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Conseil d'État, 6ème chambre, 21/07/2022, 436673, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : M. B... A... a demandé au tribunal départemental des pensions militaires de Nîmes d'annuler la décision du 29 août 2016 par laquelle le ministre de la défense a rejeté sa demande de pension militaire d'invalidité pour quatre infirmités causées par un accident de la circulation ayant eu lieu le 4 septembre 1974. Par un jugement n° 16/00017 du 12 octobre 2018, le tribunal départemental des pensions militaires de Nîmes a, après un jugement avant dire-droit du 14 avril 2017, ordonné une expertise et condamné l'Etat à payer à M. A... une pension au taux de 40 % à compter de sa demande de pension du 29 juillet 2015. Par un arrêt n° 18/0008 du 28 octobre 2019, la cour régionale des pensions militaires de Nîmes, sur appel de la ministre des armées, infirmé ce jugement et déclaré irrecevable la demande de M. A.... Par un pourvoi, enregistré le 12 décembre 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... demande au Conseil d'Etat d'annuler cet arrêt. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 ; - le décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018 ; - le décret n° 2021-1583 du 7 décembre 2021 ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Cédric Fraisseix, maître des requêtes en service extraordinaire, - les conclusions de M. Stéphane Hoynck, rapporteur public ; Considérant ce qui suit : 1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la ministre des armées a demandé à la cour régionale des pensions de Nîmes l'annulation du jugement par lequel le tribunal départemental des pensions de Nîmes a déclaré imputables au service les infirmités de M. A... qui entraînent un taux d'invalidité de 40 %, et condamné l'Etat à lui verser une pension à ce taux à compter de sa demande de pension du 29 juillet 2015. Par un arrêt du 28 octobre 2019, contre lequel M. A... se pourvoit en cassation, la cour régionale des pensions de Nîmes a fait droit à l'appel de la ministre contre ce jugement. 2. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que la cour s'est fondée, pour annuler le jugement du tribunal départemental des pensions au motif de la tardiveté de la requête de M. A..., sur la preuve de la notification régulière, le 9 juillet 1976, de la décision du 22 juin 1976 rejetant sa demande de pension militaire, par une lettre recommandée avec accusé de réception postal enregistré sous le numéro Lyon RP 7504. Il ressort cependant des pièces du dossier que cette pièce n'a pas été communiquée au requérant devant la cour. Il résulte de ce qui précède qu'en se fondant sur cette pièce, sans la soumettre à M. A..., la cour régionale des pensions de Nîmes a méconnu le caractère contradictoire de la procédure. Par suite, M. A... est fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué. 3. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de renvoyer l'affaire à la cour administrative d'appel de Toulouse, compétente en vertu des dispositions combinées du décret du 28 décembre 2018 portant transfert de compétence entre juridictions de l'ordre administratif pris pour l'application de l'article 51 de la loi du 13 juillet 2018 relative à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025 et portant diverses dispositions intéressant la défense, des dispositions du décret du 7 décembre 2021 portant création de la cour administrative d'appel de Toulouse et de l'article R. 221-7 du code de justice administrative. D E C I D E : -------------- Article 1er : L'arrêt de la cour régionale des pensions de Nîmes du 28 octobre 2019 est annulé. Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Toulouse. Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. B... A... et au ministre des armées. Délibéré à l'issue de la séance du 16 juin 2022 où siégeaient : Mme Suzanne von Coester, assesseure, présidant ; Mme Isabelle de Silva, présidente de chambre et M. Cédric Fraisseix, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteur. Rendu le 21 juillet 2022. La présidente : Signé : Mme Suzanne von Coester Le rapporteur : Signé : M. Cédric Fraisseix La secrétaire : Signé : Mme Valérie PeyrisseECLI:FR:CECHS:2022:436673.20220721
Conseil d'Etat
CAA de MARSEILLE, 6ème chambre, 04/07/2022, 21MA03791, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme A... D... a demandé au tribunal administratif de Toulon de condamner l'Etat à lui payer la somme de 178 715 euros en réparation des préjudices subis en raison de l'accident de service dont elle a été victime le 6 octobre 2014, assortie des intérêts à compter de la réception de la demande préalable et de la capitalisation des intérêts. Par un jugement n° 1901272 du 5 juillet 2021, le tribunal a condamné l'Etat à verser à Mme D... la somme de 16 300 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 20 décembre 2018, avec capitalisation des intérêts échus à la date du 20 décembre 2019, puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date, et rejeté le surplus des conclusions de la requête de Mme D.... Procédure devant la Cour : Par une requête, enregistrée le 3 septembre 2021, Mme D..., représentée par Me Varron Charrier, demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il n'a pas fait totalement droit à ses conclusions indemnitaires ; 2°) de condamner l'Etat à lui payer la somme de 71 171,56 euros en réparation des préjudices subis en raison de l'accident de service survenu le 6 octobre 2014 dont elle a été victime, assortie des intérêts à compter de la réception de la demande préalable et de la capitalisation des intérêts ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : 1°) le rectorat a commis une faute dès lors que, connaissant sa pathologie, ses supérieurs l'ont affectée à un poste nécessitant le port de charges lourdes, en méconnaissance de sa fiche de poste de gestionnaire-comptable de 2014 qui prévoyait qu'elle était d'ailleurs en principe positionnée sur un poste administratif au secrétariat des élèves comprenant " 50 % intendance et 50 % administration ", alors que, compte tenu de son état de santé, elle n'aurait pas été victime de cet accident si elle avait été affectée à un poste administratif ; 2°) elle est fondée à demander réparation de ses préjudices dans les conditions suivantes : - le taux d'incapacité permanente partielle (IPP) a été fixé à 10 % selon une expertise du 14 septembre 2018, mais c'est un taux de 20 % qui devrait être retenu ; pour une IPP de 20 %, le montant de l'allocation temporaire d'invalidité aurait dû être de 2 755,38 euros par an, soit de 229,61 euros par mois ; la perte de revenus professionnels est constituée par l'absence de versement de l'allocation temporaire d'invalidité entre le 6 octobre 2014 et le 8 juillet 2016, date à laquelle elle a perçu cette allocation, et par le fait que cette allocation aurait dû être calculée selon un taux de 20 % et non de 10 % ; sa perte de gains jusqu'au 10 février 2021 s'élève donc à 11 171,56 euros se décomposant comme suit : entre le 6 octobre 2014 et le 8 juillet 2016 : 229,61 euros par mois pendant vingt-et-un mois soit 4 821,81 euros, un manque à gagner de 115,45 euros par mois entre le 8 juillet 2016 et le 10 février 2021 soit 6 349,75 euros (115,45 euros x quatre ans et sept mois) ; - la somme de 10 000 euros viendra réparer l'incidence professionnelle ; - elle est fondée à obtenir 2 000 euros en réparation de son déficit fonctionnel temporaire ; - le Dr C... ayant chiffré son pretium doloris à hauteur de 2,5/7, elle sollicite l'indemnisation de ce chef de préjudice à hauteur de 5 000 euros sauf à parfaire ; - elle sollicite l'indemnisation de son préjudice d'agrément à hauteur de 3 000 euros, privée désormais d'activités sportives ; - il résulte des éléments du dossier que le déficit fonctionnel temporaire (DFT) justifie l'allocation d'une somme de 2 000 euros à titre de réparation, en raison, d'après le Dr C..., d'un DFT de 25 % du 6 octobre 2014 au 6 janvier 2015, de 10 % du 7 janvier au 7 avril 2015 et de 6 % du 8 avril au 30 septembre 2015 ; - le DFP est de 20 % (10 % au titre des séquelles physiques, rapport du Dr B... ; 10 % au titre des séquelles psychologiques, rapport du Dr E... ; 1 % au titre de la gêne à la marche), taux non contesté et repris par l'administration rectorale dans son courrier du 12 avril 2021 l'informant que son dossier était transmis à la commission départementale de réforme ; âgée de soixante ans, l'appelante sollicite l'indemnisation de ce chef de préjudice à hauteur de 30 000 euros ; - elle sollicite 10 000 euros en réparation de son préjudice sexuel justifié. Par un mémoire en défense, enregistré le 10 mai 2022, le recteur de l'académie de Nice conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés. Le 25 mai 2022, un mémoire a été enregistré pour Mme D... et non communiqué en application des dispositions de l'article R. 611-1 du code de justice administrative. Par ordonnance du 6 mai 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 31 mai 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ; - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - le code de justice administrative. La présidente de la Cour a décidé, par décision du 23 mai 2022, de désigner M. Philippe Portail, président assesseur, pour présider par intérim la 6éme chambre en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Gilles Taormina, rapporteur, - les conclusions de M. Renaud Thielé, rapporteur public, - et les observations de Me Varron Charrier, représentant Mme D.... Deux notes en délibéré présentées pour Mme D... ont été enregistrées les 22 juin 2022 et 24 juin 2022. Considérant ce qui suit : 1. Mme D..., affectée au service de restauration du lycée professionnel de La Coudoulière à Six-Fours-Les-Plages, a été victime le 6 octobre 2014 d'un accident reconnu imputable au service. Alors qu'elle distribuait des serviettes aux élèves, elle a attrapé avec sa main gauche un bac à verres vide qu'un élève avait poussé à hauteur de ses yeux, son bras gauche ayant fait un brusque mouvement de torsion entraînant des lésions. Par une décision du 8 décembre 2014, le recteur de l'académie de Nice lui a alors accordé un congé à plein traitement du 6 octobre au 19 novembre 2014, lequel a été prolongé, par une décision du 22 décembre 2014, jusqu'au 19 décembre suivant. Par une décision du 18 septembre 2015, l'administration lui a accordé un congé à plein traitement jusqu'au 29 juin 2015. Par cette même décision, le recteur a indiqué que les arrêts de travail postérieurs à la date du 29 juin 2015 seraient pris en charge au titre des congés de maladie ordinaire. Par ordonnance n° 1504236 du 23 février 2016, le président du tribunal administratif de Toulon, statuant en référé, a ordonné une expertise médicale confiée au Dr C..., concernant l'état de Mme D.... Le 23 juin 2016 l'expert commis a déposé son rapport. 2. Par une décision du 9 janvier 2017, le recteur a notamment revu, après avis de la commission de réforme du 8 décembre 2016, la date de sa consolidation en la fixant au 30 septembre 2015. Mme D... perçoit à ce titre une allocation temporaire d'invalidité depuis le 8 juillet 2016, sur la base d'un taux d'invalidité de 20 %. 3. Par jugement n° 1504114, 1504115 du 20 février 2018, le tribunal administratif de Toulon a notamment dit n'y avoir lieu de statuer sur les conclusions aux fins d'annulation de la décision du 18 septembre 2015 du recteur de l'académie de Nice en tant qu'elle fixe la date de consolidation de Mme D... au 30 juin 2015, annulé la décision du 18 septembre 2015 du recteur de l'académie de Nice en tant qu'elle refusait à Mme D... de reconnaître l'imputabilité au service des arrêts de maladie postérieurs au 29 juin 2015 et avait fixé son taux d'incapacité permanente partielle à 2 %, et a enjoint au recteur de l'académie de Nice de procéder au réexamen de sa situation. 4. Par jugement n° 1700765 du 23 mai 2019, le tribunal administratif de Toulon a annulé, pour illégalité externe, la décision du 9 janvier 2017 par laquelle le recteur de l'académie de Nice a refusé de reconnaître comme étant imputable au service, le préjudice psychologique dont se prévaut Mme D... suite à l'accident de service du 6 octobre 2014 et a enjoint au recteur de l'académie de Nice de procéder au réexamen de sa situation. Suite à ce jugement, Mme D... a été examinée à la demande de l'administration, par le Dr E..., médecin psychiatre, le 16 novembre 2020. 5. Sa demande d'indemnisation de son préjudice formulée par courrier du 18 décembre 2018, ayant fait l'objet d'une décision implicite de rejet, Mme D... relève appel du jugement n° 1901272 du 5 juillet 2021 en tant que le tribunal administratif de Toulon n'a fait que partiellement droit à sa requête indemnitaire. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 6. Les dispositions des articles L. 27 et L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite et 65 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat qui instituent, en faveur des fonctionnaires victimes d'accidents de service ou de maladies professionnelles, une rente viagère d'invalidité en cas de mise à la retraite et une allocation temporaire d'invalidité en cas de maintien en activité doivent être regardées comme ayant pour objet de réparer les pertes de revenus et l'incidence professionnelle résultant de l'incapacité physique causée par un accident de service ou une maladie professionnelle. Les dispositions instituant ces prestations déterminent forfaitairement la réparation à laquelle les fonctionnaires concernés peuvent prétendre, au titre de ces chefs de préjudice, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions. Ces dispositions ne font en revanche obstacle ni à ce que le fonctionnaire qui subit, du fait de l'invalidité ou de la maladie, des préjudices patrimoniaux d'une autre nature ou des préjudices personnels, obtienne de la personne publique qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice, ni à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre la collectivité, dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette collectivité. S'agissant des préjudices patrimoniaux permanents : 7. Il résulte de l'instruction, et notamment de sa fiche de poste, que Mme D..., gestionnaire-comptable, devait, compte tenu de ses fonctions, occuper un poste administratif exclusivement consacré à la gestion administrative et comptable des dossiers des élèves. Toutefois, Mme D... ne démontre pas que le rectorat aurait contrevenu à un quelconque avis médical par lequel l'administration aurait été informée de précautions particulières à prendre dans la détermination de ses fonctions. En outre, il résulte de l'instruction que le faux mouvement ayant entraîné les séquelles n'est pas en lien avec le port de charges lourdes et aurait donc pu être fait dans un autre service. Enfin, il résulte du certificat d'allocation temporaire d'invalidité du 14 février 2022 qu'il a été reconnu à Mme D... un taux d'invalidité de 20 %, distinct du taux de déficit fonctionnel permanent, taux d'invalidité sur la base duquel ladite allocation a été liquidée pour un montant annuel de 2 735,38 euros à compter du 8 juillet 2016. Dès lors, en l'absence de faute de l'administration, la requérante n'est pas fondée à demander réparation des préjudices patrimoniaux (incidence professionnelle et perte de revenus du fait de la sous-évaluation ou d'un versement tardif de l'allocation temporaire d'invalidité) qu'elle allègue, excédant la réparation forfaitaire que lui procure l'allocation temporaire d'invalidité. S'agissant des préjudices extrapatrimoniaux temporaires : 8. En premier lieu, il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise judiciaire du Dr C..., médecin expert commis par le tribunal, que Mme D... a enduré des troubles dans les conditions d'existence pendant la période du 6 octobre 2014 au 6 janvier 2015 où elle a subi un déficit fonctionnel temporaire de 25 %, du 7 janvier 2015 au 7 avril 2015 où ce déficit a été évalué à 10 % et du 8 avril 2015 au 30 septembre 2015 où ce déficit a été fixé à 6 %. Le tribunal a fait une inexacte appréciation de ce préjudice en l'évaluant à la somme de 800 euros. Il sera fait une juste évaluation du préjudice ainsi subi par Mme D... en portant cette indemnisation à 1 200 euros. 9. En second lieu, Mme D... a également subi des souffrances évaluées par l'expert judiciaire commis en première instance à 2,5 sur 7. L'expert judiciaire a tenu compte du préjudice psychologique lié à l'accident, dans le cadre de ce pretium doloris. Le tribunal ayant fait une juste appréciation de la réparation de ce préjudice en lui allouant la somme de 2 500 euros, elle n'est, par suite, pas fondée à demander à ce titre une somme d'un montant supérieur. S'agissant des préjudices extrapatrimoniaux permanents : 10. En premier lieu, il résulte de l'instruction qu'un premier expert a conclu dans son rapport d'expertise judiciaire, qu'en ce qui concerne la période post-consolidation, la date de consolidation ayant été fixée au 30 septembre 2015, Mme D... née le 30 août 1960 demeure atteinte d'un déficit fonctionnel permanent de 6 % résultant de l'accident de service dont elle a été victime le 6 octobre 2014, l'expert ayant tenu compte du préjudice psychologique lié à l'accident, dans le cadre du pretium doloris. Toutefois, suite à la réclamation de Mme D..., un médecin spécialiste en chirurgie orthopédique et traumatologique a procédé à l'examen de Mme D... à la demande du rectorat de l'académie de Nice, et a évalué dans son rapport du 14 septembre 2018 son incapacité permanente partielle résultant de l'accident de service du 6 octobre 2014 à 10 %. Un expert psychiatre qui a examiné Mme D... également à la demande du rectorat de l'académie de Nice a estimé dans son rapport du 16 novembre 2020 que l'intéressée souffre d'un syndrome de tension post-traumatique suite à l'accident de service du 6 octobre 2014, générant une incapacité permanente partielle de 10 %. Il résulte d'ailleurs d'un courrier du 12 avril 2021 adressé par le recteur à Mme D..., que celle-ci reste atteinte d'un infirmité imputable au service d'un total de 21 %. Cette infirmité qui doit être qualifiée, faute de plus de précision et de contestation dans le cadre de la présente instance, de déficit fonctionnel permanent, justifie que la somme allouée à ce titre à l'intéressée en première instance soit portée à la somme de 30 000 euros. 11. En deuxième lieu, Mme D... justifie par ailleurs ne plus pouvoir pratiquer le fitness. Le tribunal a fait une inexacte appréciation de ce préjudice d'agrément en l'évaluant à la somme de 800 euros. Il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en le portant à 1 500 euros. 12. En troisième lieu, l'existence d'un préjudice sexuel en lien avec les séquelles de l'accident de service n'étant pas davantage établi devant la Cour qu'en première instance, Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal a rejeté ses conclusions formulées à ce titre. 13. Compte tenu de tout ce qui précède, la somme totale allouée à Mme D... en réparation de son préjudice doit être portée à 35 200 euros. Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 14. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie... perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens... ". 15. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par Mme D... et non compris dans les dépens, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D É C I D E : Article 1er : L'Etat est condamné à verser à Mme D... la somme de 35 200 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 20 décembre 2018, et capitalisation des intérêts échus à la date du 20 décembre 2019, puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date. Article 2 : Le jugement n° 1901272 rendu le 5 juillet 2021 par le tribunal administratif de Toulon est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt. Article 3 : Il est mis à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme D... est rejeté. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... D... et au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse. Copie en sera adressée au recteur de l'académie de Nice. Délibéré après l'audience du 20 juin 2022, où siégeaient : - M. Philippe Portail président par intérim, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, - M. Gilles Taormina, président assesseur, - M. François Point, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 4 juillet 2022. N° 21MA03791 2
Cours administrative d'appel
Marseille
CAA de MARSEILLE, 4ème chambre, 05/07/2022, 21MA04023, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. D... E... a demandé au tribunal administratif de Marseille, d'une part, par la requête enregistrée sous le n° 2003848, d'annuler la décision du 13 mars 2018 par laquelle la direction générale des finances publiques a suspendu le paiement des arrérages de la pension servie par la CNP Assurances à compter du 1er janvier 2002, ainsi que le titre de pension qui lui a été délivré qui fait application de cette minoration. D'autre part, par la requête n° 2010344, il a demandé l'annulation de la décision du 7 juillet 2020 par laquelle la commission de recours de l'invalidité a rejeté sa demande de révision de sa pension. Par un jugement n° 2003848 - 2010344 du 19 juillet 2021, le tribunal administratif de Marseille a rejeté les requêtes de M. E.... Procédure devant la Cour : Par une requête enregistrée le 30 septembre 2021, M. E..., représenté par Me Haddad, demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 19 juillet 2021 ; 2°) d'annuler la décision du 13 mars 2018 par laquelle la direction générale des finances publiques a suspendu le paiement des arrérages de la pension servie par la CNP Assurances à compter du 1er janvier 2002 ; 3°) d'annuler l'annulation de la décision du 7 juillet 2020 par laquelle la commission de recours de l'invalidité a rejeté sa demande de révision de sa pension ; 4°) d'enjoindre à l'administration d'exécuter le jugement du tribunal des pensions de Marseille du 20 décembre 2016, sans faire application de la règle du non-cumul ; 5°) de lui accorder une pension pour l'infirmité de " céphalées " ; 6°) de lui accorder une pension pour l'infirmité de " diabète insulinodépendant " ; 7°) de lui accorder l'allocation pour tierce personne ; 8°) de porter à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - le tribunal a statué au visa d'un article L 1331-1 du code des pensions militaires et des victimes de guerre, point 7 de la décision, qui n'existe pas ; il a ainsi entaché son jugement d'une erreur de droit qui rend le jugement irrégulier ; - le tribunal n'a pas motivé le rejet de sa demande de suspension de la pension ; - c'est à tort que la règle du non-cumul lui a été appliquée puisque si le fait générateur est identique, les deux prestations ne relèvent pas du même régime juridique ; d'une part, il s'agit de l'engagement de la responsabilité de l'Etat, de l'autre de son adhésion à la CNP Assurance du fait de son impossibilité de travailler en raison de son invalidité ; l'administration ne respecte pas la prescription quadriennale en faisant rétroagir la suspension à compter de l'année 2002, et le principe de sécurité juridique est méconnu ; - il est fondé à solliciter l'allocation à la tierce personne au regard de l'expertise du docteur B... ; - il est fondé à solliciter une pension pour l'infirmité de " céphalées " qui est en relation avec les blessures survenues le 31 juillet 1961 ; - le diabète qu'il présente est lié aux troubles de l'humeur imputables au traumatisme initial et aux séquelles corporelles qu'il a généré. Par un mémoire en défense enregistré le 24 janvier 2022, la ministre des armées conclut au rejet de la requête. La ministre fait valoir que les moyens de M. E... ne sont pas fondés. Par un mémoire en défense enregistré le 25 janvier 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête. Le ministre fait valoir que les moyens de M. E... ne sont pas fondés. Par ordonnance du 10 mai 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 25 mai 2022 à 12 heures. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Ury, - et les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. M. E..., né le 12 janvier 1953, de nationalité française, a été victime à l'âge de 8 ans d'un accident de la circulation causé par un camion militaire en Algérie le 31 juillet 1961, ayant entrainé de multiples blessures. Un jugement rendu le 8 décembre 2016 par le tribunal des pensions de Marseille accorde la qualification d'attentat à cet accident au sens de la loi n° 63-778 du 31 juillet 1963 visant spécifiquement les victimes civiles de tout acte de violence en relation avec les évènements survenus sur le territoire algérien, au motif que les militaires qui étaient dans le camion fuyaient une embuscade des fellaghas. Au titre de victime civile d'un acte de violence en relation avec les évènements survenus sur le territoire algérien entre le 31 octobre 1954 et jusqu'au 29 septembre 1962, M. E... dispose d'une rente viagère versée par la CNP Assurances. L'intéressé a contesté devant le tribunal des pensions militaires de Marseille la décision du 13 mars 2018 de suspension des arrérages de la pension servie par la CNP Assurances à compter du 1er janvier 2002 ainsi que le titre de pension qui lui a été délivré faisant application de cette minoration, et par une requête présentée devant le tribunal administratif de Marseille, il a contesté la décision du 7 juillet 2020 par laquelle la commission de recours de l'invalidité a rejeté sa demande de révision de sa pension s'agissant de l'aide d'une tierce personne, des céphalées et du diabète. Il relève appel du jugement du 19 juillet 2021 qui rejette ses deux requêtes dirigées contre l'ensemble de ces décisions. Sur la régularité du jugement : 2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " les jugements sont motivés ". Il ressort des mentions du point 4 du jugement attaqué, que le tribunal a suffisamment motivé sa décision en indiquant qu'en raison de la perception par le requérant d'une rente viagère versée par CNP Assurances, et en vertu des dispositions du 2ème alinéa de l'article L. 162-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, le moyen tiré de ce que la règle de l'interdiction de cumul ne peut être appliquée à M. E..., doit être écarté. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation du jugement ne peut qu'être écarté. 3. En deuxième lieu, s'il est constant que le jugement attaqué désigne le texte sur lequel il se fonde s'agissant de la révision de la pension, comme étant l'article " L. 1331-1 " du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ", alors qu'il s'agit en réalité de celui de l'article " L. 133-1 " du même code, dont il cite les termes exacts à la suite de la mention de l'article, cette simple erreur de plume ne constitue toutefois pas, en l'absence de toute ambiguïté sur la législation appliquée par les premiers juges, une irrégularité de nature à en justifier l'annulation. Sur les droits à pension de M. E... : En ce qui concerne la suspension de la pension : 4. Aux termes de l'article 112 du code des pensions militaires d'invalidité des victimes de la guerre : " Les pensions définitives ou temporaires, majorations et allocations concédées conformément au présent code demeurent soumises à toutes les règles relatives au cumul édictées pour les pensions militaires par les lois et règlements en vigueur (...) ". Aux termes également de l'article L. 219 du même code : " Les indemnités pouvant être dues aux personnes visées au paragraphe 2 de la section 1 ou à leurs ayants cause, en raison du fait générateur du droit à pension, en vertu, soit d'une législation étrangère, soit d'autre régime français de réparation, sont déduites des sommes qui reviennent aux victimes civiles ou à leurs ayants cause. (...) ". 5. Il résulte de l'instruction que M. E... a obtenu d'une part, une rente viagère d'accident du travail versée par la CNP Assurances au titre de l'accident du 31 juillet 1961, et d'autre part, une pension militaire d'invalidité en exécution d'un jugement du 8 décembre 2016 du tribunal des pensions de Marseille, pour les conséquences du même acte du 31 juillet 1961. Ainsi, même si le fondement juridique est différent, contrairement à ce qu'il soutient, M. E... bénéficiait de deux régimes de réparations pour le même fait générateur. Dès lors, les dispositions précitées de l'article 219 du code des pensions militaires d'invalidité des victimes de la guerre relatives au cumul pouvaient légalement trouver à s'appliquer. Par suite, les conclusions de M. E..., dirigées contre la décision du 13 mars 2018 par laquelle la direction générale des finances publiques a suspendu, à compter du 1er janvier 2002, le versement de la pension versée par l'Etat, dès lors qu'il n'est pas contesté que le montant de ladite pension était inférieur à celui de la pension versée par la CNP Assurances, doivent être rejetées. 6. Par ailleurs, à supposer qu'il le soutienne pour contester le bien-fondé de la décision de suspension de sa pension à compter du 2 janvier 2002, M. E... n'est pas fondé à se prévaloir des dispositions de la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics, pour opposer l'exception de prescription quadriennale à l'Etat, car ce texte ne trouve à s'appliquer qu'au profit notamment de l'Etat, et non des administrés. Par suite, ce moyen doit être écarté comme inopérant. 7. Enfin en se bornant à soutenir que le principe de sécurité juridique est méconnu sans plus de précision, M. E... ne met pas le juge en mesure d'apprécier ce moyen qui ne peut qu'être écarté. En ce qui concerne la révision de la pension : 8. En premier lieu, aux termes de l'article L. 124-20 du code des pensions militaires d'invalidité des victimes de la guerre : " Il appartient aux postulants de faire la preuve de leurs droits à pension en établissant que l'infirmité invoquée a bien son origine dans une blessure ou dans une maladie causée par l'un des faits prévus aux sections 1 et 2 du présent chapitre ". 9. D'une part, à l'appui de sa demande d'attribution du 25 mai 2018 d'une pension pour l'infirmité de " céphalées ", M. E..., alors âgé de 58 ans, fait valoir que les interventions chirurgicales qu'il a subies, outre le coma d'une durée de trois mois dans lequel il s'est trouvé plongé, à la suite de l'accident du 31 juillet 1961 survenu à l'âge de 8 ans, lui causent de sévères céphalées et des douleurs quotidiennes qui s'accroissent avec l'âge, notamment suite à des fractures du crâne incurables. Toutefois, hormis les éléments décrits par l'intéressé, celui-ci n'apporte aucun document médical de nature à établir un lien de causalité avec les pathologies qu'il évoque et les conséquences de l'accident précité dont il souffre depuis l'âge de 8 ans. 10. D'autre part, la circonstance que M. E... a été hospitalisé à l'âge de 8 ans en raison de l'accident susmentionné, n'est pas plus de nature à établir que le diabète qu'il présente au 25 mai 2018, pour lequel il a sollicité une pension pour l'infirmité de " diabète insulinodépendant ", trouve son origine dans les conséquences de l'accident qu'il a subi dans sa prime enfance, ou même à supposer qu'il le soutienne, qu'il puisse être rattaché à l'infirmité " syndrome dépressif réactionnel " pour laquelle il est pensionné. 11. En second lieu, aux termes de l'article L. 133-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre : " Les invalides que leurs infirmités rendent incapables de se mouvoir, de se conduire ou d'accomplir les actes essentiels de la vie et qui, vivant chez eux, sont obligés de recourir de manière constante aux soins d'une tierce personne, ils ont droit, à titre d'allocation spéciale, à une majoration égale au quart de la pension. (...) ". 12. D'une part, si ces dispositions ne peuvent être interprétées comme exigeant que l'aide d'un tiers soit nécessaire à l'accomplissement de la totalité des actes nécessaires à la vie courante, elle impose toutefois que l'aide d'une tierce personne soit indispensable ou bien pour l'accomplissement d'actes nombreux se répartissant tout au long de la journée, ou bien pour faire face soit à des manifestations imprévisibles des infirmités dont le pensionné est atteint, soit à des soins dont l'accomplissement ne peut être subordonné à un horaire préétabli, et dont l'absence mettrait sérieusement en danger l'intégrité physique ou la vie de l'intéressé. D'autre part, le bénéfice de l'article L. 133-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre en faveur des invalides que leurs infirmités rendent incapables de se mouvoir, de se conduire ou d'accomplir les actes essentiels à la vie ne peut être accordé que si la nécessité de l'aide constante d'une tierce personne est la conséquence directe et exclusive d'affections imputables au service. 13. Au cas de l'espèce, il résulte des termes de l'expertise médicale du docteur B... du 3 octobre 2018, expert mandaté par l'administration, que M. E... se déplace en fauteuil roulant et qu'il est incapable de sortir de chez lui. S'il peut réaliser les actes de la vie courante, il doit être assisté au quotidien en raison de sa faible endurance à l'effort. S'il peut passer du fauteuil au lit, du lit au fauteuil, et faire sa toilette, il doit être installé dans la salle de bains et être aidé, et il ne peut pas préparer ses repas ou mettre la table. L'expert indique que l'état de santé de M. E... requiert l'assistance d'une tierce personne à hauteur de six heures par jour. Ainsi, il résulte de l'instruction que la possibilité de prodiguer l'aide nécessaire à M. E..., qui reste autonome pour une partie des actes de la vie courante, peut être dispensée à des horaires préétablis. Dans ces conditions, l'appelant n'est pas fondé à soutenir qu'il a droit à la majoration prévue à l'article L. 133-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre dont les conditions sont strictement entendues. 14. Il résulte de tout ce qui précède que M. E... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa requête n° 2010344, en tant qu'il a rejeté sa demande d'obtention de la majoration pour assistance à tierce personne. Sur les frais exposés à l'occasion du litige : 15. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens (...) ". Il résulte de ces dispositions que le paiement des sommes exposées et non comprises dans les dépens ne peut être mis à la charge que de la partie qui perd pour l'essentiel. 16. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre une somme à la charge de l'Etat au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. D É C I D E : Article 1er : La requête de M. E... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... E..., au ministre des armées et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté. Délibéré après l'audience du 21 juin 2022, où siégeaient : - M. Badie, président, - M. Revert, président assesseur, - M. Ury, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 juillet 2022 N° 21MA040232
Cours administrative d'appel
Marseille
CAA de MARSEILLE, 4ème chambre, 05/07/2022, 21MA00422, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... D... a demandé au tribunal des pensions militaires de Haute-Corse, qui a transmis cette demande au tribunal administratif de Bastia, d'annuler la décision en date du 7 décembre 2016 par laquelle le ministre de la défense a rejeté sa demande de révision de pension militaire d'invalidité pour aggravation des infirmités dénommées " pleurésie avec retentissement cardiaque " et " cardiopathie ischémique ". Par un jugement n° 1901458 du 1er décembre 2020, le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés les 29 janvier et 24 juin 2021, M. D..., représenté par Me Luca, demande à la Cour : 1°) à titre principal, d'homologuer le rapport d'expertise judiciaire du 22 février 2019 ; 2°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bastia du 1er décembre 2020 ; 3°) d'annuler la décision du ministre de la défense du 7 décembre 2016 refusant de faire droit à sa demande de révision de pension pour aggravation de l'infirmité dite " cardiopathie ischémique " ; 4°) de faire droit à sa demande de révision de pension pour aggravation de cette infirmité au taux de 10 % supplémentaire, portant le taux d'invalidité dû à ce titre à 25 % ; 5°) de mettre à la charge de l'Etat les entiers dépens et la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; 6°) subsidiairement, de saisir l'expert judiciaire désigné par jugement avant dire droit du tribunal des pensions militaires d'invalidité de Haute-Corse, afin de déterminer s'il a rendu son rapport en prenant pour date de référence celle de la demande de révision ou celle de l'examen médical du requérant. Il soutient que : - contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, l'expert judiciaire, conformément aux prescriptions du jugement avant dire droit, ainsi qu'aux dispositions de l'article L. 6 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, s'est placé à la date de la demande de révision, et non à celle des opérations d'expertise, pour rendre son rapport concluant à l'aggravation de la cardiopathie ischémique ; - en cas de doute sur ce point, il reviendrait à la Cour de saisir l'expert judiciaire ; - son infirmité de cardiopathie ischémique s'est notablement aggravée, comme l'ont constaté le rapport médical du 18 août 2015 et le rapport d'expertise judiciaire, et le taux d'invalidité correspondant doit être porté à 25 % ; - il renonce à solliciter la révision de sa pension pour apparition d'une infirmité nouvelle, dite broncho-pneumopathie chronique obstructive non tabagique légère, qui est distincte de la pleurésie mais en relation médicale directe et certaine avec elle. Par des mémoires en défense, enregistrés les 25 mai et 30 juillet 2021, la ministre des armées conclut au rejet de la requête, en soutenant que les moyens qui y sont présentés ne sont pas fondés. Par ordonnance du 17 mai 2022 la clôture d'instruction a été fixée au 2 juin 2022, à 12 heures. Par une décision du 23 avril 2021, M. D... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. A..., - et les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. M. D... est titulaire d'une pension militaire d'invalidité au taux d'invalidité global de 85%, notamment au titre des infirmités liées, d'une part, à une pleurésie avec retentissement cardiaque, et d'autre part, à une cardiopathie ischémique, auxquelles sont attachés respectivement les taux d'invalidité de 60 % et de 15 %. Le 5 mars 2015, il a demandé la révision de sa pension pour aggravation de ces infirmités. Mais le 7 décembre 2016, après avis de la commission consultative médicale du 3 août 2016 et de la commission de réforme du 29 novembre 2016, le ministre de la défense a rejeté sa demande. Par jugement du 1er décembre 2020, dont M. D... relève appel, le tribunal administratif de Bastia, auquel a été transmise l'affaire par le tribunal des pensions militaires de Haute-Corse, a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision et à la révision de sa pension militaire d'invalidité. Sur l'étendue du litige : 2. Au soutien de sa requête d'appel, M. D... déclare renoncer " à sa demande relative au titre de la pathologie relative à l'aggravation des séquelles de pleurésie droite avec retentissement cardiaque ". Il doit être ainsi regardé comme se désistant de ses conclusions, présentées en première instance, et tendant non seulement à l'annulation de la décision du ministre de la défense du 7 décembre 2016 refusant de réviser sa pension militaire d'invalidité pour aggravation des séquelles de pleurésie droite avec retentissement cardiaque, mais encore à la révision de sa pension dans cette mesure. Ce désistement est pur et simple et il n'existe aucun obstacle à ce qu'il en soit donné acte. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 3. Aux termes de l'article L. 29 du code des pensions militaires d'invalidité, dans sa rédaction en vigueur au jour de la demande de révision de pension présentée par M. D... : " Le titulaire d'une pension d'invalidité concédée à titre définitif peut en demander la révision en invoquant l'aggravation d'une ou plusieurs infirmités en raison desquelles cette pension a été accordée ". Par ailleurs, en vertu de l'article L. 6 du même code, les juridictions de pensions doivent rechercher quel est le degré d'invalidité à la date de la demande et ne peuvent tenir compte d'aggravations survenues après cette date. 4. En premier lieu, par jugement avant dire droit du 2 juillet 2018, le tribunal des pensions militaires de Haute-Corse a désigné un expert aux fins, notamment, d'évaluer s'il y a lieu le taux d'aggravation de l'infirmité " cardiopathie ischémique ", en précisant que l'expert devrait se placer, pour ce faire, au jour de la demande de révision, le 5 mars 2015. Cependant, pour conclure, dans son rapport du 3 février 2019, qu'il existe une aggravation de cette infirmité, et pour qualifier celle-ci de significative et l'évaluer suivant le taux de 10%, l'expert judiciaire s'est fondé non seulement sur un examen médical du demandeur réalisé les 7 novembre 2018 et 31 janvier 2019, dont il a recueilli au préalable les doléances, mais encore sur les résultats d'une échographie cardiaque et d'un scanner, pratiqués à sa demande, les 22 et 29 novembre 2018, en fonction de l'état de santé du requérant au jour de leur réalisation. Il ressort en outre des énonciations de son rapport que les comparaisons de documents médicaux auxquelles l'expert s'est livré, lorsqu'elles sont temporellement situées, portent sur des éléments contemporains du rapport ou datant de 2015. Ainsi, dès lors que, par l'ambiguïté et l'imprécision de ses termes et les conditions d'établissement de ses annexes, le rapport d'expertise judiciaire, qui du reste ne fait pas apparaître d'aggravation de la gêne fonctionnelle correspondant à la cardiopathie ischémique de M. D..., ne peut être considéré comme ayant été rendu en tenant compte de l'état de santé de ce dernier à la date de sa demande de révision de pension, le 5 mars 2015, il y a lieu pour la Cour de ne pas prendre en considération ce rapport pour statuer sur les droits à révision de pension de l'intéressé. 5. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction, et plus particulièrement du rapprochement des rapports du médecin expert rendus les 20 février 2014 et 18 août 2015, dont les contenus, les dates et conditions d'élaboration permettent d'apprécier l'état de santé de M. D... à la date de sa demande de révision, qu'au jour de cette demande, une légère aggravation de la cardiopathie ischémique dont il souffre a pu être constatée, caractérisée par une augmentation de la tension artérielle et du rythme sinusal, une baisse de la fraction d'éjection, une aggravation des troubles diffus de repolarisation, une modification de l'axe électrique du cœur, ainsi que par l'apparition d'une très légère fuite mitrale. Si le certificat établi par un pneumologue le 17 février 2015 au soutien de la demande de révision de M. D... indique que son état cardio-respiratoire s'est nettement dégradé, ni ce document, ni aucun autre élément de l'instruction, qui font tous état, à la date de la demande comme avant son introduction, d'une dyspnée, de palpitations, et de quelques douleurs rétrosternales sans notion nette d'effort, ne démontrent une aggravation significative de la gêne fonctionnelle associée à la cardiopathie ischémique dont il est atteint, ni l'apparition d'une nouvelle gêne fonctionnelle qui y serait liée, ainsi que le relève d'ailleurs le médecin conseiller technique de l'administration dans son avis du 2 avril 2019. Par conséquent, il ne résulte pas de l'instruction que l'aggravation de l'infirmité cardiaque de M. D... justifierait l'allocation d'un taux supérieur au taux de 5% retenu par l'administration pour rejeter sa demande de révision de pension, un tel taux étant inférieur au taux de 10 % susceptible d'ouvrir droit à révision de pension. 6. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'ordonner une mesure d'instruction, que M. D... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement querellé, le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision ministérielle refusant de réviser sa pension militaire d'invalidité pour aggravation de sa cardiopathie ischémique et à la révision de cette pension. Sur les dépens et les frais liés au litige : 7. Aux termes de l'article L. 711-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " Les recours contentieux contre les décisions individuelles prises en application du livre Ier et des titres Ier à III du livre II sont introduits, instruits et jugés conformément aux dispositions du code de justice administrative, sous réserve du présent chapitre. ". L'article R. 761-1 du code de justice administrative dispose quant à lui que : " Les dépens comprennent les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'État. Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties. (...) ". 8. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de laisser à la charge de l'Etat les frais et honoraires de l'expertise ordonnée avant dire droit par jugement du tribunal des pensions militaires de Haute-Corse du 2 juillet 2018, l'intéressé bénéficiant au demeurant, en première instance comme en appel, de l'aide juridictionnelle totale. 9. En revanche, les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, au titre des frais exposés par M. D... et non compris dans les dépens. Les conclusions présentées à ce titre ne peuvent donc qu'être rejetées. DECIDE : Article 1er : Il est donné acte du désistement de M. D... de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du ministre de la défense du 7 décembre 2016 refusant de réviser sa pension militaire d'invalidité pour aggravation des séquelles de pleurésie droite avec retentissement cardiaque, et à la révision de sa pension dans cette mesure. Article 2 : Les frais et honoraires de l'expertise ordonnée avant dire droit par jugement du tribunal des pensions militaires de Haute-Corse du 2 juillet 2018 sont laissés à la charge de l'Etat. Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. D... est rejeté. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... D... et au ministre des armées. Copie en sera adressée au docteur C..., expert. Délibéré après l'audience du 21 juin 2022, où siégeaient : - M. Badie, président, - M. Revert, président assesseur, - M. Ury, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 juillet 2022. N° 21MA004222
Cours administrative d'appel
Marseille
CAA de DOUAI, 3ème chambre, 07/07/2022, 21DA01411, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme A... B... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler la décision du 22 juillet 2020 par laquelle la directrice départementale des finances publiques a fixé au 3 mars 2020 la date de consolidation de son état de santé à la suite de son accident de service du 23 octobre 1990 et retenu un taux d'incapacité permanente partielle de 20 %, dont 10 % liés à une pathologie distincte, ainsi que l'avis de la commission de réforme du 7 juillet 2020 se prononçant sur son inaptitude définitive à exercer toute fonction. Par une ordonnance n° 2003101 du 26 avril 2021, le président de la 3ème chambre du tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 25 juin 2021 et 1er mars 2022, Mme B..., représentée par Me Bach, demande à la cour : 1°) d'annuler cette ordonnance ; 2°) à titre principal, de renvoyer l'affaire devant le tribunal administratif d'Amiens ; 3°) à titre subsidiaire, d'annuler la décision du 22 juillet 2020 par laquelle la directrice départementale des finances publiques de l'Aisne a fixé au 3 mars 2020 la date de consolidation de son état de santé à la suite de son accident de service du 23 octobre 1990 et retenu un taux d'incapacité permanente partielle de 20 %, dont 10 % liés à une pathologie distincte ; 4°) d'enjoindre à l'administration de lui reconnaître un taux d'incapacité de 20 % lié à son accident de service du 23 octobre 1990, dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ; 5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 7611 du code de justice administrative. Elle soutient que : - c'est à tort que le premier juge a estimé que sa demande était irrecevable dès lors que la décision fixant son taux d'incapacité permanente partielle est un acte susceptible de recours ; - l'auteur de la décision contestée ne justifiait pas d'une délégation de signature régulière ; - la décision litigieuse est entachée de vices de procédure au regard du décret du 14 mars 1986 en l'absence de rapport écrit du médecin de prévention, en raison du caractère incomplet du dossier sur lequel la commission de réforme s'est prononcée, en l'absence de convocation et d'information régulières concernant la réunion de la commission de réforme et en l'absence de médecin spécialiste de sa pathologie au cours de cette réunion ; - elle est entachée d'erreur d'appréciation en ce qu'elle retient un taux d'invalidité limité à 10 % concernant l'accident de service qu'elle a subi le 23 octobre 1990 et estime que son état de santé était consolidé au 3 mars 2020. Par un mémoire en défense, enregistré le 4 févier 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête. Il soutient qu'aucun des moyens soulevés dans la requête n'est fondé. Par une ordonnance du 2 mars 2022, la clôture de l'instruction a été reportée au 25 mars 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions civiles et militaire de retraite ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - le décret n° 60-1089 du 6 octobre 1960 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Nil Carpentier-Daubresse, premier conseiller, - et les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. Mme B..., titularisée dans le grade des contrôleurs des impôts de 2ème classe le 1er septembre 1999 et affectée au centre des impôts fonciers de Château-Thierry, a été promue contrôleur principal des finances publiques le 31 décembre 2012 et affectée au service des impôts des particuliers de cette commune. Par un avis du 7 juillet 2020, la commission de réforme a prononcé son inaptitude définitive à exercer toute fonction. Par une décision du 22 juillet 2020, la directrice départementale des finances publiques de l'Aisne a fixé au 3 mars 2020 la date de consolidation de son état de santé à la suite d'un accident de service du 23 octobre 1990 et retenu un taux d'incapacité permanente partielle de 20 %, dont 10 % liés à une pathologie distincte. Le 1er janvier 2021, Mme B... a été admise d'office à faire valoir ses droits à la retraite pour invalidité. Elle relève appel de l'ordonnance du 26 avril 2021 par laquelle le président de la 3ème chambre du tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 22 juillet 2020 précitée. Sur la régularité de l'ordonnance : 2. D'une part, aux termes de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, dans sa rédaction alors en vigueur : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident (...) ". 3. D'autre part, aux termes de l'article 65 de cette même loi : " Le fonctionnaire qui a été atteint d'une invalidité résultant d'un accident de service ayant entraîné une incapacité permanente d'au moins 10 % ou d'une maladie professionnelle peut prétendre à une allocation temporaire d'invalidité cumulable avec son traitement dont le montant est fixé à la fraction du traitement minimal de la grille mentionnée à l'article 15 du titre Ier du statut général, correspondant au pourcentage d'invalidité. / Les conditions d'attribution ainsi que les modalités de concession, de liquidation, de paiement et de révision de l'allocation temporaire d'invalidité sont fixées par un décret en Conseil d'Etat qui détermine également les maladies d'origine professionnelle ". Aux termes de l'article 1er du décret du 6 octobre 1960 portant règlement d'administration publique pour l'application des dispositions de l'article 23 bis de l'ordonnance n° 59-244 du 4 février 1959 relative au statut général des fonctionnaires : " L'allocation temporaire d'invalidité prévue à l'article 65 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat est attribuée aux agents maintenus en activité qui justifient d'une invalidité permanente résultant : a) Soit d'un accident de service ayant entraîné une incapacité permanente d'un taux rémunérable au moins égal à 10 % ; (...) / dans ces cas, par dérogation aux règles prévues par cet article, le pouvoir de décision appartient en dernier ressort au ministre dont relève l'agent et au ministre chargé du budget (....) La demande d'allocation doit, à peine de déchéance, être présentée dans le délai d'un an à partir du jour où le fonctionnaire a repris ses fonctions après la consolidation de la blessure ou de son état de santé ". Aux termes de l'article 3 de ce même décret : " La réalité des infirmités invoquées par le fonctionnaire, leur imputabilité au service, la reconnaissance du caractère professionnel des maladies, les conséquences ainsi que le taux d'invalidité qu'elles entraînent sont appréciés par la commission de réforme prévue à l'article L. 31 du code des pensions civiles et militaires de retraite. Le pouvoir de décision appartient dans tous les cas au ministre dont relève l'agent et au ministre chargé du budget ". 4. Pour considérer que la demande de Mme B... était entachée d'une irrecevabilité manifeste et pouvait être rejetée sur le fondement du 4° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, le président de la 3ème chambre du tribunal administratif d'Amiens a estimé que le taux d'incapacité de l'intéressée résultant de son accident de service du 23 octobre 1990 ne pouvait être utilement contesté qu'après l'intervention d'une décision se prononçant sur le principe et l'étendue de son droit à l'allocation temporaire d'invalidité prise dans les conditions prévues à l'article 3 du décret du 6 octobre 1960 précité, ce sur quoi ne se prononçait pas la décision contestée et alors que l'intéressée n'avait pas sollicité le bénéfice de cette allocation. Toutefois, la décision par laquelle l'administration fixe un taux d'invalidité résultant d'un accident de service est un acte faisant grief qui est ainsi susceptible de faire l'objet d'un recours contentieux. Par ailleurs, il ne résulte pas des dispositions citées au point 3 que la recevabilité de ce recours serait conditionnée par une demande préalable d'allocation temporaire d'invalidité alors au demeurant que cette demande peut être présentée dans le délai d'un an à partir du jour où le fonctionnaire a repris ses fonctions après la consolidation de la blessure ou de son état de santé ainsi que le prévoit l'article 1er de ce même décret. 5. Dans ces conditions, il résulte de ce qui précède que Mme B... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance contestée, le président de la 3ème chambre du tribunal administratif d'Amiens a rejeté comme manifestement irrecevable sa demande tendant à l'annulation de la décision du 22 juillet 2020 par laquelle la directrice départementale des finances publiques de l'Aisne a fixé au 3 mars 2020 la date de consolidation de son accident de service du 23 octobre 1990 et retenu un taux d'incapacité permanente partielle de 20 %, dont 10 % liés à une pathologie distincte de celle résultant de l'accident de service du 23 octobre 1990. L'appelante demandant, à titre principal, le renvoi de cette affaire devant le tribunal administratif d'Amiens, il y a lieu d'y procéder pour qu'il y soit statué. Sur les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Mme B... de la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DÉCIDE : Article 1er : L'ordonnance du président de la 3ème chambre du tribunal administratif d'Amiens du 26 avril 2021 est annulée. Article 2 : La demande de Mme B... est renvoyée devant le tribunal administratif d'Amiens. Article 3 : L'Etat versera à Mme B... la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Délibéré après l'audience publique du 23 juin 2022 à laquelle siégeaient : - Mme Ghislaine Borot, présidente de chambre, - M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur, - M. Nil Carpentier-Daubresse, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 juillet 2022. Le rapporteur, Signé : N. Carpentier-Daubresse La présidente de chambre, Signé : G. Borot La greffière, Signé : C. Huls-Carlier La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme La greffière, C. Huls-Carlier 1 2 N° 21DA01411 1 3 N°"Numéro"
Cours administrative d'appel
Douai
CAA de NANTES, 3ème chambre, 01/07/2022, 21NT02781, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... D..., en son nom propre et en sa qualité de tuteur légal de ses enfants, E... et B... D..., a demandé au tribunal administratif d'Orléans de condamner l'Etat à indemniser les préjudices qu'il estime avoir subis à la suite d'une vaccination obligatoire ainsi que les préjudices subis par ses enfants en raison des mêmes faits. Par un jugement n° 1500510 du 30 mai 2017, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande. Par un arrêt n°17NT03250 du 5 juillet 2019, la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté l'appel formé par M. D... contre ce jugement. Par une décision n°435323 du 29 septembre 2021, le Conseil d'État, statuant au contentieux, a annulé cet arrêt et renvoyé devant la cour l'affaire, qui porte désormais le n° 21NT02781. Procédure après cassation : Par un mémoire enregistré le 31 janvier 2022 la ministre des armées conclut au rejet de la demande présentée par M. D.... Elle soutient que : - à titre principal, le dernier état des connaissances scientifiques exclut la probabilité qu'une vaccination puisse entrainer d'éventuels effets secondaires ; - à titre subsidiaire, le lien de causalité entre la vaccination subie par M. D... et la myofasciite ne peut être regardé comme établi ; l'intéressé ne présente pas l'ensemble des symptômes exigés par le Conseil d'État ; des antécédents familiaux existent. Par un mémoire enregistré le 31 janvier 2022, M. D..., agissant tant en son nom personnel qu'en qualité de représentant légal de ses enfants mineurs E... et B..., représenté par Me Jeudi, demande à la cour : - d'annuler le jugement n° 1500510 du 30 mai 2017 du tribunal administratif d'Orléans ; - d'annuler la décision du 17 mars 2015 par laquelle le ministre de la défense a rejeté son recours administratif préalable formé devant la commission de recours des militaires ; - de condamner l'État à lui verser la somme de 58 000 euros en réparation de son préjudice outre la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice subi par ses deux enfants ; - de majorer ces sommes des intérêts aux taux légal à compter de sa demande préalable du 13 novembre 2013 ; - de mettre à la charge de l'État la somme de 2 500 euros au titre de l'article L 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - il est fondé à demander une réparation complémentaire à celle du forfait de pension ; - il a été vacciné à titre obligatoire ; la biopsie réalisée permet de constater l'absence d'élimination des particules aluminiques, les symptômes caractéristiques en lien avec une myofasciite à macrophages sont apparus à compter de septembre 1995, dans un délai compatible avec la pathologie ; - les préjudices extra- patrimoniaux doivent être réparés par le versement de dommages et intérêts d'un montant de 58 000 euros ; ses enfants ont également subi un préjudice moral devant être réparé par une indemnité de 10 000 euros. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de la santé publique ; - le code de la sécurité sociale ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme C..., - les conclusions de M. Berthon, rapporteur public, - et les observations de Me Jeudi, représentant M. D.... Des notes en délibéré présentées pour M. D... ont été enregistrées les 17 et 30 juin 2022. Considérant ce qui suit : 1. M. D... a été vacciné contre le virus de l'hépatite B pendant son service militaire en mai, juin et août 1994 ainsi qu'en février 1995. A partir de septembre 1995, il a souffert de divers troubles qui ont été attribués à une myofasciite à macrophages. Il a bénéficié à ce titre, à partir de 2001, d'une pension militaire d'invalidité dont le taux a été progressivement porté de 40% à 60 %. Par une lettre du 13 novembre 2013, il a saisi le ministre de la défense d'une demande d'indemnisation de divers préjudices non indemnisés par sa pension, qui a été rejetée par une décision du 9 juillet 2014. Le 31 juillet 2014, il a contesté cette décision devant la commission des recours des militaires. Le ministre de la défense a, après avis de la commission, rejeté son recours par une décision du 17 mars 2015. M. D... a alors saisi le tribunal administratif d'Orléans d'une demande tendant notamment à la condamnation de l'Etat à lui verser 58 000 euros au titre de ses préjudices propres et 10 000 euros au titre des préjudices de ses deux enfants mineurs. Le tribunal a rejeté cette demande au motif que sa créance était prescrite. Par un arrêt n° 17NT03250 du 5 juillet 2019, la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté la requête de M. D.... Par sa décision n° 435323 du 29 septembre 2021, le Conseil d'État statuant au contentieux a annulé cet arrêt et renvoyé devant la cour l'affaire, qui porte désormais le n° 21NT02781. 2. En vertu de l'article L. 3111-4 du code de la santé publique, toute personne qui, dans un établissement de prévention ou de soins, exerce une activité professionnelle l'exposant à des risques de contamination, doit être immunisée, notamment, contre l'hépatite B et aux termes de l'article L. 3111-9 du même code : " Sans préjudice des actions qui pourraient être exercées conformément au droit commun, la réparation intégrale des préjudices directement imputables à une vaccination obligatoire pratiquée dans les conditions mentionnées au présent chapitre, est assurée par l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales institué à l'article L. 1142-22, au titre de la solidarité nationale. (...) ". 3. Aux termes de l'article R. 625-3 du code de justice administrative : " La formation chargée de l'instruction peut inviter toute personne, dont la compétence ou les connaissances seraient de nature à l'éclairer utilement sur la solution à donner à un litige, à produire des observations d'ordre général sur les points qu'elle détermine. / L'avis est consigné par écrit. Il est communiqué aux parties. (...) ". 4. Lorsqu'il est saisi d'un litige individuel portant sur les conséquences, pour la personne concernée, d'une vaccination présentant un caractère obligatoire, il appartient tout d'abord au juge de s'assurer, au vu du dernier état des connaissances scientifiques en débat devant lui, qu'il n'y a aucune probabilité qu'un lien existe entre l'injection du vaccin et les symptômes attribués à la pathologie dont cette personne est atteinte. 5. Il appartient ensuite au juge, s'il ressort, en l'état des connaissances scientifiques en débat devant lui, qu'il n'y a aucune probabilité qu'un tel lien existe, de rejeter les conclusions indemnitaires dont il est saisi, soit, dans l'hypothèse inverse, de procéder à l'examen des circonstances de l'espèce et de ne retenir alors l'existence d'un lien de causalité entre les vaccinations obligatoires subies par cette personne et les symptômes qu'elle a ressentis que si ceux-ci sont apparus, postérieurement à la vaccination, dans un délai normal pour ce type d'affection, ou se sont aggravés à un rythme et une ampleur qui n'étaient pas prévisibles au vu de son état de santé antérieur ou de ses antécédents et, par ailleurs, qu'il ne ressort pas du dossier qu'ils pouvaient être regardés comme résultant d'une autre cause que ces vaccinations. 6. En l'espèce, il résulte de l'instruction que la dernière vaccination de M. D... contre l'hépatite B a été réalisée en février 1995 et l'intéressé indique supporter, depuis septembre 1995, une importante asthénie même si son état de santé s'est stabilisé depuis 2007. 7. Eu égard à la teneur des débats échangés devant la cour quant à l'absence de probabilité d'un lien de causalité entre des vaccins comportant ou non des adjuvants aluminiques et la survenue d'une symptomatologie spécifique liée à une lésion histologique de myofasciite à macrophages, il y a lieu pour la cour d'inviter l'Académie nationale de médecine à lui présenter des observations écrites de caractère général de nature à l'éclairer sur le point de savoir si, en l'état actuel des connaissances scientifiques, il n'y a aucune probabilité qu'un lien de causalité existe entre la survenue de symptômes pouvant se rattacher aux manifestations cliniques caractéristiques d'une myofasciite à macrophages et l'administration de vaccins comportant des adjuvants aluminiques et éventuellement d'autres vaccins ne comportant pas de tels adjuvants. DECIDE : Article 1er : L'Académie nationale de médecine est invitée, en application de l'article R. 625-3 du code de justice administrative, à présenter à la cour, dans un délai de quatre mois à compter de la notification de la présente décision, des observations écrites de caractère général de nature à l'éclairer utilement sur l'absence de probabilité de tout lien de causalité entre des vaccins comportant des adjuvants aluminiques et éventuellement d'autres vaccins ne comportant pas de tels adjuvants et la survenue d'une symptomatologie liée à une lésion histologique de myofasciite à macrophages. Article 2 : Toutes conclusions et moyens des parties sur lesquels il n'a pas été expressément statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'à la fin de l'instance. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D..., au ministre des armées et à l'Académie nationale de médecine. Délibéré après l'audience du 16 juin 2022, à laquelle siégeaient : - M. Salvi président, - Mme Brisson, présidente-assesseure, - M. Catroux, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er juillet 2022. La rapporteure, C. C... Le président, D. SALVI Le greffier, R. MAGEAU La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21NT02781
Cours administrative d'appel
Nantes
CAA de MARSEILLE, 4ème chambre, 05/07/2022, 21MA02116, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Bastia d'annuler la décision du 11 octobre 2018 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande de pension militaire d'invalidité pour l'infirmité " syndrome myélodysplasique ", et d'ordonner avant dire droit une expertise médicale. Par un jugement n° 1901515 du 15 avril 2021, le tribunal administratif de Bastia a rejeté la requête de M. B.... Procédure devant la Cour : Par une requête enregistrée le 3 juin 2021, M. B..., représenté par Me Elgart, demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Bastia du 15 avril 2021 ; 2°) d'annuler la décision du 11 octobre 2018 par laquelle la ministre de la défense a rejeté sa demande de pension militaire d'invalidité pour l'infirmité " syndrome myélodysplasique " ; 3°) de lui accorder une pension militaire d'invalidité pour l'infirmité " syndrome myélodysplasique " ; 4°) d'ordonner une expertise médicale pour fixer le taux de son invalidité. Il soutient que : - la décision attaquée a été prise à la suite d'une procédure viciée faute de saisine de la commission consultative médicale ; - il est fondé à se prévaloir de l'application de l'article L. 121-2-1 du code des pensions militaire d'invalidité dans sa rédaction issue de la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018, qui fait obstacle à ce qu'un délai de prise en charge lui soit opposé ; - il existe un lien de causalité entre l'utilisation de produits benzéniques au cours de sa carrière militaire, et l'apparition d'un syndrome myélodysplasique. Par un mémoire en défense enregistré le 3 mai 2022, la ministre des armées conclut au rejet de la requête. La ministre fait valoir que les moyens de M. B... ne sont pas fondés. Par ordonnance du 4 mai 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 27 mai 2022 à 12 heures. Un mémoire, présenté le 24 mai 2022 pour M. B..., n'a pas été communiqué. M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 3 septembre 2021. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des relations entre le public et l'administration ; - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; - la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 relative à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025 et portant diverses dispositions intéressant la défense ; - le décret n° 2009-56 du 15 janvier 2009 révisant et complétant les tableaux de maladies professionnelles annexés au livre IV du code de la sécurité sociale ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. A..., - et les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. M. B..., né le 18 novembre 1945, engagé au sein de la Marine nationale le 4 décembre 1963, maître principal au 1er avril 1975, a été placé en position de retraite le 2 avril 1986. Il a sollicité le 24 février 2017 une pension militaire d'invalidité pour l'infirmité " affection de longue durée constatée en 2012 - syndrome myélodysplasique (SMD). Suivi médical continu jusqu'à ce jour à l'hôpital de Castellucio (Ajaccio) ". Il relève appel du jugement du 15 avril 2021 du tribunal administratif de Bastia qui rejette sa requête dirigée contre la décision du 11 octobre 2018 par laquelle la ministre de la défense a rejeté sa demande de pension militaire d'invalidité pour l'infirmité " syndrome myélodysplasique ". 2. Lorsqu'il est saisi d'un litige en matière de pensions militaires d'invalidité, il appartient au juge administratif, en sa qualité de juge de plein contentieux, de se prononcer sur les droits de l'intéressé en tenant compte de l'ensemble des circonstances de fait qui résultent de l'instruction, et aussi, le cas échéant, d'apprécier, s'il est saisi de moyens en ce sens ou au vu de moyens d'ordre public, la régularité de la décision en litige. 3. D'une part, aux termes de l'article R. 151-12 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre alors applicable : " Lorsque l'instruction médicale est achevée, le dossier est soumis pour avis à la commission consultative médicale dans les cas prévus par arrêté des ministres chargés des anciens combattants et victimes de guerre et du budget, ou lorsque l'un ou l'autre des services mentionnés à l'article R. 151-18 l'estime utile. Le service désigné par le ministre chargé des anciens combattants et victimes de guerre procède au constat provisoire des droits à pension et en notifie le résultat à l'intéressé. (...). ". D'autre part, aux termes de l'article L. 312-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Font l'objet d'une publication les instructions, les circulaires (...) qui comportent une interprétation du droit positif ou une description des procédures administratives (...) ". Aux termes de l'article L. 312-3 du même code : " Toute personne peut se prévaloir des documents administratifs mentionnés au premier alinéa de l'article L. 312-2, émanant des administrations centrales et déconcentrées de l'Etat et publiés sur des sites internet désignés par décret (...) ". Selon l'article R. 312-3-1 de ce code : " Les documents administratifs mentionnés au premier alinéa de l'article L. 312-2 émanant des administrations centrales de l'Etat sont (...) publiés dans des bulletins ayant une périodicité au moins trimestrielle et comportant dans leur titre la mention "Bulletin officiel". (...) ". Enfin, le point 1.2.4 " Saisine de la commission consultative médicale " de la circulaire n° 230125/DEF/DGA/DRH-MD/SPGRH/FM4 relative à la constitution, à l'instruction et à la liquidation des dossiers de pension d'invalidité du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre du 12 février 2010 précise : " 1.2.4.1. Saisine obligatoire. Cette saisine est obligatoire si le dossier de l'intéressé figure au nombre des instances visées au chapitre III, section I, de la circulaire du ministère des anciens combattants et victimes de guerre n° 721/1 du 10 septembre 1992 (...) ". Le chapitre III de la circulaire du 10 septembre 1992, prévoit l'avis obligatoire de la commission consultative médicale pour toute demande d'infirmité nouvelle, avec reconnaissance de l'imputabilité par preuve portant sur des maladies dès lors qu'elles sont susceptibles d'ouvrir droit à pension. 4. Pour rejeter la demande de M. B..., la ministre des armées a relevé dans sa décision du 11 octobre 2018, après avis 1er octobre 2018 du médecin chargé des pensions militaire d'invalidité, que la présomption d'imputabilité de l'infirmité de M. B... comme maladie professionnelle ne peut s'appliquer. 5. M. B... se prévaut des termes de la circulaire du secrétaire d'Etat aux anciens combattants et victimes de guerre du 10 septembre 1992 relative à l'extension de la déconcentration de la liquidation des pensions militaires d'invalidité précitée, pour soutenir que c'est à tort que son dossier n'a pas été soumis à la commission consultative médicale. Le chapitre III de cette instruction exige que les dossiers de pension posant une question d'imputabilité des maladies par preuve nécessitent l'avis de la commission consultative médicale. Or, la circulaire n° 230125/DEF/DGA/DRH-MD/SPGRH/FM4 relative à la constitution, à l'instruction et à la liquidation des dossiers de pension d'invalidité du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre du 12 février 2010, publiée au Bulletin Officiel des Armées (BOC N° 14 du 9 avril 2010, texte 2) donc invocable par le requérant, renvoie à la circulaire de 1992 visée au point précédent, et dispose qu'il y a obligation de saisine de la commission consultative en cas d'imputabilité par preuve des maladies. L'administration ne conteste pas que la demande de M. B... repose sur une hypothèse de preuve de son imputabilité au service. Par suite, M. B... est fondé à se prévaloir des termes de cette circulaire et à soutenir que, en l'absence d'examen de son dossier par la commission consultative médicale, la décision litigieuse a été édictée à l'issue d'une procédure irrégulière. 6. Il résulte de ce qui précède que M. B... est fondé à demander l'annulation du jugement du 15 avril 2021 du tribunal administratif de Bastia qui a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 11 octobre 2018 par laquelle la ministre de la défense a rejeté sa demande de pension militaire d'invalidité pour l'infirmité " syndrome myélodysplasique ", et l'annulation de cette décision. 7. Aucun autre moyen n'étant mieux à même de régler le litige, et sans qu'il soit besoin d'ordonner l'expertise médicale demandée par l'appelant, eu égard à ses motifs, l'exécution du présent arrêt implique seulement mais nécessairement, en application des dispositions de l'article L. 911-2 du code de justice administrative, d'enjoindre au ministre des armées de statuer à nouveau sur la demande de titre de pension de M. B..., après avoir saisi la commission consultative médicale, dans le délai de trois mois suivant la notification du présent arrêt. D É C I D E : Article 1er : Le jugement du 15 avril 2021 du tribunal administratif de Bastia, et la décision du 11 octobre 2018 par laquelle la ministre de la défense a rejeté la demande de M. B... de pension militaire d'invalidité pour l'infirmité " syndrome myélodysplasique ", sont annulés. Article 2 : Il est enjoint au ministre des armées de réexaminer la demande de pension militaire d'invalidité de M. B..., après avoir saisi la commission médicale consultative, dans le délai de trois mois suivant la notification du présent arrêt. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre des armées. Délibéré après l'audience du 21 juin 2022, où siégeaient : - M. Badie, président, - M. Revert, président assesseur, - M. Ury, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 juillet 2022 N° 21MA021162
Cours administrative d'appel
Marseille
CAA de MARSEILLE, 6ème chambre, 04/07/2022, 21MA02807, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. E... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision du 7 février 2019 par laquelle le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse a rejeté sa demande de réintégration suite à sa mise à la retraite pour invalidité, ensemble la décision implicite de rejet de son C... gracieux. Par un jugement n° 1905229 du 25 mai 2021, le tribunal a rejeté sa requête. Procédure devant la Cour : Par une requête, enregistrée le 16 juillet 2021, M. B..., représenté par Me Boulisset, demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler la décision du 7 février 2019 par laquelle le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse a rejeté sa demande de réintégration suite à sa mise à la retraite pour invalidité, ensemble la décision implicite de rejet de son C... gracieux ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - la décision du 7 février 2019 est entachée d'erreur de droit, le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse s'étant cru en situation de compétence liée par l'avis défavorable émis par la commission de réforme sur sa demande de réintégration ; - le ministre a mis près de deux ans avant de prendre une nouvelle décision à son égard qui est entachée d'erreur d'appréciation notamment au regard du rapport du 19 mai 2018 du Dr A... mandaté le 28 février 2018 par l'inspection académique, le tribunal ayant préféré s'attacher aux conclusions des rapports des Dr C... et Prosperi de 2014 ; or, la dépression n'est pas un état permanent ; - elle est entachée d'un détournement de pouvoir, l'administration ayant tardé à re-statuer pour ne pas avoir à le réintégrer. Par un mémoire en défense, enregistré le 31 mai 2022, le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés. Le 7 juin 2022, un mémoire a été enregistré pour M. B... et non communiqué en application des dispositions de l'article R. 611-1 du code de justice administrative. Par courrier du 9 juin 2022 les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la Cour est susceptible de fonder son arrêt sur le moyen relevé d'office tiré du fait que le ministre de l'éducation nationale, en situation de compétence liée du fait qu'au 7 février 2019, date de la décision querellée, M. B... avait dépassé la limite d'âge dans le corps des professeurs certifiés, ne pouvait que refuser de le réintégrer. Par un mémoire enregistré le 17 juin 2022 en réponse au courrier du 9 juin 2022, M. B..., représenté par Me Boulisset, conclut aux mêmes fins que dans ses précédentes écritures. Il soutient que : - au 20 mai 2015, sa réintégration rétroactive à la date de la première décision annulée était possible ; - il résulte de l'article 1.1. de la loi du 13 septembre 1984 alors en vigueur qu'il n'avait pas les cent-soixante trimestres requis pour une requête à taux plein, mais seulement cent-sept ; - l'Etat aurait porté atteinte au droit du requérant à un procès équitable s'il avait refusé de le réintégrer en raison de la limite d'âge. Par ordonnance du 13 mai 2022, la clôture de l'instruction a été fixée du 8 juin 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ; - le code de justice administrative. La présidente de la Cour a décidé, par décision du 23 mai 2022, de désigner M. Philippe Portail, président assesseur, pour présider par intérim la 6éme chambre en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Gilles Taormina, rapporteur, - les conclusions de M. Renaud Thielé, rapporteur public, - et les observations de Me Boulisset, représentant M. B... et de M. D... représentant le ministre de l'éducation nationale. Considérant ce qui suit : 1. M. B..., né le 27 janvier 1953, professeur certifié d'espagnol dans l'académie d'Aix-Marseille a, par un arrêté du 24 octobre 2006, été admis à la retraite pour invalidité non imputable au service à compter du 4 janvier 2004. Par une décision du 20 mai 2015, le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse a rejeté sa demande de réintégration présentée sur le fondement de l'article L. 33 du code des pensions civiles et militaires de retraite. Par un jugement n° 1505555 du 15 mai 2017 devenu définitif, le tribunal administratif de Marseille a annulé la décision du 20 mai 2015 et a enjoint au ministre de se prononcer de nouveau sur la demande de M. B.... Par une nouvelle décision du 7 février 2019, prise sur l'avis défavorable émis par la commission de réforme départementale des Bouches-du-Rhône réunie dans sa séance du 9 octobre 2018, le ministre a décidé de ne pas donner une suite favorable à la demande de réintégration de M. B.... Par un courrier du 15 février 2019, l'intéressé a formé un C... gracieux à l'encontre de cette décision qui a été implicitement rejeté. Ayant demandé l'annulation de la décision du 7 février 2019, ensemble la décision implicite de rejet du C... gracieux, il relève appel du jugement n° 1905229 du 25 mai 2021 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 2. Aux termes de l'article L. 33 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " Le fonctionnaire dont la mise à la retraite a été prononcée en vertu des articles L. 27 ou L. 29 et qui est reconnu, après avis de la commission de réforme prévue à l'article L. 31, apte à reprendre l'exercice de ses fonctions, peut être réintégré dans un emploi de son grade s'il existe une vacance. La pension et, le cas échéant, la rente viagère d'invalidité prévue à l'article L. 28 sont annulées à compter de la date d'effet de la réintégration. ". 3. Il ressort des pièces du dossier que M. B... a été reconnu inapte de façon totale et définitive, non seulement à l'exercice de ses fonctions d'enseignant mais également à l'exercice de toute fonction au sein de la fonction publique par deux médecins psychiatres, dans des rapports des 20 mars et 28 février 2014, la commission de réforme ayant en outre, le 9 octobre 2018, émis un avis défavorable à la réintégration. Il résulte toutefois de l'avis médical émis le 19 mai 2018, par un médecin psychiatre agréé, à la demande de l'administration, en exécution du jugement n° 1505555 rendu le 15 mai 2017 par le tribunal administratif de Marseille qui a annulé la décision du 20 mai 2015 et a enjoint au ministre de se prononcer de nouveau sur la demande de M. B..., que " l'état de santé actuel du sujet lui permet de bénéficier de la réintégration sollicitée à l'égard de son activité professionnelle ". Dès lors, au vu de ce dernier avis médical, dont l'administration ne conteste pas utilement la pertinence, émis plusieurs années après les deux premiers, le ministre a entaché sa décision du 7 février 2019, ensemble la décision implicite de rejet du C... gracieux, d'une erreur d'appréciation au regard de l'état de santé du requérant en refusant la réintégration de M. B.... 4. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande et à demander l'annulation du jugement attaqué et des décisions en litige. Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 5. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie... perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens... ". 6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. B... et non compris dans les dépens, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D É C I D E : Article 1er : Le jugement du 25 mai 2021 du tribunal administratif de Marseille est annulé. Article 2 : La décision du 7 février 2019 du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse rejetant la demande de réintégration de M. B..., ensemble la décision rejetant son C... gracieux sont annulées. Article 3 : Il est mis à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... B... et au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse. Délibéré après l'audience du 20 juin 2022, où siégeaient : - M. Philippe Portail président par intérim, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, - M. Gilles Taormina, président assesseur, - M. François Point, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 4 juillet 2022. N° 21MA02807 2
Cours administrative d'appel
Marseille
CAA de DOUAI, 3ème chambre, 07/07/2022, 21DA01490, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme A... B... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler la décision non formalisée par laquelle la direction départementale des finances publiques de l'Aisne a interrompu sa rémunération ainsi que l'arrêté du 18 décembre 2020 par lequel le directeur général des finances publiques a prononcé son admission d'office à faire valoir ses droits à la retraite à compter du 1er janvier 2021. Par une ordonnance n° 2100924 du 26 avril 2021, le président de la 3ème chambre du tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 28 juin 2021 et 1er mars 2022, Mme B..., représentée par Me Bach, demande à la cour : 1°) d'annuler cette ordonnance ; 2°) à titre principal, de renvoyer l'affaire devant le tribunal administratif d'Amiens ; 3°) à titre subsidiaire, d'annuler l'arrêté du 18 décembre 2020 par lequel le directeur général des finances publiques a prononcé son admission d'office à faire valoir ses droits à la retraite à compter du 1er janvier 2021 ; 4°) d'enjoindre à l'administration de régulariser sa situation en lui accordant le congé pour invalidité temporaire imputable au service dont elle aurait dû bénéficier en lieu et place d'une mise à la retraite d'office et d'en tirer toutes les conséquences, dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ; 5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 7611 du code de justice administrative. Elle soutient que : - c'est à tort que le premier juge a estimé que sa demande entrait dans la champ d'application du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative ; - l'arrêté litigieux est entaché de vices de procédure au regard du décret du 14 mars 1986 en l'absence de rapport écrit du médecin de prévention, en raison du caractère incomplet du dossier sur lequel la commission de réforme s'est prononcée, en l'absence de convocation et d'information régulières concernant la réunion de la commission de réforme et en l'absence de médecin spécialiste de sa pathologie au cours de cette réunion ; - il est entaché d'erreur de droit en raison de sa portée rétroactive ; - il est entaché d'erreur de droit et d'erreur d'appréciation dès lors que Mme B... n'a pas été déclarée inapte définitivement à toutes fonctions et qu'elle n'a pas été invitée à présenter une demande de reclassement. Par un mémoire en défense, enregistré le 4 février 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête. Il soutient qu'aucun des moyens soulevés dans la requête n'est fondé. Par une ordonnance du 2 mars 2022, la clôture de l'instruction a été reportée au 25 mars 2022. Par un courrier du 9 juin 2022, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la cour était susceptible de soulever d'office le moyen tiré de l'irrégularité de l'ordonnance en litige qui a rejeté la demande présentée par Mme B... sur le fondement du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative alors que cet article ne permet pas d'écarter un moyen de légalité interne comme étant manifestement infondé, de sorte que l'affaire aurait dû être jugée en formation collégiale. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions civiles et militaire de retraite ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - le décret n° 60-1089 du 6 octobre 1960 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Nil Carpentier-Daubresse, premier conseiller, - et les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. Mme B..., titularisée dans le grade des contrôleurs des impôts de 2ème classe le 1er septembre 1999 et affectée au centre des impôts fonciers de Château-Thierry, a été promue contrôleur principal des finances publiques le 31 décembre 2012 et affectée au service des impôts des particuliers de cette commune. Par un avis du 7 juillet 2020, la commission de réforme a prononcé son inaptitude définitive à exercer toute fonction. Par une décision du 22 juillet 2020, la directrice départementale des finances publiques de l'Aisne a fixé au 3 mars 2020 la date de consolidation de son état de santé à la suite d'un accident de service du 23 octobre 1990 et retenu un taux d'incapacité permanente partielle de 20 %, dont 10 % liés à une pathologie distincte. Par un arrêté du 18 décembre 2020, le directeur général des finances publiques a prononcé son admission d'office à faire valoir ses droits à la retraite pour invalidité à compter du 1er janvier 2021. Mme B... relève appel de l'ordonnance du 26 avril 2021 par laquelle le président de la 3ème chambre du tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision non formalisée par laquelle la direction départementale des finances publiques de l'Aisne a interrompu sa rémunération ainsi que de l'arrêté du 18 décembre 2020 précité. Sur la régularité de l'ordonnance : 2. Aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " Les (...) présidents de formation de jugement des tribunaux (...) peuvent, par ordonnance : (...) 7° Rejeter, après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire, les requêtes ne comportant que des moyens de légalité externe manifestement infondés, des moyens irrecevables, des moyens inopérants ou des moyens qui ne sont assortis que de faits manifestement insusceptibles de venir à leur soutien ou ne sont manifestement pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ". 3. Pour considérer que la demande de Mme B... pouvait être rejetée sur le fondement du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, le président de la 3ème chambre du tribunal administratif d'Amiens a notamment estimé que le moyen tiré de la rétroactivité illégale au 3 mars 2020 de l'arrêté du 18 décembre 2020 en litige manquait en fait. Toutefois, ce moyen relevant de la légalité interne, il ne pouvait être écarté comme manifestement infondé sur le fondement du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, de sorte que l'affaire aurait dû être jugée en formation collégiale. 4. Dans ces conditions, il résulte de ce qui précède que Mme B... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance contestée, le président de la 3ème chambre du tribunal administratif d'Amiens a rejeté, sur le fondement du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, sa demande tendant à l'annulation de la décision non formalisée par laquelle la direction départementale des finances publiques de l'Aisne a interrompu sa rémunération ainsi que de l'arrêté du 18 décembre 2020 par lequel le directeur général des finances publiques a prononcé son admission d'office à faire valoir ses droits à la retraite à compter du 1er janvier 2021. L'appelante demandant, à titre principal, le renvoi de cette affaire devant le tribunal administratif d'Amiens, il y a lieu d'y procéder pour qu'il y soit statué. Sur les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Mme B... de la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DÉCIDE : Article 1er : L'ordonnance du président de la 3ème chambre du tribunal administratif d'Amiens du 26 avril 2021 est annulée. Article 2 : La demande de Mme B... est renvoyée devant le tribunal administratif d'Amiens. Article 3 : L'Etat versera à Mme B... la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Délibéré après l'audience publique du 23 juin 2022 à laquelle siégeaient : - Mme Ghislaine Borot, présidente de chambre, - M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur, - M. Nil Carpentier-Daubresse, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 juillet 2022. Le rapporteur, Signé : N. Carpentier-Daubresse La présidente de chambre, Signé : G. Borot La greffière, Signé : C. Huls-Carlier La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme La greffière, C. Huls-Carlier 1 2 N° 21DA01490 1 3 N°"Numéro"
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Douai
CAA de TOULOUSE, 2ème chambre, 05/07/2022, 21TL02275, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner le centre hospitalier universitaire de Montpellier à l'indemniser des préjudices qu'il estimait avoir subis du fait de son invalidité imputable au service, à hauteur de 32 047 euros, déduction faite de la provision déjà perçue. Par un jugement n° 1905438 du 15 avril 2021, le tribunal administratif de Montpellier a condamné le centre hospitalier universitaire de Montpellier à verser à M. A... une somme totale de 14 500 euros, sous déduction de la provision de 14 000 euros accordée en référé le 7 janvier 2020. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 11 juin 2021, sous le n°21MA02275, au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, puis le 1er mars 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n°21TL02275, M. A..., représenté par Me Betrom, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 15 avril 2021 en tant qu'il ne condamne le centre hospitalier universitaire à lui verser que la somme de 14 500 euros ; 2°) de condamner le centre hospitalier universitaire de Montpellier à lui verser la somme de 32 047 euros en réparation des préjudices subis ; 3°) de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Montpellier une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - le tribunal n'a pas tiré les conséquences financières de la responsabilité sans faute qu'il a reconnue en limitant son préjudice à la somme de 14 500 euros ; - en tenant compte du barème des préjudices corporels des cours d'appel établi par le président Mornet, son déficit fonctionnel permanent, évalué à 10 %, doit être réparé par le versement d'une somme de 18 500 euros ; - son incapacité temporaire, de 589 jours, doit être réparée par le versement d'une somme de 13 547 euros ; ces journées d'incapacité l'ont placé dans l'impossibilité de s'occuper de ses enfants de 10 et 4 ans et participer aux activités quotidiennes du foyer. Par un mémoire en défense enregistré le 31 mars 2022, le centre hospitalier universitaire de Montpellier conclut au rejet de la requête et ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. A... en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative. Il fait valoir que : - il ne conteste pas l'engagement de sa responsabilité sans faute ; - le référentiel Mornet est purement indicatif et n'ouvre pas un droit à obtenir les sommes sollicitées ; - l'évaluation du dommage relève de l'office du juge et aucun élément ne montre une sous-évaluation de ce poste de préjudice ; - en allouant 14 000 euros au titre d'un déficit fonctionnel permanent de 10%, il a été fait une juste appréciation du préjudice subi par M. A... ; - en l'absence de conclusion de l'expert constatant l'existence du déficit temporaire, il appartenait à M. A... de démontrer l'existence de ce préjudice ; M. A... ne développe pas plus en appel qu'en première instance ce poste de préjudice et ne démontre pas l'existence des charges familiales qui lui incombent ; - à titre subsidiaire, les prétentions de M. A... doivent être ramenées à de plus justes proportions. Par une ordonnance du 9 mai 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 7 juin 2022 à 12 heures. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ; - le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Céline Arquié, première conseillère, - les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique, - et les observations de Me Constans pour le centre hospitalier universitaire de Montpellier. Considérant ce qui suit : 1. M. A..., aide-soignant exerçant ses fonctions au sein du centre hospitalier universitaire de Montpellier, souffre d'une maladie professionnelle reconnue comme imputable au service. Il a sollicité l'indemnisation des préjudices extrapatrimoniaux qu'il a subis du fait de son invalidité. Par un jugement du 15 avril 2021, le tribunal administratif de Montpellier a condamné le centre hospitalier universitaire de Montpellier à verser à M. A... une somme de 14 500 euros. M. A... relève appel de ce jugement en tant qu'il estime insuffisante la somme que le centre hospitalier universitaire de Montpellier a été condamné à lui verser. Sur le bien-fondé du jugement : 2. Il résulte de l'instruction que M. A... est atteint d'un déficit fonctionnel permanent estimé à 10% par l'expert dans son rapport établi le 25 janvier 2019. Si M A... soutient que la somme allouée par les premiers juges en réparation de ce préjudice est inférieure à celle indiquée par le barème des préjudices corporels des cours d'appel établi par le président Mornet, qui devrait selon lui amener à retenir une somme d'un montant de 18 500 euros, ce barème est indicatif et l'intéressé n'apporte aucun élément de nature à établir qu'au regard des circonstances de l'espèce, les premiers juges auraient, sur la base des éléments soumis à leur examen, fait une appréciation insuffisante de ce chef de préjudice en l'évaluant à un montant de 14 000 euros. 3. L'expert a retenu que la durée d'incapacité temporaire de M. A... s'étend du 4 au 26 janvier 2015 puis du 16 février 2015 au 2 octobre 2016 en précisant que l'évaluation des souffrances subies, du préjudice esthétique et du préjudice d'agrément est sans objet. M. A... soutient qu'il n'a pas pu s'occuper ni jouer avec ses enfants alors âgés de 4 et 10 ans, ou participer aux tâches familiales quotidiennes, sans plus de précision ou justifications sur les charges qui lui incombaient habituellement. Par suite, et au regard de ces circonstances, les premiers juges ont fait une juste appréciation de ce chef de préjudice en l'évaluant à la somme de 500 euros. 4. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a limité à 14 500 euros le montant de son préjudice indemnisable et rejeté le surplus de sa demande. Sur les frais liés au litige : 5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge du centre hospitalier universitaire de Montpellier, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à M. A... de la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... le versement d'une somme de 1 500 euros au centre hospitalier universitaire de Montpellier au titre des frais d'instance exposés et non compris dans les dépens. D E C I D E : Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : M. A... versera au centre hospitalier universitaire de Montpellier une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au centre hospitalier universitaire de Montpellier. Délibéré après l'audience du 21 juin 2022 à laquelle siégeaient : Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre, Mme Blin, présidente assesseure, Mme Arquié, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 juillet 2022. La rapporteure, C. Arquié La présidente, A. Geslan-Demaret La greffière, M-M Maillat La République mande et ordonne au ministre de la santé et de la prévention, en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21TL02275
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Toulouse