Jurisprudence
La jurisprudence est l'ensemble des décisions rendues par les juridictions administratives, pendant une certaine période dans une matière, dans une branche ou dans l'ensemble du droit.
5916 résultats
Conseil d'État, 9ème et 10ème sous-sections réunies, 09/07/2009, 299743, Inédit au recueil Lebon
Vu l'ordonnance du 12 décembre 2006, enregistrée le 15 décembre 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par laquelle le président du tribunal administratif de Nice a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, la demande présentée à ce tribunal par Mme Christiane A veuve B, demeurant ... ; Vu la requête, enregistrée le 11 juillet 2003 au greffe du tribunal administratif de Nice, présentée par Mme Christiane A veuve B ; Mme A demande l'annulation de la décision du 10 juin 2003 du ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche rejetant sa demande de révision de sa pension de réversion en vue de l'attribution d'une rente viagère d'invalidité à la suite du décès de son mari, professeur des universités ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Cécile Raquin, Auditeur, - les conclusions de Mme Claire Legras, rapporteur public ; Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. Gilbert C, professeur des universités, est décédé, alors qu'il participait à un colloque scientifique à Autrans, des suites d'une crise cardiaque dans sa chambre d'hôtel au cours de la nuit du 18 octobre 2001 ; que sa veuve demande l'annulation de la décision du 10 juin 2003 du ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche rejetant sa demande de révision de sa pension de réversion en vue de l'attribution d'une rente viagère d'invalidité à la suite du décès de son mari ; Considérant qu'aux termes de l'article R. 38 du code des pensions civiles et militaires de retraite : Le bénéfice de la rente viagère d'invalidité prévue à l'article L. 28 du code est attribuable si la radiation des cadres ou le décès en activité surviennent avant la limite d'âge et sont imputables à des blessures ou maladies résultant par origine ou aggravation d'un fait précis et déterminé de service (...) ; que tout accident survenu lorsqu'un agent public est en mission doit être regardé comme intervenu pendant le temps du service, alors même qu'il serait survenu à l'occasion d'un acte de la vie courante, sauf s'il a eu lieu lors d'une interruption de cette mission pour des motifs personnels ; Considérant cependant qu'il y a lieu d'écarter toute présomption d'imputabilité entre le décès de M. C, mari de la requérante, survenu au cours de sa mission, et l'exécution du service ; qu'en effet, le bénéfice d'une rente viagère d'invalidité est subordonné à la condition que soit rapportée la preuve d'un lien direct de causalité entre l'exécution du service assumé par le fonctionnaire et l'accident ou la maladie dont il a été victime ; que si Mme A soutient que la crise cardiaque dont a été victime son mari était due au surmenage causé par des conditions de travail très lourdes, le dossier ne révèle aucun élément particulier permettant d'établir un lien direct entre l'exécution du service et l'accident ; que la circonstance que M. C, se trouvant seul dans sa chambre d'hôtel, n'aurait pu bénéficier des secours nécessaires ne peut, compte tenu des conditions ordinaires dans lesquelles s'est déroulée cette mission, faire regarder son décès comme imputable au service ; que par ailleurs, si, dans un avis du 11 juin 2002, la commission de réforme des Bouches-du-Rhône a estimé l'accident imputable au service, la position ainsi prise par cette commission ne s'imposait pas au ministre ; que par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le ministre lui a refusé, par une décision du 10 juin 2003, l'attribution d'une rente viagère d'invalidité à la suite du décès de son mari ;D E C I D E : -------------- Article 1er : La requête de Mme A est rejetée. Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme Christiane A, à la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 5ème sous-section jugeant seule, 10/07/2009, 306064, Inédit au recueil Lebon
Vu le pourvoi et le mémoire complémentaire, enregistrés les 30 mai et 20 août 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par le MINISTRE DE LA DEFENSE ; le MINISTRE DE LA DEFENSE demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler l'arrêt du 23 février 2007 de la cour régionale des pensions d'Aix-en-Provence en tant qu'il a accordé à M. A le bénéfice des dispositions de l'article L. 18 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre et a réformé sur ce point le jugement du 3 février 2000 du tribunal départemental des pensions des Bouches-du-Rhône ; 2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter les conclusions de l'appel formé par M. A contre le jugement du 3 février 2000 du tribunal départemental des pensions des Bouches-du-Rhône, en tant qu'elles tendent à ce que lui soit accordé le bénéfice de ces dispositions ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Jean de L'Hermite, Maître des Requêtes, - les conclusions de M. Jean-Philippe Thiellay, Rapporteur public ; Considérant qu'aux termes de l'article L. 18 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre : Les invalides que leurs infirmités rendent incapables de se mouvoir, de se conduire ou d'accomplir les actes essentiels à la vie ont droit à l'hospitalisation s'ils la réclament ... S'ils ne reçoivent pas ou s'ils cessent de recevoir cette hospitalisation et si, vivant chez eux, ils sont obligés de recourir d'une manière constante aux soins d'une tierce personne, ils ont droit, à titre d'allocation spéciale, à une majoration égale au quart de la pension ; que cette disposition ne peut être interprétée comme exigeant que l'aide d'un tiers soit nécessaire à l'accomplissement de la totalité des actes nécessaires à la vie ; qu'elle impose toutefois que l'aide d'une tierce personne soit indispensable ou bien pour l'accomplissement d'actes nombreux se répartissant tout au long de la journée, ou bien pour faire face à des manifestations imprévisibles des infirmités dont le pensionné est atteint, soit à des soins dont l'accomplissement ne peut être subordonné à un horaire préétabli, et dont l'absence mettrait sérieusement en danger l'intégrité physique ou la vie de l'intéressé ; Considérant que pour reconnaître le droit au bénéfice de ces dispositions à M. A, qui était titulaire d'une pension définitive au taux de 100 % + 23° avec le bénéfice de l'article L. 36 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre pour sept infirmités, la cour régionale des pensions militaires d'Aix-en-Provence, qui n'était pas tenue de suivre l'avis des experts a jugé, par une appréciation souveraine exempte de dénaturation, que les infirmités d'acophose totale et de crises d'épilepsie généralisée au taux de 75 % dont M. A est atteint et qui ne sont pas contestées, justifiaient l'assistance d'une tierce personne pour se mouvoir, se conduire ou accomplir les actes essentiels à la vie ; qu'en statuant ainsi la cour n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 18 précité, et a suffisamment motivé son arrêt ; Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DE LA DEFENSE n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ; Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Considérant qu'il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros que demande M. A au titre des frais exposés par lui devant le Conseil d'Etat ;D E C I D E : -------------- Article 1er : Le pourvoi du MINISTRE DE LA DEFENSE est rejeté. Article 2 : L'Etat versera à M. A la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Jean-Pierre A et au MINISTRE DE LA DEFENSE.
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 5ème sous-section jugeant seule, 10/07/2009, 314266, Inédit au recueil Lebon
Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 14 mars et 16 juin 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Kablouti A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat 1°) d'annuler l'arrêt du 25 juin 2007 par lequel la cour régionale des pensions de Nîmes a confirmé le jugement du 20 septembre 2005 du tribunal départemental des pensions du Gard déclarant irrecevable sa demande de pension de retraite militaire ; 2°) réglant l'affaire au fond, d'enjoindre à l'administration de lui accorder le bénéfice de cette pension pour la période du 1er juillet 1958 au 10 octobre 1960 et la période du 1er mai 1961 au 1er mai 1962 ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Jean-Yves Rossi, Conseiller d'Etat, - les observations de la SCP Capron, Capron, avocat de M. A, - les conclusions de Mme Catherine de Salins, Rapporteur public, La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Capron, Capron, avocat de M. A ; Considérant que M. A demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 25 juin 2007 par lequel la cour régionale des pensions de Nîmes a confirmé le jugement du 20 septembre 2005 du tribunal des pensions militaires de Nîmes déclarant irrecevable sa demande de pension de retraite militaire et d'enjoindre à l'administration de lui accorder le bénéfice de cette pension pour la période du 1er juillet 1958 au 10 octobre 1960 et la période du 1er mai 1961 au 1er mai 1962 ; Considérant qu'en vertu de l'article L. 79 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, les juridictions des pensions ne sont compétentes que sur les contestations soulevées par l'application du livre Ier (à l'exception des chapitres I et IV du titre VII) et du livre II de ce code ; que les pensions militaires de retraite sont prévues par le code de pensions civiles et militaires de retraite ; qu'il s'ensuit que le contentieux de ces pensions relève de la compétence du juge administratif de droit commun ; Considérant que la demande présentée par M. A devant le tribunal départemental des pensions du Gard était relative à l'octroi d'une pension militaire de retraite ; qu'il en résulte qu'en n'annulant pas d'office pour incompétence le jugement du tribunal départemental des pensions du Gard du 20 septembre 2005 statuant sur la demande de M. A, la cour régionale des pensions de Nîmes a entaché d'une erreur de droit son arrêt du 25 juin 2007 ; que M. A est, par suite, fondé à en demander l'annulation ; Considérant que dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de régler l'affaire au fond par application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ; Considérant que, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, le tribunal départemental des pensions du Gard n'était pas compétent pour statuer sur la demande de M. A ; que celui-ci est dès lors fondé à demander l'annulation de son jugement ; Considérant que, lorsqu'en la qualité de juge d'appel que lui confère l'application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, le Conseil d'Etat annule un jugement rendu en première instance au motif que la juridiction administrative saisie n'était pas compétente, il peut, soit, en vertu des dispositions de l'article R. 351-1 du même code, attribuer le jugement de l'affaire à la juridiction administrative compétente en première instance, soit évoquer et statuer immédiatement sur la demande présentée en première instance ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. A devant le tribunal départemental des pensions du Gard ; Considérant qu'aux termes de l'article R. 412-1 du code de justice administrative : La requête doit, à peine d'irrecevabilité, être accompagnée (...) de la décision attaquée (...) ; que la requête de M. A n'est dirigée contre aucune décision qui aurait opposé un refus à sa demande de pension militaire ; que par suite sa requête est irrecevable et doit être rejetée ;D E C I D E : -------------- Article 1er : L'arrêt de la cour régionale des pensions de Nîmes en date du 25 juin 2007 et le jugement du tribunal départemental des pensions du Gard en date du 20 septembre 2005 sont annulés. Article 2 : La demande présentée par M. A devant le tribunal départemental des pensions du Gard est rejetée. Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Kablouti A et au ministre de la défense.
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 9ème sous-section jugeant seule, 01/07/2009, 294121, Inédit au recueil Lebon
Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 6 juin et 2 octobre 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Mallé A, domicilié ... ; M. A demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler le jugement du 12 octobre 2005 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du ministre de la défense rejetant sa demande de révision de sa retraite du combattant ; 2°) réglant l'affaire au fond, d'annuler la décision du ministre de la défense rejetant sa demande de révision de sa retraite du combattant ; 3°) de constater que la SCP Lyon-Caen-Fabiani-Thiriez renonce au bénéfice de l'indemnité d'aide juridictionnelle et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros par application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble son premier protocole additionnel ; Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; Vu la loi n° 59-1454 du 26 décembre 1959 ; Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; Vu la loi n° 2006-1666 du 21 décembre 2006 ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Benoit Bohnert, Maître des Requêtes, - les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. A, - les conclusions de M. Pierre Collin, rapporteur public ; La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. A ; Considérant que, par un jugement en date du 12 octobre 2005, le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de M. A, ressortissant malien, tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le ministre de la défense a rejeté sa demande tendant à la revalorisation de sa retraite du combattant ; que M. A se pourvoit en cassation contre ce jugement ; Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 255 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre : Il est institué pour tout titulaire de la carte du combattant (...) une retraite cumulable, sans aucune restriction, avec la retraite qu'il aura pu s'assurer par ses versements personnels (...)./ Cette retraite annuelle, qui n'est pas réversible, est accordée en témoignage de la reconnaissance nationale ; qu'aux termes de l'article 71 de la loi n° 59-1454 du 26 décembre 1959 rendu applicable aux ressortissants maliens par l'article 14 de la loi n° 79-1102 du 21 décembre 1979, modifié par l'article 22 de la loi n° 81-1179 du 31 décembre 1981 : I - A compter du 1er janvier 1961, les pensions, rentes ou allocations viagères imputées sur le budget de l'Etat ou d'établissements publics, dont sont titulaires les nationaux des pays ou territoires ayant appartenu à l'Union française ou à la Communauté ou ayant été placés sous le protectorat ou sous la tutelle de la France, seront remplacées pendant la durée normale de leur jouissance personnelle par des indemnités annuelles en francs, calculées sur la base des tarifs en vigueur pour lesdites pensions ou allocations à la date de leur transformation ... ; Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 1er de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Les Hautes parties contractantes reconnaissent à toute personne relevant de leur juridiction les droits et libertés définis au titre I de la présente convention ; qu'aux termes de l'article 14 de la même convention : La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation ; qu'en vertu des stipulations de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention : Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. (...) ; Considérant que le tribunal a fait une inexacte application des stipulations précitées de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en jugeant que la retraite du combattant attribuée en application des dispositions de l'article L. 255 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, qui constitue pour ses bénéficiaires une créance, ne peut être regardée comme un bien au sens desdites stipulations ; que M. A est, par suite, fondé à demander, pour ce motif, l'annulation du jugement attaqué ; Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au fond ; Considérant qu'une distinction entre les personnes placées dans une situation analogue est discriminatoire, au sens des stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, si elle n'est pas assortie de justifications objectives et raisonnables, c'est-à-dire si elle ne poursuit pas un objectif d'utilité publique, ou si elle n'est pas fondée sur des critères objectifs et rationnels en rapport avec les buts de la loi ; Considérant qu'il ressort des termes mêmes de l'article 71 de la loi du 26 décembre 1959 précitée, que les pensions perçues par les nationaux des pays ou territoires ayant appartenu à l'Union française ou à la Communauté ou ayant été placés sous le protectorat ou sous la tutelle de la France, ne sont pas revalorisables dans les conditions prévues par le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; que, dès lors, et quelle qu'ait pu être l'intention initiale du législateur manifestée dans les travaux préparatoires de ces dispositions, cet article crée une différence de traitement entre les retraités en fonction de leur seule nationalité ; que la différence de situation existant entre d'anciens combattants, selon qu'ils ont la nationalité française ou sont ressortissants d'Etats devenus indépendants, ne justifie pas, eu égard à l'objet de la retraite du combattant, une différence de traitement ; que si les dispositions de l'article 71 de la loi du 26 décembre 1959 avaient notamment pour objectif de tirer les conséquences de l'indépendance des Etats concernés et de l'évolution désormais distincte de leur économie et de celle de la France, qui privait de justification la revalorisation des retraites du combattant en fonction de l'évolution de l'économie française, la différence de traitement qu'elles créent, en raison de leur seule nationalité, entre les titulaires de la retraite du combattant, ne peut être regardée comme reposant sur un critère en rapport avec cet objectif ; que, ces dispositions étant, de ce fait, incompatibles avec les stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, elles ne pouvaient justifier le refus opposé par l'administration à la demande présentée par M. A en vue de la revalorisation de sa retraite du combattant ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A est fondé à demander l'annulation de la décision implicite par laquelle l'administration a rejeté sa demande tendant à la revalorisation de sa retraite du combattant ; Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que, contrairement à ce que soutient le ministre de la défense, M. A peut prétendre à la revalorisation de sa retraite du combattant ; que le montant de cette retraite doit être revalorisé, au taux prévu par les dispositions de l'article L. 256 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, à compter de la date d'attribution de cette retraite, soit le 1er août 1991 jusqu'à la date d'entrée en vigueur des dispositions du décret du 3 novembre 2003 pris pour l'application de l'article 68 de la loi de finances pour 2002, soit le 5 novembre 2003 ; qu'à partir de cette date, la pension doit être revalorisée en application du II et du III de l'article 68 de la loi de finances rectificative pour 2002, et ce, jusqu'au 31 décembre 2006 ; qu'à compter du 1er janvier 2007, ce taux doit être fixé dans les conditions prévues par l'article 100 de la loi de finances pour 2007 ; qu'il y a lieu, dès lors, de condamner l'Etat, pour la période postérieure à cette date, à verser à M. A les arrérages correspondant à la différence entre le montant ainsi fixé et celui qui a déjà été versé à l'intéressé ; Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Considérant que M. A a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. A, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 500 euros à payer à la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez ;D E C I D E : -------------- Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Paris du 12 octobre 2005, ensemble la décision implicite du ministre de la défense rejetant la demande de M. A tendant à la revalorisation de sa retraite du combattant sont annulés. Article 2 : M. A est renvoyé devant le ministre de la défense pour qu'il soit procédé à la liquidation de la pension revalorisée à laquelle il a droit sur les bases définies dans les motifs de la présente décision. Article 3 : L'Etat versera à la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. A, la somme de 500 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve que ladite société renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle. Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Mallé A, au ministre de la défense et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat. Une copie sera transmise pour information au Premier ministre.
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 9ème sous-section jugeant seule, 01/07/2009, 294119, Inédit au recueil Lebon
Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 6 juin et 2 octobre 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Hocine A, domicilié ... ; M. A demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler le jugement du 12 octobre 2005 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du ministre de la défense rejetant sa demande de révision de sa retraite du combattant ; 2°) réglant l'affaire au fond, d'annuler la décision du ministre de la défense rejetant sa demande de révision de sa retraite du combattant ; 3°) de constater que la SCP Lyon-Caen-Fabiani-Thiriez renonce au bénéfice de l'indemnité d'aide juridictionnelle et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros par application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble son premier protocole additionnel ; Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; Vu la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ; Vu la loi n° 81-734 du 3 août 1981 ; Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; Vu la loi n° 2006-1666 du 21 décembre 2006 ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Benoit Bohnert, Maître des Requêtes, - les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. A, - les conclusions de M. Pierre Collin, rapporteur public ; La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. A ; Considérant que, par un jugement en date du 12 octobre 2005, le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de M. A, ressortissant algérien, tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le ministre de la défense a rejeté sa demande tendant à la revalorisation de sa retraite du combattant ; que M. A se pourvoit en cassation contre ce jugement ; Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 255 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre : Il est institué pour tout titulaire de la carte du combattant (...) une retraite cumulable, sans aucune restriction, avec la retraite qu'il aura pu s'assurer par ses versements personnels (...)./ Cette retraite annuelle, qui n'est pas réversible, est accordée en témoignage de la reconnaissance nationale ; qu'aux termes de l'article 26 de la loi du 3 août 1981 portant loi de finances rectificative pour 1981 : Les pensions, rentes ou allocations viagères attribuées aux ressortissants de l'Algérie sur le budget de l'Etat ou d'établissements publics de l'Etat et garanties en application de l'article 15 de la déclaration de principe du 19 mars 1962 relative à la coopération économique et financière entre la France et l'Algérie ne sont pas révisables à compter du 3 juillet 1962 et continuent à être payées sur la base des tarifs en vigueur à cette même date./ Elles pourront faire l'objet de revalorisations dans des conditions et suivant des taux fixés par décret./ (...) La retraite du combattant pourra être accordée, au tarif tel qu'il est défini ci-dessus, aux anciens combattants qui remplissent les conditions requises postérieurement à la date d'effet de cet article./ (...) ; Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 1er de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Les Hautes parties contractantes reconnaissent à toute personne relevant de leur juridiction les droits et libertés définis au titre I de la présente convention ; qu'aux termes de l'article 14 de la même convention : La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation ; qu'en vertu des stipulations de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention : Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. (...) ; Considérant que le tribunal a fait une inexacte application des stipulations précitées de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en jugeant que la retraite du combattant attribuée en application des dispositions de l'article L. 255 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, qui constitue pour ses bénéficiaires une créance, ne peut être regardée comme un bien au sens desdites stipulations ; que M. A est, par suite, fondé à demander, pour ce motif, l'annulation du jugement attaqué ; Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au fond ; Considérant qu'une distinction entre les personnes placées dans une situation analogue est discriminatoire, au sens des stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, si elle n'est pas assortie de justifications objectives et raisonnables, c'est-à-dire si elle ne poursuit pas un objectif d'utilité publique, ou si elle n'est pas fondée sur des critères objectifs et rationnels en rapport avec les buts de la loi ; Considérant qu'il ressort des termes mêmes de l'article 26 de la loi du 3 août 1981 précité, que les pensions perçues par les ressortissants algériens ne sont pas revalorisables dans les conditions prévues par le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; que, dès lors, et quelle qu'ait pu être l'intention initiale du législateur manifestée dans les travaux préparatoires de ces dispositions, cet article crée une différence de traitement entre les retraités en fonction de leur seule nationalité ; que la différence de situation existant entre d'anciens combattants, selon qu'ils ont la nationalité française ou sont ressortissants d'Etats devenus indépendants, ne justifie pas, eu égard à l'objet de la retraite du combattant, une différence de traitement ; que si les dispositions de l'article 26 de la loi du 3 août 1981 avaient notamment pour objectif de tirer les conséquences de l'indépendance de l'Algérie et de l'évolution désormais distincte de son économie et de celle de la France, qui privait de justification la revalorisation des retraites du combattant en fonction de l'évolution de l'économie française, la différence de traitement qu'elles créent, en raison de leur seule nationalité, entre les titulaires de la retraite du combattant, ne peut être regardée comme reposant sur un critère en rapport avec cet objectif ; que, ces dispositions étant, de ce fait, incompatibles avec les stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, elles ne pouvaient justifier le refus opposé par le ministre de la défense à la demande présentée par M. A en vue de la revalorisation de sa retraite du combattant ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A est fondé à demander l'annulation de la décision implicite par laquelle l'administration a rejeté sa demande tendant à la revalorisation de sa retraite du combattant ; Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que, contrairement à ce que soutient le ministre de la défense, M. A peut prétendre à la revalorisation de sa retraite du combattant ; que le montant de cette retraite doit être revalorisé, au taux prévu par les dispositions de l'article L. 256 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, à compter de la date d'attribution de cette retraite, soit le 1er avril 1981 jusqu'à la date d'entrée en vigueur des dispositions du décret du 3 novembre 2003 pris pour l'application de l'article 68 de la loi de finances pour 2002, soit le 5 novembre 2003 ; qu'à partir de cette date, la pension doit être revalorisée en application du II et du III de l'article 68 de la loi de finances rectificative pour 2002, et ce, jusqu'au 31 décembre 2006 ; qu'à compter du 1er janvier 2007, ce taux doit être fixé dans les conditions prévues par l'article 100 de la loi de finances pour 2007 ; qu'il y a lieu, dès lors, de condamner l'Etat à verser à M. A les arrérages correspondant à la différence entre le montant ainsi fixé et celui qui a déjà été versé à l'intéressé ; Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Considérant que M. A a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. A, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 500 euros à payer à la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez ;D E C I D E : -------------- Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Paris du 12 octobre 2005, ensemble la décision implicite du ministre de la défense rejetant la demande de M. A tendant à la revalorisation de sa retraite du combattant sont annulés. Article 2 : M. A est renvoyé devant le ministre de la défense pour qu'il soit procédé à la liquidation de la pension revalorisée à laquelle il a droit sur les bases définies dans les motifs de la présente décision. Article 3 : L'Etat versera à la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. A, la somme de 500 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve que ladite société renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle. Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Hocine A, au ministre de la défense et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat. Une copie sera transmise pour information au Premier ministre.
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 9ème sous-section jugeant seule, 01/07/2009, 294113, Inédit au recueil Lebon
Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 6 juin et 2 octobre 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Doudou A, domicilié ... ; M. A demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler le jugement du 12 octobre 2005 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite du ministre de la défense rejetant sa demande de révision de sa retraite du combattant ; 2°) réglant l'affaire au fond, d'annuler la décision du ministre de la défense rejetant sa demande de révision de sa retraite du combattant ; 3°) de constater que la SCP Lyon-Caen-Fabiani-Thiriez renonce au bénéfice de l'indemnité d'aide juridictionnelle et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros par application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble son premier protocole additionnel ; Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; Vu la loi n° 59-1454 du 26 décembre 1959 ; Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; Vu la loi n° 2006-1666 du 21 décembre 2006 ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Benoit Bohnert, Maître des Requêtes, - les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. A, - les conclusions de M. Pierre Collin, rapporteur public ; La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. A ; Considérant que, par un jugement en date du 12 octobre 2005, le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de M. A, ressortissant sénégalais, tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le ministre de la défense a rejeté sa demande tendant à la revalorisation de sa retraite du combattant ; que M. A se pourvoit en cassation contre ce jugement ; Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 255 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre : Il est institué pour tout titulaire de la carte du combattant (...) une retraite cumulable, sans aucune restriction, avec la retraite qu'il aura pu s'assurer par ses versements personnels (...)./ Cette retraite annuelle, qui n'est pas réversible, est accordée en témoignage de la reconnaissance nationale ; qu'aux termes de l'article 71 de la loi n° 59-1454 du 26 décembre 1959 rendu applicable aux ressortissants sénégalais par l'article 14 de la loi n° 79-1102 du 21 décembre 1979, modifié par l'article 22 de la loi n° 81-1179 du 31 décembre 1981 : I - A compter du 1er janvier 1961, les pensions, rentes ou allocations viagères imputées sur le budget de l'Etat ou d'établissements publics, dont sont titulaires les nationaux des pays ou territoires ayant appartenu à l'Union française ou à la Communauté ou ayant été placés sous le protectorat ou sous la tutelle de la France, seront remplacées pendant la durée normale de leur jouissance personnelle par des indemnités annuelles en francs, calculées sur la base des tarifs en vigueur pour lesdites pensions ou allocations à la date de leur transformation ... ; Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 1er de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Les Hautes parties contractantes reconnaissent à toute personne relevant de leur juridiction les droits et libertés définis au titre I de la présente convention ; qu'aux termes de l'article 14 de la même convention : La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation ; qu'en vertu des stipulations de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention : Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. (...) ; Considérant que le tribunal a fait une inexacte application des stipulations précitées de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en jugeant que la retraite du combattant attribuée en application des dispositions de l'article L. 255 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, qui constitue pour ses bénéficiaires une créance, ne peut être regardée comme un bien au sens desdites stipulations ; que M. A est, par suite, fondé à demander, pour ce motif, l'annulation du jugement attaqué ; Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au fond ; Considérant qu'une distinction entre les personnes placées dans une situation analogue est discriminatoire, au sens des stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, si elle n'est pas assortie de justifications objectives et raisonnables, c'est-à-dire si elle ne poursuit pas un objectif d'utilité publique, ou si elle n'est pas fondée sur des critères objectifs et rationnels en rapport avec les buts de la loi ; Considérant qu'il ressort des termes mêmes de l'article 71 de la loi du 26 décembre 1959 précitée, que les pensions perçues par les nationaux des pays ou territoires ayant appartenu à l'Union française ou à la Communauté ou ayant été placés sous le protectorat ou sous la tutelle de la France, ne sont pas revalorisables dans les conditions prévues par le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; que, dès lors, et quelle qu'ait pu être l'intention initiale du législateur manifestée dans les travaux préparatoires de ces dispositions, cet article crée une différence de traitement entre les retraités en fonction de leur seule nationalité ; que la différence de situation existant entre d'anciens combattants, selon qu'ils ont la nationalité française ou sont ressortissants d'Etats devenus indépendants, ne justifie pas, eu égard à l'objet de la retraite du combattant, une différence de traitement ; que si les dispositions de l'article 71 de la loi du 26 décembre 1959 avaient notamment pour objectif de tirer les conséquences de l'indépendance des Etats concernés et de l'évolution désormais distincte de leur économie et de celle de la France, qui privait de justification la revalorisation des retraites du combattant en fonction de l'évolution de l'économie française, la différence de traitement qu'elles créent, en raison de leur seule nationalité, entre les titulaires de la retraite du combattant, ne peut être regardée comme reposant sur un critère en rapport avec cet objectif ; que, ces dispositions étant, de ce fait, incompatibles avec les stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, elles ne pouvaient justifier le refus opposé par l'administration à la demande présentée par M. A en vue de la revalorisation de sa retraite du combattant ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A est fondé à demander l'annulation de la décision implicite par laquelle l'administration a rejeté sa demande tendant à la revalorisation de sa retraite du combattant ; Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que, contrairement à ce que soutient le ministre de la défense, M. A peut prétendre à la revalorisation de sa retraite du combattant ; que le montant de cette retraite doit être revalorisé, au taux prévu par les dispositions de l'article L. 256 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, à compter de la date d'attribution de cette retraite, soit le 1er août 1992 jusqu'à la date d'entrée en vigueur des dispositions du décret du 3 novembre 2003 pris pour l'application de l'article 68 de la loi de finances pour 2002, soit le 5 novembre 2003 ; qu'à partir de cette date, la pension doit être revalorisée en application du II et du III de l'article 68 de la loi de finances rectificative pour 2002, et ce, jusqu'au 31 décembre 2006 ; qu'à compter du 1er janvier 2007, ce taux doit être fixé dans les conditions prévues par l'article 100 de la loi de finances pour 2007 ; qu'il y a lieu, dès lors, de condamner l'Etat à verser à M. A les arrérages correspondant à la différence entre le montant ainsi fixé et celui qui a déjà été versé à l'intéressé ; Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Considérant que M. A a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. A, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 500 euros à payer à la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez ;D E C I D E : -------------- Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Paris du 12 octobre 2005, ensemble la décision implicite du ministre de la défense rejetant la demande de M. A tendant à la revalorisation de sa retraite du combattant sont annulés. Article 2 : M. A est renvoyé devant le ministre de la défense pour qu'il soit procédé à la liquidation de la pension revalorisée à laquelle il a droit sur les bases définies dans les motifs de la présente décision. Article 3 : L'Etat versera à la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. A, la somme de 500 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve que ladite société renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle. Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Doudou A, au ministre de la défense et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat. Une copie sera transmise pour information au Premier ministre.
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 9ème sous-section jugeant seule, 01/07/2009, 294112, Inédit au recueil Lebon
Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 6 juin et 2 octobre 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Bilal A, domicilié ... ; M. A demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler le jugement du 12 octobre 2005 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite du ministre de la défense rejetant sa demande de révision de sa retraite du combattant ; 2°) réglant l'affaire au fond, d'annuler la décision du ministre de la défense rejetant sa demande de révision de sa retraite du combattant ; 3°) de constater que la SCP Lyon-Caen-Fabiani-Thiriez renonce au bénéfice de l'indemnité d'aide juridictionnelle et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros par application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble son premier protocole additionnel ; Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; Vu la loi n° 59-1454 du 26 décembre 1959 ; Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; Vu la loi n° 2006-1666 du 21 décembre 2006 ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Benoit Bohnert, Maître des Requêtes, - les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. A, - les conclusions de M. Pierre Collin, rapporteur public ; La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. A ; Considérant que, par un jugement en date du 12 octobre 2005, le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de M. A, ressortissant sénégalais, tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le ministre de la défense a rejeté sa demande tendant à la revalorisation de sa retraite du combattant ; que M. A se pourvoit en cassation contre ce jugement ; Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 255 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre : Il est institué pour tout titulaire de la carte du combattant (...) une retraite cumulable, sans aucune restriction, avec la retraite qu'il aura pu s'assurer par ses versements personnels (...)./ Cette retraite annuelle, qui n'est pas réversible, est accordée en témoignage de la reconnaissance nationale ; qu'aux termes de l'article 71 de la loi n° 59-1454 du 26 décembre 1959 rendu applicable aux ressortissants sénégalais par l'article 14 de la loi n° 79-1102 du 21 décembre 1979, modifié par l'article 22 de la loi n° 81-1179 du 31 décembre 1981 : I - A compter du 1er janvier 1961, les pensions, rentes ou allocations viagères imputées sur le budget de l'Etat ou d'établissements publics, dont sont titulaires les nationaux des pays ou territoires ayant appartenu à l'Union française ou à la Communauté ou ayant été placés sous le protectorat ou sous la tutelle de la France, seront remplacées pendant la durée normale de leur jouissance personnelle par des indemnités annuelles en francs, calculées sur la base des tarifs en vigueur pour lesdites pensions ou allocations à la date de leur transformation ... ; Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 1er de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Les Hautes parties contractantes reconnaissent à toute personne relevant de leur juridiction les droits et libertés définis au titre I de la présente convention ; qu'aux termes de l'article 14 de la même convention : La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation ; qu'en vertu des stipulations de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention : Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. (...) ; Considérant que le tribunal a fait une inexacte application des stipulations précitées de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en jugeant que la retraite du combattant attribuée en application des dispositions de l'article L. 255 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, qui constitue pour ses bénéficiaires une créance, ne peut être regardée comme un bien au sens desdites stipulations ; que M. A est, par suite, fondé à demander, pour ce motif, l'annulation du jugement attaqué ; Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au fond ; Considérant qu'une distinction entre les personnes placées dans une situation analogue est discriminatoire, au sens des stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, si elle n'est pas assortie de justifications objectives et raisonnables, c'est-à-dire si elle ne poursuit pas un objectif d'utilité publique, ou si elle n'est pas fondée sur des critères objectifs et rationnels en rapport avec les buts de la loi ; Considérant qu'il ressort des termes mêmes de l'article 71 de la loi du 26 décembre 1959 précitée, que les pensions perçues par les nationaux des pays ou territoires ayant appartenu à l'Union française ou à la Communauté ou ayant été placés sous le protectorat ou sous la tutelle de la France, ne sont pas revalorisables dans les conditions prévues par le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; que, dès lors, et quelle qu'ait pu être l'intention initiale du législateur manifestée dans les travaux préparatoires de ces dispositions, cet article crée une différence de traitement entre les retraités en fonction de leur seule nationalité ; que la différence de situation existant entre d'anciens combattants, selon qu'ils ont la nationalité française ou sont ressortissants d'Etats devenus indépendants, ne justifie pas, eu égard à l'objet de la retraite du combattant, une différence de traitement ; que si les dispositions de l'article 71 de la loi du 26 décembre 1959 avaient notamment pour objectif de tirer les conséquences de l'indépendance des Etats concernés et de l'évolution désormais distincte de leur économie et de celle de la France, qui privait de justification la revalorisation des retraites du combattant en fonction de l'évolution de l'économie française, la différence de traitement qu'elles créent, en raison de leur seule nationalité, entre les titulaires de la retraite du combattant, ne peut être regardée comme reposant sur un critère en rapport avec cet objectif ; que, ces dispositions étant, de ce fait, incompatibles avec les stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, elles ne pouvaient justifier le refus opposé par l'administration à la demande présentée par M. A en vue de la revalorisation de sa retraite du combattant ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A est fondé à demander l'annulation de la décision implicite par laquelle l'administration a rejeté sa demande tendant à la revalorisation de sa retraite du combattant ; Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que, contrairement à ce que soutient le ministre de la défense, M. A peut prétendre à la revalorisation de sa retraite du combattant ; que le montant de cette retraite doit être revalorisé, au taux prévu par les dispositions de l'article L. 256 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, à compter de la date d'attribution de cette retraite, soit le 1er juillet 1992 jusqu'à la date d'entrée en vigueur des dispositions du décret du 3 novembre 2003 pris pour l'application de l'article 68 de la loi de finances pour 2002, soit le 5 novembre 2003 ; qu'à partir de cette date, la pension doit être revalorisée en application du II et du III de l'article 68 de la loi de finances rectificative pour 2002, et ce, jusqu'au 31 décembre 2006 ; qu'à compter du 1er janvier 2007, ce taux doit être fixé dans les conditions prévues par l'article 100 de la loi de finances pour 2007 ; qu'il y a lieu, dès lors, de condamner l'Etat à verser à M. A les arrérages correspondant à la différence entre le montant ainsi fixé et celui qui a déjà été versé à l'intéressé ; Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Considérant que M. A a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. A, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 500 euros à payer à la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez ;D E C I D E : -------------- Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Paris du 12 octobre 2005, ensemble la décision implicite du ministre de la défense rejetant la demande de M. A tendant à la revalorisation de sa retraite du combattant sont annulés. Article 2 : M. A est renvoyé devant le ministre de la défense pour qu'il soit procédé à la liquidation de la pension revalorisée à laquelle il a droit sur les bases définies dans les motifs de la présente décision. Article 3 : L'Etat versera à la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. A, la somme de 500 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve que ladite société renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle. Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Bilal A, au ministre de la défense et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat. Une copie sera transmise pour information au Premier ministre.
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 9ème sous-section jugeant seule, 01/07/2009, 294111, Inédit au recueil Lebon
Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 6 juin et 2 octobre 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Cheikh A, domicilié ... ; M. A demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler le jugement du 12 octobre 2005 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite du ministre de la défense rejetant sa demande de révision de sa retraite du combattant ; 2°) réglant l'affaire au fond, d'annuler la décision du ministre de la défense rejetant sa demande de révision de sa retraite du combattant ; 3°) de constater que la SCP Lyon-Caen-Fabiani-Thiriez renonce au bénéfice de l'indemnité d'aide juridictionnelle et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros par application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble son premier protocole additionnel ; Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; Vu la loi n° 59-1454 du 26 décembre 1959 ; Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; Vu la loi n° 2006-1666 du 21 décembre 2006 ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Benoit Bohnert, Maître des Requêtes, - les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. A, - les conclusions de M. Pierre Collin, rapporteur public ; La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thieriez, avocat de M. A ; Considérant que, par un jugement en date du 12 octobre 2005, le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de M. A, ressortissant sénégalais, tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le ministre de la défense a rejeté sa demande tendant à la revalorisation de sa retraite du combattant ; que M. A se pourvoit en cassation contre ce jugement ; Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 255 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre : Il est institué pour tout titulaire de la carte du combattant (...) une retraite cumulable, sans aucune restriction, avec la retraite qu'il aura pu s'assurer par ses versements personnels (...)./ Cette retraite annuelle, qui n'est pas réversible, est accordée en témoignage de la reconnaissance nationale ; qu'aux termes de l'article 71 de la loi n° 59-1454 du 26 décembre 1959 rendu applicable aux ressortissants sénégalais par l'article 14 de la loi n° 79-1102 du 21 décembre 1979, modifié par l'article 22 de la loi n° 81-1179 du 31 décembre 1981 : I - A compter du 1er janvier 1961, les pensions, rentes ou allocations viagères imputées sur le budget de l'Etat ou d'établissements publics, dont sont titulaires les nationaux des pays ou territoires ayant appartenu à l'Union française ou à la Communauté ou ayant été placés sous le protectorat ou sous la tutelle de la France, seront remplacées pendant la durée normale de leur jouissance personnelle par des indemnités annuelles en francs, calculées sur la base des tarifs en vigueur pour lesdites pensions ou allocations à la date de leur transformation ... ; Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 1er de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Les Hautes parties contractantes reconnaissent à toute personne relevant de leur juridiction les droits et libertés définis au titre I de la présente convention ; qu'aux termes de l'article 14 de la même convention : La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation ; qu'en vertu des stipulations de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention : Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. (...) ; Considérant que le tribunal a fait une inexacte application des stipulations précitées de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en jugeant que la retraite du combattant attribuée en application des dispositions de l'article L. 255 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, qui constitue pour ses bénéficiaires une créance, ne peut être regardée comme un bien au sens desdites stipulations ; que M. A est, par suite, fondé à demander, pour ce motif, l'annulation du jugement attaqué ; Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au fond ; Considérant qu'une distinction entre les personnes placées dans une situation analogue est discriminatoire, au sens des stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, si elle n'est pas assortie de justifications objectives et raisonnables, c'est-à-dire si elle ne poursuit pas un objectif d'utilité publique, ou si elle n'est pas fondée sur des critères objectifs et rationnels en rapport avec les buts de la loi ; Considérant qu'il ressort des termes mêmes de l'article 71 de la loi du 26 décembre 1959 précitée, que les pensions perçues par les nationaux des pays ou territoires ayant appartenu à l'Union française ou à la Communauté ou ayant été placés sous le protectorat ou sous la tutelle de la France, ne sont pas revalorisables dans les conditions prévues par le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; que, dès lors, et quelle qu'ait pu être l'intention initiale du législateur manifestée dans les travaux préparatoires de ces dispositions, cet article crée une différence de traitement entre les retraités en fonction de leur seule nationalité ; que la différence de situation existant entre d'anciens combattants, selon qu'ils ont la nationalité française ou sont ressortissants d'Etats devenus indépendants, ne justifie pas, eu égard à l'objet de la retraite du combattant, une différence de traitement ; que si les dispositions de l'article 71 de la loi du 26 décembre 1959 avaient notamment pour objectif de tirer les conséquences de l'indépendance des Etats concernés et de l'évolution désormais distincte de leur économie et de celle de la France, qui privait de justification la revalorisation des retraites du combattant en fonction de l'évolution de l'économie française, la différence de traitement qu'elles créent, en raison de leur seule nationalité, entre les titulaires de la retraite du combattant, ne peut être regardée comme reposant sur un critère en rapport avec cet objectif ; que, ces dispositions étant, de ce fait, incompatibles avec les stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, elles ne pouvaient justifier le refus opposé par l'administration à la demande présentée par M. A en vue de la revalorisation de sa retraite du combattant ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A est fondé à demander l'annulation de la décision implicite par laquelle l'administration a rejeté sa demande tendant à la revalorisation de sa retraite du combattant ; Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que, contrairement à ce que soutient le ministre de la défense, M. A peut prétendre à la revalorisation de sa retraite du combattant ; que le montant de cette retraite doit être revalorisé, au taux prévu par les dispositions de l'article L. 256 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, à compter de la date d'attribution de cette retraite, soit le 1er août 1991 jusqu'à la date d'entrée en vigueur des dispositions du décret du 3 novembre 2003 pris pour l'application de l'article 68 de la loi de finances pour 2002, soit le 5 novembre 2003 ; qu'à partir de cette date, la pension doit être revalorisée en application du II et du III de l'article 68 de la loi de finances rectificative pour 2002, et ce, jusqu'au 31 décembre 2006 ; qu'à compter du 1er janvier 2007, ce taux doit être fixé dans les conditions prévues par l'article 100 de la loi de finances pour 2007 ; qu'il y a lieu, dès lors, de condamner l'Etat à verser à M. A les arrérages correspondant à la différence entre le montant ainsi fixé et celui qui a déjà été versé à l'intéressé ; Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Considérant que M. A a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. A, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 500 euros à payer à la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez ;D E C I D E : -------------- Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Paris du 12 octobre 2005, ensemble la décision implicite du ministre de la défense rejetant la demande de M. A tendant à la revalorisation de sa retraite du combattant sont annulés. Article 2 : M. A est renvoyé devant le ministre de la défense pour qu'il soit procédé à la liquidation de la pension revalorisée à laquelle il a droit sur les bases définies dans les motifs de la présente décision. Article 3 : L'Etat versera à la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. A, la somme de 500 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve que ladite société renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle. Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Cheikh A, au ministre de la défense et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat. Une copie sera transmise pour information au Premier ministre.
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 9ème sous-section jugeant seule, 01/07/2009, 294120, Inédit au recueil Lebon
Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 6 juin et 2 octobre 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Ben Mohamed A, ... ; M. A demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler le jugement du 12 octobre 2005 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du ministre de la défense rejetant sa demande de révision de sa retraite du combattant ; 2°) réglant l'affaire au fond, d'annuler la décision du ministre de la défense rejetant sa demande de révision de sa retraite du combattant ; 3°) de constater que la SCP Lyon-Caen-Fabiani-Thiriez renonce au bénéfice de l'indemnité d'aide juridictionnelle et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros par application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble son premier protocole additionnel ; Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; Vu la loi n° 81-734 du 3 août 1981 ; Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; Vu la loi n° 2006-1666 du 21 décembre 2006 ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Benoit Bohnert, Maître des Requêtes, - les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. A, - les conclusions de M. Pierre Collin, rapporteur public ; Considérant que, par un jugement en date du 12 octobre 2005, le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de M. A, ressortissant algérien, tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le ministre de la défense a rejeté sa demande tendant à la revalorisation de sa retraite du combattant ; que M. A se pourvoit en cassation contre ce jugement ; Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 255 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre : Il est institué pour tout titulaire de la carte du combattant (...) une retraite cumulable, sans aucune restriction, avec la retraite qu'il aura pu s'assurer par ses versements personnels (...)./ Cette retraite annuelle, qui n'est pas réversible, est accordée en témoignage de la reconnaissance nationale ; qu'aux termes de l'article 26 de la loi du 3 août 1981 portant loi de finances rectificative pour 1981 : Les pensions, rentes ou allocations viagères attribuées aux ressortissants de l'Algérie sur le budget de l'Etat ou d'établissements publics de l'Etat et garanties en application de l'article 15 de la déclaration de principe du 19 mars 1962 relative à la coopération économique et financière entre la France et l'Algérie ne sont pas révisables à compter du 3 juillet 1962 et continuent à être payées sur la base des tarifs en vigueur à cette même date./ Elles pourront faire l'objet de revalorisations dans des conditions et suivant des taux fixés par décret./ (...) La retraite du combattant pourra être accordée, au tarif tel qu'il est défini ci-dessus, aux anciens combattants qui remplissent les conditions requises postérieurement à la date d'effet de cet article./ (...) ; Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 1er de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Les Hautes parties contractantes reconnaissent à toute personne relevant de leur juridiction les droits et libertés définis au titre I de la présente convention ; qu'aux termes de l'article 14 de la même convention : La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation ; qu'en vertu des stipulations de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention : Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. (...) ; Considérant que le tribunal a fait une inexacte application des stipulations précitées de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en jugeant que la retraite du combattant attribuée en application des dispositions de l'article L. 255 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, qui constitue pour ses bénéficiaires une créance, ne peut être regardée comme un bien au sens desdites stipulations ; que M. A est, par suite, fondé à demander, pour ce motif, l'annulation du jugement attaqué ; Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au fond ; Considérant qu'une distinction entre les personnes placées dans une situation analogue est discriminatoire, au sens des stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, si elle n'est pas assortie de justifications objectives et raisonnables, c'est-à-dire si elle ne poursuit pas un objectif d'utilité publique, ou si elle n'est pas fondée sur des critères objectifs et rationnels en rapport avec les buts de la loi ; Considérant qu'il ressort des termes mêmes de l'article 26 de la loi du 3 août 1981 précité, que les pensions perçues par les ressortissants algériens ne sont pas revalorisables dans les conditions prévues par le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; que, dès lors, et quelle qu'ait pu être l'intention initiale du législateur manifestée dans les travaux préparatoires de ces dispositions, cet article crée une différence de traitement entre les retraités en fonction de leur seule nationalité ; que la différence de situation existant entre d'anciens combattants, selon qu'ils ont la nationalité française ou sont ressortissants d'Etats devenus indépendants, ne justifie pas, eu égard à l'objet de la retraite du combattant, une différence de traitement ; que si les dispositions de l'article 26 de la loi du 3 août 1981 avaient notamment pour objectif de tirer les conséquences de l'indépendance de l'Algérie et de l'évolution désormais distincte de son économie et de celle de la France, qui privait de justification la revalorisation des retraites du combattant en fonction de l'évolution de l'économie française, la différence de traitement qu'elles créent, en raison de leur seule nationalité, entre les titulaires de la retraite du combattant, ne peut être regardée comme reposant sur un critère en rapport avec cet objectif ; que, ces dispositions étant, de ce fait, incompatibles avec les stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, elles ne pouvaient justifier le refus opposé par le ministre de la défense à la demande présentée par M. A en vue de la revalorisation de sa retraite du combattant ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A est fondé à demander l'annulation de la décision implicite par laquelle l'administration a rejeté sa demande tendant à la revalorisation de sa retraite du combattant ; Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que, contrairement à ce que soutient le ministre de la défense, M. A peut prétendre à la revalorisation de sa retraite du combattant ; que le montant de cette retraite doit être revalorisé, au taux prévu par les dispositions de l'article L. 256 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, à compter de la date d'attribution de cette retraite, soit le 1er août 1985 jusqu'à la date d'entrée en vigueur des dispositions du décret du 3 novembre 2003 pris pour l'application de l'article 68 de la loi de finances pour 2002, soit le 5 novembre 2003 ; qu'à partir de cette date, la pension doit être revalorisée en application du II et du III de l'article 68 de la loi de finances rectificative pour 2002, et ce, jusqu'au 31 décembre 2006 ; qu'à compter du 1er janvier 2007, ce taux doit être fixé dans les conditions prévues par l'article 100 de la loi de finances pour 2007 ; qu'il y a lieu, dès lors, de condamner l'Etat à verser à M. A les arrérages correspondant à la différence entre le montant ainsi fixé et celui qui a déjà été versé à l'intéressé ; Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Considérant que M. A a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. A, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 500 euros à payer à la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez ;D E C I D E : -------------- Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Paris du 12 octobre 2005, ensemble la décision implicite du ministre de la défense rejetant la demande de M. A tendant à la revalorisation de sa retraite du combattant sont annulés. Article 2 : M. A est renvoyé devant le ministre de la défense pour qu'il soit procédé à la liquidation de la pension revalorisée à laquelle il a droit sur les bases définies dans les motifs de la présente décision. Article 3 : L'Etat versera à la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. A, la somme de 500 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve que ladite société renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle. Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Ben Mohamed A, au ministre de la défense et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat. Une copie sera transmise pour information au Premier ministre.
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 9ème sous-section jugeant seule, 01/07/2009, 294114, Inédit au recueil Lebon
Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 6 juin et 2 octobre 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Kien A, domicilié ... ; M. A demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler le jugement du 12 octobre 2005 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du ministre de la défense rejetant sa demande de révision de sa retraite du combattant ; 2°) réglant l'affaire au fond, d'annuler la décision du ministre de la défense rejetant sa demande de révision de sa retraite du combattant ; 3°) de constater que la SCP Lyon-Caen-Fabiani-Thiriez renonce au bénéfice de l'indemnité d'aide juridictionnelle et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros par application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble son premier protocole additionnel ; Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; Vu la loi n° 59-1454 du 26 décembre 1959 ; Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; Vu la loi n° 2006-1666 du 21 décembre 2006 ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Benoit Bohnert, Maître des Requêtes, - les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. A, - les conclusions de M. Pierre Collin, rapporteur public ; La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. A ;Considérant que, par un jugement en date du 12 octobre 2005, le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de M. A, ressortissant vietnamien, tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le ministre de la défense a rejeté sa demande tendant à la revalorisation de sa retraite du combattant ; que M. A se pourvoit en cassation contre ce jugement ; Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 255 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre : Il est institué pour tout titulaire de la carte du combattant (...) une retraite cumulable, sans aucune restriction, avec la retraite qu'il aura pu s'assurer par ses versements personnels (...)./ Cette retraite annuelle, qui n'est pas réversible, est accordée en témoignage de la reconnaissance nationale ; qu'aux termes de l'article 71 de la loi n° 59-1454 du 26 décembre 1959 : I - A compter du 1er janvier 1961, les pensions, rentes ou allocations viagères imputées sur le budget de l'Etat ou d'établissements publics, dont sont titulaires les nationaux des pays ou territoires ayant appartenu à l'Union française ou à la Communauté ou ayant été placés sous le protectorat ou sous la tutelle de la France, seront remplacées pendant la durée normale de leur jouissance personnelle par des indemnités annuelles en francs, calculées sur la base des tarifs en vigueur pour lesdites pensions ou allocations à la date de leur transformation ... ; Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 1er de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Les Hautes parties contractantes reconnaissent à toute personne relevant de leur juridiction les droits et libertés définis au titre I de la présente convention ; qu'aux termes de l'article 14 de la même convention : La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation ; qu'en vertu des stipulations de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention : Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. (...) ; Considérant que le tribunal a fait une inexacte application des stipulations précitées de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en jugeant que la retraite du combattant attribuée en application des dispositions de l'article L. 255 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, qui constitue pour ses bénéficiaires une créance, ne peut être regardée comme un bien au sens desdites stipulations ; que M. A est, par suite, fondé à demander, pour ce motif, l'annulation du jugement attaqué ; Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au fond ; Considérant qu'une distinction entre les personnes placées dans une situation analogue est discriminatoire, au sens des stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, si elle n'est pas assortie de justifications objectives et raisonnables, c'est-à-dire si elle ne poursuit pas un objectif d'utilité publique, ou si elle n'est pas fondée sur des critères objectifs et rationnels en rapport avec les buts de la loi ; Considérant qu'il ressort des termes mêmes de l'article 71 de la loi du 26 décembre 1959 précitée, que les pensions perçues par les nationaux des pays ou territoires ayant appartenu à l'Union française ou à la Communauté ou ayant été placés sous le protectorat ou sous la tutelle de la France, ne sont pas revalorisables dans les conditions prévues par le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; que, dès lors, et quelle qu'ait pu être l'intention initiale du législateur manifestée dans les travaux préparatoires de ces dispositions, cet article crée une différence de traitement entre les retraités en fonction de leur seule nationalité ; que la différence de situation existant entre d'anciens combattants, selon qu'ils ont la nationalité française ou sont ressortissants d'Etats devenus indépendants, ne justifie pas, eu égard à l'objet de la retraite du combattant, une différence de traitement ; que si les dispositions de l'article 71 de la loi du 26 décembre 1959 avaient notamment pour objectif de tirer les conséquences de l'indépendance des Etats concernés et de l'évolution désormais distincte de leur économie et de celle de la France, qui privait de justification la revalorisation des retraites du combattant en fonction de l'évolution de l'économie française, la différence de traitement qu'elles créent, en raison de leur seule nationalité, entre les titulaires de la retraite du combattant, ne peut être regardée comme reposant sur un critère en rapport avec cet objectif ; que, ces dispositions étant, de ce fait, incompatibles avec les stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, elles ne pouvaient justifier le refus opposé par l'administration à la demande présentée par M. A en vue de la revalorisation de sa retraite du combattant ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A est fondé à demander l'annulation de la décision implicite par laquelle l'administration a rejeté sa demande tendant à la revalorisation de sa retraite du combattant ; Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que, contrairement à ce que soutient le ministre de la défense, M. A peut prétendre à la revalorisation de sa retraite du combattant ; que le montant de cette retraite doit être revalorisé, au taux prévu par les dispositions de l'article L. 256 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, à compter de la date d'attribution de cette retraite, soit le 1er janvier 1996 jusqu'à la date d'entrée en vigueur des dispositions du décret du 3 novembre 2003 pris pour l'application de l'article 68 de la loi de finances pour 2002, soit le 5 novembre 2003 ; qu'à partir de cette date, la pension doit être revalorisée en application du II et du III de l'article 68 de la loi de finances rectificative pour 2002, et ce, jusqu'au 31 décembre 2006 ; qu'à compter du 1er janvier 2007, ce taux doit être fixé dans les conditions prévues par l'article 100 de la loi de finances pour 2007 ; qu'il y a lieu, dès lors, de condamner l'Etat à verser à M. A les arrérages correspondant à la différence entre le montant ainsi fixé et celui qui a déjà été versé à l'intéressé ; Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Considérant que M. A a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. A, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 500 euros à payer à la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez ;D E C I D E : -------------- Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Paris du 12 octobre 2005, ensemble la décision implicite du ministre de la défense rejetant la demande de M. A tendant à la revalorisation de sa retraite du combattant sont annulés. Article 2 : M. A est renvoyé devant le ministre de la défense pour qu'il soit procédé à la liquidation de la pension revalorisée à laquelle il a droit sur les bases définies dans les motifs de la présente décision. Article 3 : L'Etat versera à la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. A, la somme de 500 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve que ladite société renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle. Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Kien A, au ministre de la défense et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat. Une copie sera transmise pour information au Premier ministre.
Conseil d'Etat