Jurisprudence
La jurisprudence est l'ensemble des décisions rendues par les juridictions administratives, pendant une certaine période dans une matière, dans une branche ou dans l'ensemble du droit.
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CAA de DOUAI, 3e chambre - formation à 3, 22/11/2018, 16DA01350, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. C...F...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 21 juin 2013 par laquelle la directrice des ressources humaines de La Poste a refusé de reconnaître à sa chute survenue le 23 mai 2013 le caractère d'un accident de service. Par un jugement n°1305068 du 24 mai 2016, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 25 juillet 2016, M. C...F..., représenté par Me D...A..., demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler la décision de La Poste du 21 juin 2013 ; 3°) de mettre à la charge de La Poste la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. --------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n°84-16 du 11 janvier 1984 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Hervé Cassara, premier conseiller, - les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public, - et les observations de Me B...E...représentant la société anonyme La Poste. Considérant ce qui suit : 1. M. C...F...relève appel du jugement du 24 mai 2016 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa requête tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de la décision du 21 juin 2013 par laquelle la directrice des ressources humaines de la société anonyme La Poste (" La Poste ") a refusé de reconnaître à sa chute survenue le 23 mai 2013 le caractère d'un accident de service. 2. Aux termes de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat : " Le fonctionnaire en activité a droit : / (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident ; (...) ". 3. M. F...soutient que, le 23 mai 2013, alors qu'il s'apprêtait à entrer dans la plateforme industrielle du courrier du Nord pour prendre son service qui débutait à 14 h 30, il a fait une chute sur le parvis de cette plateforme vers 14 h, après avoir trébuché sur des dalles descellées de ce parvis, qu'il s'est, en conséquence de cette chute, blessé à la main droite, et qu'ainsi, cet accident doit être regardé comme imputable au service. 4. En premier lieu, il est constant que plusieurs dalles du parvis de la plateforme du courrier Nord étaient abîmées, ce qui a été attesté sur le registre du personnel le 6 mai 2013, et que des travaux de réfection étaient d'ailleurs programmés mais non encore réalisés à la date de l'accident, le 23 mai 2013. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que si personne n'a été témoin de la chute de M. F..., ainsi qu'il le reconnaît lui-même, aucune personne ne l'a non plus vu entrer dans les locaux de la plateforme du courrier Nord, pas même les agents de sécurité, à supposer qu'ils aient été présents à cet instant au poste de sécurité à l'entrée de la plateforme comme La Poste l'affirme sans l'établir, aucune attestation de ces agents n'étant produite. En troisième lieu, si M. F... relate qu'il s'est écoulé environ trente minutes entre la chute et le moment où la douleur est devenue suffisamment aigue pour qu'il en avertisse son supérieur afin d'être autorisé à se rendre à l'infirmerie, il ressort des pièces du dossier, notamment des pièces médicales produites par M.F..., qu'un tel délai, au demeurant bref, est compatible avec la survenance d'un oedème résultant d'une entorse du pouce à la suite d'une chute, sans même qu'il soit besoin de tenir compte de la circonstance, à la supposer établie, que M. F...aurait pris un traitement par antalgique de classe II le matin même de l'accident. En quatrième lieu, il est constant que l'infirmière de la plateforme Nord a suspecté une entorse sévère au pouce droit vers 15 h le 23 mai 2013, diagnostic qui sera confirmé vers 16 h 30, le même jour, par la clinique SOS mains à laquelle M. F... a été conduit, ce qui rend plausible la survenance d'une chute ayant entraîné ladite entorse peu de temps avant les premières constatations. Dès lors, eu égard aux circonstances particulières de temps et de lieu, et compte tenu de l'ensemble des pièces du dossier, l'entorse dont M. F... a été victime doit être regardée comme résultant d'une chute survenue sur le parvis de la plateforme du courrier Nord vers 14 h, le 24 mai 2013, ainsi qu'il le soutient. Par suite, cet accident est survenu à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, au sens des dispositions du 2° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 citées au point 2. 5. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner le moyen relatif à la régularité du jugement attaqué, M. F...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 21 juin 2013 par laquelle la directrice des ressources humaines de La Poste a refusé de reconnaître à sa chute survenue le 23 mai 2013 le caractère d'un accident de service. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M.F..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que La Poste demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de La Poste une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. F... et non compris dans les dépens. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement du 24 mai 2016 du tribunal administratif de Lille est annulé. Article 2 : La décision du 21 juin 2013 de la directrice des ressources humaines de La Poste est annulée. Article 3 : La Poste versera une somme de 1 500 euros à M. F...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Les conclusions de La Poste présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...F...et à la société anonyme La Poste. N°16DA001350 2
Cours administrative d'appel
Douai
Conseil d'État, 7ème - 2ème chambres réunies, 30/11/2018, 416753
Vu la procédure suivante : Mme B...A...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision du 11 septembre 2012 par laquelle le directeur du service des retraites de l'Etat a refusé de lui accorder une allocation temporaire d'invalidité. Par un jugement n° 1205499 du 7 avril 2016, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté cette demande. Par une ordonnance n° 16BX01880 du 7 décembre 2017, enregistrée le 22 décembre 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le président de la cour administrative d'appel de Bordeaux a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, le pourvoi présenté devant cette cour par MmeA.... Par ce pourvoi, enregistré le 8 juin 2016 au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux, un mémoire complémentaire et un nouveau mémoire, enregistrés les 16 février et 14 mars 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme A...demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Marc Firoud, maître des requêtes en service extraordinaire, - les conclusions de M. Gilles Pellissier, rapporteur public. La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à Me Le Prado, avocat de MmeA....1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que MmeA..., agent de constatation principale de 2ème classe des douanes, était affectée à un service de la direction générale des douanes intitulé " Paris spécial ", dont les agents sont amenés à intervenir sur l'ensemble du territoire métropolitain pour effectuer des missions temporaires ; qu'elle a été appelée, à compter de septembre 2009, à exercer une mission à Marseille, où elle s'est vu attribuer un studio dans une résidence proposant des logements provisoires aux fonctionnaires ; que, le dimanche 27 décembre 2009, alors qu'elle quittait, à l'issue d'une période de congé, son domicile personnel situé à Martel (Lot), pour regagner Marseille, où elle devait prendre son service à 8 h le lundi matin, elle a été victime d'une chute en se dirigeant vers son véhicule, qu'elle avait garé devant sa résidence ; qu'elle a été placée en arrêt de travail du 28 décembre 2009 au 30 juin 2011 ; qu'à la suite de la consolidation, à compter du 21 décembre 2011, des séquelles de ses blessures, Mme A...a demandé le bénéfice d'une allocation temporaire d'invalidité en vue de l'indemnisation des séquelles invalidantes de son accident ; que, par une décision du 11 septembre 2012, le directeur interrégional des douanes d'Ile-de-France l'a informée du refus du service des retraites de l'Etat de lui accorder le bénéfice de cette allocation, au motif que l'accident dont elle avait été victime ne pouvait être qualifié d'accident de service ; que Mme A...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler cette décision ; que, par un jugement du 7 avril 2016, contre lequel Mme A...se pourvoit en cassation, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté cette demande ; 2. Considérant qu'aux termes de l'article 65 de la loi du 10 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat : " Le fonctionnaire qui a été atteint d'une invalidité résultant d'un accident de service ayant entraîné une incapacité permanente d'au moins 10 % ou d'une maladie professionnelle peut prétendre à une allocation temporaire d'invalidité cumulable avec son traitement dont le montant est fixé à la fraction du traitement minimal de la grille mentionnée à l'article 15 du titre Ier du statut général, correspondant au pourcentage d'invalidité (...) " ; 3. Considérant qu'est réputé constituer un accident de trajet tout accident dont est victime un agent public qui se produit sur le parcours habituel entre le lieu où s'accomplit son travail et sa résidence et pendant la durée normale pour l'effectuer, sauf si un fait personnel de cet agent ou toute autre circonstance particulière est de nature à détacher l'accident du service ; qu'est également réputé constituer un accident de trajet, dans les mêmes conditions, tout accident se produisant sur le parcours habituel entre la résidence de l'agent et le lieu où il est hébergé provisoirement afin d'être à même d'exercer les fonctions qui lui sont attribuées ; 4. Considérant qu'il ressort des énonciations du jugement attaqué que, pour rejeter les conclusions dont il était saisi par MmeA..., le tribunal administratif de Toulouse s'est fondé sur la seule circonstance que son accident était survenu à l'occasion d'un trajet ayant pour destination son logement à Marseille et non directement les locaux professionnels où elle devait exercer ses fonctions, alors qu'il était soutenu devant lui qu'elle regagnait un logement où elle était hébergée provisoirement afin d'être à même d'assurer la mission temporaire qui lui avait été confiée ; qu'il a ainsi entaché son jugement d'erreur de droit ; que, par suite et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de son pourvoi, Mme A...est fondée à en demander l'annulation ; 5. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative et de régler l'affaire au fond ; 6. Considérant que, pour que soit reconnue l'existence d'un accident de trajet, il faut que le trajet du domicile au lieu de destination ait commencé ; que tel n'est pas le cas lorsque l'intéressé se trouve encore, lors de l'accident, à l'intérieur de son domicile ou de sa propriété ; 7. Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment des plans cadastraux versés par les parties, que la chute litigieuse s'est déroulée à l'intérieur de la propriété de Mme A... ; qu'ainsi qu'il vient d'être dit, il ne peut y avoir d'accident de trajet si l'intéressée se trouve encore à l'intérieur de son domicile ou de sa propriété ; que, par suite, Mme A...n'est pas fondée à soutenir que le directeur du service des retraites de l'Etat aurait entaché d'erreur de fait sa décision en lui refusant le bénéfice de l'allocation temporaire d'invalidité ; 8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions à fin d'annulation présentées par Mme A...doivent être rejetées ; 9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise, à ce titre, à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;D E C I D E : -------------- Article 1er : Le jugement du 7 avril 2016 du tribunal administratif de Toulouse est annulé. Article 2 : La demande présentée par Mme A...devant le tribunal administratif de Toulouse ainsi que ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme B...A...et au ministre de l'action et des comptes publics.ECLI:FR:CECHR:2018:416753.20181130
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 7ème - 2ème chambres réunies, 23/11/2018, 421016
Vu la procédure suivante : Par un mémoire, enregistré le 28 août 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, M. B...A...demande au Conseil d'Etat, en application de l'article 23-5 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 et à l'appui de son pourvoi tendant à l'annulation de l'arrêt n° 17BX02492 du 27 février 2018 de la cour administrative d'appel de Bordeaux, de renvoyer au Conseil constitutionnel la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution du deuxième alinéa de l'article 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ; - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Jean-Yves Ollier, maître des requêtes, - les conclusions de M. Gilles Pellissier, rapporteur public. La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Rousseau, Tapie, avocat de M.A.... Vu la note en délibéré, enregistrée le 14 novembre 2018, présentée par La Poste.Considérant ce qui suit : 1. Aux termes du premier alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : " Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé (...) à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat (...) ". Il résulte des dispositions de ce même article que le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux ; 2. Aux termes des dispositions de l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " Le fonctionnaire civil qui se trouve dans l'incapacité permanente de continuer ses fonctions en raison d'infirmités résultant de blessures ou de maladie contractées ou aggravées soit en service, soit en accomplissant un acte de dévouement dans un intérêt public, soit en exposant ses jours pour sauver la vie d'une ou plusieurs personnes et qui n'a pu être reclassé dans un autre corps en application de l'article 63 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précitée peut être radié des cadres par anticipation soit sur sa demande, soit d'office à l'expiration d'un délai de douze mois à compter de sa mise en congé si cette dernière a été prononcée en application des 2° et 3° de l'article 34 de la même loi ou à la fin du congé qui lui a été accordé en application du 4° du même article. / L'intéressé a droit à la pension rémunérant les services prévue au 2° du I de l'article L. 24 du présent code. Par dérogation à l'article L. 16 du même code, cette pension est revalorisée dans les conditions fixées à l'article L. 341-6 du code de la sécurité sociale ". Aux termes des dispositions du premier alinéa de l'article L. 28 du même code : " Le fonctionnaire civil radié des cadres dans les conditions prévues à l'article L. 27 a droit à une rente viagère d'invalidité cumulable, selon les modalités définies à l'article L. 30 ter, avec la pension rémunérant les services ". Aux termes des dispositions du deuxième alinéa du même article : " Le droit à cette rente est également ouvert au fonctionnaire retraité qui est atteint d'une maladie professionnelle dont l'imputabilité au service est reconnue par la commission de réforme postérieurement à la date de la radiation des cadres, dans les conditions définies à l'article L. 31 (...) " ; 3. Les dispositions précitées du deuxième alinéa de l'article L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite sont applicables au présent litige. Elles n'ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution par le Conseil Constitutionnel ; 4. Ces dispositions, qui ne comportent aucune restriction quant à l'origine des maladies professionnelles qu'elles mentionnent, ne sauraient avoir pour effet d'exclure du bénéfice du droit à une rente viagère d'invalidité les agents atteints d'infirmités résultant des séquelles d'un accident de service apparues tardivement et reconnues comme imputables au service postérieurement à la date de radiation des cadres. Par suite, la question des atteintes portées par ces dispositions, d'une part, aux principes d'égalité devant la loi et d'égalité de traitement entre fonctionnaires et, d'autre part, aux droits et garanties à caractère social consacrés au onzième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946, qui n'est pas nouvelle, ne présente pas de caractère sérieux ; 5. Il résulte de ce qui précède qu'il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée ;D E C I D E : -------------- Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par M.A.... Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. B...A..., à La Poste et au ministre de l'action et des comptes publics. Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel et au Premier ministre.ECLI:FR:CECHR:2018:421016.20181123
Conseil d'Etat
CAA de NANCY, 3ème chambre - formation à 3, 23/10/2018, 16NC02046, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du garde des sceaux, ministre de la justice du 8 juin 2006 prononçant son admission à la retraite pour invalidité en tant qu'il refuse de reconnaitre l'imputabilité de son invalidité au service, ensemble la décision implicite par laquelle le ministre a rejeté son recours gracieux du 31 décembre 2010, et de condamner l'Etat à réparer l'ensemble de ses préjudices pour un montant total de 440 581 euros, sauf à parfaire, cette somme étant assortie des intérêts de droit et de la capitalisation des intérêts. Par un jugement n° 1205762 du 7 juillet 2016, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique enregistrés les 9 septembre 2016, 17 octobre 2016 et 20 février 2017, M. A... B..., représenté par MeC..., demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 7 juillet 2016 ; 2°) d'annuler l'arrêté du garde des sceaux, ministre de la justice du 8 juin 2006 en tant qu'il a refusé de reconnaitre l'imputabilité de son invalidité au service, ensemble la décision implicite de rejet née du silence gardé par le ministre sur le recours gracieux formé le 31 décembre 2010 ; 3°) de condamner l'Etat à lui verser, à titre principal, une somme de 440 581 euros ou, à titre subsidiaire, celle de 250 000 euros, sauf à parfaire, en réparation de ses préjudices, assortie des intérêts au taux légal à compter du 31 décembre 2010 et de la capitalisation des intérêts échus ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - il ressort des termes mêmes de l'arrêté du 8 juin 2006 le maintenant en congé de longue durée pour une période de six mois à compter du 14 mars 2006 que celle-ci correspondait à l'ultime période de congé rétribué à laquelle il pouvait prétendre ; - en tout état de cause, l'agent peut toujours être placé en invalidité sans avoir préalablement épuisé ses droits à congés ; - en l'espèce, l'arrêté contesté a été pris à l'issue d'une procédure irrégulière dès lors que l'administration a omis de consulter la commission de réforme, en méconnaissance de l'article L. 31 du code des pensions civiles et militaires de retraites, et qu'il n'a jamais été invité à prendre connaissance de son dossier et à faire valoir ses observations en méconnaissance de l'article R. 49 du même code ; - le ministre ne pouvait refuser de le mettre à la retraite sur le fondement des articles L. 27 et L. 28 de ce code dès lors que son invalidité présente un lien direct et certain avec le service ; - il reste recevable à demander l'annulation de l'arrêté contesté en tant qu'il refuse de reconnaitre l'imputabilité de son invalidité au service, quand bien même il a été admis à la retraite à sa demande ; - la décision des chefs de la cour d'appel de Metz du 3 janvier 2005 ne fait pas obstacle à son recours dès lors que l'administration ne justifie pas de la notification de cette décision, laquelle est sans rapport avec son départ à la retraite pour invalidité ; - l'expiration du délai d'un an dont il dispose pour demander la révision de sa pension de retraite ne fait pas obstacle à ce qu'il obtienne réparation des préjudices résultant de l'illégalité de l'arrêté prononçant son admission à la retraite sans reconnaître l'imputabilité au service de son invalidité ; - l'illégalité de cet arrêté lui a fait perdre le bénéfice de la pension d'invalidité à laquelle il pouvait prétendre et justifie à ce titre le versement d'une indemnité d'un montant de 280 908,54 euros ; - à supposer que l'invalidité ne présente pas de lien de causalité avec le service, il a au moins subi une perte de chance sérieuse que la commission de réforme admette l'imputabilité de son invalidité au service, évaluée au taux de 90 %, et justifiant une indemnisation de la pension d'invalidité dont il a été privé pour un montant de 250 000 euros ; - les articles L. 27 et L. 28 précités ne font pas obstacle à ce qu'il obtienne, même en l'absence de faute de l'administration, une indemnité complémentaire réparant les préjudices extrapatrimoniaux distincts de l'atteinte à son intégrité physique et qu'il a subis du fait de son invalidité imputable au service ; - il est donc en droit d'obtenir la réparation de ses souffrances évaluées à la somme de 60 000 euros et du préjudice moral résultant de l'interruption prématurée de sa carrière, évalué à la somme de 20 000 euros ; - les articles L. 27 et L. 28 précités ne font pas non plus obstacle à ce qu'il obtienne la réparation intégrale de son préjudice dès lors que son invalidité est imputable à une faute de l'administration ; - les décisions illégales prises à son encontre sont à l'origine de la dégradation de son état de santé et à un arrêt prématuré de son activité professionnelle en 2006, justifiant une indemnisation des traitements dont il a été privé jusqu'à l'âge normal de départ à la retraite en 2008 pour un montant évalué à 58 793 euros, et une réparation des pertes de pension de retraite pour un montant évalué à 20 880 euros. Par un mémoire en défense enregistré le 15 février 2017, la garde des sceaux, ministre de la justice conclut au rejet de la requête. Elle soutient que : - les conclusions à fin d'annulation sont irrecevables dès lors que le requérant n'a pas contesté la décision des chefs de la cour d'appel de Metz du 3 janvier 2005 refusant de reconnaitre l'imputabilité au service de sa pathologie ; - les moyens tirés de l'inexacte appréciation de la non imputabilité au service de son invalidité, du non respect de la procédure et de la méconnaissance du principe du contradictoire sont inopérants dès lors que le requérant a été mis à la retraite pour invalidité à sa demande ; - à titre subsidiaire, les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés. Les parties ont été informées, par application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office tiré de la tardiveté des conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 juin 2006 prononçant la mise à la retraite de M. B...pour invalidité sans reconnaître celle-ci comme imputable au service et de la décision implicite rejetant sa demande tendant au retrait de cet arrêté. En effet, si l'intéressé soutient n'avoir jamais reçu notification de l'arrêté précité mentionnant les voies et délais de recours, il en a eu connaissance au plus tard le 31 décembre 2010, date à laquelle il a notifié au ministre de la justice sa demande de retrait de l'arrêté du 8 juin 2006 en tant que cet arrêté ne reconnaît pas l'imputabilité au service de son invalidité. Par ailleurs, il ressort des termes de cette demande, notifiée au ministre le 31 décembre 2010, que l'intéressé n'ignorait pas qu'en l'absence de réponse dans un délai de deux mois, l'administration serait réputée avoir pris une décision implicite de rejet. Le requérant a saisi le tribunal administratif d'une demande d'annulation de ces deux décisions au-delà d'un délai raisonnable qui, sauf circonstances particulières dont il se prévaudrait, ne saurait excéder un an à compter de la date à laquelle il est établi qu'il a eu connaissance de l'acte contesté. Par un mémoire enregistré le 1er octobre 2018, M. B...a présenté ses observations sur le moyen relevé d'office. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Guérin-Lebacq, - les conclusions de Mme Kohler, rapporteur public, - et les observations de M.B.... Considérant ce qui suit : 1. Par un arrêté du 8 juin 2006, le ministre de la justice a admis M.B..., magistrat judiciaire du second grade, à faire valoir ses droits à la retraite à compter du 14 septembre 2006, pour invalidité non imputable au service. L'intéressé a demandé au ministre, le 31 décembre 2010, le retrait de cet arrêté en tant qu'il ne reconnaît pas son invalidité comme imputable au service, ainsi que l'indemnisation des préjudices résultant de sa maladie et de la privation de rente d'invalidité. Cette demande ayant été implicitement rejetée, M. B...a saisi le tribunal administratif de Strasbourg en vue d'obtenir l'annulation de l'arrêté du 8 juin 2006 en tant qu'il ne reconnaît pas l'imputabilité au service de son invalidité et celle de la décision implicite rejetant sa demande du 31 décembre 2010. Il a également demandé au tribunal administratif la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 159 673 euros en réparation des préjudices patrimoniaux et extrapatrimoniaux qu'il impute à son invalidité et la somme de 280 908 euros à raison de la privation illégale de rente d'invalidité. M. B...relève appel du jugement du 7 juillet 2016 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Sur les conclusions à fin d'annulation : 2. Aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative, dans sa version applicable au litige : " Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. " 3. Le principe de sécurité juridique, qui implique que ne puissent être remises en cause sans condition de délai des situations consolidées par l'effet du temps, fait obstacle à ce que puisse être contestée indéfiniment une décision administrative individuelle qui a été notifiée à son destinataire ou dont il est établi, à défaut d'une telle notification, que celui-ci a eu connaissance. En une telle hypothèse, si le non-respect de l'obligation d'informer l'intéressé sur les voies et les délais de recours, ou l'absence de preuve qu'une telle information a bien été fournie, ne permet pas que lui soient opposés les délais de recours fixés par le code de justice administrative, le destinataire de la décision ne peut exercer de recours juridictionnel au-delà d'un délai raisonnable. En règle générale et sauf circonstances particulières dont se prévaudrait le requérant, ce délai ne saurait, sous réserve de l'exercice de recours administratifs pour lesquels les textes prévoient des délais particuliers, excéder un an à compter de la date à laquelle une décision expresse lui a été notifiée ou de la date à laquelle il est établi qu'il en a eu connaissance. Cette règle, qui a pour seul objet de borner dans le temps les conséquences de la sanction attachée au défaut de mention des voies et délais de recours, ne porte pas atteinte à la substance du droit au recours mais tend seulement à éviter que son exercice, au-delà d'un délai raisonnable, ne mette en péril la stabilité des situations juridiques et la bonne administration de la justice, en exposant les défendeurs potentiels à des recours excessivement tardifs. Il appartient dès lors au juge administratif d'en faire application au litige dont il est saisi, quelle que soit la date des faits qui lui ont donné naissance. 4. Si M. B...soutient n'avoir jamais reçu notification de l'arrêté du 8 juin 2006 avec l'indication des voies et délais de recours, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé a nécessairement eu connaissance de cet arrêté au plus tard le 31 décembre 2010, date à laquelle il a notifié au ministre de la justice une demande de retrait de cet arrêté en tant qu'il ne reconnaît pas l'imputabilité au service de son invalidité. Il ressort des termes de cette demande que l'intéressé n'ignorait pas qu'en l'absence de réponse dans un délai de deux mois, l'administration serait réputée avoir pris une décision implicite de rejet. Le requérant a saisi le tribunal administratif de Strasbourg le 14 décembre 2012, plus d'un an après la date à laquelle il a eu connaissance de l'arrêté du 8 juin 2006 et de la décision rejetant sa demande de retrait de cet arrêté. M. B...ne se prévaut d'aucune circonstance particulière qui l'aurait empêché d'exercer son recours dans un délai raisonnable. La demande d'annulation partielle de l'arrêté du 8 juin 2006, ainsi que la demande d'annulation de la décision implicite rejetant sa demande de retrait, étaient donc tardives et, par suite, irrecevables lorsqu'elles ont été présentées devant le tribunal administratif de Strasbourg. 5. Il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses conclusions à fin d'annulation. Sur les conclusions à fin d'indemnisation : En ce qui concerne la légalité de l'arrêté du 8 juin 2006 : 6. En premier lieu, aux termes de l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " Le fonctionnaire civil qui se trouve dans l'incapacité permanente de continuer ses fonctions en raison d'infirmités résultant de blessures ou de maladie contractées ou aggravées (...) en service (...) et qui n'a pu être reclassé dans un autre corps en application de l'article 63 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précitée peut être radié des cadres par anticipation soit sur sa demande, soit d'office à l'expiration d'un délai de douze mois à compter de sa mise en congé si cette dernière a été prononcée en application des 2° et 3° de l'article 34 de la même loi ou à la fin du congé qui lui a été accordé en application du 4° du même article ". Le premier alinéa de l'article L. 28 du même code dispose que " Le fonctionnaire civil radié des cadres dans les conditions prévues à l'article L. 27 a droit à une rente viagère d'invalidité cumulable avec la pension rémunérant les services ". Aux termes de l'article L. 29 de ce code : " Le fonctionnaire civil qui se trouve dans l'incapacité permanente de continuer ses fonctions en raison d'une invalidité ne résultant pas du service et qui n'a pu être reclassé dans un autre corps en application de l'article 63 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précitée peut être radié des cadres par anticipation soit sur sa demande, soit d'office (...) ". Aux termes du premier alinéa de l'article L. 31 du même code : " La réalité des infirmités invoquées, la preuve de leur imputabilité au service, le taux d'invalidité qu'elles entraînent, l'incapacité permanente à l'exercice des fonctions sont appréciés par une commission de réforme selon des modalités qui sont fixées par un décret en Conseil d'Etat ". L'article 13 du décret du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires, qui s'applique aux magistrats de l'ordre judiciaire, dispose que " La commission de réforme est consultée notamment sur (...) 6. L'application des dispositions du code des pensions civiles et militaires de retraite ". L'article 19 du même décret précise que : " L'avis formulé en application du premier alinéa de l'article L. 31 du code des pensions civiles et militaires de retraite doit être accompagné de ses motifs ". 7. M. B...soutient que l'arrêté du 8 juin 2006 est irrégulier dès lors qu'il n'a pas été précédé d'un avis de la commission de réforme et que l'invalidité justifiant son admission à la retraite est imputable au service. Il demande une indemnisation à raison de la rente d'invalidité prévue à l'article L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite dont il estime avoir été irrégulièrement privé ou, à tout le moins, de la perte de chance sérieuse d'obtenir cette rente. 8. Il résulte des dispositions citées au point 6 qu'une radiation des cadres par anticipation prise en application de l'article L. 27 ou de l'article L. 29 du code des pensions civiles et militaires de retraite doit être précédée d'un avis de la commission de réforme, quand bien même cette radiation interviendrait sur demande du fonctionnaire ou du magistrat intéressé. Il est vrai qu'en application des dispositions de l'article 42 du décret du 14 mars 1986 relatif, notamment, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, le comité médical doit, lorsque l'agent sollicite l'octroi de l'ultime période de congé rétribué à laquelle il peut prétendre, se prononcer non seulement sur cette ultime période mais également sur l'aptitude ou l'inaptitude présumée de l'agent à reprendre ses fonctions à l'issue de cette dernière prolongation. Il est alors prévu que, si l'agent n'est pas présumé définitivement inapte, le comité médical devra se prononcer à l'expiration de la période de congé rémunéré sur son aptitude à reprendre ses fonctions, alors que, s'il est présumé définitivement inapte, son cas sera soumis à la commission de réforme. Ces dispositions ont ainsi pour objet d'éviter une consultation du comité médical au terme de la dernière période de congé rémunéré compte tenu de l'état de santé présenté par l'agent avant même le début de cette période. Pour autant, ces mêmes dispositions ne sauraient avoir pour effet de dispenser l'administration de consulter la commission de réforme lorsque l'agent est mis à la retraite pour invalidité avant d'avoir bénéficié de sa dernière période de congé rémunéré. 9. Le ministre de la justice ne conteste pas avoir admis M. B...à faire valoir ses droits à la retraite pour invalidité non imputable au service à compter du 14 septembre 2006, en application de l'article L. 29 du code des pensions civiles et militaires de retraite, sans avoir préalablement consulté la commission de réforme. La circonstance, invoquée par le ministre, que la déclaration d'accident de service présentée le 21 septembre 2004 par M. B... avait fait l'objet d'un refus d'imputabilité le 3 janvier 2005, plus d'un an avant son admission à la retraite, ne dispensait pas l'administration de saisir la commission de réforme afin qu'elle rende un avis dans les conditions fixées par l'article L. 31 du code précité. M. B... est donc fondé à soutenir que l'arrêté du 8 juin 2006 prononçant son admission à la retraite pour invalidité a été pris au terme d'une procédure irrégulière. 10. En second lieu, lorsqu'une personne sollicite le versement d'une indemnité en réparation du préjudice subi du fait de l'illégalité d'une décision entachée d'un vice de procédure, il appartient au juge de plein contentieux, saisi de moyens en ce sens, de déterminer, en premier lieu, la nature de cette irrégularité procédurale puis, en second lieu, de rechercher, en forgeant sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties, si, compte tenu de la nature et de la gravité de cette irrégularité procédurale, la même décision aurait pu être légalement prise dans le cadre d'une procédure régulière. 11. Il résulte de l'instruction que M. B...a été mis en cause dans une affaire judiciaire médiatisée qui a notamment conduit l'autorité compétente à lui infliger la sanction de mise à la retraite d'office puis à le radier des cadres le 18 juin 2002. A la suite de l'annulation de ces mesures, le requérant a été installé dans les fonctions de substitut du procureur près le tribunal de grande instance de Metz le 12 janvier 2004. L'intéressé, placé en congé de maladie puis de longue durée à compter de mars 2004, souffrait, lors de sa mise à la retraite pour invalidité en 2006, d'un syndrome anxio-dépressif qu'il impute aux difficultés professionnelles précitées. Si la commission de réforme a rendu un avis négatif le 15 novembre 2004 sur sa demande tendant à voir reconnaître l'imputabilité au service de son congé de longue durée, il ressort des certificats médicaux établis par un médecin psychiatre les 3 et 16 juin 2005 et le 12 juillet 2007 que M. B...a subi un effondrement psychologique à la suite de sa mise en cause dans l'affaire judiciaire précitée, caractérisé par un tableau anxio-dépressif sévère avec des idées de passage à l'acte, des conduites phobiques avérées, des bouffées d'angoisse très déstabilisantes et une aversion pathologique pour le cadre professionnel judiciaire. Appelé à donner son avis sur le renouvellement du congé de longue durée de M. B..., le médecin expert du comité médical indique, dans son rapport du 21 avril 2006, que l'intéressé a présenté, à la suite de ses difficultés professionnelles, un état dépressif anxieux majeur et des troubles psychiatriques marqués par des ruminations et par une grande agressivité à l'égard de sa hiérarchie. L'expert précise que ces troubles font obstacle à une reprise du travail, laquelle entraînerait selon lui une rechute dépressive, et donne un avis favorable au renouvellement du congé de longue durée jusqu'à la mise à la retraite du requérant pour " invalidité totale, absolue et définitive ". Si le médecin expert se borne à conclure que l'affection dont M. B... est atteint " semble devoir être imputable au service ", il n'est pas contesté que l'intéressé ne présentait aucune pathologie psychiatrique avant qu'il ne soit sanctionné et radié des cadres en 2002. Il ressort donc des éléments produits à l'instance, notamment les documents médicaux, que la maladie à l'origine de l'invalidité du requérant, et qui a fait obstacle à la poursuite de son activité, présente un lien direct et certain avec le service. Dans ces conditions, alors que la commission de réforme est chargée de se prononcer, notamment, sur la réalité des infirmités invoquées par l'agent et la preuve de leur imputabilité au service, il n'est pas établi que, si cette commission avait été consultée, la même décision admettant M. B... à la retraite sur le fondement de l'article L. 29 du code des pensions civiles et militaires de retraite aurait pu être légalement prise dans le cadre d'une procédure régulière. Par conséquent, le vice de procédure dont est entaché l'arrêté du 8 juin 2006 est de nature, en l'espèce, à ouvrir droit à réparation du préjudice résultant selon M. B...de la décision du ministre de la justice refusant de reconnaître son invalidité comme imputable au service. 12. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses conclusions indemnitaires. En ce qui concerne l'indemnisation du préjudice né de la privation de la rente d'invalidité : 13. Il résulte de l'article L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite que seuls les fonctionnaires civils et les magistrats radiés des cadres sur le fondement de l'article L. 27 du même code, c'est-à-dire en raison d'une incapacité permanente imputable au service, peuvent percevoir une rente viagère d'invalidité. Par ailleurs, en vertu des dispositions des articles R. 4 et R. 65 du même code, l'administration gestionnaire spécifie, dans l'acte de radiation des cadres, les circonstances susceptibles d'ouvrir le droit à pension ainsi que les dispositions légales invoquées au soutien de cette décision et propose les bases de liquidation de la pension ainsi que celles, le cas échéant, de la rente viagère d'invalidité au ministre du budget, qui effectue ensuite les opérations de liquidation et concède par arrêté la pension et la rente. Si, en cas de proposition d'octroi d'une rente viagère par l'administration gestionnaire, le ministre du budget n'est pas tenu par les énonciations de l'arrêté de radiation et les propositions de bases de liquidation, en revanche, le fait que l'arrêté de radiation des cadres ne soit pas pris sur le fondement de l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite fait obstacle à ce qu'il puisse, en l'absence de proposition en ce sens de l'administration gestionnaire, concéder une rente viagère d'invalidité. Dès lors que le refus de l'administration gestionnaire de radier le fonctionnaire sur le fondement de l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite fait obstacle à l'attribution d'une rente viagère d'invalidité, l'intéressé peut se prévaloir de l'illégalité fautive, dans cette mesure, de l'arrêté de radiation au soutien de conclusions indemnitaires tendant à l'indemnisation du préjudice né de la privation de cette rente. 14. En application de l'article L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite, le montant de la rente d'invalidité est fixé à la fraction du traitement de base défini à l'article L. 15 du même code, cette fraction étant égale au pourcentage d'invalidité. L'article L. 15 prévoit que le traitement de base est celui afférent à l'indice correspondant à l'emploi, grade, classe et échelon effectivement détenus depuis six mois au moins par l'agent au moment de la cessation des services. L'article L. 28 précise que si le montant de ce traitement de base dépasse un montant correspondant à la valeur de l'indice net majoré 681 au 1er janvier 2004, la fraction dépassant cette limite n'est comptée que pour le tiers. Ce même article prévoit encore que " la rente d'invalidité ajoutée à la pension ne peut faire bénéficier le titulaire d'émoluments totaux supérieurs aux émoluments de base visés à l'article L. 15 ". 15. Il résulte de l'instruction que M. B...détenait au moment de la cessation de son service l'indice net majoré 820 qui, compte tenu de la valeur annuelle du point d'indice majoré égale à 53,9795 euros en 2006, correspond à un traitement de base de 44 263,19 euros. Ce montant dépasse toutefois celui correspondant à la valeur de l'indice net majoré 681 au 1er janvier 2004, soit 36 760,04 euros. Il convient donc de prendre en compte, outre la somme de 36 760,04 euros, le tiers de la fraction correspondant à la différence entre cette dernière somme et celle de 44 263,19 euros, soit 2 501,05 euros, pour retenir un traitement de base annuel de 39 261,09 euros. 16. Il ressort de l'avis rendu par le comité médical le 11 mai 2006 sur le renouvellement du congé de longue durée de M. B... que celui-ci présente un taux d'invalidité de 46 %, lequel n'est pas contesté par l'administration. Appliqué au traitement de base de 39 261,09 euros, ce taux permet d'envisager une rente d'invalidité d'un montant de 18 060,10 euros. M. B...percevant une pension de retraite d'un montant de 31 495,03 euros, le montant de la rente d'invalidité ajoutée à cette pension, soit 49 555,13 euros, serait supérieur au traitement de base perçu par l'intéressé lorsqu'il était en activité, soit 44 263,19 euros. Le montant de la rente doit donc être ramené à 12 768,16 euros afin que le montant cumulé de la pension de retraite et de la rente d'invalidité ne dépasse pas celui du traitement de base que percevait le requérant. 17. L'espérance de vie de M.B..., né le 6 septembre 1947 et âgé de 59 ans lors de son départ à la retraite, peut être évaluée au regard des données statistiques publiées par l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE). D'après ces données statistiques, un homme âgé de 60 ans en 2005 avait une espérance de vie de 21,4 ans. Sur cette base, il y a donc lieu d'évaluer le montant de la rente dont le requérant a été irrégulièrement privé à la somme de 273 238,62 euros. En ce qui concerne l'indemnisation des autres préjudices invoqués par M.B... : 18. En premier lieu, la rente d'invalidité doit être regardée, eu égard à son mode de calcul et aux conditions posées à son octroi, comme ayant pour objet de réparer les pertes de revenus et l'incidence professionnelle résultant de l'incapacité physique causée par un accident de service ou une maladie professionnelle. Les dispositions des articles L. 27 et L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite, qui instituent ces prestations, déterminent forfaitairement la réparation à laquelle les agents concernés peuvent prétendre au titre de ces chefs de préjudice, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions. Elles ne font en revanche pas obstacle à ce que l'agent qui subit, du fait de l'invalidité ou de la maladie, des préjudices patrimoniaux d'une autre nature ou des préjudices personnels, obtienne de la personne publique qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice. 19. Il résulte de ce qui a été dit au point 11 que l'invalidité de M. B...est imputable au service. Il est donc fondé à demander la réparation des préjudices personnels résultant de cette invalidité. Il sera fait une juste appréciation des souffrances subies par le requérant et de son préjudice moral en lui allouant la somme de 10 000 euros à ce titre. 20. En second lieu, la décision du ministre de la justice du 17 juin 2002 infligeant la sanction de mise à la retraite d'office de M. B...et le décret du Président de la République du 18 juin 2002 le radiant des cadres ont été annulés par une décision du Conseil d'Etat n° 248242 du 20 juin 2003 au motif notamment du caractère manifestement disproportionné de la sanction. Par une décision n° 264005 du 23 mars 2005, le Conseil d'Etat a annulé la décision du ministre de la justice du 5 septembre 2003 prononçant à l'encontre de l'intéressé un abaissement d'échelon à titre disciplinaire au motif que cette sanction était insuffisamment motivée. Invoquant le caractère irrégulier des sanctions précitées auxquelles il impute la dégradation de son état de santé, M. B... demande l'indemnisation des pertes de revenus et de pensions de retraite qu'il estime avoir subis à raison de la cessation prématurée de son activité professionnelle en 2006, avant d'avoir atteint la limite d'âge. Il résulte cependant de ce qui a été dit plus haut que l'intéressé est indemnisé par le présent arrêt pour avoir été illégalement privé d'une rente d'invalidité. Cette rente ayant pour objet de réparer les pertes de revenus et l'incidence professionnelle consécutifs à l'invalidité, le requérant n'est donc pas fondé à demander une indemnisation supplémentaire à raison de ces mêmes préjudices patrimoniaux. 21. Il résulte de ce qui a été dit aux points 17 et 19 qu'il y a lieu de condamner l'Etat à verser la somme de 283 238,62 euros à M. B...en réparation de ses préjudices. Sur les intérêts et la capitalisation des intérêts : 22. M. B...a droit aux intérêts au taux légal à compter du 31 décembre 2010, date de réception de sa demande d'indemnisation par l'administration. 23. La capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond. Toutefois, cette demande ne prend effet au plus tôt qu'à la date à laquelle elle a été enregistrée et pourvu qu'à cette date, il s'agisse d'intérêts dus au moins pour une année entière. La capitalisation des intérêts a été demandée le 14 décembre 2012 devant le tribunal administratif de Strasbourg. Il y a lieu de faire droit à cette demande à compter du 14 décembre 2012, date à laquelle était due, pour la première fois, une année d'intérêts, ainsi qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date. Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 24. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. B...et non compris dans les dépens. D E C I D E : Article 1er : L'Etat est condamné à verser à M. B...la somme de 283 238,62 euros avec les intérêts au taux légal à compter du 31 décembre 2010. Les intérêts échus à la date du 14 décembre 2012, puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date, seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts. Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Strasbourg n° 1205762 du 7 juillet 2016 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt. Article 3 : L'Etat versera à M. B...la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le surplus des conclusions de M. B...est rejeté. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et à la garde des sceaux, ministre de la justice. 2 N° 16NC02046
Cours administrative d'appel
Nancy
Conseil d'État, 5ème et 6ème chambres réunies, 09/11/2018, 414376
Vu la procédure suivante : Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Dijon de condamner le centre hospitalier Henri Dunant de La Charité-sur-Loire (Nièvre) à réparer les préjudices qu'elle estime avoir subis au cours de la période comprise entre le 15 juillet 2009 et le 28 février 2012 du fait de la méconnaissance des dispositions applicables aux agents qui, ayant épuisé leurs droits aux congés de maladie, sont définitivement inaptes à reprendre leur service, en lui versant des indemnités de 93 428,68 euros pour perte de rémunérations et de 15 000 euros pour troubles dans ses conditions d'existence. Par un jugement n° 1202207 du 11 avril 2013, le tribunal administratif a rejeté sa demande. Par un arrêt n° 13LY01393 du 4 novembre 2014, la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté l'appel formé par Mme B...contre ce jugement. Par une décision n° 386957 du 27 juin 2016, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a annulé cet arrêt et renvoyé l'affaire à la cour administrative d'appel de Lyon. Par un arrêt n° 16LYO2168 du 18 juillet 2017, la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté la requête de Mme B.... Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 18 septembre et 18 décembre 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme B... demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler cet arrêt ; 2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ; 3°) de mettre à la charge du centre hospitalier Henri Dunant une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code civil ; - la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ; - le décret n° 88-386 du 19 avril 1988 ; - le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 ; - l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Alain Seban, conseiller d'Etat, - les conclusions de M. Nicolas Polge, rapporteur public. La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Thouvenin, Coudray, Grevy, avocat de MmeB.... Vu la note en délibéré, enregistrée le 25 octobre 2018, présentée par Mme B... ; 1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que MmeB..., qui a été recrutée en 1980 par le centre hospitalier Henri Dunant en qualité de masseur kinésithérapeute et qui a souffert de diverses pathologies depuis l'année 2003, a été placée en position de disponibilité d'office, à compter du 15 juillet 2009, par une décision du 14 avril 2010 du directeur de cet établissement ; que cette décision a été annulée par un jugement du 28 février 2012 du tribunal administratif de Dijon, devenu définitif, au motif que la procédure suivie devant la commission de réforme n'avait pas été régulière ; que, par une décision du 27 septembre 2012, le directeur du centre hospitalier a de nouveau placé Mme B...en position de disponibilité d'office à compter du 15 juillet 2009 ; que l'intéressée a demandé au tribunal administratif de Dijon de condamner le centre hospitalier à lui verser des indemnités en réparation de pertes de rémunérations subies entre le 15 juillet 2009 et le 28 février 2012, valuées à un montant total de 93 428,68 euros, et de troubles dans ses conditions d'existence causés par cette privation de revenus, évalués à 15 000 euros ; que cette demande a été rejetée par un jugement du 11 avril 2013, confirmé en appel par un arrêt du 4 novembre 2014 de la cour administrative d'appel de Lyon ; que, à la suite de l'annulation de cet arrêt par une décision du Conseil d'Etat, statuant au contentieux du 27 juin 2016, la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté à nouveau l'appel de Mme B...par un arrêt du 18 juillet 2017, contre lequel l'intéressée se pourvoit en cassation ; 2. Considérant que la demande indemnitaire formée par Mme B...devant le tribunal administratif de Dijon devait être regardée comme tendant à la réparation des préjudices qu'avait entraînés pour elle, entre le 15 juillet 2009 et le 28 février 2012, la méconnaissance fautive par le centre hospitalier Henri Dunant des dispositions applicables aux agents qui, ayant épuisé leurs droits aux congés de maladie, sont définitivement inaptes à reprendre leur service ; qu'en se prévalant pour la première fois en appel des dispositions de l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière, dont l'article 13 prévoit le maintien pendant la durée de la procédure devant la commission de réforme des droits à rémunération dont l'agent disposait à la date à laquelle cette commission a été saisie, l'intéressée a soulevé, comme il lui était loisible de le faire, un moyen nouveau se rattachant à la cause juridique sur laquelle elle avait fondé sa demande de première instance ; qu'en retenant que ce moyen était constitutif d'une demande nouvelle présentée pour la première fois en appel et n'était, par suite, pas recevable, la cour administrative d'appel de Lyon a commis une erreur de droit qui doit entraîner l'annulation de son arrêt ; 3. Considérant qu'il incombe au Conseil d'Etat de régler l'affaire au fond, en application du second alinéa de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ; Sur les dispositions applicables : 4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière dans sa rédaction applicable au litige : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. (...) / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à sa mise à la retraite. (...) / Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de la maladie ou de l'accident est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales (...) " ; que les 3° et 4° du même article prévoient respectivement des congés de longue maladie d'une durée maximale de trois ans quand la maladie rend nécessaires un traitement et des soins prolongés et présente un caractère invalidant et de gravité confirmée et des congés de longue durée d'une durée maximale de cinq ans si le fonctionnaire est atteint de certaines affections ; 5. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 17 du décret du 19 avril 1988 relatif aux conditions d'aptitude physique et aux congés de maladie des agents de la fonction publique hospitalière, dans sa rédaction issue du décret du 27 novembre 2006, en vigueur jusqu'à l'intervention du décret du 5 octobre 2011 : " (...) Lorsqu'un fonctionnaire a obtenu pendant une période de douze mois consécutifs des congés de maladie d'une durée totale de douze mois, il ne peut, à l'expiration de sa dernière période de congé, reprendre son service qu'après l'avis favorable du comité médical. / Si l'avis du comité médical est défavorable, le fonctionnaire est soit mis en disponibilité, soit, s'il le demande, reclassé dans un autre emploi, soit, s'il est reconnu définitivement inapte à l'exercice de tout emploi, admis à la retraite après avis de la commission de réforme des agents des collectivités locales. Dans ce dernier cas, le paiement du demi-traitement est maintenu par l'établissement employeur, le cas échéant, jusqu'à la date de la décision portant admission à la retraite " ; 6. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes du dernier alinéa de l'article 30 du décret du 26 décembre 2003 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL) : " La mise en retraite d'office pour inaptitude définitive à l'exercice de l'emploi ne peut être prononcée qu'à l'expiration des congés de maladie, des congés de longue maladie et des congés de longue durée dont le fonctionnaire bénéficie en vertu des dispositions statutaires qui lui sont applicables (...) " ; qu'aux termes de l'article 31 du même décret : " Une commission de réforme est constituée dans chaque département pour apprécier la réalité des infirmités invoquées, la preuve de leur imputabilité au service, les conséquences et le taux d'invalidité qu'elles entraînent, l'incapacité permanente à l'exercice des fonctions. (...) / Le pouvoir de décision appartient dans tous les cas à l'autorité qui a qualité pour procéder à la nomination, sous réserve de l'avis conforme de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales " ; qu'il résulte des dispositions des articles 34 et 39 du même décret que le fonctionnaire mis à la retraite en raison d'une invalidité non imputable au service a droit à une pension déterminée en fonction des services qu'il a accomplis et du taux d'invalidité ; que l'article 59 du même décret détermine les formalités que l'employeur doit accomplir auprès de la Caisse des dépôts et consignations, préalablement à la date de radiation des cadres, afin de permettre la liquidation de la pension ; 7. Considérant, enfin, qu'il résulte des dispositions de l'article 13 de l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière que la demande d'inscription à l'ordre du jour de la commission de réforme est adressée par l'employeur au secrétariat de la commission et que celle-ci doit statuer dans un délai d'un mois, porté à deux mois lorsqu'elle fait procéder à une mesure d'instruction ; qu'aux termes du quatrième alinéa de cet article : " Le traitement auquel l'agent avait droit, avant épuisement des délais en cours à la date de saisie de la commission de réforme lui est maintenu durant les délais mentionnés et en tout état de cause jusqu'à l'issue de la procédure justifiant la saisie de la commission de réforme " ; 8. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées que lorsqu'un fonctionnaire hospitalier ayant épuisé ses droits aux congés de maladie, de longue maladie et longue durée se trouve définitivement inapte à l'exercice de tout emploi, il est admis à la retraite après avis de la commission de réforme ; que cette commission est saisie par l'employeur et se prononce dans un délai d'un mois, porté à deux mois si elle fait procéder à une mesure d'instruction ; que l'employeur doit, préalablement à la mise à la retraite, obtenir un avis conforme de la CNRACL et accomplir des formalités en vue de la liquidation de la pension ; que, jusqu'à la décision de mise à la retraite, le fonctionnaire bénéficie d'un plein traitement ou d'un demi-traitement selon que sa maladie est ou non imputable au service ; Sur les conditions dans lesquelles ces dispositions ont été mises en oeuvre à l'égard de MmeB... : 9. Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'à la suite d'un accident de service survenu le 31 octobre 2007, Mme B...a été placée à compter du 5 novembre 2007 en congé maladie en raison d'une affection regardée comme imputable au service ; que, par un avis du 25 mars 2010, la commission de réforme a estimé, d'une part, que l'intéressée était définitivement inapte au service et, d'autre part, qu'à compter du 15 juillet 2009, son état de santé n'était plus imputable à l'accident du 31 octobre 2007 ; que le directeur du centre hospitalier l'a alors placée, par une décision du 14 avril 2010, en disponibilité d'office à compter du 15 juillet 2009 ; que, le 30 septembre 2010, la commission de réforme a confirmé le caractère définitif de l'incapacité mais a sursis à statuer sur les conditions de la mise à la retraite pour invalidité dans l'attente des conclusions d'un expert ; que, par un jugement du 28 février 2012, le tribunal administratif de Dijon a annulé la décision du 14 avril 2010 en raison d'un vice de procédure ; que, par une décision du 27 septembre 2012, le directeur du centre hospitalier a placé à nouveau Mme B...en position de disponibilité d'office à compter du 15 juillet 2009 et l'a mise à la retraite d'office à compter du 1er avril 2010 ; qu'au vu du rapport déposé par l'expert le 5 décembre 2012, la commission de réforme a, par un avis du 11 avril 2013, confirmé que l'invalidité n'était pas imputable au service puis, par un avis du 10 avril 2014, s'est prononcée notamment sur le taux d'invalidité ; qu'à la suite d'un avis rendu le 15 mai 2014 par la CNRACL, le directeur du centre hospitalier a, par une décision du 4 mars 2015, prononcé la mise à la retraite de Mme B...pour invalidité à compter du 1er février 2014 puis, par deux décisions du 23 mars 2015, placé celle-ci en disponibilité d'office du 1er avril 2010 au 14 juillet 2012 et en " service non fait " du 14 juillet 2012 au 31 janvier 2014 ; que ces trois décisions ont donné lieu à une demande d'annulation et à une demande indemnitaire présentées par Mme B... devant le tribunal administratif, qui ne s'est pas prononcé à la date de la présente décision ; 10. Considérant que la circonstance que Mme B...n'a pas formé de recours pour excès de pouvoir contre la décision du 27 septembre 2012 par laquelle le directeur du centre hospitalier a réglé sa situation pour la période postérieure au 14 juillet 2009 ne lui interdit pas d'invoquer, à l'appui d'une demande indemnitaire, la méconnaissance par l'administration des dispositions statutaires qui lui étaient applicables ; qu'il suit de là que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon s'est fondé sur le caractère définitif de cette décision pour rejeter sa demande indemnitaire ; qu'il y a lieu pour le Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les moyens soulevés par l'intéressée à l'appui de cette demande, tant en première instance qu'en appel ; 11. Considérant, d'une part, qu'il n'est pas contesté que, comme la commission de réforme l'a estimé dans son avis du 25 mars 2010, Mme B...était, depuis le 15 juillet 2009, définitivement inapte à tout emploi en raison d'une affection qui ne pouvait être regardée comme imputable au service ; qu'elle se trouvait, à cette date, en congé de maladie depuis plus de douze mois et ne remplissait pas les conditions pour obtenir un congé de longue maladie ni un congé de longue durée ; que si elle ne pouvait, par suite, prétendre au maintien du plein traitement qui lui avait été versé jusqu'au 14 juillet 2009, elle tirait des dispositions de l'article 17 du décret du 19 avril 1988 citées au point 5 le droit de percevoir un demi-traitement jusqu'à l'intervention d'une décision la mettant à la retraite pour invalidité ; que si Mme B... se prévaut des dispositions du dernier alinéa de l'article 13 de l'arrêté du 4 août 2004 citées au point 7, qui prévoient le maintien, jusqu'à l'issue de la procédure, du traitement auquel l'agent avait droit lors de la saisine de la commission de réforme, ces dispositions n'ont pas pour objet, et ne sauraient d'ailleurs avoir légalement pour effet, de conférer aux agents définitivement inaptes en raison d'une maladie non imputable au service et ayant épuisé leurs droits à congé de maladie des droits supérieurs à ceux qu'ils tiennent des dispositions précitées du décret du 19 avril 1988 ; qu'ainsi, le centre hospitalier Henri Dunant a commis une faute de nature à engager sa responsabilité en ne versant pas à Mme B...un demi-traitement jusqu'à la date à laquelle elle aurait dû être admise à la retraite ; 12. Considérant, d'autre part, qu'à la suite de l'avis du 25 mars 2010, le centre hospitalier devait mener à bien, dans un délai raisonnable, la procédure de mise à la retraite pour invalidité, tout en accomplissant les formalités nécessaires à la liquidation de la pension prévue à l'article 39 du décret du 26 décembre 2003 ; qu'il résulte de l'instruction que la mise à la retraite exigeait un nouvel avis de la commission de réforme, qui devait notamment se prononcer sur le taux d'invalidité ; que si cette évaluation présentait des difficultés, liées notamment au fait que Mme B...était atteinte de plusieurs pathologies, si le comportement de l'intéressée, qui ne s'est pas rendue à deux convocations que l'expert désigné à la suite de l'avis de la commission de réforme du 30 septembre 2010 lui avait adressées, a contribué à allonger la procédure et s'il y avait lieu par ailleurs de recueillir l'avis conforme de la CNRACL, le fait que la mise à la retraite n'ait pas pu être effectuée, au plus tard le 1er mars 2011, révèle une faute de nature à engager la responsabilité du centre hospitalier, auquel il appartenait de veiller au bon déroulement de la procédure devant la commission de réforme ; 13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la mise en oeuvre des dispositions applicables devait conduire le centre hospitalier à verser à Mme B...un demi-traitement jusqu'à l'intervention, au plus tard le 1er mars 2011, d'une mise à la retraite pour invalidité ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que l'intéressée ait bénéficié d'un demi-traitement pour la période postérieure au 14 juillet 2009 ; que si la décision du 27 septembre 2012 a prononcé sa mise à la retraite à compter du 1er avril 2010, cette mesure, en l'absence d'accomplissement des formalités requises auprès de la CNRACL, ne lui a pas permis de percevoir une pension ; que la mise à la retraite n'a été prononcée dans des conditions régulières qu'à compter du 1er février 2014 ; qu'ainsi, les fautes commises ont entraîné des pertes de revenus correspondant, jusqu'au 1er mars 2011, à la moitié du traitement de l'intéressée et, à compter de cette date, au montant de la pension à laquelle elle pouvait prétendre ; que cette privation de revenus a entraîné des troubles dans ses conditions d'existence ; que, dès lors, Mme B... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande indemnitaire ; Sur le montant des indemnités dues à MmeB... : 14. Considérant que, dans le cadre du présent litige, Mme B...s'est bornée à demander la réparation des préjudices qu'elle a subis au cours de la période comprise entre le 15 juillet 2009 et le 28 février 2012 ; qu'elle peut prétendre, au titre de ses pertes de revenus, à une indemnité calculée sur la base d'un demi-traitement pour la période comprise entre le 15 juillet 2009 et le 1er mars 2011 et sur la base du montant de la pension qui lui a été allouée en 2014 pour la période comprise entre le 1er mars 2011 et le 28 février 2012, sous déduction des rémunérations qui ont pu lui être versées au titre de ces périodes, notamment à l'occasion de la régularisation effectuée le 6 mai 2015 ; qu'il y a lieu de renvoyer Mme B... devant l'administration en vue de la détermination du montant de cette indemnité ; qu'il sera fait par ailleurs une juste appréciation des troubles dans les conditions d'existence subis par l'intéressée en mettant à ce titre à la charge du centre hospitalier le versement d'une indemnité de 5 000 euros ; que le total des indemnités ne pourra excéder la somme de 61 000 euros que Mme B... demande dans le dernier état de ses conclusions ; 15. Considérant que les indemnités mises à la charge du centre hospitalier porteront intérêt au taux légal à compter du 12 juillet 2012, date de réception par le centre hospitalier de la réclamation préalable présentée par MmeB... ; que la capitalisation des intérêts a été demandée le 6 janvier 2015 ; qu'à cette date, il était dû au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande à cette date et à chaque échéance annuelle à compter de cette date ; Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 16. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du centre hospitalier Henri Dunant une somme de 8 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative pour les frais exposés par Mme B..., tant en première instance, qu'en appel et en cassation et non compris dans les dépens ; que les dispositions de cet article font obstacle à ce qu'une somme soit mise, à ce titre, à la charge de Mme B...qui n'est pas, dans ces instances, la partie perdante ; D E C I D E : -------------- Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon du 18 juillet 2017 est annulé. Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Dijon du 11 avril 2013 est annulé. Article 3 : Le centre hospitalier Henri Dunant est condamné à verser à MmeB..., d'une part, une indemnité pour perte de revenus calculée sur la base d'un demi-traitement pour la période comprise entre le 15 juillet 2009 et le 1er mars 2011 et sur la base du montant de la pension qui lui a été allouée en 2014 pour la période comprise entre le 1er mars 2011 et le 28 février 2012, sous déduction des rémunérations qui ont pu lui être versées au titre de ces périodes, et, d'autre part, une indemnité de 5 000 euros au titre des troubles qu'elle a subis dans ses conditions d'existence, le total des indemnités ne pouvant toutefois excéder 61 000 euros. Article 4 : La somme due par le centre hospitalier Henri Dunant au titre de ces indemnités portera intérêt au taux légal à compter du 12 juillet 2012. Les intérêts échus le 6 janvier 2015 seront capitalisés à cette date et à chaque échéance annuelle à compter de cette date. Article 5 : Le centre hospitalier Henri Dunant versera à Mme B...une somme de 8 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 6 : Le surplus des conclusions de la demande présentée par Mme B... devant le tribunal administratif de Dijon ainsi que les conclusions présentées par le centre hospitalier Henri Dunant au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés. Article 7 : La présente décision sera notifiée à Mme A...B...et au centre hospitalier Henri Dunant. Copie en sera adressée à la ministre des solidarités et de la santé.ECLI:FR:CECHR:2018:414376.20181109
Conseil d'Etat
CAA de PARIS, 2ème chambre, 23/10/2018, 17PA03908, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme E...B...a demandé au Tribunal administratif de Melun de condamner la commune de Villiers-Saint-Georges à lui verser les rémunérations non perçues depuis le 31 mai 2014 jusqu'à sa réintégration effective en réparation de son préjudice financier et à lui verser la somme de 26 800 euros à titre de dommages et intérêts, avec intérêts au taux légal à compter de sa demande préalable. Par un jugement n° 1507224/5 du 23 novembre 2017, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête enregistrée le 21 décembre 2017, Mme B..., représentée par Me A...F..., demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement n° 1507224/5 du 23 novembre 2017 du Tribunal administratif de Melun ; 2°) de condamner la commune de Villiers-Saint-Georges à lui verser la somme de 26 800 euros à titre de dommages et intérêts avec intérêts au taux légal à compter de sa demande préalable du 14 janvier 2015 et anatocisme ; 3°) de mettre à la charge de la commune de Villiers-Saint-Georges le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - sa demande devant le tribunal administratif n'était pas tardive ; les voies et délais de recours n'ayant à aucun moment été notifiés, elle était recevable à contester devant le tribunal le rejet implicite de sa réclamation préalable faite le 14 janvier 2015 ; - un agent public est en droit d'obtenir réparation des chefs de préjudice non concernés par les dispositions des articles L. 27 et L. 28 du code des pensions civiles et militaires, même en l'absence de faute de l'administration ; en conséquence, sur le fondement du rapport d'expertise, elle est en droit d'obtenir au titre du déficit fonctionnel temporaire (22 mois) une somme de 14 700 euros, au titre de l'A.I.P.P. (8%), une somme de 8 000 euros, au titre des souffrances endurées (2,5/7) une somme de 3 400 euros et au titre du préjudice esthétique (0,5/7) une somme de 700 euros. Par un mémoire enregistré le 13 avril 2018, la commune de Villiers-Saint-Georges, représentée par Me D...C...conclut, à titre principal au rejet de la requête et à la condamnation de Mme B... à lui verser la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et à tire subsidiaire, à ce que l'indemnisation accordée à Mme B... soit limitée à une somme de 2 179 euros. Elle soutient que : - la demande faite devant le tribunal administratif était bien tardive et irrecevable ; - l'atteinte à l'intégrité physique permanente n'est pas indemnisable ; - la déficience physique temporaire n'est probablement pas indemnisable ; - les indemnités demandées excèdent la réalité des préjudices. Par ordonnance du 18 avril 2018, la clôture d'instruction a été fixée au 14 mai 2018. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - le décret 85-603 du 10 juin 1985 ; - le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Appèche, - et les conclusions de M. Cheylan, rapporteur public. 1. Considérant que Mme B... relève appel du jugement n° 1507224/5 du 23 novembre 2017 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté, comme irrecevable, sa demande tendant à la condamnation de la commune de Villiers-Saint-Georges à lui verser les rémunérations non perçues depuis le 31 mai 2014 jusqu'à sa réintégration effective, en réparation de son préjudice financier, ainsi que la somme de 26 800 euros à titre de dommages et intérêts, assortie des intérêts au taux légal à compter de sa demande préalable ; Sur la régularité du jugement : 2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision et ce, dans les deux mois de la notification ou de la publication de la décision attaquée (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 421-2 du même code : " Sauf disposition législative ou réglementaire contraire, le silence gardé pendant plus de deux mois sur une réclamation par l'autorité compétente vaut décision de rejet. Les intéressés disposent, pour se pourvoir contre cette décision implicite, d'un délai de deux mois à compter du jour de l'expiration de la période mentionnée au premier alinéa. Néanmoins, lorsqu'une décision explicite de rejet intervient dans ce délai de deux mois, elle fait à nouveau courir le délai du pourvoi (...) " ; que l'article R. 421-3 dudit code précise : " Toutefois, l'intéressé n'est forclos qu'après un délai de deux mois à compter du jour de la notification d'une décision expresse de rejet : 1° En matière de plein contentieux ; (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 421-5 de ce code : " Les délais et voies de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours dans la notification de la décision " ; 3. Considérant qu'il est constant que Mme B... a saisi, le 12 mars 2010, la commune de Villiers-Saint-Georges d'une demande d'indemnisation des préjudices résultant de la maladie imputable au service dont elle était affectée, qu'elle estimait à 26 800 euros ; qu'à la suite de cette demande, une offre d'indemnisation, pour un montant sensiblement inférieur soit 2 100 euros a été faite par la commune, ce montant étant porté à 2 179 euros par un courrier ultérieur du 8 juin 2012 ; que des courriers ont été échangés en 2014 entre les assureurs respectifs de la requérante et de la commune de Villiers-Saint-Georges concernant certains chefs de préjudice ; qu'à supposer que les courriers susmentionnés, émanant de la commune ou de son assureur, puissent être regardés comme des décisions valant rejet de la demande indemnitaire présentée par Mme B... en 2010, il ne résulte pas de l'instruction que ces courriers aient été assortis de l'indication des voies et délais de recours ; que par suite, ces délais n'étaient pas opposables à Mme B... ; qu'à supposer même que le courrier du 14 janvier 2015, par lequel Mme B... a réitéré auprès de la commune sa demande indemnitaire, puisse être regardé comme un recours gracieux dirigé contre le rejet partiel de sa demande résultant implicitement des réponses susmentionnées de la commune ou de son assureur, et comme montrant que l'intéressée a eu connaissance, au plus tard à cette date, de ces décisions de rejet partiel, une telle circonstance est par elle-même sans incidence sur l'application des dispositions de l'article R. 421-5 du code de justice administrative, qui subordonnent l'opposabilité des délais de recours contentieux à la mention des voies et délais de recours dans la notification de la décision ; qu'à la date à laquelle elle a saisi le Tribunal administratif de Melun, le 10 septembre 2015, d'une demande tendant à la condamnation de la commune de Villiers-Saint-Georges à l'indemniser des préjudices qu'elle estimait avoir subis, Mme B... n'avait été destinataire d'aucune décision administrative expresse de refus d'indemnisation, assortie de la mention des voies et délais de recours ; que dans ces conditions, c'est en méconnaissance des dispositions susénoncées que le Tribunal administratif de Melun a rejeté cette demande comme tardive ; que par suite, Mme B... est fondée à soutenir que le jugement attaqué est entaché d'irrégularité et à en obtenir l'annulation ; 4. Considérant qu'il y a lieu pour la Cour d'évoquer et de statuer sur la demande présentée par Mme B... devant le Tribunal administratif de Melun et sur les autres conclusions de sa requête ; Sur les conclusions indemnitaires de Mme B... : 5. Considérant qu'en vertu des articles L. 27 et L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite, les fonctionnaires civils de l'Etat qui se trouvent dans l'incapacité permanente de continuer leurs fonctions en raison d'infirmités résultant de blessures ou de maladies contractées ou aggravées en service peuvent être radiés des cadres par anticipation et ont droit au versement d'une rente viagère d'invalidité cumulable avec la pension rémunérant les services ; que les articles 36 et 37 du décret du 26 décembre 2003 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL) prévoient, conformément aux prescriptions du II de l'article 119 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, des règles comparables au profit des agents relevant de cet organisme ; 6. Considérant que les dispositions qui déterminent forfaitairement la réparation à laquelle un fonctionnaire victime d'un accident de service ou atteint d'une maladie professionnelle peut prétendre, au titre de l'atteinte qu'il a subie dans son intégrité physique, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions, ne font cependant obstacle ni à ce que le fonctionnaire qui a enduré, du fait de l'accident ou de la maladie, des préjudices patrimoniaux d'une autre nature, des souffrances physiques ou morales et des préjudices esthétiques ou d'agrément, obtienne de la collectivité qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice, distincts de l'atteinte à l'intégrité physique, ni à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre la collectivité, dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette collectivité ou à l'état d'un ouvrage public dont l'entretien incombait à celle-ci ; 7. Considérant que MmeB..., née en 1949, recrutée en 2000 par la commune de Villiers-Saint-Georges, tout d'abord comme agent contractuel faisant fonction d'agent territorial spécialisé des écoles maternelles (ATSEM), puis titularisée en 2002 en tant qu'ATSEM, a rencontré, à compter du 29 décembre 2007, différents problèmes de santé, au niveau des membres supérieurs, déclarés imputables au service ; qu'elle a été placée de ce fait en congé pour maladie professionnelle sans discontinuité jusqu'au 31 octobre 2009, date de consolidation de son état et a été, à compter de cette date, admise à faire valoir ses droits à la retraite ; 8. Considérant, en premier lieu, qu'au vu de ses écritures produites tant devant le tribunal administratif que devant la Cour, Mme B... doit être regardée comme demandant la réparation des préjudices autres que ceux dont les agents publics du régime de retraite de la CNRACL, obtiennent l'indemnisation de manière forfaitaire en vertu des articles 36 et 37 du décret du 26 décembre 2003 susmentionné ; que l'indemnisation de l'atteinte à l'intégrité physique permanente étant assurée dans le cadre de ce régime forfaitaire, les conclusions présentées de ce chef par Mme B... ne peuvent qu'être rejetées ; 9. Considérant, en second lieu, que Mme B..., qui produit un rapport d'expertise établi par les docteurs Debièvre et Charon, mandatés respectivement par l'assureur de la requérante et par celui de la commune de Villiers-Saint-Georges, demande également la réparation, d'une part, des troubles dans les conditions d'existence qu'elle a subis entre 2007 et 2009 du fait d'un déficit fonctionnel temporaire physique, d'autre part, du préjudice correspondant aux souffrances endurées, et enfin d'un préjudice esthétique ; qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus, que Mme B... est en droit d'obtenir réparation au titre de ces chefs de préjudices ; 10. Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction que Mme B... a souffert d'un ténosynovite au niveau des coudes et des poignets droit et gauche, de douleurs invalidantes déclenchées par la supination et la flexion des poignets, et d'une tendinite calcifiante du sus-épineux de l'épaule droite avec fissuration ; que ce déficit fonctionnel temporaire physique a, durant la période susmentionnée où elle a été placée en congé de maladie, entrainé des troubles dans ses conditions d'existence ; 11. Considérant, d'autre part, que Mme B... a subi des douleurs imputables à sa maladie professionnelle évaluées à 2,5/7 par les médecins experts ; qu'elle est en droit d'obtenir réparation de ce chef de préjudice ainsi que du préjudice esthétique, qualifié de minime par les médecins experts, qui résulte d'une unique cicatrice d'arthroscopie au niveau de l'épaule droite ; 13. Considérant qu'il sera fait une juste appréciation de l'ensemble des préjudices indemnisables susdécrits en les évaluant, tous chefs de préjudices confondus, à la somme de 6 000 euros ; que l'indemnité d'un montant total de 6 000 euros mise à la charge de la commune de Villiers-Saint-Georges portera intérêt au taux légal à compter du 15 janvier 2015, date de réception par la commune de la demande préalable de Mme B... ; que les intérêts porteront eux mêmes intérêts à chaque échéance annuelle à compter de cette date. 14. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme B... est fondée à obtenir l'annulation du jugement attaqué et la condamnation de la commune de Villiers-Saint-Georges à lui verser la somme de 6 000 euros, majorée des intérêts légaux avec anatocisme, en réparation des préjudices qu'elle a subis ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Villiers-Saint-Georges une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'en revanche, les conclusions présentées par la commune sur le même fondement ne peuvent qu'être rejetées ; DECIDE : Article 1er : Le jugement n° 1507224/5 en date du 23 novembre 2017 du Tribunal administratif de Melun est annulé. Article 2 : La commune de Villiers-Saint-Georges versera à Mme B... une indemnité de 6 000 euros. Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 15 janvier 2015 et les intérêts seront capitalisés à chaque échéance annuelle à compter de cette date. Article 3 : La commune de Villiers-Saint-Georges versa à Mme B... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le surplus des conclusions présentées par Mme B... devant le tribunal administratif et devant la Cour est rejeté. Article 5 : Les conclusions de la commune de Villiers-Saint-Georges présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... B...et à la commune de Villiers-Saint-Georges. Délibéré après l'audience du 10 octobre 2018, à laquelle siégeaient : - Mme Brotons, président de chambre, - Mme Appèche, président assesseur, - Mme Jimenez, premier conseiller. Lu en audience publique, le 23 octobre 2018. Le rapporteur, S. APPECHELe président, I. BROTONS Le greffier, P. LIMMOIS La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 17PA03908
Cours administrative d'appel
Paris
CAA de LYON, 5ème chambre B - formation à 3, 22/10/2018, 16LY01158, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble : - d'une part, d'annuler l'arrêté du recteur de l'académie de Grenoble du 11 juillet 2014 en tant qu'il l'a admise à la retraite pour invalidité à compter du 4 octobre 2013 et la décision du 10 octobre 2014 par laquelle la même autorité a rejeté son recours gracieux dirigé contre l'arrêté du 11 juillet 2014 ; - d'autre part, de condamner l'État à lui verser une somme 21 090,20 euros. Par un jugement nos 1407395 - 1500431 du 3 février 2016, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté ces demandes. Procédure devant la cour Par une requête enregistrée le 1er avril 2016, présentée pour Mme A..., il est demandé à la cour : 1°) d'annuler ce jugement nos 1407395 - 1500431 du 3 février 2016 du tribunal administratif de Grenoble ; 2°) de prononcer la condamnation demandée et d'annuler les décisions susmentionnées ; 3°) d'enjoindre à l'administration de la rétablir dans ses droits dans les deux mois de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ; 4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - c'est à tort que les premiers juges ont considéré que les décisions prises par l'administration entre le 3 octobre 2013 et le 4 juillet 2014 étaient provisoires et présentaient un caractère conservatoire, alors que, par ces décisions d'autorisation d'absence et d'avancement de grade et d'échelon, l'administration s'est comportée en considérant qu'elle demeurait en position d'activité durant cette période, de sorte que la rétroactivité de l'arrêté du 11 juillet 2014 n'était pas nécessaire pour assurer la continuité de sa carrière ou procéder à la régularisation de sa situation ; - en raison de l'illégalité fautive de la décision du 11 juillet 2014, elle a subi un préjudice financier, sur la période d'octobre 2013 à juillet 2014, d'un montant de 16 090,20 euros ; elle a également subi des conséquences financières sur le montant de sa pension de retraite, du fait du placement en position de retraite à compter du 4 octobre 2013, alors qu'elle était titulaire d'un grade de classe normale 11ème échelon, à hauteur de 3 000 euros ; - à supposer même l'arrêté du 11 juillet 2014 légal, la responsabilité de l'administration doit être engagée à raison de l'incomplète exécution financière de ses propres décisions devenues définitives et créatrices de droit, dès lors qu'elle devait se trouver en position de plein traitement, à défaut de renouvellement de l'arrêté de placement en temps partiel après le 31 août 2013, alors qu'elle n'a perçu qu'un demi-traitement au cours de la période d'octobre 2013 à juillet 2014 ; - la responsabilité de l'administration doit être également engagée à raison d'un comportement fautif résultant de l'absence de placement en position de mise en disponibilité avec demi-traitement et de son placement dans une situation irrégulière en lui laissant croire que tel n'était pas le cas et en lui laissant également croire qu'elle percevrait un plein traitement d'octobre 2013 à juillet 2014 et qu'elle profiterait de la prise en compte des avancements dans le calcul de sa pension de retraite ; le préjudice financier doit être évalué à 16 090,20 euros et ses troubles dans les conditions d'existence évalués à 2 000 euros. Par un mémoire, enregistré le 14 septembre 2017, le ministre de l'éducation nationale conclut au rejet de la requête. Il soutient que les arguments développés par la requérante ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ; - le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Seillet, président assesseur, - les conclusions de M. Laval, rapporteur public ; Considérant ce qui suit : 1. Mme A..., professeur certifié d'anglais affectée au collège Danièle Fauchet à Loriol sur Drôme, a été placée en congé de maladie ordinaire à compter du 4 octobre 2012 et ce jusqu'à l'épuisement de ses droits, le 3 octobre 2013, sa demande de placement en position de congé de longue durée, présentée le 24 octobre 2012, ayant été rejetée. Par courrier du 23 septembre 2013, Mme A..., invitée par une lettre du rectorat de Grenoble du 19 septembre 2013 à choisir sa position à l'expiration de ses droits à congé de maladie ordinaire, a sollicité sa mise à la retraite pour invalidité. Après un avis du comité médical départemental du 7 janvier 2014 estimant que Mme A... était totalement et définitivement inapte à toute fonction, l'intéressée a été admise à la retraite pour invalidité à compter du 4 octobre 2013, date d'épuisement de ses droits à congés de maladie, par un arrêté du 11 juillet 2014 du recteur de l'académie de Grenoble. Après le rejet, le 10 octobre 2014, du recours gracieux qu'elle avait formé le 23 août 2014 contre la décision du 11 juillet 2014, en tant qu'elle fixait la date de sa mise à la retraite au 4 octobre 2013, Mme A... a saisi le tribunal administratif de Grenoble d'une première demande, aux fins d'annulation de l'arrêté du 11 juillet 2014, ensemble la décision de rejet de son recours gracieux. Elle a également adressé à l'administration une réclamation préalable, le 17 novembre 2014, aux fins d'indemnisation des préjudices qu'elle estimait avoir subis puis, à défaut de réponse à cette réclamation, elle a saisi le tribunal administratif de Grenoble d'une seconde demande aux fins de condamnation de l'État à lui verser une indemnité de 21 090,20 euros. Mme A... interjette appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté ces deux demandes. Sur la légalité de l'arrêté du 11 juillet 2014 : 2. Aux termes de l'article 27 du décret n° 86-442 du 14 mars 1986 susvisé relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires : " Lorsqu'un fonctionnaire a obtenu pendant une période de douze mois consécutifs des congés de maladie d'une durée totale de douze mois, il ne peut, à l'expiration de sa dernière période de congé, reprendre son service sans l'avis favorable du comité médical : en cas d'avis défavorable il est soit mis en disponibilité, soit reclassé dans un autre emploi, soit, s'il est reconnu définitivement inapte à l'exercice de tout emploi, admis à la retraite après avis de la commission de réforme. Le paiement du demi-traitement est maintenu, le cas échéant, jusqu'à la date de la décision de reprise de service, de reclassement, de mise en disponibilité ou d'admission à la retraite ". 3. Si les décisions administratives ne peuvent légalement disposer que pour l'avenir l'administration peut, en dérogation à cette règle, s'agissant des décisions relatives à la carrière des fonctionnaires, des militaires ou des magistrats, leur conférer une portée rétroactive dans la stricte mesure nécessaire pour assurer la continuité de la carrière de l'agent intéressé ou procéder à la régularisation de sa situation. 4. Il ressort des pièces du dossier, et notamment de l'avis émis par le comité médical départemental le 7 janvier 2014, estimant que Mme A... était totalement et définitivement inapte à toute fonction, que celle-ci ne pouvait être regardée comme apte a reprendre ses fonctions. L'administration n'a pu, dès lors, que constater l'inaptitude de l'intéressée à exercer ses fonctions à la date de prise d'effet de la décision de mise à la retraite contestée. Dès lors, elle était tenue de la placer dans la seule position régulière que prévoyait dans son cas le statut, c'est-à-dire de l'admettre à la retraite pour invalidité rétroactivement à la date du 4 octobre 2013. Mme A... ne peut, par suite, soutenir que l'administration aurait dû faire application des dispositions de l'article 45 du décret n° 85-986 du 16 septembre 1985 prévoyant une mise en disponibilité d'office. La seule circonstance que l'administration, qui a fait application des dispositions précitées de l'article 27 du décret du 14 mars 1986 pour maintenir le paiement d'un demi-traitement jusqu'à la date de sa mise à la retraite, a, durant cette période, à titre provisoire dans l'attente de la décision de mise à la retraite, pris des décisions d'autorisation d'absence et procédé à son évaluation n'est pas de nature à démontrer que l'administration avait entendu maintenir l'intéressée en position d'activité ni à faire obstacle à l'édiction d'une mesure de portée rétroactive. Sur les conclusions indemnitaires : 5. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit que ni l'arrêté du 11 juillet 2014 du recteur de l'académie de Grenoble, en tant qu'il a admis Mme A... à la retraite pour invalidité à compter du 4 octobre 2013, ni la décision du 10 octobre 2014 par laquelle la même autorité a rejeté son recours gracieux dirigé contre l'arrêté du 11 juillet 2014 ne sont entachés d'une illégalité fautive de nature à engager la responsabilité de l'État alors, au demeurant, qu'à supposer même établie une illégalité fautive desdites décisions, Mme A... n'établirait pas l'existence d'un lien de causalité certain et direct entre une telle illégalité et les préjudices qu'elle invoque, résultant du versement d'un demi-traitement durant la période comprise entre le 4 octobre 2013 et le 11 juillet 2014 ou de ce que le montant de sa pension de retraite a été calculé sur la base du grade qu'elle détenait depuis une durée suffisante pour sa prise en compte pour ce calcul. 6. En deuxième lieu, d'une part, la circonstance que, par un arrêté du 1er octobre 2012, Mme A... avait été placée en position d'activité à temps partiel jusqu'au 31 août 2013 n'est pas de nature à démontrer qu'après cette échéance l'administration était tenue de verser à cet agent, eu égard à sa position de congé de maladie, un plein traitement. D'autre part, le document intitulé " gestion individuelle - historique des congés ", établi le 25 avril 2014 et constituant un tableau récapitulatif des périodes de congés pris par Mme A... ou en cours à cette date, produit par la requérante, n'est pas de nature à révéler une décision de l'administration d'accorder à Mme A... un avantage financier correspondant au versement d'un plein traitement ni, par suite, l'existence d'un acte individuel créateur de droits, nonobstant la mention " PT " pour " plein traitement " figurant pour certaines périodes de congés, alors au demeurant que ledit tableau a été établi postérieurement aux périodes en cause, de sorte que Mme A... ne pourrait, en tout état de cause, invoquer une méconnaissance, à la date de versement de son traitement pour les périodes concernées, d'un acte créateur de droits antérieur. Dès lors, il ne résulte pas de l'instruction que l'administration aurait méconnu, de manière fautive, ses engagements en procédant au versement d'un demi-traitement à Mme A.... 7. En troisième et dernier lieu, il ne résulte pas de l'instruction que l'administration aurait placé Mme A... en situation irrégulière ni qu'elle lui aurait fait croire, comme le soutient la requérante, qu'elle percevrait un plein traitement. 8. Il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté ses demandes. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DÉCIDE : Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre de l'éducation nationale. Délibéré après l'audience du 1er octobre 2018 à laquelle siégeaient : M. Clot, président de chambre, M. Seillet, président assesseur, Mme Dèche, premier conseiller. Lu en audience publique, le 22 octobre 2018. 1 5 N° 16LY01158
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Lyon
CAA de PARIS, 4ème chambre, 19/11/2018, 16PA03897, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B...C...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 19 août 2013 par laquelle la directrice générale de l'office national des anciens combattants et des victimes de guerre a refusé de lui reconnaître la qualité de combattant. Par une ordonnance n° 1604619 du 16 novembre 2016, le vice-président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête et un mémoire enregistrés le 23 décembre 2016 et le 8 octobre 2017, M. C..., représenté par MeA..., demande à la Cour : 1°) d'annuler l'ordonnance du Tribunal administratif de Paris n° 1604619 du 23 décembre 2016 ; 2°) d'annuler la décision de la directrice générale de l'office national des anciens combattants et des victimes de guerre du 19 août 2013 ; 3°) d'enjoindre à l'office national des anciens combattants et des victimes de guerre de lui délivrer la carte du combattant, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à Me A...sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991. Il soutient que : - l'ordonnance a été prise en méconnaissance du droit au recours effectif garanti par l'article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, le premier juge ne lui ayant pas demandé de produire les justificatifs permettant d'apprécier le bien-fondé de sa demande ; - la décision attaquée est insuffisamment motivée ; - il remplit les conditions pour être qualifié de combattant. Par un mémoire en défense enregistré le 22 novembre 2017, l'Office national des anciens combattants et des victimes de guerre conclut au rejet de la requête. Il soutient que : - à titre principal, la demande de première instance était tardive ; - à titre subsidiaire, le moyen tiré de l'illégalité externe de la décision attaquée est nouveau en appel et, par suite, irrecevable ; - les autres moyens soulevés par M. C...ne sont pas fondés. M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris du 28 avril 2017. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, - le code de procédure civile, - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Hamon, - et les conclusions de Mme Oriol, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. M. C...fait appel de l'ordonnance du 16 novembre 2016 par laquelle le vice-président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 19 août 2013 par laquelle la directrice générale de l'Office national des anciens combattants et des victimes de guerre lui a refusé l'attribution de la carte du combattant. Sur la régularité de l'ordonnance attaquée : 2. Aux termes du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " Les présidents de tribunal administratif, (...) le vice-président du tribunal administratif de Paris (...) peuvent, par ordonnance : (...) / 7° Rejeter, après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire, les requêtes ne comportant que des moyens de légalité externe manifestement infondés, des moyens irrecevables, des moyens inopérants ou des moyens qui ne sont assortis que de faits manifestement insusceptibles de venir à leur soutien ou ne sont manifestement pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé.(...) ". M. C...ne conteste pas que la demande qu'il a présentée au Tribunal administratif de Paris, laquelle se bornait à invoquer, sans plus de précisions, quatre années de services dans l'armée française entre 1940 et 1944, n'était assortie d'aucune pièce justificative, et donc n'était manifestement pas assortie des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé. 3. Si M. C...invoque l'article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne relatif au droit à un recours effectif et à accéder à un tribunal impartial, selon lequel " Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable par un tribunal indépendant et impartial, établi préalablement par la loi. Toute personne a la possibilité de se faire conseiller, défendre et représenter ", il n'a nullement été privé d'exercer un recours effectif devant le juge compétent par le seul fait que ce recours a été rejeté à raison de son irrecevabilité. Sur la légalité de la décision attaquée : 4. Aux termes de l'article L. 253 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre : " Il est créé une carte de combattant qui est attribuée dans les conditions fixées aux articles R. 223 à R. 235 ". L'article R. 223 de ce code dispose que : " La carte du combattant prévue à l'article L. 253 est attribuée à toutes les personnes qui justifient de la qualité de combattant dans les conditions déterminées par les articles R. 224 à R. 229 " et son article R. 224 que " Sont considérés comme combattants : / (...) C- Pour les opérations effectuées après le 2 septembre 1939 : / (...) I.- Militaires / Les militaires des armées de terre, de mer et de l'air : / 1º) Qui ont appartenu pendant trois mois, consécutifs ou non, aux unités énumérées aux listes établies par le ministre de la défense nationale et, s'il y a lieu, par le ministre chargé de la France d'outre-mer ; pour le calcul de la durée d'appartenance, les services accomplis au titre des opérations comprises entre le 2 août 1914 et le 2 septembre 1939 se cumulent entre eux et avec ceux effectués au titre des opérations postérieures au 2 septembre 1939. D'autre part, sont accordées des bonifications afférentes soit à des opérations de combat limitativement désignées ou effectuées dans des conditions exceptionnellement dangereuses, soit à des situations personnelles, résultant du contrat d'engagement ou d'une action d'éclat homologuée par citation collective au titre d'une unité ou d'une fraction d'unité constituée. Ces bonifications ne devront pas excéder le coefficient six pour celles afférentes aux combats, ou la durée de dix jours pour celles afférentes aux situations personnelles. Leurs modalités d'application sont fixées par arrêtés des ministres intéressés ; 2º) Qui ont été évacués pour blessure reçue ou maladie contractée en service, alors qu'ils appartenaient aux unités énumérées aux listes susvisées, mais sans condition de durée de séjour dans ces unités ; 3º) Qui ont reçu une blessure de guerre, quelle que soit l'unité à laquelle ils ont appartenu, sans condition de durée de séjour dans cette unité ; 3º bis) Qui ont pris part pendant la campagne de 1940 à des opérations ayant permis de contenir ou de repousser l'ennemi, caractérisées autant par l'intensité des combats que par l'importance des forces engagées, sous réserve que les intéressés aient servi, à ce titre, quelle qu'en soit la durée, dans une unité combattante. Les lieux et les dates de ces opérations sont déterminés par arrêté du ministre chargé de la défense ; 4º) Qui ont été, soit détenus comme prisonniers de guerre pendant six mois en territoire occupé par l'ennemi, soit immatriculés dans un camp en territoire ennemi, sous réserve d'avoir appartenu, au moment de leur capture, sans condition de durée de séjour, à une unité combattante pendant la période où celle-ci avait cette qualité ; 5º) Qui ont été, soit détenus comme prisonniers de guerre pendant six mois en territoire occupé par l'ennemi, soit immatriculés dans un camp en territoire ennemi où ils ont été détenus pendant quatre-vingt-dix jours au moins, sous réserve d'avoir appartenu antérieurement à leur capture, ou postérieurement à leur détention, sans condition de durée de séjour, à une unité combattante, pendant la période où celle-ci avait cette qualité. Les durées de détention prévues aux alinéas 4º et 5º sont réduites, en ce qui concerne les combattants d'Indochine, par un arrêté conjoint du ministre des anciens combattants et victimes de guerre, du ministre d'Etat chargé de la défense nationale et du ministre chargé de la France d'outre-mer, dont les dispositions font l'objet de l'article A. 121 bis ; 6º) Qui, faits prisonniers, ont obtenu la médaille des évadés, conformément aux dispositions de l'article 3 de la loi du 30 octobre 1946 ; 7º) Qui, faits prisonniers, peuvent se prévaloir des dispositions du chapitre Ier du titre II relatives aux membres de la Résistance ayant servi dans les pays d'outre-mer ou ayant résisté dans les camps de prisonniers ou en territoires étrangers occupés par l'ennemi, ou ont fait l'objet de la part de l'ennemi, pour actes qualifiés de résistance, de mesures de représailles et notamment de conditions exceptionnelles de détention ; 8º) Qui, Alsaciens et Mosellans, sans avoir servi dans l'armée française, satisfont aux conditions qui sont déterminées par arrêté interministériel dont les dispositions font l'objet des articles A. 123-2 à A. 123-5 (...) ". 5. En premier lieu, il ressort de la décision attaquée du 19 août 2013 que la directrice de l'office national des anciens combattants et des victimes de guerre a cité les textes fondant sa décision, ainsi que les circonstances de fait qui ont conduit à son édiction. Le moyen tiré de son insuffisante motivation doit donc être écarté comme manquant en fait. 6. En second lieu, si M. C...soutient qu'il a droit à la carte du combattant sur le fondement des dispositions de l'article R. 224 précité du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, dès lors qu'il a servi dans une unité combattante des forces armées françaises pendant plus de trois mois avant la fin de la seconde guerre mondiale, il ressort des pièces du dossier, et notamment de l'attestation des services militaires de l'intéressé, que M. C...a servi en qualité d'appelé dans l'armée française du 10 octobre 1944 au 10 mars 1946. Le requérant n'établit pas par cette pièce, ni même ne soutient avoir servi dans l'une des unités figurant sur les listes établies par le ministre de la défense nationale et, s'il y a lieu, par le ministre chargé de la France d'outre-mer au sens des dispositions précitées. D'autre part, M. C...ne soutient ni même n'allègue qu'il se trouvait dans l'un des autres cas mentionnés à l'article R. 224 pouvant ouvrir droit à la carte du combattant. 7. Il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le vice-président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées. DECIDE : Article 1er : La requête de M. C...est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...C...et à la ministre des armées. Copie en sera adressée à l'Office national des anciens combattants et des victimes de guerre. Délibéré après l'audience du 5 novembre 2018, à laquelle siégeaient : - M. Even, président de chambre, - Mme Hamon, président assesseur, - Mme d'Argenlieu, premier conseiller. Lu en audience publique, le 19 novembre 2018. Le rapporteur, P. HAMONLe président, B. EVENLe greffier, I. BEDRLa République mande et ordonne à la ministre des armées, en ce qui la concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 16PA03897
Cours administrative d'appel
Paris
CAA de LYON, 3ème chambre - formation à 3, 13/11/2018, 17LY00272, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure M. C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 15 janvier 2014 par lequel le président du conseil régional de la région Rhône-Alpes l'a mis à la retraite d'office, en tant que cet arrêté ne reconnaît pas l'imputabilité au service de son invalidité et de mettre à la charge de la région Rhône-Alpes la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n° 1404448 du 25 novembre 2016, le tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande comme irrecevable. Procédure devant la cour Par une requête enregistrée le 23 janvier 2017, M. C..., représenté par Me A..., demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif du 25 novembre 2016 ; 2°) d'annuler l'arrêté du Président du Conseil régional Rhône-Alpes du 15 janvier 2014 en tant qu'il ne reconnaît pas l'imputabilité au service de son invalidité ; 3°) de mettre à la charge la Région Rhône-Alpes la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du Code de justice administrative. Il soutient que : * sa demande n'était pas tardive car il avait formé dans les délais du recours une demande d'aide juridictionnelle qui a prorogé ces délais et a déposé sa demande dans les deux mois qui ont suivi la notification de la décision du bureau d'aide juridictionnelle ; * l'arrêté est entaché de vices de procédure car la commission de réforme ne comprenait pas de médecin psychiatre en son sein lors de l'examen de son dossier et alors que sa dépression est liée à l'attitude de son administration ; son avis est insuffisamment motivé car il ne se prononce pas sur l'imputabilité au service de son syndrome réactionnel très sévère ; * l'arrêté est entaché d'une erreur dès lors que son invalidité résulte directement des conditions d'exercice de ses fonctions et qu'elle est imputable au service, à supposer même que des causes étrangères aient contribué à son état ; Par un mémoire en défense, enregistré le 26 avril 2018, la région Auvergne, Rhône-Alpes conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. C... la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que les moyens ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : * le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales ; * la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ; * la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 portant application de celle-ci ; * le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique : * le rapport de M. Pierre Thierry, premier conseiller, * les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public, * et les observations de Me A..., représentant M. C... et celles de Me D..., représentant la région Auvergne, Rhône-Alpes ; Considérant ce qui suit : 1. Par sa requête susvisée, M. C..., employé en qualité d'adjoint technique territorial de première classe depuis 1996 par la région Rhône-Alpes, relève appel du jugement du 25 novembre 2016 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté comme irrecevable sa demande d'annulation de l'arrêté du 15 janvier 2014 en tant que par celui-ci, le président de la région Rhône-Alpes a prononcé son admission à la retraite pour invalidité résultant d'une pathologie non imputable au service. Sur la régularité du jugement : 2. Aux termes de l'article 38 du décret du 19 décembre 1991 portant application de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique dans sa version applicable à l'espèce " Lorsqu'une action en justice doit être intentée avant l'expiration d'un délai devant la juridiction du premier degré, (...) l'action est réputée avoir été intentée dans le délai si la demande d'aide juridictionnelle s'y rapportant est adressée au bureau d'aide juridictionnelle avant l'expiration dudit délai et si la demande en justice est introduite dans un nouveau délai de même durée à compter : (...) c) De la date à laquelle la décision d'admission ou de rejet de la demande est devenue définitive ; ". Aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée ". 3. Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté attaqué a été notifié le 22 janvier 2014 à M. C.... Ainsi, la demande d'aide juridictionnelle qu'il a formée le 7 mars 2014, soit dans le délai ouvert par les dispositions de l'article R. 421-1 du code de justice administrative, a eu pour effet d'interrompre ce délai qui, en vertu des dispositions sus rappelées de l'article 38 du décret du 19 décembre 1991, n'a pu recommencer à courir, pour une nouvelle durée de deux mois, qu'à compter du jour où la décision du 24 mars 2014, qui lui a été notifiée le 7 avril 2014, par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle lui a accordé l'aide juridictionnelle partielle, a acquis un caractère définitif. Il suit de là que la demande de M. C..., enregistrée le 2 juin 2014 au greffe du tribunal administratif de Lyon n'était pas tardive. Il s'ensuit que M. C... est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Lyon a rejeté comme irrecevable la demande dont il l'avait saisi. Son jugement en date du 25 novembre 2016 doit, dès lors, être annulé. 4. Dans les circonstances de l'espèce il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. C.... Sur les conclusions à fin d'annulation : Sans qu'il soit besoin d'examiner l'ensemble des moyens de la demande : 5. Aux termes de l'article 36 du décret susvisé du 26 décembre 2003, dans sa version applicable à la date de la décision attaquée : " Le fonctionnaire qui a été mis dans l'impossibilité permanente de continuer ses fonctions en raison d'infirmités résultant de blessures ou de maladies contractées ou aggravées, soit en service, soit en accomplissant un acte de dévouement dans un intérêt public, soit en exposant ses jours pour sauver la vie d'une ou plusieurs personnes, peut être mis à la retraite par anticipation soit sur sa demande, soit d'office, à l'expiration des délais prévus au troisième alinéa de l'article 30 et a droit à la pension rémunérant les services prévue au 2° de l'article 7 et au 2° du I de l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite. ". L'article 37 du même décret dispose : " I. - Les fonctionnaires qui ont été mis à la retraite dans les conditions prévues à l'article 36 ci-dessus bénéficient d'une rente viagère d'invalidité cumulable avec la pension rémunérant les services prévus à l'article précédent. ". 6. Le droit pour un fonctionnaire territorial de bénéficier de la rente viagère d'invalidité prévue par ces dispositions est subordonné à la condition que les blessures ou maladies contractées ou aggravées en service aient été de nature à entraîner, à elles seules ou non, la mise à la retraite de l'intéressé. 7. Il ressort des pièces du dossier que M. C... a été affecté en 2005 au poste d'accueil et maintenance du lycée la Martinière Terreaux qui a fusionné l'année suivante avec le lycée Diderot et a bénéficié, à ce titre, d'une concession de logement par nécessité absolue de service. Il a, par la suite, été affecté en 2010 au lycée Jean Lurçat dans un emploi pour lequel il n'a plus bénéficié de ce logement. A la suite des troubles psychologiques qui se sont déclarés à partir de 2009, M. C... a été placé en congé maladie ordinaire en novembre 2011 en raison d'un état dépressif, puis en disponibilité d'office à compter de novembre 2012. L'invalidité provoquée par cet état dépressif a conduit à sa mise à la retraite par la décision attaquée du président de la région Auvergne, Rhône-Alpes. M. C..., qui ne conteste pas son inaptitude définitive à toute fonction, soutient que son invalidité est imputable au service. 8. M. C... soutient qu'à partir de 2006 ses relations avec une de ses collègues se sont dégradées ce qu'en l'absence de réaction de sa hiérarchie, il a vécu comme une situation de harcèlement moral et que le sentiment d'injustice qu'il en a ressenti a été aggravé par la circonstance que le bénéfice d'un logement de fonction pour nécessité absolue de service lui a été retiré lors de sa nouvelle affectation. 9. Dans un rapport du 17 septembre 2012 le docteur Sabatini, qui a examiné M. C... à la demande de l'administration, relève que ce dernier vit sa situation comme exclusivement liée à sa situation professionnelle, qu'il estime être victime de " mépris et harcèlement ", qu'" il parle inlassablement et de façon répétitive de la question du travail " et précise que " son psychisme est fixé sur le proviseur et sur l'injustice qu'il ressent du fait que son épouse n'a pas été affectée dans le même établissement que lui ". La région Auvergne, Rhône-Alpes venant aux droits de la région Rhône-Alpes, qui se borne à dénier tout lien entre la pathologie de M. C... et le service, ne fait valoir aucun élément qui permettrait de considérer que cette pathologie serait liée à des antécédents sans lien avec le service et évoluant pour leur propre compte. Il découle ainsi de l'ensemble de ces éléments, que l'invalidité de l'intéressé doit être regardée comme imputable au service, la circonstance que le harcèlement et l'injustice dont s'estime victime M. C... ne sont pas établis étant par ailleurs sans influence sur cette situation. 10. Il résulte de ce qui précède que M. C... est fondé à demander l'annulation de l'arrêté du 15 janvier 2014 en tant que par celui-ci, le président de la région Rhône-Alpes a prononcé son admission à la retraite pour invalidité résultant d'une pathologie non imputable au service. Sur les conclusions relatives aux frais irrépétibles : 11. Il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la région Auvergne, Rhône-Alpes une somme de 1 500 euros qu'elle paiera à M. C..., au titre des frais non compris dans les dépens que ce dernier a exposés. D E C I D E : Article 1er : Le jugement n° 1404448 du 25 novembre 2016, du tribunal administratif de Lyon et l'arrêté du 15 janvier 2014 de la région Auvergne, Rhône-Alpes en tant qu'il qualifie de non imputable au service l'invalidité de M. C... sont annulés. Article 2 : La région Auvergne, Rhône-Alpes versera à M. C... une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C..., et à la région Auvergne, Rhône-Alpes. Délibéré après l'audience du 16 octobre 2018 à laquelle siégeaient : M. Jean-François Alfonsi, président de chambre, Mme Virginie Chevalier-Aubert, président assesseur, M. Pierre Thierry premier conseiller. Lu en audience publique, le 13 novembre 2018. 5 N° 17LY00272
Cours administrative d'appel
Lyon
CAA de BORDEAUX, 2ème chambre - formation à 3, 06/11/2018, 16BX02420, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B...A...a demandé au tribunal administratif de la Martinique, d'une part, de condamner solidairement l'État et la collectivité territoriale de Martinique (CTM) à lui verser une somme de 373 180, 08 euros au titre du préjudice de carrière résultant de sa chute survenue le 4 mai 2001, de condamner l'État à lui verser une somme de 22 500 euros au titre du préjudice moral qu'il a subi en raison du blocage de son avancement et de condamner la CTM à lui verser la somme de 1 280 119,88 euros en réparation des autres préjudices qui lui a causés cette chute, d'autre part, de dire et juger qu'il a droit au bénéfice d'une allocation pour incapacité permanente partielle et non d'une allocation temporaire d'invalidité. Par un jugement n° 1300727 du 12 mai 2016, le tribunal administratif de la Martinique a condamné solidairement l'État et la CTM à lui verser une somme totale de 236 620 euros. Procédure devant la cour : Par un recours, enregistré le 20 juillet 2016 et un mémoire enregistré le 13 juillet 2017, le ministre de l'éducation nationale demande à la cour d'annuler ce jugement du tribunal administratif de la Martinique du 12 mai 2016 et de rejeter les demandes présentées par M. A... devant le tribunal administratif de la Martinique. Il soutient que - le tribunal a entaché son jugement d'une erreur de droit en s'abstenant de soulever d'office l'irrecevabilité de la demande présentée devant le tribunal administratif ; - le contentieux n'a pas été lié par une demande préalable ; - le préjudice subi par M. A...au titre de l'assistance par une tierce personne doit être ramené, avant indexation, à une somme annuelle fixée à 2 394 euros ; que M. A...ne justifie pas de la nécessité de procéder à l'aménagement de son domicile et que les préjudices extrapatrimoniaux de ce dernier doivent être ramenés à de plus justes proportions. Par des mémoires, enregistrés les 5 octobre 2016 et 8 août 2017, M.A..., représenté par MeD..., conclut à ce que le jugement attaqué soit réformé en tant qu'il n'a pas condamné l'État et la CTM à lui verser solidairement la somme totale de 922 310,22 euros en réparation de ses préjudices, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge solidaire de l'État et la CTM au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que, s'agissant d'un dommage de travaux publics, il n'était pas tenu de former une demande indemnitaire préalable, et qu'il justifie de la réalité et du quantum de ses préjudices. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code de l'éducation ; - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - le décret n° 85-924 du 30 août 1985 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M.E..., - les conclusions de M. Normand, rapporteur public, - et les observations de MeC..., substituant MeD..., représentant M.A.... Considérant ce qui suit : 1. M.A..., professeur certifié, né en 1954, a été victime, le 4 mai 2001, d'une chute dans un escalier du lycée Acajou I au Lamentin au sein duquel il était affecté. L'imputabilité au service de cet accident a été reconnue par une décision du recteur de l'académie de la Martinique du 17 juillet 2008. Le ministre de l'éducation nationale demande à la cour d'annuler le jugement du 12 mai 2016 par lequel le tribunal administratif de la Martinique a condamné solidairement l'État et la collectivité territoriale de Martinique (CTM) à verser à M. A...une somme totale de 236 620 euros en réparation de ses préjudices. Par la voie du recours incident, M. A...demande à la cour, à titre principal, de réformer le jugement attaqué en tant qu'il n'a pas condamné l'État et la CTM à lui verser solidairement la somme totale de 922 310,22 euros. Sur la régularité du jugement attaqué : 2. Aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative dans sa version alors en vigueur : " Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. ". 3. Il résulte de l'instruction et n'est pas contesté que la chute dont a été victime M. A... est imputable à un ouvrage public immobilier et caractérise ainsi un dommage de travaux publics. Par suite, le ministre de l'éducation nationale n'est pas fondé à soutenir que la demande présentée par M. A...devant le tribunal administratif était irrecevable, faute pour celui-ci d'avoir lié le contentieux à son égard en lui adressant une demande indemnitaire. Par voie de conséquence, le ministre n'est pas non plus fondé à soutenir que le tribunal administratif a méconnu son office en s'abstenant de soulever d'office l'irrecevabilité de la demande présentée par M. A...devant le tribunal administratif. Sur la responsabilité : 4. Ni la CTM ni l'État n'ont entendu critiquer le jugement attaqué en tant qu'il a retenu l'engagement solidaire de leur responsabilité dans l'accident dont à été victime M. A...à raison des défauts de conception et d'entretien qui affectaient l'ouvrage et des manquements du chef d'établissement à l'obligation d'assurer la sécurité des personnes qui, en vertu des dispositions de l'article 8 du décret n°85-924 du 30 août 1985, lui incombait. Sur les préjudices : En ce qui concerne le préjudice patrimonial : 5. Il résulte de l'instruction, notamment du rapport de l'expert judiciaire, d'une part, que M. A...demeure atteint de troubles sensitifs des membres supérieurs, d'une nette diminution de la force musculaire, d'une mobilité limitée et douloureuse de la colonne vertébrale tant à la flexion qu'à l'extension ainsi qu'aux inflexions latérales et d'une flexion antérieure très limitée, la distance sol-doigts étant de 60 centimètres, d'autre part, qu'il a besoin, à raison de ces handicaps, d'une assistance par une tierce personne à raison de trois heures par semaine. Dans ces conditions, il sera fait une juste appréciation des coûts correspondants en les évaluant, compte tenu d'une rémunération horaire fixée par les premiers juges à 14 euros augmentée des charges sociales, à la somme de 9 576 euros pour la période antérieure au présent arrêt puis à une somme de 42 881,32 euros après application de l'euro de rente prévu au barème publié à la Gazette du palais le 28 novembre 2017 pour la période postérieure à cet arrêt. 6. En outre, M. A...ne justifie ni de la nécessité d'une assistance par tierce personne plus conséquente, ni de celle d'adapter son logement à son handicap et d'acquérir un véhicule adapté à ce même handicap en se bornant à produire des attestations établies par son médecin traitant pour les besoins de la cause. En ce qui concerne les préjudices extrapatrimoniaux : 7. L'expert a évalué les souffrances endurées par M. A...à 5 sur 7. En outre, il résulte des pièces du dossier que certaines de ces souffrances présentent un caractère permanent ou quotidien. Dans ces conditions, il y a lieu de fixer ce chef de préjudice à la somme de 23 000 euros. 8. À la suite de la chute dont s'agit, M. A...a subi, en 2001, un déficit fonctionnel temporaire total d'une durée de quatre mois. Il a par ailleurs fait l'objet d'une intervention chirurgicale en novembre 2005, qui n'a malheureusement pas permis une amélioration de son état de santé. Enfin, l'expert judiciaire a évalué à 42 % le déficit fonctionnel permanent dont reste atteint M. A...à compter de la consolidation de son état de santé le 12 octobre 2014 et ce taux n'est plus contesté, en appel, par le ministre. Il sera fait une juste évaluation du préjudice résultant de ces différents déficits fonctionnels en l'évaluant à la somme globale de 85 000 euros. 9. Au vu des pièces produites à l'instance, notamment du rapport d'expertise qui qualifie ces préjudices d' " importants ", la fixation par les premiers juges des préjudices d'agrément et sexuel de M.A..., aux sommes, respectivement de 20 000 et 4 000 euros résulte de justes appréciations qu'il y a lieu de confirmer. 10. Enfin, si M. A...fait valoir que des antidépresseurs lui ont été prescrits à compter de l'année 2007, il n'établit pas que les premiers juges ont fait une inexacte appréciation de son préjudice moral directement lié à la chute susmentionnée en le fixant à la somme de 4 000 euros. 11. Il résulte de ce qui précède que la somme que l'État et la CTM ont été solidairement condamnés à verser à M. A...doit être ramenée à 188 457,32 euros. Cette somme devra être versée à M. A...dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt sans qu'il soit besoin d'assortir cette prescription d'une astreinte. Sur les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 12. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge solidaire de l'État et de la CTM la somme que demande M. A...au titre des frais qu'il a exposés pour l'instance. DÉCIDE : Article 1er : L'État et la collectivité territoriale de Martinique sont solidairement condamnés à verser à M. A...la somme de 188 457,32 euros en réparation de ses préjudices. Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de la Martinique du 12 mai 2016 est réformé en tant qu'il est contraire au présent arrêt. Article 3 : Le surplus des conclusions présentées par les parties est rejeté. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A..., au ministre de l'éducation nationale, à la collectivité territoriale de Martinique, et à la mutuelle générale de l'éducation nationale. Délibéré après l'audience du 25 septembre 2018 à laquelle siégeaient : M. Éric Rey-Bèthbéder, président, M. Didier Salvi, président-assesseur, M. Manuel Bourgeois, premier conseiller. Lu en audience publique, le 6 novembre 2018. Le rapporteur, Manuel E... Le président, Éric Rey-BèthbéderLe greffier, Cindy Virin La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. 2 N°16BX02420
Cours administrative d'appel
Bordeaux