5915 Ergebnisse
Conseil d'État, 9ème sous-section jugeant seule, 21/05/2012, 338147, Inédit au recueil Lebon
Vu l'ordonnance n° 09PA06297 du 19 mars 2010 par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Paris a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, le pourvoi par lequel Mme Yamina B veuve C, et M. Zeggaï A, domiciliés ..., demandent : 1°) d'annuler l'ordonnance n° 0205723 du 31 décembre 2008 du président de la cinquième section du tribunal administratif de Paris en tant que, après avoir annulé la décision implicite du Premier ministre en tant qu'elle rejetait leur demande de réversion de la pension de Mme B veuve C et mis à la charge de l'Etat le versement, pour la période postérieure au 1er janvier 1998, des arrérages correspondant à la différence entre le montant de sa pension de réversion revalorisée et ce qui lui avait déjà été versé, ainsi que les intérêts capitalisés y afférents, elle a rejeté le surplus de leurs conclusions tendant, d'une part, à la revalorisation de la pension militaire de retraite et de la retraite du combattant de leur défunt époux et père M. M'Hamed C à compter du 3 juillet 1962 et au versement des arrérages correspondants, assortis des intérêts capitalisés, à M. Zeggaï A en sa qualité d'hériter et, d'autre part, à la revalorisation de la pension de Mme B veuve C à compter du 13 mars 1970 ; 2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à leurs conclusions de première instance ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 500 euros au bénéfice de la SCP Barthélémy-Matuchansky-Vexliard désignée au titre de l'aide juridictionnelle, au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et son premier protocole additionnel ; Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ; Vu la loi n° 48-1450 du 20 septembre 1948 ; Vu la loi n° 59-1454 du 26 décembre 1959 ; Vu la loi n° 62-873 du 31 juillet 1962 ; Vu la loi n° 64-1339 du 26 décembre 1964 Vu la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ; Vu la loi n° 74-1129 du 30 décembre 1974 ; Vu la loi n° 77-574 du 7 juin 1977 ; Vu la loi n° 79-1102 du 21 décembre 1979 ; Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; Vu la loi n° 2002-1576 du 30 décembre 2002, notamment son article 68 ; Vu la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010, notamment son article 211 ; Vu la décision n° 2010-1 QPC du Conseil constitutionnel du 28 mai 2010 ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Olivier Gariazzo, Maître des Requêtes en service extraordinaire, - les observations de la SCP Barthélemy, Matuchansky, Vexliard, avocat de Mme B et de M. A, - les conclusions de M. Frédéric Aladjidi, rapporteur public ; La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Barthélemy, Matuchansky, Vexliard, avocat de Mme B et de M. A ; Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que M. M'Hamed C, ressortissant algérien, rayé des contrôles de l'armée active en 1945 et dont la pension a été liquidée en 1949, est décédé le 13 mars 1970 ; que par un courrier du 2 janvier 2002, Mme Yamina B, sa veuve, et M. Zeggaï A, représentant les héritiers de M. M'Hamed C, ont demandé au Premier ministre, d'une part, la revalorisation de la pension de réversion que détient Mme B du chef de son époux défunt au titre de sa pension militaire de retraite et de sa retraite du combattant, à un taux décristallisé, et le versement des arrérages correspondants et, d'autre part, la revalorisation de la pension militaire de retraite et de la retraite du combattant de M. M'Hamed C, à un taux décristallisé, et le versement des arrérages correspondants à ses héritiers ; que Mme Yamina B et M. Zeggaï A ont saisi le 16 avril 2002 le tribunal administratif d'une demande tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet née du silence gardé par le Premier ministre en tant qu'elle a refusé de faire droit à leurs prétentions et à enjoindre à l'Etat de procéder aux revalorisations demandées, et ont présenté un mémoire en réplique tendant en outre à la condamnation de l'Etat à leur verser la somme de 50 000 euros au titre des dommages et intérêts pour résistance abusive ; que, par arrêté du 2 mai 2005, l'administration a procédé à l'octroi d'une pension de réversion à un taux décristallisé au titre de la pension militaire de retraite de M. M'Hamed C et aux rappels d'arrérages correspondants à compter du 1er janvier 1998 ; que Mme Yamina B et M. Zeggaï A se pourvoient en cassation contre l'ordonnance du 31 décembre 2008 du président de la cinquième section du tribunal administratif de Paris en tant que, par cette ordonnance, le tribunal, après avoir annulé la décision implicite du Premier ministre en tant qu'elle rejetait leur demande de réversion de la pension de Mme Yamina B, et mis à la charge de l'Etat, pour la période postérieure au 1er janvier 1998, le versement des arrérages correspondant à la différence entre le montant de sa pension de réversion revalorisée et ce qui lui a déjà été versé, ainsi que les intérêts capitalisés y afférents, a rejeté le surplus des conclusions de leur demande tendant d'une part au versement des rappels d'arrérages dus au titre de la pension militaire de retraite et de la retraite du combattant de M. M'Hamed C, d'autre part, au versement à Mme B des rappels d'arrérages pour la période antérieure au 1er janvier 1998 ; Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi ; Considérant qu'aux termes du troisième alinéa de l'article R. 742-2 du code de justice administrative, dans sa rédaction issue du décret du 28 juillet 2005, applicable à la date de l'ordonnance attaquée : " Dans le cas prévu au 6° des articles R. 122-12 et R. 222-1, l'ordonnance vise la décision ou l'avis par lequel ont été tranchées ou examinées les questions identiques à celles que la requête présente à juger " ; Considérant que l'ordonnance du 31 décembre 2008 du président de la cinquième section du tribunal administratif de Paris, rendue sur le fondement du 6° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, ne comporte pas le visa de la décision ou de l'avis par lequel auraient été tranchées ou examinées les questions identiques à celles que la requête de Mme Yamina B et M. Zeggaï A présentait à juger ; que l'absence de cette mention, dans les visas comme dans les motifs de l'arrêt, est de nature à entacher d'irrégularité l'ordonnance attaquée ; que son article 5 doit, par suite, être annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions des requérants tendant d'une part au versement des rappels d'arrérages dus au titre de la pension militaire de retraite et de la retraite du combattant de M. M'Hamed C, d'autre part, au versement à Mme B des rappels d'arrérages pour la période antérieure au 1er janvier 1998 ; Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative et de régler dans cette mesure l'affaire au fond ; Sur les rappels d'arrérages de la pension de réversion de Mme B : Considérant qu'aux termes de l'article 68 de la loi du 30 décembre 2002 portant loi de finances rectificative pour 2002, applicable à la demande de pension de M. M'Hamed C : " I. Les prestations servies en application des articles (...) 71 de la loi de finances pour 1960 (n° 59-1454 du 26 décembre 1959) (...) sont calculées dans les conditions prévues aux paragraphes suivants. / (...) IV. Sous les réserves mentionnées au deuxième alinéa du présent IV et sans préjudice des prescriptions prévues aux articles L. 108 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, L. 74 du code des pensions civiles et militaires de retraite, dans sa rédaction issue de la loi n° 48-1450 du 20 septembre 1948 portant réforme du régime des pensions civiles et militaires et ouverture de crédits pour la mise en application de cette réforme, et L. 53 du même code, dans sa rédaction issue de la loi n° 64-1339 du 26 décembre 1964 portant réforme du code des pensions civiles et militaires de retraite (partie Législative), les dispositions des II et III sont applicables à compter du 1er janvier 1999. / Ce dispositif spécifique s'applique sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée et des contentieux contestant le caractère discriminatoire des textes visés au I, présentés devant les tribunaux avant le 1er novembre 2002 (...) " ; que ces dispositions n'ont ni pour objet ni pour effet de faire obstacle à ce que les règles de prescription mentionnées au premier alinéa du IV s'appliquent aux contentieux présentés devant les tribunaux avant le 1er novembre 2002 ; Considérant qu'aux termes de l'article L. 53 du code des pensions civiles et militaires de retraite, dans sa rédaction applicable à la date de demande de pension de Mme B : " Lorsque, par suite du fait personnel du pensionné, la demande de liquidation ou de révision de la pension est déposée postérieurement à l'expiration de la quatrième année qui suit celle de l'entrée en jouissance normale de la pension, le titulaire ne peut prétendre qu'aux arrérages afférents à l'année au cours de laquelle la demande a été déposée et aux quatre années antérieures " ; que les demandes tendant à la revalorisation des arrérages d'une pension cristallisée s'analysent comme des demandes de liquidation de pension au sens de ces dispositions ; qu'ainsi, compte tenu de la date de présentation de sa demande, soit le 2 janvier 2002, la date à partir de laquelle Mme B avait droit aux compléments d'arrérages de sa pension de réversion est celle du 1er janvier 1998 ; que, par suite, ses conclusions tendant à la révision de sa pension pour la période antérieure au 1er janvier 1998 ne peuvent qu'être rejetées ; Sur les conclusions de M. Zeggaï A tendant au versement de rappels d'arrérages au titre de la pension militaire de retraite et de la retraite du combattant de M. M'Hamed C : Considérant qu'aux termes de l'article L. 1 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " La pension est une allocation pécuniaire, personnelle et viagère accordée aux fonctionnaires (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions qu'en raison du caractère personnel d'une pension de retraite, celle-ci n'est due qu'au titulaire du droit à pension qui en fait la demande ; qu'il en va de même pour la retraite du combattant qui en constitue l'accessoire ; que ce droit ne constitue ainsi pas une créance qui pourrait être regardée comme un bien transmis aux héritiers lors du décès de ce bénéficiaire, hors le cas où ce dernier s'est prévalu de ce droit avant son décès, sans qu'un refus définitif ne lui ait été opposé ; que, par suite, si le décès du titulaire du droit à pension a normalement pour effet l'extinction définitive de ce droit qui était ouvert à son bénéfice exclusif, ses héritiers ne pouvant se prévaloir de ce droit, sauf pour obtenir le cas échéant une pension de réversion, il en va autrement dans l'hypothèse où le titulaire du droit a réclamé de son vivant, en saisissant l'administration ou en engageant une action contentieuse, la concession de sa pension, et qu'il n'a pas été statué définitivement sur sa demande ; que dans cette hypothèse, ses héritiers justifient d'un intérêt leur donnant qualité pour agir en vue de la reconnaissance de cet avantage ; Considérant qu'il est constant que M. M'Hamed C n'a pas présenté avant son décès de demande tendant à la revalorisation de sa pension militaire de retraite et de sa retraite du combattant ; que, par suite, les conclusions de M. Zeggaï A, agissant en qualité d'héritier de son père et tendant à ce que lui soient versés les rappels d'arrérages au titre de cette pension, ne peuvent qu'être rejetées ; Sur les conclusions à fin d'injonction : Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions tendant à enjoindre au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, et au ministre de la défense, de verser les arrérages correspondant à la revalorisation de la pension de réversion de Mme B au titre de la période précédant le 1er janvier 1998 ne peuvent qu'être rejetées ; Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Considérant qu'il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 par la SCP Barthélémy-Matuchansky-Vexliard, avocat de Mme B et M. Zeggaï A ;D E C I D E : -------------- Article 1er : L'article 5 de l'ordonnance du président de la cinquième section du tribunal administratif de Paris du 31 décembre 2008 est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de Mme B et de M. A tendant d'une part au versement des rappels d'arrérages dus au titre de la pension militaire de retraite et de la retraite du combattant de M. M'Hamed C, d'autre part, au versement à Mme B des rappels d'arrérages pour la période antérieure au 1er janvier 1998. Article 2 : Les conclusions de la demande de Mme B et de M. Zeggaï A présentée devant le tribunal administratif de Paris tendant d'une part au versement des rappels d'arrérages dus au titre de la pension militaire de retraite et de la retraite du combattant de M. M'Hamed C, et d'autre part, au versement à Mme B des rappels d'arrérages pour la période antérieure au 1er janvier 1998, sont rejetées. Article 3 : Les conclusions de l'avocat de Mme B et M. Zeggaï A tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme Yamina B, à M. Zeggaï A, au ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et du commerce extérieur, chargé du budget et au ministre de la défense.
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 1ère et 6ème sous-sections réunies, 31/05/2012, 354061
Vu le pourvoi, enregistré le 15 novembre 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT, PORTE-PAROLE DU GOUVERNEMENT ; le ministre demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler le jugement n° 1100144 du 15 septembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Bastia a, d'une part, annulé la décision du 18 janvier 2011 par lequel le directeur du service des pensions de la Poste et de France Télécom avait rejeté la demande de révision de la pension civile de retraite de M. Roger A afin d'obtenir la bonification prévue par le décret du 29 juillet 2010 portant attribution du bénéfice de la campagne double aux anciens combattants d'Afrique du Nord et, d'autre part, enjoint au ministre du budget de procéder à cette révision ; 2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la demande de M. A ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ; Vu le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ; Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ; Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ; Vu la loi n° 99-882 du 18 octobre 1999 ; Vu le décret n° 2010-890 du 29 juillet 2010 ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Jean Lessi, Maître des Requêtes, - les observations de la SCP Potier de la Varde, Buk Lament, avocat de M. A, - les conclusions de Mme Claire Landais, rapporteur public ; La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Potier de la Varde, Buk Lament, avocat de M. A ;Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 12 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " Aux services effectifs s'ajoutent, dans les conditions déterminées par un décret en Conseil d'Etat, les bonifications ci-après : / (...) c) bénéfices de campagne, notamment en temps de guerre et pour services à la mer et outre-mer " ; qu'aux termes de l'article R. 14 du même code : " Les bénéfices de campagne prévus à l'article L. 12, c), attribués en sus de la durée effective des services militaires sont décomptés selon les règles ci-après : / A. - Double en sus de la durée effective pour le service accompli en opérations de guerre : / 1° Soit dans les opérations des armées françaises et des armées alliées ; (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 19 de ce code : " La nature et la durée des bénéfices de campagne attribués en conformité des dispositions du présent chapitre sont fixées par voie de décisions du ministre intéressé et du ministre des finances qui déterminent également les conditions de cumul de plusieurs bénéfices de campagne acquis au titre d'une même période (...) " ; Considérant, d'autre part, que la loi du 18 octobre 1999 a substitué aux mots " aux opérations effectuées en Afrique du Nord " les mots " à la guerre d'Algérie ou aux combats en Tunisie et au Maroc " aux articles L. 1er bis, L. 243, L. 253 bis et L. 401 bis du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, ainsi qu'à l'article L. 321-9 du code de la mutualité ; que, par ces dispositions, le législateur a entendu permettre l'attribution du bénéfice de la campagne double aux titulaires de pensions civiles et militaires de l'Etat ayant participé à la guerre d'Algérie ou aux combats en Tunisie et au Maroc et accompli à ce titre des services militaires en opérations de guerre, selon des modalités déterminées par le ministre du budget et les ministres intéressés dans le cadre des pouvoirs qui leur sont attribués par l'article R. 19 du code des pensions civiles et militaires de retraite ; qu'en revanche, il ne résulte ni des termes de la loi, ni de ses travaux préparatoires que le législateur ait entendu donner une portée rétroactive aux dispositions qu'il a édictées, seule à même de permettre la révision des pensions liquidées avant leur entrée en vigueur, les décisions relatives à l'attribution de la campagne double n'ayant pas un caractère recognitif ; qu'ainsi, si le décret du 29 juillet 2010 portant attribution du bénéfice de la campagne double aux anciens combattants d'Afrique du Nord, contresigné par les ministres chargés de la fonction publique et du budget, a prévu, à ses articles 1er et 2, que le bénéfice de la campagne double était accordé pour toute journée durant laquelle les appelés du contingent et les militaires d'active exposés à des situations de combat ont pris part à une action de feu ou de combat ou ont subi le feu en Algérie, au Maroc, en Tunisie, entre le 1er janvier 1952 et le 2 juillet 1962, il résulte de son article 3 que seules les pensions de retraite liquidées à compter du 19 octobre 1999 peuvent, à compter de la demande des intéressés et sans ouvrir droit à intérêt de retard, être révisées dans les conditions qui viennent d'être rappelées ; Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que M. A, ancien fonctionnaire en poste chez France Télécom, radié des cadres le 26 décembre 1996, s'est vu concéder une pension proportionnelle de retraite par un arrêté du 20 janvier 1997 ; que, par un jugement du 16 septembre 2010, le tribunal administratif de Bastia a annulé cet arrêté en tant qu'il ne tenait pas compte de la bonification pour enfants prévue au b) de l'article L. 12 du code des pensions civiles et militaires de retraite ; qu'un arrêté du 11 octobre 2010 a procédé, en exécution de ce jugement, à une nouvelle liquidation de la pension et au versement des arrérages correspondants à compter du 1er janvier 2005 ; que M. A a saisi l'administration d'une demande de révision de sa pension, afin que soit pris en compte le bénéfice de campagne double auquel il estime avoir droit à raison du service militaire qu'il a effectué en Algérie entre mars 1961 et septembre 1962 ; que cette demande a été rejetée ; que, par le jugement attaqué du 15 septembre 2011, le tribunal administratif de Bastia a annulé la décision refusant de faire droit à cette demande et a enjoint à l'administration de réviser la pension de M. A ; que ce dernier demande, à l'appui de sa défense devant le Conseil d'Etat, que la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution de la loi du 18 octobre 1999 soit renvoyée au Conseil constitutionnel ; Sur la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par M. A : Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : " Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé, y compris pour la première fois en cassation, à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat (...) " ; qu'il résulte des dispositions de ce même article que le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux ; Considérant que M. A soutient que la loi du 18 octobre 1999 est contraire au principe d'égalité devant la loi ainsi qu'au principe d'égalité devant les charges publiques en ce qu'elle introduit une différence de traitement injustifiée entre les anciens combattants en Afrique du Nord, selon que leur pension civile ou militaire de retraite est liquidée avant ou après son entrée en vigueur ; que toutefois, la différence de traitement qui résulte de la succession de deux régimes juridiques dans le temps n'est pas, en elle-même, contraire au principe d'égalité ; que, s'agissant du régime applicable au calcul d'une pension de retraite, celui-ci est nécessairement déterminé par la date à laquelle les droits sont liquidés ; que, dans ces conditions, le respect des principes d'égalité devant la loi et d'égalité devant les charges publiques n'imposait pas au législateur de donner un caractère rétroactif à l'avantage de retraite qu'il instituait ; que, par suite, la question soulevée, qui n'est pas nouvelle, ne présente pas un caractère sérieux ; qu'ainsi, sans qu'il soit besoin de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée, le moyen invoqué en défense, tiré de ce que la loi du 18 octobre 1999 porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution, doit être écarté ; Sur le moyen du ministre : Considérant que, pour l'application des dispositions transitoires de l'article 3 du décret du 29 juillet 2010, la date à compter de laquelle la pension a été liquidée s'entend de la date à laquelle l'administration doit légalement se placer pour la détermination des droits à pension ; que, pour faire droit à la demande de M. A, le tribunal administratif de Bastia a estimé que l'arrêté du 20 janvier 1997 avait été retiré et remplacé par l'arrêté du 11 octobre 2010, et qu'il y avait dès lors lieu de se placer, en l'espèce, à la date fixée par ce nouvel arrêté pour le calcul des droits à pension de l'intéressé, soit le 1er janvier 2005 ; qu'en statuant ainsi, alors, d'une part, que cette date était seulement celle à compter de laquelle devaient être versés les arrérages dus à M. A conformément à la règle de prescription fixée par l'article L. 53 du code des pensions civiles et militaires de retraite et, d'autre part, que la circonstance que l'arrêté initial de concession ait été annulé par la juridiction administrative et que soit intervenu par la suite un arrêté procédant à une nouvelle liquidation de sa pension était sans incidence sur la date à laquelle les droits à pension de l'intéressé doivent légalement être appréciés, le tribunal a commis une erreur de droit ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT, PORTE-PAROLE DU GOUVERNEMENT est fondé à demander l'annulation du jugement qu'il attaque ; Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ; Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A a été radié des cadres le 26 décembre 1996 ; que cette date constitue, en l'espèce, celle à laquelle l'administration devait légalement se placer pour apprécier ses droits à pension sans que, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, l'annulation de l'arrêté initial de concession et l'intervention d'un nouvel arrêté procédant à la liquidation de sa pension aient d'incidence à cet égard ; qu'ainsi, sa demande n'entre pas dans les prévisions de l'article 3 du décret du 29 juillet 2010 ; que M. A ne saurait, en tout état de cause, exciper de l'incompatibilité de cette disposition avec les stipulations de l'ancien article 141 du traité instituant la Communauté européenne, reprises désormais à l'article 157 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, dès lors que ces stipulations, qui garantissent l'égalité de rémunération entre travailleurs masculins et travailleurs féminins, ne concernent pas le bénéfice de la campagne double ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la demande présentée par M. A devant le tribunal administratif de Bastia doit être rejetée ; Sur les conclusions de M. A présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;D E C I D E : -------------- Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par M. A. Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Bastia du 15 septembre 2011 est annulé. Article 3 : La demande présentée par M. A devant le tribunal administratif de Bastia et ses conclusions présentées devant le Conseil d'Etat au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 4 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DU COMMERCE EXTERIEUR et à M. Roger A. Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel.ECLI:FR:CESSR:2012:354061.20120531
Conseil d'Etat
Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 05/06/2012, 10PA01085, Inédit au recueil Lebon
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 25 février 2010 et 3 août 2011, présentés pour M. Djelloul A, demeurant à ..., par Me Rodrigue-Moriconi ; M. A demande à la Cour : 1°) d'annuler l'ordonnance n° 0909555/12-1 en date du 18 janvier 2010 par laquelle le vice-président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 29 décembre 2008 par laquelle le préfet de la région Île-de-France, préfet de Paris, lui a refusé l'attribution de la carte du combattant ; 2°) d'annuler pour excès de pouvoir cette décision ; 3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer la carte du combattant sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter du prononcé de l'arrêt à intervenir ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3000 euros, à verser à son avocat en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; ........................................................................................................................ Vu les autres pièces du dossier ; Vu la Constitution, notamment ses articles 61-1 et 62 ; Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; Vu la décision n° 2010-18 QPC du 23 juillet 2010 du Conseil constitutionnel ; Vu la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ; Vu le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 mai 2012 : - le rapport de M. Dellevedove, rapporteur, - et les conclusions de M. Rousset, rapporteur public ; Considérant que M. A, ressortissant algérien, fait appel de l'ordonnance en date du 18 janvier 2010 par laquelle le vice-président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 29 décembre 2008 par laquelle le préfet de la région Île-de-France, préfet de Paris, lui a refusé l'attribution de la carte du combattant ; Sur les conclusions à fin d'annulation : Considérant qu'aux termes de l'article L. 253 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " Il est créé une carte de combattant qui est attribuée dans les conditions fixées aux articles R. 223 à R. 235. " ; qu'aux termes de l'article L. 253 bis du même code dans sa rédaction alors en vigueur : " Ont vocation à la qualité de combattant et à l'attribution de la carte du combattant, selon les principes retenus pour l'application du présent titre et des textes réglementaires qui le complètent, sous la seule réserve des adaptations qui pourraient être rendues nécessaires par le caractère spécifique de la guerre d'Algérie ou des combats en Tunisie et au Maroc entre le 1er janvier 1952 et le 2 juillet 1962 : /Les militaires des armées françaises, / Les membres des forces supplétives françaises possédant la nationalité française à la date de la présentation de leur demande ou domiciliés en France à la même date ,/ Les personnes civiles possédant la nationalité française à la date de la présentation de leur demande qui ont pris part à des actions de feu ou de combat au cours de ces opérations. / Une commission d'experts, comportant notamment des représentants des intéressés, est chargée de déterminer les modalités selon lesquelles la qualité de combattant peut, en outre, être reconnue, par dérogation aux principes visés à l'alinéa précédent, aux personnes ayant pris part à cinq actions de feu ou de combat ou dont l'unité aura connu, pendant leur temps de présence, neuf actions de feu ou de combat. Les adaptations visées au premier alinéa ci-dessus ainsi que les modalités d'application du présent article, et notamment les périodes à prendre en considération pour les différents théâtres d'opérations, seront fixées par décret en Conseil d'Etat ; un arrêté interministériel énumérera les catégories de formations constituant les forces supplétives françaises. /Une durée des services d'au moins quatre mois dans l'un ou l'autre ou dans plusieurs des pays mentionnés au premier alinéa est reconnue équivalente à la participation aux actions de feu ou de combat exigée au cinquième alinéa. " ; qu'aux termes de l'article R. 223 du même code : " La carte du combattant prévue à l'article L. 253 est attribuée à toutes les personnes qui justifient de la qualité de combattant dans les conditions déterminées par les articles R. 224 à R. 229. " ; qu'aux termes de l'article R. 224 du même code dans sa rédaction alors en vigueur : " Sont considérés comme combattants : (...) / D - Pour les opérations effectuées en Afrique du Nord entre le 1er janvier 1952 et le 2 juillet 1962 inclus : (...) / c) En Algérie, à compter du 31 octobre 1954. / I. - Sont considérés comme des combattants les militaires des armées françaises et les membres des forces supplétives françaises :1° Qui ont appartenu pendant trois mois, consécutifs ou non, à une unité combattante ou à une formation entrant dans l'une des catégories énumérées par l'arrêté interministériel prévu au troisième alinéa de l'article L. 253 bis et assimilée à une unité combattante ; /Pour le calcul de la durée d'appartenance, les services accomplis au titre d'opérations antérieures se cumulent entre eux et avec ceux des opérations d'Afrique du Nord ; /Des bonifications afférentes à des situations personnelles résultant du contrat d'engagement sont accordées pour une durée ne pouvant excéder dix jours, suivant les modalités d'application fixées par arrêtés des ministres intéressés ; /2° Qui ont appartenu à une unité ayant connu, pendant leur temps de présence, neuf actions de feu ou de combat ; /3° Qui ont pris part à cinq actions de feu ou de combat ; /4° Qui ont été évacués pour blessure reçue ou maladie contractée en service, alors qu'ils appartenaient à une unité combattante ou à une formation assimilée sans condition de durée de séjour dans cette unité ou formation ;/ 5° Qui ont reçu une blessure assimilée à une blessure de guerre quelle que soit l'unité ou la formation à laquelle ils ont appartenu, sans condition de durée de séjour dans cette unité ou formation ; /6° Qui ont été détenus par l'adversaire et privés de la protection des conventions de Genève. (...) " ; que l'arrêté inter ministériel du 11 février 1975 susvisé qui énumère les formations constituant les forces supplétives françaises qui ont participé aux opérations effectuées en Afrique du Nord entre le 1er janvier 1952 et le 2 juillet 1962 mentionne notamment " 1. Les formations de harkis (...) " ; Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et notamment de l'" attestation de services militaires " établie par les services du ministère de la défense le 13 janvier 2006 et qu'il n'est pas contesté que M. A a servi notamment dans les forces supplétives françaises en qualité de harki du 16 avril au 31 décembre 1959, du 1er au 17 janvier 1961 et du 1er juillet au 30 septembre 1961 ; qu'il a donc été membre des forces supplétives françaises pendant une période d'au moins 4 mois et remplit ainsi, contrairement aux motifs de la décision contestée du 29 décembre 2008 du préfet de la région Île-de-France, préfet de Paris, la condition de services et de durée posée par les dispositions précitées du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre lui ouvrant droit à la reconnaissance de la qualité de combattant ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité de l'ordonnance attaquée, que M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que, par cette ordonnance, le vice président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 29 décembre 2008 par laquelle le préfet de la région Île-de-France, préfet de Paris lui a refusé la qualité de combattant au motif qu'il ne justifiait pas d'une " présence en Afrique du Nord pendant au minimum 120 jours " ; Sur les conclusions à fin d'injonction : Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une décision dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " ; Considérant que M. A doit être regardé comme demandant à la Cour, sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, d'enjoindre au préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris, de lui attribuer la carte du combattant; Considérant qu'il appartient au juge de l'exécution de statuer en tenant compte des éléments de droit et de fait existant à la date de sa décision ; Considérant que, par une décision n° 2010-18 QPC du 23 juillet 2010, le Conseil constitutionnel a déclaré contraires à la Constitution les conditions de nationalité et de domiciliation imposées par le troisième alinéa de l'article 253 bis du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; que ces dispositions législatives ont été abrogées à compter du 24 juillet 2010, date de la publication de la décision n° 2010-18 QPC au journal officiel de la République française ; qu'eu égard à la rédaction de l'article L. 253 bis en vigueur à la date du présent arrêt et compte tenu du motif qui a été retenu pour annuler la décision refusant à M. A la qualité de combattant, l'exécution du présent arrêt implique nécessairement que la qualité de combattant soit reconnue à M. A et que la carte du combattant soit attribuée à ce dernier ; que, dès lors, il y a lieu de prescrire au préfet de délivrer à l'intéressé la carte du combattant dans un délai de quatre mois à compter de la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ; Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de loi du 10 juillet 1991 : Considérant que M. A a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article 37 de la loi susvisée du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Rodrigue-Moriconi renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros à ce titre ; D E C I D E : Article 1er : L'ordonnance susvisée du vice-président du Tribunal administratif de Paris en date du 18 janvier 2010 et la décision du préfet de la région Île-de-France, préfet de Paris, en date du 29 décembre 2008 sont annulées. Article 2 : Il est enjoint au préfet de la région Île-de-France, préfet de Paris, de délivrer à M. A, dans un délai de quatre mois à compter de la notification du présent arrêt, la carte du combattant. Article 3 : L'Etat versera à Me Rodrigue-Moriconi la somme de 1 000 euros, en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que celui-ci renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat. '' '' '' '' 2 N° 10PA01085
Cours administrative d'appel
Paris
Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 05/06/2012, 10PA05440, Inédit au recueil Lebon
Vu, enregistrée le 17 novembre 2010, l'ordonnance n° 328132, en date du 5 novembre 2010, par laquelle le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a renvoyé le jugement de la requête de M. Boufedja A à la Cour administrative d'appel de Paris ; Vu la requête sommaire, enregistrée le 17 juin 2009 au secrétariat de la section du contentieux du Conseil d'État, et les mémoires complémentaires, enregistrés les 17 novembre 2010, 10 novembre 2011 et 4 janvier 2012 au greffe de la Cour, présentés pour M. Boufedja A, demeurant ..., par Me Taulet ; M. A demande à la Cour : 1°) d'annuler l'ordonnance n° 080192/12 en date du 20 avril 2009 par laquelle le vice-président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 14 mai 2007 par laquelle le préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, lui a refusé l'attribution de la carte du combattant ; 2°) d'annuler pour excès de pouvoir cette décision ; 2°) d'enjoindre à l'État de lui délivrer la carte du combattant ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1200 euros, à verser à son avocat en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; ..................................................................................................................... Vu les autres pièces du dossier ; Vu la Constitution, notamment ses articles 61-1 et 62 ; Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; Vu la décision n° 2010-18 QPC du 23 juillet 2010 du Conseil constitutionnel ; Vu la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ; Vu le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 mai 2012 : - le rapport de M. Dellevedove, rapporteur, - et les conclusions de M. Rousset, rapporteur public ; Considérant que M. A, ressortissant algérien, fait appel de l'ordonnance en date du 20 avril 2009 par laquelle le vice-président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 14 mai 2007 par laquelle le préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris lui a refusé l'attribution de la carte du combattant ; Sur les conclusions à fin d'annulation, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité de l'ordonnance attaquée : Considérant qu'aux termes de l'article L. 253 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " Il est créé une carte de combattant qui est attribuée dans les conditions fixées aux articles R. 223 à R. 235. " ; qu'aux termes de l'article L. 253 bis du même code dans sa rédaction alors en vigueur : " Ont vocation à la qualité de combattant et à l'attribution de la carte du combattant, selon les principes retenus pour l'application du présent titre et des textes réglementaires qui le complètent, sous la seule réserve des adaptations qui pourraient être rendues nécessaires par le caractère spécifique de la guerre d'Algérie ou des combats en Tunisie et au Maroc entre le 1er janvier 1952 et le 2 juillet 1962 : /Les militaires des armées françaises, / Les membres des forces supplétives françaises possédant la nationalité française à la date de la présentation de leur demande ou domiciliés en France à la même date ,/ Les personnes civiles possédant la nationalité française à la date de la présentation de leur demande qui ont pris part à des actions de feu ou de combat au cours de ces opérations. / Une commission d'experts, comportant notamment des représentants des intéressés, est chargée de déterminer les modalités selon lesquelles la qualité de combattant peut, en outre, être reconnue, par dérogation aux principes visés à l'alinéa précédent, aux personnes ayant pris part à cinq actions de feu ou de combat ou dont l'unité aura connu, pendant leur temps de présence, neuf actions de feu ou de combat. Les adaptations visées au premier alinéa ci-dessus ainsi que les modalités d'application du présent article, et notamment les périodes à prendre en considération pour les différents théâtres d'opérations, seront fixées par décret en Conseil d'Etat ; un arrêté interministériel énumérera les catégories de formations constituant les forces supplétives françaises. /Une durée des services d'au moins quatre mois dans l'un ou l'autre ou dans plusieurs des pays mentionnés au premier alinéa est reconnue équivalente à la participation aux actions de feu ou de combat exigée au cinquième alinéa. " ; qu'aux termes de l'article R. 223 du même code : " La carte du combattant prévue à l'article L. 253 est attribuée à toutes les personnes qui justifient de la qualité de combattant dans les conditions déterminées par les articles R. 224 à R. 229. " ; qu'aux termes de l'article R. 224 du même code dans sa rédaction alors en vigueur : " Sont considérés comme combattants : (...) / D - Pour les opérations effectuées en Afrique du Nord entre le 1er janvier 1952 et le 2 juillet 1962 inclus : (...) / c) En Algérie, à compter du 31 octobre 1954. / I. - Sont considérés comme des combattants les militaires des armées françaises et les membres des forces supplétives françaises :1° Qui ont appartenu pendant trois mois, consécutifs ou non, à une unité combattante ou à une formation entrant dans l'une des catégories énumérées par l'arrêté interministériel prévu au troisième alinéa de l'article L. 253 bis et assimilée à une unité combattante ; /Pour le calcul de la durée d'appartenance, les services accomplis au titre d'opérations antérieures se cumulent entre eux et avec ceux des opérations d'Afrique du Nord ; /Des bonifications afférentes à des situations personnelles résultant du contrat d'engagement sont accordées pour une durée ne pouvant excéder dix jours, suivant les modalités d'application fixées par arrêtés des ministres intéressés ; /2° Qui ont appartenu à une unité ayant connu, pendant leur temps de présence, neuf actions de feu ou de combat ; /3° Qui ont pris part à cinq actions de feu ou de combat ; /4° Qui ont été évacués pour blessure reçue ou maladie contractée en service, alors qu'ils appartenaient à une unité combattante ou à une formation assimilée sans condition de durée de séjour dans cette unité ou formation ;/ 5° Qui ont reçu une blessure assimilée à une blessure de guerre quelle que soit l'unité ou la formation à laquelle ils ont appartenu, sans condition de durée de séjour dans cette unité ou formation ; /6° Qui ont été détenus par l'adversaire et privés de la protection des conventions de Genève. (...) " ; que l'arrêté inter ministériel du 11 février 1975 susvisé qui énumère les formations constituant les forces supplétives françaises qui ont participé aux opérations effectuées en Afrique du Nord entre le 1er janvier 1952 et le 2 juillet 1962 mentionne notamment " 1. Les formations de harkis (...) " ; Considérant que, par la décision susvisée en date du 23 juillet 2010, le Conseil constitutionnel a déclaré contraire à la Constitution les mots du troisième alinéa de l'article L. 253 bis, " possédant la nationalité française à la date de la présentation de leur demande ou domicilié en France à la même date ", au motif que le législateur ne pouvait établir, au regard de l'objet de la loi et pour l'attribution de la carte du combattant, une différence de traitement selon la nationalité ou le domicile entre les membres de forces supplétives et que l'exigence d'une telle condition de nationalité et de domiciliation est contraire au principe d'égalité ; Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment de l'" extrait des services " établi par les services du ministère de la défense le 9 octobre 2003, et qu'il n'est pas contesté que l'intéressé, qui a servi en qualité de harki, soit au sein des forces supplétives françaises, du 1er octobre 1955 au 4 avril 1959, remplissait les conditions de services prévues par les dispositions précitées du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre et, en particulier, la condition de durée prévue au dernier alinéa de l'article L. 253 bis dudit code ; que, dès lors, M. A, qui invoque expressément le moyen tiré de la discrimination qui lui a été opposée en raison de sa nationalité et de son domicile, est fondé à soutenir que le ministre, pour ce motif, a entaché sa décision d'illégalité ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le vice-président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 14 mai 2007 par laquelle le ministre de la défense lui a refusé l'attribution de la carte du combattant ; Sur les conclusions à fin d'injonction : Considérant que le présent arrêt, qui annule la décision par laquelle le ministre de la défense lui a refusé l'attribution de la carte du combattant, implique nécessairement la délivrance à M. A de la carte sollicitée ; qu'il y a lieu de prescrire la délivrance à l'intéressé de la carte du combattant dans un délai de quatre mois à compter de la notification du présent arrêt ; Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de loi du 10 juillet 1991 : Considérant que M. A a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article 37 de la loi susvisée du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Taulet renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros, à ce titre ; D E C I D E : Article 1er : L'ordonnance susvisée du vice-président du Tribunal administratif de Paris en date du 20 avril 2009 et la décision du ministre de la défense en date du 14 mai 2007 sont annulées. Article 2 : Il est enjoint au préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, de faire délivrer à M. A, dans un délai de quatre mois à compter de la notification du présent arrêt, la carte du combattant. Article 3 : L'Etat versera à Me Taulet la somme de 1 000 euros, en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que celui-ci renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat. '' '' '' '' 2 N° 10PA05440
Cours administrative d'appel
Paris
Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 05/06/2012, 10PA02575, Inédit au recueil Lebon
Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 26 mai 2010 et 29 avril 2011, présentés pour M. Mohammed A, demeurant ..., par Me Canavaggio ; M. A demande à la Cour : 1°) d'annuler l'ordonnance n° 0920597/12 en date du 3 mai 2010 par laquelle le vice-président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 6 novembre 2009 par laquelle le préfet de la région Île-de-France, préfet de Paris, a refusé de lui attribuer la carte du combattant ; 2°) d'annuler pour excès de pouvoir cette décision ; 3°) d'enjoindre à l'administration de lui délivrer la carte du combattant ; ..................................................................................................................... Vu les autres pièces du dossier ; Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 mai 2012 : - le rapport de M. Dellevedove, rapporteur, - et les conclusions de M. Rousset, rapporteur public ; Considérant que M. A, ressortissant algérien, fait appel de l'ordonnance en date du 3 mai 2010 par laquelle le vice-président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 6 novembre 2009 par laquelle le préfet de la région Île-de-France, préfet de Paris, lui a refusé l'attribution de la carte du combattant ; Sur la légalité de la décision du préfet : Considérant, en premier lieu, que M. A n'a présenté devant le Tribunal administratif de Paris que des moyens de légalité interne à l'appui de son recours pour excès de pouvoir ; que, dès lors, le moyen de légalité externe soulevé devant la Cour et tiré de la motivation insuffisante de la décision contestée est nouveau en cause d'appel et ne peut qu'être écarté ; Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 253 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " Il est créé une carte de combattant qui est attribuée dans les conditions fixées aux articles R. 223 à R. 235. " ; qu'aux termes de l'article L. 253 bis du même code dans sa rédaction alors en vigueur : " Ont vocation à la qualité de combattant et à l'attribution de la carte du combattant, selon les principes retenus pour l'application du présent titre et des textes réglementaires qui le complètent, sous la seule réserve des adaptations qui pourraient être rendues nécessaires par le caractère spécifique de la guerre d'Algérie ou des combats en Tunisie et au Maroc entre le 1er janvier 1952 et le 2 juillet 1962 : /Les militaires des armées françaises, / Les membres des forces supplétives françaises possédant la nationalité française à la date de la présentation de leur demande ou domiciliés en France à la même date ,/ Les personnes civiles possédant la nationalité française à la date de la présentation de leur demande qui ont pris part à des actions de feu ou de combat au cours de ces opérations. / Une commission d'experts, comportant notamment des représentants des intéressés, est chargée de déterminer les modalités selon lesquelles la qualité de combattant peut, en outre, être reconnue, par dérogation aux principes visés à l'alinéa précédent, aux personnes ayant pris part à cinq actions de feu ou de combat ou dont l'unité aura connu, pendant leur temps de présence, neuf actions de feu ou de combat. Les adaptations visées au premier alinéa ci-dessus ainsi que les modalités d'application du présent article, et notamment les périodes à prendre en considération pour les différents théâtres d'opérations, seront fixées par décret en Conseil d'Etat ; un arrêté interministériel énumérera les catégories de formations constituant les forces supplétives françaises. /Une durée des services d'au moins quatre mois dans l'un ou l'autre ou dans plusieurs des pays mentionnés au premier alinéa est reconnue équivalente à la participation aux actions de feu ou de combat exigée au cinquième alinéa. " ; qu'aux termes de l'article R. 223 du même code : " La carte du combattant prévue à l'article L. 253 est attribuée à toutes les personnes qui justifient de la qualité de combattant dans les conditions déterminées par les articles R. 224 à R. 229. " ; qu'aux termes de l'article R. 224 du même code dans sa rédaction alors en vigueur : " Sont considérés comme combattants : (...) / C- Pour les opérations effectuées après le 2 septembre 1939 : / (...) I.- Militaires / Les militaires des armées de terre, de mer et de l'air : / 1° Qui ont appartenu pendant trois mois, consécutifs ou non, aux unités énumérées aux listes établies par le ministère de la défense nationale et, s'il y a lieu, par le ministre chargé de la France d'outre-mer (...) / D - Pour les opérations effectuées en Afrique du Nord entre le 1er janvier 1952 et le 2 juillet 1962 inclus : (...) / c) En Algérie, à compter du 31 octobre 1954. / I. - Sont considérés comme des combattants les militaires des armées françaises et les membres des forces supplétives françaises : / 1° Qui ont appartenu pendant trois mois, consécutifs ou non, à une unité combattante ou à une formation entrant dans l'une des catégories énumérées par l'arrêté interministériel prévu au troisième alinéa de l'article L. 253 bis et assimilée à une unité combattante ; /Pour le calcul de la durée d'appartenance, les services accomplis au titre d'opérations antérieures se cumulent entre eux et avec ceux des opérations d'Afrique du Nord ; /Des bonifications afférentes à des situations personnelles résultant du contrat d'engagement sont accordées pour une durée ne pouvant excéder dix jours, suivant les modalités d'application fixées par arrêtés des ministres intéressés ; /2° Qui ont appartenu à une unité ayant connu, pendant leur temps de présence, neuf actions de feu ou de combat ; /3° Qui ont pris part à cinq actions de feu ou de combat ; /4° Qui ont été évacués pour blessure reçue ou maladie contractée en service, alors qu'ils appartenaient à une unité combattante ou à une formation assimilée sans condition de durée de séjour dans cette unité ou formation ;/ 5° Qui ont reçu une blessure assimilée à une blessure de guerre quelle que soit l'unité ou la formation à laquelle ils ont appartenu, sans condition de durée de séjour dans cette unité ou formation ; /6° Qui ont été détenus par l'adversaire et privés de la protection des conventions de Genève. (...) " ; Considérant que M. A soutenait en première instance avoir appartenu à une unité combattante de l'armée française pendant la seconde guerre mondiale et avoir droit à ce titre à la carte du combattant ; que, par la décision litigieuse, le préfet de la région Île-de-France, préfet de Paris, a refusé de faire droit aux prétentions de l'intéressé au motif notamment qu'il n'a pas appartenu pendant 90 jours au moins à une unité figurant sur la liste des unités qui ont été reconnues unités combattantes, au sens des dispositions précitées ; que M. A ne saurait sérieusement contester le motif retenu par le préfet en se bornant à produire un extrait de livret individuel, dont le contenu ne permet pas d'affirmer qu'il serait effectivement le sien en ce qu'il comporte notamment une date de naissance différente de la sienne et dont le titulaire a reçu une seule affectation au 10ème bataillon du 67ème régiment d'artillerie algérienne à compter du 2 mars 1946, soit après la fin du second conflit mondial ; qu'à supposer que M. A ait entendu faire valoir qu'il aurait appartenu aux forces supplétives françaises, il ne fournit aucun commencement de preuve au soutien de ses allégations ; que, si M. A soulève le moyen tiré de la discrimination dont il aurait fait l'objet en raison de sa nationalité en méconnaissance de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, l'article L. 253 bis du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre réservant aux seuls membres des forces supplétives françaises possédant la nationalité française qui en remplissent les conditions le bénéfice de la carte du combattant, ce moyen est, en l'espèce, inopérant dans la mesure où il n'établit pas avoir appartenu aux forces supplétives françaises, ainsi qu'il a été dit, ni même ne soutient avoir pris part à des actions de feu ou de combat en Afrique du Nord au sens des dispositions du I de l'article R. 224-D de ce code ; qu'il ne se prévaut d'aucune autre condition de nature à lui ouvrir droit à la qualité de combattant ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le vice-président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; Sur les conclusions à fin d'injonction : Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de M. A, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent qu'être rejetées ; D E C I D E : Article 1er : La requête susvisée de M. A est rejetée. '' '' '' '' 2 N° 10PA02575
Cours administrative d'appel
Paris
Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre (formation à 3), 29/05/2012, 09BX02653, Inédit au recueil Lebon
Vu l'arrêt n° 09BX02653, en date du 6 avril 2010, par lequel la présente cour, avant de statuer sur la demande de M. A tendant, d'une part, à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion du 30 juin 2009 en ce qu'il a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'attribution d'une rente viagère d'invalidité, d'autre part, à la liquidation de cette rente viagère, a invité le ministre de l'éducation nationale ainsi que le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat à produire leurs observations en défense ; --------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ; Vu le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 mai 2012 : - le rapport de Mme Dominique Boulard, président-assesseur ; - et les conclusions de Mme Marie-Pierre Dupuy, rapporteur public ; Considérant qu'aux termes de l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " Le fonctionnaire civil qui se trouve dans l'incapacité permanente de continuer ses fonctions en raison d'infirmités résultant de blessures ou de maladie contractées ou aggravées (...) en service (...) et qui n'a pu être reclassé dans un autre corps en application de l'article 63 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précitée peut être radié des cadres (...) par anticipation soit sur sa demande, soit d'office (...) ; qu'aux termes de l'article L. 28 du même code : " Le fonctionnaire civil radié des cadres dans les conditions prévues à l'article L. 27 a droit à une rente viagère d'invalidité cumulable avec la pension rémunérant les services. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 29 du même code : " Le fonctionnaire civil qui se trouve dans l'incapacité permanente de continuer ses fonctions en raison d'une invalidité ne résultant pas du service et qui n'a pu être reclassé dans un autre corps (...) peut être radié des cadres par anticipation soit sur sa demande, soit d'office ; dans ce dernier cas, la radiation des cadres est prononcée sans délai si l'inaptitude résulte d'une maladie ou d'une infirmité que son caractère définitif et stabilisé ne rend pas susceptible de traitement, ou à l'expiration d'un délai de douze mois à compter de sa mise en congé si celle-ci a été prononcée en application de l'article 36 (2°) de l'ordonnance du 4 février 1959 relative au statut général des fonctionnaires ou à la fin du congé qui lui a été accordé en application de l'article 36 (3°) de ladite ordonnance. L'intéressé a droit à la pension rémunérant les services, sous réserve que ses blessures ou maladies aient été contractées ou aggravées au cours d'une période durant laquelle il acquérait des droits à pension. " ; qu'aux termes de l'article L. 55 dudit code : " La pension et la rente viagère d'invalidité sont définitivement acquises et ne peuvent être révisées ou supprimées à l'initiative de l'administration ou sur demande de l'intéressé que dans les conditions suivantes : / A tout moment en cas d'erreur matérielle ; / Dans un délai d'un an à compter de la notification de la décision de concession initiale de la pension ou de la rente viagère, en cas d'erreur de droit. (...) " Considérant que M. A conteste la pension qui lui a été attribuée en soutenant que c'est à tort qu'elle a été déterminée sans tenir compte de l'imputabilité au service de son invalidité et qu'elle lui a été, par suite, concédée sans rente viagère d'invalidité ; qu'il se prévaut, en revendiquant l'imputabilité au service de son invalidité, d'une erreur affectant la pension dont il demande la révision ; qu'en principe, une erreur affectant le refus de reconnaître l'imputabilité totale ou partielle au service d'une invalidité présente le caractère d'une erreur de droit ; que M. A fait cependant valoir que, en l'espèce, la source de cette erreur est purement matérielle et que l'erreur commise dans la liquidation de sa pension revêt elle-même un caractère matériel ; qu'il soutient ainsi que c'est à la suite d'un avis en date du 19 février 2004 du comité médical départemental rédigé de manière erronée, sans que les mentions relatives à l'origine de son invalidité aient été correctement " renseignées ", alors que cet avis a été visé par l'arrêté du 29 mars 2004 l'admettant à la retraite, que sa pension lui a été concédée sans rente viagère d'invalidité ; que, toutefois, il ne ressort pas des termes de cet avis du 19 février 2004 que le comité médical départemental, qui a reconnu l'inaptitude absolue et définitive de M. A à l'exercice de ses fonctions, aurait admis l'imputabilité au service de son invalidité ; que la circonstance que le médecin spécialiste agréé avait auparavant évalué son invalidité au taux de 25% et avait indiqué qu'elle était partiellement imputable au service ne révèle pas davantage que le comité médical était lui-même d'avis d'imputer au service, fût-ce pour une part, l'invalidité qu'il a reconnue ; qu'il ne résulte donc pas de l'instruction que la liquidation de sa pension sans attribution d'une rente viagère d'invalidité aurait été faite en fonction d'un avis autre que celui donné ; que sont à cet égard sans incidence les visas de l'arrêté admettant l'intéressé à la retraite ; que, par suite, la contestation du requérant de son titre de pension, en tant que ce dernier ne lui attribue pas de rente viagère d'invalidité, ne procède pas d'une erreur matérielle, mais d'une erreur de droit, laquelle ne peut être rectifiée que dans le délai d'un an ; que ce délai court à partir de la date de la notification du titre de pension, sans qu'il soit besoin que cette notification s'accompagne d'un refus exprès de rente viagère d'invalidité ; Considérant qu'il résulte de l'instruction que le titre de pension n° 4 139 133 en date du 14 juin 2004 accordant à M. A une pension de retraite sans rente viagère d'invalidité, sur le fondement des articles L. 4-2 et L. 29 du code des pensions civiles et militaires de retraite qu'il vise, lui a été notifié le 30 juin 2004 ; qu'en appel, le requérant soutient qu'il avait dès le 20 juillet 2004 contesté son titre de pension et qu'il avait de nouveau contesté ce titre par un courrier du 27 octobre en demandant alors expressément le bénéfice d'une rente viagère d'invalidité, puis réitéré sa demande les 24 novembre 2005 et 22 février 2006 ; que, cependant, sa contestation du 20 juillet 2004 portait seulement sur la validation des services auxiliaires et le décompte des retenues pour pension civile ; qu'elle ne tendait pas à l'attribution d'une rente viagère d'invalidité ; que la mention finale de ce courrier selon laquelle " le titre de pension fait référence aux articles L. 4-2 et L. 29 du code des pensions civiles et militaires de retraite et non à l'article L. 5 " du même code ne peut être vue comme une demande de rente viagère d'invalidité ; que n'en apportent pas la preuve contraire les réponses faites par l'administration à ce courrier non plus que les révisions opérées par la suite procédant de la modification de la durée des services effectués par l'intéressé ; que, s'agissant du courrier en date du 27 octobre 2004 invoqué par le requérant, l'administration conteste l'avoir reçu et aucune pièce portant cette date ne figure même au dossier, que ce soit en première instance ou en appel ; que le requérant ne saurait reprocher à l'administration de s'être abstenue d'accuser réception d'un courrier dont il n'établit pas l'envoi ; qu'en admettant même de tenir les contestations adressées par M. A en novembre 2005 et février 2006 pour des demandes en révision, elles ont été faites après l'expiration du délai d'un an fixé par les dispositions précitées de l'article L. 55 et ne peuvent être utilement invoquées par le requérant à l'appui de ses prétentions ; Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté comme irrecevables ses conclusions tendant au bénéfice d'une rente viagère d'invalidité ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent être accueillies ; DECIDE : Article 1er : La requête de M. Guy A est rejetée. '' '' '' '' 3 No 09BX02653
Cours administrative d'appel
Bordeaux
Conseil d'État, 9ème sous-section jugeant seule, 21/05/2012, 326418, Inédit au recueil Lebon
Vu l'ordonnance n° 09LY00059 du 12 mars 2009, enregistrée le 24 mars 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Lyon a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, le pourvoi présenté à cette cour par le MINISTRE DE LA DEFENSE ; Vu le pourvoi, enregistré le 15 janvier 2009 au greffe de la cour administrative d'appel de Lyon, présenté par le MINISTRE DE LA DEFENSE et tendant : 1°) à l'annulation du jugement n° 0506603-3 du 23 octobre 2008 par lequel le tribunal administratif de Lyon, sur demande de Mme Josyane A, a annulé l'arrêté du 1er août 2005 du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie lui concédant une pension civile d'invalidité en tant qu'il retient un taux d'invalidité global de 53,91 % et a enjoint au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique de prendre un nouvel arrêté retenant un taux d'invalidité global de 69,12 % dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement ; 2°) au titre du règlement de l'affaire au fond, au rejet de la demande présentée par Mme A au tribunal administratif de Lyon ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ; Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; Vu le décret n° 68-756 du 13 août 1968 ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Olivier Gariazzo, Maître des Requêtes en service extraordinaire, - les conclusions de M. Frédéric Aladjidi, rapporteur public ;Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par arrêté du 22 juillet 2005, Mme Josyane A, ancienne adjointe administrative au bureau du service national de Lyon, a été admise à la retraite pour invalidité à compter du 1er septembre 2005 et que, par arrêté du 1er août 2005, le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie lui a concédé une pension civile d'invalidité sur la base d'un taux d'invalidité de 53,91 % ; que, par jugement du 13 juin 2007, le tribunal administratif de Lyon a ordonné avant dire droit une expertise médicale en vue de déterminer le taux d'invalidité global de Mme A à la date de sa radiation des cadres ; que, par jugement du 23 octobre 2008, ce tribunal a annulé l'arrêté du 1er août 2005 en tant qu'il retenait un taux d'invalidité global de 53,91 % et a enjoint au ministre compétent de prendre un nouvel arrêté de concession de pension civile d'invalidité en retenant un taux de 69,12 % ; que le MINISTRE DE LA DEFENSE se pourvoit en cassation contre le jugement du 23 octobre 2008 ; Considérant qu'aux termes de l'article L. 29 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " Le fonctionnaire civil qui se trouve dans l'incapacité permanente de continuer ses fonctions en raison d'une invalidité ne résultant pas du service et qui n'a pu être reclassé dans un autre corps en application de l'article 63 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précitée peut être radié des cadres par anticipation soit sur sa demande, soit d'office (...). L'intéressé a droit à la pension rémunérant les services, sous réserve que ses blessures ou maladies aient été contractées ou aggravées au cours d'une période durant laquelle il acquérait des droits à pension " ; Considérant, en premier lieu, que la circonstance que le docteur Cervantès, expert commis par le jugement avant dire droit du 13 juin 2007, ait pris en considération, pour la rédaction de son rapport, des expertises médicales réalisées les 8 février et 21 juin 2006 postérieurement à la radiation des cadres de l'intéressée, à la demande d'un organisme d'assurance, et appréciant l'invalidité de l'intéressée sans se référer au barème indicatif prévu par l'article L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite n'entache pas d'irrégularité l'expertise au vu de laquelle le tribunal administratif s'est prononcé, dès lors que les expertises mentionnées ont fait l'objet d'un débat contradictoire entre les parties ; Considérant, en deuxième lieu, que c'est par une appréciation souveraine exempte de dénaturation que le tribunal a estimé qu'il n'était pas établi ni même allégué que l'affection respiratoire, consistant en un asthme associé à une apnée du sommeil sévère, dont souffre la requérante aurait évolué entre la date de la décision attaquée et la date à laquelle l'intéressée a été examinée par le docteur Colas, auteur de l'expertise du 8 février 2006, sur laquelle se fonde le rapport d'expertise du docteur Cervantès pour conclure à un taux d'incapacité de 35 % au lieu d'un taux de 5 % tel que retenu par la commission de réforme ; qu'en en déduisant qu'il pouvait valablement retenir un taux d'incapacité de 35 % en raison de cette affection, sans qu'y fasse obstacle la circonstance que l'examen médical sur lequel se fondait cette appréciation était postérieur de quelques mois à la date de radiation des cadres, le tribunal administratif de Lyon n'a pas commis d'erreur de droit ; Considérant, en troisième lieu, que, s'agissant de l'hypothyroïdie, prise en compte par l'expert judiciaire à hauteur de 5 %, le tribunal a jugé que le ministre de la défense ne saurait valablement s'opposer à la prise en compte de cette affection en se contentant de soutenir, sans plus de précisions, que cette hypothyroïdie était apparue en 1995 alors que la requérante se trouvait en disponibilité ; qu'il résulte, d'une part, des dispositions précitées de l'article L. 29 du code des pensions civiles et militaires de retraite que ne peuvent être prises en considération, pour le calcul de la pension qu'elles prévoient, les blessures ou maladies qui n'auraient pas été contractées ou aggravées au cours d'une période durant laquelle le fonctionnaire acquérait des droits à pension, et d'autre part, des dispositions de l'article 51 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat qu'une période de disponibilité ne peut être regardée comme une telle période ; que, toutefois, dès lors que le MINISTRE DE LA DEFENSE n'apportait aucun élément de nature à établir la date à laquelle l'affection était apparue et ne soutenait aucunement que l'affection en cause ne s'était pas aggravée entre la date à laquelle la disponibilité de Mme A avait pris fin, en 1997, et celle à laquelle elle avait été radiée des cadres, en 2005, le tribunal administratif n'a pas entaché son jugement d'erreur de droit ; Considérant, en dernier lieu, qu'en procédant de nouveau au calcul du taux global d'invalidité de Mme A à partir des taux retenus pour chaque affection par la commission de réforme départementale du Rhône, le MINISTRE DE LA DEFENSE ne critique pas utilement le jugement attaqué, qui retient un taux plus élevé au titre du handicap respiratoire de l'intéressée et prend en considération son hypothyroïdie, non retenue par la commission ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DE LA DEFENSE n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement attaqué ; Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, le versement à Mme A d'une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;D E C I D E : -------------- Article 1er : Le pourvoi du MINISTRE DE LA DEFENSE est rejeté. Article 2 : L'Etat versera à Mme A une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DE LA DEFENSE et à Mme Josyane A.
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 5ème sous-section jugeant seule, 04/04/2012, 326200, Inédit au recueil Lebon
Vu le pourvoi, enregistré le 17 mars 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, du MINISTRE DE LA DEFENSE ET DES ANCIENS COMBATTANTS ; le MINISTRE DE LA DEFENSE ET DES ANCIENS COMBATTANTS demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler l'arrêt n° S 07/00047 du 15 janvier 2009 par lequel la cour régionale des pensions de Paris a réformé le jugement n° 05/046 du 13 juin 2007 du tribunal départemental des pensions de Paris et accordé à M. Hamady A la revalorisation de sa pension militaire d'invalidité, les arrérages ainsi que les intérêts moratoires et intérêts capitalisés y afférents à compter du 1er janvier 2001 ; 2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à ses conclusions d'appel ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu la Constitution, notamment ses articles 61-1 et 62 ; Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le premier protocole additionnel à cette convention ; Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; Vu la loi n° 59-1454 du 26 décembre 1959 ; Vu la loi n° 2002-1576 du 30 décembre 2002 ; Vu la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 ; Vu la décision n° 2010-1 QPC du 28 mai 2010 du Conseil constitutionnel ; Vu la décision n° 2010-108 QPC du 25 mars 2011 du Conseil constitutionnel ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Philippe Ranquet, Maître des Requêtes, - les observations de Me Brouchot, avocat de M. Hamady A, - les conclusions de Mme Sophie-Justine Lieber, rapporteur public ; La parole ayant été à nouveau donnée à Me Brouchot, avocat de M. Hamady A ; Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. Hamady A, ressortissant sénégalais ayant servi dans l'armée française du 8 octobre 1954 au 1er août 1960, s'est vu attribuer à compter du 15 octobre 1989 une pension militaire d'invalidité de 15%, concédée initialement au taux cristallisé en vigueur au 2 janvier 1975, en application de l'article 71 de la loi du 26 décembre 1959 portant loi de finances pour 1960, modifié par l'article 22 de la loi de finances rectificative du 31 décembre 1981, avant d'être revalorisée, à compter du 1er janvier 1999, en application des I, II et III de l'article 68 de la loi du 30 décembre 2002 portant loi de finances rectificative pour 2002 ; que, par courrier du 25 octobre 2004, M. A a saisi le payeur général du trésor d'une demande tendant à ce que le taux de sa pension soit, à compter du 15 octobre 1989, revalorisé à un taux identique à celui des anciens combattants français et à ce que lui soient versés les arrérages de sa pension revalorisée échus à compter de cette date, assortis des intérêts moratoires et de leur capitalisation ; que, sa demande ayant été rejetée, M. A a saisi le tribunal départemental des pensions de Paris qui, par jugement du 13 juin 2007, a fait droit à cette demande ; que le MINISTRE DE LA DEFENSE ET DES ANCIENS COMBATTANTS se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 15 janvier 2009 par lequel la cour régionale des pensions de Paris a, sur son appel, réformé partiellement ce jugement en fixant au 1er janvier 2001 la date de la revalorisation de la pension, et jugé que M. A avait droit à compter de cette date aux arrérages correspondant à la différence entre le montant de la pension revalorisée et celui qui lui a été versé ainsi qu'aux intérêts afférents et à leur capitalisation ; Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi ; Considérant que, pour écarter l'application au cas de M. A des dispositions des I, II et III de l'article 68 de la loi du 30 décembre 2002 portant loi de finances rectificative pour 2002 instituant un dispositif de révision des prestations versées aux ressortissants de pays placés antérieurement sous souveraineté française et résidant hors de France lors de la liquidation de leurs droits à pension, la cour régionale des pensions s'est bornée à indiquer que ces dispositions législatives étaient discriminatoires au regard des stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales sans s'expliquer sur les raisons qui la conduisaient à une telle conclusion ; que le ministre de la défense et des anciens combattants est par suite fondé à soutenir que son arrêt est insuffisamment motivé et à en demander l'annulation ; Considérant qu'il a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ; Sur la décristallisation de la pension et le versement d'arrérages : Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 61-1 de la Constitution : " Lorsqu'à l'occasion d'une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d'Etat ou de la Cour de cassation. " ; qu'aux termes du deuxième alinéa de son article 62 : " Une disposition déclarée inconstitutionnelle sur le fondement de l'article 61-1 est abrogée à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel ou d'une date ultérieure fixée par cette décision. Le Conseil constitutionnel détermine les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition a produits sont susceptibles d'être remis en cause " ; qu'enfin aux termes du troisième alinéa du même article : " Les décisions du Conseil constitutionnel ne sont susceptibles d'aucun recours. Elles s'imposent aux pouvoirs publics et à toutes les autorités administratives et juridictionnelles. " ; Considérant qu'il résulte des dispositions précitées de l'article 62 de la Constitution qu'une disposition législative déclarée contraire à la Constitution sur le fondement de l'article 61-1 n'est pas annulée rétroactivement mais abrogée pour l'avenir à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel ou d'une date ultérieure fixée par sa décision ; que par sa décision n° 2010-108 QPC en date du 25 mars 2011, le Conseil constitutionnel a jugé que " si, en principe la déclaration d'inconstitutionnalité doit bénéficier à l'auteur de la question prioritaire de constitutionnalité et la disposition déclarée contraire à la Constitution ne peut être appliquée dans les instances en cours à la date de la publication de la décision du Conseil constitutionnel, les dispositions de l'article 62 de la Constitution réservent à ce dernier le pouvoir tant de fixer la date de l'abrogation et reporter dans le temps ses effets que de prévoir la remise en cause des effets que la disposition a produits avant l'intervention de cette déclaration " ; Considérant que, lorsque le Conseil constitutionnel, après avoir abrogé une disposition déclarée inconstitutionnelle, use du pouvoir que lui confèrent les dispositions précitées, soit de déterminer lui-même les conditions et limites dans lesquelles les effets que la décision a produits sont susceptibles d'être remis en cause, soit de décider que le législateur aura à prévoir une application aux instances en cours des dispositions qu'il aura prises pour remédier à l'inconstitutionnalité constatée, il appartient au juge, saisi d'un litige relatif aux effets produits par la disposition déclarée inconstitutionnelle, de les remettre en cause en écartant, pour la solution du litige, au besoin d'office, cette disposition, dans les conditions et limites fixées par le Conseil constitutionnel ou le législateur ; Considérant que, par sa décision n° 2010-1 QPC du 28 mai 2010, le Conseil constitutionnel a déclaré contraire à la Constitution les dispositions de l'article 68 de la loi du 30 décembre 2002 de finances rectificative pour 2002, à l'exception de celles de son paragraphe VII ; qu'il a jugé que " afin de permettre au législateur de remédier à l'inconstitutionnalité constatée, l'abrogation des dispositions précitées prendra effet à compter du 1er janvier 2011 ; afin de préserver l'effet utile de la présente décision, il appartient, d'une part, aux juridictions de surseoir à statuer jusqu'au 1er janvier 2011 dans les instances dont l'issue dépend de l'application des dispositions déclarées inconstitutionnelles et, d'autre part, au législateur de prévoir une application des nouvelles dispositions à ces instances en cours à la date de la présente décision " ; Considérant que, à la suite de cette décision, l'article 211 de la loi du 29 décembre 2010 de finances pour 2011 a défini de nouvelles dispositions pour le calcul des pensions militaires d'invalidité, des pensions civiles et militaires de retraite et des retraites du combattant servies aux ressortissants des pays ou territoires ayant appartenu à l'Union française ou à la Communauté ou ayant été placées sous le protectorat ou la tutelle de la France, et abrogé plusieurs dispositions législatives, notamment celles de l'article 71 de la loi du 26 décembre 1959 portant loi de finances pour 1960 ; que, par ailleurs, son paragraphe VI prévoit que : " Le présent article est applicable aux instances en cours à la date du 28 mai 2010, la révision des pensions prenant effet à compter de la date de réception par l'administration de la demande qui est à l'origine de ces instances " ; qu'enfin, aux termes du XI du même article : " Le présent article entre en vigueur au 1er janvier 2011 " ; En ce qui concerne la période postérieure au 25 octobre 2004 : Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, les dispositions de l'article 71 de la loi du 26 décembre 1959 et celles de l'article 68 de la loi du 30 décembre 2002 qui définissaient, à la date de la décision attaquée, le montant des droits à pension militaire d'invalidité de M. A, ont été abrogées à compter du 1er janvier 2011, les premières par l'article 211 de la loi de finances pour 2011, les secondes par la décision du Conseil constitutionnel du 28 mai 2010 ; qu'en application du VI de l'article 211 de la loi du 29 décembre 2010 de finances pour 2011, dont la portée a été précisée ci-dessus, il y a lieu d'écarter ces dispositions législatives pour statuer sur la demande de M. A tendant à obtenir une pension militaire d'invalidité décristallisée à compter de la date de réception de sa demande par l'administration, soit à compter du 25 octobre 2004 ; Considérant que l'article 211 de la loi de finances pour 2011 prévoit de nouvelles règles pour le calcul du montant des pensions des personnes qu'il mentionne ; que ces règles, ainsi que le reconnaît d'ailleurs le ministre, sont applicables pour le calcul de la pension militaire d'invalidité de M. A à compter du 25 octobre 2004, date de sa demande ; que c'est par suite à bon droit que le tribunal départemental des pensions de Paris a reconnu à M. A le droit à une pension d'invalidité au taux français à compter du 25 octobre 2004 et au versement des arrérages correspondant à la différence entre le montant de la pension ainsi revalorisée et celui qui lui a été versé ; En ce qui concerne la période antérieure au 25 octobre 2004 : Quant au rappel des arrérages de la pension militaire d'invalidité de M. A : Considérant que, dans l'exercice du contrôle de conformité des lois à la Constitution qui lui incombe selon la procédure définie à l'article 61-1 de la Constitution, le Conseil constitutionnel a le pouvoir d'abroger les dispositions législatives contraires à la Constitution ; que les juridictions administratives et judiciaires, à qui incombe le contrôle de la compatibilité des lois avec le droit de l'Union européenne ou les engagements internationaux de la France, peuvent déclarer que des dispositions législatives incompatibles avec le droit de l'Union ou ces engagements sont inapplicables au litige qu'elles ont à trancher ; qu'il appartient, par suite, au juge du litige, s'il n'a pas fait droit à l'ensemble des conclusions du requérant en tirant les conséquences de la déclaration d'inconstitutionnalité d'une disposition législative prononcée par le Conseil constitutionnel, d'examiner, dans l'hypothèse où un moyen en ce sens est soulevé devant lui, s'il doit, pour statuer sur les conclusions qu'il n'a pas déjà accueillies, écarter la disposition législative en cause du fait de son incompatibilité avec une stipulation conventionnelle ou, le cas échéant, une règle du droit de l'Union européenne dont la méconnaissance n'aurait pas été préalablement sanctionnée ; Considérant qu'à cette fin, lorsqu'est en litige une décision refusant au requérant l'attribution d'un droit auquel il prétend et qu'est invoquée l'incompatibilité de la disposition sur le fondement de laquelle le refus lui a été opposé avec les stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention, il incombe au juge, en premier lieu, d'examiner si le requérant peut être regardé comme se prévalant d'un bien au sens des stipulations de l'article 1er du premier protocole additionnel et, en second lieu, quand tel est le cas, si la disposition législative critiquée doit être écartée comme portant atteinte à ce bien de façon discriminatoire et, par suite, comme étant incompatible avec les stipulations de l'article 14 de la convention ; Considérant qu'aux termes de l'article 71 de la loi du 26 décembre 1959, rendu applicable aux ressortissants sénégalais par l'article 14 de la loi du 21 décembre 1979, modifié par l'article 22 de la loi du 31 décembre 1981 : " I - A compter du 1er janvier 1961, les pensions, rentes ou allocations viagères imputées sur le budget de l'Etat ou d'établissements publics, dont sont titulaires les nationaux des pays ou territoires ayant appartenu à l'Union française ou à la Communauté ou ayant été placés sous le protectorat ou sous la tutelle de la France, seront remplacées pendant la durée normale de leur jouissance personnelle par des indemnités annuelles en francs, calculées sur la base des tarifs en vigueur pour lesdites pensions ou allocations à la date de leur transformation (...) " ; qu'aux termes de l'article 68 de la loi du 30 décembre 2002 : " I. - Les prestations servies en application des articles 170 de l'ordonnance n° 58-1374 du 30 décembre 1958 portant loi de finances pour 1959, 71 de la loi de finances pour 1960 (n° 59-1454 du 26 décembre 1959) et 26 de la loi de finances rectificative pour 1981 (n° 81-734 du 3 août 1981) sont calculées dans les conditions prévues aux paragraphes suivants./ II. - Lorsque, lors de la liquidation initiale des droits directs ou à réversion, le titulaire n'a pas sa résidence effective en France, la valeur du point de base de sa prestation, telle qu'elle serait servie en France, est affectée d'un coefficient proportionnel au rapport des parités de pouvoir d'achat dans le pays de résidence et des parités de pouvoir d'achat de la France. Les parités de pouvoir d'achat du pays de résidence sont réputées être au plus égales à celles de la France. (...) / Les parités de pouvoir d'achat sont celles publiées annuellement par l'Organisation des Nations unies ou, à défaut, sont calculées à partir des données économiques existantes. / III. - Le coefficient dont la valeur du point de pension est affectée reste constant jusqu'au 31 décembre de l'année suivant celle au cours de laquelle a eu lieu la liquidation des droits effectuée en application de la présente loi. Ce coefficient, correspondant au pays de résidence du titulaire lors de la liquidation initiale des droits, est ensuite réévalué annuellement. / (...) " ; Considérant que M. A soutient que les dispositions des II et III de l'article 68 de la loi du 30 décembre 2002 sont incompatibles avec les stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention, en ce qu'elles instaurent une discrimination fondée sur la nationalité en faisant dépendre le montant de la pension militaire d'invalidité attribuée au militaire de nationalité étrangère de son lieu de résidence au moment de la liquidation initiale de celle-ci, alors qu'elles ne prévoient pas la prise en compte d'un critère de résidence pour le pensionné de nationalité française ; Considérant qu'aux termes de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention : " Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. / Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes " ; qu'aux termes de l'article 14 de cette convention : " La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation " ; Considérant, d'une part, que les pensions d'invalidité accordées aux anciens combattants et victimes de la guerre, qui sont des allocations pécuniaires personnelles, constituent pour leurs bénéficiaires des créances qui doivent être regardées comme des biens au sens de l'article 1er précité du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que M. A peut demander au juge d'écarter l'application des dispositions des II et III de l'article 68 de la loi du 30 décembre 2002 en invoquant leur incompatibilité avec les stipulations de l'article 14 de la convention ; Considérant, d'autre part, qu'une distinction entre des personnes placées dans une situation analogue est discriminatoire, au sens des stipulations de l'article 14 de la convention, si elle n'est pas assortie de justifications objectives et raisonnables, c'est-à-dire si elle ne poursuit pas un objectif d'utilité publique, ou si elle n'est pas fondée sur des critères objectifs et rationnels en rapport avec les buts de la loi ; que les pensions d'invalidité servies en application du code des pensions militaires d'invalidité et victimes de la guerre ont pour objet de garantir à leurs bénéficiaires une réparation due à raison d'infirmités imputables aux événements ou circonstances décrits à l'article L. 2 du code et de compenser les pertes de revenus et les charges financières résultant de ces infirmités ; qu'en faisant dépendre, pour les seuls pensionnés de nationalité étrangère, le montant de la pension militaire d'invalidité d'un critère de résidence au moment de la liquidation initiale de celle-ci, les dispositions des II et III de l'article 68 de la loi du 30 décembre 2002 instaurent une différence de traitement entre les titulaires de pensions, quant à la fixation du montant de ces dernières, qui n'est pas justifiée par une différence de situation eu égard à l'objet des pensions militaires d'invalidité ; que cette différence de traitement ne peut être regardée comme reposant sur un critère en rapport avec l'objectif de la loi du 30 décembre 2002 ; que les dispositions des II et III de l'article 68 de cette loi étant, de ce fait, incompatibles avec les stipulations précitées de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le ministre de la défense était tenu d'en écarter l'application ; Considérant, en outre, que M. A peut, contrairement à ce que soutient le ministre, sans qu'y fassent obstacle les dispositions du second alinéa du IV de l'article 68 de la loi du 30 décembre 2002, demander au juge d'écarter l'application des dispositions de l'article 71 de la loi du 26 décembre 1959 ; que ces dernières dispositions, qui créent une différence de traitement, en raison de leur seule nationalité, entre les titulaires de pensions, en interdisant toute revalorisation, à compter de la date qu'elles fixent, pour les seules pensions de militaires qui n'ont pas la nationalité française, sans que le critère de nationalité puisse être regardé comme un critère objectif et rationnel en rapport avec les buts de la loi, sont incompatibles avec les stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DE LA DEFENSE ET DES ANCIENS COMBATTANTS n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal départemental des pensions de Paris a jugé que les dispositions du I de l'article 71 de la loi du 26 décembre 1959 et des II et III de l'article 68 de la loi du 30 décembre 2002 étaient, en tant qu'ils concernent les pensions militaires d'invalidité, incompatibles avec les stipulations précitées de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et à demander qu'il soit fait application de ces dispositions ; Quant à la prescription : Considérant qu'aux termes de l'article L. 108 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre : " Lorsque, par suite du fait personnel du pensionné, la demande de liquidation ou de révision de la pension est déposée postérieurement à l'expiration de la troisième année qui suit celle de l'entrée en jouissance normale de la pension, le titulaire ne peut prétendre qu'aux arrérages afférents à l'année au cours de laquelle la demande a été déposée et aux trois années antérieures " ; Considérant que le fait que M. A n'ait demandé la décristallisation de sa pension militaire d'invalidité que le 25 octobre 2004 résulte d'un fait personnel qui lui est imputable, au sens de ces dispositions, dès lors qu'aucune circonstance ne l'empêchait de se prévaloir, dès la date de cette liquidation, des stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales à l'encontre des dispositions du I de l'article 71 de la loi du 26 décembre 1959 et des II et III de l'article 68 de la loi du 30 décembre 2002 ; que, dès lors que le ministre a opposé la prescription instituée par ces dispositions, M. A ne pouvait prétendre qu'aux arrérages afférents à l'année au cours de laquelle la demande a été déposée auprès de l'administration et aux trois années antérieures ; que l'intéressé ayant présenté, ainsi qu'il a été dit, sa demande de revalorisation de sa pension le 25 octobre 2004, le ministre est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal départemental des pensions de Paris a fixé au 15 octobre 1989 la date de la revalorisation de la pension accordée à M. A et à demander que cette date soit, conformément aux dispositions de l'article L. 108 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, fixée au 1er janvier 2001 ; Sur les intérêts et leur capitalisation : Considérant que M. A a demandé le versement des intérêts sur les arrérages de la pension militaire d'invalidité qui lui étaient dus ; qu'il y a lieu de faire droit à ses conclusions, à compter du 25 octobre 2004, date de réception de sa demande de décristallisation de sa pension militaire d'invalidité ; qu'il a simultanément demandé la capitalisation des intérêts afférents à ces arrérages ; qu'à cette date, il n'était pas dû au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande, seulement à compter du 25 octobre 2005 et à chaque échéance annuelle à compter de cette dernière date ; que le MINISTRE DE LA DEFENSE ET DES ANCIENS COMBATTANTS est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal départemental des pensions de Paris a accordé à M. A le bénéfice des intérêts sur les sommes qui lui sont dues et de leur capitalisation à compter d'une date antérieure ;D E C I D E : -------------- Article 1er : L'arrêt de la cour régionale des pensions de Paris du 15 janvier 2009 est annulé. Article 2 : Le jugement du 13 juin 2007 du tribunal départemental des pensions de Paris est annulé en tant qu'il accorde à M. A le bénéfice d'une pension d'invalidité revalorisée pour la période du 15 octobre 1989 au 1er janvier 2001 et en tant qu'il assortit les sommes qui lui sont dues des intérêts de droit capitalisés à compter du 15 octobre 1989. Article 3 Le rappel d'arrérages de la pension de M. A sera assorti des intérêts au taux légal à compter du 25 octobre 2004. Les intérêts dus au 25 octobre 2005 et à chaque échéance annuelle ultérieure seront capitalisés pour produire eux-mêmes intérêts. Article 4 : Le surplus des conclusions du recours du ministre de la défense et des anciens combattants devant la cour régionale des pensions de Paris est rejeté. Article 5 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DE LA DEFENSE ET DES ANCIENS COMBATTANTS et à M. Hamady A.
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 1ère et 6ème sous-sections réunies, 28/03/2012, 336753
Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 17 février et 17 mai 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Mokhtar A et Mme Khedidja A, demeurant ... ; M. et Mme A demandent au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler le jugement n° 074437 du 12 mars 2009 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision implicite du ministre de la défense rejetant leur demande de révision de leur pension militaire d'ayants cause et, d'autre part, à la condamnation de l'Etat à leur verser une pension " décristallisée " à compter du 3 juillet 1962, avec les rappels d'arrérages et les intérêts moratoires correspondants ; 2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à leur demande et d'enjoindre au ministre de la défense de produire les tableaux des intérêts moratoires capitalisés pour les arrérages échus, sous astreinte de 2 000 euros par jour de retard ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à la SCP Lyon-Caen, Thiriez de la somme de 5 000 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu la Constitution et, notamment, son article 62 ; Vu la déclaration gouvernementale relative à la coopération économique et financière du 19 mars 1962 publiée au Journal officiel du 20 mars 1962, notamment son article 15 ; Vu le code civil ; Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ; Vu la loi n° 48-1450 du 20 septembre 1948 ; Vu la loi n° 62-873 du 31 juillet 1962 ; Vu la loi n° 81-734 du 3 août 1981 ; Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; Vu la loi n° 2002-1576 du 30 décembre 2002 ; Vu la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 ; Vu la décision du 14 avril 2010 par laquelle le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a renvoyé au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par M. et Mme A ; Vu la décision n° 2010-1 QPC du 28 mai 2010 du Conseil constitutionnel ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Jean Lessi, Auditeur, - les observations de la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de M. Mokhtar A et de Mme Khedidja A, - les conclusions de Mme Claire Landais, rapporteur public ; La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de M. Mokhtar A et de Mme Khedidja A ;Considérant que, lorsque le Conseil constitutionnel, après avoir abrogé une disposition déclarée inconstitutionnelle, use du pouvoir que lui confèrent les dispositions de l'article 62 de la Constitution, soit de déterminer lui-même les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition a produits sont susceptibles d'être remis en cause, soit de décider que le législateur aura à prévoir une application aux instances en cours des dispositions qu'il aura prises pour remédier à l'inconstitutionnalité constatée, il appartient au juge, saisi d'un litige relatif aux effets produits par la disposition déclarée inconstitutionnelle, de les remettre en cause en écartant, pour la solution de ce litige, le cas échéant d'office, cette disposition, dans les conditions et limites fixées par le Conseil constitutionnel ou le législateur ; Considérant que, par sa décision n° 2010-1 QPC du 28 mai 2010, le Conseil constitutionnel, auquel le Conseil d'Etat avait renvoyé la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par M. Mokhtar et Mme Khedidja A, a déclaré contraires à la Constitution les dispositions de l'article 26 de la loi du 3 août 1981 de finances rectificative pour 1981, ainsi que les dispositions de l'article 68 de la loi du 30 décembre 2002 de finances rectificative pour 2002, à l'exception de celles de son paragraphe VII ; qu'il a jugé que : " afin de permettre au législateur de remédier à l'inconstitutionnalité constatée, l'abrogation des dispositions précitées prendra effet à compter du 1er janvier 2011 ; afin de préserver l'effet utile de la présente décision à la solution des instances actuellement en cours, il appartient, d'une part, aux juridictions de surseoir à statuer jusqu'au 1er janvier 2011 dans les instances dont l'issue dépend de l'application des dispositions déclarées inconstitutionnelles et, d'autre part, au législateur de prévoir une application des nouvelles dispositions à ces instances en cours à la date de la présente décision " ; Considérant que, à la suite de cette décision, l'article 211 de la loi du 29 décembre 2010 de finances pour 2011 a défini de nouvelles dispositions pour le calcul des pensions militaires d'invalidité, des pensions civiles et militaires de retraite et des retraites du combattant servies aux ressortissants des pays ou territoires ayant appartenu à l'Union française ou à la Communauté ou ayant été placés sous le protectorat ou sous la tutelle de la France ; que son paragraphe VI prévoit que " le présent article est applicable aux instances en cours à la date du 28 mai 2010, la révision des pensions prenant effet à compter de la date de réception par l'administration de la demande qui est à l'origine de ces instances " ; qu'enfin, aux termes du XI du même article : " Le présent article entre en vigueur au 1er janvier 2011 " ; Considérant que, pour rejeter la demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision implicite par laquelle le ministre de la défense a refusé de réviser la pension de réversion concédée par un arrêté du 23 novembre 1958 à Mme Khedidja A, veuve de M. Berrezoug C, qui avait été cristallisée à compter du 3 juillet 1962 en application de l'article 26 de la loi de finances rectificatives pour 1981 du 3 août 1981, puis revalorisée à compter du 1er janvier 1999 dans les conditions prévues à l'article 68 de la loi de finances rectificative pour 2002 du 30 décembre 2002 et, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au ministre de procéder à la révision de cette pension au taux servi aux ressortissants français à compter du 3 juillet 1962, le tribunal administratif de Nantes s'est exclusivement fondé sur les dispositions des articles 26 de la loi du 3 août 1981 et 68 de la loi du 30 décembre 2002 ; qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus qu'afin de préserver l'effet utile de la décision précitée du Conseil constitutionnel à la solution de l'instance ouverte par la demande de Mme A, en permettant au juge du fond de remettre en cause, dans les conditions et limites définies par le paragraphe VI de l'article 211 de la loi de finances pour 2011, les effets produits par les dispositions mentionnées ci-dessus, il incombe au juge de cassation d'annuler le jugement attaqué ; Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ; Sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre de la défense : Considérant qu'aux termes de l'article R. 431-8 du code de justice administrative : " Les parties non représentées devant un tribunal administratif qui ont leur résidence hors du territoire de la République doivent faire élection de domicile dans le ressort de ce tribunal " ; que M. et Mme A étaient représentés devant le tribunal administratif de Nantes ; que, par suite, la fin de non-recevoir tirée de la méconnaissance de ces dispositions doit, en tout état de cause, être écartée ; Sur le droit à une retraite du combattant de M. Berrezoug C et sur le taux de la pension temporaire d'orphelin de M. Mokhtar A : Considérant qu'eu égard aux moyens qu'ils soulèvent, les requérants doivent être regardés comme demandant que soit reconnu le droit à une retraite de combattant de M. Berrezoug C ; que, toutefois, il ne résulte pas de l'instruction que l'administration ait été saisie d'une demande préalable tendant au bénéfice d'une telle prestation, qui aurait été de nature à lier le contentieux et à donner à ses ayants cause intérêt pour en contester le refus au contentieux ; que, par suite, de telles conclusions sont irrecevables ; Considérant que la demande adressée le 22 juin 2005 à l'administration tendait seulement à la revalorisation de la pension de réversion concédée à Mme A, et non à la révision de la pension d'orphelin perçue de 1958 à 1971 par M. Mokhtar A, fils de M. Berrezoug C ; qu'il suit de là que les conclusions qu'ils présentent à cette fin sont, elles aussi, irrecevables ; Sur le droit à pension de réversion de Mme A : En ce qui concerne la période postérieure au 22 juin 2005 : Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'il a été procédé à la révision de la pension de réversion de Mme A et aux rappels d'arrérages correspondants à compter du 22 juin 2005, en application des dispositions de l'article 211 de la loi du 29 décembre 2010 ; que Mme A a ainsi bénéficié, pour la période postérieure à cette date, du rétablissement du taux de droit commun, conformément à sa demande ; que, par suite, ses conclusions tendant à la revalorisation du montant de sa pension de retraite sont devenues sans objet dans cette mesure ; que, dès lors, il n'y a pas lieu d'y statuer ; En ce qui concerne la période antérieure au 22 juin 2005 : S'agissant de l'application de la prescription opposée par le ministre de la défense : Considérant qu'aux termes de l'article L. 74 du code des pensions civiles et militaires de retraite, issu de la loi du 20 septembre 1948, en vigueur à la date du décès de M. Berrezoug C, dans sa rédaction issue de la loi du 31 juillet 1962, applicable à Mme A eu égard à la date de sa demande : " Sauf l'hypothèse où la production tardive de la demande de liquidation ne serait pas imputable au fait personnel du pensionné, il ne pourra y avoir lieu, en aucun cas, au rappel de plus de deux années d'arrérages antérieurs à la date du dépôt de la demande de pension " ; que les demandes tendant à la revalorisation des arrérages d'une pension cristallisée s'analysent comme des demandes de liquidation de pension au sens de ces dispositions ; qu'il suit de là que Mme A ne peut, en tout état de cause, prétendre au versement des arrérages de sa pension de réversion qu'à compter du 22 juin 2003 ; S'agissant du taux de la pension de réversion de Mme A : Considérant qu'aux termes de l'article 15 de la déclaration gouvernementale relative à la coopération économique et financière du 19 mars 1962 : " (...) Sont garantis les droits à pension de retraite et d'invalidité acquis à la date de l'autodétermination auprès d'organismes français " ; que Mme A, dont les droits à pension de réversion, ouverts à la date du décès de son époux le 22 janvier 1958, étaient acquis au 3 juillet 1962, peut utilement se prévaloir de ces stipulations ; que sa pension de réversion, qui lui a été concédée en application des dispositions des articles L. 54 et L. 64 du code des pensions civiles et militaires de retraite issu de la loi du 20 septembre 1948 applicable à sa situation, était liquidée en fonction du taux de la pension de retraite proportionnelle dont son époux était titulaire, lequel dépendait de l'indice correspondant au grade et à l'échelon occupés en dernier lieu par celui-ci ; qu'ainsi, en application des stipulations précitées, la jouissance d'une pension de réversion revalorisable en fonction, le cas échéant, des évolutions ultérieures de cet indice et de la valeur du point d'indice, était ouvert à Mme A à compter du 3 juillet 1962 ; Considérant que, pour la période comprise entre le 22 juin 2003 et le 21 juin 2005, le taux de la pension de réversion de Mme A a été calculé en application des dispositions combinées de l'article 26 de la loi du 3 août 1981, qui prévoyaient notamment que les pensions attribuées aux ressortissants algériens sur le budget de l'Etat n'étaient pas révisables à compter du 3 juillet 1962 et continuaient d'être payées sur la base des tarifs en vigueur à cette même date, et de l'article 68 de la loi du 20 décembre 2002, dont le paragraphe II dispose que " Lorsque, lors de la liquidation initiale des droits directs ou à réversion, le titulaire n'a pas sa résidence effective en France, la valeur du point de base de sa prestation, telle qu'elle serait servie en France, est affectée d'un coefficient proportionnel au rapport des parités de pouvoir d'achat dans le pays de résidence et des parités de pouvoir d'achat de la France. Les parités de pouvoir d'achat du pays de résidence sont réputées être au plus égales à celles de la France (...) " ; que ces dispositions, en ce qu'elles n'assurent pas à Mme A le bénéfice d'une pension d'un montant au moins égal à celui que lui garantissent les stipulations de l'article 15 de la déclaration gouvernementale relative à la coopération économique et financière du 19 mars 1962, sont incompatibles avec ces mêmes stipulations ; que, dès lors, il y a lieu d'en écarter l'application au présent litige ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A a droit à ce que sa pension de réversion soit calculée en application des règles de droit commun du code des pensions civiles et militaires de retraite pour la période comprise entre le 22 juin 2003 et le 21 juin 2005 ; Sur les intérêts et la capitalisation des intérêts : Considérant, d'une part, que Mme A a droit aux intérêts légaux sur les rappels d'arrérages de sa pension à compter de la réception, par l'administration, de sa demande du 22 juin 2005, pour les arrérages dus à cette date et, pour les arrérages postérieurs à cette date, au fur et à mesure de leurs échéances successives ; Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 1154 du code civil : " Les intérêts échus des capitaux peuvent produire des intérêts, ou par une demande judiciaire, ou par une convention spéciale, pourvu que, soit dans la demande, soit dans la convention, il s'agisse d'intérêts dus au moins pour une année entière " ; que pour l'application de ces dispositions, la capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond ; que cette demande prend toutefois effet au plus tôt à la date à laquelle elle est enregistrée et pourvu qu'à cette date il s'agisse d'intérêts dus au moins pour une année entière ; que, le cas échéant, la capitalisation s'accomplit à nouveau à l'expiration de chaque échéance annuelle ultérieure, sans qu'il soit besoin de formuler une nouvelle demande ; que Mme A a demandé la capitalisation des intérêts dans sa demande enregistrée devant le tribunal administratif de Poitiers le 24 novembre 2006 ; qu'à cette date, il était dû plus d'une année d'intérêts ; que, par suite, sans qu'il soit besoin d'ordonner la production des tableaux des intérêts moratoires capitalisés, il y a lieu de faire droit à cette demande à cette date et à chaque échéance annuelle pour les intérêts échus postérieurement à cette même date ; Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 : Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, au profit de la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de M. et Mme A, la somme de 3 000 euros en application de ces dispositions, sous réserve que cette société renonce à la part contributive de l'Etat ;D E C I D E : -------------- Article 1er : Le jugement du 12 mars 2009 du tribunal administratif de Nantes est annulé. Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de Mme A tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser le rappel d'arrérages de sa pension au titre de la période postérieure au 22 juin 2005. Article 3 : La décision implicite de refus du ministre de la défense est annulée en tant qu'elle porte sur la période comprise entre le 22 juin 2003 et le 21 juin 2005. Article 4 : L'Etat versera à Mme A, conformément aux motifs de la présente décision, les arrérages correspondant à la revalorisation de sa pension de retraite pour la période comprise entre le 22 juin 2003 et le 21 juin 2005. Article 5 : Les arrérages versés pour la période postérieure au 22 juin 2003 porteront intérêts au taux légal à compter de la réception, par l'administration, de la demande du 22 juin 2005, puis au fur et à mesure de l'échéance des arrérages. Les intérêts échus à la date du 24 novembre 2006, puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date, seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts. Article 6 : L'Etat versera à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de M. et Mme A, une somme de 3 000 euros en application du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette SCP renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat. Article 7 : Le surplus des conclusions présentées par M. et Mme A devant le tribunal administratif de Nantes puis devant le Conseil d'Etat est rejeté. Article 8 : La présente décision sera notifiée à Mme Khedidja A, à M. Mokhtar A, au Premier ministre, au ministre de la défense et des anciens combattants et à la ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, porte-parole du Gouvernement.ECLI:FR:CESSR:2012:336753.20120328
Conseil d'Etat
Cour Administrative d'Appel de Marseille, 8ème chambre - formation à 3, 03/04/2012, 09MA03555, Inédit au recueil Lebon
Vu la requête, enregistrée le 25 septembre 2009, présentée par Me Jean-Yves Pasquier, avocat, pour M. Jean-Marie A, élisant domicile ... ; M. A demande à la Cour : 1°) de réformer le jugement n° 0502932 rendu le 8 juillet 2009 en tant que, par l'article 1er dudit jugement, le tribunal administratif de Nice a limité à la somme de 10 000 euros, assortie des intérêts légaux avec anatocisme, la condamnation de l'Etat à l'indemniser des préjudices subis consécutifs à sa radiation des services avant la limite d'âge ; 2°) de porter cette indemnisation à la somme de 280 200 euros, assortie des intérêts légaux à compter du 3 juin 2005 et de la capitalisation des intérêts à compter du 3 juin 2006 ; ----------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; Vu le code civil ; Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ; Vu le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 février 2012 : - le rapport de Mme Busidan, rapporteur, - les conclusions de Mme Vincent-Dominguez, rapporteur public, - et les observations de Me Pasquier pour M. A ; Considérant que M. Jean-Marie A, né en 1960 et engagé dans la Marine Nationale depuis 1981, nommé quartier maître principal en 1996 et exerçant les fonctions d'infirmier anesthésiste à l'hôpital d'instruction des armées Sainte Anne, s'est vu infliger le 4 juin 1998, sur une présomption de toxicomanie, une sanction disciplinaire de 20 jours d'arrêt, alors qu'il se trouvait, depuis la fin du mois d'avril précédent, dans un état de santé fragilisé par un "syndrome dépressif réactionnel à un conflit familial", selon les termes du médecin du travail de l'hôpital Sainte Anne consulté par l'intéressé le 4 mai 1998 ; qu'à la suite d'une demande présentée par M. A en avril 2000 auprès du tribunal administratif de Nice tendant à l'annulation de cette sanction, le ministre l'a retirée comme non fondée le 14 août 2000 ; que cependant, depuis le 26 août 1998, M. A avait été placé en congé de longue durée pour un état dépressif ; que, par jugement du 20 novembre 2003, le tribunal départemental des pensions des Bouches-du-Rhône a décidé, après expertise diligentée auprès d'un neuropsychiatre, l'allocation à compter du 17 septembre 1998 d'une pension d'invalidité au taux de 60 %, se décomposant en 40 % imputables au service et 20 % imputables à l'état antérieur de l'intéressé, au titre d'un psycho-syndrome traumatique ; qu'à la suite de ce jugement, l'administration a poursuivi le placement en congé longue durée de l'intéressé comme dû à une affection imputable au service ; qu'à l'issue de ses droits à congé, il a été radié des cadres le 26 août 2006 pour inaptitude au service avec droit à pension, avant la limite d'âge de son grade ; qu'estimant qu'une faute de l'administration était à l'origine de cette radiation prématurée des cadres et lui avait causé des préjudices tant personnels que matériels, M. A a demandé à en être indemnisé ; que, par jugement rendu le 8 juillet 2009, le tribunal administratif de Nice a condamné l'Etat à lui verser une somme de 10 000 euros en réparation des souffrances physiques, morales et des troubles dans les conditions d'existence subis par l'intéressé, mais a refusé toute indemnisation relative à un préjudice financier ; que M. A interjette appel du jugement rendu le 8 juillet 2009 en demandant la revalorisation de son indemnisation ; Sur la responsabilité de l'Etat et l'évaluation des préjudices : Considérant qu'il résulte de l'instruction, et n'est d'ailleurs pas contesté par le ministre de la défense, qui a retiré la sanction infligée comme non fondée, que ledit ministre a commis une erreur de fait entachant d'illégalité la sanction infligée à M. A ; que, toutefois, cette illégalité fautive ne peut ouvrir droit à réparation au profit du requérant qu'à la condition qu'elle soit à l'origine d'un préjudice personnel, direct et certain subi par lui ; Considérant qu'il résulte tant du rapport de l'expert diligenté par le tribunal départemental des pensions des Bouches-du-Rhône que des énonciations du jugement rendu par cette juridiction que les difficultés psychologiques de l'intéressé étaient temporaires et auraient été rapidement surmontées moyennant un soutien psychologique adapté si l'intéressé n'avait pas été accusé à tort de toxicomanie ; qu'ainsi, la sanction fondée sur cette accusation erronée doit être regardée comme ayant directement et entièrement causé le traumatisme durable affectant l'état de santé de M. A, qui a d'abord nécessité son placement en congé de longue durée pendant 8 ans, puis a conduit à sa radiation des cadres pour inaptitude physique ; que l'administration doit, par suite, réparer intégralement l'ensemble des dommages, patrimoniaux ou non, endurés du fait de la maladie causée à M. A ; Considérant, s'agissant des préjudices patrimoniaux, que M. A sollicite, en premier lieu, une indemnité réparant les pertes de rémunération entraînées, d'une part, par le versement d'un demi-traitement durant les trois dernières années de son placement en congé longue durée, entre les 26 août 2003 et 2006, d'autre part, par sa radiation des cadres pour mise à la retraite pour inaptitude, du 26 août 2006 jusqu'au 29 avril 2016, jour où il aurait atteint la limite d'âge du grade détenu à la date de sa radiation, soit 56 ans pour les majors infirmiers ; que, dès lors qu'il faut considérer que M. A aurait été apte à travailler durant ces périodes, il convient de déduire des rémunérations auxquelles il aurait pu prétendre, la pension d'invalidité et la pension de retraite qui lui ont été, ou lui seront, servies pendant ces mêmes périodes ; que compte tenu des éléments figurant au dossier, notamment ceux indiqués par le ministre en première instance sur la rémunération qu'aurait perçue, en mars 2008, M. A, s'il avait poursuivi sa carrière dans le grade de major infirmier auquel il avait été promu en décembre 1998, il sera fait une juste appréciation de l'indemnité réparant les pertes de rémunération précitées subies par l'appelant en l'évaluant à la somme de 102 880 euros ; Considérant que M. A soutient en deuxième lieu qu'il a également perdu une chance sérieuse d'être promu, par concours, au grade d'officier durant la carrière qu'il n'a pu poursuivre et demande, au titre de cette perte professionnelle, l'allocation d'une somme de 60 000 euros ; que cependant, la circonstance qu'il a toujours réussi les concours qu'il a présentés, y compris celui passé au début de la période où il a éprouvé des difficultés de santé, un feuillet de mutation établi en 1996 faisant état de ses "qualités professionnelles et intellectuelles remarquables" ainsi que des lettres de félicitations ou d'octroi de médailles sont insuffisants à établir la perte de chance sérieuse alléguée ; Considérant enfin qu'il résulte de l'instruction qu'eu égard aux séquelles psychologiques très importantes engendrées par la sanction illégale, et à ses répercussions sur la carrière de l'intéressé, qui s'est arrêtée à l'âge de 38 ans alors que, jusque là, M. A la réussissait remarquablement, le tribunal administratif de Nice a fait une insuffisante appréciation de la réparation à allouer au titre du préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence subis par l'appelant ; qu'il y a lieu de porter l'indemnité réparant lesdits préjudices à la somme de 20 000 euros ; Sur les intérêts et les intérêts des intérêts : Considérant d'une part que les sommes mentionnées ci-dessus porteront intérêts à compter de la date demandée par l'intéressé, soit le 3 juin 2005, date d'enregistrement de sa demande auprès du tribunal administratif de Nice ; Considérant, d'autre part, que, pour l'application des dispositions de l'article 1154 du code civil, la capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond ; que cette demande prend toutefois effet au plus tôt à la date à laquelle elle est enregistrée, et pourvu qu'à cette date il s'agisse d'intérêts dus au moins pour une année entière ; que, le cas échéant, la capitalisation s'accomplit à nouveau à l'expiration de chaque échéance annuelle ultérieure sans qu'il soit besoin de formuler une nouvelle demande ; que l'appelant a demandé pour la première fois la capitalisation des intérêts par un mémoire enregistré le 18 août 2007 ; qu'à cette date, les intérêts étaient dus pour au moins une année entière ; qu'il y a lieu, dès lors, de faire droit à cette demande à cette date, et à chaque échéance annuelle, à compter de cette date ; Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a borné son indemnisation à la somme de 10 000 euros, et à obtenir que le montant global de l'indemnité réparant les préjudices invoqués soit porté à la somme de 122 880 euros, majorée des intérêts au taux légal à compter du 3 juin 2005 avec capitalisation à compter du 18 août 2007 ; que le jugement doit être réformé dans cette mesure ; Sur les conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Considérant qu'il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. A dans l'instance et non compris dans les dépens ; DECIDE : Article 1er : L'indemnité que l'Etat est condamné à payer à M. A est portée à la somme de 122 880 euros (cent vingt-deux mille huit cent quatre-vingts euros). La somme précitée portera intérêts à compter du 3 juin 2005, et capitalisation des intérêts à compter du 18 août 2007 et à chaque échéance annuelle ultérieure. Article 2 : Le jugement rendu le 8 juillet 2009 par le tribunal administratif de Nice est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er du présent dispositif. Article 3 : L'Etat versera à M. A la somme de 2 000 (deux mille) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. Jean-Marie A et au ministre de la défense et des anciens combattants. '' '' '' '' N° 09MA035552
Cours administrative d'appel
Marseille