmètre de marche limité à 500 mètres. Algies de la face antéro-externe du pied. Déficit des releveurs du pied gauche : 40% ", et au titre de l'infirmité " Troubles colitiques avec hémorroïdes, troubles du transit avec ballonnements et douleurs abdominales ; fréquentes poussées congestives hémorroïdaires avec diarrhée, hémorroïdectomie partielle : 25% + 5 ". Le 6 octobre 2017, il a sollicité la révision de sa pension pour aggravation de l'infirmité principale. La ministre des armées a, par décision du 26 août 2019, rejeté sa demande au motif qu'aucune aggravation n'a été constatée après expertise médicale. Par jugement du 16 avril 2021 dont M. B... relève appel, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande. 2. Aux termes de l'article L. 121-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " Ouvrent droit à pension : 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; / (...). " Aux termes de l'article L. 121-2 du même code : " Lorsqu'il n'est pas possible d'administrer ni la preuve que l'infirmité ou l'aggravation résulte d'une des causes prévues à l'article L. 2, ni la preuve contraire, la présomption d'imputabilité au service bénéficie à l'intéressé à condition : / (...) / 3° En tout état de cause, que soit établie, médicalement, la filiation entre la blessure ou la maladie ayant fait l'objet de la constatation et l'infirmité invoquée " Selon l'article L. 121-5 : " La pension est concédée : / 1° Au titre des infirmités résultant de blessures, si le taux d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse 10 % ; / (...). " Enfin, l'article L. 154-1 du même code, alors en vigueur, dispose : " le titulaire d'une pension d'invalidité concédée à titre définitif peut en demander la révision en invoquant l'aggravation d'une ou plusieurs des infirmités en raison desquelles cette pension a été accordée. Cette demande est recevable sans condition de délai. La pension ayant fait l'objet de la demande est révisée lorsque le pourcentage d'invalidité résultant de l'infirmité ou de l'ensemble des infirmités est reconnu supérieur de 10 points par rapport au pourcentage antérieur. Toutefois, l'aggravation ne peut être prise en considération que si le supplément d'invalidité est exclusivement imputable aux blessures et aux maladies constitutives des infirmités pour lesquelles la pension a été accordée. La pension définitive révisée est concédée à titre définitif ". Il résulte de ces dispositions que le droit à pension est destiné à réparer toutes les conséquences des faits de service dommageables telles qu'elles se révèlent par suite de l'évolution physiologique, pour autant qu'aucune cause étrangère, telle qu'une affection distincte de l'affection pensionnée, ne vienne, pour sa part, aggraver l'état de l'intéressé. Ainsi l'aggravation de l'infirmité initiale, si elle est seulement due au vieillissement, peut justifier une révision du taux de la pension. En revanche, si le vieillissement cause une nouvelle infirmité, distincte de l'infirmité pensionnée, qui contribue à l'aggravation de celle-ci, les dispositions précitées de l'article L. 154-1 font obstacle à cette révision, dès lors que l'aggravation est due à une cause étrangère à l'infirmité pensionnée. 3. En premier lieu, la circonstance que l'expertise a été rendue seize mois après le dépôt de la demande de révision présentée par M. B... est dépourvue d'incidence sur la régularité de la procédure suivie, dès lors qu'aucune disposition alors applicable du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ne prescrit le délai dans lequel celle-ci doit être diligentée par la ministre des armées. 4. En second lieu, M. B..., dont l'infirmité principale résulte des conséquences d'une chute dont il a été victime le 29 juin 1962 pendant la guerre d'Algérie, soutient que le pincement en L5-S1 ainsi que le basculement du bassin de 18 mm au lieu de 12 mm constaté le 30 août 2006, caractérisent l'aggravation de son infirmité justifiant la révision de sa pension d'invalidité. Toutefois, il résulte de l'instruction que l'expert a relevé l'absence de modification notable du tableau radio-clinique à l'issue d'un examen clinique et radiographique particulièrement complet, ce que ne viennent pas infirmer les pièces médicales produites qui ont été examinées par l'expert. Si l'appelant fait état de douleurs insoutenables, celles-ci ne viennent pas caractériser par elles-mêmes une aggravation de l'infirmité au sens des dispositions prévues à l'article L. 154-1 du code précité, ainsi que l'a relevé la commission de réforme dans son avis conforme rendu le 21 août 2019 précisant que les douleurs ne sont pas prises en compte dans le barème d'indemnisation sur le plan des séquelles fonctionnelles. Ainsi, il ne résulte pas de l'instruction que l'aggravation de l'infirmité principale dont est atteint M. B... serait supérieure de 10 points au pourcentage antérieur qui lui a été concédé. 5. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il y ait lieu d'ordonner une expertise médicale qui ne présente pas de caractère d'utilité, M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande. Ses conclusions demandant de statuer sur les dépens doivent dès lors en tout état de cause être également rejetées. D E C I D E : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre des armées. Délibéré après l'audience du 24 mai 2022, à laquelle siégeaient : Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre, Mme Blin, présidente assesseure, Mme Arquié, première conseillère, Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 juin 2022. La rapporteure, A. Blin La présidente, A. Geslan-Demaret La greffière, M-M. Maillat La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. N° 21TL02080 N° 21TL02080 2
Cours administrative d'appel
Toulouse
Conseil d'État, 7ème chambre, 10/06/2022, 454655, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé par le ministre de la défense suite à son recours préalable devant la commission des recours des militaires du 26 février 2015 et de condamner l'Etat à lui verser les sommes de 148 956 euros et de 50 000 euros au titre de ses préjudices financier et moral. Par un jugement n° 1502893 du 22 octobre 2018, le tribunal administratif de Toulon a condamné l'Etat à lui verser la somme de 158 956 euros assorties des intérêts au taux légal à compter de sa demande d'indemnisation préalable du 1er décembre 2014. Par un arrêt n° 18MA05442 du 11 juin 2021, la cour administrative de Marseille, sur un appel de la ministre des armées, a ramené la somme que la ministre des armées a été condamnée à verser à M. C... à 67 314,17 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter de sa demande d'indemnisation préalable. Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire enregistrés le 16 juillet et le 15 octobre 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. C... demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler cet arrêt ; 2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Elise Adevah-Poeuf, maître des requêtes, - les conclusions de M. Marc Pichon de Vendeuil, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, au cabinet Rousseau, Tapie, avocat de M. C... ;Considérant ce qui suit : 1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. C..., lieutenant colonel de l'armée de terre, a développé, à compter de l'année 2007, des troubles anxieux et dépressifs. Par une décision du 1er décembre 2009, le ministre de la défense lui a refusé l'octroi d'une pension militaire d'invalidité au motif que sa maladie n'était pas imputable au service. Ce refus a été annulé par une décision du Conseil d'Etat n° 366628 du 22 septembre 2014. L'intéressé a alors formé le 1er décembre 2014 une demande préalable d'indemnisation des préjudices consécutifs à l'absence de reconnaissance de l'imputabilité de sa maladie au service, implicitement rejetée par le ministre de la défense. Par jugement du 22 octobre 2018, le tribunal administratif de Toulon a condamné l'Etat à verser à M. C... la somme de 158 956 euros au titre de ces préjudices. Par un arrêt du 11 juin 2021, la cour administrative de Marseille, sur l'appel de la ministre des armées, a ramené cette somme à 67 314,17 euros. M. C..., qui se pourvoit en cassation contre cet arrêt, doit être regardé comme demandant l'annulation de l'arrêt de la cour administrative d'appel en tant seulement qu'il a limité l'indemnisation du préjudice lié aux pertes de pension de retraite à la somme de 4 956 euros. 2. Aux termes de l'article L. 4138 12 du code de la défense prévoit que : " Le congé de longue durée pour maladie est attribué, après épuisement des droits de congé de maladie ou des droits du congé du blessé prévus aux articles L. 4138 3 et L. 4138 3 1, pour les affections dont la liste est fixée par décret en Conseil d'Etat. / Lorsque l'affection survient du fait ou à l'occasion de l'exercice des fonctions ou à la suite de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, ce congé est d'une durée maximale de huit ans. Le militaire perçoit, dans les conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, sa rémunération pendant cinq ans, puis une rémunération réduite de moitié les trois années qui suivent. / Dans les autres cas, ce congé est d'une durée maximale de cinq ans et le militaire de carrière perçoit, dans les conditions définies par décret en Conseil d'Etat, sa rémunération pendant trois ans, puis une rémunération réduite de moitié les deux années qui suivent. (...) / Le militaire placé en congé de longue durée pour maladie continue à figurer sur la liste d'ancienneté, concourt pour l'avancement à l'ancienneté et, dans les cas visés au deuxième alinéa du présent article, pour l'avancement au choix. Le temps passé en congé est pris en compte pour l'avancement et pour les droits à pension de retraite. (...) ". Aux termes de l'article R. 4138-56 du même code : " Le militaire ayant bénéficié de la totalité de ses droits à congés de longue durée pour maladie est, s'il demeure dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, radié des cadres ou rayé des contrôles pour réforme définitive après avis de la commission mentionnée au 4° de l'article L. 4139-14. (...) ". 3. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. C... a été placé en congé de longue durée pour maladie du 7 mai 2008 au 6 mai 2013 puis a été radié des cadres d'office à compter du 6 juin 2013. Toutefois, du fait de la reconnaissance de l'imputabilité au service de sa pathologie par la décision du Conseil d'Etat du 22 décembre 2014 mentionnée au point 1, M. C... aurait dû bénéficier, en application de l'article L. 4138-12 du code de la défense cité au point 2, d'une solde complète pendant une durée de cinq années à compter du 7 mai 2008 puis d'une solde diminuée de moitié pendant trois années à compter du 6 mai 2013. 4. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que, pour calculer le préjudice financier lié à la perte de rémunération subie par M. C... pendant son congé de longue durée pour maladie, la cour administrative d'appel de Marseille a reconstitué le montant de la solde que M. C... aurait dû percevoir de 2013 à 2016 en déduisant le montant de la pension de retraite qui lui a été versé au cours de cette période. Il ressortait toutefois des écritures de M. C... que ce dernier avait déduit ces mêmes sommes dans ses conclusions tendant à l'indemnisation du préjudice lié à la perte de retraite consécutive à sa radiation des cadres à compter du 6 juin 2013. En condamnant l'Etat à verser à M. C... la somme de 4 956 euros au titre du préjudice lié à la perte de retraite sans tenir du compte du fait que la somme demandée par M. C... tenait déjà compte de la déduction des pensions de retraite effectivement perçues entre 2013 et 2016, la cour a dénaturé les pièces du dossier. 5. Il résulte de ce qui précède que M. C... est fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque en tant qu'il a limité l'indemnisation du préjudice lié aux pertes de pension de retraite à la somme de 4 956 euros. 6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, dans la limite de la cassation prononcée. 7. Il résulte de l'instruction, et notamment de l'évaluation fournie par le service des retraites de l'Etat, non contestée par le requérant, qu'à la date du 8 mai 2016 à laquelle M. C... aurait dû être placé en position de retraite, l'intéressé aurait dû percevoir la somme annuelle brute de 33 119,33 euros au lieu de la somme annuelle brute de 30 493,42 euros correspondant à une pension de retraite liquidée au 2 juillet 2013, soit une perte annuelle brute de 2 625,91 euros. Au regard du coefficient de rente viagère tel qu'établi par l'administration et non contesté par M. C..., le préjudice lié à la perte de retraite subie par le requérant doit donc être évalué à la somme 85 801,61euros, et non à la somme de 89 916 euros qu'il demande. 8. M. C... a droit aux intérêts au taux légal correspondant à l'indemnité de 85 801,61euros euros à compter de la date de réception de sa demande préalable du 1er décembre 2014 par la ministre des armées. 9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. C... de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.D E C I D E : -------------- Article 1er : L'arrêt du 11 juin 2021 de la cour administrative d'appel de Marseille est annulé en tant qu'il a fixé à la somme de 4 956 euros l'indemnisation du préjudice lié aux pertes de pension de retraite de M. C.... Article 2 : L'Etat est condamné à verser à M. C... la somme de 85 801,61 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter de la date de réception de la demande préalable du 1er décembre 2014. Article 3 : Le jugement du 22 octobre 2018 du tribunal administratif de Toulon est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision. Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête d'appel de M. C... est rejeté. Article 5 : L'Etat versera une somme de 3 000 euros à M. C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice Article 6 : La présente décision sera notifiée à M. B... C... et au ministre des armées. Délibéré à l'issue de la séance du 17 mai 2022 où siégeaient : M. Gilles Pellissier, assesseur, présidant ; M. Benoît Bohnert, conseiller d'Etat et Mme Elise Adevah-Poeuf, maître des requêtes-rapporteure. Rendu le 10 juin 2022. Le président : Signé : M. Gilles Pellissier La rapporteure : Signé : Mme Elise Adevah-Poeuf La secrétaire : Signé : Mme Corinne SakECLI:FR:CECHS:2022:454655.20220610
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 8ème - 3ème chambres réunies, 14/06/2022, 455292, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Mme A... C... a demandé au tribunal des pensions de Marseille d'annuler la décision du 6 octobre 2015 par laquelle le ministre de la défense lui a refusé l'octroi d'une pension de réversion du chef de M. D... B.... Par un jugement n° 18/00071 du 23 août 2019, ce tribunal a rejeté sa demande. Par un arrêt n° 19MA05435 du 28 mai 2021, la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté l'appel formé par Mme C... contre ce jugement. Par un pourvoi et un mémoire en réplique, enregistrés les 5 août 2021 et 19 avril 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme C... demande au Conseil d'Etat d'annuler cet arrêt. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; - la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010, notamment son article 211 ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. François-René Burnod, auditeur, - les conclusions de Mme Karin Ciavaldini, rapporteure publique ; Considérant ce qui suit : 1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que Mme C... a, par une demande en date du 18 mars 2014, sollicité l'octroi d'une pension de réversion en qualité de conjointe survivante de M. B..., décédé le 15 août 1956 en Algérie au cours d'un fait de guerre, et reconnu " Mort pour la France " par décision du 18 mars 2010. Par une décision du 6 octobre 2015, le ministre de la défense a rejeté cette demande. Mme C... se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 28 mai 2021 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté l'appel qu'elle avait formé contre le jugement du tribunal des pensions de Marseille du 23 août 2019 rejetant sa demande tendant à l'annulation de cette décision. 2. Aux termes de l'article 211 de la loi du 29 décembre 2010 de finances pour l'année 2011, applicable aux demandes de pension de réversion : " I. Les pensions militaires d'invalidité (...) servies aux ressortissants des pays ou territoires ayant appartenu à l'Union française ou à la Communauté ou ayant été placés sous le protectorat ou sous la tutelle de la France sont calculées dans les conditions prévues aux paragraphes suivants. (...) V. Les demandes de pensions présentées en application du présent article sont instruites dans les conditions prévues par le code des pensions militaires d'invalidité (...) ". 3. Aux termes de l'article L. 43 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, qui a repris en substance les dispositions en vigueur à la date du décès de M. B... : " Ont droit à pension : / 1° Les veuves des militaires et marins dont la mort a été causée par des blessures ou suites de blessures reçues au cours d'événements de guerre ou par des accidents ou suites d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; / 2° Les veuves des militaires et marins dont la mort a été causée par des maladies contractées ou aggravées par suite de fatigues, dangers ou accidents survenus par le fait ou à l'occasion du service, ainsi que les conjoints survivants de militaires et marins morts en jouissance d'une pension définitive ou temporaire correspondant à une invalidité égale ou supérieure à 85 % ou en possession de droits à cette pension ; / 3° Les veuves des militaires et marins morts en jouissance d'une pension définitive ou temporaire correspondant à une invalidité égale ou supérieure à 60 % ou en possession de droits à cette pension. / Dans les trois cas, il y a droit à pension si le mariage est antérieur soit à l'origine, soit à l'aggravation de la blessure ou de la maladie, à moins qu'il ne soit établi qu'au moment du mariage l'état du conjoint pouvait laisser prévoir une issue fatale à brève échéance. (...) ". 4. Aux termes du 5ème alinéa de l'article L. 241 de ce même code, relatif au droit à pension des militaires autochtones et de leurs ayant cause, en vigueur à la date de la demande formée par Mme C... et repris en substance au 5ème alinéa de l'article L.141-5 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " La preuve du mariage et de la filiation est faite par la production soit d'actes régulièrement inscrits suivant les prescriptions des textes régissant l'état civil des autochtones musulmans, soit, à défaut, au moyen d'un acte établi par le cadi (...) ". Ces dispositions ont été complétées, en ce qui concerne les modalités d'établissement des actes de l'état civil relatifs au mariage, par les dispositions de la loi du 11 juillet 1957 relative à la preuve du mariage contracté en Algérie suivant les règles du droit musulman. Cette loi prévoit que, pour l'exercice des droits autres que l'application du statut personnel ou les contestations d'ordre privé entre parties, le mariage ne peut être prouvé que par inscription aux registres de l'état civil. Son article 7 prévoit que, lorsque le mariage n'a pas fait l'objet d'une déclaration en mairie dans les cinq jours de sa célébration en vue de son inscription à l'état civil, chacun des époux ou, en cas de décès de l'un d'eux, le conjoint survivant peut obtenir l'inscription sur le registre d'état civil au vu d'un jugement recognitif obtenu du tribunal civil. Aux termes du dernier alinéa de cet article 7 : " Le mariage ainsi constaté et transcrit sur les registres de l'état civil prend effet, à l'égard des personnes ayant requis le jugement ou qui y ont été appelées, à dater du jour reconnu par le jugement comme étant celui de la célébration de l'union ". Il résulte de ces dispositions qu'un jugement déclaratif de mariage rendu par une juridiction algérienne postérieurement à l'accession de l'Algérie à l'indépendance n'est pas opposable à l'Etat français, lorsque celui-ci n'a pas été mis en cause dans l'instance. Il constitue le cas échéant un élément de preuve susceptible d'être retenu par le juge administratif pour apprécier si la matérialité ou la date du mariage est établie de façon certaine. 5. Par suite, en jugeant que le jugement du tribunal de Cherchell du 8 octobre 2006 authentifiant son mariage avec M. B... et ordonnant son inscription à l'état-civil à titre rétroactif, rendu sans que l'Etat français n'ait été appelé à l'instance, n'était pas opposable à celui-ci et ne constituait qu'un élément de preuve susceptible d'être retenu par le juge pour apprécier si la date du mariage était établie de façon certaine, la cour n'a pas commis d'erreur de droit. Mme C... n'est, par suite, pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque. Son pourvoi doit donc être rejeté. D E C I D E : -------------- Article 1er : Le pourvoi de Mme C... est rejeté. Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme A... C... et au ministre des armées. Délibéré à l'issue de la séance du 1er juin 2022 où siégeaient : M. Rémy Schwartz, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. Pierre Collin, président de chambre ; M. Stéphane Verclytte, M. Mathieu Herondart, M. Hervé Cassagnabère, M. Christian Fournier, Mme Françoise Tomé, M. Jonathan Bosredon, conseillers d'Etat et M. François-René Burnod, auditeur-rapporteur. Rendu le 14 juin 2022. Le président : Signé : M. Rémy Schwartz Le rapporteur : Signé : M. François-René Burnod La secrétaire : Signé : Mme Magali MéaulleECLI:FR:CECHR:2022:455292.20220614
Conseil d'Etat
CAA de BORDEAUX, 2ème chambre, 31/05/2022, 19BX04015, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Par un arrêt avant dire droit du 9 octobre 2018, la cour régionale des pensions de Bordeaux a ordonné des expertises avant de se prononcer sur les demandes de M. A... relatives à la réformation de l'arrêté du 18 mars 2013 par lequel le ministre de la défense a porté à 95 % le taux de sa pension militaire d'invalidité pour de nombreuses infirmités, en tant qu'il a rejeté ses demandes relatives à des infirmités de séquelles de traumatisme cervico-lombo-sacré, de séquelles traumatiques du genou gauche, de séquelles traumatiques de l'épaule droite, de séquelles traumatiques du poignet droit et de la main droite, de baisse de l'acuité auditive droite et d'acouphènes de l'oreille droite. Le docteur C... a été désigné comme expert par ordonnance de la présidente de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 1er juillet 2020. Le professeur D... a été désigné comme expert par ordonnance de la présidente de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 18 septembre 2020. Le rapport du docteur C..., expert spécialisé en chirurgie orthopédique, a été enregistré le 15 octobre 2020. Le rapport du professeur D..., expert spécialisé en oto-rhino-laryngologie, a été enregistré le 26 novembre 2020. Par des mémoires enregistrés les 18 décembre 2020, 22 décembre 2020, 2 février 2021, 18 mars 2021, 7 juin 2021 et 2 juillet 2021, M. A... demande à la cour : 1°) de ne pas tenir compte de l'expertise du docteur C... et d'homologuer les expertises antérieures qu'il a produites ; 2°) d'annuler l'expertise du professeur D... et d'homologuer celle du docteur F... du 10 avril 2015 ; 3°) de retenir un taux de 65 % en aggravation pour la surdité totale confirmée par quatre examens à partir de sa demande du 31 mai 2005, ou à titre subsidiaire d'ordonner une nouvelle expertise pour cette aggravation ; 4°) de retenir l'infirmité de " vertiges rotatoires avec nausées et vomissements de fréquence hebdomadaire " au taux de 30 %. Il soutient que : - le docteur C..., qui lui avait dispensé des soins à deux reprises, dont une fois pour le genou gauche, a réalisé l'expertise en méconnaissance des dispositions de l'article R. 4127-105 du code de la santé publique ; En ce qui concerne le rachis et le bassin : - l'expertise omet de mentionner les troubles génitaux en lien avec l'atteinte de la queue de cheval ; - il n'existe ni une lombarthrose L3-L4, ni une coxarthrose droite, mais des séquelles de fracture de L3-L4 et de fracture du cotyle droit avec ostéophytose, et il n'y avait pas d'arthrose sur les clichés radiographiques interprétés le 5 mars 2005 ; le tribunal des pensions et la cour régionale des pensions ont d'ailleurs ordonné une expertise relative à l'atteinte rachidienne du traumatisme cervico-dorso-lombaire, et non à une aggravation de l'infirmité de lombarthrose L3-L4 ; - l'expert n'a pas tenu compte du rétrolisthésis de C3 sur C4 avec instabilité cervicale et atrophie du trapèze gauche et n'a pas compris les modalités de fixation des taux selon le barème des pensions militaires d'invalidité ; il convient de retenir des taux de 35 à 70 % pour le rachis et de 100 % pour les troubles génito-sphinctériens, comme l'ont fait les autres experts qu'il a consultés ; en évaluant au plus bas l'ensemble de ses séquelles selon le barème des pensions militaires d'invalidité, on trouve un taux global de 195 % ; En ce qui concerne le genou gauche : - l'expert n'a pas examiné le genou gauche et conclut à l'absence d'aggravation en faisant état d'une gonarthrose alors qu'il existe des séquelles de fractures de la rotule partiellement soudées, ainsi qu'une fracture du plateau tibial, ce que l'expert avait d'ailleurs admis, lorsqu'il l'avait consulté à titre privé ; - il sollicite un taux de 20 % aggravé au 26 juillet 2005 comme l'avait retenu une expertise du 12 décembre 2008 ; cinq experts avaient évalué l'infirmité à 15 % en se plaçant au 9 août 1994 ; En ce qui concerne l'épaule droite : - contrairement à ce que retient l'expert, qui ne l'a pas examiné, il n'existe pas d'arthrose scapulo-humérale et acromio-claviculaire, puisqu'aucun des rhumatologues qu'il a consultés n'en fait état ; - il sollicite un taux de 40 % aggravé au 21 septembre 2005 comme l'a retenu l'expertise réalisée le 26 février 2009 ; En ce qui concerne le poignet droit et la main droite : - l'expert n'a pas examiné les quatre derniers doigts et leurs métacarpiens, ne tient pas compte de ce qu'il s'agit d'une seule invalidité pour le poignet et la main comme pour le poignet et la main gauches, et le barème retenu n'est pas celui des pensions militaires d'invalidité ; - à la date du 14 novembre 1995, les infirmités du poignet droit et de la main droite ont été évaluées à 10 % chacune ; il convient d'évaluer la totalité de la main droite et d'inclure la neuropathie canalaire retenue par le docteur G... le 26 février 2009 à un taux de 30 % ; En ce qui concerne le pouce droit et le 1er rayon : - il sollicite un taux de 20 % aggravé au 21 septembre 2005 comme l'a retenu l'expertise réalisée le 26 février 2009 ; En ce qui concerne l'oreille droite : - l'expertise ne respecte pas le guide-barème des pensions militaires d'invalidité, les schémas ne sont pas intelligibles et l'expert, qui rapporte des faits inexacts, ne démontre pas ce qu'il affirme ; en outre, le rapport n'est pas signé ; ainsi, il doit être annulé ; - l'insufflation d'air comprimé le 1er février 2007 avait pour objet de masquer l'oreille droite pour pouvoir examiner l'oreille gauche, examen réalisé en 2007 ; - l'expert n'aurait pas dû réaliser d'examen vestibulaire dès lors que la mission d'expertise ne le prévoyait pas, et il aurait dû réaliser les examens lui-même au lieu de les confier à des techniciennes ; - selon le barème des pensions militaires d'invalidité, la perte de 50 à 59 décibels à droite associée à une cophose gauche correspond à un taux de 50 % et non de 30 % comme l'a retenu l'expert, et les acouphènes sévères doivent être cotés à 30 % et non à 10 % ; - les examens réalisés les 23 février 2016, 7 février 2017, 17 avril 2018 et 5 mars 2019 ont constaté respectivement des pertes auditives à droite de 69, 65, 61 et 55 décibels, soit en moyenne 62,5 décibels, ce qui, associé à une cophose gauche, correspond à un taux global d'invalidité de 65 % ; En ce qui concerne les vertiges : - contrairement à ce qui est soutenu en défense, l'infirmité de vertiges, qualifiée à tort d'inexistante par le tribunal, a été reconnue dans l'arrêt de la cour régionale des pensions du 9 octobre 2018. Par des mémoires en défense enregistrés les 5 février, 4 mai et 24 juin 2021, la ministre des armées admet le droit de M. A... à une pension militaire d'invalidité à compter du 27 décembre 2007 pour les infirmités nouvelles d'hypoacousie de l'oreille droite au taux de 30 % et d'acouphènes droits permanents et invalidants au taux de 10 % et conclut au rejet du surplus. Elle fait valoir que : En ce qui concerne le rachis et le bassin : - l'infirmité n° 2512 de " lombarthrose L3-L4 et discret tassement cunéiforme antérieur du corps de L4 " est pensionnée au taux de 20 % et non de 30 % comme indiqué par erreur dans les conclusions, alors que le taux de 20 % a bien été pris en compte au début de l'analyse ; - en application de la règle de Balthazar prévue à l'article L. 14 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, lorsque l'infirmité la plus grave entraîne une invalidité d'au moins 20 %, chaque infirmité supplémentaire est affectée d'une majoration " suffixe " de 5, 10, 15 ...% suivant le rang qu'elle occupe dans l'ordre croissant de gravité ; l'infirmité n° 2512 est pensionnée au taux de 20 % + 10 ; l'aggravation de 30 % retenue par l'expert correspond à un taux global de 50 % et non de 60 % comme indiqué par erreur ; - l'expert, qui avait pour mission principale d'évaluer le taux d'invalidité de l'infirmité n° 2512, a retenu une aggravation de 30 % en incluant des séquelles déjà pensionnées au titre de l'infirmité n° 5060 " syndrome pluri-radiculaire avec incontinence fécale intermittente, incontinence urinaire incomplète et troubles généraux ne permettant pas de rapports sexuels " , et des séquelles de coxarthrose droite post-traumatique affectant la hanche droite, dont le taux d'invalidité ne peut être qu'inférieur à 10 % compte tenu de la modicité de la gêne fonctionnelle ; en l'absence d'élément nouveau, le taux d'invalidité acquis pour l'infirmité n° 2512 doit être maintenu ; En ce qui concerne le genou gauche : - aucune aggravation n'a été constatée ; En ce qui concerne l'épaule droite : - aucune aggravation n'a été constatée ; En ce qui concerne le poignet droit et la main droite : - si l'expert retient 5 % d'aggravation pour chacune des deux infirmités pensionnées à la date du 21 septembre 2005, il n'évoque, s'agissant du pouce droit, aucun élément clinique nouveau à l'exception d'allégations douloureuses dues à l'instabilité du pouce par rapport au certificat médico-légal établi le 22 octobre 2002, date à laquelle la désaxation avec rotation externe était déjà responsable d'un déficit de l'extension du fait du non alignement articulaire ; s'agissant du poignet droit, l'examen clinique réalisé le 8 septembre 2020 n'objective aucune aggravation par rapport à celui du 22 octobre 2002 ; ainsi, les taux de 10 % déjà acquis doivent être maintenus ; En ce qui concerne l'oreille droite : - il est admis, conformément aux conclusions de l'expertise, que M. A... a droit à compter du 27 décembre 2007 à une pension militaire d'invalidité pour les infirmités nouvelles d'hypoacousie de l'oreille droite au taux de 30 % et d'acouphènes droits permanents et invalidants au taux de 10 %. M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 16 juillet 2020. Les frais et honoraires de l'expertise du docteur C..., liquidés et taxés à la somme de 840 euros, ont été mis à la charge de l'Etat par une ordonnance de la présidente de la cour du 21 octobre 2020. Les frais et honoraires de l'expertise du professeur D..., liquidés et taxés à la somme de 300 euros, ont été mis à la charge de l'Etat par une ordonnance de la présidente de la cour du 1er décembre 2020. Par ordonnance du 5 mai 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 7 juillet 2021. Par lettre du 4 janvier 2022, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur le moyen relevé d'office suivant : " Le premier jugement du tribunal est définitif en ce qu'il a reconnu à M. A... des droits à pension pour sept nouvelles infirmités, qui ont pour effet de porter le taux de la pension de 95 % dont il bénéficiait à 100 %, comme l'a admis la ministre en liquidant ses droits à ce taux pour jouissance dès le 29 janvier 1998 par arrêté du 15 avril 2019. Alors qu'aucune infirmité déjà reconnue ou alléguée ne représente à elle-seule un taux de 100 % permettant de dépasser en vertu de l'article L. 125-10 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre le maximum de 100 % de la pension, il n'y a pas lieu de se prononcer sur les autres contestations de M. A..., dont aucune ne pourrait aboutir à une majoration de ses droits à pension. " Des observations en réponse à ce moyen d'ordre public ont été présentées par la ministre des armées les 24 janvier et 10 février 2022, et par M. A... les 24 et 25 janvier 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - le code de la santé publique ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 ; - le décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018 ; - le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme B..., - et les conclusions de Mme Gallier, rapporteure publique, - et les observations de M. A.... Considérant ce qui suit : 1. Après un grave accident survenu en service le 4 juillet 1986, M. A..., engagé dans l'armée en 1965, a été radié des contrôles le 8 novembre 1986 au grade de caporal-chef, à la fin de son contrat. Il a obtenu à compter de 1992 une pension militaire d'invalidité, puis a sollicité à huit reprises la révision de cette pension pour différentes aggravations ou nouvelles infirmités. Certaines ont été admises par l'administration, qui a porté le taux de la pension à 95 % pour sept infirmités, avec jouissance à compter du 29 mars 1998, tandis que d'autres ont été rejetées par l'arrêté du 18 mars 2013 que M. A... a contesté devant le tribunal des pensions de Bordeaux. Le tribunal, après avoir admis plusieurs infirmités en révision de la pension et ordonné onze expertises, a constaté que celles-ci n'avaient pu être réalisées et qu'il n'était pas en mesure de statuer sur le surplus. Saisie en appel par M. A..., la cour régionale des pensions de Bordeaux a porté de 10 à 50 % le taux de l'infirmité de " séquelle de hernie inguino-scrotale gauche " retenu par le tribunal, a rejeté certaines prétentions et, par un arrêt avant dire droit du 9 octobre 2018, a ordonné des expertises avant de statuer sur les demandes de révision de la pension militaire d'invalidité de M. A... relatives aux séquelles d'un traumatisme cervico-dorso-lombo-sacré subi lors de la chute du 4 juillet 1986, à l'aggravation des séquelles d'un traumatisme du genou gauche subi le 24 mars 1983, d'un traumatisme de l'épaule droite subi le 23 décembre 1968, de traumatismes de la main droite et du poignet droit subis le 20 décembre 1982 et le 24 mars 1983, et à l'infirmité nouvelle de baisse de l'acuité auditive et d'acouphènes de l'oreille droite. La procédure a été transmise, en application de la loi du 13 juillet 2018 susvisée, à la cour administrative d'appel de Bordeaux, qui a nommé de nouveaux experts pour suppléer la défaillance de ceux précédemment désignés. Sur l'étendue du litige : 2. Contrairement à ce que soutient M. A..., la cour régionale des pensions de Bordeaux a rejeté, au troisième paragraphe du dispositif de son arrêt du 9 octobre 2018, la demande relative à l'infirmité nouvelle de " vertiges d'origine ORL à type de troubles de l'équilibre et d'instabilité " qualifiés par le requérant de " vertiges rotatoires avec nausées et vomissements de fréquence hebdomadaire ". Ainsi, le litige dont la cour administrative d'appel est saisie n'inclut pas cette infirmité. 3. Par une décision du 14 février 2020, la ministre des armées, en exécution du jugement du tribunal des pensions de Bordeaux du 23 novembre 2016 et de l'arrêt de la cour régionale des pensions de Bordeaux du 9 octobre 2018, a retenu à compter du 29 janvier 1998 les infirmités de cophose de l'oreille gauche au taux de 15 %, de séquelles de rupture du ligament latéral externe et de fracture ostéochondrale de la malléole externe du pied gauche au taux de 15 %, d'acouphènes permanents gauches au taux de 10 %, à compter du 8 février 2001 l'infirmité de séquelles traumatiques par compression plâtrée brachio-palmaire gauche du nerf cubital avec retentissement moteur important au taux de 10 %, à compter du 30 octobre 2001 les infirmités de séquelles d'entorse de la cheville droite avec hyperlaxité par atteinte du ligament talo-fibulaire et rupture du ligament tibial antérieur responsable d'instabilité avec discrète claudication au taux de 15 %, d'arthrose métatarso-phalangienne de l'avant-pied droit avec douleur à l'appui et mauvais déroulement du pied au taux de 10 %, et à compter du 24 octobre 2003 l'infirmité de séquelles de hernie inguino-scrotale opérée, compliquée d'une éventration cicatricielle douloureuse et récurrence herniaire gauche non réductible avec hydrocèle scrotale gauche au taux de 50 %. Cette décision concède un droit à pension de 100 % à compter du 29 janvier 1998. Toutefois, aux termes de l'article L. 115, devenu l'article L. 212-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " L'Etat doit gratuitement aux titulaires d'une pension d'invalidité attribuée au titre du présent code les prestations médicales, paramédicales, chirurgicales et pharmaceutiques nécessitées par les infirmités qui donnent lieu à pension, en ce qui concerne exclusivement les accidents et complications résultant de la blessure ou de la maladie qui ouvre droit à pension. " Il résulte de ces dispositions que le litige conserve un objet en ce qui concerne les infirmités qui n'ont pas été reconnues pensionnables par l'administration. Sur les conclusions à fin d'annulation de l'expertise du professeur D... et d'homologation d'expertises non judiciaires : 4. Une expertise a pour objet d'apporter au juge les éléments d'information nécessaires à la solution du litige dont il est saisi. Elle ne constitue pas une décision et ne lie pas le juge, auquel il appartient d'en retenir ou non les conclusions compte tenu de l'ensemble des pièces du dossier, y compris d'autres expertises, même non judiciaires, produites par les parties. Par suite, les conclusions à fin d'annulation de l'expertise du professeur D... et " d'homologation " d'expertises produites par M. A... ne peuvent qu'être rejetées comme irrecevables. Sur la régularité des expertises : 5. Aux termes de l'article R. 4127-105 du code de la santé publique : " Nul ne peut être à la fois médecin expert et médecin traitant d'un même malade. / Un médecin ne doit pas accepter une mission d'expertise dans laquelle sont en jeu ses propres intérêts, ceux d'un de ses patients, d'un de ses proches, d'un de ses amis ou d'un groupement qui fait habituellement appel à ses services. " En se bornant à produire une brève observation du docteur C... du 17 octobre 2018 constatant une bonne évolution d'une " contusion avec fracture du plateau tibial genou gauche " sans indication chirurgicale, M. A..., dont le dossier fait état de la consultation de nombreux autres chirurgiens orthopédistes, ne démontre pas l'existence d'une relation de médecin traitant à patient de nature à entacher l'expertise d'irrégularité. 6. Les divers reproches dirigés contre les experts, relatifs à la restitution d'un dossier médical incomplet, à des erreurs de fait ou de diagnostic, à l'absence d'examen clinique ou au contraire à la réalisation d'examens non nécessaires, et à des évaluations non conformes au guide-barème des pensions militaires d'invalidité, ne mettent pas en cause la régularité des expertises. Sur les droits à pension de M. A... : 7. Aux termes de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre applicable aux dates des demandes de pension : " Ouvrent droit à pension : 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; / (...). " Aux termes de l'article L. 4 du même code : " Les pensions sont établies d'après le degré d'invalidité. / Sont prises en considération les infirmités entraînant une invalidité égale ou supérieure à 10 %. / Il est concédé une pension : / 1° Au titre des infirmités résultant de blessures, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse 10 % (...) ". Aux termes de l'article L. 29 de ce code : " Le titulaire d'une pension d'invalidité concédée à titre définitif peut en demander la révision en invoquant l'aggravation d'une ou plusieurs infirmités en raison desquelles cette pension a été accordée. / Cette demande est recevable sans condition de délai. / La pension ayant fait l'objet de la demande est révisée lorsque le degré d'invalidité résultant de l'infirmité ou de l'ensemble des infirmités est reconnu supérieur de 10 % au moins du pourcentage antérieur. / Toutefois, l'aggravation ne peut être prise en considération que si le supplément d'invalidité est exclusivement imputable aux blessures et aux maladies constitutives des infirmités pour lesquelles la pension a été accordée. / La pension définitive révisée est concédée à titre définitif. " En ce qui concerne les séquelles de traumatisme cervico-dorso-lombo-sacré : 8. Le 4 juillet 1986, alors qu'il participait à des manœuvres militaires à Mayotte, M. A... a fait une chute de haute énergie dans les rochers, d'une hauteur de 15 mètres, à l'origine d'un grave traumatisme cervico-dorso-lombo-sacré. La pension définitive dont il était titulaire antérieurement à l'arrêté contesté incluait seulement, en lien avec cette blessure, l'infirmité de " lombarthrose L3-L4 et discret tassement cunéiforme antérieur du corps de L4 " au taux définitif de 20 % à compter du 4 juin 1992. L'arrêté du 18 mars 2013 a retenu, en lien avec le même traumatisme, un droit à pension au taux de 25 % à compter du 29 janvier 1998 pour un " syndrome pluri-radiculaire avec incontinence fécale intermittente, incontinence urinaire incomplète et troubles généraux ne permettant pas de rapports sexuels ". 9. La cour régionale des pensions a ordonné une expertise relative à " l'atteinte rachidienne conséquence du traumatisme cervico-dorso-lombo-sacré ", incluant nécessairement l'infirmité de syndrome pluri-radiculaire dont M. A... avait contesté le taux devant le tribunal des pensions. Elle a demandé à l'expert de se prononcer sur l'existence d'aggravations de l'infirmité de " lombarthrose L3-L4 et discret tassement cunéiforme antérieur du corps de L4 " aux dates des 29 janvier 1998, 28 janvier 2003 et 12 mai 2005, de décrire et de chiffrer les infirmités du bassin et du dos en se plaçant au 29 janvier 1998 et de dire si elles sont imputables à l'accident du 4 juillet 1986, et enfin de dire, au vu du guide-barème, si ces différentes infirmités sont susceptibles de constituer une seule et même infirmité, et dans cette hypothèse, d'en fixer le taux. 10. L'expert a retenu comme imputables à la chute du 4 juillet 1986, au niveau cervical, une attitude antalgique avec aspect de torticolis, une raideur du rachis avec limitation de l'amplitude des mouvements, une amyotrophie sévère du muscle trapèze gauche ainsi que des cervico-scapulo-brachialgies bilatérales, au niveau lombaire une cyphose à rayon court entraînant un bloc fonctionnel post-fracturaire responsable d'une cypho-scoliose thoraco-lombaire par compensation, une amyotrophie des fessiers et une atteinte polyradiculaire en L3-L4-L5 et S1, une coxarthrose droite post-traumatique après fracture du cotyle droit avec bascule du bassin, et enfin une incontinence anale et vésicale par atteinte de la queue de cheval. Il a précisé que la pathologie rachidienne s'était progressivement détériorée tant sur le plan mécanique (aggravation de la cypho-scoliose, canal lombaire étroit post-traumatique) que neurologique (poly-radiculalgies des quatre membres, syndrome de la queue de cheval). Toutefois, son évaluation de l'invalidité à un taux global de 60 % ne peut être retenue dès lors que les infirmités distinctes constatées ne se rattachent pas à une pathologie unique figurant au guide-barème des pensions militaires d'invalidité. Par suite, il y a lieu d'évaluer distinctement les infirmités correspondant aux séquelles cervicales, lombaires, du bassin et neurologiques. S'agissant des séquelles cervicales : 11. Il résulte de l'instruction, notamment de l'expertise ainsi que de témoignages des supérieurs hiérarchiques de M. A... au moment de l'accident et d'attestations de médecins qui l'ont examiné de 1986 au 20 janvier 1988, cités dans une expertise du docteur G... du 30 mars 2009 produite par le requérant, que la chute du 4 juillet 1986 a causé une entorse cervicale grave avec rétrolisthésis de C3 sur C4 et instabilité segmentaire post-traumatique, à l'origine de cervicalgies chroniques et d'une attitude antalgique avec aspect de torticolis nécessitant le port d'un collier cervical en particulier la nuit, puis secondairement une amyotrophie sévère du muscle trapèze gauche. Ces séquelles sont établies à la date du 29 janvier 1998, contrairement à la discarthrose secondaire étagée de C3 à T1 et prédominant en C3-C4, mentionnée par un certificat médical d'aggravation du 1er décembre 2014, laquelle ne peut être retenue dans le cadre du présent litige. Par suite, il y a lieu de retenir, à la date du 29 janvier 1998, une infirmité de " séquelles d'entorse cervicale avec rétrolisthésis de C3 sur C4, instabilité segmentaire post-traumatique et cervicalgies " dont le taux d'invalidité doit être fixé à 20 % au regard du guide-barème des pensions militaires d'invalidité. S'agissant des séquelles lombaires : 12. Il résulte de l'instruction, notamment des interprétations d'imageries citées par l'expertise du docteur G... du 30 mars 2009 et de l'expertise judiciaire que la " lombarthrose L3-L4 et discret tassement cunéiforme antérieur du corps de L4 " pensionnée au taux de 20 % à compter du 4 juin 1992 correspond à des séquelles de fractures de L3 et L4 associées à un affaissement du disque L3-L4 avec ostéophytose, présentes sur des clichés réalisés le 18 novembre 1991, en lien avec la chute du 4 juillet 1986. Ces lésions ont évolué avec l'affaissement total du disque L3-L4, constituant un bloc fonctionnel responsable d'une cyphose du segment lombaire centrée sur L3-L4 et d'un rétrécissement canalaire acquis. Il en résulte une attitude cypho-scoliotique du segment dorsal post-traumatique par compensation, rendant notamment la station debout pénible. La comparaison des différentes imageries décrites au dossier fait apparaître que cette aggravation était constituée au 29 janvier 1998. Par suite, il y a lieu de modifier l'intitulé de l'infirmité de " lombarthrose L3-L4 et discret tassement cunéiforme antérieur du corps de L4 " en " séquelles de fractures de L3 et L4 avec cyphose et rétrécissement canalaire acquis ", et de fixer le taux d'invalidité à la date du 29 janvier 1998 à 30 % au regard du guide-barème des pensions militaires d'invalidité. S'agissant des séquelles du bassin : 13. Il résulte de l'instruction, notamment des certificats médicaux cités par l'expertise réalisée le 17 février 2015 par le docteur F... à la demande de M. A..., que la chute du 4 juillet 1986 a causé une fracture du cotyle droit, ayant pour conséquence une rotation-bascule du bassin vers la gauche avec atrophie musculaire de toute la région de la hanche gauche. Ces séquelles, identifiées sur des clichés réalisés le 4 octobre 2000, étaient constituées à la date du 29 janvier 1998, comme l'a retenu l'expert missionné par la cour. Elles ont pour conséquences fonctionnelles, décrites par le docteur F..., une réduction des mouvements de rotation pelvienne, de flexion et d'extension avec une distance main-sol limitée à 34 cm, ainsi que d'abduction et d'adduction des membres inférieurs, ces mouvements étant en outre douloureux, de même que le repos en décubitus latéral gauche et la position assise. L'expert judiciaire mentionne également une coxarthrose. Le taux de 75 % calculé par le docteur F... en additionnant des séquelles qui ne correspondent pas à des infirmités identifiables dans le guide-barème ne peut être admis. Eu égard aux douleurs et à la gêne dans la marche et les efforts, il y a lieu de retenir, à la date du 29 janvier 1998, une infirmité de " séquelles de fracture du cotyle droit avec rotation-bascule du bassin vers la gauche, atrophie musculaire de la région de la hanche gauche et coxarthrose " au taux de 20 %. S'agissant des séquelles neurologiques : 14. L'arrêté du 18 mars 2013 a accordé un droit à pension au taux de 25 % à compter du 29 janvier 1998 au titre de l'infirmité de " syndrome pluri-radiculaire avec incontinence fécale intermittente, incontinence urinaire incomplète et troubles génitaux ne permettant pas de rapports sexuels ". Aucun des constats médicaux auxquels le dossier fait référence ne permet d'identifier une aggravation de cette infirmité entre la demande du 29 janvier 1998 et celle du 28 janvier 2003. Eu égard aux troubles modérés décrits par les pièces du dossier, le taux de 25 % n'apparaît pas sous-évalué au regard du guide-barème des pensions militaires d'invalidité. En ce qui concerne les séquelles de traumatisme du genou gauche : 15. L'arrêté du 18 mars 2013 a rejeté la demande présentée le 26 juillet 2005 par M. A... au titre de l'aggravation de l'infirmité, pensionnée au taux de 10 % à compter du 14 novembre 1995, de " séquelles de traumatisme du genou gauche " résultant d'une blessure reçue à l'occasion du service le 24 mars 1983 lors d'un match de volley-ball. Le traumatisme, tel que décrit par les documents médicaux cités par l'expertise réalisée le 12 décembre 2008 par le docteur G... à la demande de M. A..., était une luxation rotulienne ayant pour séquelles, au 9 août 1994, " un syndrome fémoro-patellaire avec un très net rabot rotulien associé à d'importants craquements douloureux limitant l'utilisation du genou gauche ". La cour régionale des pensions a ordonné une expertise afin d'évaluer l'aggravation éventuelle de cette infirmité à la date du 26 juillet 2005. L'expert a conclu à l'absence d'aggravation du retentissement fonctionnel modéré pris en compte par le taux d'invalidité de 10 % retenu en 1995, ce taux, désormais définitif, ne pouvant être utilement contesté dans le cadre du présent litige. Si l'expertise du docteur G..., citant un autre expert, avait retenu une aggravation de 10 % au 26 juillet 2005 pour " latéralité, laxité du tendon biceps-fémoral et instabilité de la rotule du genou gauche ", elle ne décrit pas de retentissements fonctionnels susceptibles de caractériser une aggravation d'au moins 10 %. Par suite, l'existence de l'aggravation invoquée ne peut être regardée comme établie. En ce qui concerne les séquelles de traumatisme de l'épaule droite : 16. L'arrêté du 18 mars 2013 a rejeté la demande présentée le 21 septembre 2005 par M. A... au titre de l'aggravation de l'infirmité, pensionnée au taux de 25 % à compter du 14 novembre 1995, de " séquelles de traumatisme de l'épaule droite " résultant d'une blessure survenue en service le 23 décembre 1968 lors d'un parcours du combattant. Selon l'interprétation de clichés du 29 juillet 1992 citée par le docteur G... dans une expertise réalisée le 26 février 2009 à la demande de M. A..., ce traumatisme avait laissé des séquelles de luxation compliquée acromio-claviculaire avec disjonction très nette et fracture-arrachement du versant latéral de la clavicule, témoignant d'instabilité résiduelle, ainsi que des séquelles de luxation scapulo-humérale avec décoaptation en élévation de 1 cm de la tête humérale. Ces lésions étaient à l'origine d'une importante limitation fonctionnelle douloureuse de l'épaule droite pour laquelle le taux de 25 % a été retenu. La cour régionale des pensions a ordonné une expertise afin d'évaluer l'aggravation éventuelle de cette infirmité à la date du 21 septembre 2005. L'expert a conclu à l'absence d'aggravation des lésions, stables et déjà prises en compte dans l'évaluation de 1995, ce que M. A... ne conteste pas utilement en se bornant à réfuter la qualification d'arthrose scapulo-humérale et acromio-claviculaire retenue par l'expert et à se prévaloir de l'expertise du docteur G..., lequel a retenu une aggravation de 15 % au 21 septembre 2005 en se fondant sur le commentaire purement descriptif des lésions montrées par un arthroscanner du 13 septembre 2005, sans aucune précision sur les retentissements fonctionnels des évolutions constatées par rapport aux imageries antérieures. Par suite, l'existence de l'aggravation invoquée ne peut être regardée comme établie. En ce qui concerne les séquelles de traumatisme du poignet droit et de la main droite : 17. L'arrêté du 18 mars 2013 a rejeté les demandes présentées le 21 septembre 2005 par M. A... au titre de l'aggravation des infirmités, pensionnées chacune au taux de 10 % à compter du 14 novembre 1995, de " séquelles de traumatisme du poignet droit " résultant d'une blessure reçue à l'occasion du service le 24 mars 1983 lors d'un match de volley-ball et de " séquelles de traumatisme du pouce droit " résultant d'une blessure en service le 20 décembre 1982 lors de la réparation d'une roue de camion. La cour régionale des pensions a ordonné une expertise afin d'évaluer l'aggravation éventuelle de ces infirmités à la date du 21 septembre 2005. 18. Aux termes de l'article L. 26 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " Toute décision administrative ou judiciaire relative à l'évaluation de l'invalidité doit être motivée par des raisons médicales et comporter, avec le diagnostic de l'infirmité, une description complète faisant ressortir la gêne fonctionnelle et, s'il y a lieu, l'atteinte de l'état général qui justifient le pourcentage attribué. " Il résulte de l'instruction, notamment des pièces anciennes du dossier médical citées par le docteur G... dans des expertises réalisées les 13 janvier et 26 février 2009 à la demande de M. A..., que la blessure au pouce droit du 20 décembre 1982 était une luxation métacarpo-phalangienne avec entorse de l'inter-phalangienne et éclatement de la pulpe, et que la blessure du 24 mars 1983 était une entorse du poignet droit avec luxations et fractures des quatre derniers rayons de la main. Les taux de 10 % retenus à compter du 14 novembre 1995 correspondent, pour le pouce et le premier rayon de la main, à une hypoesthésie, une laxité avec torsion de la phalange distale et une instabilité métacarpo-phalangienne limitant la préhension et l'opposition du pouce, et pour le poignet et la main, à une raideur franche et douloureuse du poignet et de la main, associée à une très nette diminution de la force de préhension. L'expert, conformément à la mission qui lui a été confiée, a évalué des aggravations distinctes au 21 septembre 2005 pour le pouce d'une part, et pour le poignet et la main d'autre part. L'aggravation de 5 % qu'il a retenue pour chacune de ces infirmités est inférieure au minimum de 10 % ouvrant droit à une révision de la pension. Toutefois, les aggravations constatées, caractérisées par l'évolution de l'instabilité de toutes les articulations par atteinte des tendons et par un syndrome du canal carpien, résultent d'un cumul des séquelles des deux blessures. Elles ont pour conséquence une majoration de l'infirmité affectant la main droite du fait de l'aggravation de la perte de capacité de préhension et des douleurs. Par suite, il y a lieu de fusionner les infirmités de " séquelles de traumatisme du pouce droit " et de " séquelles de traumatisme du poignet droit " en une seule infirmité de " séquelles de traumatismes du pouce droit et du poignet droit avec perte de préhension de la main droite et syndrome du canal carpien " avec un droit à pension à compter du 21 septembre 2005, et d'en fixer le taux à 30 % au regard du guide-barème des pensions militaires d'invalidité. En ce qui concerne les infirmités de l'oreille droite : 19. Le 1er février 2007, lors d'une expertise organisée par l'administration dans le cadre de l'instruction de la demande de pension militaire d'invalidité pour des vertiges d'origine ORL mentionnée au point 2, la réalisation d'un examen vestibulaire a donné lieu à une violente insufflation d'air comprimé sur le tympan droit, laquelle a provoqué un traumatisme sonore et un barotraumatisme. L'arrêté du 18 mars 2013 a rejeté les demandes de pension pour des infirmités d'" acouphènes droits " et de " baisse de l'acuité auditive droite " en lien avec cette blessure. La cour régionale des pensions a ordonné une expertise afin de décrire ces infirmités, de se prononcer sur leur lien avec l'examen réalisé le 1er février 2007, et d'évaluer les taux d'invalidité correspondants. L'expert a conclu à des taux d'incapacité permanente en relation directe, certaine et déterminante avec cet examen, de 30 % pour la perte auditive et de 10 % pour les acouphènes. La contestation par M. A... des taux retenus par l'expert ne relève pas du présent litige en tant qu'elle se rapporte à une aggravation des infirmités postérieurement à sa demande. Contrairement à ce que soutient le requérant, le taux de 30 % fixé pour la perte auditive de 50 % de l'oreille droite tient compte de l'aggravation de l'état auditif antérieur caractérisé par une cophose de l'oreille gauche pensionnée au taux de 15 % à compter du 29 janvier 1998, et n'apparaît pas sous-évalué au regard du guide-barème des pensions militaires d'invalidité. Ces infirmités, distinctes selon le guide-barème, n'ont pas à être fusionnées. Il y a lieu de retenir un droit à pension définitif à compter du 27 décembre 2007 et de fixer les taux d'invalidité à 10 % pour les " acouphènes permanents droits " et à 30 % pour une " hypoacousie droite ", ainsi que l'admet au demeurant la ministre des armées. 20. Il résulte de tout ce qui précède que l'arrêté du 13 mars 2013 doit être annulé en tant qu'il a rejeté les demandes de M. A... relatives aux infirmités de " lombarthrose L3-L4 et discret tassement cunéiforme antérieur du corps de L4 ", de " séquelles de traumatisme du pouce droit ", de " séquelles de traumatisme du poignet droit ", d'" acouphènes droits " et de " baisse de l'acuité auditive droite ", et que les droits à pension de M. A... doivent être retenus ainsi qu'il est exposé aux points 11, 12, 13, 18 et 19. 21. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. / La juridiction peut également prescrire d'office cette mesure. " Eu égard à ce qui a été dit aux points 11, 12, 13, 18 et 19, il y a lieu d'enjoindre au ministre des armées de procéder aux nouveaux calculs de liquidation des droits à pension correspondants dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt. Sur les frais d'expertise : 22. Aux termes de l'article 116 du décret du 28 décembre 2020 portant application de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique : " Les rémunérations afférentes aux constatations, consultations, expertises et médiations (...) et, en général, tous les frais dus à des tiers en application de l'article 40 de la loi du 10 juillet 1991 susvisée, sont avancés par l'Etat. / (...) / Les frais, à l'exception des sommes revenant aux avocats, sont liquidés et ordonnancés par l'ordonnateur compétent ou son délégataire au vu, selon le cas, d'une attestation du greffier ou du secrétaire de la juridiction, d'une décision de taxe ou de la justification par l'auxiliaire de justice de l'exécution de sa mission et sont payés par le comptable de la direction générale des finances publiques. / (...). " M. A... étant bénéficiaire de l'aide juridictionnelle totale, les frais et honoraires de l'expertise du docteur C..., liquidés et taxés à la somme de 840 euros par ordonnance de la présidente de la cour du 21 octobre 2020, et ceux de l'expertise du professeur D..., liquidés et taxés à la somme de 300 euros par ordonnance de la présidente de la cour du 1er décembre 2020, doivent être mis à la charge définitive de l'Etat. DÉCIDE : Article 1er : L'arrêté du 13 mars 2013 est annulé en tant qu'il a rejeté les demandes de M. A... relatives aux infirmités de " lombarthrose L3-L4 et discret tassement cunéiforme antérieur du corps de L4 ", de " séquelles de traumatisme du pouce droit ", de " séquelles de traumatisme du poignet droit ", d'" acouphènes droits " et de " baisse de l'acuité auditive droite ". Article 2 : Il est enjoint au ministre des armées de procéder aux nouveaux calculs des droits à pension de M. A... conformément à ce qui est indiqué aux points 11, 12, 13, 18 et 19, dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt. Article 3 : Les frais et honoraires des expertises du docteur C... et du professeur D..., liquidés et taxés aux sommes respectives de 840 euros et de 300 euros, sont mis à la charge définitive de l'Etat. Article 4 : Le surplus des conclusions d'appel de M. A... est rejeté. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... A... et au ministre des armées. Des copies en seront transmises pour information au docteur C... et au professeur D..., experts. Délibéré après l'audience du 3 mai 2022 à laquelle siégeaient : Mme Catherine Girault, présidente, Mme Anne Meyer, présidente-assesseure, Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 mai 2022. La rapporteure, Anne B... La présidente, Catherine GiraultLa greffière, Virginie Guillout La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui la concerne et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. 2 N° 19BX04015
Cours administrative d'appel
Bordeaux
CAA de PARIS, 8ème chambre, 02/06/2022, 20PA03852, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. G... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris de condamner l'Etat à lui verser la somme de 302 804,26 euros en réparation du préjudice subi du fait d'un accident de service intervenu alors qu'il était en opération extérieure en Côte d'Ivoire. A... jugement n° 1819788/5-1 du 8 octobre 2020, le Tribunal administratif de Paris a condamné l'Etat à verser à M. B... la somme de 4 697,60 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 7 mai 2018 avec capitalisation des intérêts le 7 mai 2019 ainsi qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date. Procédure devant la Cour : A... une requête enregistrée le 9 décembre 2020, M. B..., représenté A... Me Guillou, demande à la Cour : 1°) d'annuler les articles 1er et 3 du jugement n° 1819788/5-1 du 8 octobre 2020 du Tribunal administratif de Paris ; 2°) de confirmer l'article 2 dudit jugement relatif aux intérêts et à leur capitalisation ; 3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 302 354,26 euros en réparation du préjudice subi du fait d'un accident de service intervenu alors qu'il était en opération extérieure en Côte d'Ivoire ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - la responsabilité de l'Etat peut être engagée du fait de la faute de service qui a été commise et qui a entraîné les préjudices qu'il a subis ; - il est fondé à solliciter la réparation intégrale de son préjudice compte tenu de la faute de l'administration ; - il sollicite au titre de ses préjudices patrimoniaux temporaires une indemnisation de 200 euros au titre des frais divers qu'il a engagés, de 26 672,64 euros au titre des pertes de gains professionnels actuels et de 2 000 euros au titre d'une prime, soit au total 28 672,64 euros ; - il sollicite au titre de ses préjudices patrimoniaux permanents une indemnisation de 3 000 euros au titre des dépenses de santé futures, de 4 800 euros pour les frais futurs de recours à une tierce personne, de 81 681,62 euros au titre des pertes de gains professionnels futurs et de 60 000 euros au titre de l'incidence professionnelle ; - il sollicite au titre de ses préjudices extrapatrimoniaux temporaires, une indemnisation de 19 000 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire, de 17 000 euros au titre des souffrances qu'il a endurées et de 4 000 euros au titre du préjudice esthétique temporaire ; - il sollicite au titre de ses préjudices extrapatrimoniaux permanents une indemnisation de 51 000 euros au titre du déficit fonctionnel permanent, de 5 000 euros pour son préjudice d'agrément, de 3 000 euros au titre du préjudice esthétique permanent, de 10 000 euros pour son préjudice sexuel, de 5 000 euros pour son préjudice d'établissement et de 10 000 euros au titre de ses préjudices permanents exceptionnels. A... un mémoire en défense enregistré le 25 février 2022, la ministre des armées conclut au rejet de la requête de M. B..., à la confirmation du jugement n° 1819788/5-1 du 8 octobre 2020 du Tribunal administratif de Paris et à ce que les intérêts au taux légal soient suspendus à compter du 23 février 2021. Elle soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de la défense ; - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme C..., - et les conclusions de Mme Bernard, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. Le 29 mars 2005, alors qu'il se trouvait en opération extérieure en Côte d'Ivoire, le soldat de 1ère classe Gwennaël B... a été touché à l'abdomen A... l'explosion d'un étui de cartouche de 12,7 mm lors d'un exercice de tir programmé à la mitrailleuse. A... jugement du 22 septembre 2009, le Tribunal aux armées de Paris a relaxé les deux militaires, à savoir le directeur de tir et le responsable de la vérification de l'arme avant le tir, qui étaient poursuivis pour blessures involontaires. A... arrêté du 19 décembre 2005, une pension militaire d'invalidité a été attribuée à M. B... à titre définitif au taux de 40 % depuis le 22 juin 2005. A... courrier du 19 mars 2009, M. B... a adressé au ministre de la défense et des anciens combattants une demande préalable d'indemnisation des préjudices qu'il a subis et A... décision du 5 juin 2009, le ministre de la défense a retenu la responsabilité sans faute de l'Etat mais sans faire d'offre amiable d'indemnisation du fait de l'absence d'expertise médicale suffisante pour évaluer les préjudices indemnisables. A... ordonnance de référé du 12 avril 2010, le juge des référés du Tribunal administratif de Paris a condamné l'Etat à verser à M. B... une provision de 20 000 euros. A... ordonnance du 17 décembre 2013, le juge des référés du Tribunal administratif de Paris a ordonné une expertise médicale et l'expert, le docteur E..., a déposé son rapport le 26 juin 2014. M. B... a formé le 7 mai 2018 un recours administratif préalable obligatoire devant la commission des recours des militaires tendant à l'indemnisation des préjudices qu'il estime avoir subis à hauteur de 302 804,26 euros et un refus implicite lui a été opposé. M. B... a alors saisi le Tribunal administratif de Paris d'une demande de condamnation de l'Etat à lui verser cette somme en réparation des préjudices subis du fait de son accident de service. A... décision du 23 janvier 2019 postérieure à l'introduction de la requête devant les premiers juges, la ministre des armées a indemnisé M. B... pour les préjudices consécutifs à l'accident en litige A... le versement d'une somme de 7 000 euros, déduction faite de la provision de 20 000 euros déjà versée A... mandatement du 6 août 2010. A... jugement n° 1819788/5-1 du 8 octobre 2020, le Tribunal administratif de Paris a condamné l'Etat à verser à M. B... la somme de 4 697,60 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 7 mai 2018 avec capitalisation des intérêts le 7 mai 2019 ainsi qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date. M. B... relève appel ce jugement en demandant l'annulation de ses articles 1er et 3 lui accordant une indemnisation de 4 697,60 euros et rejetant le surplus de ses conclusions indemnitaires. Sur les conclusions indemnitaires : En ce qui concerne le principe de la responsabilité de l'État : 2. Aux termes de l'article L. 4123-2 du code de la défense : " Les militaires bénéficient des régimes de pensions ainsi que des prestations de sécurité sociale dans les conditions fixées A... le code des pensions civiles et militaires de retraite, le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre et le code de la sécurité sociale (...) ". Aux termes de l'article L. 121-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " Ouvrent droit à pension : / 1° Les infirmités résultant de blessures reçues A... suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés A... le fait ou à l'occasion du service (...) ". 3. Eu égard à la finalité qui lui est assignée A... les dispositions de l'article L. 121-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre et aux éléments entrant dans la détermination de son montant, la pension militaire d'invalidité doit être regardée comme ayant pour objet de réparer, d'une part, les pertes de revenus et l'incidence professionnelle de l'incapacité physique et, d'autre part, le déficit fonctionnel, entendu comme l'ensemble des préjudices à caractère personnel liés à la perte de la qualité de la vie, aux douleurs permanentes et aux troubles ressentis A... la victime dans ses conditions d'existence personnelles, familiales et sociales, à l'exclusion des souffrances éprouvées avant la consolidation, du préjudice esthétique, du préjudice sexuel, du préjudice d'agrément lié à l'impossibilité de continuer à pratiquer une activité spécifique, sportive ou de loisirs, et du préjudice d'établissement lié à l'impossibilité de fonder une famille. Lorsqu'elle est assortie de la majoration prévue à l'article L. 133-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, la pension a également pour objet la prise en charge des frais afférents à l'assistance A... une tierce personne. 4. En instituant la pension militaire d'invalidité, le législateur a entendu déterminer forfaitairement la réparation à laquelle les militaires peuvent prétendre, au titre des préjudices mentionnés ci-dessus, dans le cadre de l'obligation qui incombe à l'État de les garantir contre les risques qu'ils courent dans l'exercice de leur mission. Cependant, si le titulaire d'une pension a subi, du fait de l'infirmité imputable au service, d'autres préjudices que ceux que cette prestation a pour objet de réparer, il peut prétendre à une indemnité complémentaire égale au montant de ces préjudices. En outre, dans l'hypothèse où le dommage engage la responsabilité de l'État à un autre titre que la garantie contre les risques courus dans l'exercice des fonctions, l'intéressé peut prétendre à une indemnité complémentaire au titre des préjudices que la pension a pour objet de réparer, si elle n'en assure pas une réparation intégrale. Lorsqu'il est saisi de conclusions en ce sens, il incombe au juge administratif de déterminer le montant total des préjudices que la pension a pour objet de réparer, avant toute compensation A... cette prestation, d'en déduire le capital représentatif de la pension et d'accorder à l'intéressé une indemnité égale au solde, s'il est positif. 5. Pour déterminer si l'accident de service ayant causé un dommage à un militaire est imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat, de sorte que ce militaire soit fondé à engager une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale A... l'Etat de l'ensemble du dommage, il appartient au juge administratif, saisi de conclusions en ce sens, de rechercher si l'accident est imputable à une faute commise dans l'organisation ou le fonctionnement du service. 6. Il résulte de l'instruction qu'au cours d'un exercice de tir programmé à la mitrailleuse sur affût à partir d'un véhicule militaire, M. B..., soldat de 1ère classe, a été touché à l'abdomen A... l'explosion d'un étui de cartouche de 12,7 mm le 29 mars 2005 à Lomo, en Côte d'Ivoire. La séance de tir était dirigée A... le lieutenant D... secondé A... le maréchal des logis F.... Il résulte de l'instruction que, conformément aux mesures de sécurité appliquées en temps de paix prévues A... le règlement de sécurité au tir TTA 207, l'arme avait été vérifiée avant le tir A... M. F... à la demande du directeur de tir qui pouvait désigner un représentant pour effectuer cette tâche. Or, il résulte de l'instruction que M. F... est titulaire d'un certificat de tireur d'élite depuis 1997 et a suivi l'instruction concernant la mitrailleuse de 12,7 mm. Il s'ensuit qu'en confiant cette mission à M. F..., le lieutenant D... a choisi un militaire expérimenté et que cette vérification a été effectivement réalisée. La circonstance qu'il ressort de l'avis du ministre de la défense du 20 juillet 2006 que M. F... a reconnu, après une reconstitution, avoir omis de bloquer le canon de l'arme après sa vérification et du jugement du Tribunal aux armées de Paris du 22 septembre 2009 qu'il n'a " pas procédé à la deuxième vérification, en tournant cette fois-ci le canon vers la gauche, jusqu'à entendre trois " clics ", ce qui avait pour effet de bloquer le canon et qu'il a expliqué cette omission A... le fait qu'il était habitué à utiliser la mitrailleuse de 12,7 mm dans la version destinée à équiper le char Leclerc " est seulement de nature à établir un lien entre le fait générateur du dommage subi A... M. B... et le service, mais ne permet pas de caractériser, contrairement à ce que soutient ce dernier, l'existence d'une faute qui aurait été commise A... l'administration dans l'organisation ou le fonctionnement du service. Ainsi, la preuve de la carence du service résultant selon le requérant d'un défaut de surveillance avant que l'ordre de débuter le tir ne soit donné n'est pas établie. A... ailleurs, la circonstance que l'adjudant-chef Mathey, responsable de l'armement petit calibre au 4ème Bataillon d'infanterie de Marine (BIMa), ait constaté que la mitrailleuse présentait un espace de tête trop important et une mauvaise fixation du canon et que ces anomalies ont pu, selon lui, créer l'incident de tir en question n'est pas non plus de nature à établir l'existence d'une faute dans l'organisation ou le fonctionnement du service. Enfin, si M. B... se prévaut de ce qu'en admettant que l'arme était bien réglée, l'explosion serait alors survenue à cause d'une anomalie affectant le fonctionnement de l'arme qui aurait été mal préparée A... l'armurerie, cette circonstance n'est pas établie en l'absence d'expertise réalisée sur l'arme litigieuse. Il suit de là qu'en l'absence de défaut de vérification de l'arme avant son utilisation et de défaillance avérée du service de l'armurerie, M. B... n'établit pas qu'il existerait pour ces motifs un manquement de l'Etat constitutif d'une faute dans l'organisation ou le fonctionnement du service de nature à engager sa responsabilité et à ouvrir droit à la réparation intégrale de son préjudice. En ce qui concerne la réparation des préjudices : 7. Si M. B... n'a pas droit à la réparation intégrale de son préjudice, il peut néanmoins prétendre, comme indiqué au point 4 du présent arrêt, au titre de la garantie contre les risques courus dans l'exercice des fonctions, à une indemnité complémentaire égale au montant des préjudices qu'il a subis du fait de l'infirmité imputable au service, distincts de ceux que sa pension d'invalidité a pour objet de réparer. 8. En premier lieu, comme l'ont considéré à bon droit les premiers juges, M. B... n'est pas fondé à demander l'indemnisation de ses pertes de gains professionnels actuelles et futures, de son déficit fonctionnel temporaire et permanent, ni de l'incidence professionnelle de son accident qui sont des préjudices que sa pension d'invalidité a pour objet de réparer. 9. En deuxième lieu, si M. B... se prévaut d'un préjudice lié à des frais divers de téléphone et de télévision à l'hôpital et de dépenses de santé futures, il n'apporte en cause d'appel comme en première instance aucun élément à l'appui de sa demande tendant à établir la réalité de ces préjudices. A... suite, ses conclusions d'appel tendant à leur indemnisation ne peuvent qu'être rejetées. 10. En troisième lieu, il ressort du rapport d'expertise du docteur E... du 26 juin 2014 que M. B... a eu besoin de l'assistance d'une tierce personne à hauteur de deux heures A... jour du 29 mars 2005 au 31 juillet 2005. Ainsi, pour cette période, en retenant un tarif horaire qui fera l'objet d'une juste évaluation à 18 euros sur la base d'une année de 412 jours afin de tenir compte des congés payés et des jours fériés, il y a lieu de porter la somme allouée à l'intéressé A... les premiers juges au titre de ce préjudice à 5 040 euros. 11. En quatrième lieu, s'agissant des souffrances endurées évaluées à 4/7 A... l'expert, il y a lieu de maintenir la juste évaluation faite de ce chef de préjudice A... les premiers juges en allouant à M. B... la somme de 8 000 euros. 12. En cinquième lieu, il résulte de l'instruction et notamment de l'expertise médicale du 26 juin 2014 que le préjudice esthétique temporaire subi A... M. B... a été évalué à 2,5 sur une échelle de 7 et le préjudice esthétique permanent à 1,5 sur la même échelle. Les premiers juges ont procédé à une juste évaluation de ce poste de préjudice en allouant à M. B... la somme totale de 4 000 euros, qui doit être maintenue. 13. En sixième lieu, il résulte de l'instruction et notamment de l'expertise médicale du 26 juin 2014 que les activités sportives nécessitant le soulèvement d'une charge de plus de 35 kg et pouvant traumatiser la ceinture abdominale sont contre-indiquées pour M. B... alors qu'il soutient qu'il pratiquait antérieurement la musculation et le rugby. Les premiers juges ont procédé à une juste évaluation de ce poste de préjudice en allouant à M. B... la somme totale de 5 000 euros, qui doit être maintenue. 14. En septième lieu, il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise du 26 juin 2014 que M. B... a des troubles sexuels liés à l'accident dont il a été victime. Les premiers juges ont procédé à une juste appréciation de son préjudice sexuel en lui allouant la somme de 2 000 euros. 15. En huitième lieu, si M. B... se prévaut de l'existence d'un préjudice d'établissement, il résulte de l'instruction et notamment de l'expertise médicale réalisée A... le docteur de Poncheville le 22 mars 2007 que M. B... est en couple et qu'il a eu un enfant. Il s'ensuit que c'est à bon droit que les premiers juges ont rejeté sa demande tendant à la réparation de la perte de chance de réaliser normalement un projet de vie familiale. 16. En dernier lieu, il résulte de l'instruction que le docteur E... a relevé dans son rapport d'expertise que M. B... a subi des souffrances psychologiques liées aux circonstances dans lesquelles est intervenu l'accident, à savoir une plaie hémorragique abdominale survenue dans une zone située en pleine montagne loin d'une base et qu'il souffre de ce fait d'un syndrome psychologique post-traumatique identifié A... le docteur de Poncheville dans son expertise. Il s'ensuit que les premiers juges ont procédé à une juste appréciation de son préjudice moral en allouant à M. B... la somme de 10 000 euros. 17. Il résulte de ce qui précède que l'indemnité complémentaire due à M. B... s'élève à 34 040 euros et que, A... suite, M. B... est seulement fondé à soutenir que la somme de 4 697,60 euros, déduction faite de l'indemnité de 27 000 euros qui a été attribuée A... la ministre des armées au titre des préjudices résultant de l'accident du 29 mars 2005, que l'Etat a été condamné à lui verser A... le jugement n° 2000099 du 15 décembre 2020 du Tribunal administratif de Paris doit être portée à la somme de 7 040 euros. Sur les intérêts et leur capitalisation : 18. Même en l'absence de demande tendant à l'allocation d'intérêts, tout jugement prononçant une condamnation à une indemnité fait courir les intérêts au jour de son prononcé jusqu'à son exécution, sauf si le retard de paiement est imputable au créancier. La ministre des armées soutient que le retard de paiement des sommes dues au requérant peut être regardé comme lui étant imputable dès lors qu'elle a, A... courriel du 11 janvier 2021, demandé au conseil de M. B... de produire les documents nécessaires à l'exécution du jugement attaqué et qu'aucune réponse n'a été apportée à cette demande, comme à la lettre du 19 février 2021 adressée cette fois directement à M. B... tendant à l'exécution de la décision de la ministre des armées du 23 janvier 2019 l'indemnisant des préjudices consécutifs à l'accident survenu en service le 29 mars 2005. Toutefois, dès lors qu'il résulte de l'instruction que la ministre des armées verse, A... ailleurs, à l'intéressé une pension militaire d'invalidité, elle dispose nécessairement, A... suite, de ses coordonnées bancaires. Il s'ensuit que, dans les circonstances de l'espèce, le retard de paiement ne peut être regardé comme étant imputable à M. B..., les conclusions de la ministre des armées tendant à ce que les intérêts au taux légal soient suspendus à compter du 23 février 2021, ne peuvent être accueillies. La somme qui est allouée à M. B... portera, ainsi, intérêt au taux légal à compter du 7 mai 2018 date de réception A... la commission des recours des militaires de sa demande indemnitaire préalable jusqu'au jour où le règlement sera effectué A... la ministre des armées. 19. La capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond, même si, à cette date, les intérêts sont dus depuis moins d'une année. En ce cas, cette demande ne prend toutefois effet qu'à la date à laquelle, pour la première fois, les intérêts sont dus pour une année entière. La capitalisation des intérêts a été demandée A... M. B... le 31 octobre 2018 dans sa requête de première instance. Il y a lieu de faire droit à cette demande à compter du 7 mai 2019, date à laquelle était due, pour la première fois, une année d'intérêts, ainsi qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date. Sur les frais liés à l'instance : 20. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de condamner l'Etat à verser à M. B... la somme de 2 000 euros qu'il demande au titre des frais exposés A... lui et non compris dans les dépens. DÉCIDE : Article 1er : La somme de 4 697,60 euros, déduction faite de l'indemnité de 27 000 euros qui a été attribuée A... la ministre des armées au titre des préjudices résultant de l'accident du 29 mars 2005, que l'Etat a été condamné à verser à M. B... A... le jugement n° 1819788/5-1 du 8 octobre 2020 du Tribunal administratif de Paris est portée à la somme de 7 040 euros. Article 2 : L'article 1er du jugement n° 1819788/5-1 du 8 octobre 2020 du Tribunal administratif de Paris est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt. Article 3 : Il est mis à la charge de l'Etat la somme totale de 2 000 euros à verser à M. B... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté. Article 5 : Les conclusions de la ministre des armées tendant à ce que les intérêts au taux légal soient suspendus à compter du 23 février 2021 sont rejetées. Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. G... B... et au ministre des armées. Délibéré après l'audience du 16 mai 2022, à laquelle siégeaient : - M. Le Goff, président, - M. Ho Si Fat, président assesseur, - Mme Collet, première conseillère. Rendu public A... mise à disposition au greffe le 2 juin 2022. La rapporteure, A. C... Le président, R. LE GOFF La greffière, E. VERGNOL La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 20PA03852
Cours administrative d'appel
Paris