5960 resultados
Conseil d'État, 2ème chambre, 29/06/2023, 465924, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : M. B... A... a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler la décision du 13 avril 2017 par laquelle le ministre de la défense a rejeté sa demande de pension militaire d'invalidité et, à titre subsidiaire, d'ordonner une expertise médicale. Par un jugement n° 1903896 du 21 janvier 2020, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande. Par un arrêt n° 20NT00968 du 17 mai 2022, la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté l'appel formé par M. A... contre ce jugement. Par un pourvoi sommaire et deux mémoires complémentaires, enregistrés les 19 juillet 2022, 19 octobre 2022 et 10 mars 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler cet arrêt ; 2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Alexandre Trémolière, maître des requêtes en service extraordinaire, - les conclusions de M. Clément Malverti, rapporteur public, La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Krivine, Viaud, avocat de M. A... ; Considérant ce qui suit : Sur la régularité de l'arrêt attaqué : 1. Aux termes du dernier alinéa de l'article R. 741-2 du code de justice administrative : " La décision fait apparaître la date de l'audience et la date à laquelle elle a été prononcée ". La circonstance selon laquelle l'arrêt attaqué fait état de deux dates d'audience différentes est sans influence sur la régularité dudit arrêt dès lors que les pièces du dossier d'appel, en particulier l'avis d'audience, permettent d'établir la date exacte de celle-ci et que, par suite, l'erreur qui affecte l'une de ces dates est purement matérielle. Sur le bien fondé de l'arrêt attaqué : 2. Aux termes de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre dans sa rédaction applicable au litige : " Ouvrent droit à pension : 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; / 2° Les infirmités résultant de maladies contractées par le fait ou à l'occasion du service ; / 3° L'aggravation par le fait ou à l'occasion du service d'infirmités étrangères au service ; / 4° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'accidents éprouvés entre le début et la fin d'une mission opérationnelle, y compris les opérations d'expertise ou d'essai, ou d'entraînement ou en escale, sauf faute de la victime détachable du service ". L'article L. 3 du même code dispose : " Lorsqu'il n'est pas possible d'administrer ni la preuve que l'infirmité ou l'aggravation résulte d'une des causes prévues à l'article L. 2, ni la preuve contraire, la présomption d'imputabilité au service bénéficie à l'intéressé à condition : / 1° S'il s'agit de blessure, qu'elle ait été constatée avant le renvoi du militaire dans ses foyers ; / 2° S'il s'agit d'une maladie, qu'elle n'ait été constatée qu'après le quatre-vingt-dixième jour de service effectif et avant le soixantième jour suivant le retour du militaire dans ses foyers ; / 3° En tout état de cause, que soit établie, médicalement, la filiation entre la blessure ou la maladie ayant fait l'objet de la constatation et l'infirmité invoquée (...) ". 3. Il résulte des dispositions précitées au point 2 que le demandeur d'une pension, s'il ne peut prétendre au bénéfice de la présomption légale d'imputabilité au service, doit rapporter la preuve de l'existence d'un fait précis ou de circonstances particulières de service à l'origine de l'affection qu'il invoque. Cette preuve ne saurait résulter de la seule circonstance que l'infirmité soit apparue durant le service, ni d'une hypothèse médicale, ni d'une vraisemblance, ni d'une probabilité, aussi forte soit-elle. 4. En premier lieu, M. A... n'est pas fondé à soutenir que la cour administrative d'appel de Nantes a méconnu son office et entaché son arrêt de contradiction de motifs en jugeant que lorsque la présomption légale d'imputabilité au service ne trouve pas à s'appliquer, la preuve de cette imputabilité peut être apportée par tout moyen à l'exception de ceux énumérés au point 3. 5. En deuxième lieu, les principes exposés au point 3 n'interdisent pas aux juges du fond, faisant usage de leur pouvoir souverain d'appréciation, de puiser dans l'ensemble des renseignements contenus au dossier une force probante suffisante pour former leur conviction et décider en conséquence que la preuve de l'imputabilité au service doit, par dérogation à ces principes, être regardée comme établie. La cour administrative d'appel de Nantes, en ne recourant pas à cette possibilité, s'est livrée à une appréciation souveraine des faits qui ne saurait être discutée devant le juge de cassation. 6. En troisième lieu, il ressort des pièces de la procédure que M. A..., s'il a invité la cour administrative d'appel de Nantes à faire usage de ses pouvoirs d'instruction pour solliciter de l'administration, d'une part, le dossier médical présenté au moment de son intégration dans l'armée, d'autre part, ses états de service et, plus largement, tous éléments utiles de nature strictement médicale en sa possession susceptibles d'établir le lien qu'il allègue entre un fait précis de service et les infirmités invoquées, n'établit pas qu'il se trouverait dans l'impossibilité de fournir ces éléments. Par suite, il n'est pas fondé à soutenir que la cour aurait méconnu les règles relatives à la charge de la preuve en s'abstenant de solliciter ces éléments auprès de l'administration. 7. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 4 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre : " (...) Il est concédé une pension : / 1° Au titre des infirmités résultant de blessures, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse 10 % ; / 2° Au titre d'infirmités résultant de maladies associées à des infirmités résultant de blessures, si le degré total d'invalidité atteint ou dépasse 30 % ; / 3° Au titre d'infirmité résultant exclusivement de maladie, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse : / 30 % en cas d'infirmité unique ; / 40 % en cas d'infirmités multiples./ En cas d'aggravation par le fait ou à l'occasion du service d'une infirmité étrangère à celui-ci, cette aggravation seule est prise en considération, dans les conditions définies aux alinéas précédents./ Toutefois, si le pourcentage total de l'infirmité aggravée est égal ou supérieur à 60 %, la pension est établie sur ce pourcentage. ". Pour l'application de ces dispositions, une infirmité doit être regardée comme résultant d'une blessure lorsqu'elle trouve son origine dans une lésion soudaine, consécutive à un fait précis de service. En l'absence de tout fait précis de service ayant causé un traumatisme qui serait à l'origine de l'infirmité litigieuse, celle-ci doit être qualifiée de maladie. 8. Pour dénier à M. A... un droit à pension pour l'affection invoquée, la cour administrative d'appel de Nantes a relevé que M. A..., qui ne rentre dans aucun des cas de présomption d'imputabilité prévus à l'article L. 3 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, premièrement n'était pas, contrairement à ce qu'il soutient, sur un théâtre d'opération extérieure lors de l'accident survenu le 15 octobre 2001 et que les mentions de son livret militaire concernant cet accident, qui font état d'une dorsalgie aiguë, ne suffisent pas à établir un lien de causalité avec l'affection invoquée consistant en une lombalgie, deuxièmement que M. A..., s'il évoque à titre subsidiaire un accident survenu le 27 août 2001 lors d'une opération extérieure, n'établit ni la réalité de cette opération, ni la cause de l'arrêt de travail qui lui a été prescrit à l'époque, troisièmement que si l'évolution lente de la pathologie de M. A... rend difficile d'en fixer l'élément déclencheur, cette circonstance confirme seulement que son infirmité est susceptible d'être reconnue comme une maladie imputable au service et non comme un accident de service, quatrièmement que les expertises médicales confirment que M. A... souffrait dès 2002 d'une " discopathie débutante des deux derniers étages " et a souffert d'une lombalgie avec sciatalgies en juin 2009 et, enfin, que si certains médecins reconnaissent que M. A... présente un degré d'invalidité de 30 %, ils n'admettent, dans le meilleur des cas, le lien avec le service qu'à hauteur de 15 %, ce taux restant inférieur au seuil permettant l'octroi d'une pension militaire d'invalidité pour une maladie hors temps de guerre. La cour a ce faisant, sans commettre d'erreur de droit, porté sur les pièces du dossier une appréciation souveraine qui n'est pas entachée de dénaturation. 9. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué. 10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise, à ce titre, à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.D E C I D E : -------------- Article 1er : Le pourvoi de M. A... est rejeté. Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. B... A... et au ministre des armées.ECLI:FR:CECHS:2023:465924.20230629
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 8ème chambre, 30/06/2023, 467854, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : M. A... B... a demandé au tribunal des pensions militaires d'invalidité de la Somme d'annuler la décision du 29 novembre 2016 par laquelle le ministre de la défense a rejeté sa demande tendant à l'octroi d'une pension militaire d'invalidité et d'ordonner une expertise visant à déterminer le taux d'invalidité concernant, d'une part, sa blessure à la cheville, d'autre part, la maladie lombaire contractée dans l'exercice de ses fonctions. Par un jugement n° 1903510 du 8 juillet 2021, le tribunal administratif d'Amiens, auquel sa demande a été transmise, a rejeté celle-ci. Par un arrêt n° 21DA02149 du 26 juillet 2022, la cour administrative d'appel de Douai a annulé ce jugement en tant qu'il a rejeté la demande de M. B... tendant à l'annulation de la décision du 29 novembre 2016 du ministre de la défense rejetant sa demande de pension militaire d'invalidité au titre de l'instabilité de sa cheville droite, annulé cette décision dans cette mesure, enjoint au ministre des armées, dans un délai de trois mois à compter de la notification de son arrêt, de concéder à M. B... une pension militaire d'invalidité au taux de 15 % au titre de cette infirmité et rejeté le surplus des conclusions de l'appel formé par M. B... contre ce jugement. 1° Sous le n° 467854, par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un nouveau mémoire, enregistrés les 28 septembre 2022, 12 décembre 2022 et 26 mai 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre des armées demande au Conseil d'État : 1°) d'annuler les articles 1er à 3 de cet arrêt ; 2°) réglant l'affaire au fond dans cette mesure, de rejeter l'appel de M. B.... 2° Sous le n° 468899, par un pourvoi et un mémoire complémentaire, enregistrés les 14 novembre 2022 et 13 février 2023, M. B... demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler l'article 4 de cet arrêt ; 2°) réglant l'affaire au fond dans cette mesure, de faire droit à son appel ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros à verser à la SCP Bouzidi, Bouhanna, son avocat, au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. .................................................................................... Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des pensions militaire d'invalidité et des victimes de la guerre ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Jean-Marc Vié, maître des requêtes, - les conclusions de M. Romain Victor, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Bouzidi, Bouhanna, avocat de M. B... ; Considérant ce qui suit : 1. M. B..., militaire sous contrat dans l'armée de l'air depuis le 2 mars 1998, a demandé, le 2 avril 2013, la concession d'une pension militaire d'invalidité au titre d'une lombosciatalgie récidivante et de séquelles d'instabilité de la cheville droite. Par une décision du 29 novembre 2016, le ministre de la défense a rejeté cette demande aux motifs que le taux d'invalidité résultant de la lombosciatalgie, maladie contractée en temps de paix, n'atteignait pas le minimum requis de 30 % pour ouvrir des droits à pension et que celui résultant de l'instabilité de la cheville droite, acquise à la suite d'une blessure, n'atteignait pas le minimum requis de 10 %. Par un arrêt du 26 juillet 2022, la cour administrative d'appel de Douai, jugeant que l'infirmité relative à la cheville droite justifiait le bénéfice d'une pension calculée sur la base d'un taux d'invalidité de 15 %, a, dans ses articles 1er à 3, annulé le jugement du 8 juillet 2021 du tribunal administratif d'Amiens rejetant la demande de M. B... tendant à l'annulation de cette décision en tant qu'elle porte sur cette infirmité et a enjoint au ministre des armées de concéder à l'intéressé la pension correspondante, puis, dans son article 4, a rejeté le surplus des conclusions de l'appel de M. B.... Le ministre des armées se pourvoit en cassation contre les articles 1er à 3 de cet arrêt, tandis que M. B... se pourvoit en cassation contre son article 4. Il y a lieu de joindre ces pourvois pour statuer par une même décision. Sur le pourvoi du ministre des armées : 2. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'ainsi que l'a relevé la cour, l'expert médical diligenté pour l'instruction de la demande de pension de M. B..., après avoir fait état de la persistance, en dépit d'une ligamentoplastie réalisée en septembre 2012 et reprise en 2014, de douleurs de type mécanique au niveau de la malléole externe et d'une instabilité chronique de la cheville droite de M. B..., a, dans son rapport en date du 9 janvier 2016, estimé qu'un taux d'incapacité de 15 % devait être retenu à ce titre. Ainsi, c'est sans dénaturer les pièces du dossier que la cour a pu estimer, alors même que l'examen clinique ne mettait pas en évidence de déficit fonctionnel significatif en dehors des éléments précédents et que les avis du médecin chargé des pensions militaires d'invalidité de la sous-direction des pensions de la direction des ressources humaines du ministère de la Défense du 1er mars 2016 et de la commission consultative médicale du 8 novembre 2016 estimaient le taux d'invalidité correspondant inférieur au seuil de 10 %, que le taux d'invalidité résultant des blessures à la cheville survenues alors que l'intéressé était en service devait être fixé à hauteur de celui préconisé par le rapport d'expertise. 3. Il résulte de ce qui précède que le pourvoi du ministre des armées doit être rejeté. Sur le pourvoi de M. B... : 4. Aux termes de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, applicable à la date de la demande de pension : " Ouvrent droit à pension : / 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; 2° Les infirmités résultant de maladies contractées par le fait ou à l'occasion du service ; 3° L'aggravation par le fait ou à l'occasion du service d'infirmités étrangères au service (...)". Aux termes de l'article L. 4 du même code : " Les pensions sont établies d'après le degré d'invalidité. / Sont prises en considération les infirmités entraînant une invalidité égale ou supérieure à 10 %. / Il est concédé une pension : 1° Au titre des infirmités résultant de blessures, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse 10 % ; 2° Au titre d'infirmités résultant de maladies associées à des infirmités résultant de blessures, si le degré total d'invalidité atteint ou dépasse 30 % ; 3° Au titre d'infirmités résultant exclusivement de maladie, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse : 30 % en cas d'infirmité unique ; 40 % en cas d'infirmités multiples (...) ". Selon l'article L. 14 du même code : " Dans le cas d'infirmités multiples dont aucune n'entraîne l'invalidité absolue, le taux d'invalidité est considéré intégralement pour l'infirmité la plus grave et pour chacune des infirmités supplémentaires, proportionnellement à la validité restante. / A cet effet, les infirmités sont classées par ordre décroissant de taux d'invalidité. / Toutefois, quand l'infirmité principale est considérée comme entraînant une invalidité d'au moins 20 %, les degrés d'invalidité de chacune des infirmités supplémentaires sont élevés d'une, de deux ou de trois catégories, soit de 5, 10, 15 %, et ainsi de suite, suivant qu'elles occupent les deuxième, troisième, quatrième rangs dans la série décroissante de leur gravité (...) ". 5. Après avoir estimé qu'aucune des pièces médicales versées au dossier par M. B... ne permettait de remettre en cause l'appréciation du taux d'invalidité de 25 % préconisé par l'expert médical au titre de la lombosciatalgie récidivante dont il souffre, la cour en a déduit que ce taux n'atteignait pas le seuil de 30 % requis par l'article L. 4 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre et que M. B... n'était ainsi pas fondé à soutenir que l'administration lui avait refusé à tort la concession d'une pension militaire d'invalidité au titre de cette infirmité. En statuant ainsi, sans tirer les conséquences de ce qu'elle avait également jugé que l'intéressé souffrait, par ailleurs, du fait de blessures, d'une invalidité dont le taux devait être fixé à 15 %, si bien que, par application aux faits de l'espèce des règles précisées par l'article L. 14 du même code, le degré total d'invalidité de M. B... atteignait 40 % et dépassait ainsi le seuil fixé au 2° de l'article L. 4 du même code, la cour a commis une erreur de droit. 6. Il en résulte que M. B... est fondé à demander l'annulation de l'article 4 de l'arrêt qu'il attaque. Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37-2 de la loi du 10 juillet 1991 : 7. M. B... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle dans la présente instance. Ainsi, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relatives à l'aide juridique. Dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP Bouzidi, Bouhanna, avocat de M. B..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, il y a lieu de mettre à la charge de celui-ci la somme de 3 000 euros ;D E C I D E : -------------- Article 1er : Le pourvoi du ministre des armées est rejeté. Article 2 : L'article 4 de l'arrêt du 26 juillet 2022 de la cour administrative d'appel de Douai est annulé. Article 3 : L'affaire est, dans cette mesure, renvoyée à la cour administrative d'appel de Douai. Article 4 : L'Etat versera à la SCP Bouzidi, Bouhanna, avocat de M. B..., une somme de 3 000 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette société renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat. Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. A... B... et au ministre des armées. Délibéré à l'issue de la séance du 1er juin 2023 où siégeaient : M. Pierre Collin, président de chambre, présidant ; M. Hervé Cassagnabère, conseiller d'Etat et M. Jean-Marc Vié, maître des requêtes-rapporteur. Rendu le 30 juin 2023. Le président : Signé : M. Pierre Collin Le rapporteur : Signé : M. Jean-Marc Vié La secrétaire : Signé : Mme Michelle BailleulECLI:FR:CECHS:2023:467854.20230630
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 3ème chambre, 30/06/2023, 453834, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : M. C... D... a demandé au tribunal administratif de Limoges de condamner la communauté de communes du Pays d'Argenton-sur-Creuse à lui verser la somme de 40 000 euros, avec intérêts à compter du 4 mai 2016 et la somme de 20 000 euros, avec intérêts à compter du 2 août 2016. Par un jugement n°s1601132, 1601561 du 23 octobre 2018, le tribunal administratif de Limoges a condamné la communauté de communes du Pays d'Argenton-sur-Creuse à verser à M. D... la somme de 3 000 euros, avec intérêts à compter du 9 mai 2016 et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande. Par un arrêt n° 18BX04545 du 14 décembre 2020, la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté l'appel de M. D... et l'appel incident de la communauté de communes du Pays d'Argenton-sur-Creuse dirigés contre ce jugement. Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 22 juin et 23 septembre 2021, M. D... demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler cet arrêt ; 2°) de mettre à la charge de la communauté de communes du Pays d'Argenton-sur-Creuse la somme de 3 000 euros à verser à Me Thomas Haas, son avocat, au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Julien Autret, maître des requêtes, - les conclusions de Mme Marie-Gabrielle Merloz, rapporteure publique ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, à Maître Haas, avocat de M. C... D... et à Me Occhipinti, avocat de la communauté de communes du Pays d'Argenton-sur-Creuse ; Considérant ce qui suit : 1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. C... D..., adjoint technique principal, affecté au sein du service chargé de l'environnement de la communauté de communes du Pays d'Argenton-sur-Creuse en qualité de gardien de la déchetterie de Saint-Marcel, a été victime d'une chute, le 17 décembre 2015, alors qu'il manipulait une caissette dans le couloir de passage permettant le déplacement à l'intérieur du conteneur des déchets ménagers spéciaux, qui a provoqué une fracture de son pilon tibial droit et a été reconnue, le 28 décembre 2015, comme constitutive d'un accident imputable au service. Par un jugement du 23 octobre 2018, le tribunal administratif de Limoges a condamné la communauté de communes du Pays d'Argenton-sur-Creuse à verser à M. D... la somme de 3 000 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 9 mai 2016 et a rejeté le surplus de ses conclusions tendant à la condamnation de cette collectivité à lui verser la somme de 60 000 euros en réparation des préjudices qu'il alléguait. M. D... se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 14 décembre 2020 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté l'appel qu'il a formé contre ce jugement. 2. En premier lieu, la personne qui a demandé en première instance la réparation des conséquences dommageables d'un fait qu'elle impute à une administration est recevable à détailler ces conséquences devant le juge d'appel, en invoquant le cas échéant des chefs de préjudice dont elle n'avait pas fait état devant les premiers juges, dès lors que ces chefs de préjudice se rattachent au même fait générateur et que ses prétentions demeurent dans la limite du montant total de l'indemnité chiffrée en première instance, augmentée le cas échéant des éléments nouveaux apparus postérieurement au jugement, sous réserve des règles qui gouvernent la recevabilité des demandes fondées sur une cause juridique nouvelle. Cette personne n'est toutefois recevable à majorer ses prétentions en appel que si le dommage s'est aggravé ou s'est révélé dans toute son ampleur postérieurement au jugement qu'elle attaque. Il suit de là qu'il appartient au juge d'appel d'évaluer, à la date à laquelle il se prononce, les préjudices invoqués, qu'ils l'aient été dès la première instance ou pour la première fois en appel, et de les réparer dans la limite du montant total demandé devant les premiers juges. Il ne peut mettre à la charge du responsable une indemnité excédant ce montant que si le dommage s'est aggravé ou révélé dans toute son ampleur postérieurement au jugement attaqué. 3. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. D... demandait, en première instance comme dans ses premières écritures en appel, la condamnation de la communauté de communes du Pays d'Argenton-sur-Creuse à hauteur de 60 000 euros pour différents chefs de préjudice ayant tous pour fait générateur l'accident de service du 17 décembre 2015 et incluant le chef du préjudice patrimonial causé par les conséquences de cet accident sur le déroulement de sa carrière professionnelle. Dans le dernier état de ses écritures en appel, il a demandé la même condamnation de la collectivité, en y ajoutant une demande d'indemnisation pour une somme correspondant à l'allocation temporaire d'activité dont il soutient qu'il aurait dû bénéficier, compte tenu de la fixation de son taux d'invalidité à 15 % par le rapport médical du docteur A... B..., établi le 16 octobre 2019. 4. Il résulte de ce qui a été dit au point 2 ci-dessus, d'une part, que dès lors que ces dernières conclusions étaient présentées par M. D..., comme ses conclusions de première instance, sur le fondement de la responsabilité pour faute de la communauté de communes, et que le préjudice patrimonial qu'elles invoquaient se rattachait, comme ceux dont il s'était prévalu en première instance, au même fait générateur constitué par l'accident de service du 17 octobre 2015, il appartenait à la cour administrative d'appel, en tout état de cause, de se prononcer sur celles-ci, dans la limite du montant total de l'indemnité chiffrée en première instance. Il en résulte aussi, d'autre part, qu'il lui appartenait également d'apprécier, dans la mesure où l'intéressé soutenait que ces conclusions correspondaient à la révélation du préjudice dans toute son ampleur, conformément à la fixation de son taux d'invalidité à 15 % par le rapport médical du docteur A... B... établi le 16 octobre 2019, soit postérieurement à l'enregistrement de son appel, si ces conclusions justifiaient de mettre à la charge de la communauté de communes une indemnité excédant le montant total demandé en première instance. M. D... est donc fondé à soutenir qu'en rejetant ses conclusions comme irrecevables, au seul motif qu'elles étaient nouvelles en appel, la cour administrative d'appel a entaché son arrêt d'une erreur de droit. 5. En second lieu, il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que la cour administrative d'appel a relevé que le passage étroit du conteneur, dans lequel M. D... circulait au moment de l'accident de service, était dans un état dégradé, encombré par des sangles exposant notamment ses utilisateurs à de forts risques de chutes, pourvu d'un sol irrégulier et doté d'un éclairage insuffisant. Dans ces conditions, la circonstance que M. D... ait lui-même signalé à la communauté de communes l'état dégradé du conteneur et la présence de sangles ne saurait établir qu'il a fait preuve, en s'y déplaçant, d'un manque de prudence fautif. Par suite, la cour administrative d'appel a donné aux faits de l'espèce une qualification juridique erronée en retenant une telle faute de la part de M. D..., pour en déduire qu'elle justifiait une atténuation de la part de responsabilité de la communauté de communes du Pays d'Argenton-sur-Creuse dans l'accident de service survenu le 17 décembre 2015. 6. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'autre moyen du pourvoi, que M. D... est fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque. 7. M. D... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce et sous réserve que Me Thomas Haas, son avocat, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de la communauté de communes du Pays d'Argenton-sur-Creuse la somme de 3 000 euros à verser à M. D.... D E C I D E : -------------- Article 1er : L'arrêt du 14 décembre 2020 de la cour administrative d'appel de Bordeaux est annulé. Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Bordeaux. Article 3 : La communauté de communes du Pays d'Argenton-sur-Creuse versera à Me Thomas Haas, avocat de M. D..., la somme de 3 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. C... D... et à la communauté de communes du Pays d'Argenton-sur-Creuse. Délibéré à l'issue de la séance du 8 juin 2023 où siégeaient : M. Stéphane Verclytte, président de chambre, présidant ; M. Christian Fournier, conseiller d'Etat et M. Julien Autret, maître des requêtes-rapporteur. Rendu le 30 juin 2023. Le président : Signé : M. Stéphane Verclytte Le rapporteur : Signé : M. Julien Autret La secrétaire : Signé : Mme Elisabeth RavanneECLI:FR:CECHS:2023:453834.20230630
Conseil d'Etat
CAA de MARSEILLE, 7ème chambre, 23/06/2023, 22MA00142, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler la décision du 15 mai 2019 par laquelle la ministre des armées a rejeté son recours administratif préalable obligatoire formé le 8 janvier 2019 auprès de la commission des recours des militaires afin d'obtenir réparation de l'entier préjudice subi à la suite d'un incident survenu dans le cadre de ses fonctions à l'hôpital d'instruction des armées Sainte-Anne de Toulon. Par un jugement n° 1902778 du 9 novembre 2021, le tribunal administratif de Toulon a rejeté cette demande. Procédure devant la Cour : Par une requête, enregistrée le 13 janvier 2022, sous le n° 22MA00142, M. D..., représenté par Me Michel, demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 9 novembre 2021 ; 2°) d'annuler la décision du 15 mai 2019 ; 3°) d'enjoindre au ministre des armées, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours, à compter de l'arrêt à intervenir ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - le sens des conclusions du rapporteur public était incomplet ; - le tribunal n'a pas répondu à ses conclusions à fin d'annulation de la décision du 15 mai 2019 en ce qu'elle concerne le refus d'imputabilité au service des pathologies dont il est victime ; - le jugement attaqué est insuffisamment motivé faute de répondre à son moyen tiré de l'imputabilité au service de ses pathologies ; - la décision contestée est entachée d'une incompétence de son auteur dont la délégation de signature était imprécise ; - ses pathologies sont directement imputables au service ; - il a droit à la réparation de ses préjudices en application de la décision du Conseil d'Etat du 1er juillet 2005, n° 258208, Mme C..., au titre de la responsabilité sans faute ou pour faute de l'Etat ; - il a subi un préjudice moral découlant, à la fois, du comportement fautif de l'administration en lien avec la sanction déguisée prise à son encontre mais également des conséquences des maladies contractées lors de l'exercice de ses fonctions, un préjudice professionnel et matériel du fait que son salaire actuel étant bien inférieur à son traitement perçu dans l'armée et que l'exemption de gardes l'a privé de revenus ainsi qu'un préjudice sexuel ; - ce préjudice ouvre droit à réparation au titre de la responsabilité sans faute de l'Etat ; - l'interdiction de toute garde pour une durée de 4 à 6 mois constitue une sanction déguisée et engage la responsabilité de l'Etat pour faute. La requête a été communiquée au ministre des armées qui n'a pas produit de mémoire. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de la défense ; - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; - le décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Marchessaux, - les conclusions de M. Guillaumont, rapporteur public, - et les observations de Me Michel, représentant M. D.... Considérant ce qui suit : 1. M. D..., médecin-chef du service de santé des armées, exerçait une activité de chirurgie viscérale au sein de l'hôpital d'instruction des armées (HIA) Sainte-Anne à Toulon et bénéficiait depuis le 25 novembre 2012 d'une pension militaire d'invalidité au taux de 10 % au titre d'une infirmité antérieure imputable au service. Le 24 juin 2015, à l'issue d'une intervention chirurgicale menée à son terme en dépit d'un contexte difficile et d'une ambiance tendue au bloc opératoire, M. D... a ressenti une douleur brutale et très intense à la fesse gauche s'accompagnant d'une impotence fonctionnelle. A la suite d'examens réalisés à la fin de l'année 2015, le symptôme rattaché initialement à une sciatalgie, s'est révélé consécutif à une occlusion vasculaire aigüe de l'artère hypogastrique gauche nécessitant une première coronarographie-angioplastie réalisée le 25 février 2016 puis une seconde le 25 mars 2016 à la suite d'un diagnostic d'ischémie myocardique asymptomatique. Par ailleurs, le 31 juillet 2015, trois semaines après le retour du patricien hospitalier dans le service à l'issue d'un arrêt de travail, son chef de service lui a imposé une exemption de ses gardes de nuit et de week-end. A la suite de sa demande du 4 février 2016, M. D... a été rayé des cadres à compter du 1er septembre 2016 dans la perspective d'une reconversion professionnelle. Le 22 avril 2016, le requérant a demandé que le syndrome dépressif réactionnel et les séquelles de l'atteinte poly-vasculaire dont il souffre soient pris en compte au titre de la révision de sa pension militaire d'invalidité. Le 2 février 2018, la commission consultative médicale du ministère des armées n'a pas reconnu l'imputabilité au service de ces deux pathologies et par une décision du 1er juin 2018, la ministre des armées a rejeté la demande de révision de la pension militaire d'invalidité. Par une demande préalable non chiffrée du 5 juin 2018, M. D... a alors sollicité auprès de cette même autorité la réparation de l'entier préjudice subi à la suite de l'accident survenu le 24 juin 2015 dans le cadre de ses fonctions à l'hôpital d'instruction des armées Sainte-Anne. Par une décision du 19 décembre 2018, cette demande a été rejetée. Le recours administratif préalable obligatoire de M. D... enregistré le 8 janvier 2019 auprès de la commission des recours des militaires a également été rejeté par une décision de la ministre des armées du 15 mai 2019. M. D... relève appel du jugement du 9 novembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision du 15 mai 2019. Sur la régularité du jugement attaqué : 2. L'article R. 711-3 du code de justice administrative dispose que " Si le jugement de l'affaire doit intervenir après le prononcé de conclusions du rapporteur public, les parties ou leurs mandataires sont mis en mesure de connaître, avant la tenue de l'audience, le sens de ces conclusions sur l'affaire qui les concerne ". 3. La communication aux parties du sens des conclusions, prévue par les dispositions de la partie réglementaire du code de justice administrative, a pour objet de mettre les parties en mesure d'apprécier l'opportunité d'assister à l'audience publique, de préparer, le cas échéant, les observations orales qu'elles peuvent y présenter, après les conclusions du rapporteur public, à l'appui de leur argumentation écrite et d'envisager, si elles l'estiment utile, la production, après la séance publique, d'une note en délibéré. En conséquence les parties ou leurs mandataires doivent être mises en mesure de connaître, dans un délai raisonnable avant l'audience, l'ensemble des éléments du dispositif de la décision que le rapporteur public compte proposer à la formation de jugement d'adopter, à l'exception de la réponse aux conclusions qui revêtent un caractère accessoire, notamment celles qui sont relatives à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Cette exigence s'impose à peine d'irrégularité de la décision rendue sur les conclusions du rapporteur public. Par ailleurs, pour l'application de ces dispositions et eu égard à leurs objectifs, il appartient au rapporteur public de préciser, en fonction de l'appréciation qu'il porte sur les caractéristiques de chaque dossier, les raisons qui déterminent la solution qu'appelle, selon lui, le litige, et notamment d'indiquer, lorsqu'il propose le rejet de la requête, s'il se fonde sur un motif de recevabilité ou sur une raison de fond, et de mentionner, lorsqu'il conclut à l'annulation d'une décision, les moyens qu'il propose d'accueillir. La communication de ces informations n'est toutefois pas prescrite à peine d'irrégularité de la décision. 4. Il ressort des pièces de la procédure devant le tribunal administratif que le sens des conclusions du rapporteur public sur l'affaire en litige a été mis en ligne le 16 octobre 2021 à 9 h 15 en vue d'une audience du 19 octobre 2021 à 9 h 15. Il comportait les mentions " Sens synthétique des conclusions : rejet au fond " et " Sens des conclusions et moyens retenus : Rejet au fond de la requête ". Le rapporteur public a ainsi indiqué aux parties le sens de ses conclusions. Il n'était pas tenu, à peine d'irrégularité du jugement rendu par le tribunal administratif, d'indiquer les motifs qui le conduisaient à proposer le rejet de requête. Il s'ensuit que M. D... n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué aurait été rendu au terme d'une procédure irrégulière. 5. Il ressort du point 14 du jugement attaqué que les premiers juges ont estimé que M. D... n'était pas fondé à demander l'annulation de la décision du 15 mai 2019 par laquelle la ministre des armées a rejeté son recours administratif préalable obligatoire. Ainsi, ils n'ont pas omis de se prononcer sur les conclusions aux fins d'annulation de cette décision. 6. Le tribunal a répondu au moyen tiré de l'imputabilité au service des pathologies de M. D... en estimant, au point 10 du jugement contesté qu'il résultait de l'instruction que la demande de révision de la pension militaire d'invalidité de M. D... présentée le 22 avril 2016 au titre du syndrome dépressif réactionnel et des séquelles de l'atteinte poly-vasculaire a été rejetée par une décision de la ministre des armées du 1er juin 2018 au motif que ces deux infirmités n'étaient pas imputables au service. Bien que cette décision ait été contestée devant le tribunal des pensions militaires d'invalidité de Marseille, à la date du présent jugement, elle n'en revêt pas moins un caractère exécutoire. Par suite, le jugement attaqué n'est pas entaché d'un défaut de réponse à ce moyen ni n'est insuffisamment motivé. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 7. M. D... reprend en appel le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision contestée et de l'imprécision de la délégation de signature. Toutefois, il y a lieu d'écarter ce moyen, qui ne comporte aucun développement nouveau, par adoption des motifs retenus à juste titre par les premiers juges aux points 2 à 4 du jugement attaqué. 8. Par la décision contestée, la ministre des armées a rejeté la demande de M. D... tendant à ce que soit reconnu l'imputabilité au service de l'occlusion vasculaire aigüe de l'artère hypogastrique gauche survenue le 24 juin 2015 et des troubles psychologiques qui en ont résulté pour le requérant. En ce qui concerne l'occlusion vasculaire aigüe : 9. Il ressort des pièces du dossier que le 24 juin 2015, M. D... a pratiqué une intervention chirurgicale lourde au bloc opératoire de l'HIA Saint-Anne de Toulon, dans une atmosphère tendue en raison d'une altercation qui a éclaté entre lui et une infirmière. Au cours de cette intervention, le requérant a présenté une vive douleur à la fesse gauche qui s'est révélée être secondaire à une occlusion vasculaire aigüe de l'artère hypogastrique gauche pour laquelle, il a été placé en arrêt maladie du 25 juin 2015 au 11 juillet 2015. Puis le 25 février 2016, il a subi une intervention chirurgicale afin de traiter l'occlusion vasculaire dont il souffrait. Toutefois, le compte rendu de l'angioplastie hypogastrique gauche du 25 février 2016 a constaté une " lésion sub-occlusive " de l'artère iliaque interne et une deuxième lésion tronculaire de l'ordre de 70 %, qui ont nécessité la mise en place de 4 stents iliaques et de 5 stents coronariens. Ce traitement endovasculaire a permis de traiter une pathologie polyvasculaire évolutive antérieure à l'accident du 24 juin 2015. Si l'expertise médicale du 20 septembre 2017 réalisée par le docteur E..., cardiologue, à la demande du ministère des armées conclut à un surmenage et un stress professionnel très important s'accompagnant d'élévation tensionnelle que l'on peut rendre responsable en grande partie du développement de cette atteinte vasculaire coronarienne et artérielle, elle ne se prononce pas sur l'existence d'une pathologie antérieure. En outre, la commission consultative médicale a rendu, le 2 février 2018, un avis en désaccord avec cette expertise qui retient le stress comme facteur essentiel à l'origine de la pathologie en estimant que l'on retrouve au dossier un antécédent de tabagisme et d'une hypertension artérielle (HTA). A la suite de cet avis, le procès-verbal de la commission de réforme des pensions militaires d'invalidité du 30 mai 2018 conclut que la poly-arthériopathie avec atteinte des coronaires, des artères iliaques et carotidiennes n'est pas imputable au service par défaut de preuve de présomption. Dans ces conditions, et alors qu'aucune des pièces versées au dossier ne permet d'établir un lien de causalité direct, la ministre des armées n'a pas commis une erreur d'appréciation en refusant de reconnaître l'imputabilité au service de l'occlusion vasculaire aigüe dont a été victime M. D... le 24 juin 2015. En ce qui concerne les troubles psychologiques : 10. Il ressort du rapport du 1er septembre 2017 du docteur B..., expert psychiatre, sollicité par le SGA du ministre des armées dans le cadre d'une demande de révision de pension de M. D... que ce dernier a été très affecté par le fait d'avoir été écarté de toutes gardes. Il a sollicité à plusieurs reprises la hiérarchie de l'hôpital pour sortir de cette situation et s'est finalement tourné vers la cellule Themis du ministère de la défense, démarche qui a provoqué une enquête de commandement, laquelle a conclu qu'il devait retrouver dans la forme l'ensemble de ses attributions techniques au sein de son service. La reprise de travail s'est faite dans un contexte difficile marqué par des tensions avec son chef de service ce qui l'a amené à envisager une reconversion professionnelle et quitter le service de santé des armées définitivement en septembre 2016. L'expertise mentionne " une souffrance morale importante " nécessitant un traitement antidépresseur et un suivi psychiatrique hebdomadaire sans discontinuité. La reprise entière de ses activités n'a pas suffi à apaiser son sentiment d'injustice exprimé à l'égard de son ancien chef de service et la souffrance encore aujourd'hui présente autour de ces évènements. Cette expertise relève également que M. D... a fait une grave tentative de suicide survenue en 2002 alors qu'il effectuait sa formation chirurgicale, dans un contexte de fatigue physique importante. L'expert retient un " syndrome anxio-dépressif persistant en relation avec le vécu d'une situation personnelle conflictuelle. Son expression est aussi aujourd'hui étroitement mêlée aux problèmes somatiques sévères auxquels il est confronté, dont l'origine ne peut être rattachée exclusivement aux conséquences du conflit rapporté. La coïncidence entre la révélation symptomatique de l'occlusion de l'artère gastrique au travers de douleurs fessières et le conflit professionnel est purement conjoncturelle. Il ne peut y avoir de lien de causalité médicales entre ces deux aspects " et que " la persistance de troubles (...) doit être mis en perspective avec le passage à l'acte de 2002 qui témoigne d'une fragilité particulière du fonctionnement de sa personnalité. ". Par ailleurs, il ressort d'une note du SGA du 26 février 2019, que M. D... a déclaré être " dans une situation d'épuisement physique depuis plusieurs semaines ". Si le procès-verbal de la commission de réforme des pensions militaires d'invalidité du 30 mai 2018 comporte une remarque manuscrite précisant que : " s'il est difficile de reconnaître comme certain, direct et déterminant les séquelles liées au trouble vasculaire, il me paraît acceptable de reconnaître une part imputable au service sur les troubles psychologiques existant actuellement ", elle a néanmoins conclu à l'absence d'imputabilité au service des troubles psychologiques subis par M. D... par défaut de preuve et de présomption. Le requérant n'est ainsi pas fondé à soutenir que ses troubles psychologiques seraient en lien avec le service. En ce qui concerne la décision d'exemption de gardes médicales : 11. M. D... s'est vu notifié le 12 juillet 2015 par son chef de service, le jour de son retour de congés maladie, son retrait temporaire de la liste des gardes de chirurgie, la nuit et le week-end, pour une durée de 4 à 6 mois. Cette interdiction ne portait pas sur les autres activités d'urgence réalisée dans la journée. Par une lettre adressée au médecin chef de l'HIA Sainte-Anne, le chef de service a précisé que cette exemption n'avait rien à voir avec une sanction et qu'elle visait véritablement à protéger l'intéressé autant que les patients qu'il serait amené à opérer et qu'en attendant, il pouvait consulter et opérer en situation réglée et prendre en charge des urgences chirurgicales pendant les heures ouvrables. Le rapport d'enquête diligentée par le ministère des armées estime que cette décision semble avoir été raisonnable d'autant qu'elle était qualifiée de temporaire, au vu des antécédents personnels de M. D.... Ainsi, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette exemption de garde constituerait une sanction déguisée mais a été prise dans l'intérêt du service et motivée par le souci de protéger la santé de M. D... qui était dans un état d'épuisement professionnel, comme l'a indiqué le certificat médical du 9 novembre 2016. La circonstance que le rapport d'enquête recommande que la décision contestée soit prise collégialement est sans incidence sur sa légalité. En ce qui concerne la responsabilité de l'Etat : 12. Compte tenu de ce qui a été dit aux points 9 à 11, en l'absence d'imputabilité au service des pathologies dont M. D... a été victime et de caractère fautif de la décision d'exemption de gardes médicales, l'appelant n'est pas fondé à rechercher la responsabilité de l'Etat ni à se prévaloir de préjudices moral, financier et sexuel. 13. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 15 mai 2019 de la ministre des armées. Sur les conclusions à fin d'injonction : 14. Le présent arrêt qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. D... n'implique aucune mesure d'exécution. Il y a lieu, par suite, de rejeter les conclusions à fin d'injonction de M. D.... Sur les frais liés au litige : 15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par M. D... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. D É C I D E : Article 1er : La requête de M. D... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D... et au ministre des armées. Délibéré après l'audience du 7 juin 2023, où siégeaient : - Mme Chenal-Peter, présidente de chambre, - M. Prieto, premier conseiller, - Mme Marchessaux, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 23 juin 2023. 2 N° 22MA00142 fa
Cours administrative d'appel
Marseille
CAA de VERSAILLES, 6ème chambre, 20/06/2023, 21VE02408, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Versailles de condamner la commune de Grigny à lui verser les sommes respectives de 150 000 et 200 000 euros en réparation des préjudices d'ordre moral et matériel imputables aux fautes commises à son encontre par les services communaux. Par un jugement n° 1905703 du 14 juin 2021, le tribunal administratif de Versailles a condamné la commune de Grigny à verser à Mme A... la somme de 1 500 euros et a rejeté le surplus de ses demandes. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 16 août 2021, Mme A..., représentée par Me de Folleville, avocate, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il a partiellement rejeté sa demande ; 2°) de condamner la commune de Grigny à lui verser les sommes respectives de 150 000 et 200 000 euros en réparation des préjudices d'ordre moral et matériel imputables aux fautes commises à son encontre par les services communaux ; 3°) de mettre à la charge de la commune de Grigny le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Mme A... soutient que : - la commune de Grigny a méconnu son obligation de sécurité à son égard ; - elle a subi des agressions de la part de son supérieur hiérarchique ; - elle a été victime de harcèlement moral ; - elle a en tout état de cause droit d'être indemnisée des préjudices nés de sa maladie professionnelle relatifs à ses frais médicaux, au non versement de primes, à des troubles dans les conditions d'existence et à un préjudice moral ; - la commune a commis une faute en ne lui fournissant pas de feuilles de soins. Par un mémoire en défense, enregistré le 15 mars 2023, la commune de Grigny, représentée par Me Carrère, avocate, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de Mme A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés. La requête a été communiquée à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Essonne pour laquelle il n'a pas été produit de mémoire. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - le décret n°87-602 du 30 juillet 1987 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Villette, - les conclusions de Mme Moulin-Zys, rapporteure publique, - et les observations de Me de Folleville, pour Mme A... et de Me Langlet, pour la commune de Grigny. Considérant ce qui suit : 1. Mme A..., adjointe administrative de deuxième classe, a été recrutée en 1993 par la commune de Grigny. Elle a été affectée à un poste d'agent d'accueil au sein du centre culturel de la commune. Elle a déclaré au mois de juillet 2012 une dépression en réaction à la dégradation de ses conditions de travail et a été placée en congé pour maladie à compter du 20 juillet 2012. Par un arrêté du 15 octobre 2012, Mme A... a été placée en congé pour accident de service à compter du 20 juillet 2012. Ce congé imputable au service a été renouvelé, de façon continue, jusqu'au 10 juillet 2020, date à laquelle Mme A... a été licenciée pour inaptitude physique. Le 19 mars 2019, elle a saisi la commune de Grigny d'une demande indemnitaire portant sur l'absence de versement d'éléments de rémunération et sur l'indemnisation qu'elle estime avoir subis à raison de diverses fautes commises par la commune, ainsi que du fait de son invalidité imputable au service. Mme A... relève appel du jugement du 14 juin 2021 par lequel le tribunal administratif de Versailles a limité à 1 500 euros la condamnation prononcée à l'encontre de la commune de Grigny à son profit. Sur la rémunération de Mme A... : 2. Mme A... demande le versement de primes, fondées sur deux délibérations du conseil municipal de la commune de Grigny en date des 8 juillet 1985 et 19 novembre 1991, qui ne lui auraient pas été versées depuis son placement en congé. 3. D'une part, Mme A... n'est pas fondée à se prévaloir des dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983, entré en vigueur postérieurement à la déclaration de son invalidité imputable au service et au dernier renouvellement de son congé maladie. 4. D'autre part, aux termes de l'article 20 de la loi du 13 juillet 1983 alors en vigueur : " Les fonctionnaires ont droit, après service fait, à une rémunération comprenant le traitement, l'indemnité de résidence, le supplément familial de traitement ainsi que les indemnités instituées par un texte législatif ou réglementaire. S'y ajoutent les prestations familiales obligatoires (...) ". Aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 alors en vigueur : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. Le bénéfice de ces dispositions est subordonné à la transmission par le fonctionnaire, à son administration, de l'avis d'arrêt de travail justifiant du bien-fondé du congé de maladie, dans un délai et selon les sanctions prévues en application de l'article 58. / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident, même après la date de radiation des cadres pour mise à la retraite. " ; 5. Il résulte de ce qui précède que, sous réserve de dispositions expresses en sens contraire des délibérations qui les instituent, le droit à rémunération des fonctionnaires territoriaux en congé de maladie ne comprend pas les indemnités accessoires attachées à l'exercice des fonctions ou qui ont le caractère de remboursement de frais. En l'espèce, la prime annuelle prévue par la délibération du 8 juillet 1985 est versée aux agents au prorata des heures effectuées. L'indemnité prévue par la délibération du 19 novembre 1991 vise à compenser les conditions difficiles de travail des agents de la commune face à une population socialement défavorisée. Par suite, ces indemnités doivent être regardées comme liées à l'exercice effectif des fonctions des agents. Aucune disposition de ces délibérations ne prévoit leur maintien en cas de placement en congé de maladie. Dès lors, Mme A... n'est pas fondée à en demander le versement pour la période comprise entre son placement en congé et son licenciement. Sur les conclusions indemnitaires de Mme A... : 6. Les dispositions des articles L. 27 et L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite et L. 417-8 du code des commune qui instituent, en faveur des fonctionnaires territoriaux victimes d'accidents de service ou de maladies professionnelles, une rente viagère d'invalidité en cas de mise à la retraite et une allocation temporaire d'invalidité en cas de maintien en activité doivent être regardées comme ayant pour objet de réparer les pertes de revenus et l'incidence professionnelle résultant de l'incapacité physique causée par un accident de service ou une maladie professionnelle. Ces dispositions déterminent forfaitairement la réparation à laquelle les fonctionnaires concernés peuvent prétendre, au titre de ces chefs de préjudice, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions. Elles ne font en revanche obstacle ni à ce que le fonctionnaire qui subit, du fait de l'invalidité ou de la maladie, des préjudices patrimoniaux d'une autre nature ou des préjudices personnels, obtienne de la collectivité qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice, ni à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre cette personne publique, dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette personne ou à l'état d'un ouvrage public dont l'entretien lui incombait. En ce qui concerne l'existence d'une faute : 7. En premier lieu, aux termes de l'article 23 de la loi du 13 juillet 1983 alors en vigueur : " Des conditions d'hygiène et de sécurité de nature à préserver leur santé et leur intégrité physique sont assurées aux fonctionnaires durant leur travail. ". 8. Mme A... produit un courrier du 2 décembre 2010 dans lequel elle faisait état du dysfonctionnement des outils informatiques et téléphoniques mis à sa disposition, d'une vitre cassée et de fauteuils cassés dans son bureau au centre culturel Sydney Bechet. Néanmoins, il résulte de l'instruction que des travaux et des interventions ont été réalisés en janvier 2011 pour y remédier. Elle produit également le compte rendu d'une visite du médecin du travail réalisée dans ce centre culturel le 3 juillet 2012 faisant état d'un travail isolé, d'un défaut de vérification périodique des systèmes incendie et électrique, d'odeurs nauséabondes, du manque de formation à la santé au travail des agents, de problèmes d'humidité, d'un mauvais stockage des archives et de produits périmés dans la trousse à pharmacie. Néanmoins, à la suite de cette visite, des travaux ont été réalisés dans les bureaux et la cuisine du centre culturel en vue d'y reprendre les peintures et les sanitaires et que la commune a contesté l'absence de réalisation des vérifications précitées et invité les agents à faire remonter tout besoin en matériel. En outre, il ne résulte pas de l'instruction que ces difficultés aient été à l'origine de la pathologie de la requérante qui résulte d'un stress post-traumatique faisant suite à l'envahissement du centre culturel quelques mois plus tôt. Enfin, si Mme A... se plaint de l'accès du public à son bureau, cet état de fait est inhérente à sa mission d'accueil. Dès lors, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que la commune de Grugny aurait ainsi commis une faute à l'origine de sa pathologie. 9. En deuxième lieu, si Mme A... soutient que son supérieur hiérarchique aurait été régulièrement en état d'ébriété et aurait eu un comportement agressif à l'égard des agents et du public du centre culturel, elle ne l'établit pas par les documents qu'elle produit qui se bornent tous à reprendre ses seules allégations. 10. En troisième lieu, il résulte de ce qui a été dit au point 6 que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que la seule reconnaissance de l'imputabilité au service de son état de santé serait de nature à caractériser l'existence d'une faute de la part de la commune à l'origine de celui-ci. 11. En quatrième lieu, il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement. Il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements de harcèlement sont ou non établis. Le juge se détermine au vu de ces échanges contradictoires qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile. Pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge doit tenir compte des comportements respectifs de l'agent auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral. 12. Il résulte de ce qui a été dit aux points 8 et 9 du présent arrêt que Mme A... n'établit pas avoir été sciemment soumise à des conditions de travail dégradées ni avoir été exposée à des agressions de son supérieur hiérarchique. Mme A... ne conteste pas utilement que l'interruption du versement de son traitement entre les mois de décembre 2017 et mai 2018 était justifié par son refus de se présenter aux expertises médicales diligentées par son employeur, dont il ne résulte pas de l'instruction qu'elle aurait revêtu un caractère excessif. De même, le versement tardif de son allocation de retour à l'emploi est lié, certes à une erreur de la commune, mais également au délai mis par la requérante pour saisir Pôle Emploi d'une demande d'indemnisation. Si Mme A... a sollicité des feuilles de soins permettant une prise en charge par avance de ses frais médicaux en vain, elle ne justifie pas en avoir sollicité en vain le remboursement. Enfin, si le tribunal administratif de Versailles a jugé, par un jugement n° 2005965 du 23 septembre 2022 devenu définitif, que son licenciement pour inaptitude était illégal, il a jugé que Mme A... aurait dû être évincée du service au travers d'une mise en disponibilité d'office. Dès lors, les éléments produits par Mme A... ne permettent pas de faire présumer l'existence d'un harcèlement moral. 13. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que sa dépression imputable au service trouverait sa cause dans une faute commise par l'administration. En ce qui concerne les préjudices de Mme A... : 14. En premier lieu, Mme A... ne produit toujours en appel aucun justificatif des frais de déplacement aux expertise médicales et commission de réforme qu'elle invoque. 15. En deuxième lieu, elle ne justifie pas de l'envoi en lettre avec accusé de réception de ses arrêts de travail et ainsi des frais invoqués au titre de ces envois. Elle ne justifie pas non plus des sommes restées à sa charge à raison des consultations réalisées auprès de son médecin traitant pour l'obtention de prolongations de ces arrêts. 16. En troisième lieu, si Mme A... fait valoir la prise en charge de frais induits par le paiement d'ordonnances non couvertes par la commune de Grigny, elle ne produit à l'instance ni ces ordonnances ni la preuve d'un quelconque paiement. 17. En quatrième lieu, il résulte de ce qui a été dit au point 6 et 13 du présent arrêt qu'en l'absence de faute de la commune, Mme A... n'est pas fondée à demander la condamnation de celle-ci à l'indemniser de la perte des primes liées à l'exercice de ses fonctions à raison de son placement en congé. 18. En cinquième lieu, Mme A... soutient avoir subi des troubles dans les conditions d'existence du fait de l'arrêt du versement de son traitement entre les mois de décembre 2017 et mai 2018. Néanmoins, Mme A... ne conteste pas utilement que cette suspension, fondée sur l'article 15 du décret du 30 juillet 1987, trouve sa cause dans son refus de se présenter aux expertises médicales diligentées par son employeur. Les troubles invoqués ne présentent dès lors pas de lien de causalité avec la maladie dont souffre Mme A.... 19. En dernier lieu, il résulte de l'instruction que Mme A... était atteinte entre 2012 et 2020 d'un syndrome dépressif sévère. Dès lors, elle est fondée à demander que l'indemnisation des souffrances endurées et du préjudice moral qu'elle a subi soit portée à la somme de 5 000 euros. Sur l'absence de fourniture de feuilles de soins : 20. Mme A... soutient que la commune a commis une faute en ne lui fournissant pas des attestations de prise en charge de ses frais médicaux la dispensant d'avancer ses frais. Néanmoins, à supposer même une faute ainsi commise, elle ne fait état d'aucun préjudice distinct de ceux évoqués ci-dessus. 21. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... est seulement fondée à demander que la somme à laquelle la commune de Grigny a été condamnée soit portée à 5 000 euros et à demander la réformation du jugement du 14 juin 2021 du tribunal administratif de Versailles en ce sens. Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 22. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de Mme A..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que la commune demande à ce titre. Il y a lieu en revanche de mettre à la charge de la commune de Grigny une somme de 1 500 euros à verser à Mme A... sur le fondement des mêmes dispositions. DÉCIDE : Article 1er : La commune de Grigny est condamnée à verser à Mme A... la somme de 5 000 euros. Article 2 : Le jugement n° 1905703 du 14 juin 2021 du tribunal administratif de Versailles est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt. Article 3 : La commune de Grigny versera à Mme A... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et à la commune de Grigny. Délibéré après l'audience du 16 mai 2023, à laquelle siégeaient : M. Albertini, président M. Mauny, président assesseur, Mme Villette, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 juin 2023. La rapporteure, A. VILLETTELe président, P.-L. ALBERTINILa greffière, F. PETIT GALLAND La République mande et ordonne au préfet de l'Essonne en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme La greffière, 2 N° 21VE02408
Cours administrative d'appel
Versailles
CAA de TOULOUSE, 2ème chambre, 20/06/2023, 21TL03138, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. D... E... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 4 juin 2018 qui lui concède une pension militaire d'invalidité, en tant qu'il refuse de prendre en compte les lombosciatalgies gauches, d'enjoindre à l'administration de lui accorder à ce titre un taux d'invalidité de 20 % au 19 octobre 2017, date de sa demande, et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n° 1905984 du 28 mai 2021, le tribunal administratif de Montpellier a annulé l'arrêté du 4 juin 2018 du ministre de l'économie et des finances en tant qu'il refuse de prendre en compte les lombosciatalgies gauches de M. E..., a enjoint au ministre de l'économie, des finances et de la relance de réviser la pension de M. E... en lui accordant au 19 octobre 2017 un taux d'invalidité de 20 % pour les lombosciatalgies gauches, dans un délai de deux mois, a mis à la charge définitive de l'Etat les frais d'expertise d'un montant de 960 euros ainsi que la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Procédure devant la cour : Par un recours et un mémoire, enregistrés les 28 juillet et 9 août 2021 sous le n° 21MA03138 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, puis le 1er mars 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n° 21TL03138, et un mémoire enregistré le 20 mai 2022, le ministre des armées demande à la cour : 1°) de réformer ce jugement du 28 mai 2021 en ce qu'il a accordé à M. E... un taux d'invalidité de 20% au titre des lombosciatalgies gauches à compter du 19 octobre 2017 ; 2°) de limiter le taux d'invalidité de M. E... à ce titre au taux de 10%, à compter du 17 octobre 2017. Il soutient que : - le tribunal a entaché son jugement d'une erreur d'appréciation en estimant qu'il ne justifiait pas de l'existence d'un état antérieur de la pathologie de M. E... avant l'accident d'octobre 2009, alors que plusieurs éléments médicaux ont été produits et que cet accident n'a eu aucune répercussion, en l'absence de prise en charge thérapeutique ; - il convient de déterminer une part non imputable au service déduite du taux global d'invalidité dès lors que la symptomatologie lombalgique de M. E... révèle une maladie étrangère au service et qu'elle a été aggravée par une blessure en service le 30 juillet 2013 ; ce taux doit être fixé à 10% ; - le jugement est entaché d'une erreur de plume dans son dispositif s'agissant du point de départ du droit à pension. Par des mémoires en défense, enregistrés le 5 mai 2022 et le 3 février 2023, le dernier n'ayant pas été communiqué, M. D... E..., représenté par Me Tucoo-Chala, conclut, dans le dernier état de ses écritures, au rejet de la requête et demande de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il fait valoir que : - le recours est irrecevable, en l'absence de présentation de moyens dans le délai de recours contentieux ; - la cour statuera ce que de droit sur l'erreur matérielle en ce qui concerne le droit à pension ; - il convient de retenir le taux de 20% tel qu'évalué par l'expert ; - à titre subsidiaire, il y a lieu d'ordonner un complément d'expertise judiciaire médicale à l'effet de confirmer que les lombosciatalgies gauches sont imputables à l'accident de service du 30 juillet 2013 et que le taux de l'infirmité afférente doit être fixé à 20% sans état antérieur. Par ordonnance du 9 janvier 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 7 février 2023. Vu : - le jugement avant dire droit du 17 septembre 2019 du tribunal des pensions de Montpellier ordonnant une expertise médicale ; - l'ordonnance du 5 décembre 2019 de la présidente du tribunal administratif de Montpellier liquidant et taxant les frais d'expertise à la somme de 960 euros ; - les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Anne Blin, présidente-assesseure, - les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique, - et les observations de Me Tucoo-Chala, représentant M. E.... Considérant ce qui suit : 1. M. E..., né le 27 juillet 1970, qui a servi dans l'armée de terre du 3 février 1993 au 12 décembre 2019, a été titulaire d'une pension militaire d'invalidité temporaire concédée par arrêté du 6 mars 2017 au taux global de 40% prenant effet du 3 mars 2014 au 2 mars 2017, au titre d'un " état de stress post-traumatique " et d'un " syndrome subjectif des traumatisés ". Le 17 octobre 2017, M. E... a sollicité le renouvellement de ses infirmités pensionnées ainsi que le bénéfice d'une pension au titre d'infirmités nouvelles. Par une décision du 4 juin 2018, la ministre des armées a maintenu et consolidé sa pension au taux global de 40% à compter du 3 mars 2017, mais rejeté sa demande présentée au titre des infirmités nouvelles. M. E... a demandé au tribunal régional des pensions militaires de Montpellier d'annuler cette décision, notamment en tant qu'elle refuse de faire droit à sa demande présentée au titre des infirmités nouvelles. Par jugement avant dire droit du 17 septembre 2019, ledit tribunal a ordonné une expertise médicale, avant de transmettre la demande de M. E... au tribunal administratif de Montpellier en application du décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018 relatif au contentieux des pensions militaires d'invalidité. Par un jugement du 28 mai 2021, le tribunal administratif de Montpellier a annulé l'arrêté du 4 juin 2018 du ministre de l'économie et des finances en tant qu'il refuse de prendre en compte les lombosciatalgies gauches de M. E..., a enjoint au ministre de l'économie, des finances et de la relance de réviser la pension de l'intéressé en lui accordant au 19 octobre 2017 un taux d'invalidité de 20 % pour les lombosciatalgies gauches, dans un délai de deux mois. Le ministre des armées demande de réformer ce jugement en limitant le taux d'invalidité de M. E... au titre de cette pathologie à 10%. Sur le bien-fondé du jugement : 2. D'une part, aux termes de l'article L. 151-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " La pension militaire d'invalidité prévue par le présent code est attribuée sur demande de l'intéressé. L'entrée en jouissance est fixée à la date du dépôt de la demande. / Il en est de même de la date d'entrée en jouissance de la pension révisée pour aggravation ou pour prise en compte d'une infirmité nouvelle (...) " Il résulte de ces dispositions que c'est à cette date qu'il faut se placer pour évaluer le taux des infirmités à raison desquelles la pension ou sa révision est demandée. 3. D'autre part, aux termes de l'article L. 121-1 du même code : " Ouvrent droit à pension : 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; 2° Les infirmités résultant de maladies contractées par le fait ou à l'occasion du service ; 3° L'aggravation par le fait ou à l'occasion du service d'infirmités étrangères au service ; (...) ". 4. Il résulte de l'instruction que M. E... a été victime de deux accidents à l'occasion de sauts en parachute. A la suite du premier accident survenu le 27 octobre 2009, l'intéressé a ressenti une vive douleur au niveau du dos et du rachis cervical au moment de l'impact au sol. M. E..., qui n'a pas bénéficié d'un suivi thérapeutique à la suite de cet accident, a conservé son habilitation à participer à des opérations parachutées. En revanche, à la suite du second accident survenu le 30 juillet 2013 suite à une réception violente après un déventement, M. E... a été hospitalisé au centre hospitalier de Castres. Le scanner lombaire réalisé le 2 août suivant concluait à l'absence de lésion osseuse traumatique visible et à une hernie discale médiane et postéro-latérale gauche en L5-S1. Le 16 septembre 2013, le docteur A... retenait une " lombosciatalgie gauche décompensée par un accident et résistante au traitement médicamenteux ". Estimant que les lombosciatalgies gauches dont il souffre sont imputables à l'accident de service du 30 juillet 2013, M. E... a demandé le bénéfice d'une pension au titre de cette infirmité. Le rapport d'expertise établi le 14 février 2018 par le docteur B..., neurologue, conclut à l'absence de lésion en imagerie sauf à l'IRM lombaire dont le rapport à l'accident n'est pas avéré et à " l'inorganicité pour tous les chefs neurologiques stricto sensu ". Le 10 avril 2018, le médecin chargé des pensions militaires d'invalidité a émis l'avis de l'inexistence de cette infirmité. Au regard de l'ancienneté des doléances relatives aux lombalgies et à la possibilité d'une décompensation, le tribunal des pensions militaires d'invalidité de Montpellier a ordonné une expertise médicale le 17 septembre 2019, afin d'être éclairé sur la question de savoir si les troubles dont se plaint M. E... sont susceptibles d'être imputés au service. Le professeur C... a remis un rapport le 27 novembre 2019. Selon ce rapport, les lombosciatalgies gauches dont souffre M. E... sont imputables à l'accident du 30 juillet 2013 compte-tenu du mécanisme et du type d'accident avec chute violente à la suite d'un accident de déventement lors d'un saut en parachute. L'expert s'est également fondé sur le compte-rendu d'hospitalisation du 24 octobre 2013 du service de rhumatologie du centre hospitalier de Carcassonne selon lequel le patient avait évoqué des sensations de décharges électriques des pieds à la tête au moment de l'impact et s'était plaint de douleurs lombo radiculaires gauches de trajet postérieur, sur la mise en évidence d'une hernie discale postéro latérale gauche L5-S1 notée dans ledit compte-rendu à la suite des examens tomodensitométriques et de l'IRM lombaire réalisés en septembre 2013, sur l'évolution continue des épisodes de lombosciatalgies gauches jusqu'au jour de l'expertise et sur les données de l'IRM du 26 août 2019 confirmant cette lésion discale. L'expert, qui a retenu un taux d'invalidité de 20%, concluait en outre à l'absence d'état antérieur notable même s'il y a eu une exploration en imagerie en 2008 pour lombalgies, M. E... étant à ce moment-là apte au saut en parachute. A la suite des conclusions de l'expert judiciaire, le médecin conseiller technique auprès du ministre des armées a estimé, dans son avis du 19 décembre 2019, qu'il existe bien une lombosciatalgie L5-S1 gauche par atteinte de la racine S1 dans une forme clinique d'intensité légère justifiant un taux d'invalidité de 20%, l'organicité étant bien réelle, la concordance radio-clinique établie et le traumatisme du rachis lombaire réel. Il retient toutefois un état antérieur à l'étage L5-S1 non antérieur au service et déjà symptomatique mais qui n'aurait été aggravé qu'après l'accident de 2013, et conclut qu'il s'agit donc d'une infirmité de nature maladie aggravée par blessure en service, avec une part non imputable au service de 10%. Pour demander de limiter le taux d'invalidité de M. E... au titre de cette infirmité à 10% en raison de l'état antérieur de l'intéressé, le ministre des armées se prévaut de l'avis émis par le médecin conseiller technique ainsi que des résultats de l'IRM du rachis lombaire effectué le 11 juillet 2019 et suivi d'une tomodensitométrie dorso-lombaire le 29 juillet 2009. Toutefois, les résultats de ces examens n'ont objectivé qu'un discret débord discal L4-L5 et L5-S1 et, ainsi qu'il a été exposé, M. E... était apte au saut en parachute. De même, s'il ressort du livret médical de l'intéressé qu'il a bénéficié d'une consultation le 2 avril 2008 pour des douleurs du rachis cervical et dorsal, puis de lombalgies sans fait de service associé le 30 septembre 2009, d'un épisode de lombalgies en novembre 2009, et d'une consultation pour des lombalgies depuis trois jours à la suite d'un long trajet en voiture sans fait de service associé le 19 mai 2011, ces éléments ne permettent pas de justifier d'un état antérieur significatif, alors que selon l'expert M. E... ne présente pas d'état antérieur notable. Dans ces conditions, le taux d'invalidité de l'infirmité au titre des lombosciatalgies gauches dont souffre M. E... doit être évalué à 20% à la date de sa demande présentée le 17 octobre 2017. 5. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par M. E..., que le ministre des armées n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a annulé l'arrêté du 4 juin 2018 du ministre de l'économie et des finances en tant qu'il refuse de prendre en compte les lombosciatalgies gauches de M. E.... Sur la liquidation de la pension militaire d'invalidité de M. E... : 6. La liquidation de la pension militaire d'invalidité de M. E... doit être effectuée en prenant en compte l'infirmité au titre des lombosciatalgies gauches sur la base d'un taux de 20% à compter du 17 octobre 2017, et non à compter du 19 octobre 2017 comme mentionné à l'article 2 du jugement par suite d'une erreur matérielle, qu'il convient de rectifier comme en conviennent les parties. Sur les frais liés au litige : 7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. E... et non compris dans les dépens. D E C I D E : Article 1er : Le ministre des armées procédera à la liquidation de la pension militaire d'invalidité allouée à M. E... en prenant en compte l'infirmité au titre des lombosciatalgies gauches au taux de 20% à compter du 17 octobre 2017. Article 2 : Le jugement n° 1905984 du tribunal administratif de Montpellier en date du 28 mai 2021 est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er du présent arrêt. Article 3 : Le surplus des conclusions du recours du ministre des armées est rejeté. Article 4 : L'Etat versera à M. E... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... E..., au ministre des armées et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Délibéré après l'audience du 6 juin 2023, à laquelle siégeaient : Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre, Mme Blin, présidente assesseure, M. Teulière, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 juin 2023. La rapporteure, A. Blin La présidente, A. Geslan-Demaret La greffière, M-M. Maillat La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. N°21TL03138 2
Cours administrative d'appel
Toulouse
CAA de MARSEILLE, 4ème chambre, 27/06/2023, 22MA01771, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... a demandé au tribunal des pensions militaires d'invalidité de Marseille, qui a transmis cette demande au tribunal administratif de Marseille, d'annuler la décision du 27 juillet 2018 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande de révision de pension militaire d'invalidité pour aggravation des infirmités " dorso-lombalgies chroniques (...) ", " acouphènes bilatéraux (...) ", " séquelles d'entorse cervicale (...) " et " dureté des deux oreilles ". Par un jugement n° 2004178 du 7 juin 2022, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de M. A.... Procédure devant la Cour : Par une requête et des mémoires, enregistrés les 23 juin 2022, 23 février 2023, 16 mars et 28 mars 2023, M. A..., représenté par Me Paolantonacci, demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement n° 2004178 du 7 juin 2022 du tribunal administratif de Marseille ; 2°) d'annuler la décision du 27 juillet 2018 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande de révision de sa pension militaire d'invalidité ; 3°) à titre principal, de dire et juger qu'il a droit, à compter du 9 décembre 2015, à une pension à raison d'un taux d'invalidité de 30 % au titre de l'invalidité " dorso-lombalgie chronique " et de 15 % + 10 au titre de l'invalidité " acouphènes bilatéraux permanents ", ladite pension devant être calculée sur la base de l'indice correspondant au grade d'adjudant-chef ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - en ce qui concerne l'infirmité " dorso-lombalgie chronique ", le tribunal a violé les dispositions des articles L. 6, L. 10 et L. 29 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; la réalité de l'aggravation de sa pathologie, avec une invalidité portée à un taux de 30 % qui n'est plus contesté par l'administration, ressort de la comparaison des pièces médicales produites au dossier ; cette aggravation doit par ailleurs être appréciée entre la date de la demande initiale de pension, soit le 16 décembre 1996, et la date de la demande de révision, soit le 9 décembre 1995 ; le constat d'un surpoids ne suffit pas à imputer l'aggravation d'une infirmité pensionnée à titre définitif à cette surcharge pondérale sans lien de causalité direct et déterminant ; de plus, la prise de poids retenue par le tribunal n'apparait pas si évidente et repose sur le poids constaté lors de l'expertise réalisée quatre ans après la demande de révision ; en conséquence, le jugement sera annulé pour insuffisance de motifs ; le jugement, qui prend en compte des éléments postérieurs à la demande de révision, méconnaît l'article L. 6 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - s'agissant des infirmités " acouphènes " et " dureté des deux oreilles ", l'expert auprès de la sous-direction des pensions a retenu une aggravation de 5 points pour les acouphènes et un maintien du taux pour la dureté des oreilles ; si l'aggravation de 5 % est inopérante prise isolément, l'aggravation de 10 points des dorso-lombalgies chroniques permet de la prendre en compte, en application de l'article L. 29 du code des pensions militaires d'invalidité ; en conséquence, le taux d'invalidité de l'infirmité " acouphènes " doit être porté à 15 % au lieu des 10 % précédemment concédés ; - sa pension devra être calculée sur la base de l'indice correspondant au grade d'adjudant-chef, en application du décret du 10 mai 2010. Par des mémoires en défense, enregistrés les 15 février, 14 mars et 24 mars 2023, le ministre des armées conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés. Un courrier du 24 février 2023 adressé aux parties en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les a informées de la période à laquelle il était envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et leur a indiqué la date à partir de laquelle l'instruction pourrait être close, dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2 du même code. Un mémoire, présenté par le ministère des armées, enregistré le 3 avril 2023, n'a pas été communiqué en application du dernier alinéa de l'article R. 611-1 du code de justice administrative. Par une ordonnance du 5 avril 2023, la clôture de l'instruction a été prononcée avec effet immédiat, en application du dernier alinéa de l'article R. 613-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - le code de justice administrative ; Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Martin, - et les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. M. A..., né le 12 septembre 1953, a souscrit un contrat d'engagé volontaire dans l'armée de l'air à compter du 15 novembre 1972. Nommé adjudant-chef le 1er avril 1990, il a été rayé des contrôles de l'armée d'active le 10 septembre 2000. Titulaire d'une pension militaire d'invalidité, concédée par arrêté du 19 janvier 2009, au taux global de 75 %, pour les infirmités " dorso-lombalgies chroniques (...) ", " séquelles d'entorse cervicale (...) ", " acouphènes bilatéraux (...) ", " séquelles de traumatisme de la cheville droite (...) " et " dureté des deux oreilles ", M. A... a sollicité, par une demande enregistrée le 9 décembre 2015, la révision de sa pension pour aggravation des infirmités pensionnées précitées, à l'exception de l'infirmité " séquelles de traumatisme de la cheville droite (...) ". Par une décision du 27 juillet 2018, la ministre des armées a rejeté sa demande. Par la présente requête, M. A... relève appel du jugement du 7 juin 2022 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande d'annulation de cette décision ainsi que sa demande tendant à ce qu'il soit fait droit à sa demande de révision de pension, en retenant un taux de 30 % au titre de l'infirmité " dorso-lombalgies chroniques (...) " et un taux de 15 % au titre de l'infirmité " acouphènes (...) ". Sur la régularité du jugement attaqué : 2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". 3. Il ressort des énonciations du jugement attaqué que les premiers juges ont considéré, en ce qui concerne l'infirmité " dorso-lombalgies chroniques (...) ", que si l'expert judiciaire a retenu, à la date du 9 décembre 2015, une aggravation de 10 points du déficit fonctionnel au titre de l'infirmité " dorso-lombalgies chroniques (...) ", il résulte toutefois de l'avis médical rendu le 15 octobre 2020 par le médecin conseiller technique auprès de l'administration centrale que le surpoids du requérant a joué un rôle prépondérant dans cette aggravation, de sorte qu'il ne saurait être déduit que le supplément d'invalidité fixé à 10 % doit être intégralement imputable à la blessure constitutive de l'infirmité pensionnée. Ce faisant, ils ont suffisamment motivé leur jugement, conformément à l'exigence fixée par l'article L. 9 du code de justice administrative. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 4. Aux termes de l'article L. 29 du code des pensions militaires d'invalidité, dans sa rédaction en vigueur au jour de la demande de révision de pension présentée par M. A... : " Le titulaire d'une pension d'invalidité concédée à titre définitif peut en demander la révision en invoquant l'aggravation d'une ou plusieurs infirmités en raison desquelles cette pension a été accordée. (...) La pension ayant fait l'objet de la demande est révisée lorsque le degré d'invalidité résultant de l'infirmité ou de l'ensemble des infirmités est reconnu supérieur de 10 % au moins du pourcentage antérieur. ". Par ailleurs, en vertu des dispositions de l'article L. 6 du même code, l'évolution des infirmités pensionnées s'apprécie sur une période comprise entre la date initiale d'octroi de la pension et celle de dépôt de la demande de révision. 5. Selon le rapport d'expertise médicale remis le 2 décembre 2019 à la suite du jugement avant dire droit du 2 mai 2019 du tribunal des pensions militaires d'invalidité de Marseille, doit être prise en compte, à la date de la demande de révision de la pension de M. A..., soit le 9 décembre 2015, une aggravation de 10 points du déficit fonctionnel au titre de l'infirmité " dorso-lombalgies chroniques (...) ". Le tribunal administratif de Marseille a toutefois estimé, par le jugement attaqué, que le taux d'invalidité de 10 % fixé par l'expert judiciaire devait être regardé, dans une proportion fixée à hauteur de 5 %, comme étant imputable au seul surpoids de M. A..., lequel était sans lien avec le service, de sorte que c'était sans entacher sa décision d'une erreur d'appréciation ou d'une erreur de droit que la ministre a pu estimer que l'aggravation constatée n'atteignait pas au moins 10 % au sens et pour l'application des dispositions de l'article L. 29 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, et ainsi rejeter la demande de révision de l'intéressé. Toutefois, alors que les premiers juges se sont essentiellement appuyés sur les conclusions de l'avis médical rendu le 15 octobre 2020 par le médecin conseiller technique auprès de l'administration centrale, aux termes duquel l'expert ne s'est pas prononcé sur l'origine de l'aggravation constatée chez un individu en surpoids important alors que, lors de l'expertise précédente du 18 mai 2001, il ne pesait que 90 kg, il ne résulte nullement de ce certificat que le médecin, qui s'est prononcé sur la situation de surpoids " actuelle " de M. A..., aurait procédé à une analyse de cette situation contemporaine de la demande de révision de pension formulée par l'intéressé. Il ne résulte par ailleurs pas de l'instruction et ne ressort d'aucune des pièces médicales produites au dossier que la situation de surpoids de M. A..., à la date de sa demande de révision, aurait été de nature à justifier une minoration du taux d'aggravation imputable au seul service, cette situation de surpoids n'ayant au demeurant été évoquée ni dans les conclusions de l'expertise médicale initiale du 17 avril 2018, ni dans l'avis émis par le médecin chargé des pensions militaires d'invalidité le 10 juillet 2018. Ce faisant, l'appelant est fondé à soutenir que c'est à tort que, pour rejeter sa demande, le tribunal administratif s'est fondé sur l'avis médical du 15 octobre 2020 et a pris en compte son état de santé à une date postérieure à celle de sa demande de révision. 6. Toutefois il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner la demande de M. A.... 7. En premier lieu, il résulte de l'instruction, et plus particulièrement tant des conclusions de l'expertise médicale initiale du 17 avril 2018 que des conclusions du médecin chargé des pensions militaires d'invalidité, que l'aggravation de l'infirmité " dorso-lombalgies chroniques (...) " devait être évaluée à cinq points seulement. Selon ces documents, M. A... souffre, à la date de sa demande de révision, d'une augmentation en intensité et en fréquence de douleurs dorso-lombaires avec irradiation vers les membres inférieurs, mais qui ne traduit toutefois qu'une légère aggravation du déficit fonctionnel avec majoration de la raideur caractérisée par une distance main-sol de 70 centimètres contre 50 centimètres lors d'une expertise réalisée en 1997, avec troubles au niveau des membres inférieurs (dysesthésie notamment), et une manœuvre de Lasègue positive à 40 degrés à gauche et à droite, de sorte que le taux d'invalidité de 20 % doit être majoré de cinq points seulement. Si le rapport d'expertise établi à la suite du jugement avant dire droit du 2 mai 2019 du tribunal des pensions militaires d'invalidité de Marseille indique que l'aggravation doit être évaluée à 10 %, il ressort de ce rapport que le médecin s'est fondé sur les mêmes examens d'imagerie médicale que ceux consultés par les précédents experts, examens réalisés les 25 septembre 2014 et 8 octobre 2014, ainsi que sur un certificat médical d'un rhumatologue établi le 9 octobre 2014, sans expliquer en quoi le taux de 5 % retenu au titre de l'aggravation de l'invalidité aurait été sous-évalué, et ce alors même que les constatations médicales qu'il opère sur le fondement de ces documents médicaux ne diffèrent aucunement de celles des deux autres médecins. De surcroît, il ne décrit pas davantage l'existence de gênes fonctionnelles supplémentaires, à la date de la demande de révision, qui n'auraient pas été prises en compte par ces médecins. Par conséquent, il ne résulte pas de l'instruction que l'aggravation de l'infirmité " dorso-lombalgies chroniques (...) " de M. A... justifierait l'allocation d'un taux supérieur à celui de 5% retenu par l'administration pour rejeter sa demande de révision de pension, un tel taux étant inférieur au taux de 10 % susceptible d'ouvrir droit à révision de pension. 8. En second lieu, il résulte de ce qui vient d'être exposé que l'appelant ne peut utilement soutenir que l'aggravation de l'invalidité " acouphènes bilatéraux (...) ", évaluée à un taux non contesté de cinq points seulement, doit être prise en compte au seul motif que l'aggravation de l'infirmité " dorso-lombalgies chroniques (...) " permet la révision de sa pension. 9. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 27 juillet 2018 et à la révision de la pension qui lui a été concédée par arrêté du 19 janvier 2009. Par suite, ses conclusions aux fins d'annulation, d'injonction, et tendant à la mise à la charge de l'Etat des frais d'instance doivent être rejetées. D É C I D E : Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre des armées. Délibéré après l'audience du 13 juin 2023, où siégeaient : - M. Marcovici, président, - M. Revert, président assesseur, - M. Martin, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 27 juin 2023. 2 N° 22MA01771
Cours administrative d'appel
Marseille
CAA de MARSEILLE, 4ème chambre, 27/06/2023, 22MA00448, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. D... C... a demandé au tribunal des pensions militaires de Haute-Corse d'annuler la décision du 11 décembre 2017 par laquelle le ministre des armées a rejeté sa demande de révision de pension pour aggravation des infirmités de dorsalgies chroniques et de périarthrite scapulo-humérale dont il souffre. Par un jugement du 18 mars 2019, le tribunal des pensions militaires de Haute-Corse a, d'une part, rejeté la demande de M. C... tenant à l'annulation de cette décision du ministre des armées du 11 décembre 2017 en tant qu'elle a trait à l'infirmité de périarthrite scapulo-humérale et, d'autre part, ordonné avant dire droit une expertise s'agissant de l'infirmité dorsalgies chroniques. L'expert de justice a déposé son rapport au greffe du tribunal des pensions militaires de Haute-Corse le 18 avril 2019. Par application de l'article 51 de la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018, la procédure a été transférée, à compter du 1er novembre 2019, au tribunal administratif de Bastia. Par un jugement n° 1901463 du 7 décembre 2021, le tribunal administratif de Bastia a rejeté la demande présentée par M. C... qui tendait, dans le dernier état de ses écritures, à l'annulation de la décision susvisée du 11 décembre 2017 en tant que le ministre des années a rejeté sa demande de révision de pension pour aggravation de l'infirmité de dorsalgies chroniques dont il souffre et à ce que, s'agissant de cette infirmité, son taux d'invalidité soit fixé à 70 %, voire à 80 %. Procédure devant la Cour : Par une requête, enregistrée le 2 février 2022, M. C... relève appel de ce jugement du tribunal administratif de Bastia du 7 décembre 2021. Il soutient que : - il trouve " anormal " d'avoir été jugé par le tribunal administratif de Bastia alors que la procédure avait été engagée devant le tribunal des pensions de Bastia ; - il n'a pas reçu d'avis sur la date d'audience du tribunal administratif de Bastia ; - il n'a reçu le jugement du tribunal administratif de Bastia du 7 décembre 2021 que le 6 décembre 2022 ; - l'infirmité de dorsalgies chroniques dont il souffre s'est aggravée ; - le certificat établi par le docteur B... n'a pas été présenté aux médecins pour effectuer leur expertise, comme l'exige la législation ; - une expertise médicale faite par un médecin spécialiste en rhumatologie ou un chirurgien du rachis serait bienvenue. Par un mémoire en défense, enregistré le 29 décembre 2022, le ministre des armées conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que : - les moyens de la requête ne sont pas fondés et M. C... n'apporte aucun élément de nature à remettre en cause le jugement attaqué, ni l'évaluation à 60 % de son taux de l'infirmité afférente aux dorsalgies chroniques ; - s'il appartient à la Cour d'apprécier souverainement la demande présentée par M. C... tendant à l'organisation d'une nouvelle expertise, compte tenu de l'état d'invalidité de ce dernier, cette demande ne saurait se justifier. Par une ordonnance du 29 décembre 2022, la clôture de l'instruction, initialement fixée au 30 décembre 2022, a été reportée au 27 janvier 2023, à 12 heures. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 ; - le décret n° 2018-1292 du 28 décembre 2018 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Lombart, - et les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. Né le 30 janvier 1944, M. C... était médecin en chef au service de santé des armées (SSA), avant d'être placé en position de retraite et rayé des cadres de l'armée active à compter du 24 avril 1997. M. C... est titulaire d'une pension militaire d'invalidité au taux de 85 % qui lui a été concédée par un arrêté du 26 mars 2012, avec entrée en jouissance à compter du 29 septembre 2010, pour cinq infirmités au nombre desquelles figurent l'infirmité de dorsalgies chroniques, dont le taux non imputable est pour moitié du taux global de cette affection, et celle de périarthrite scapulo-humérale. Le 16 mars 2016, M. C... a demandé la révision de sa pension en raison de l'aggravation de ces deux infirmités. Par une décision du 11 décembre 2017, le ministre des armées a refusé de faire droit à cette demande. Après que, par un jugement du 18 mars 2019, le tribunal des pensions militaires de Haute-Corse a, d'une part, rejeté la demande de M. C... tendant à l'annulation de cette décision du 11 décembre 2017 en tant qu'elle a trait à l'infirmité de périarthrite scapulo-humérale et, d'autre part, ordonné une expertise avant dire droit afin qu'un expert puisse donner un avis sur le taux d'invalidité de l'infirmité de dorsalgies chroniques, le tribunal administratif de Bastia a, par un jugement du 7 décembre 2021, également rejeté la demande de M. C... tendant à l'annulation de cette même décision en tant que le ministre des armées a rejeté sa demande de révision de pension pour l'aggravation de cette infirmité de dorsalgies chroniques. Par la présente requête, M. C... doit être regardé comme demandant à la Cour d'annuler ce dernier jugement. Sur la régularité du jugement attaqué : 2. En premier lieu, par l'effet combiné de la loi susvisée du 13 juillet 2018 relative à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025 et portant diverses dispositions intéressant la défense et du décret du 28 décembre 2018 pris pour l'application de l'article 51 de cette loi, le contentieux des pensions militaires d'invalidité pendant devant les tribunaux des pensions a été transféré aux tribunaux administratifs, à compter du 1er novembre 2019. Le tribunal des pensions militaires de Haute-Corse a ainsi transmis à bon droit le surplus des conclusions de M. C... sur lesquelles il n'avait pas statué par son jugement du 18 mars 2019 au tribunal administratif de Bastia, lequel s'est compétemment prononcé sur ce surplus ainsi que sur les conclusions directement présentées devant lui par M. C.... 3. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 711-2 du code de justice administrative : " Toute partie est avertie, par une notification faite par lettre recommandée avec demande d'avis de réception (...), du jour où l'affaire sera appelée à l'audience. / (...) / L'avertissement est donné sept jours au moins avant l'audience (...). ". Selon l'article R. 711-2-1 du même code : " (...) Les parties qui ont accepté l'usage du téléservice mentionné à l'article R. 414-2 pour une affaire peuvent être convoquées au moyen de ce téléservice à l'audience à laquelle elle sera appelée. / Les dispositions de l'article R. 611-8-6 sont applicables. ". Cet article R. 611-8-6 dispose que : " Les parties sont réputées avoir reçu la communication ou la notification à la date de première consultation du document qui leur a été adressé par voie électronique, certifiée par l'accusé de réception délivré par l'application informatique, ou, à défaut de consultation dans un délai de deux jours ouvrés à compter de la date de mise à disposition du document dans l'application, à l'issue de ce délai. Sauf demande contraire de leur part, les parties sont alertées de toute nouvelle communication ou notification par un message électronique envoyé à l'adresse choisie par elles. (...) ". Il résulte de la combinaison de ces dispositions que, lorsqu'un avis d'audience est envoyé via l'application informatique Télérecours citoyens à une partie qui en a accepté l'usage et que cette partie ne consulte pas ce document dans le délai de deux jours ouvrés prévu à l'article R. 611-8-6 précité, elle est réputée en avoir reçu notification à l'expiration de ce délai. 4. Il ressort des pièces de la procédure devant le tribunal administratif de Bastia que l'avis d'audience a été mis à disposition de M. C... le 20 octobre 2021 au moyen de l'application Télérecours citoyens, mentionnée à l'article R. 414-6 du code de justice administrative. A supposer même que l'appelant n'ait pas consulté ce document dans le délai de deux jours à compter de cette date, il était, en application des dispositions précitées de l'article R. 611-8-6 du code de justice administrative, réputé en avoir reçu notification à l'expiration de ce délai, soit le 22 octobre 2020. Par suite, et alors qu'au demeurant, il ressort des mêmes pièces de la procédure devant le tribunal administratif de Bastia qu'il a pu présenter lui-même des observations au cours de l'audience publique qui s'est tenue le 16 novembre 2021, l'appelant n'est pas fondé à soutenir qu'il n'a pas été destinataire d'un avis d'audience. 5. En troisième et dernier lieu, si M. C... soutient que le jugement attaqué ne lui a été notifié que le 6 janvier 2022 alors qu'il a été mis à disposition le 7 décembre 2021, cette circonstance est sans influence sur la régularité de cette décision juridictionnelle. 6. Dès lors, le jugement attaqué du tribunal administratif de Bastia du 7 décembre 2021 n'est pas entaché d'irrégularité sur ces différents points. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 7. En premier lieu, en se bornant à soutenir que le certificat établi par le docteur B... n'a pas été présenté aux médecins qui se sont vus confier une mission d'expertise " comme l'exige la législation ", M. C... n'assortit pas ce moyen des précisions permettant à la Cour d'en apprécier le bien-fondé. 8. En second lieu, selon l'article L. 29 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, en vigueur à la date de la demande de révision de la pension de M. C..., devenu l'article L. 154-1 du même code : " Le titulaire d'une pension d'invalidité concédée à titre définitif peut en demander la révision en invoquant l'aggravation d'une ou plusieurs infirmités en raison desquelles cette pension a été accordée. / Cette demande est recevable sans condition de délai. / La pension ayant fait l'objet de la demande est révisée lorsque le degré d'invalidité résultant de l'infirmité ou de l'ensemble des infirmités est reconnu supérieur de 10 % au moins du pourcentage antérieur. / Toutefois, l'aggravation ne peut être prise en considération que si le supplément d'invalidité est exclusivement imputable aux blessures et aux maladies constitutives des infirmités pour lesquelles la pension a été accordée. / La pension définitive révisée est concédée à titre définitif. ". Ces dispositions ne sont applicables, d'une part, qu'en cas d'aggravation de l'une des infirmités au titre desquelles la pension a été concédée, d'autre part, que si l'aggravation constatée est elle-même imputable au service. 9. En vertu des dispositions de l'article L. 6 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, alors applicable, désormais codifié à l'article L. 151-2 du même code, le degré d'infirmité est déterminé au jour du dépôt de la demande de l'intéressé, sans qu'il soit possible de tenir compte d'éléments d'aggravation postérieurs à cette date. L'administration doit dès lors se placer à la date de la demande de pension pour évaluer le degré d'invalidité entraîné par l'infirmité invoquée et cette évaluation doit, en application des termes mêmes de l'article L. 26 du même code, alors applicable et désormais repris à l'article L. 151-6 du même code, tenir compte de la gêne fonctionnelle engendrée dans le temps par ces infirmités. 10. Par ailleurs, en vertu de l'article L. 10 du même code, désormais repris à l'article L. 125-5 du même code, les degrés de pourcentage d'invalidité figurant aux barèmes prévus par l'article L. 9, aujourd'hui repris à l'article L. 125-3 du même code, présentent un caractère indicatif, à l'exception des amputations et des exérèses d'organes. 11. En l'espèce, il résulte de l'instruction que si l'ensemble des experts amenés à se prononcer sur les dorsalgies chroniques dont souffre M. C... concluent de manière concordante, à l'instar notamment du docteur A... B..., à une aggravation de celles-ci, tant l'expert consulté par l'administration en août 2017, que le médecin chargé des pensions militaires d'invalidité sur le droit à pension d'invalidité, dans son avis de novembre 2017, et le médecin conseiller technique auprès de l'administration centrale, dans son avis du 15 mai 2019, retiennent un taux d'invalidité de 60 %. Dans ces conditions, et alors que M. C... ne conteste au demeurant pas, à l'appui de ses écritures d'appel, que, comme l'ont relevé à juste titre les premiers juges dans leur jugement attaqué, pour conclure à l'existence d'une aggravation de l'infirmité de dorsalgies chroniques et proposer de porter le taux d'invalidité de cette infirmité de 45 à 70 %, l'expert de justice désigné par le tribunal des pensions militaires de Haute-Corse dans son jugement du 18 mars 2019 a notamment pris en considération certaines constatations effectuées le jour même de la visite qu'il a effectuée, soit le 9 avril 2019, il y a lieu de retenir ce taux de 60 % qui apparaît d'ailleurs cohérent avec le guide-barème des invalidités, M. C... n'établissant, ni même n'alléguant souffrir d'une immobilisation totale du rachis et des hanches. Dans la mesure où, ainsi qu'il a été déjà dit au point 1 du présent arrêt, seuls 50 % du taux global de l'infirmité dont souffre M. C... est imputable au service, l'aggravation à 60 % de cette infirmité, soit une augmentation de 15 % dont seule la moitié est imputable au service, est inférieure au taux de 10 % requis par les dispositions applicables de l'article L. 29 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre pour obtenir la révision de la pension. Par conséquent, le ministre des armées a pu légalement la lui refuser. 12. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit utile d'ordonner une nouvelle expertise, que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 7 décembre 2021, le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 11 décembre 2017 en tant que le ministre des armées a rejeté sa demande de révision de pension pour aggravation de l'infirmité de dorsalgies chroniques dont il souffre. D É C I D E : Article 1er : La requête de M. C... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C... et au ministre des armées. Délibéré après l'audience du 13 juin 2023, où siégeaient : - M. Marcovici, président, - M. Revert, président assesseur, - M. Lombart, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 juin 2023. 2 No 22MA00448 ot
Cours administrative d'appel
Marseille
CAA de TOULOUSE, 2ème chambre, 20/06/2023, 21TL03842, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler les décisions des 17 mai et 8 juillet 2019 par lesquelles la ministre des armées a refusé de l'inscrire sur les listes d'aptitude aux emplois réservés, et d'enjoindre à la ministre de l'inscrire sur la liste des emplois réservés de catégorie A. Par un jugement n° 1905590 du 19 mars 2021, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 9 septembre 2021, sous le n° 21MA03842 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, puis le 1er mars 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n° 21TL03842, M. A... B..., représenté par Me Guyon, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du 19 mars 2021 ; 2°) d'annuler les décisions des 17 mai et 8 juillet 2019 par lesquelles la ministre des armées a refusé de l'inscrire sur les listes d'aptitude aux emplois réservés de catégorie A ; 3°) d'enjoindre à la ministre de l'inscrire sur la liste des emplois réservés de catégorie A ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 75 et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il soutient que : - sa requête est recevable s'agissant tant du respect du délai de recours que de son intérêt à agir à l'encontre d'un acte administratif lui faisant grief ; - le jugement est entaché d'irrégularité en ce qu'il a considéré que sa demande dirigée contre la décision du 17 mai 2019 était irrecevable ; le tribunal a commis une erreur de qualification juridique des faits ; - il appartient à l'administration de démontrer que les décisions ont été prises par une autorité compétente ; - la décision du 8 juillet 2019 ne comporte pas les nom et prénom de son auteur ainsi que les mentions obligatoires relatives à l'agent chargé d'instruire sa demande, en méconnaissance de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration ; - les décisions sont entachées d'une erreur quant à l'exactitude matérielle des faits dès lors qu'il n'a pas bénéficié à ce jour d'une quelconque possibilité d'embauche lui permettant d'accéder à un emploi de catégorie A ; - elles sont entachées d'erreur de droit en ce qu'il remplit les conditions lui conférant un droit d'accès aux emplois réservés de catégorie A énoncées aux articles L. 242-1, L. 241-4 et R. 242-11 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - elles portent atteinte aux dispositions des articles 8 et 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la ministre des armées a méconnu sa compétence liée. Par un mémoire en défense, enregistré le 28 avril 2023, le ministre des armées conclut au rejet de la requête. Il fait valoir qu'aucun des moyens invoqués n'est fondé. M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du bureau d'aide juridictionnelle du 25 juin 2021. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 ; - la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Anne Blin, présidente-assesseure, - et les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. A l'issue d'un entretien qui s'est tenu le 10 mai 2019 au sein des services du ministère des armées, M. B..., bénéficiaire prioritaire au titre de la procédure d'accès aux emplois réservés en sa qualité de fils de harki, s'est vu remettre un passeport professionnel par le service départemental de l'office national des anciens combattants et victimes de guerre de l'Hérault. Par un courrier du 17 mai 2019, il a été informé de son inscription sur les listes d'aptitude aux emplois réservés pour une durée de cinq ans. Par lettre du 12 juin 2019, M. B... a demandé la mise en conformité de son passeport professionnel avec l'article 26 de la loi du 13 juillet 2018 relative à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025, en ce qui concerne la catégorie A correspondant à ses diplômes et compétences et, à défaut, la radiation de son inscription sur la liste des emplois réservés jusqu'à la mise en conformité de son passeport. Par un courrier du 8 juillet 2019, le ministre des armées lui a indiqué que l'outil informatique pour la gestion des passeports professionnels des bénéficiaires du dispositif ne permettrait de compiler les orientations professionnelles dans cette catégorie d'emploi qu'à compter de l'année 2020, lors de la mise en service d'un nouvel outil informatique. M. B... relève appel du jugement rendu le 19 mars 2021 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation des courriers des 17 mai et 8 juillet 2019 par lesquels la ministre des armées a refusé de modifier les orientations de son passeport et de suspendre son inscription des listes d'aptitude aux emplois réservés. Sur la régularité du jugement : 2. Aux termes de l'article L. 242-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, dans sa version applicable au litige : " I.-Sauf exceptions tirées de la nature des emplois auxquels le corps donne accès ou du faible nombre des postes mis au recrutement, dont la liste est fixée par décret en Conseil d'Etat, sont accessibles par la voie des emplois réservés : 1° Les corps de la fonction publique de l'Etat et de la fonction publique hospitalière classés en catégorie A, ou de niveau équivalent, pour les bénéficiaires mentionnés aux articles L. 241-2, L. 241-3 et L. 241-4 ; 2° Les corps de la fonction publique de l'Etat et de la fonction publique hospitalière classés en catégories B et C, ou de niveau équivalent, pour les bénéficiaires mentionnés au chapitre Ier du présent titre. / II.- Peuvent être recrutés par l'autorité territoriale conformément au a de l'article 38 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : 1° Dans les cadres d'emplois de la fonction publique territoriale de catégorie A, ou de niveau équivalent, les bénéficiaires mentionnés aux articles L. 241-2, L. 241-3 et L. 241-4 du présent code ; 2° Dans les cadres d'emplois de la fonction publique territoriale de catégories B et C, ou de niveau équivalent, les bénéficiaires mentionnés au chapitre Ier du présent titre. ". Aux termes de l'article L. 241-4 du même code : " Les emplois réservés sont également accessibles, sans condition de délai : (...) 2° Sans condition d'âge, aux enfants des personnes mentionnées aux articles 1er et 6 de la loi n° 94-488 du 11 juin 1994 relative aux rapatriés anciens membres des formations supplétives et assimilés ou victimes de la captivité en Algérie. ". 3. Ainsi qu'il a été dit au point 1, par son courrier du 17 mai 2019, le ministre des armées s'est borné à informer M. B... de ce qu'il était inscrit sur les listes d'aptitude aux emplois réservés pour une durée de cinq ans à compter du 16 mai 2019. Une telle lettre d'information ne constitue pas une décision faisant grief et n'est, dès lors, pas susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir. Par suite et pour ce motif, le tribunal administratif de Montpellier a pu sans entacher son jugement d'irrégularité, rejeter comme irrecevables les conclusions de M. B... tendant à l'annulation de ce courrier. Sur la recevabilité de la demande devant le tribunal présentée à l'encontre de la lettre du 8 juillet 2019 : 4. Aux termes de l'article L. 242-3 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, dans sa version applicable au litige alors en vigueur : " Le ministre de la défense, ou le ministre de l'intérieur pour les militaires de la gendarmerie nationale, inscrit par ordre alphabétique sur une ou plusieurs listes d'aptitude, pour une durée limitée, les candidats aux corps ou cadres d'emplois des fonctions publiques de l'Etat, territoriale et hospitalière. Les personnes mentionnées aux articles L. 241-2 à L. 241-4 bénéficient d'une durée d'inscription spécifique sur ces listes. / L'inscription du candidat sur la ou les listes d'aptitude est subordonnée à la reconnaissance de ses qualifications et acquis de l'expérience professionnelle. (...) ". Aux termes de l'article R. 242-4 du même code : " Pour les bénéficiaires (...) des articles L. 241-3 et L. 241-4, la reconnaissance des qualifications et acquis de l'expérience professionnelle s'effectue à partir d'un dossier, retraçant leurs qualifications et expériences professionnelles, examiné par l'Office national des anciens combattants et des victimes de guerre. ". Aux termes de l'article R. 242-7 du même code : " Le candidat dépose sa demande de recrutement au titre des emplois réservés auprès : 1° Du service territorialement compétent de l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre s'il s'agit d'un bénéficiaire mentionné à l'article R. 242-4 ; (...) ". Aux termes de l'article R. 242-8 du même code : " Le candidat doit : 1° Fournir les pièces exigées et notamment celles attestant de sa qualité d'ayant droit ou d'ayant cause ; 2° Obtenir un document intitulé passeport professionnel attestant de ses titres, diplômes et qualifications professionnelles (...). " Aux termes de l'article R. 242-10 du même code : " Les passeports professionnels mentionnent les domaines de compétences du candidat, ses qualifications professionnelles, le niveau détenu, les fonctions auxquelles il peut prétendre et tout autre renseignement utile pour le futur employeur. / Les modalités de qualification des candidats pour l'accès à chaque corps et cadre d'emploi sont définies après concertation avec les autorités administratives chargées du recrutement, dans le respect des dispositions statutaires. Ces modalités sont établies, en tant que de besoin, par spécialités, branches d'activité professionnelle ou emplois types. ". Et aux termes de l'article R. 242-11 du même code : " (...) L'inscription sur les listes d'aptitude est subordonnée au respect des conditions spécifiques de diplômes et d'aptitudes prévues pour l'exercice des fonctions afférentes à certains corps, cadres d'emplois ou emplois (...) ". 5. En l'espèce, selon les mentions contenues dans le passeport établi le 10 mai 2019 après entretien de M. B... auprès des services de l'office national des anciens combattants et victimes de guerre de l'Hérault, alors que l'intéressé est notamment titulaire d'un diplôme d'Etat d'ingénierie sociale obtenu en 2011, la rubrique concernant l'orientation préconisée compte-tenu de ses compétences et souhaits, fait état de plusieurs métiers relevant de la catégorie B. Il a toutefois été mentionné dans la rubrique précédente que " compte-tenu de ses expériences et de son niveau de qualification, M. B... est visé par les dispositions de l'article 26 de la loi du 13 juillet 2018 ouvrant droit à un emploi de catégorie A dans l'une des trois fonctions publiques ", afin de neutraliser l'impact de l'impossibilité technique de l'outil informatique qui ne permettait pas, à la date du passeport, de compiler les orientations professionnelles dans la catégorie d'emploi revendiquée par l'intéressé. Par suite, alors que l'élaboration des orientations du passeport professionnel d'un candidat à un emploi réservé constitue une mesure préparatoire à une décision portant sur le recrutement dans un emploi réservé et que M. B... n'établit ni qu'il ne serait pas inscrit sur les listes d'aptitude ni que celles-ci seraient établies par catégorie, le courrier du 8 juillet 2019 lui rappelant l'impossibilité de compiler les orientations professionnelles dans la catégorie d'emploi de niveau A, ne constitue pas une décision lui faisant grief. Si l'intéressé a demandé qu'à défaut, il soit procédé à la radiation provisoire de son inscription sur la liste des emplois réservés jusqu'à la mise en conformité de son passeport, aucun texte de nature législative ou réglementaire ne permet cependant d'accéder à une telle demande. Dans ces conditions, ainsi que l'a opposé le ministre en première instance, les conclusions dirigées à l'encontre du courrier du 8 juillet 2019 refusant de faire droit à la demande de M. B... de mise en conformité de son passeport professionnel avec l'article 26 de la loi du 13 juillet 2018 relative à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025 en ce qui concerne la catégorie A correspondant à ses diplômes et compétences, sont irrecevables. [0] 6. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande. Sur les frais liés au litige : 7. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que M. B... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. D E C I D E : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre des armées. Délibéré après l'audience du 6 juin 2023, à laquelle siégeaient : Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre, Mme Blin, présidente assesseure, M. Teulière, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 juin 2023. La rapporteure, A. Blin La présidente, A. Geslan-Demaret La greffière, M-M. Maillat La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. N°21TL03842 2
Cours administrative d'appel
Toulouse
CAA de BORDEAUX, 6ème chambre, 28/06/2023, 21BX02331, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 8 octobre 2019 par lequel le maire de Vic-en-Bigorre a prononcé son admission à la retraite pour invalidité sans lien avec le service, à compter du 1er novembre 2019, et l'a radiée des cadres à cette même date. Par un jugement n° 1902805 du 23 mars 2021, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire (non communiqué) enregistrés le 31 mai 2021 et le 31 mars 2023, Mme A..., représentée par Me Hirtzlin-Pinçon, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Pau du 23 mars 2021 ; 2°) d'ordonner, avant dire droit, qu'il soit procédé à un expertise médicale afin de déterminer l'origine de sa maladie, et si cette dernière est en lien avec le service ; 3°) d'annuler l'arrêté du 8 octobre 2019 par lequel le maire de Vic-en-Bigorre a prononcé son admission à la retraite pour invalidité sans lien avec le service, à compter du 1er novembre 2019, et l'a radiée des cadres à cette même date ; 4°) d'enjoindre à la commune de Vic-en-Bigorre de prendre une nouvelle décision déclarant l'imputabilité au service de sa mise à la retraite pour invalidité et de reconstituer sa carrière, en prenant en compte les arrêts de travail comme imputables au service, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à venir, et ce, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ; 5°) de mettre à la charge de la commune de Vic-en-Bigorre les frais d'expertise ; 6°) de mettre à la charge de la commune de Vic-en-Bigorre la somme de 2 500 euros HT en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi qu'aux dépens. Elle soutient que : - l'arrêté attaqué est entaché d'incompétence, la signature illisible ne permettant pas d'identifier l'identité de son auteur ; - il n'est pas motivé, faute de reprendre l'avis de la commission de réforme sans le discuter ; - il est entaché d'un vice de procédure dès lors que le maire de Vic-en-Bigorre n'a pas mis en œuvre la procédure permettant que la reconnaissance de l'imputabilité au service de son invalidité soit examinée ; la commission de réforme n'a pas tenu compte du certificat médical de son psychiatre, qui a été produit par courrier du 26 avril 2019 adressé à la commission de réforme ; - son invalidité est imputable au service. Par un mémoire en défense, enregistré le 1er mars 2023, la commune de Vic-en-Bigorre représentée par son maire en exercice et par Me Picard, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de Mme A... la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraites ; - le code des relations entre l'administration et le public ; - le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Caroline Gaillard, - et les conclusions de Mme Florence Madelaigue, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. Mme A..., adjointe technique principale de deuxième classe, employée par la commune de Vic-en-Bigorre, a été victime d'un accident reconnu imputable au service le 9 septembre 2003, puis a connu une période d'arrêt maladie et de reprise à temps partiel entre le 14 mars 2005 et le 11 février 2012, après que le comité médical départemental l'ait déclarée apte à la reprise du travail. A compter du 8 avril 2013, Mme A... a été placée en arrêts de maladie ordinaire successifs, avec alternance de reprise de poste, jusqu'au 12 janvier 2016. Le comité médical départemental s'est alors prononcé les 19 avril 2016, 8 novembre 2016 et 12 décembre 2017 en défaveur de l'octroi à Mme A... d'un congé de longue maladie, confirmé en ce sens par le comité médical supérieur réuni les 14 juin 2016, 31 janvier 2017 et 3 juillet 2018. Ce même comité départemental, après avoir fait procéder à une expertise supplémentaire le 21 février 2019, s'est prononcé le 22 mars 2019 pour une inaptitude totale et définitive de Mme A... à toutes fonctions et à la saisine de la commission de réforme pour mise à la retraite pour invalidité non imputable au service. Par un avis du 30 avril 2019, cette commission a adopté les mêmes conclusions. Par un arrêté du 8 octobre 2019 le maire de Vic-en-Bigorre a admis Mme A... à la retraite pour invalidité à compter du 1er novembre 2019 et l'a radiée des cadres. Mme A... a demandé au tribunal administratif de Pau l'annulation de cette décision. Elle relève appel du jugement par lequel le tribunal a rejeté sa demande. 2. En premier lieu, à l'appui de ses moyens tirés de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté du 8 octobre 2019, Mme A... ne se prévaut, devant la cour, d'aucun élément de droit ou de fait nouveau par rapport à son argumentation devant les premiers juges. Par suite, il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs pertinents du jugement attaqué. 3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " (...) doivent être motivées les décisions qui : (...) 4° Retirent ou abrogent une décision créatrice de droits (...) ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. " En application de ces dispositions, la décision qui, comme l'arrêté contesté, met fin avant son terme normal à la carrière d'un fonctionnaire, est au nombre de celles qui doivent être motivées. 4. L'arrêté portant admission à la retraite pour invalidité de Mme A... vise les textes législatifs et réglementaires applicables à sa situation, en particulier la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ainsi que l'avis du 30 avril 2019 de la commission de réforme départementale, favorable à la mise à la retraite de l'intéressée pour invalidité non imputable au service, ainsi que l'avis de la CNRACL du 2 octobre 2019, favorable à sa radiation des cadres à compter du 8 octobre 2019, dont l'intéressée a eu connaissance. Cet arrêté rappelle en outre que " Mme A... a épuisé ses droits à congé maladie et qu'elle est reconnue définitivement inapte à l'exercice de toute fonction ". La décision contestée comporte ainsi l'énoncé des motifs de droit et des considérations de fait qui en constituent le fondement et satisfait aux exigences de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation doit être écarté. 5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 31 du code des pensions civiles et militaires de retraites ; " La réalité des infirmités invoquées, la preuve de leur imputabilité au service, le taux d'invalidité qu'elles entraînent, l'incapacité permanente à l'exercice des fonctions sont appréciés par une commission de réforme selon des modalités qui sont fixées par un décret en Conseil d'Etat (...) ". Aux termes de l'article 30 du décret du 26 décembre 2003 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales : " Le fonctionnaire qui se trouve dans l'impossibilité définitive et absolue de continuer ses fonctions par suite de maladie, blessure ou infirmité grave dûment établie peut être admis à la retraite soit d'office, soit sur demande (...) ". Aux termes de l'article 31 du même décret : " Une commission de réforme est constituée dans chaque département pour apprécier la réalité des infirmités invoquées, la preuve de leur imputabilité au service, les conséquences et le taux d'invalidité qu'elles entraînent, l'incapacité permanente à l'exercice des fonctions. La commission de réforme compétente est celle du département où le fonctionnaire exerce ou a exercé, en dernier lieu, ses fonctions (...) Le pouvoir de décision appartient dans tous les cas à l'autorité qui a qualité pour procéder à la nomination, sous réserve de l'avis conforme de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (...) ". 6. Mme A... soutient que sa demande de reconnaissance d'imputabilité au service de sa maladie n'a pas été instruite par son employeur. Il ressort toutefois des pièces du dossier que Mme A... a été informée de la procédure de mise à la retraite pour invalidité mise en œuvre par son employeur en raison de " l'avis d'inaptitude définitive à toute fonction non imputable au service ", rendu par le comité médical départemental le 22 mars 2019. Il ressort encore des pièces du dossier que la requérante a directement soumis par courrier du 26 avril 2019 adressé directement non à son employeur comme le prévoit les textes, mais aux médecins de la commission de réforme statuant le 30 avril 2019, un certificat médical, établi le même jour par son médecin psychiatre afin que son invalidité soit reconnue imputable à son accident de service du 9 septembre 2003. Si Mme A... fait valoir que la commission n'aurait pas " pris en compte " ce certificat, elle n'allègue pas que cette instance, dont le procès-verbal mentionne qu'elle a pris connaissance des documents fournis par l'intéressée, n'en aurait pas eu communication avant de rendre son avis. Ainsi, la demande de reconnaissance d'imputabilité au service de la pathologie ayant conduit à la mise à la retraite pour invalidité de Mme A... a bien été soumise à la commission de réforme qui a émis un avis éclairé sur sa situation. Par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté contesté serait entaché d'un vice de procédure ne peut qu'être écarté. 7. En dernier lieu, la requérante soutient que son invalidité est imputable à son accident de service survenu le 9 septembre 2003 au cours duquel elle a chuté dans une fosse de vidange après que la grille de protection eut cédé. Toutefois, l'unique certificat médical de son médecin psychiatre, qu'elle produit à l'appui de sa demande, se borne à rappeler son état anxio-dépressif chronique réactionnel et conclut que " le caractère imputable au service n'a pas été suffisamment et correctement analysé sur le fond par les diverses expertises ". Ce document ne permet pas, à défaut d'éléments suffisamment circonstanciés motivant sa position concernant les carences qui seraient contenues dans les expertises déjà réalisées, de remettre en cause les conclusions concordantes du docteur C..., expert psychiatre, et de l'avis de la commission de réforme au sein de laquelle siégeaient deux médecins, qui ont estimé que la pathologie dont elle souffre n'était pas imputable au service. Il s'ensuit qu'aucun élément du dossier ne permet de remettre en cause le bien-fondé de la décision du maire de Vic-en-Bigorre, prise au vu des avis de la commission de réforme, de la CNRACL et du comité médical départemental, tous trois convergents, quant à l'inaptitude définitive de l'intéressée à l'exercice de toute fonction et au caractère non imputable au service de cette inaptitude. Par suite, le moyen tiré de l'erreur d'appréciation sera écarté. 8. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'ordonner une mesure d'expertise médicale, que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté contesté du 8 octobre 2019. Sa requête doit, dès lors, être rejetée en toutes ses conclusions, y compris celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A... une somme de 1500 euros à verser à la commune de Vic-en-Bigorre au titre des mêmes dispositions. DECIDE : Article 1er : : La requête de Mme A... est rejetée. Article 2 : Mme A... versera à la commune de Vic-en-Bigorre la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et à la commune de Vic-en-Bigorre. Délibéré après l'audience du 15 juin 2023 à laquelle siégeaient : Mme Florence Demurger, présidente, M. Frédéric Faïck, président-assesseur, Mme Caroline Gaillard, première conseillère, Rendu public par mise à disposition au greffe, le 28 juin 2023. La rapporteure, Caroline Gaillard La présidente, Florence Demurger La greffière, Catherine Jussy La République mande et ordonne au préfet des Hautes-Pyrénées en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21BX02331
Cours administrative d'appel
Bordeaux