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CAA de DOUAI, 2ème chambre, 02/02/2021, 19DA02689, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... a demandé au tribunal des pensions militaires d'invalidité de Rouen l'annulation de la décision du 23 mars 2016 du ministre de la défense rejetant sa demande de révision de sa pension militaire d'invalidité pour aggravation des première, deuxième et quatrième de ses infirmités. Par un jugement n° 16/00007 du 24 septembre 2019, le tribunal des pensions militaires de Rouen a rejeté sa demande. Par une requête, enregistrée le 30 octobre 2019, M. A..., représenté par Me C... D..., a demandé à la cour régionale des pensions de Rouen d'annuler ce jugement. ---------------------------------------------------------------------------------------------------------- Procédure devant la cour : Par un acte de transmission des dossiers, enregistré le 5 novembre 2019, et en application des dispositions du décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018 portant transfert de compétence entre juridictions de l'ordre administratif, la cour administrative d'appel de Douai est saisie de la requête de M. A..., enregistrée sous le n° 19DA02689. ---------------------------------------------------------------------------------------------------------- Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - la loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 ; - le décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018 ; - le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Muriel Milard, premier conseiller, - et les conclusions de M. Bertrand Baillard, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. M. A..., né le 23 août 1938, a été victime le 4 avril 1960 d'une blessure par balle à la jambe à la suite d'une rafale d'arme automatique lors de son service national en Algérie. L'intéressé a, par la suite, présenté un cal-vicieux en tibia varum, un raccourcissement du membre inférieur gauche de 2 centimètres et des lésions du ligament croisé antérieur du genou gauche. Il s'est vu accorder le 3 janvier 1989 une pension militaire d'invalidité au taux global de 85 % pour trois infirmités. A la suite d'un jugement du 12 avril 2006 du tribunal des pensions militaires de Rouen, une quatrième infirmité a été retenue pour une arthrose secondaire de la cheville gauche avec raideur et gonflement avec un taux fixé à 10 %. Un arrêté du 9 octobre 2006 a ainsi porté à 90 % le taux global de la pension accordée à M. A.... Le 6 novembre 2013, l'intéressé a demandé la révision de sa pension pour l'aggravation des première, deuxième et quatrième infirmités. Par une décision du 23 mars 2016, la ministre des armées a rejeté sa demande. M. A... relève appel du jugement du 24 septembre 2019 par lequel le tribunal des pensions militaires de Rouen a rejeté sa demande de révision de pension. 2. D'une part, aux termes de l'article L. 29 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre en vigueur à la date de la demande de révision de la pension de M. A..., devenu l'article L. 154-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " Le titulaire d'une pension d'invalidité concédée à titre définitif peut en demander la révision en invoquant l'aggravation d'une ou plusieurs des infirmités en raison desquelles cette pension a été accordée. / Cette demande est recevable sans condition de délai. / La pension ayant fait l'objet de la demande est révisée lorsque le pourcentage d'invalidité résultant de l'infirmité ou de l'ensemble des infirmités est reconnu supérieur de 10 p 100 au moins du pourcentage antérieur. / Toutefois, l'aggravation ne peut être prise en considération que si le supplément d'invalidité est exclusivement imputable aux blessures et aux maladies constitutives des infirmités pour lesquelles la pension a été accordée. / La pension définitive révisée est concédée à titre définitif ". L'évolution des infirmités pensionnées s'apprécie sur une période comprise entre l'octroi de la pension et la date de dépôt de la demande de révision, soit, en l'espèce, entre le 3 janvier 1989 et le 6 novembre 2013. 3. D'autre part, aux termes de l'article L. 14 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre alors en vigueur, devenu l'article L. 125-8 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre pour les alinéas 1, 2 et 3 : " Dans le cas d'infirmités multiples dont aucune n'entraîne l'invalidité absolue, le taux d'invalidité est considéré intégralement pour l'infirmité la plus grave et pour chacune des infirmités supplémentaires, proportionnellement à la validité restante. / A cet effet, les infirmités sont classées par ordre décroissant de taux d'invalidité. / Toutefois, quand l'infirmité principale est considérée comme entraînant une invalidité d'au moins 20 %, les degrés d'invalidité de chacune des infirmités supplémentaires sont élevés d'une, de deux ou de trois catégories, soit de 5, 10, 15 %, et ainsi de suite, suivant qu'elles occupent les deuxième, troisième, quatrième rangs dans la série décroissante de leur gravité. Tous les calculs d'infirmités multiples prévus par le présent code, par les barèmes et textes d'application doivent être établis conformément aux dispositions de l'alinéa premier du présent article sauf dans les cas visés à l'article L. 15 ". L'article L. 15 du même code alors en vigueur, devenu l'article L. 125-9 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre dispose que : " Par dérogation aux dispositions du quatrième alinéa de l'article L. 14, doivent s'ajouter arithmétiquement, au pourcentage d'invalidité des infirmités siégeant sur un membre, les troubles indemnisés sous forme de majoration au guide-barème visé par l'article L. 9. / Lorsque les amputations d'un membre ne permettent aucunement le port d'un appareil de prothèse, elles ouvrent droit à une majoration de 5 % qui, de même, s'ajoute arithmétiquement au pourcentage d'invalidité correspondant à l'amputation ". 4. M. A... s'est vu concéder une pension militaire d'invalidité pour l'indemniser de quatre infirmités résultant pour la première, évaluée au taux de 70 %, des séquelles de la fracture du tiers supérieur des deux os de la jambe gauche entraînant un raccourcissement de 2,5 centimètres traitée par greffe vissée, pour la seconde, évaluée au taux de 20 % + 5, d'une scoliose d'origine statique par bascule du bassin et lombalgies invalidantes, pour la troisième, évaluée au taux de 10 % + 10, d'une cicatrice de 17 centimètres pour prise de greffon tibial et pour la dernière, évaluée au taux de 10 % + 15, d'une arthrose secondaire de la cheville gauche avec raideur et gonflement. L'intéressé a demandé le 6 novembre 2013 la révision de sa pension pour l'aggravation des première, deuxième et quatrième infirmités. 5. S'agissant de la première infirmité liée aux séquelles de la fracture du tiers supérieur des deux os de la jambe gauche entraînant un raccourcissement de 2,5 centimètres, il résulte de l'instruction et, en particulier, du rapport d'expertise du docteur Menguy du 26 décembre 2018 qu'après avoir pris en compte l'ensemble des éléments médicaux produits jusqu'au 6 novembre 2013, date de la demande de révision de pension, dont ceux présentés par M. A..., l'expert a constaté une restriction du périmètre de la marche depuis l'année 2013 par rapport à l'expertise précédente et une aggravation de l'arthrose, secondaire aux séquelles de la fracture, du genou du fait de sa désaxassion et de l'âge du malade. L'expert constate que M. A... est particulièrement gêné dans ses déplacements par la limitation de la mobilité du genou, aggravée par l'existence d'un cal-vicieux de la jambe déterminant un génu-varum et par l'ankylose de la cheville et estime ainsi que la diminution de la mobilité du genou gauche et du périmètre de marche justifie la demande d'aggravation. Il résulte de l'ensemble de ces éléments que contrairement à ce qu'a estimé le tribunal des pensions militaires d'invalidité de Rouen, la première infirmité dont est atteint M. A... s'était aggravée à la date de sa demande de révision de pension. 6. L'expert propose une nouvelle répartition des infirmités en dissociant les séquelles de la fracture de la jambe gauche en attribuant un taux de 50 % pour l'apparition d'un cal-vicieux déterminant une extension en génu-varum et une ankylose et un taux de 40 % pour la consolidation angulaire et la déviation de la jambe en dedans et le raccourcissement. En faisant valoir que le taux à retenir du fait de cette dissociation de cette infirmité s'élève à 72,5 %, soit un taux d'aggravation en-dessous du minimum requis pour être pensionnée, la ministre des armées doit être regardée comme demandant en appel une substitution de motifs. Il résulte du mode de calcul déterminé par les articles précités L. 14 et L. 15 du code des pensions militaires d'invalidité que la dissociation de la première infirmité en deux distinctes n'aboutit effectivement qu'à une augmentation totale de 2,5 % de l'invalidité par rapport au taux antérieur de 70 %. Par suite, cette augmentation demeurant inférieure au seuil d'aggravation de 10 % requis par les dispositions de l'article L. 29 du code des pensions précité, il ne peut être fait droit à la demande de M. A.... 7. S'agissant de la seconde infirmité, il ressort du rapport d'expertise du 26 décembre 2018 que l'expert a estimé que la scoliose dont souffre M. A... est stable. Par suite, en l'absence d'éléments médicaux existant à la date de la demande de révision de pension de nature à infirmer les conclusions de l'expert, il ne résulte pas de l'instruction que cette infirmité aurait connu une aggravation de nature à ouvrir droit, au profit de M. A..., à une révision de la pension d'invalidité perçue. 8. S'agissant enfin de la quatrième infirmité relative à l'arthrose secondaire de la cheville gauche avec raideur et gonflement, il résulte du rapport d'expertise du 26 décembre 2018 que la cheville concernée présente une importante limitation de sa mobilité et qu'il existe des phénomènes douloureux importants. L'expert propose une augmentation de 5 %, tout en soulignant la difficulté qu'il y a à se placer cinq ans auparavant, au moment de la demande de révision du 6 novembre 2013. Toutefois, cette augmentation de 5 % du taux d'invalidité demeure inférieure au seuil d'aggravation de 10 % requis par l'article L. 29 du code des pensions précité. 9. Il résulte de ce qui ce qui précède qu'il n'est pas établi que les infirmités pensionnées auraient connu une aggravation de nature à ouvrir droit, au profit de M. A..., à une révision de sa pension d'invalidité. Il suit de là que M. A... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal des pensions militaires d'invalidité de Rouen a rejeté sa demande tendant à la révision de sa pension militaire d'invalidité. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à la ministre des armées et à Me C... D.... 2 N°19DA02689
Cours administrative d'appel
Douai
CAA de BORDEAUX, 1ère chambre, 04/02/2021, 19BX00462, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Pau de condamner l'Etat à lui verser la somme de 100 000 euros en réparation des préjudices de carrière et de pension qu'elle estime avoir subis. Par un jugement n° 1702174 du 5 décembre 2018, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande et a mis à la charge de l'Etat les frais d'expertise. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 29 janvier 2019, Mme B..., représentée par Me C..., demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Pau du 5 décembre 2018 ; 2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 100 000 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis au titre de la perte de chance de poursuivre une carrière à son terme ; 3°) de mettre à la charge l'Etat la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la décision du 7 mai 2010 portant mise à la retraire pour invalidité repose sur une appréciation manifestement erronée dès lors qu'elle n'était pas invalide de manière définitive et absolue à l'exercice de toutes fonctions ; cette illégalité constitue une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat ; - cette décision illégale l'a privée de son traitement, à concurrence de 11 280 euros par an, de l'avancement d'échelon ou de grade et de droits à pension dès lors qu'elle aurait pu poursuivre son activité pendant six années ; le préjudice financier sera évalué forfaitairement à 100 000 euros. Par un mémoire enregistré le 18 septembre 2020, le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports conclut au rejet de la requête. Il soutient que : - si l'appelante a entendu soulever le moyen tiré de ce que la décision contestée a été prise au terme d'une procédure irrégulière faute d'avoir été examinée par les comité médicaux consultés, ce moyen est irrecevable en appel dès lors qu'elle n'a développé, dans ses écritures de première instance, que des moyens de légalité interne ; - les moyens développés par Mme B... ne sont pas fondés. Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle à 55 % par une décision du 18 avril 2019. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme D..., - les conclusions de M. Romain Roussel, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. Par une décision du recteur de l'académie de Toulouse du 7 mai 2010, Mme B..., infirmière des services médicaux des administrations de l'Etat, qui exerçait ses fonctions au collège Voltaire de Tarbes, a été admise à la retraite pour invalidité, à compter du 13 février 2010, en raison de son incapacité définitive et absolue à exercer toutes fonctions. Après le rejet implicite de sa réclamation indemnitaire préalable adressée le 21 août 2017, Mme B... a demandé au tribunal administratif de Pau de condamner l'Etat à lui verser la somme de 100 000 euros en réparation des préjudices résultant de l'illégalité de cette décision. Elle relève appel du jugement n° 1702174 du 5 décembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande. Sur la responsabilité : 2. Aux termes de l'article L. 29 du code des pensions civiles et militaires de retraite, dans sa rédaction applicable au litige : " Le fonctionnaire civil qui se trouve dans l'incapacité permanente de continuer ses fonctions en raison d'une invalidité ne résultant pas du service et qui n'a pu être reclassé dans un autre corps en application de l'article 63 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précitée peut être radié des cadres par anticipation soit sur sa demande, soit d'office ; dans ce dernier cas, la radiation des cadres est prononcée sans délai si l'inaptitude résulte d'une maladie ou d'une infirmité que son caractère définitif et stabilisé ne rend pas susceptible de traitement, ou à l'expiration d'un délai de douze mois à compter de sa mise en congé si celle-ci a été prononcée en application de l'article 36 (2°) de l'ordonnance du 4 février 1959 relative au statut général des fonctionnaires ou à la fin du congé qui lui a été accordé en application de l'article 36 (3°) de ladite ordonnance. L'intéressé a droit à la pension rémunérant les services, sous réserve que ses blessures ou maladies aient été contractées ou aggravées au cours d'une période durant laquelle il acquérait des droits à pension ". 3. Il résulte de l'instruction que Mme B..., placée en arrêt maladie ordinaire pour dépression, a demandé l'octroi d'un congé de longue maladie à compter du 13 février 2009. Le 21 juillet 2009, le comité médical départemental a émis un avis défavorable à l'octroi de ce congé et a conclu à l'inaptitude totale et définitive à l'exercice de toute fonction de Mme B.... Cet avis a été confirmé par le comité médical supérieur le 22 décembre 2009 ainsi que par une expertise d'un psychiatre des hôpitaux de Lannemezan du 6 mars 2010 indiquant que Mme B... était " inapte totalement et définitivement à reprendre son emploi d'infirmière scolaire ". Après avis de la commission de réforme du 2 avril 2010, le recteur de l'académie de Toulouse a, par une décision du 7 mai 2010, prononcé sa mise à la retraite pour invalidité, à compter du 13 février 2010, en raison de son incapacité définitive et absolue à exercer toutes fonctions. Si Mme B... fait valoir que son état de santé était en voie d'amélioration et qu'elle aurait dû être placée en congé de longue maladie, elle produit à l'appui de ses allégations deux certificats médicaux, le premier d'un praticien hospitalier du centre hospitalier des Pyrénées du 11 janvier 2010 qui constate une amélioration progressive de son état de santé mais qui précise également qu'il " persiste une phobie par rapport à son milieu scolaire " et qu'elle " souhaite reprendre son activité sur un poste de reclassement " et le second d'un médecin généraliste du 6 septembre 2010 qui constate que " lors de la consultation de ce jour, elle ne prend plus de Deroxat, n'a plus de suivi psychologique et ne parait plus dépressive ". Toutefois, ce dernier avis, postérieur à la décision attaquée ne se prononce pas sur son aptitude à exercer des fonctions à la date du 13 février 2010. Par ailleurs, si Mme B... se prévaut du rapport d'expertise établi le 3 juin 2014 par un psychiatre à la demande du juge des référés du tribunal administratif de Pau dans son ordonnance du 14 février 2014, le tribunal n'était pas lié par les conclusions de l'expertise qu'il avait ordonnée. Au demeurant, si cette expertise indique que " l'épisode dépressif majeur était en voie d'amélioration ", elle ajoute que " l'examen de contre-expertise ne stipule pas que celui-ci était guéri ". Enfin, si elle conclut à ce que " l'état clinique de Mme B... à la date du 13 février 2010 justifiait qu'elle restât en congé de maladie ", il ressort des pièces du dossier que l'agent avait épuisé ses droits à un congé de maladie ordinaire à cette date sans pouvoir prétendre à un congé de longue maladie compte tenu de son affection. Ainsi, les éléments versés au dossier par Mme B..., qui ne se prononcent pas sur son aptitude quant à l'exercice de ses fonctions au sein de l'administration, ne permettent pas de remettre en cause l'avis du comité médical départemental confirmé par l'avis du comité médical supérieur ainsi que l'avis de la commission de réforme, tous convergents. Par suite, il ne résulte pas de l'instruction qu'en décidant de prononcer la radiation des cadres de Mme B... en raison de son inaptitude totale et définitive à l'exercice de toutes fonctions, constatée par les comités médicaux, le recteur de l'académie de Toulouse aurait entaché sa décision d'une erreur d'appréciation quant à son état de santé. Dès lors, la responsabilité de l'Etat n'est pas engagée à l'égard de Mme B... du fait de cette décision. 4. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande indemnitaire. Sur les frais liés au litige : 5. Les dispositions de l'article L. 761-1 font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande Mme B... au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. DECIDE : Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports. Délibéré après l'audience du 7 janvier 2021 à laquelle siégeaient : Mme Marianne Hardy, président, M. Didier Salvi, président-assesseur, Mme D..., premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 février 2021. Le rapporteur, D...Le président, Marianne Hardy Le greffier, Sophie Lecarpentier La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. N° 19BX00462 2
Cours administrative d'appel
Bordeaux
CAA de LYON, 3ème chambre, 11/02/2021, 19LY01009, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure M. F... H... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 28 avril 2017 par laquelle le maire de Givors a renouvelé le détachement de Mme A... sur l'emploi de directeur général des services à compter du 1er mai 2017 pour une durée d'un an, ensemble la décision du 28 juillet 2017 rejetant son recours gracieux. Par un jugement n° 1706652 du 16 janvier 2019, le tribunal administratif de Lyon a annulé les décisions du 28 avril et 28 juillet 2017. Procédure devant la cour Par une requête enregistrée le 15 mars 2019 et un mémoire, enregistré le 27 juin 2019, la commune de Givors, représentée par Me G... demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 16 janvier 2019 ; 2°) de mettre à la charge de M. H... la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - le litige aurait dû faire l'objet d'une décision de non-lieu à statuer dès lors que l'arrêté du 28 avril 2017 avait été abrogé par un arrêté du 11 juillet 2017 et que le litige avait ainsi perdu son objet ; - c'est à tort que les juges de première instance ont annulé la décision litigieuse par voie de conséquence et par un moyen d'ordre public sans examiner les moyens soulevés ; - les moyens invoqués en première instance par M. H... ne sont pas fondés. Par des mémoires en défense, enregistrés le 22 mai 2019 et 29 juin 2019, M. H..., représenté par Me C..., conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge de la commune de Givors la somme de 3 000 euros au titre des frais non compris dans les dépens. Il soutient que les moyens ne sont pas fondés. Par ordonnance du 8 juillet 2019, la clôture d'instruction a été fixée, en dernier lieu, au 30 août 2019. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code général des collectivités territoriales ; - le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Pierre Thierry, premier conseiller, - les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public, - et les observations de Me C..., représentant M. H... ; Considérant ce qui suit : 1. Par une décision du 30 avril 2015, Mme A..., soeur de M. D..., maire de la commune de Givors, a été détachée sur l'emploi fonctionnel de directrice générale des services (DGS) de la commune à compter du 26 janvier 2015. Ce détachement a été renouvelé par un arrêté du 18 avril 2016 et, à nouveau, par un arrêté du 28 avril 2017. Par un jugement du 6 mai 2018, le tribunal administratif de Lyon, à la demande de M. H..., a annulé la décision du 30 avril 2015. Par un arrêt du 20 septembre 2020, la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté les conclusions à fin d'annulation de ce jugement présentées par la commune de Givors. Cette dernière relève appel du jugement du 16 janvier 2019 par lequel le tribunal administratif de Lyon a, sur demande de M. H..., annulé la décision du 28 avril 2017 portant détachement de Mme A... aux mêmes fonctions à compter du 1er mai 2017 ainsi que le rejet opposé à son recours gracieux. Sur la régularité du jugement : 2. En premier lieu, un recours pour excès de pouvoir dirigé contre un acte administratif n'a d'autre objet que d'en faire prononcer l'annulation avec effet rétroactif. Si, avant que le juge n'ait statué, l'acte attaqué est rapporté par l'autorité compétente et si le retrait ainsi opéré acquiert un caractère définitif faute d'être critiqué dans le délai du recours contentieux, il emporte alors disparition rétroactive de l'ordonnancement juridique de l'acte contesté, ce qui conduit à ce qu'il n'y ait plus lieu pour le juge de la légalité de statuer sur le mérite du pourvoi dont il était saisi. Dans le cas où l'administration se borne à procéder à l'abrogation de l'acte attaqué, cette circonstance prive d'objet le pourvoi formé à son encontre, à la double condition que cet acte n'ait reçu aucune exécution pendant la période où il était en vigueur et que la décision procédant à son abrogation soit devenue définitive. 3. A la suite de sa condamnation par les juridictions pénales à l'interdiction d'exercer des fonctions publiques pendant 18 mois, Mme A... a été radiée des cadres à compter du 6 juillet 2017, ce qui a privé d'effet et a ainsi fait disparaître de l'ordre juridique, à compter de cette date, l'arrêté litigieux du 28 avril 2017. Cette radiation des cadres n'ayant pas eu d'effet rétroactif et, ainsi que l'a jugé à bon droit le tribunal administratif de Lyon, l'arrêté en litige ayant produit des effets jusqu'au 6 juillet 2017, la demande d'annulation formée devant lui par M. H..., même après la disparition, pour l'avenir, de l'ordre juridique de la décision litigieuse, ne privait pas d'objet le litige. Par suite, la commune de Givors n'est pas fondée à soutenir que le tribunal administratif de Lyon aurait dû prononcer un non-lieu à statuer sur la demande de M. H.... 4. En second lieu, en raison des effets qui s'y attachent, l'annulation pour excès de pouvoir d'un acte administratif, qu'il soit ou non réglementaire, emporte, lorsque le juge est saisi de conclusions recevables, l'annulation par voie de conséquence des décisions administratives consécutives qui n'auraient pu légalement être prises en l'absence de l'acte annulé ou qui sont en l'espèce intervenues en raison de l'acte annulé. Il en va ainsi, notamment, des décisions qui ont été prises en application de l'acte annulé et de celles dont l'acte annulé constitue la base légale. 5. Il n'est pas contesté qu'entre le moment de son détachement sur le poste de directeur général des services de la commune, en janvier 2015, et sa radiation des cadres, Mme A... a exercé ses fonctions sans interruption. Il ne ressort par ailleurs ni de l'arrêté en litige, ni d'aucune autre pièce, que l'arrêté du 28 avril 2017 renouvelant ses fonctions a eu pour effet ou même pour objectif de modifier les responsabilités de Mme A.... Ainsi, alors que la commune n'a jamais manifesté son intention de mettre un terme à son détachement sur ces fonctions et qu'elle affirme, au contraire, qu'elle souhaitait lui renouveler sa confiance, les circonstances qu'elle a fait précéder l'arrêté litigieux de la publication d'une vacance de poste et qu'elle a demandé l'avis de la CAP sont sans influence sur la nature de l'arrêté en cause. Celui-ci n'a d'autre objet que de prolonger le détachement de Mme A... dans ses fonctions de directrice générale des services. C'est par suite à bon droit que les premiers juges ont considéré que l'arrêté du 28 avril 2017 renouvelant le détachement de Mme A... a été pris en application de la décision du 30 avril 2015 la détachant sur l'emploi fonctionnel de DGS de la commune, décision annulée, comme il a été dit au point 1 du présent arrêt, par jugement du 6 mai 2018. Dès lors, il y avait lieu, en application des principes mentionnés au point précédent et sans qu'il fût besoin d'examiner les moyens soulevés par M. H..., d'annuler l'arrêté en litige par voie de conséquence. 6. Il résulte de ce qui précède que la commune de Givors n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par son jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a annulé l'arrêté litigieux du 28 avril 2017. Sur les conclusions relatives aux frais d'instance : 7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative faisant obstacle à ce que soit mise à la charge de M. H..., qui n'est pas la partie perdante, une somme à ce titre, les conclusions de la commune de Givors en ce sens doivent être rejetées. 8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces mêmes dispositions, de mettre à la charge de la commune de Givors une somme de 2 000 euros qu'elle paiera à M. H..., au titre des frais non compris dans les dépens que ce dernier a exposés. DÉCIDE : Article 1er : La requête de la commune de Givors est rejetée. Article 2 : La commune de Givors versera à M. H... une somme de 2 000 euros en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Givors et à M. F... H.... Copie en sera délivrée à Mme A.... Délibéré après l'audience du 26 janvier 2020 à laquelle siégeaient : Mme E... B..., présidente de chambre, M. Gilles Fédi, président-assesseur, M. Pierre Thierry, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 11 février 2021. No 19LY010092
Cours administrative d'appel
Lyon
CAA de MARSEILLE, 8ème chambre, 09/02/2021, 19MA05718, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme M'A... C... a demandé au tribunal des pensions de Marseille d'annuler la décision du 11 juillet 2013 par laquelle le ministre de la défense a refusé de lui accorder une pension de veuve du chef de M. D... B.... Par un jugement n° 14/00048 du 28 mai 2015, le tribunal des pensions de Marseille a rejeté sa demande. Par un arrêt n° 2017/6 du 13 mars 2017, la cour régionale des pensions d'Aix-en-Provence, saisie d'un appel de Mme C... contre ce jugement du tribunal des pensions de Marseille, a ordonné la radiation de l'affaire par suite du décès de Mme C..., survenu le 14 février 2016. Par lettre enregistrée au greffe de la cour régionale des pensions d'Aix-en-Provence le 24 juin 2019, M. E... G... B..., se disant héritier de Mme C..., a demandé la reprise de l'instance. Procédure devant la Cour : La cour régionale des pensions d'Aix-en-Provence a transmis à la cour administrative d'appel de Marseille, en application du décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018 relatif au contentieux des pensions militaires d'invalidité, le dossier de la requête de Mme C.... Par un mémoire en défense enregistré le 12 mars 2020, la ministre des armées conclut au rejet de la requête. Elle soutient que : - la requête d'appel est tardive et, par suite, irrecevable ; - le jugement du tribunal des pensions de Marseille étant devenu définitif, M. E... G... B... ne peut obtenir le versement des arrérages de la pension due selon lui à Mme C.... Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code civil ; - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; - la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018, notamment l'article 51 ; - le décret n°59-327 du 20 février 1959 relatif aux juridictions des pensions ; - le décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. d'Izarn de Villefort, - et les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. Par décision du 11 juillet 2013, le ministre de la défense a refusé de donner suite à la demande que lui avait adressée Mme M'A... C... tendant à l'attribution d'une pension de veuve du chef de M. D... B..., décédé le 28 avril 1998, lequel percevait une pension d'invalidité en qualité de victime civile de la guerre 1939-1945, au motif qu'elle n'établissait pas sa qualité d'ayant cause. Par jugement du 28 mai 2015, le tribunal des pensions de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision et à l'attribution de cette pension. L'intéressée, qui avait relevé appel de ce jugement devant la cour régionale des pensions d'Aix-en-Provence, est décédée le 14 février 2016. Par un arrêt du 13 mars 2017, la cour régionale des pensions a ordonné la radiation de l'affaire. Par lettre enregistrée au greffe de la cour régionale des pensions d'Aix-en-Provence le 24 juin 2019, M. E... G... B..., se disant héritier de Mme C..., demande la reprise de l'instance. 2. L'affaire étant en l'état à la date du décès de la requérante, il y a lieu pour la Cour, en application des règles générales de procédure applicables aux juridictions administratives, d'y statuer, alors même qu'aucun ayant droit ayant établi cette qualité n'aurait déclaré reprendre l'instance. 3. Aux termes de l'article 11 du décret du 20 février 1959 relatif aux juridictions des pensions en vigueur à la date de l'appel soit le 4 janvier 2016 : " Les décisions du tribunal des pensions sont susceptibles d'appel devant la cour régionale des pensions. (...) L'appel est introduit par lettre recommandée adressée au greffier de la cour dans les deux mois de la notification de la décision. (...) Le cas échéant, les délais supplémentaires de distance prévus aux articles 643 et 644 du code de procédure civile s'ajoutent aux délais prévus au présent article. ". Aux termes de l'article 643 du code de procédure civile : " Lorsque la demande est portée devant une juridiction qui a son siège en France métropolitaine, les délais de comparution, d'appel, d'opposition, de recours en révision et de pourvoi en cassation sont augmentés de : (...) 2. Deux mois pour celles qui demeurent à l'étranger. ". 4. Il résulte de l'examen de l'avis de réception de la notification du jugement attaqué à Mme C..., qui résidait en Tunisie, que cette notification a bien été faite à la requérante, qui y a apposé sa signature. Si la date de la notification n'y est pas indiquée, le timbre du bureau de poste de Mareth qui a renvoyé l'avis comporte la date du 15 juin 2015, ce qui établit que la notification a été faite au plus tard à cette date. Le délai d'appel expirait le 16 octobre 2015, compte tenu du délai de distance de deux mois dont bénéficiait l'intéressée. La requête d'appel enregistrée et parvenue au greffe de la cour régionale des pensions d'Aix-en-Provence le 31 décembre 2015 était donc tardive. Par suite, la fin de non-recevoir opposée en ce sens par la ministre des armées doit être accueillie. 5. Il résulte de tout ce qui précède que les héritiers de Mme C... ne sont pas fondés à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal des pensions de Marseille a rejeté sa demande. D É C I D E : Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié aux héritiers de Mme M'A... C..., à M. E... G... B... et à la ministre des armées. Délibéré après l'audience du 26 janvier 2021, où siégeaient : - M. Badie, président, - M. d'Izarn de Villefort, président assesseur, - M. Ury, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 février 2021. N° 19MA05718 2
Cours administrative d'appel
Marseille
CAA de DOUAI, 2ème chambre, 02/02/2021, 19DA02432, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. C... A... a demandé au tribunal des pensions militaires d'invalidité de Lille l'annulation de la décision implicite du ministre de la défense rejetant sa demande adressée le 20 mars 2017 tendant à la concession d'une pension militaire d'invalidité. Par un jugement n° 17/014 du 3 décembre 2018, le tribunal des pensions militaires de Lille a rejeté sa demande. Par une requête et des mémoires, enregistrés les 27 décembre 2018, 30 avril 2019, 26 juin 2019 et 26 août 2019, M. A..., représenté par Me B... D..., demande à la cour régionale des pensions de Douai : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) à titre subsidiaire, d'ordonner une mesure d'instruction quant à sa situation sociale et médicale avant et pendant son engagement dans la Légion étrangère ; 3°) d'ordonner une expertise médicale ; 4°) de condamner l'Etat aux entiers dépens. ---------------------------------------------------------------------------------------------------------- Procédure devant la cour : Par un acte de transmission des dossiers, enregistré le 5 novembre 2019, et en application des dispositions du décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018 portant transfert de compétence entre juridictions de l'ordre administratif, la cour administrative d'appel de Douai est saisie de la requête de M. A..., enregistrée sous le n° 19DA02432. ---------------------------------------------------------------------------------------------------------- Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - la loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 ; - le décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018 ; - le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Muriel Milard, premier conseiller, - et les conclusions de M. Bertrand Baillard, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. M. A..., né le 23 novembre 1980, a été incorporé à la Légion étrangère comme engagé volontaire le 15 mars 2004. Il a été mis fin à son contrat d'engagement et l'intéressé a été radié des contrôles le 6 juillet 2004 pour inaptitude médicale. Il a demandé le 14 mai 2008 la concession d'une pension militaire d'invalidité pour " trouble schizophrénique de type indifférencié ". Par une décision du 14 février 2009, le ministre de la défense et des anciens combattants a rejeté sa demande au motif que son infirmité n'était pas imputable au service pour défaut de preuve et de présomption. Par un jugement du 12 décembre 2011 du tribunal des pensions du Nord, confirmé par un arrêt de la cour régionale des pensions de Douai du 24 septembre 2012, devenu définitif à la suite du rejet du pourvoi en cassation par une décision du Conseil d'Etat du 21 octobre 2013, cette décision de rejet de demande de concession de pension est devenue définitive. Le 19 février 2016, M. A... a demandé le réexamen de sa demande, qui a été rejetée par une décision du 11 mars 2016. M. A... a réitéré le 20 mars 2017 sa demande de concession de pension, qui a fait l'objet d'une décision implicite de rejet. M. A... relève appel du jugement du 3 décembre 2018 par lequel le tribunal des pensions militaires de Lille a rejeté pour irrecevabilité sa demande tendant à l'annulation de cette décision implicite de rejet. 2. Par le jugement attaqué, le tribunal des pensions militaires d'invalidité de Lille a rejeté, comme irrecevable, le recours de M. A... dirigé contre la décision implicite de rejet de sa demande du 20 mars 2017 en raison de l'autorité de la chose jugée qui s'attache aux décisions juridictionnelles précitées, devenues définitives. Or, M. A..., qui se borne à soutenir que les troubles psychiatriques dont il souffre sont consécutifs à un fait imputable au service et qu'il existe ainsi un lien direct et déterminant entre ces troubles et un fait précis du service, ne conteste pas l'irrecevabilité qui lui a été opposée en première instance en raison de l'autorité de chose jugée qui s'attache aux décisions juridictionnelles précitées devenues définitives. Par suite, et en l'absence de circonstances de fait et de droit nouvelles, les moyens qu'il invoque à l'encontre de la décision en litige doivent être rejetés comme inopérants. 3. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner une mesure d'instruction, ni une nouvelle expertise, que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal des pensions militaires d'invalidité de Lille a rejeté sa demande. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A..., à la ministre des armées et à Me B... D.... 2 N°19DA02432
Cours administrative d'appel
Douai
CAA de DOUAI, 2ème chambre, 02/02/2021, 19DA02432, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. C... A... a demandé au tribunal des pensions militaires d'invalidité de Lille l'annulation de la décision implicite du ministre de la défense rejetant sa demande adressée le 20 mars 2017 tendant à la concession d'une pension militaire d'invalidité. Par un jugement n° 17/014 du 3 décembre 2018, le tribunal des pensions militaires de Lille a rejeté sa demande. Par une requête et des mémoires, enregistrés les 27 décembre 2018, 30 avril 2019, 26 juin 2019 et 26 août 2019, M. A..., représenté par Me B... D..., demande à la cour régionale des pensions de Douai : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) à titre subsidiaire, d'ordonner une mesure d'instruction quant à sa situation sociale et médicale avant et pendant son engagement dans la Légion étrangère ; 3°) d'ordonner une expertise médicale ; 4°) de condamner l'Etat aux entiers dépens. ---------------------------------------------------------------------------------------------------------- Procédure devant la cour : Par un acte de transmission des dossiers, enregistré le 5 novembre 2019, et en application des dispositions du décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018 portant transfert de compétence entre juridictions de l'ordre administratif, la cour administrative d'appel de Douai est saisie de la requête de M. A..., enregistrée sous le n° 19DA02432. ---------------------------------------------------------------------------------------------------------- Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - la loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 ; - le décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018 ; - le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Muriel Milard, premier conseiller, - et les conclusions de M. Bertrand Baillard, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. M. A..., né le 23 novembre 1980, a été incorporé à la Légion étrangère comme engagé volontaire le 15 mars 2004. Il a été mis fin à son contrat d'engagement et l'intéressé a été radié des contrôles le 6 juillet 2004 pour inaptitude médicale. Il a demandé le 14 mai 2008 la concession d'une pension militaire d'invalidité pour " trouble schizophrénique de type indifférencié ". Par une décision du 14 février 2009, le ministre de la défense et des anciens combattants a rejeté sa demande au motif que son infirmité n'était pas imputable au service pour défaut de preuve et de présomption. Par un jugement du 12 décembre 2011 du tribunal des pensions du Nord, confirmé par un arrêt de la cour régionale des pensions de Douai du 24 septembre 2012, devenu définitif à la suite du rejet du pourvoi en cassation par une décision du Conseil d'Etat du 21 octobre 2013, cette décision de rejet de demande de concession de pension est devenue définitive. Le 19 février 2016, M. A... a demandé le réexamen de sa demande, qui a été rejetée par une décision du 11 mars 2016. M. A... a réitéré le 20 mars 2017 sa demande de concession de pension, qui a fait l'objet d'une décision implicite de rejet. M. A... relève appel du jugement du 3 décembre 2018 par lequel le tribunal des pensions militaires de Lille a rejeté pour irrecevabilité sa demande tendant à l'annulation de cette décision implicite de rejet. 2. Par le jugement attaqué, le tribunal des pensions militaires d'invalidité de Lille a rejeté, comme irrecevable, le recours de M. A... dirigé contre la décision implicite de rejet de sa demande du 20 mars 2017 en raison de l'autorité de la chose jugée qui s'attache aux décisions juridictionnelles précitées, devenues définitives. Or, M. A..., qui se borne à soutenir que les troubles psychiatriques dont il souffre sont consécutifs à un fait imputable au service et qu'il existe ainsi un lien direct et déterminant entre ces troubles et un fait précis du service, ne conteste pas l'irrecevabilité qui lui a été opposée en première instance en raison de l'autorité de chose jugée qui s'attache aux décisions juridictionnelles précitées devenues définitives. Par suite, et en l'absence de circonstances de fait et de droit nouvelles, les moyens qu'il invoque à l'encontre de la décision en litige doivent être rejetés comme inopérants. 3. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner une mesure d'instruction, ni une nouvelle expertise, que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal des pensions militaires d'invalidité de Lille a rejeté sa demande. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A..., à la ministre des armées et à Me B... D.... 2 N°19DA02432
Cours administrative d'appel
Douai
CAA de LYON, 7ème chambre, 14/01/2021, 20LY00696, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure Mme B... C... a demandé au tribunal des pensions de Lyon d'annuler la décision du 27 juin 2011, par laquelle le ministre de la défense a refusé de faire droit à sa demande de pension militaire d'invalidité et de lui reconnaître un droit à pension pour une symptomatologie de myofasciite à macrophages, et de lui accorder une pension d'invalidité au taux de 80 %. Par un jugement n° 11/00019 du 23 septembre 2014, le tribunal départemental des pensions de Lyon lui a accordé une pension à compter du 28 juillet 2009 au taux de 50 % pour myofasciite à macrophages, 20 % pour fibromyalgie invalidante et 15% pour personnalité névrotique-anxiété. Par un arrêt n° 14/00008 du 30 janvier 2018, la cour régionale des pensions de Lyon, sur appel de la ministre des armées, a annulé ce jugement et rejeté la demande de Mme C.... Par un arrêt n° 419329 du 13 février 2020, le Conseil d'État, statuant en cassation sur pourvoi de Mme C..., a annulé cet arrêt de la cour régionale des pensions de Lyon et renvoyé l'affaire à la cour. Procédure devant la cour Par des mémoires, enregistrés les 27 mai 2020, 29 juillet 2020 et 21 septembre 2020, la ministre des armées demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal des pensions du 23 septembre 2014 ; 2°) de rejeter la demande de Mme B... C... et confirmer la décision du 27 juin 2011. Elle soutient que : - la production des pièces jointes au mémoire du 27 mai 2020 est conforme aux articles R. 414-1 et R. 414-3 du code de justice administrative ; - la circonstance que la décision en litige s'approprie l'avis de la commission consultative médicale n'a pas pour effet de lier le signataire à cet avis ; - il ne ressort pas des expertises menées à l'instance une relation de cause à effet entre la myofasciite post-vaccinale et la fibromyalgie dont est principalement affectée Mme C..., pour un taux, à titre documentaire, de 50 % ; - les infirmités invoquées relèvent de la maladie et non de la blessure reçue en service ; - sans symptomatologie immédiatement postérieure aux vaccinations en 1981, 1982 et 1985, Mme C... présentait des troubles évolutifs de même nature que ceux au titre desquels elle demande la pension, avant les injections de 1995 et 1998 ; - l'aspect histologique de la myofasciite à macrophages doit être distingué des manifestations cliniques fonctionnelles dont se plaint Mme C..., dont le lien avec la lésion au point d'injection ne peut être établi ni présumé ; - les troubles psychologiques se rattachent à la fibromyalgie ; - le taux d'invalidité résultant de l'exécution du jugement du 23 septembre 2014 est de 75 %, sans que le Conseil d'État, qui a relevé inexactement que le jugement accordait un taux de 80 %, ait statué sur ce taux ; - la demande de pension a été enregistrée le 28 juillet 2009 et non le 22 juillet 2009. Par un mémoire enregistré le 18 juin 2020, des productions complémentaires, enregistrées le 22 juin2020 (non communiquées) et des mémoires enregistrés les 31 août 2020 et 23 octobre 2020 (non communiqué), Mme B... C..., représentée par Me A..., conclut au rejet de la requête et à : - l'annulation de la décision du ministre de la défense du 27 juin 2011 ; - ce que lui soit accordée une pension militaire d'invalidité pour myofasciite à macrophages au taux de 80 %, dont 15 % au titre de la dépression réactionnelle aux séquelles de cette infirmité ; - ce que lui soient versés les intérêts moratoires depuis la date d'enregistrement de sa demande de pension ; - ce que soit mise à la charge de l'État la somme de 2 000 euros, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - à titre liminaire, les pièces produites par l'administration par voie électronique le 27 mai 2020 doivent être écartées des débats pour méconnaissance de la procédure fixée par les articles R. 414-1 et R. 414-3 du code de justice administrative ; - en s'estimant lié par l'avis de la commission consultative médicale du 20 janvier 2011, l'auteur de la décision du 27 juin 2011 a méconnu l'étendue de sa compétence ; - elle remplit les conditions fixées par les articles L. 2 et L. 3 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - elle justifie présenter les symptômes cliniques de la myofasciite à macrophages dont il n'est pas contesté qu'elle présente l'histologie ; - le taux d'invalidité pour son infirmité doit être fixé à 80 %, dont 70 % pour la myofasciite à macrophages et 15 % pour la dépression réactionnelle, rendant sans intérêt pratique la distinction entre maladie ou blessure ; - son état étant stabilisé depuis 2009, en application des articles L. 121-8, R. 121-4 et R. 121-5 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, elle doit bénéficier d'une pension définitive à compter du 22 juillet 2009. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; - le décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018 ; - le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Josserand-Jaillet, président ; - les conclusions de M. Chassagne, rapporteur public ; - et les observations de Me A..., pour Mme C... ; Considérant ce qui suit : 1 Mme B... C..., engagée dans l'armée de terre à compter du 1er mai 1981, a été soumise dans le cadre de son service à des vaccinations obligatoires, et notamment contre la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite le 16 mai 1995, renouvelée le 9 août 1995, et contre l'hépatite B, les 16 mai 1995, 28 avril 1998 et 27 mai 1998. A compter de 1999, selon ses affirmations, elle a présenté une symptomatologie clinique composée d'asthénie physique et cognitive, de douleurs musculo-articulaires et de troubles du sommeil, qui a évolué vers une affection invalidante à partir de 2001. Une biopsie réalisée en 2002 du muscle deltoïde gauche, au point d'injection des vaccins, a évoqué une myofasciite à macrophages, histologiquement confirmée le 2 avril 2009. Placée en congé de longue maladie à compter du 15 juin 2009, Mme C... a demandé, le 28 juillet 2009, une pension militaire d'invalidité pour des séquelles de myofasciite à macrophages constituées par une fatigabilité permanente, des troubles de la vision et des troubles psychologiques réactionnels. Le ministre de la défense a rejeté cette demande par une décision du 27 juin 2011, dont Mme C... a sollicité l'annulation devant le tribunal des pensions militaires de Lyon, lequel, après avoir ordonné une expertise, a accordé à l'intéressée, par jugement du 23 septembre 2014, une pension militaire d'invalidité pour myofasciite à macrophages, au taux de 50 %, fibromyalgie, au taux de 20 %, et troubles névrotiques et anxieux réactionnels, au taux de 15 %. Sur appel du ministre de la défense, par un arrêt du 30 janvier 2018, la cour régionale des pensions de Lyon, après avoir ordonné une nouvelle expertise, a annulé ce jugement et rejeté la demande de Mme C..., qui par ailleurs a été admise à faire valoir ses droits à la retraite au grade d'adjudant-chef à compter du 1er août 2014. Par un arrêt du 13 févier 2020, le Conseil d'État, statuant en cassation sur pourvoi de Mme C..., a annulé l'arrêt du 30 janvier 2018 et renvoyé l'affaire à la cour. Sur la fin de non-recevoir opposée par Mme C... aux pièces produites à l'instance le 27 mai 2020 par la ministre des armées : 2 Aux termes de l'article R. 412-2 du code de justice administrative : " Lorsque les parties joignent des pièces à l'appui de leurs requêtes et mémoires, elles en établissent simultanément un inventaire détaillé (...) ". L'article R. 414-1 du même code dispose que : " Lorsqu'elle est présentée par un avocat, un avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, une personne morale de droit public autre qu'une commune de moins de 3 500 habitants ou un organisme de droit privé chargé de la gestion permanente d'un service public, la requête doit, à peine d'irrecevabilité, être adressée à la juridiction par voie électronique au moyen d'une application informatique dédiée accessible par le réseau internet. La même obligation est applicable aux autres mémoires du requérant (...) ". Aux termes de l'article R. 414-3 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : " Par dérogation aux dispositions des articles R. 411-3, R. 411-4, R. 412-1 et R. 412-2, les requérants sont dispensés de produire des copies de leur requête et des pièces qui sont jointes à celle-ci et à leurs mémoires. / Les pièces jointes sont présentées conformément à l'inventaire qui en est dressé. / Lorsque le requérant transmet, à l'appui de sa requête, un fichier unique comprenant plusieurs pièces, chacune d'entre elles doit être répertoriée par un signet la désignant conformément à l'inventaire mentionné ci-dessus. S'il transmet un fichier par pièce, l'intitulé de chacun d'entre eux doit être conforme à cet inventaire. Le respect de ces obligations est prescrit à peine d'irrecevabilité de la requête. / Les mêmes obligations sont applicables aux autres mémoires du requérant, sous peine pour celui-ci, après invitation à régulariser non suivie d'effet, de voir ses écritures écartées des débats. / Si les caractéristiques de certaines pièces font obstacle à leur communication par voie électronique, ces pièces sont transmises sur support papier, dans les conditions prévues par l'article R. 412-2. L'inventaire des pièces transmis par voie électronique en fait mention ". 3 Les dispositions citées au point 2 relatives à la transmission de la requête et des pièces qui y sont jointes par voie électronique définissent un instrument et les conditions de son utilisation qui concourent à la qualité du service public de la justice rendu par les juridictions administratives et à la bonne administration de la justice. Elles ont pour finalité de permettre un accès uniformisé et rationalisé à chacun des éléments du dossier de la procédure, selon des modalités communes aux parties, aux auxiliaires de justice et aux juridictions. A cette fin, elles organisent la transmission par voie électronique des pièces jointes à la requête à partir de leur inventaire détaillé et font obligation à son auteur de les transmettre soit en un fichier unique, chacune d'entre elles devant alors être répertoriée par un signet la désignant, soit en les distinguant chacune par un fichier désigné, l'intitulé des signets ou des fichiers devant être conforme à l'inventaire qui accompagne la requête. Ces dispositions ne font pas obstacle, lorsque l'auteur de la requête entend transmettre un nombre important de pièces jointes constituant une série homogène eu égard à l'objet du litige, à ce qu'il les fasse parvenir à la juridiction en les regroupant dans un ou plusieurs fichiers sans répertorier individuellement chacune d'elles par un signet, à la condition que le référencement de ces fichiers ainsi que l'ordre de présentation, au sein de chacun d'eux, des pièces qu'ils regroupent soient conformes à l'énumération, figurant à l'inventaire, de toutes les pièces jointes à la requête. 4 Il résulte de l'instruction que les dix-neuf pièces accompagnant le mémoire produit le 27 mai 2020 par la ministre des armées ont été réparties dans l'application électronique dénommée " Télérecours " en deux fichiers, et identifiées individuellement par un signet sous un numéro d'ordre correspondant à l'inventaire détaillé figurant en annexe du mémoire. La circonstance que le classement de ces pièces ne suivrait pas un ordre chronologique mais celui de l'exposé dans les écritures auxquelles elles viennent à l'appui en considération du déroulement de l'instance et des débats ne saurait faire regarder cette présentation comme non conforme aux dispositions précitées, dont Mme C... n'est dès lors pas fondée à se prévaloir de la méconnaissance pour opposer une fin de non-recevoir à ces pièces. Sur le bien-fondé de la demande de Mme C... : 5 En premier lieu, d'une part, les omissions ou inexactitudes susceptibles d'affecter les visas d'une décision sont en tout état de cause sans influence sur la légalité de cette dernière. Dès lors, la circonstance que les visas de la décision en litige du 27 juin 2011 recopient littéralement la description des infirmités au titre desquelles l'intéressée a formulé sa demande de pension d'invalidité ne saurait, par elle-même, révéler que l'autorité signataire de cette décision se serait abstenue d'exercer sa compétence. D'autre part, s'il se l'est approprié au fond, il ne ressort pas de la motivation de cette décision que le ministre s'est estimé lié par l'avis émis le 20 janvier 2011 par la commission consultative médicale. Dans ces conditions, Mme C... n'est pas fondée à soutenir que le ministre de la défense s'est abstenu d'exercer, dans l'examen de sa demande, la plénitude de sa compétence. 6 En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, dans sa version applicable au litige : " Ouvrent droit à pension : (...) 2° Les infirmités résultant de maladies contractées par le fait ou à l'occasion du service (...) ". 7 Il résulte de ces dispositions, combinées avec celles de l'article L. 3 du même code, que le demandeur d'une pension, s'il ne peut prétendre au bénéfice de la présomption légale d'imputabilité au service, doit rapporter la preuve de l'existence d'un fait précis ou de circonstances particulières de service à l'origine de l'affection qu'il invoque. Cette preuve ne saurait résulter de la seule circonstance que l'infirmité soit apparue durant le service, ni d'une hypothèse médicale, ni d'une vraisemblance, ni d'une probabilité, aussi forte soit-elle 8 D'autre part, aux termes de l'article L. 4 de ce code, dans sa version applicable au litige : " Les pensions sont établies d'après le degré d'invalidité. / (...) Il est concédé une pension : (...) 3° Au titre d'infirmité résultant exclusivement de maladie, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse : 30 % en cas d'infirmité unique ; 40 % en cas d'infirmités multiples. (...) ". Dans tous les cas, la filiation médicale doit être établie entre la blessure ou la maladie ayant fait l'objet de la constatation et l'infirmité invoquée. " 9 Il est constant que Mme C... a reçu, dans le cadre des obligations vaccinales liées à son service, des injections vaccinales le 16 mai 1995, le 28 avril 1998 et le 27 mai 1998 contre l'hépatite B, et le 16 mai 1995 contre la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite, contenant des adjuvants aluminiques destinés à favoriser la réponse immunitaire à l'antigène vaccinal. Elle a développé de manière notable à compter de 2001 une symptomatologie d'asthénie physique et cognitive, de douleurs musculo-articulaires et de troubles du sommeil et d'attention. Une biopsie réalisée en 2002 au point d'injection a mis en évidence des lésions de myofasciite à macrophages. L'évolution de son état de santé a conduit à son placement en congé de longue durée à partir du 15 juin 2009. 10 Pour apprécier si une maladie est imputable au service, il y a lieu de prendre en compte le dernier état des connaissances scientifiques, lesquelles peuvent être de nature à révéler la probabilité d'un lien entre une affection et le service, alors même qu'à la date à laquelle l'autorité administrative a pris sa décision, l'état de ces connaissances excluait une telle possibilité. 11 En cet état, a été mise en évidence chez certains patients, à partir de 1998, une lésion dénommée myofasciite à macrophages, manifestation locale liée à la persistance d'aluminium dans les cellules immunitaires au lieu d'injection du vaccin, puis, par des études sur l'animal, la possible migration de nanoparticules d'aluminium vers différents organes, dont le cerveau, et a conduit à l'hypothèse d'une association entre une telle lésion et une combinaison de symptômes constitués notamment par une fatigue chronique, des douleurs articulaires et musculaires et des troubles cognitifs. En 2010, a été proposée la définition d'un " syndrome auto-immunitaire inflammatoire induit par les adjuvants ", et l'hypothèse d'une incidence de l'aluminium sur les cellules immunitaires du cerveau. Si les études consacrées aux adjuvants vaccinaux par l'Académie nationale de médecine, le Haut Conseil de la santé publique et l'Académie nationale de pharmacie, de même que des travaux de l'Organisation mondiale de la santé, n'ont établi aucun lien de causalité, à ce jour, entre adjuvants aluminiques et maladie auto-immune, eu égard notamment à l'hétérogénéité et à l'absence de spécificité des manifestations cliniques qui seraient associées à la lésion histologique de myofasciite à macrophages, l'existence d'un tel lien ne peut être exclue et revêt une probabilité suffisante pour qu'il puisse être regardé comme établi sous certaines conditions. 12 Tel peut être le cas lorsque la personne vaccinée présente des lésions musculaires de myofasciite à macrophages au site des injections et la combinaison des symptômes constitués notamment par une asthénie chronique marquée, des douleurs musculaires et articulaires et des troubles cognitifs et de l'attention, si ces symptômes sont apparus dans un délai normal pour ce type d'affection postérieurement à la vaccination ou, s'ils préexistaient, se sont aggravés à un rythme et une ampleur qui n'était pas prévisibles au vu de l'état de santé antérieur à celle-ci et si ces symptômes ne se rattachent pas à une autre cause identifiée. 13 Il ressort en premier lieu des rapports des 25 et 28 janvier 2002 de la biopsie réalisée sur le muscle deltoïde gauche de Mme C..., où ont été pratiquées les injections vaccinales en cause, qui ont écarté une cytopathie mitochondriale, une lésion histologique caractérisée par un amas de macrophages à cytoplasme granuleux évocatrice, selon le médecin lecteur de la biopsie, d'une myofasciite à macrophages. Le certificat médical du Professeur Authier rédigé le 2 juillet 2009 à la date de la demande de pension de l'intéressée, suivant un premier rapport en date du 2 avril 2009 confirmant cette évocation, indique que l'aspect de la lésion à cette date, caractérisé notamment par la persistance d'hydroxyde d'aluminium, établit le lien direct de celle-ci avec les injections vaccinales. Cette constatation n'est pas contestée par l'administration ni contredite par les autres pièces du dossier. 14 Il ressort en deuxième lieu de l'expertise médicale réalisée le 15 févier 2010 à la demande de l'administration que la symptomatologie globale présentée par Mme C... correspond au tableau clinique de manifestations anxieuses dans le contexte évolutif d'une maladie somatique aux conséquences invalidantes. La ministre des armées ne conteste pas que Mme C... souffre de ce syndrome, non plus que du lien de ce dernier avec la fibromyalgie très invalidante diagnostiquée dans son rapport du 6 novembre 2013 par l'expert désigné par le tribunal des pensions militaires. 15 Il résulte de ce qui précède aux points 13 et 14 que Mme C... établit l'existence des trois infirmités au titre desquelles elle a sollicité une pension d'invalidité. 16 Il ressort en troisième lieu de l'ensemble des rapports d'expertises que, si Mme C... montrait avant les injections en cause une propension à l'anxiété, la symptomatologie relevée à compter de 2002 ne préexistait pas à cette date, contrairement à ce que soutient l'administration en faisant état de pathologies distinctes relevées dans le rapport du médecin-conseil du 7 décembre 2012, avant de s'établir dans toutes ses composantes à la date de sa demande de pension, et que si des éléments de contexte privé ont pu inférer dans l'expression de cette symptomatologie, aucune cause extérieure n'a pu être établie. 17 Il résulte enfin de l'instruction que l'ensemble des symptômes histologiques et fonctionnels dont souffre Mme C..., qui relèvent du tableau de la myofasciite à macrophages, sont apparus dans un délai d'environ six ans après les injections en cause, compatible avec l'évolution connue de la maladie en l'état des connaissances scientifiques, qu'a suivi également dans sa progression le syndrome anxieux réactionnel, lié à cette dernière. 18 Dès lors, dans les circonstances particulières de l'espèce, le lien de causalité entre les vaccinations contenant des adjuvants aluminiques que Mme C... a dû subir en raison de son service en 1995 et 1998 et les infirmités au titre desquelles elle a demandé une pension militaire d'invalidité doit être regardé comme établi. Par suite, c'est à bon droit que le tribunal des pensions a annulé le refus du 27 juin 2011 opposé à sa demande et lui a accordé une pension pour myofasciite à macrophages, trouble dépressif réactionnel et fibromyalgie. 19 En troisième lieu, aux termes de l'article L. 14 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, dans sa rédaction applicable à la date du litige : " Dans le cas d'infirmités multiples dont aucune n'entraîne l'invalidité absolue, le taux d'invalidité est considéré intégralement pour l'infirmité la plus grave et pour chacune des infirmités supplémentaires, proportionnellement à la validité restante. / A cet effet, les infirmités sont classées par ordre décroissant de taux d'invalidité. / Toutefois, quand l'infirmité principale est considérée comme entraînant une invalidité d'au moins 20 %, les degrés d'invalidité de chacune des infirmités supplémentaires sont élevés d'une, de deux ou de trois catégories, soit de 5, 10, 15 %, et ainsi de suite, suivant qu'elles occupent les deuxième, troisième, quatrième rangs dans la série décroissante de leur gravité. Tous les calculs d'infirmités multiples prévus par le présent code, par les barèmes et textes d'application doivent être établis conformément aux dispositions de l'alinéa premier du présent article sauf dans les cas visés à l'article L. 15 ". Il résulte des dispositions de l'article L. 9 du même code, dans sa rédaction applicable à la date du litige et dont les dispositions ont été reprises à l'article L. 125-3 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, que " (...) Quand l'invalidité est intermédiaire entre deux échelons, l'intéressé bénéficie du taux afférent à l'échelon supérieur (...) ". 20 La ministre, qui ne peut valablement, ainsi qu'il a été dit précédemment, distinguer entre la fibromyalgie et les lésions histologiques de la myofasciite à macrophages pour réduire cette dernière, par nature polysymptomatique, à ces seules lésions, n'est pas fondée à contester le taux d'invalidité de 50 % estimé par l'expert de première instance au titre de la myofasciite à macrophages. C'est dès lors à bon droit que le tribunal, par le jugement attaqué, a fixé ce taux à 50 %, fixé respectivement à 20 % et 15 % les taux d'invalidité au titre de la fibromyalgie et du syndrome anxieux réactionnel et, en application des dispositions précitées au point 19, fixé au taux global de 80 % l'invalidité de Mme C.... 21 Il résulte de ce qui précède que la ministre des armées n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal des pensions de Lyon a annulé la décision en litige et a accordé, au taux global de 80 %, une pension à Mme C.... Sa requête doit par suite être rejetée. Sur les intérêts moratoires : 22 Les bénéficiaires de pensions militaires d'invalidité ont droit, sur leur demande, en cas de retard apporté au versement des sommes qui leur sont dues, à des intérêts moratoires. Il y a dès lors lieu de faire droit aux conclusions, par la voie de l'appel incident, de Mme C... tendant au versement de ces intérêts sur les sommes qui auraient dû lui être versées, à compter du 28 juillet 2009, date de présentation de sa demande de pension à l'administration et, dans cette mesure, d'annuler le jugement attaqué en tant qu'il n'a pas fait droit sur ce point à la demande de Mme C.... Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 23 Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État une somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative à verser à Mme C..., DÉCIDE : Article 1er : La requête de la ministre des armées est rejetée. Article 2 : Le jugement n° 11/00019 du 23 septembre 2014 du tribunal des pensions de Lyon est annulé en tant qu'il n'a pas fait droit à la demande d'intérêts moratoires de Mme C.... Article 3 : Mme C... est renvoyée devant la ministre des armées, afin qu'il soit procédé au versement des intérêts au taux légal sur les sommes qu'elle aurait dû percevoir, à compter du 28 juillet 2009, au fur et à mesure des échéances successives de la pension à laquelle il lui a été fait droit par le jugement du 23 septembre 2014. Article 4 : En application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative l'État versera la somme de 1 200 euros à Mme C.... Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la ministre des armées et à Mme B... C.... Délibéré après l'audience du 10 décembre 2020 à laquelle siégeaient : M. Josserand-Jaillet, président de chambre ; M. Seillet, président assesseur ; Mme Djebiri, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 janvier 2021. N° 20LY00696 2
Cours administrative d'appel
Lyon
CAA de MARSEILLE, 9ème chambre, 19/01/2021, 19MA01083, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme E... D... a demandé au tribunal administratif de Montpellier avant dire droit d'ordonner une expertise, d'annuler l'arrêté du 22 décembre 2016 par lequel le président du conseil départemental de l'Aude l'a mise à la retraite pour invalidité à compter du 16 juin 2016, ensemble la décision du 2 mai 2017 de rejet de son recours gracieux tendant au retrait de cette décision et d'enjoindre au département de l'Aude de reconstituer sa carrière et de réexaminer sa situation statutaire après l'expertise médicale ordonnée. Par jugement n° 1703459 du 26 décembre 2018, le tribunal administratif de Montpellier a, par l'article 1er du jugement, annulé cet arrêté du 22 décembre 2016 en tant seulement qu'il admet Mme D... à la retraite pour invalidité à une date antérieure à sa notification et, par son article 2, a rejeté le surplus des conclusions des parties. Procédure devant la Cour : Par une requête enregistrée le 5 mars 2019, Mme D..., représentée par Me A..., demande à la Cour : 1°) avant dire droit, d'ordonner une expertise afin notamment de déterminer si son état de santé lui permettait de poursuivre ses précédentes fonctions ou d'autres fonctions qu'elle aurait vocation à exercer ; 2°) à titre principal, d'annuler l'article 2 du jugement du 26 décembre 2018 du tribunal administratif de Montpellier, d'annuler dans sa totalité l'arrêté du 22 décembre 2016 du président du conseil départemental de l'Aude, ensemble sa décision du 2 mai 2017 et d'enjoindre au département de l'Aude de reconstituer sa carrière et de réétudier sa situation, après expertise médicale, pour qu'elle soit maintenue en activité sur un poste de reclassement, sous astreinte de 300 euros par jour de retard, à titre subsidiaire, de confirmer le jugement attaqué en tant qu'il a annulé partiellement l'arrêté du 22 décembre 2016 et d'enjoindre au département de l'Aude de reconstituer sa carrière, ses droits sociaux et sa pension de retraite ; 3°) de mettre à la charge du département de l'Aude la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les frais d'expertise. Elle soutient que : - la Cour ordonnera par avant dire droit, sur le fondement de l'article R. 621-1 du code de justice administrative, une expertise qui sera utile compte-tenu de son aptitude résiduelle et des contradictions entre les différents avis médicaux sur cette aptitude ; - la décision en litige du 22 décembre 2016 est insuffisamment motivée en méconnaissance des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration ; - la composition de la commission de réforme est irrégulière au regard des exigences de l'article 3 de l'arrêté du 4 août 2004 en l'absence de la présence physique d'un médecin spécialiste de son affection, ce qui l'a privée d'une garantie ; - il n'est pas établi que le secrétariat de la commission de réforme ait informé le médecin du service de prévention en application de l'article 15 de l'arrêté du 4 août 2004, ce qui l'a privée d'une garantie ; - l'administration a failli à son obligation de reclassement, dès lors qu'elle n'était pas inapte à l'exercice de toute fonction administrative ; - les premiers juges ont estimé à bon droit que l'arrêté litigieux était entaché d'une rétroactivité illégale. Par un mémoire en défense enregistré le 10 septembre 2019, le département de l'Aude, représenté par la SELARL d'avocats Jean-Pierre et Walgenwitz avocats et associés, conclut à l'annulation de l'article 1er du jugement, au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la requérante la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - le code général des collectivités territoriales ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 relative au reclassement des fonctionnaires territoriaux reconnus inaptes à l'exercice de leurs fonctions, notamment son article 1er ; - le décret n° 85-1054 du 30 septembre 1985 ; - le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ; - le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 ; - l'arrêté du 4 août 2004 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme C..., - et les conclusions de M. Roux, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. Mme D..., adjoint technique titulaire de 2ème classe du département de l'Aude exerçant des fonctions d'agent d'entretien, a été victime le 6 décembre 2012 d'un accident domestique qui lui a occasionné une luxation du coude droit. Ses périodes successives de congé de maladie et d'exercice de ses fonctions à mi-temps thérapeutique ont donné lieu à un avis du 16 décembre 2015 du comité médical départemental, confirmé par le comité médical supérieur le 11 mai 2016. Après avis de la commission de réforme réunie le 15 juin 2016, qui a estimé que Mme D... était définitivement inapte à l'exercice de toutes fonctions, le conseil départemental de l'Aude, par l'arrêté en litige du 22 décembre 2016, a admis la requérante à faire valoir ses droits à la retraite pour invalidité à compter du 16 juin 2016, date fixée par la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL) pour sa radiation des cadres pour invalidité. Par courrier du 1er mars 2017, Mme D... a formé auprès de l'administration un recours gracieux tendant au retrait de cet arrêté, lequel a été rejeté par décision du 2 mai 2017 du président du conseil départemental de l'Aude. Saisi par Mme D..., le tribunal administratif de Montpellier, par le jugement attaqué, a, par l'article 1er du jugement, annulé cet arrêté du 22 décembre 2016 en tant seulement qu'il admet Mme D... à la retraite pour invalidité à une date antérieure à sa notification et, par son article 2, rejeté le surplus des conclusions des parties. Mme D... relève appel de l'article 2 de ce jugement. Le département de l'Aude, par la voie de l'appel incident, relève appel de l'article 1er de ce jugement. Sur l'appel principal de Mme D... : 2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) - retirent ou abrogent une décision créatrice de droits (...) ". Aux termes de l'article L. 211-5 de ce code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. ". La décision qui, comme en l'espèce, constate l'inaptitude définitive et absolue d'un agent et indique qu'il sera mis à la retraite pour invalidité mettant ainsi fin avant son terme normal à sa carrière, est au nombre de celles qui doivent être motivées en application des dispositions précitées. 3. L'arrêté litigieux du 22 décembre 2016, qui admet l'intéressée à faire valoir ses droits à la retraite pour invalidité, vise les textes sur lesquels il se fonde ainsi que le procès-verbal de la commission de réforme en date du 15 juin 2016. Il est ainsi suffisamment motivé en droit, alors même qu'il ne vise ni l'article 29 du code des pensions civiles et militaires de retraite, ni les avis du comité médical départemental, ni l'avis du comité médical supérieur rendus dans le cadre de la procédure distincte du prolongement des congés de maladie de la requérante avant son admission à la retraite pour invalidité. Cet arrêté indique également que Mme D... a épuisé ses droits à congé de maladie et qu'elle est reconnue définitivement inapte à l'exercice de ses fonctions et fait ainsi état de sa situation particulière. Par suite, cet arrêté comporte aussi les considérations de fait sur lesquelles il se fonde et est donc suffisamment motivé, contrairement à ce que soutient la requérante. 4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 16 de l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière : " La commission de réforme doit être saisie de tous témoignages, rapports et constatations propres à éclairer son avis. Elle peut faire procéder à toutes mesures d'instructions, enquêtes et expertises qu'elle estime nécessaires. Dix jours au moins avant la réunion de la commission, le fonctionnaire est invité à prendre connaissance, personnellement ou par l'intermédiaire de son représentant, de son dossier, dont la partie médicale peut lui être communiquée, sur sa demande, ou par l'intermédiaire d'un médecin ; il peut présenter des observations écrites et fournir des certificats médicaux. La commission entend le fonctionnaire, qui peut se faire assister d'un médecin de son choix. Il peut aussi se faire assister par un conseiller ". En application des dispositions de l'article 3 du même arrêté, la commission de réforme comprend : " 1. Deux praticiens de médecine générale, auxquels est adjoint, s'il y a lieu, pour l'examen des cas relevant de sa compétence, un médecin spécialiste qui participe aux débats mais ne prend pas part aux votes (...) ". Il résulte de ces dispositions que, dans les cas où il est manifeste, au vu des éléments dont dispose la commission de réforme, que la présence d'un médecin spécialiste de la pathologie invoquée par un agent est nécessaire pour éclairer l'examen de son cas, l'absence d'un tel spécialiste doit être regardée comme privant l'intéressé d'une garantie et comme entachant la procédure devant la commission d'une irrégularité justifiant l'annulation de la décision attaquée. 5. Il est constant que la commission de réforme des agents de la fonction publique territoriale de l'Aude, réunie le 15 juin 2016 pour examiner l'admission de la requérante à la retraite pour invalidité, comprenait deux médecins généralistes mais pas de médecin spécialiste en rhumatologie, pathologie invoquée par la requérante. Toutefois, en se bornant à soutenir que seul le rapport médical établi le 30 juin 2015 par le docteur H. Sentenac-Mourou, médecin généraliste agréé saisi par la commission de réforme pour avis, aurait été soumis à l'avis de cette commission au motif qu'il est le seul à être visé dans le procès-verbal de cette séance, la requérante ne conteste pas utilement les affirmations du département selon lesquelles la commission de réforme disposait des six rapports médicaux successivement établis depuis septembre 2013 par différents médecins agréés sur l'état de santé de Mme D..., dont l'un établi le 21 juillet 2014 par un médecin rhumatologue. Dans ces conditions, il n'est pas manifeste que la présence d'un médecin spécialiste ait été nécessaire pour éclairer la commission de réforme sur le cas de Mme D.... Par suite, le moyen tiré de ce que l'absence d'un tel spécialiste aurait privé la requérante d'une garantie et aurait entaché la procédure suivie devant la commission d'une irrégularité doit être écarté. 6. En troisième lieu, aux termes de l'article 15 de l'arrêté du 4 août 2004 : " Le secrétariat de la commission informe le médecin du service de médecine professionnelle et préventive, pour la fonction publique territoriale, le médecin du travail, pour la fonction publique hospitalière, compétent à l'égard du service auquel appartient le fonctionnaire dont le cas est soumis à la commission. (...). Ces médecins peuvent obtenir, s'ils le demandent, communication du dossier de l'intéressé. Ils peuvent présenter des observations écrites ou assister à titre consultatif à la réunion de la commission. Ils remettent obligatoirement un rapport écrit dans les cas prévus au premier alinéa des articles 21 et 23 ci-dessous. ". 7. La requérante, en se bornant à soutenir qu'il n'est pas établi que le médecin de prévention aurait été informé du passage de Mme D... devant cette commission le 15 juin 2016, n'établit pas que ce médecin n'en aurait pas été informé, alors qu'il ressort d'une attestation du chef du service gestion administrative du département de l'Aude datée du 19 mars 2018 que ce médecin a été informé de l'examen, lors de cette séance de la commission de réforme, du dossier de mise à la retraite pour invalidité de Mme D..., qui n'apporte aucun élément de nature à prouver le contraire. Ce médecin de prévention pouvait ainsi obtenir communication de son dossier et présenter des observations ou assister à la réunion de cette commission. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision en litige aurait été prise au terme d'une procédure irrégulière pour ce motif doit être écarté. 8. En quatrième lieu, l'article 81 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale prévoit que les fonctionnaires territoriaux reconnus, par suite d'altération de leur état physique, inaptes à l'exercice de leurs fonctions peuvent être reclassés dans les emplois d'un autre cadre d'emploi ou corps s'ils ont été déclarés en mesure de remplir les fonctions correspondantes et que le reclassement est subordonné à la présentation d'une demande par l'intéressé. Aux termes de l'article 2 du décret du 30 septembre 1985 : " Lorsque l'état physique d'un fonctionnaire territorial, sans lui interdire d'exercer toute activité, ne lui permet pas d'exercer des fonctions correspondant aux emplois de son grade, l'autorité territoriale ou le président du centre national de la fonction publique territoriale ou le président du centre de gestion, après avis du comité médical, invite l'intéressé soit à présenter une demande de détachement dans un emploi d'un autre corps ou cadre d'emplois, soit à demander le bénéfice des modalités de reclassement prévues à l'article 82 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984. " . Aux termes de l'article 1er du décret du 30 septembre 1985: "Lorsque l'état physique d'un fonctionnaire territorial ne lui permet plus d'exercer normalement ses fonctions et que les nécessités du service ne permettent pas d'aménager ses conditions de travail, le fonctionnaire peut être affecté dans un autre emploi de son grade (...). ". Il résulte d'un principe général du droit, dont s'inspirent tant les dispositions du code du travail relatives à la situation des salariés qui, pour des raisons médicales, ne peuvent plus occuper leur emploi que les règles statutaires applicables dans ce cas aux fonctionnaires, que, lorsqu'il a été médicalement constaté qu'un salarié se trouve, de manière définitive, atteint d'une inaptitude physique à occuper son emploi, il incombe à l'employeur public, avant de pouvoir prononcer son placement d'office en retraite pour invalidité, de chercher à reclasser l'intéressé dans un autre emploi. La mise en oeuvre de ce principe implique que, sauf si l'agent manifeste expressément sa volonté non équivoque de ne pas reprendre une activité professionnelle, l'employeur propose à ce dernier un emploi compatible avec son état de santé et aussi équivalent que possible avec l'emploi précédemment occupé ou, à défaut d'un tel emploi, tout autre emploi si l'intéressé l'accepte. Ce n'est que lorsque ce reclassement est impossible, soit qu'il n'existe aucun emploi vacant pouvant être proposé à l'intéressé, soit que l'intéressé est déclaré inapte à l'exercice de toutes fonctions ou soit que l'intéressé refuse la proposition d'emploi qui lui est faite, qu'il appartient à l'employeur de prononcer, dans les conditions applicables à l'intéressé, sa mise à la retraite d'office pour invalidité. 9. Il ressort des pièces du dossier et notamment de la décision en litige du 2 mai 2017 de rejet du recours gracieux de Mme D... que le président du conseil départemental de l'Aude s'est fondé sur l'inaptitude définitive et absolue de Mme D... à l'exercice de ses fonctions d'agent d'entretien ainsi que " pour le reclassement d'agent administratif polyvalent ", en se fondant sur les trois avis concordants du comité médical dans sa séance du 16 septembre 2015, du comité médical supérieur du 11 mai 2016 et de la commission de réforme du 15 juin 2016, qui s'est prononcée pour ce motif en faveur de la retraite pour invalidité de la requérante. Si, pour contester la teneur de ces trois avis unanimes sur son inaptitude physique, la requérante soutient que le médecin du travail et de la prévention l'a estimée apte le 7 juillet 2016 dans le cadre de l'examen annuel de contrôle obligatoire, la seule mention sur la convocation à cette visite médicale " Présente au rdv. Apte " ne saurait contredire les trois avis circonstanciés mentionnés ci-dessus. En outre et contrairement à ce que soutient la requérante, ces trois avis se prononcent aussi sur son inaptitude générale et absolue à occuper toute fonction administrative, dès lors que le comité médical supérieur a envisagé, pour finalement l'écarter, son reclassement sur ce type de fonction en se prononçant contre son " reclassement d'agent administratif polyvalent ". Ces avis écartent ainsi nécessairement l'aptitude de la requérante à occuper tout emploi relevant notamment de la filière administrative ou de la filière technique en particulier ceux qui sont mentionnés à l'article 3 du décret n° 2006-1691 du 22 décembre 2006 portant statut particulier du cadre d'emploi des adjoints techniques territoriaux auquel appartient la requérante, ou par les dispositions du décret n° 2006-1690 du 22 décembre 2006 portant statut particulier du cadre d'emploi des adjoints administratifs territoriaux invoqué par la requérante. Dans ces conditions, dès lors que Mme D... est inapte physiquement de manière absolue et définitive à l'exercice de toutes fonctions, la requérante n'est pas fondée à soutenir que l'administration aurait failli à son obligation de la reclasser sur un poste adapté à son état de santé. 10. Il résulte de ce qui précède et sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise, que Mme D... n'est pas fondée à soutenir, par la voie de l'appel principal, que c'est à tort que par l'article 2 du jugement attaqué, les premiers juges ont rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 décembre 2016 par lequel le président du conseil départemental de l'Aude l'a mise à la retraite pour invalidité à compter du 16 juin 2016, ensemble la décision du 2 mai 2017 de rejet de son recours gracieux. Sur l'appel incident du département de l'Aude : 11. D'une part, aux termes de l'article 17 du décret du 30 juillet 1987 pris pour l'application de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif à l'organisation des comités médicaux, aux conditions d'aptitude physique et au régime des congés de maladie des fonctionnaires territoriaux : " Lorsque, à l'expiration de la première période de six mois consécutifs de congé de maladie, le fonctionnaire est inapte à reprendre son service, le comité médical est saisi pour avis de toute demande de prolongation de ce congé dans la limite des six mois restant à courir. Lorsque le fonctionnaire a obtenu pendant une période de douze mois consécutifs des congés de maladie d'une durée totale de douze mois, il ne peut, à l'expiration de sa dernière période de congé, reprendre son service sans l'avis favorable du comité médical. En cas d'avis défavorable, il est soit mis en disponibilité, soit reclassé dans un autre emploi, soit, s'il est reconnu définitivement inapte à l'exercice de tout emploi, admis à la retraite après avis de la commission de réforme. Le paiement du demi-traitement est maintenu, le cas échéant, jusqu'à la date de la décision de reprise de service, de reclassement, de mise en disponibilité ou d'admission à la retraite. Le fonctionnaire qui, à l'expiration de son congé de maladie, refuse sans motif valable lié à son état de santé le poste qui lui est assigné peut être licencié après avis de la commission administrative paritaire. ". Aux termes de l'article 37 de ce décret : " Le fonctionnaire ne pouvant, à l'expiration de la dernière période de congé de longue maladie ou de longue durée, reprendre son service est soit reclassé dans un autre emploi, en application du décret n° 85-1054 du 30 septembre 1985 susvisé, soit mis en disponibilité, soit admis à la retraite après avis de la commission de réforme prévue par le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales. / Pendant toute la durée de la procédure requérant soit l'avis du comité médical, soit l'avis de la commission de réforme, soit l'avis de ces deux instances, le paiement du demi-traitement est maintenu jusqu'à la date de la décision de reprise de service ou de réintégration, de reclassement, de mise en disponibilité ou d'admission à la retraite. ". 12. D'autre part, aux termes de l'article L. 29 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " Le fonctionnaire civil qui se trouve dans l'incapacité permanente de continuer ses fonctions en raison d'une invalidité ne résultant pas du service et qui n'a pu être reclassé dans un autre corps en application de l'article 63 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précitée peut être radié des cadres par anticipation soit sur sa demande, soit d'office ; dans ce dernier cas, la radiation des cadres est prononcée sans délai si l'inaptitude résulte d'une maladie ou d'une infirmité que son caractère définitif et stabilisé ne rend pas susceptible de traitement (...) ". Aux termes de l'article de l'article R. 36 du même code : " La mise en paiement de la pension de retraite ou de la solde de réforme peut être antérieure à la date de la décision de radiation des cadres lorsque cette décision doit nécessairement avoir un effet rétroactif en vue soit d'appliquer des dispositions statutaires obligeant à placer l'intéressé dans une position administrative régulière, soit de tenir compte de la survenance de la limite d'âge, soit de redresser une illégalité ". 13. Les décisions administratives ne peuvent légalement disposer que pour l'avenir. Par suite, en l'absence de disposition législative l'y autorisant, l'administration ne peut, même lorsqu'elle est saisie d'une demande de l'intéressé en ce sens, déroger à cette règle générale et conférer un effet rétroactif à une décision d'admission à la retraite, à moins qu'il ne soit nécessaire de prendre une mesure rétroactive pour tirer les conséquences de la survenance de la limite d'âge, pour placer l'agent dans une situation régulière ou pour remédier à une illégalité. 14. L'arrêté en litige, pris le 22 décembre 2016 et notifié à la requérante le 7 janvier 2017, place Mme D... en retraite pour invalidité à compter du 16 juin 2016. Il ressort des pièces du dossier que la commission de réforme s'est prononcée en faveur de la retraite pour invalidité de la requérante le 15 juin 2016. Par suite et en application des dispositions citées au point 12, l'administration était tenue de prendre une mesure rétroactive à la date du 16 juin 2016 pour placer Mme D... dans une situation régulière, dès lors qu'elle avait épuisé ses droits à congé de maladie ordinaire, qu'un congé de longue maladie lui a été refusé et qu'elle ne pouvait être placée en disponibilité d'office eu égard à son inaptitude absolue et définitive à toute fonction, conformément dispositions de l'article 17 du décret n° 87-602 du 30 juillet 1987. Dans ces conditions, le département de l'Aude est fondé à demander, par la voie de l'appel incident, l'annulation de l'article 1er du jugement attaqué annulant son arrêté du 22 décembre 2016 en tant seulement qu'il admet Mme D... à la retraite pour invalidité à une date antérieure à sa notification. Sur les frais liés au litige : 15. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge d'une partie une somme à verser à l'autre sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative D É C I D E : Article 1er : L'article 1er du jugement du tribunal administratif de Montpellier du 26 décembre 20158 est annulé. Article 2 : Le surplus de la demande de Mme D... et des conclusions de sa requête est rejeté. Article 3 : Les conclusions présentées par le département de l'Aude sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... D... et au département de l'Aude. Délibéré après l'audience du 6 janvier 2021, où siégeaient : - M. Chazan, président de chambre, - Mme B..., présidente assesseure, - Mme C..., première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 janvier 2021. 4 N° 1901083
Cours administrative d'appel
Marseille
CAA de VERSAILLES, 5ème chambre, 21/01/2021, 18VE00513, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme B... D... a demandé au tribunal administratif de Versailles de désigner un expert, au titre de l'article R. 621-1 du code de justice administrative avec mission de procéder à l'évaluation de son état de santé, d'annuler la décision du 25 septembre 2015 en ce qu'elle ne reconnaît pas l'imputabilité au service des congés pris antérieurement au 15 septembre 2014, de condamner l'Etat à lui verser une somme de 300 000 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter de sa demande préalable et de la capitalisation, d'enjoindre à l'Etat de saisir la commission de réforme pour ce qu'il soit statué sur son taux d'IPP et, le cas échant, sur la demande d'imputabilité concernant les congés antérieurs au 15 septembre 2014, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de le condamner aux entiers dépens. Par un jugement n° 1602196 du 11 décembre 2017, le tribunal administratif de Versailles a condamné l'Etat à verser à Mme D... la somme de 10 000 euros en réparation de ses préjudices, tous intérêts compris, et rejeté le surplus des conclusions de sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et des mémoires, enregistrés respectivement les 12 février 2018, 6 juillet 2020 et 5 novembre 2020, Mme D..., représentée par Me C..., avocat, demande à la cour : 1°) d'ordonner, avant-dire droit, la désignation d'un expert afin de procéder à l'évaluation de son état de santé ; 2°) à titre principal, d'annuler ce jugement en tant, d'une part, qu'il a limité à la somme de 10 000 euros la condamnation de l'Etat et, d'autre part, qu'il n'a pas annulé la décision du 25 septembre 2015 en ce qu'elle ne retient pas l'imputabilité au service des congés de maladie pris antérieurement au 15 septembre 2014 ; 3°) d'annuler cette décision ; 4°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 300 000 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter de sa demande préalable et de la capitalisation, cette évaluation étant provisoire jusqu'au dépôt du rapport de l'expert ou définitive en l'absence d'expertise ; 5°) de condamner l'Etat à reconnaître l'imputabilité au service de ses congés de maladie et de ses soins depuis le 26 novembre 2009, date de son accident ; 6°) à titre accessoire, d'enjoindre à l'Etat de lui verser les demi-traitements indument retenus pendant la période d'imputabilité et de reconstituer ses droits à pension au titre de cette période ; 7°) d'enjoindre à l'Etat de prendre une décision sur l'imputabilité de son accident, sinon de saisir la commission de réforme concernant son taux d'IPP et le cas échéant de statuer sur la demande d'imputabilité des congés antérieurs au 15 septembre 2014 ; 8°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les dépens. Elle soutient que : - le tribunal a commis une erreur de droit et dénaturé les pièces du dossier ; - la décision du 25 septembre 2015 a été prise au terme d'une procédure irrégulière la privant d'une garantie, dès lors que la commission de réforme, lors de sa réunion du 21 mai 2015, ne comprenait aucun médecin spécialiste, dont la présence était pourtant indispensable, compte tenu de son état de santé ; - elle est insuffisamment motivée ; - elle est entachée d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation, dès lors que l'accident dont elle a été victime le 26 novembre 2009 est imputable au service sans état antérieur et à l'origine de l'ensemble des congés de maladie qu'elle a dû prendre par la suite, y compris au cours de la période antérieure au 15 septembre 2014 ; - l'illégalité ainsi commise par l'administration constitue une faute de nature à engager sa responsabilité ; - l'administration a commis une deuxième faute, en raison de sa mauvaise volonté et de ses carences délibérées dans l'instruction de sa demande ; - elle a également commis une faute en lui imposant l'activité de rollers ; - les préjudices résultant de son accident du 26 novembre 2009 sont établis par les experts et les praticiens qui l'ont examinée ; ses préjudices avant consolidation représentent 74 160 euros pour le DFT, 5 000 euros pour les souffrances endurées, 5 000 euros pour le préjudice esthétique temporaire et 8 424 euros pour l'assistance par une tierce personne ; ses préjudices après consolidation représentent 20 581 euros pour le DFP, 4 116 euros pour le préjudice d'agrément, 10 000 euros pour l'assistance par une tierce personne, 5 000 euros au titre du préjudice esthétique, 5 000 euros pour le préjudice sexuel ; les dépenses de santé futures représentent entre 3 500 euros et 5 000 euros ; la perte de gains professionnels s'établit à 8 100 euros et les dépenses de santé et frais divers à 588,90 euros ; une nouvelle expertise est nécessaire afin de préciser l'étendue de ses préjudices. ---------------------------------------------------------------------------------------------------------- Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. A..., - les conclusions de M. Clot, rapporteur public, - et les observations de Me C..., pour Mme D.... Considérant ce qui suit : 1. Mme D..., née le 7 décembre 1960, adjointe administrative affectée au lycée Jean Rostand de Mantes-la-Jolie en qualité de secrétaire, a été victime d'une chute le 26 novembre 2009, alors qu'elle participait à une activité de roller en présence du chef de l'établissement, d'une collègue et d'un professeur d'éducation physique et sportive. Par un courrier du 25 septembre 2015, le recteur de l'académie de Versailles a reconnu l'imputabilité au service de cet accident et accordé à l'intéressée un congé de longue maladie pour la période du 15 septembre 2014 au 31 décembre 2015. Mme D... relève appel du jugement du tribunal administratif de Versailles du 11 décembre 2017 en tant, d'une part, qu'il a limité à la somme de 10 000 euros la réparation de ses préjudices et, d'autre part, qu'il n'a pas annulé la décision du 25 septembre 2015 en ce qu'elle ne retient pas l'imputabilité au service des congés de maladie pris antérieurement au 15 septembre 2014. Sur la régularité du jugement attaqué : 2. Si Mme D... soutient que le tribunal a commis une erreur de droit et dénaturé les pièces du dossier, ces moyens, qui se rattachent au bien-fondé du raisonnement qu'il a suivi, ne sont pas de nature à entacher le jugement attaqué d'irrégularité. Au fond : Sur la légalité de la décision du 25 septembre 2015 : 3. En premier lieu, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision attaquée par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal administratif. 4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, dans sa rédaction alors applicable : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions (...) Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident ; 3° A des congés de longue maladie d'une durée maximale de trois ans dans les cas où il est constaté que la maladie met l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, rend nécessaire un traitement et des soins prolongés et qu'elle présente un caractère invalidant et de gravité confirmée. Le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement pendant un an ; le traitement est réduit de moitié pendant les deux années qui suivent. L'intéressé conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. / Les dispositions du deuxième alinéa du 2° du présent article sont applicables au congé de longue maladie (...) ". Aux termes de l'article 13 du décret du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires, dans sa rédaction applicable : " La commission de réforme est consultée notamment sur : 1. L'application des dispositions du deuxième alinéa des 2° et 3° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée ; 2. L'imputabilité au service de l'affection entraînant l'application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 34 (4°) de la loi du 11 janvier susvisée ; (...) 5. La réalité des infirmités résultant d'un accident de service ou d'une maladie professionnelle, la preuve de leur imputabilité au service et le taux d'invalidité qu'elles entraînent, en vue de l'attribution de l'allocation temporaire d'invalidité instituée à l'article 65 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée (...) ". Aux termes de l'article 12 de ce décret : " Dans chaque département, il est institué une commission de réforme départementale compétente à l'égard des personnels mentionnés à l'article 15. Cette commission, placée sous la présidence du préfet ou de son représentant, qui dirige les délibérations mais ne participe pas aux votes, est composée comme suit : (...) 4. Les membres du comité médical prévu à l'article 6 du présent décret (...) ". Aux termes du deuxième alinéa de l'article 5 de ce décret, auquel renvoie sur ce point le deuxième alinéa de l'article 6 : " Ce comité comprend deux praticiens de médecine générale, auxquels est adjoint, pour l'examen des cas relevant de sa qualification, un spécialiste de l'affection pour laquelle est demandé le bénéfice du congé de longue maladie ou de longue durée prévu à l'article 34 (3e et 4e) de la loi du 11 janvier 1984 susvisée ". Enfin, aux termes de l'article 19 de ce décret : " La commission de réforme ne peut délibérer valablement que si la majorité absolue des membres en exercice assiste à la séance ; un praticien de médecine générale ou le spécialiste compétent pour l'affection considérée doit participer à la délibération. / Les avis sont émis à la majorité des membres présents. / Lorsqu'un médecin spécialiste participe à la délibération conjointement avec les deux praticiens de médecine générale, l'un de ces deux derniers s'abstient en cas de vote (...) ". Il résulte des dispositions précitées que la présence d'un médecin spécialiste dans la commission de réforme n'est requise que lorsque cette instance examine une demande de congé de longue maladie ou de longue durée, et non lorsqu'elle se prononce sur l'imputabilité au service d'un accident ou d'une maladie déclaré par un agent public. 5. Il ressort des pièces du dossier que seuls deux médecins généralistes étaient présents lors de la réunion de la commission de réforme du 21 mai 2015. Toutefois, la commission, qui était appelée à se prononcer sur l'imputabilité au service de l'accident susmentionné du 26 novembre 2009, était saisie, non pas d'une demande de congé de longue maladie ou de longue durée, mais d'une demande présentée sur le fondement du 2° de l'article 34 précité de la loi du 11 janvier 1984, ainsi que la requérante l'a rappelé dans un courrier du 23 novembre 2016 adressé au directeur académique des services de l'éducation nationale. Dans ces conditions, Mme D... n'est pas fondée à soutenir qu'en l'absence de médecin spécialisé dans les pathologies occasionnées par les faits survenus le 26 novembre 2009, la composition de la commission de réforme, lors de sa réunion du 21 mai 2015, était irrégulière. 6. Enfin, par la décision attaquée du 25 septembre 2015, le recteur de l'académie de Versailles, suivant l'avis de la commission de réforme du 21 mai 2015, a reconnu l'imputabilité au service de l'accident du 26 novembre 2009 et accordé à la requérante un congé de longue maladie à compter seulement du 15 septembre 2014 et jusqu'au 31 décembre 2015. A cet égard, il ne ressort pas des certificats médicaux ou des comptes rendus d'examens par imagerie médicale antérieurs au 15 septembre 2014 que les avis d'arrêts de travail établis avant cette date, en 2013 et 2014, par le médecin traitant de la requérante seraient en lien avec l'accident survenu le 26 novembre 2009, certains de ces avis se bornant par ailleurs à mentionner un accident du travail sans en préciser la nature et la date. De même, le rapport d'expertise du docteur Renevier, rhumatologue, établi le 5 mai 2015 à la demande de l'administration, ainsi que le rapport établi le 2 novembre 2015 par le docteur Levillain à la demande de la requérante, ne permettent d'établir un tel lien. En particulier, le rapport du 5 mai 2015 mentionne que " les circonstances de l'accident [du 26 novembre 2009] ne sont pas directement responsables des lésions dont souffre l'intéressée sur un plan anatomique et physiologique, par contre elles sont responsables des douleurs persistantes qui ensuite ont évolué dans le cas d'un syndrome anxio-dépressif ". Dans ces conditions, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la décision du 25 septembre 2015, en ce qu'elle ne retient pas l'imputabilité au service des congés de maladie pris antérieurement au 15 septembre 2014, serait entachée d'une erreur de droit ou d'une erreur d'appréciation. 7. Il résulte de ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le jugement attaqué a rejeté ses conclusions à fin d'annulation et d'injonction. Sur la responsabilité de l'administration : 8. Compte tenu des conditions posées à leur octroi et de leur mode de calcul, la rente viagère d'invalidité et l'allocation temporaire d'invalidité doivent être regardées comme ayant pour objet de réparer les pertes de revenus et l'incidence professionnelle résultant de l'incapacité physique causée par un accident de service ou une maladie professionnelle. Les dispositions qui instituent ces prestations, déterminent forfaitairement la réparation à laquelle les fonctionnaires concernés peuvent prétendre, au titre de ces chefs de préjudice, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions. Ces dispositions ne font en revanche obstacle ni à ce que le fonctionnaire qui subit, du fait de l'invalidité ou de la maladie, des préjudices patrimoniaux d'une autre nature ou des préjudices personnels, obtienne de la personne publique qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice, ni à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre la personne publique, dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette personne ou à l'état d'un ouvrage public dont l'entretien lui incombait. 9. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit aux points ci-dessus que la requérante n'est pas fondée à invoquer l'illégalité fautive de la décision du 25 septembre 2015, en ce qu'elle ne retient pas l'imputabilité au service des congés de maladie pris antérieurement au 15 septembre 2014. 10. En deuxième lieu, il ne résulte pas de l'instruction, et des éléments exposés ci-dessus, que l'administration aurait fait preuve de mauvaise volonté et de carences délibérées dans l'instruction de la demande de reconnaissance de l'imputabilité au service de l'accident dont la requérante a été victime. Elle n'est ainsi pas fondée à soutenir que l'administration aurait, sur ce point, commis une faute de nature à engager sa responsabilité. 11. En troisième lieu, il ne résulte pas davantage de l'instruction que Mme D... aurait été contrainte par l'administration, de manière fautive, à pratiquer l'activité sportive à l'origine de l'accident dont elle a été victime en 2009. 12. En quatrième lieu, si l'administration ne conteste pas que l'accident dont a été victime la requérante le 26 novembre 2009 s'est produit à l'occasion d'une activité sportive organisée par la direction de l'établissement, cette seule circonstance n'est pas de nature à établir que l'administration aurait commis une faute, notamment au regard de l'article 23 de la loi du 13 juillet 1983, aux termes duquel " des conditions d'hygiène et de sécurité de nature à préserver leur santé et leur intégrité physique sont assurées aux fonctionnaires durant leur travail ". 13. Enfin, Mme D... ayant été victime le 26 novembre 2009 d'un accident imputable au service, elle est en droit d'obtenir, ainsi qu'il a été dit au point 7, une indemnité réparant le cas échéant ses préjudices patrimoniaux autres que professionnels et ses préjudices personnels au titre de ses dommages subis à compter du 15 septembre 2014. Sur l'évaluation des préjudices : 14. Dans son rapport établi le 17 avril 2015 à la demande de l'administration, le docteur Renevier a considéré que " les circonstances de l'accident ne sont pas directement responsables des lésions dont souffre Mme D... ce jour sur le plan anatomique et physiologique ", mais sont, en revanche, " responsables des douleurs persistantes qui ont ensuite évolué dans le cas d'un syndrome anxio-dépressif ", en relevant à cet égard " des anomalies congénitales de son rachis " et " une nette discordance entre l'état de la patiente et l'examen clinique ce jour traduisant une exacerbation des douleurs ". Il a en outre fixé à 10 % le déficit fonctionnel permanent (DFP), au titre de " conséquences douloureuses en relation avec l'accident de service ". Dans son rapport établi le 2 novembre 2015 à la demande de la requérante, le docteur Levillain a quant à lui relevé un état antérieur, caractérisé par des discopathies en L4 L5 et L5S1, un spondylolisthésis, ainsi qu'une arthrose inter apophysaire postérieure, visibles sur les radiographies pratiquées le 1er décembre 2009, responsable d'un DFP de 5 % non imputable à l'accident. Il a en outre fixé, comme le docteur Renevier, à 10 % le déficit fonctionnel permanent (DFP), au titre des conséquences de l'accident. 15. Mme D... soutient qu'elle est en droit d'obtenir une indemnité au titre des souffrances endurées, qu'elle a par ailleurs subi un préjudice esthétique, un préjudice d'agrément, un préjudice sexuel, des troubles dans les conditions d'existence, qu'elle a besoin de l'assistance d'une tierce personne, et que ses dépenses de santé futures doivent être prises en charge. Toutefois, l'état du dossier ne permet pas à la cour d'apprécier la réalité et le quantum des préjudices allégués par la requérante. Dès lors, il y a lieu, avant de statuer, d'ordonner une expertise sur ce point. DÉCIDE : Article 1er : Les conclusions à fin d'annulation et d'injonction de la requête de Mme D... sont rejetées. Article 2 : Avant de statuer sur les conclusions indemnitaires de la requête de Mme D..., il sera procédé, par un expert désigné par le président de la cour, à une expertise médicale. Article 3 : L'expert aura pour mission de : 1°) se faire communiquer tous documents relatifs à l'état de santé de Mme D... depuis le 15 septembre 2014 ; convoquer et entendre les parties et tous sachants ; procéder à l'examen sur pièces du dossier médical de Mme D... ainsi qu'à son examen clinique ; 2°) déterminer la date de consolidation du dommage ainsi que les préjudices patrimoniaux (dépenses de santé, frais divers dont assistance par une tierce personne) et extra patrimoniaux (déficit fonctionnel temporaire, déficit fonctionnel permanent, préjudice esthétique, souffrances endurées, préjudice d'agrément, préjudice sexuel), en relation directe avec la ou les causes retenues comme étant à l'origine du dommage et pour chaque poste de préjudice, les préjudices temporaires avant consolidation et les préjudices permanents après consolidation. Article 4 : L'expertise sera réalisée au contradictoire de Mme B... D... et du ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports. Article 5 : L'expert accomplira sa mission dans les conditions prévues par les articles R. 621-2 à R. 621-14 du code de justice administrative, communiquera le rapport d'expertise aux parties et le déposera au greffe de la cour dans un délai de quatre mois suivant la prestation de serment. Article 6 : Les frais d'expertise sont réservés pour y être statué en fin d'instance. Article 7 : Tous droits et moyens des parties, sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt, sont réservés jusqu'en fin d'instance. N° 18VE00513 2
Cours administrative d'appel
Versailles
CAA de LYON, 3ème chambre, 28/01/2021, 18LY02667, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure M. D... F... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du centre hospitalier de Morestel du 15 janvier 2015 rejetant sa demande indemnitaire et de condamner le centre hospitalier de Morestel à lui verser 149 012 euros en réparation de divers préjudices subis en conséquence d'un accident du travail et des fautes commises à son égard par le centre hospitalier de Morestel. Par un jugement n° 1501439 du 7 juin 2018, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande. Procédure devant la cour Par une requête enregistrée le 16 juillet 2018, M. F..., représenté par Me Devers, avocat, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 7 juin 2018 ; 2°) de condamner le centre hospitalier de Morestel à lui verser 153 012 euros en réparation des préjudices subis en conséquence d'un accident du travail et des fautes commises à son égard par le centre hospitalier de Morestel ; 3°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Morestel la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - les premiers juges ont omis d'examiner la responsabilité pour faute du centre hospitalier ; - il a subi, le 12 mars 2013, une décompensation qui constitue un accident de service, dont le directeur du centre hospitalier était informé ; - le centre hospitalier de Morestel a en outre commis des fautes, eu égard à l'absence de suivi médical, à la situation de suractivité dans laquelle il a été placé, à l'absence de soutien de la direction face aux évènements de février et mars 2013 et à la gestion des congés et des jours de réduction de temps de travail par l'établissement ; - cet accident du travail et ces fautes l'ont contraint à solliciter son placement en disponibilité et lui ont causé un préjudice moral qui peut être évalué à 30 000 euros, un préjudice économique qui s'élève à 96 012 euros, une perte de droits à la retraite de 20 000 euros et une perte de vingt-et-un jours de congés annuels qui doit être indemnisée à hauteur de 7 000 euros. Par un mémoire en défense enregistré le 25 mars 2019, le centre hospitalier de Morestel, représenté par Me Brun (AARPI Alternatives Avocats), avocat, conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge de M. F... la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il expose que les moyens soulevés ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 19 novembre 2019, la clôture de l'instruction a été fixée au 18 décembre 2019. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ; - le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme B... E..., première conseillère, - les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public, - et les observations de Me Brun avocat, représentant le centre hospitalier de Morestel ; Considérant ce qui suit : 1. Par courrier du 14 novembre 2014, M. F..., praticien hospitalier au sein du centre hospitalier de Morestel depuis le 1er septembre 2003, a sollicité auprès du directeur de l'établissement la reconnaissance comme accident de service d'une décompensation psychique survenue le 12 mars 2013 et a sollicité l'indemnisation des préjudices causés par cet accident de service et différentes fautes imputables au centre hospitalier, à hauteur 149 012 euros. Sa demande ayant été rejetée par décision du 15 janvier 2015, M. F... a saisi le tribunal administratif de Grenoble d'une requête aux mêmes fins, laquelle a été rejetée par un jugement du 7 juin 2018. M. F... relève appel de ce jugement. Sur la régularité du jugement : 2. Il ressort des termes mêmes du jugement attaqué que les premiers juges ont écarté la responsabilité pour faute du centre hospitalier de Morestel, en estimant que M. F... n'apportait aucun commencement de preuve d'une faute dans l'organisation de l'établissement, ni davantage dans la gestion de ses congés, de sa charge de travail et de son suivi médical. Par suite, et contrairement à ce que soutient M. F..., le jugement attaqué n'est entaché d'aucune omission à statuer. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 3. Un accident survenu sur le lieu et dans le temps du service, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par un fonctionnaire de ses fonctions ou d'une activité qui en constitue le prolongement normal, présente, en l'absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant cet évènement du service, le caractère d'un accident de service. Il appartient dans tous les cas au juge administratif, saisi d'une décision de l'autorité administrative compétente refusant de reconnaître l'imputabilité au service d'un tel événement, de se prononcer au vu des circonstances de l'espèce. Constitue un accident de service, un évènement survenu à une date certaine, par le fait ou à l'occasion du service, dont il est résulté une lésion, quelle que soit la date d'apparition de celle-ci. 4. Les dispositions des articles L. 27 et L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite et 41 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière qui instituent, en faveur des fonctionnaires victimes d'accidents de service ou de maladies professionnelles, une rente viagère d'invalidité en cas de mise à la retraite et une allocation temporaire d'invalidité en cas de maintien en activité doivent être regardées comme ayant pour objet de réparer les pertes de revenus et l'incidence professionnelle résultant de l'incapacité physique causée par un accident de service ou une maladie professionnelle. Les dispositions instituant ces prestations déterminent forfaitairement la réparation à laquelle les fonctionnaires concernés peuvent prétendre, au titre de ces chefs de préjudice, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions. Ces dispositions ne font en revanche obstacle ni à ce que le fonctionnaire qui subit, du fait de l'invalidité ou de la maladie, des préjudices patrimoniaux d'une autre nature ou des préjudices personnels, obtienne de la personne publique qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice, ni à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre la personne publique, dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette personne ou à l'état d'un ouvrage public dont l'entretien lui incombait. 5. En premier lieu, M. F... soutient avoir subi, le 12 mars 2013, une décompensation psychique qui serait liée à une altercation avec un cadre de santé survenue lors d'une réunion le 14 février 2013, et, plus généralement, avec ses conditions de travail, et qui serait constitutive, selon lui, d'un accident de service. Toutefois, s'il est constant qu'il a été placé en congés de maladie pour " syndrome anxio-dépressif sévère dans un contexte de burn out professionnel " à compter de cette date, un tel syndrome ne constitue pas en lui-même un accident de service. M. F... n'établit aucunement la survenance d'un évènement susceptible, par sa violence et sa soudaineté, d'être qualifié d'accident à la date du 12 mars 2013. En particulier, l'attestation d'un collègue, datée du 24 mai 2013, qui témoigne de la grande nervosité de l'intéressé ce jour-là, ne fait aucunement mention de la survenance d'un évènement particulier à l'origine ou en conséquence de cette nervosité. En outre, si M. F... expose avoir été reçu, ce même jour, par le directeur du centre hospitalier, il ne démontre, ni même ne prétend que cet entretien se serait déroulé dans des conditions anormales, en se bornant à regretter l'absence de toute réponse utile du directeur à ses difficultés. Dans ces conditions, M. F... ne démontre pas que la décompensation psychique qu'il invoque aurait pour origine un accident survenu le 12 mars 2013. M. F... ayant lui-même indiqué dans ses écritures d'appel ne pas solliciter la qualification en accident de service du conflit survenu le 14 février 2013, aucune responsabilité du centre hospitalier de Morestel ne saurait être engagée en raison d'un accident de service. 6. En second lieu, M. F... invoque une faute imputable au centre hospitalier de Morestel résultant de la " conjonction de plusieurs évènements " dans un contexte de surmenage. Toutefois, il ne démontre nullement le caractère fautif de la réaction de la direction face au conflit survenu lors d'une réunion organisée le 14 février 2013 et qu'il avait lui-même qualifié, dans une " fiche de signalement d'un évènement indésirable ", de " gravité modérée " tenant à une situation réversible et aux conséquences temporaires. Il n'établit pas davantage avoir fait part, avant ce conflit, de difficultés personnelles à la direction de l'établissement, tenant notamment à sa charge de travail, laquelle, au demeurant, comporte, outre les tâches incombant normalement à un praticien hospitalier, essentiellement des missions auxquelles il a spontanément candidaté, voire qu'il a lui-même initiées. Il ne prétend pas que ces missions lui auraient été imposées, ni qu'il n'aurait pu s'en dégager. Par ailleurs, il ne prétend, ni ne démontre avoir été empêché de solliciter le bénéfice des congés auxquels il pouvait prétendre, ni que tels congés lui auraient été refusés. Ainsi, il ne résulte pas de l'instruction que le comportement de la direction de l'établissement face à ce conflit et au contexte de surmenage dénoncé par M. F... soit constitutif d'une faute imputable au centre hospitalier de Morestel. Dans ces conditions, les circonstances que le suivi médical que le centre hospitalier de Morestel doit organiser pour ses agents aurait été insuffisant et que M. F... n'aurait pas été régulièrement informé de ses droits à congés n'apparaissent pas directement à l'origine de la situation de surmenage et de la dépression qu'il invoque et sont ainsi dépourvus de lien avec les préjudices dont il se prévaut. En conséquence, M. F... n'est pas fondé à soutenir que la responsabilité du centre hospitalier de Morestel doit être engagée en raison d'une telle faute. 7. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité des conclusions indemnitaires en tant qu'elles excèdent le montant réclamé initialement, que M. F... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Sur les frais liés au litige : 8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du centre hospitalier de Morestel, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par M. F.... Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de ce dernier une somme de 800 euros à verser au centre hospitalier de Morestel en application de ces mêmes dispositions. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. F... est rejetée. Article 2 : M. F... versera au centre hospitalier de Morestel une somme de 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... F... et au centre hospitalier de Morestel. Délibéré après l'audience du 12 janvier 2021, où siégeaient : Mme C... A..., présidente, M. Gilles Fedi, président-assesseur, Mme B... E..., première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 janvier 2021. 2 N° 18LY02667
Cours administrative d'appel
Lyon