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Conseil d'État, 9ème sous-section jugeant seule, 29/06/2012, 346407, Inédit au recueil Lebon
Vu l'ordonnance n° 11BX00014 du 20 janvier 2011, enregistrée le 4 février 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Bordeaux a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, le pourvoi présenté à cette cour par Mme Chama A veuve Abbès B, demeurant ... ; Vu le pourvoi et le mémoire complémentaire, enregistrés respectivement le 4 janvier 2011 au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux, et le 1er août 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Chama A et tendant, d'une part, à l'annulation du jugement n° 0702715 du 18 décembre 2008 par lequel le magistrat désigné par le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 26 octobre 2007 du ministre de la défense lui refusant le bénéfice d'une pension de réversion à raison du décès de son époux et, d'autre part, à ce qu'il soit fait droit, dans le cadre du règlement de l'affaire au fond, à sa demande ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ; Vu la loi n° 59-1454 du 26 décembre 1959 de finances pour 1960 ; Vu la loi n° 2002-1576 du 30 décembre 2002 de finances rectificative pour 2002 ; Vu la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011 ; Vu la décision n° 2010-1 QPC du 28 mai 2010 du Conseil constitutionnel ; Vu la décision n° 2010-108 QPC du 25 mars 2011 du Conseil constitutionnel ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Séverine Larere, Maître des Requêtes, - les observations de la SCP Didier, Pinet, avocat de Mme A, - les conclusions de M. Frédéric Aladjidi, rapporteur public ; La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Didier, Pinet, avocat de Mme A ;1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. B, ressortissant marocain ayant servi dans l'armée française du 20 juillet 1935 au 27 juin 1952, a été admis par arrêté du 30 mai 1953 au bénéfice d'une pension militaire de retraite, qui a été transformée en indemnité personnelle et viagère en application des dispositions de l'article 71 de la loi du 26 décembre 1959 de finances pour 1960 ; qu'il a épousé en 1957 Mme Chama A, ressortissante marocaine ; qu'un enfant est né de ce mariage ; que Mme A se pourvoit en cassation contre le jugement du 18 décembre 2008 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du ministre de la défense du 26 octobre 2007 rejetant sa demande de réversion de la pension militaire de retraite du chef de son époux décédé le 29 février 1996 avec paiement des arrérages depuis cette date ; Sur le pourvoi : En ce qui concerne la fin de non-recevoir opposée par le ministre chargé de la défense : 2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 751-3 du code de justice administrative : " Sauf disposition contraire, les décisions sont notifiées le même jour à toutes les parties en cause et adressées à leur domicile réel, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, sans préjudice du droit des parties de faire signifier ces décisions par acte d'huissier de justice " ; 3. Considérant qu'en l'absence, au dossier transmis par la cour administrative d'appel de Bordeaux, de l'accusé de réception du courrier portant notification du jugement attaqué à Mme A, la date à laquelle cette notification serait intervenue n'est pas établie ; qu'il suit de là que la fin de non-recevoir opposée par le ministre tirée de la tardiveté du pourvoi doit être écartée ; En ce qui concerne le jugement en tant qu'il statue sur le droit à pension de veuve de Mme A : 4. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 61-1 de la Constitution : "Lorsque, à l'occasion d'une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d'Etat ou de la Cour de cassation. " ; qu'aux termes du deuxième alinéa de son article 62 : " Une disposition déclarée inconstitutionnelle sur le fondement de l'article 61-1 est abrogée à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel ou d'une date ultérieure fixée par cette décision. Le Conseil constitutionnel détermine les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition a produits sont susceptibles d'être remis en cause " ; qu'enfin, aux termes du troisième alinéa du même article : " Les décisions du Conseil constitutionnel ne sont susceptibles d'aucun recours. Elles s'imposent aux pouvoirs publics et à toutes les autorités administratives et juridictionnelles. " ; 5. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées de l'article 62 de la Constitution qu'une disposition législative déclarée contraire à la Constitution sur le fondement de l'article 61-1 n'est pas annulée rétroactivement mais abrogée pour l'avenir à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel ou d'une date ultérieure fixée par cette décision ; que, par sa décision n° 2010-108 QPC en date du 25 mars 2011, le Conseil constitutionnel a jugé que " si, en principe, la déclaration d'inconstitutionnalité doit bénéficier à l'auteur de la question prioritaire de constitutionnalité et la disposition déclarée contraire à la Constitution ne peut être appliquée dans les instances en cours à la date de la publication de la décision du Conseil constitutionnel, les dispositions de l'article 62 de la Constitution réservent à ce dernier le pouvoir tant de fixer la date de l'abrogation et reporter dans le temps ses effets que de prévoir la remise en cause des effets que la disposition a produits avant l'intervention de cette déclaration " ; 6. Considérant que, lorsque le Conseil constitutionnel, après avoir abrogé une disposition déclarée inconstitutionnelle, use du pouvoir que lui confèrent les dispositions précitées, soit de déterminer lui-même les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition a produits sont susceptibles d'être remis en cause, soit de décider que le législateur aura à prévoir une application aux instances en cours des dispositions qu'il aura prises pour remédier à l'inconstitutionnalité constatée, il appartient au juge, saisi d'un litige relatif aux effets produits par la disposition déclarée inconstitutionnelle, de les remettre en cause en écartant, pour la solution de ce litige, le cas échéant d'office, cette disposition, dans les conditions et limites fixées par le Conseil constitutionnel ou le législateur ; 7. Considérant que, par sa décision n° 2010-1 QPC du 28 mai 2010, le Conseil constitutionnel a déclaré contraires à la Constitution les dispositions de l'article 68 de la loi du 30 décembre 2002 de finances rectificative pour 2002, à l'exception de celles de son paragraphe VII ; qu'il a jugé que : " afin de permettre au législateur de remédier à l'inconstitutionnalité constatée, l'abrogation des dispositions précitées prendra effet à compter du 1er janvier 2011 ; afin de préserver l'effet utile de la présente décision à la solution des instances actuellement en cours, il appartient, d'une part, aux juridictions de surseoir à statuer jusqu'au 1er janvier 2011 dans les instances dont l'issue dépend de l'application des dispositions déclarées inconstitutionnelles et, d'autre part, au législateur de prévoir une application des nouvelles dispositions à ces instances en cours à la date de la présente décision " ; 8. Considérant que, à la suite de cette décision, l'article 211 de la loi du 29 décembre 2010 de finances pour 2011 a défini de nouvelles dispositions pour le calcul des pensions militaires d'invalidité, des pensions civiles et militaires de retraite et des retraites du combattant servies aux ressortissants des pays ou territoires ayant appartenu à l'Union française ou à la Communauté ou ayant été placés sous le protectorat ou sous la tutelle de la France et abrogé plusieurs dispositions législatives, notamment celles de l'article 71 de la loi du 26 décembre 1959 portant loi de finances pour 1960 ; que, par ailleurs, son paragraphe VI prévoit que " le présent article est applicable aux instances en cours à la date du 28 mai 2010, la révision des pensions prenant effet à compter de la date de réception par l'administration de la demande qui est à l'origine de ces instances " ; qu'enfin, aux termes du XI du même article : " Le présent article entre en vigueur au 1er janvier 2011 " ; 9. Considérant que, comme il a été dit, le Conseil constitutionnel a jugé qu'il appartenait au législateur de prévoir une application aux instances en cours à la date de sa décision des dispositions qu'il adopterait en vue de remédier à l'inconstitutionnalité constatée ; que l'article 211 de la loi de finances pour 2011 ne se borne pas à déterminer les règles de calcul des pensions servies aux personnes qu'il mentionne, mais abroge aussi des dispositions qui définissent, notamment, les conditions dans lesquelles est ouvert le droit à une pension de réversion ; qu'ainsi, alors même qu'il mentionne seulement la " révision des pensions ", le paragraphe VI de l'article 211 précité doit être regardé comme s'appliquant aussi aux demandes de pension de réversion ; 10. Considérant que, pour statuer sur la demande de pension de réversion présentée par Mme A par le jugement attaqué du 18 décembre 2008, le tribunal administratif de Poitiers s'est exclusivement fondé sur les dispositions de l'article 68 de la loi de finances rectificative pour 2002 et sur celles de l'article 71 de la loi de finances pour 1960 ; qu'afin de préserver l'effet utile de la décision précitée du Conseil constitutionnel à la solution de l'instance ouverte par la demande de Mme A, en permettant au juge du fond de remettre en cause, dans les conditions et limites définies par le paragraphe VI de l'article 211 de la loi de finances pour 2011, les effets produits par les dispositions mentionnées ci-dessus, il incombe au juge de cassation d'annuler le jugement attaqué ; 11. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ; Sur le fond : En ce qui concerne la fin de non-recevoir opposée par le ministre chargé du budget : 12. Considérant que Mme A est représentée devant le Conseil d'Etat par une société civile professionnelle d'avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de Cassation à l'adresse de laquelle elle est réputée avoir élu domicile ; que la fin de non-recevoir opposée par le ministre, tirée de la méconnaissance de l'obligation d'élection de domicile posée par l'article R. 431-8 du code de justice administrative doit, par suite, être écartée ; En ce qui concerne le droit à pension de réversion de Mme A : Quant à la période postérieure au 13 mars 2007 : 13. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, les dispositions de l'article 71 de la loi du 26 décembre 1959 et celles de l'article 68 de la loi du 30 décembre 2002, qui définissaient, à la date de la décision attaquée, les conditions dans lesquelles un droit à pension de réversion était ouvert à la veuve d'un ayant droit étranger, ont été abrogées à compter du 1er janvier 2011, les premières par l'article 211 de la loi de finances pour 2011, les secondes par la décision du Conseil constitutionnel du 28 mai 2010 ; qu'en application du VI de l'article 211 de la loi de finances pour 2011, dont la portée a été précisée ci-dessus, il y a lieu d'écarter ces dispositions législatives pour statuer sur le droit à pension de réversion de Mme A à compter de la date de réception de sa demande par l'administration, soit à compter du 13 mars 2007 ; 14. Considérant que l'article 211 de la loi de finances pour 2011 n'ayant substitué aucune disposition nouvelle à celles qui doivent ainsi être écartées pour définir les conditions dans lesquelles un droit à pension de réversion est ouvert à la veuve d'un ayant droit étranger, il y a lieu de faire application des dispositions du code des pensions civiles et militaires de retraite relatives aux pensions des ayants cause applicables à la date du décès de l'ayant droit ; 15. Considérant qu'aux termes de l'article L. 47 du code des pensions civiles et militaires de retraite, dans sa rédaction en vigueur le 29 février 1996 : " Sont applicables aux ayants cause des militaires dont les droits se trouvent régis par le présent code les dispositions du chapitre Ier du présent titre, à l'exception de celles visées au premier alinéa, a et b, de l'article L. 39, qui sont remplacées par les dispositions suivantes : / Le droit à pension de veuve est subordonné à la condition : / a) Que depuis la date du mariage jusqu'à celle de la cessation de l'activité du mari, celui-ci ait accompli deux années au moins de services valables pour la retraite, sauf si un ou plusieurs enfants sont issus du mariage antérieur à ladite cessation, lorsque le mari a obtenu ou pouvait obtenir la pension prévue à l'article L. 6 (1°) (...) " ; qu'aux termes du troisième alinéa de l'article L. 39 du code des pensions civiles et militaires de retraite, rendu applicable aux ayants causes des militaires par l'article L. 47 du même code : " Nonobstant les conditions d'antériorité prévues ci-dessus, le droit à pension de veuve est reconnu : / 1° Si un ou plusieurs enfants sont issus du mariage ; 2° Ou si le mariage, antérieur ou postérieur à la cessation d'activité, a duré au moins quatre années. " ; qu'il résulte de l'instruction que Mme A remplit les conditions ainsi prévues par le code des pensions civiles et militaires de retraite pour l'obtention d'une pension de veuve ; que sa demande de versement d'une pension de réversion du chef de son mari décédé a été reçue par l'administration le 13 mars 2007 ; qu'elle est donc fondée à demander à bénéficier d'une telle pension à compter de cette date ; 16. Considérant, dès lors, que la décision du ministre du 26 octobre 2007 qui refuse à Mme A l'attribution d'une pension de veuve à compter du 13 mars 2007 doit être annulée ; Quant à la période antérieure au 13 mars 2007 : 17. Considérant que, dans l'exercice du contrôle de conformité des lois à la Constitution qui lui incombe selon la procédure définie à l'article 61-1 de la Constitution, le Conseil constitutionnel a le pouvoir d'abroger les dispositions législatives contraires à la Constitution ; que les juridictions administratives et judiciaires, à qui incombe le contrôle de la compatibilité des lois avec le droit de l'Union européenne ou les engagements internationaux de la France, peuvent déclarer que des dispositions législatives incompatibles avec le droit de l'Union ou ces engagements sont inapplicables au litige qu'elles ont à trancher ; qu'il appartient, par suite, au juge du litige, s'il n'a pas fait droit à l'ensemble des conclusions du requérant en tirant les conséquences de la déclaration d'inconstitutionnalité d'une disposition législative prononcée par le Conseil constitutionnel, d'examiner, dans l'hypothèse où un moyen en ce sens est soulevé devant lui, s'il doit, pour statuer sur les conclusions qu'il n'a pas déjà accueillies, écarter la disposition législative en cause du fait de son incompatibilité avec une stipulation conventionnelle ou, le cas échéant, une règle du droit de l'Union européenne dont la méconnaissance n'aurait pas été préalablement sanctionnée ; 18. Considérant qu'à cette fin, lorsqu'est en litige une décision refusant au requérant l'attribution d'un droit auquel il prétend et qu'est invoquée l'incompatibilité de la disposition sur le fondement de laquelle le refus lui a été opposé avec les stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention, il incombe au juge, en premier lieu, d'examiner si le requérant peut être regardé comme se prévalant d'un bien au sens des stipulations de l'article 1er du premier protocole additionnel et, en second lieu, quand tel est le cas, si la disposition législative critiquée doit être écartée comme portant atteinte à ce bien de façon discriminatoire et, par suite, comme étant incompatible avec les stipulations de l'article 14 de la convention ; 19. Considérant qu'aux termes du I de l'article 71 de la loi du 26 décembre 1959 : " A compter du 1er janvier 1961, les pensions, rentes ou allocations viagères imputées sur le budget de l'Etat ou d'établissements publics dont sont titulaires les nationaux des pays ou territoires ayant appartenu à l'Union française ou à la Communauté, ou ayant été placés sous le protectorat ou la tutelle de la France, seront remplacées, pendant la durée normale de leur jouissance personnelle, par des indemnités annuelles en francs, calculées sur la base des tarifs en vigueur pour lesdites allocations ou pensions, à la date de leur transformation " ; qu'aux termes du I de l'article 68 de la loi du 30 décembre 2002 portant loi de finances rectificative pour 2002 : " Les prestations servies en application des articles (...) 71 de la loi de finances pour 1960 (...) sont calculées dans les conditions prévues aux paragraphes suivants. " ; qu'aux termes du VI du même article : " Les prestations servies en application des textes visés au I peuvent faire l'objet, à compter du 1er janvier 2002 et sur demande, d'une réversion. L'application du droit des pensions aux intéressés et la situation de famille sont appréciées à la date d'effet des dispositions visées au I pour chaque Etat concerné " ; 20. Considérant qu'il résulte de la combinaison des dispositions précitées que le droit à la réversion d'une pension militaire de retraite versée à un ressortissant marocain en application du I de l'article 71 de la loi n° 59-1454 du 26 décembre 1959 s'apprécie au regard de la réglementation en vigueur le 1er janvier 1961, et non au regard de la réglementation applicable à la date du décès de l'ayant droit ; qu'à la date du 1er janvier 1961, l'article L. 64 du code des pensions civiles et militaires de retraite excluait du droit à pension de réversion les veuves dont le mariage avait été célébré postérieurement à la cessation d'activité du conjoint titulaire de la pension, sans tenir compte de ce que des enfants seraient issus du mariage ; 21. Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. B a cessé son activité dans l'armée française le 28 juin 1952 et que son mariage avec la requérante a eu lieu en 1957 ; que ce mariage étant postérieur à la radiation des contrôles de l'armée active de son époux décédé, Mme A, sa veuve, ne remplit pas les conditions prévues par les dispositions de l'article L. 64 du code des pensions civiles et militaires de retraite en vigueur le 1er janvier 1961 pour bénéficier d'une pension militaire de réversion ; 22. Considérant, toutefois, que Mme A soutient que les dispositions du VI de l'article 68 de la loi du 30 décembre 2002 sont incompatibles avec les stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention, en ce qu'elles instaurent une discrimination fondée sur la nationalité en appliquant aux veuves de militaires étrangers les dispositions du code des pensions civiles et militaires de retraite en vigueur à la date d'indépendance de leur pays, quand les veuves de militaires français se voient appliquer les dispositions de ce code en vigueur à la date du décès du militaire ; 23. Considérant qu'aux termes de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention : " Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. / Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes " ; qu'aux termes de l'article 14 de cette convention : " La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation " ; 24. Considérant, d'une part, que le code des pensions civiles et militaires de retraite prévoit que la pension servie à un ayant droit est, en principe, réversible, notamment au profit de sa veuve ; que, ainsi qu'il a été dit, Mme A est, depuis le 29 février 1996, veuve d'un militaire titulaire d'une pension concédée en application de ce code ; que, par suite, si la loi applicable exclut pour elle, sur le seul fondement d'un critère relatif à la nationalité du titulaire de la pension, le bénéfice d'une pension de réversion, Mme A, qui remplit la condition d'être veuve d'un titulaire d'une pension, peut se prévaloir d'un droit patrimonial, qui doit être regardé comme un bien au sens des stipulations précitées de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et peut demander au juge d'écarter l'application des dispositions du VI de l'article 68 de la loi du 30 décembre 2002 en invoquant leur incompatibilité avec les stipulations de l'article 14 de la convention ; 25. Considérant, d'autre part, qu'une distinction entre des personnes placées dans une situation analogue est discriminatoire, au sens des stipulations de l'article 14 de la convention, si elle n'est pas assortie de justifications objectives et raisonnables, c'est-à-dire si elle ne poursuit pas un objectif d'utilité publique, ou si elle n'est pas fondée sur des critères objectifs et rationnels en rapport avec les buts de la loi ; que les pensions de retraite constituent, pour les militaires et agents publics, une allocation pécuniaire destinée à leur assurer, ou à assurer à leurs ayants cause, des conditions matérielles de vie en rapport avec la dignité des fonctions précédemment exercées par ces militaires et agents ; que la différence de situation existant entre des ayants cause d'anciens militaires et agents publics de la France, selon que ceux-ci ont la nationalité française ou sont ressortissants d'Etats devenus indépendants, ne justifie pas, eu égard à l'objet des pensions de réversion, une différence de traitement ; que cette différence de traitement ne peut être regardée comme reposant sur un critère en rapport avec l'objectif de la loi du 30 décembre 2002 ; que les dispositions du VI de l'article 68 de cette loi étant, de ce fait, incompatibles avec les stipulations précitées de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le ministre de la défense devait examiner les droits à pension de Mme A au regard du droit applicable non le 1er janvier 1961, mais à la date du décès de M. B, soit le 29 février 1996 ; qu'à cette date, ainsi qu'il été dit, Mme A remplissait les conditions prévues par le code des pensions civiles et militaires pour l'obtention d'une pension de veuve ; 26. Considérant toutefois qu'aux termes de l'article L. 53 du code des pensions civiles et militaires de retraite, dont se prévaut le ministre chargé du budget : " Lorsque, par suite du fait personnel du pensionné, la demande de liquidation ou de révision de la pension est déposée postérieurement à l'expiration de la quatrième année qui suit celle de l'entrée en jouissance normale de la pension, le titulaire ne peut prétendre qu'aux arrérages afférents à l'année au cours de laquelle la demande a été déposée et aux quatre années antérieures " ; que Mme A ayant déposé sa demande de pension de réversion le 13 mars 2007, les droits de celle-ci au rappel des arrérages de sa pension se limitent, en tout état de cause, à la période postérieure au 1er janvier 2003 ; 27. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A a droit, pour la période comprise entre le 1er janvier 2003 et le 13 mars 2007 à une pension de réversion ;D E C I D E : -------------- Article 1er : Le jugement du 18 décembre 2008 du tribunal administratif de Poitiers est annulé. Article 2 : La décision du ministre de la défense du 26 octobre 2007 est annulée en tant qu'elle refuse le versement à Mme A d'une pension de réversion du chef de son époux à compter du 1er janvier 2003. Article 3 : L'Etat versera à Mme A une pension de réversion du chef de son époux à compter du 1er janvier 2003. Article 4 : Le surplus de la demande présentée devant le tribunal administratif de Poitiers est rejeté. Article 5 : La présente décision sera notifiée à Mme Chama A, au ministre de l'économie et des finances et au ministre de la défense.
Conseil d'Etat
Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 03/07/2012, 10PA03737, Inédit au recueil Lebon
Vu la requête sommaire et les mémoires complémentaires, enregistrés les 26 juillet 2010 et 3 janvier 2011, présentés pour M. Bouchiba A, demeurant ..., par Me Puillandre ; M. A demande à la Cour : 1°) d'annuler l'ordonnance n° 1000493/12 en date du 4 juin 2010 par laquelle le vice-président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 6 novembre 2009 par laquelle le préfet de la région Île-de-France, préfet de Paris, lui a refusé l'attribution de la carte du combattant ; 2°) d'annuler pour excès de pouvoir cette décision ; 3°) d'enjoindre au préfet de réexaminer sa demande d'attribution de la carte de combattant ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros, à verser à son avocat en application des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; ..................................................................................................................... Vu l'ordonnance et la décision attaquées ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu la Constitution, notamment ses articles 61-1 et 62 ; Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; Vu la décision n° 2010-18 QPC du 23 juillet 2010 du Conseil constitutionnel ; Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; Vu le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 juin 2012 : - le rapport de M. Dellevedove, rapporteur, - et les conclusions de M. Rousset, rapporteur public ; Considérant que M. A, ressortissant algérien, fait appel de l'ordonnance en date du 4 juin 2010 par laquelle le vice-président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 6 novembre 2009 par laquelle le préfet de la région Île-de-France, préfet de Paris, lui a refusé l'attribution de la carte du combattant ; Sur les conclusions à fin d'annulation : Considérant qu'aux termes de l'article L. 253 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " Il est créé une carte de combattant qui est attribuée dans les conditions fixées aux articles R. 223 à R. 235 " ; qu'aux termes de l'article L. 253 bis du même code dans sa rédaction alors en vigueur : " Ont vocation à la qualité de combattant et à l'attribution de la carte du combattant, selon les principes retenus pour l'application du présent titre et des textes réglementaires qui le complètent, sous la seule réserve des adaptations qui pourraient être rendues nécessaires par le caractère spécifique de la guerre d'Algérie ou des combats en Tunisie et au Maroc entre le 1er janvier 1952 et le 2 juillet 1962 : / Les militaires des armées françaises, / Les membres des forces supplétives françaises possédant la nationalité française à la date de la présentation de leur demande ou domiciliés en France à la même date, / Les personnes civiles possédant la nationalité française à la date de la présentation de leur demande qui ont pris part à des actions de feu ou de combat au cours de ces opérations. / Une commission d'experts, comportant notamment des représentants des intéressés, est chargée de déterminer les modalités selon lesquelles la qualité de combattant peut, en outre, être reconnue, par dérogation aux principes visés à l'alinéa précédent, aux personnes ayant pris part à cinq actions de feu ou de combat ou dont l'unité aura connu, pendant leur temps de présence, neuf actions de feu ou de combat. Les adaptations visées au premier alinéa ci-dessus ainsi que les modalités d'application du présent article, et notamment les périodes à prendre en considération pour les différents théâtres d'opérations, seront fixées par décret en Conseil d'Etat ; un arrêté interministériel énumérera les catégories de formations constituant les forces supplétives françaises. / Une durée des services d'au moins quatre mois dans l'un ou l'autre ou dans plusieurs des pays mentionnés au premier alinéa est reconnue équivalente à la participation aux actions de feu ou de combat exigée au cinquième alinéa " ; qu'aux termes de l'article R. 223 du même code : " La carte du combattant prévue à l'article L. 253 est attribuée à toutes les personnes qui justifient de la qualité de combattant dans les conditions déterminées par les articles R. 224 à R. 229 " ; qu'aux termes de l'article R. 224 du même code dans sa rédaction alors en vigueur : " Sont considérés comme combattants : (...) / D - Pour les opérations effectuées en Afrique du Nord entre le 1er janvier 1952 et le 2 juillet 1962 inclus : (...) / c) En Algérie, à compter du 31 octobre 1954. / I. - Sont considérés comme des combattants les militaires des armées françaises et les membres des forces supplétives françaises : 1° Qui ont appartenu pendant trois mois, consécutifs ou non, à une unité combattante ou à une formation entrant dans l'une des catégories énumérées par l'arrêté interministériel prévu au troisième alinéa de l'article L. 253 bis et assimilée à une unité combattante ; /Pour le calcul de la durée d'appartenance, les services accomplis au titre d'opérations antérieures se cumulent entre eux et avec ceux des opérations d'Afrique du Nord ; / Des bonifications afférentes à des situations personnelles résultant du contrat d'engagement sont accordées pour une durée ne pouvant excéder dix jours, suivant les modalités d'application fixées par arrêtés des ministres intéressés ; / 2° Qui ont appartenu à une unité ayant connu, pendant leur temps de présence, neuf actions de feu ou de combat ; / 3° Qui ont pris part à cinq actions de feu ou de combat ; / 4° Qui ont été évacués pour blessure reçue ou maladie contractée en service, alors qu'ils appartenaient à une unité combattante ou à une formation assimilée sans condition de durée de séjour dans cette unité ou formation ; / 5° Qui ont reçu une blessure assimilée à une blessure de guerre quelle que soit l'unité ou la formation à laquelle ils ont appartenu, sans condition de durée de séjour dans cette unité ou formation ; / 6° Qui ont été détenus par l'adversaire et privés de la protection des conventions de Genève (...) " ; que l'arrêté inter ministériel du 11 février 1975 susvisé qui énumère les formations constituant les forces supplétives françaises qui ont participé aux opérations effectuées en Afrique du Nord entre le 1er janvier 1952 et le 2 juillet 1962 mentionne notamment " 1. Les formations de harkis (...) " ; Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et qu'il n'est pas contesté que M. A a servi dans les forces supplétives françaises en qualité de harki du 1er novembre 1958 au 1er mai 1960 puis du 22 juillet 1960 au 31 mars 1962 ; qu'il a donc été membre des forces supplétives françaises pendant une période d'au moins 4 mois et remplit ainsi, contrairement aux motifs de la décision contestée du 6 novembre 2009 du préfet de la région Île-de-France, préfet de Paris, la condition de services et de durée posée par les dispositions précitées du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre lui ouvrant droit à la reconnaissance de la qualité de combattant ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité de l'ordonnance attaquée, que M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que, par cette ordonnance, le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 6 novembre 2009 par laquelle le préfet de la région Île-de-France, préfet de Paris lui a refusé la qualité de combattant au motif qu'il ne justifiait pas d'une " présence en Afrique du Nord pendant au minimum 120 jours " ; Sur les conclusions à fin d'injonction : Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une décision dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " ; Considérant que M. A doit être regardé comme demandant à la Cour, sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 911-2 du code de justice administrative, d'enjoindre au préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris, de réexaminer et de statuer à nouveau sur sa demande d'attribution de la carte de combattant ; Considérant qu'il appartient au juge de l'exécution de statuer en tenant compte des éléments de droit et de fait existant à la date de sa décision ; Considérant que, par une décision n° 2010-18 QPC du 23 juillet 2010, le Conseil constitutionnel a déclaré contraires à la Constitution les conditions de nationalité et de domiciliation imposées par le troisième alinéa de l'article 253 bis du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; que ces dispositions législatives ont été abrogées à compter du 24 juillet 2010, date de la publication de la décision n° 2010-18 QPC au journal officiel de la République française ; qu'eu égard à la rédaction de l'article L. 253 bis en vigueur à la date du présent arrêt et compte tenu du motif qui a été retenu pour annuler la décision refusant à M. A la qualité de combattant, l'exécution du présent arrêt implique nécessairement que l'administration réexamine et statue à nouveau sur sa demande d'attribution de la carte du combattant ; que, dès lors, il y a lieu de prescrire au préfet de procéder au réexamen et de statuer à nouveau sur la demande d'attribution de la carte du combattant de l'intéressé dans un délai de quatre mois à compter de la notification du présent arrêt ; Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de loi du 10 juillet 1991 : Considérant que M. A a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article 37 de la loi susvisée du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Puillandre renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros, à ce titre ; D E C I D E : Article 1er : L'ordonnance susvisée du vice-président du Tribunal administratif de Paris en date du 4 juin 2010 et la décision du préfet de la région Île-de-France, préfet de Paris, en date du 6 novembre 2009 sont annulées. Article 2 : Il est enjoint au préfet de la région Île-de-France, préfet de Paris, de réexaminer la demande d'attribution de la carte du combattant de l'intéressé et de statuer à nouveau sur celle-ci dans un délai de quatre mois à compter de la notification du présent arrêt. Article 3 : L'Etat versera à Me Puillandre la somme de 1 000 euros, en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que celui-ci renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat. '' '' '' '' 3 N° 10PA03737
Cours administrative d'appel
Paris
Cour Administrative d'Appel de Marseille, 8ème chambre - formation à 3, 28/06/2012, 10MA00178, Inédit au recueil Lebon
Vu la requête, enregistrée le 15 janvier 2010 sur télécopie confirmée le 18 suivant, présentée par Me Lemaire, avocat, pour Mme Alexandra A, élisant domicile ... ; Mme A demande à la Cour : 1°) de réformer le jugement n° 0901368 rendu le 19 novembre 2009 en tant que, par l'article 1er dudit jugement, le tribunal administratif de Nîmes a limité à la somme de 25 000 euros la condamnation de l'État à l'indemniser des préjudices consécutifs à l'accident subi le 21 mars 2001 ; 2°) de condamner l'État à lui verser la somme totale de 248 375 euros en réparation des préjudices subis, déduction faite de la somme de 25 000 euros allouée à titre de provision ; 3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; Vu le jugement attaqué ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu le décret n° 98-782 du 1er septembre 1998 relatif aux volontaires dans les armées ; Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; Vu le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 mars 2012 : - le rapport de Mme Busidan, rapporteur, - et les conclusions de Mme Vincent-Dominguez, rapporteur public ; Considérant que, par jugement rendu le 19 novembre 2009, le tribunal administratif de Nîmes a limité à la somme de 25 000 euros la réparation des préjudices de toute nature subis par Mme A consécutivement à un accident de tir dont elle a été victime le 21 mars 2001 à la suite de la manipulation d'une arme par un de ses collègues gendarmes-adjoints ; qu'elle interjette appel de ce jugement en sollicitant la réévaluation de l'indemnité allouée par les premiers juges ; Considérant que si les dispositions de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre déterminent forfaitairement la réparation à laquelle un militaire victime d'un accident de service peut prétendre, au titre de l'atteinte qu'il a subie dans son intégrité physique, elles ne font pas obstacle à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre l'État, dans le cas notamment où l'accident est imputable à une faute de service de nature à engager sa responsabilité ; que, comme l'ont relevé les premiers juges, tel est le cas en l'espèce ; qu'ainsi, Mlle A, qui s'est vu allouer une pension militaire d'invalidité à titre temporaire et une pension d'invalidité à titre définitif, a droit à l'indemnisation de l'ensemble des préjudices patrimoniaux et personnels résultant de l'accident dont elle a été victime, dans la mesure toutefois où ceux-ci ne sont pas réparés par les prestations qui lui ont déjà été accordées par l'État ; Considérant en premier lieu que les premiers juges, outre l'allocation d'une somme de 800 euros remboursant les frais de l'expertise judiciaire qui avaient été payés par Mlle A, ont fixé à 18 000 euros la réparation des troubles dans les conditions d'existence relatifs au déficit fonctionnel lié aux incapacités temporaires totales de travail subies avant la consolidation de son état et à l'incapacité permanente partielle de 12% qu'elle conserve, à 4 000 euros la réparation des souffrances endurées évaluées par expertise à 3,5/7, à 1 700 euros la réparation du préjudice d'agrément résultant de l'impossibilité de pratiquer des sports, et à 500 euros la réparation du préjudice esthétique évalué à 0,5/7 ; qu'en se bornant à soutenir que ces préjudices auraient été sous-évalués, l'appelante ne fournit aucun élément de nature à permettre d'établir qu'en fixant leur indemnisation ainsi qu'il vient d'être rappelé, les premiers juges les auraient insuffisamment appréciés ; Considérant, en deuxième lieu, que Mlle A soutient qu'en dehors des pertes de revenus liées à son invalidité permanente et réparées par la pension militaire d'invalidité à titre définitif qui lui a été allouée, l'accident dont elle a été victime a eu des incidences périphériques sur sa vie professionnelle liées à la perte de chance d'évoluer dans le métier de gendarme qu'elle avait choisi, et à sa dévalorisation sur le marché du travail dès lors qu'elle n'a pu accéder qu'à un emploi sans perspective d'évolution ; qu'elle demande réparation à hauteur de 200 000 euros de ce préjudice d'incidence professionnelle ; Considérant à cet égard, d'une part, que si Mlle A bénéficiait d'un engagement de courte durée sur la base d'un volontariat, un tel engagement a vocation à destiner les gendarmes-adjoints à devenir sous-officiers par concours ; qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment des fiches de notation de l'intéressée établies au titre des années 2000 et 2001, que celle-ci envisageait sérieusement une carrière active dans la gendarmerie et qu'elle disposait, selon l'appréciation portée par sa hiérarchie, des aptitudes intellectuelles et physiques et d'une motivation certaine pour réussir le concours de sous-officier ; que l'intéressée a présenté consécutivement à son accident pendant plusieurs années, un syndrome dépressif associé à un défaut de projection dans le futur, pouvant justifier que celle-ci n'ait plus été en mesure, du fait de son accident de service, d'une part, d'envisager avec la même motivation une carrière purement sédentaire dans la gendarmerie et, d'autre part et en tout état de cause, de se présenter audit concours, même en bénéficiant d'une dispense pour les épreuves physiques ; qu'elle doit ainsi être regardée, contrairement aux énonciations du jugement sur ce point, comme ayant perdu une chance d'évolution professionnelle au sein de la gendarmerie ; Considérant, d'autre part, que Mlle A a été au chômage entre le 30 août 2004 et le 1er décembre 2005, date à laquelle elle a seulement pu retrouver un emploi de surveillant de la voie publique au sein de la commune de Cavaillon, poste pour lequel il est avéré qu'elle éprouve des difficultés physiques, ainsi que cela ressort d'une fiche d'aptitude médicale en date du 28 janvier 2010 ; qu'elle doit, au vu de ces circonstances, être également regardée comme ayant perdu, de manière générale, une chance d'accéder à des emplois valorisants correspondant à ses dispositions intellectuelles et physiques telles qu'elles étaient évaluées avant son accident ; qu'il sera fait une juste appréciation des préjudices subis dans les conditions sus relatées en condamnant l'État à lui verser une indemnité de 10 000 euros à ce titre ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mlle A est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a limité à 25 000 euros la réparation des préjudices invoqués, consécutifs à l'accident de tir dont elle a été victime ; qu'elle est fondée à obtenir que l'indemnité que l'État doit être condamné à lui verser soit portée à la somme totale de 35 000 euros, et que le jugement attaqué soit réformé dans cette mesure ; Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'État le versement à Mlle A de la somme de 1 500 euros qu'elle demande au titre des frais exposés par elle, et non compris dans les dépens ; DECIDE : Article 1er : L'indemnité, que l'État (ministre de la défense) a été condamné par le tribunal administratif de Nîmes à verser à Mlle A, est portée à la somme de 35 000 (trente-cinq mille) euros, sous déduction de la somme de 25 000 euros allouée à la requérante par l'ordonnance du juge des référés du même tribunal administratif en date du 11 mai 2009. Article 2 : Le jugement n° 901368 rendu le 19 novembre 2009 par le tribunal administratif de Nîmes est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er du présent dispositif. Article 3 : L'État (ministre de la défense) versera à Mlle A la somme de 1 500 (mille cinq cents) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête présentée par Mlle A est rejeté. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mlle Alexandra A et au ministre de la défense. '' '' '' '' N° 10MA001783
Cours administrative d'appel
Marseille
Cour Administrative d'Appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 05/07/2012, 11NC01153, Inédit au recueil Lebon
Vu la requête, enregistrée le 12 juillet 2011, présentée pour Mme Marie-José A, demeurant ..., par Me Leroux ; Mme A demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement n° 0800677 du 12 mai 2011 par lequel le Tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant, d'une part à annuler la décision en date du 21 février 2008 par laquelle la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL) a fixé à 30 % son taux d'invalidité pour le calcul de sa pension de retraite et, d'autre part, à maintenir le traitement auquel elle avait droit jusqu'à l'issue de la procédure justifiant la saisie de la commission de réforme, à ce qu'il soit procédé au rétablissement de ses droits et notamment de son traitement sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter du prononcé du jugement, et, à titre subsidiaire, à la désignation d'un expert médical devant évaluer le véritable taux de son invalidité ; 2°) d'annuler la décision en date du 21 février 2008 de la CNRACL ; 3°) de maintenir le traitement auquel elle avait droit jusqu'à l'issue de la procédure justifiant la saisie de la commission de réforme, en condamnant le centre hospitalier de Belfort-Montbéliard ou, à défaut, la Caisse des dépôts et consignations, à lui verser une somme de 18 752 euros correspondant à la différence entre une pension au taux de 30 % et une pension au taux de 60 % au cours de la période s'étendant entre le 3 janvier 2005 et le 31 décembre 2009, assortie des intérêts au taux légal à compter du 3 janvier 2005, ainsi qu'une somme de 4 543,65 euros correspondant à la différence entre une pension au taux de 30 % et une pension au taux de 60 % au cours de la période s'étendant entre le 1er janvier 2010 et le 31 mars 2011, assortie des intérêts au taux légal à compter du 1er janvier 2010 ; 3°) à titre subsidiaire, de désigner un expert médical afin d'évaluer le véritable taux de son invalidité ; 4°) de mettre à la charge de la CNRACL la somme de 5 000 euros à lui verser au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative; Elle soutient que : - la commission de réforme ne pouvait être saisie que par l'employeur ou l'agent concerné, et non par la CNRACL ; l'article 13 de l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière a donc été méconnu ; - la CNRACL n'a pas respecté la procédure prévue à l'article 16 de l'arrêté du 4 août 2004, dès lors, qu'elle n'a pas été invitée à prendre connaissance de son dossier, ni à présenter d'observations, ni même à se faire assister ; - la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales n'avait aucune prérogative pour faire procéder à une contre-expertise le 16 décembre 2004 par le docteur Bouissou-Ruimy ; seule la commission de réforme pouvait demander cette contre-expertise ; - la fixation de son taux d'invalidité à 30 % est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de l'évolution de son état de santé ; Vu le jugement et la décision attaqués ; Vu le mémoire en défense, enregistré le 9 décembre 2011, présenté pour la Caisse des dépôts et consignations par Me Dietmann-Laurent, qui conclut au rejet de la requête de Mme A ; Elle fait valoir que la demande de Mme A tendant au maintien du traitement auquel elle avait droit jusqu'à l'issue de la procédure justifiant la saisie de la commission de réforme est irrecevable, et que les moyens de la requête ne sont pas fondés ; Vu le mémoire en défense, enregistré le 23 décembre 2011, présenté pour le centre hospitalier de Belfort-Montbéliard, représenté par son directeur, par Me Landbeck, qui conclut au rejet de la requête de Mme A, subsidiairement à la condamnation de la Caisse des dépôts et consignations à le garantir de toute condamnation éventuellement prononcée à son encontre, et à ce que soit mise à la charge de Mme A une somme de 1 500 euros à lui verser au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; Il fait valoir que la demande indemnitaire de Mme A est irrecevable, et que les moyens de la requête ne sont pas fondés ; Vu le mémoire récapitulatif, enregistré le 6 mars 2012, présenté pour Mme A, qui conclut aux mêmes fins que sa requête, par les mêmes moyens ; Elle soutient en outre que : - le contentieux est lié ; - le centre hospitalier ou, à défaut, la caisse des dépôts et consignations, est redevable d'une somme de 23 934 euros ; Vu le mémoire en duplique, enregistré le 9 mars 2012, présenté pour le centre hospitalier de Belfort-Montbéliard, qui conclut dans le sens de ses précédentes écritures et demande en outre à ce qu'il soit enjoint à la Caisse des dépôts et consignations de procéder à la liquidation des droits de Mme Vest, et, dans l'hypothèse où une condamnation serait prononcée à son encontre, la réduction de la somme réclamée par la requérante par la prise en compte de la pension versée, et la condamnation de la Caisse des dépôts et consignations ou de l'Etat à le garantir de toute condamnation éventuellement prononcée à son encontre ; Vu le mémoire récapitulatif, enregistré le 7 juin 2012, présenté pour Mme A ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière ; Vu le décret n° 2001-99 du 31 janvier 2001 portant modification du décret n° 68-756 du 13 août 1968 pris pour l'application de l'article L. 28 (3ème alinéa) du code des pensions civiles et militaires de retraite ; Vu le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales ; Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ; Vu le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 juin 2012 : - le rapport de M. Favret, premier conseiller, - et les conclusions de Mme Dulmet, rapporteur public ; Considérant que Mme A, technicienne de laboratoire au centre hospitalier de Belfort-Montbéliard, a bénéficié à compter du 8 octobre 1999 d'un congé de longue durée de cinq ans et d'une mise en disponibilité pour maladie du 8 octobre 2004 au 4 janvier 2005 ; qu'elle a demandé à bénéficier d'une mise à la retraite pour invalidité ; qu'à la suite des conclusions de l'expertise sollicitée par le centre hospitalier de Belfort-Montbéliard, la commission de réforme s'est prononcée le 8 septembre 2004 sur l'admission de l'intéressée à la retraite pour invalidité au taux de 60 % ; que la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL) a alors sollicité une expertise médicale complémentaire sur la base de laquelle elle a, par décision en date du 21 février 2008, fixé à 30 % le taux d'invalidité pour le calcul de la pension de retraite de Mme A ; que cette dernière demande l'annulation du jugement en date du 12 mai 2011 par lequel le Tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant, d'une part à annuler la décision de la CNRACL en date du 21 février 2008 et, d'autre part, à maintenir le traitement auquel elle avait droit jusqu'à l'issue de la procédure justifiant la saisie de la commission de réforme, à ce qu'il soit procédé au rétablissement de ses droits, et, à titre subsidiaire, à la désignation d'un expert médical devant évaluer le véritable taux de son invalidité ; Sur les conclusions à fin d'annulation : Considérant qu'il y a lieu d'adopter les motifs retenus par les premiers juges pour écarter les moyens de Mme A tirés de l'incompétence de la CNRACL pour saisir la commission de réforme et faire procéder à une contre-expertise médicale, de la méconnaissance de la procédure prévue à l'article 16 de l'arrêté susvisé en date du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière, et de ce que la fixation de son taux d'invalidité à 30 % serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de l'évolution de son état de santé ; Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande ; Sur les conclusions indemnitaires : Considérant que Mme A demande la condamnation du centre hospitalier de Belfort-Montbéliard ou, à défaut, de la Caisse des dépôts et consignations, à lui verser une somme de 18 752 euros correspondant à la différence entre une pension au taux de 30 % et une pension au taux de 60 % au cours de la période s'étendant entre le 3 janvier 2005 et le 31 décembre 2009, assortie des intérêts au taux légal à compter du 3 janvier 2005, ainsi qu'une somme de 4 543,65 euros correspondant à la différence entre une pension au taux de 30 % et une pension au taux de 60 % au cours de la période s'étendant entre le 1er janvier 2010 et le 31 mars 2011, assortie des intérêts au taux légal à compter du 1er janvier 2010 ; Considérant que la décision litigieuse fixant le taux d'invalidité de Mme A à 30 % a été prise par la CNRACL et n'est ainsi pas imputable au centre hospitalier de Belfort-Montbéliard ; que les conclusions indemnitaires dirigées contre cet établissement ne peuvent dès lors qu'être rejetées ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A ne peut se prévaloir d'une faute de la CNRACL ; que, par suite, ses conclusions indemnitaires dirigées contre la Caisse des dépôts et consignations doivent être rejetées ; Sur les conclusions au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que Mme A demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A une somme à verser au centre hospitalier de Belfort-Montbéliard au titre des mêmes dispositions ; D E C I D E : Article 1er : La requête de Mme A est rejetée. Article 2 : Les conclusions du centre hospitalier de Belfort-Montbéliard au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Marie-José A, à la caisse des dépôts et consignations, au centre hospitalier de Belfort-Montbéliard et au ministre des affaires sociales et de la santé. '' '' '' '' 3 11NC01153
Cours administrative d'appel
Nancy
Conseil d'État, 4ème sous-section jugeant seule, 29/06/2012, 325735, Inédit au recueil Lebon
Vu 1°), sous le n° 325735, le pourvoi, enregistré le 3 mars 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté pour M. Bagdad A et Mme Kheira B, veuve A, demeurant ... ; M. A et Mme B demandent au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler l'ordonnance n° 0301235 du 5 septembre 2008 par laquelle le vice-président de la 5ème section du tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant, en premier lieu, à l'annulation de la décision implicite du Premier ministre ayant rejeté leur demande du 3 février 2002 tendant, d'une part, au versement aux héritiers de M. des arrérages résultant de la décristallisation de la pension militaire de retraite et de la retraite du combattant dont il était titulaire, d'autre part, à la réversion à Mme B de ces pensions, enfin, au paiement des intérêts moratoires capitalisés sur les arrérages de ces créances, en deuxième lieu, à ce qu'il soit enjoint au ministre chargé du budget de faire droit à leurs demandes, en troisième lieu, à ce que l'Etat soit condamné à leur verser à chacun la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive ; 2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à leur demande ; Vu 2°), sous le n° 330098, le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 27 juillet et 28 septembre 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Bagdad A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler l'ordonnance n° 0301235 du 5 septembre 2008 par laquelle le vice-président de la 5ème section du tribunal administratif de Paris a rejeté la demande qu'il avait présentée avec sa mère, Mme Kheira B, tendant, en premier lieu, à l'annulation de la décision implicite du Premier ministre ayant rejeté leur demande du 3 février 2002 tendant, d'une part, au versement aux héritiers de M. des arrérages résultant de la décristallisation de la pension militaire de retraite et de la retraite du combattant dont celui-ci était titulaire, d'autre part, à la réversion à Mme B de ces pensions, enfin, au paiement des intérêts moratoires capitalisés sur les arrérages de ces créances, en deuxième lieu, à ce qu'il soit enjoint au ministre chargé du budget de faire droit à leurs demandes, en troisième lieu, à ce que l'Etat soit condamné à lui verser ainsi qu'à Mme B la somme de 50 000 euros chacun à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive ; 2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande et, en outre, de condamner l'Etat à lui verser une indemnité représentative de la pension de réversion que Mme B aurait dû percevoir ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, son avocat, au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; .................................................................................... Vu les autres pièces des dossiers ; Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ; Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; Vu la loi n° 59-1454 du 26 décembre 1959, notamment son article 71-I ; Vu le décret n° 2003-543 du 24 juin 2003 ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Hervé Guichon, Maître des Requêtes en service extraordinaire, - les observations de la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de M. A, - les conclusions de Mme Gaëlle Dumortier, rapporteur public ; La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de M. A, Considérant que les pourvois visés ci-dessus ont le même objet ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ; Considérant que Mme B et M. A, respectivement veuve et fils de M. , ressortissant algérien titulaire d'une pension militaire de retraite et d'une retraite du combattant cristallisées à compter du 3 juillet 1962 en application de l'article 71-I de la loi du 26 décembre 1959 de finances pour 1960, ont sollicité, par courrier adressé au Premier ministre le 3 février 2002, d'une part, la revalorisation de ces retraites sur la base des taux de droit commun ainsi que le versement aux ayants-droit de M. des arrérages correspondants assortis des intérêts moratoires et de leur capitalisation, d'autre part, la réversion à Mme B des retraites servies à son époux ; qu'en l'absence de réponse de l'administration, les consorts B-A ont, le 2 janvier 2003, saisi le tribunal administratif de Poitiers d'une demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision implicite du Premier ministre rejetant leur demande préalable, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au ministre chargé du budget de leur verser les arrérages de ces diverses pensions assortis des intérêts moratoires et de leur capitalisation, enfin, à ce que l'Etat soit condamné à leur verser à chacun la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive ; que, par l'ordonnance attaquée du 5 septembre 2008, le vice-président de la 5ème section du tribunal administratif de Paris, auquel l'affaire avait été transmise par le tribunal administratif de Poitiers, a rejeté l'intégralité de leurs demandes ; Considérant qu'en vertu des dispositions combinées du deuxième alinéa ajouté à l'article R. 811-1 du code de justice administrative par l'article 11 du décret du 24 juin 2003 et du 3° de l'article R. 222-13 du même code, le tribunal administratif statue en premier et dernier ressort sur les litiges en matière de pensions, sauf pour les recours comportant des conclusions tendant au versement ou à la décharge de sommes d'un montant supérieur au montant déterminé par les articles R. 222-14 et R. 222-15 ; qu'aux termes de l'article 14 du même décret du 24 juin 2003, cette règle de procédure est applicable aux décisions des tribunaux administratifs rendues à compter du 1er septembre 2003 ; Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que la demande présentée devant le tribunal administratif par les consorts B-A constituait un litige en matière de pensions assorti de conclusions indemnitaires d'un montant supérieur à celui déterminé par les articles R. 222-14 et R. 222-15 du code de justice administrative ; que, par suite, les requêtes présentées devant le Conseil d'Etat à fin d'annulation de l'ordonnance, en date du 5 septembre 2008, du vice-président de la 5ème section du tribunal administratif de Paris ont le caractère d'un appel et relèvent de la compétence de la cour administrative d'appel de Paris, à laquelle il y a lieu d'en attribuer le jugement ; D E C I D E : -------------- Article 1er : Les affaires n° 325735 et n° 330098 sont renvoyées à la cour administrative d'appel de Paris. Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Bagdad A, au ministre de la défense et au ministre de l'économie et des finances.ECLI:FR:CESJS:2012:325735.20120629
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 2ème sous-section jugeant seule, 27/06/2012, 344901, Inédit au recueil Lebon
Vu le pourvoi, enregistré le 9 décembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE D'ETAT, MINISTRE DE LA DEFENSE ET DES ANCIENS COMBATTANTS ; le ministre demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler l'arrêt n° 10/00001 du 5 octobre 2010 par lequel la cour régionale des pensions de Montpellier a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 4 novembre 2009 par lequel le tribunal départemental des pensions des Pyrénées-Orientales a accordé à M. A les arrérages de sa pension militaire d'invalidité à compter de la date d'ouverture de ses droits à pension, soit le 13 novembre 1968 ; 2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; Vu la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ; Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Catherine Moreau, Maître des requêtes en service extraordinaire, - les observations de Me Spinosi, avocat de M. A, - les conclusions de Mme Béatrice Bourgeois-Machureau, Rapporteur public, La parole ayant à nouveau été donnée à Me Spinosi, avocat de M. A ; Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A, qui a servi dans l'armée française du 4 novembre 1959 au 14 septembre 1964, date à laquelle il a été rayé des cadres, s'est vu attribuer, par arrêté du 7 janvier 1964, une pension militaire d'invalidité au taux de 70 % au titre de deux infirmités imputables à des blessures reçues à l'occasion du service en Algérie le 26 mai 1962 ; que, par un arrêté du 25 février 1967, sa pension a été révisée au taux de 95 % à compter du 13 novembre 1968 ; qu'à la suite d'une erreur matérielle, cet arrêté fait mention de l'origine " par présomption " des blessures constatées, alors que l'arrêté initial du 7 janvier 1964 mentionnait l'origine " par preuve " de ces blessures ; que, par une lettre du 11 juillet 2006, M. A a demandé à l'administration de corriger cette erreur de transcription, afin de percevoir l'allocation aux grands mutilés prévue par les dispositions du b) de l'article L. 37 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, qui subordonnent l'obtention de cette allocation à la condition que l'intéressé rapporte la preuve que sa blessure a été contractée dans une unité combattante ; que, par arrêté du 17 décembre 2007, l'intéressé s'est vu accorder le bénéfice de l'allocation aux grands mutilés à compter du 1er janvier 2002, en application des dispositions de l'article L. 108 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre relatives à la prescription ; que l'intéressé, qui demande que cette allocation lui soit versée à compter du 13 novembre 1968, a contesté cette décision par un recours formé devant le tribunal départemental des pensions des Pyrénées-Orientales ; que, par un jugement du 4 novembre 2009, le tribunal a jugé que l'intéressé avait droit à l'intégralité des arrérages relatifs à l'allocation aux grands mutilés à compter du 13 novembre 1968 ; que par un arrêt du 5 octobre 2010, la cour régionale des pensions de Montpellier a confirmé ce jugement ; que le ministre se pourvoit en cassation contre cet arrêt ; Considérant qu'aux termes de l'article L. 108 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre : " Lorsque, par suite du fait personnel du pensionné, la demande de liquidation ou de révision de la pension est déposée postérieurement à l'expiration de la troisième année qui suit celle de l'entrée en jouissance normale de la pension, le titulaire ne peut prétendre qu'aux arrérages afférents à l'année au cours de laquelle la demande a été déposée et aux trois années antérieures " ; Considérant qu'en se fondant, pour juger que l'administration ne pouvait opposer les dispositions de l'article L. 108 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre à la demande de M. A tendant à l'octroi de l'allocation aux grands mutilés à compter du 13 novembre 1968, sur ce que l'erreur à la suite de laquelle cette allocation n'avait pas été versée à l'intéressé avait été commise par l'administration, sans rechercher si la tardiveté de la demande de l'intéressé pouvait être regardée comme imputable à un fait personnel du pensionné l'ayant placé dans l'impossibilité de présenter une demande de révision, la cour a commis une erreur de droit ; que, par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen de son pourvoi, le MINISTRE DE LA DEFENSE ET DES ANCIENS COMBATTANTS est fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ; Considérant que les dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées sur le fondement de ces dispositions par Me Spinosi, avocat de M. A ;D E C I D E : -------------- Article 1er : L'arrêt du 5 octobre 2010 de la cour régionale des pensions de Montpellier est annulé. Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour régionale des pensions de Toulouse. Article 3 : Les conclusions présentées au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées. Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre de la défense et à M. Alfred A.
Conseil d'Etat
Cour Administrative d'Appel de Versailles, 4ème Chambre, 09/07/2012, 10VE03599, Inédit au recueil Lebon
Vu la requête, enregistrée le 18 novembre 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour Mme Saïda A, demeurant ..., par Me Mandicas, avocat ; Mme A demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement n° 0900247 en date du 25 mars 2010 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 1er octobre 2008 par laquelle le préfet du Val-d'Oise a refusé de lui délivrer la carte européenne de stationnement ; 2°) d'annuler ladite décision ; Elle soutient qu'elle bénéficie d'un taux d'incapacité reconnu par la Cotorep entre 50 et 79 % ; qu'elle se déplace avec une canne et avec l'aide d'un membre de sa famille ; que le certificat médical qu'elle produit n'est pas stéréotypé ; que les pièces qu'elle produit démontrent la réalité de ses difficultés de déplacement ; .......................................................................................................... Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code de l'action sociale et des familles ; Vu le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 juin 2012 : - le rapport de Mme Colrat, premier conseiller, - et les conclusions de Mme Ribeiro-Mengoli, rapporteur public ; Considérant qu'aux termes de l'article L. 241-3-2 du code de l'action sociale et des familles : " Toute personne, y compris les personnes relevant du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre et du code de la sécurité sociale, atteintes d'un handicap qui réduit de manière importante et durable sa capacité et son autonomie de déplacement à pied ou qui impose qu'elle soit accompagnée par une tierce personne dans ses déplacements, peut recevoir une carte de stationnement pour personnes handicapées. Cette carte est délivrée par le préfet conformément à l'avis du médecin chargé de l'instruction de la demande (...) " ; qu'aux termes du dernier alinéa de l'article R. 241-17 du même code : " Un arrêté des ministres chargés des personnes handicapées et des anciens combattants définit les modalités d'appréciation d'une mobilité pédestre réduite et de la perte d'autonomie dans le déplacement individuel, en tenant compte notamment de la limitation du périmètre de marche de la personne ou de la nécessité pour celle-ci de recourir systématiquement à certaines aides techniques ou à une aide humaine lors de tous ses déplacements à l'extérieur " ; qu'aux termes du 1 de l'article annexe de l'arrêté modifié susvisé du 13 mars 2006 : " La capacité et l'autonomie de déplacement à pied s'apprécient à partir de l'activité relative aux déplacements à l'extérieur. /Une réduction importante de la capacité et de l'autonomie de déplacement à pied correspond à une difficulté grave dans la réalisation de cette activité et peut se retrouver chez des personnes présentant notamment un handicap lié à des déficiences motrices ou viscérales (exemple : insuffisance cardiaque ou respiratoire). / Ce critère est rempli dans les conditions suivantes : / - la personne a un périmètre de marche limité et inférieur à 200 mètres ; / - ou la personne a systématiquement recours à l'une des aides suivantes pour ses déplacements extérieurs : / - une aide humaine ; / -une canne ou tous autres appareillages manipulés à l'aide d'un ou des deux membres supérieurs (exemple déambulateur) ; / - un véhicule pour personnes handicapées (...) ; / - ou la personne à recours, lors de tous ses déplacements extérieurs, à une oxygénothérapie " ; Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme A souffre des séquelles d'un accident du travail ayant entrainé une luxation de l'épaule droite le 19 novembre 2007 ; que toutefois, il ne ressort d'aucun des compte-rendus médicaux produits au dossier que sa capacité de déplacement serait limitée ou impossible sans l'aide d'un appareil ou d'une tierce personne ; que le certificat médical établi par le Docteur B à la demande de la requérante se contente d'affirmer que celle-ci doit bénéficier d'une carte de stationnement sans préciser en aucune manière les difficultés de déplacement dont elle souffrirait ; qu'ainsi c'est à bon droit que le préfet du Val-d'Oise a pu estimer que Mme A ne remplissait pas les conditions posées par l'article L. 241-3-2 du code de l'action sociale et des familles pour se voir délivrer la carte européenne de stationnement pour personnes handicapées ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ; DECIDE : Article 1er : La requête de Mme A est rejetée. '' '' '' '' N° 10VE03599 2
Cours administrative d'appel
Versailles
Conseil d'État, 2ème sous-section jugeant seule, 27/06/2012, 349394, Inédit au recueil Lebon
Vu le pourvoi, enregistré le 18 mai 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté pour M. Jean A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler l'arrêt n° 10/00001 du 15 décembre 2010 par lequel la cour régionale des pensions de Toulouse a confirmé le jugement du 15 décembre 2009 du tribunal départemental des pensions de la Haute-Garonne rejetant son recours dirigé contre la décision implicite par laquelle le ministre de la défense a rejeté sa demande tendant à la revalorisation indiciaire de sa pension militaire d'invalidité par l'attribution de l'indice afférent au grade équivalent au sien dans la marine nationale ; 2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande de première instance ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à la SCP Waquet-Farge-Hazan, son avocat, au titre des dispositions des articles L.761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; Vu le décret n° 56-913 du 5 septembre 1956 ; Vu le décret n° 59-327 du 20 février 1959 ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Catherine Moreau, Maître des requêtes en service extraordinaire, - les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de M. A, - les conclusions de Mme Béatrice Bourgeois-Machureau, Rapporteur public, La parole ayant à nouveau été donnée à la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de M. A ; Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A a demandé le 24 juillet 2006 au ministre de la défense de recalculer la pension militaire d'invalidité qui lui avait été concédée à titre définitif par un arrêté du 22 mai 1990 en fonction de l'indice du grade équivalent, plus favorable, pratiqué pour les personnels de la marine nationale ; que, par lettre du 4 août 2006, le ministre lui a indiqué qu'il recherchait les moyens de donner une suite à sa demande et qu'il en serait tenu informé dès que possible ; qu'en l'absence de réponse, M. A a saisi le 31 mars 2008 le tribunal départemental des pensions de la Haute-Garonne d'un recours contre le rejet qui avait été implicitement opposé par le ministre à sa demande de revalorisation ; Considérant que pour juger que la requête de M. A devant le tribunal départemental des pensions était irrecevable, la cour régionale des pensions s'est bornée à relever que M. A avait saisi cette juridiction après l'expiration du délai prévu par l'article 5 du décret du 20 février 1959 ; qu'en statuant ainsi, sans que le ministre n'ait apporté la preuve, qui lui incombe, de la régularité de la notification de l'arrêté de concession, la cour régionale des pensions a commis une erreur de droit ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, M. A est fondé à demander l'annulation de cet arrêt ; Considérant que M. A a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP Waquet-Farge-Hazan, avocat de M. A, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat le versement à la SCP Waquet-Farge-Hazan de la somme de 2 000 euros ; D E C I D E : -------------- Article 1er : L'arrêt de la cour régionale des pensions de Toulouse du 15 décembre 2010 est annulé. Article 2 : L'affaire est renvoyée devant la cour régionale des pensions de Bordeaux. Article 3 : L'Etat versera à la SCP Waquet-Farge-Hazan, avocat de M. A, une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette société renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle. Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Jean A et au ministre de la défense.
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 9ème et 10ème sous-sections réunies, 13/06/2012, 338828, Inédit au recueil Lebon
Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 21 avril et 21 juillet 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Claude A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler le jugement n° 0800355 du 18 février 2010 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du ministre de l'économie et des finances du 3 décembre 2007 lui attribuant une pension en tant qu'elle plafonne la rente viagère d'invalidité et ne comprend pas une majoration pour l'assistance d'une tierce personne, d'un montant calculé, sur la base de la responsabilité pour faute, conformément à la convention collective du 29 novembre 1999 et, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint à l'administration de prendre un nouvel arrêté de pension lui accordant le versement d'une rente viagère d'invalidité calculée sans application de la règle du plafonnement et majorée au titre de l'assistance d'une tierce personne sur la base de la responsabilité pour faute, du montant correspondant au salaire minimum conventionnel et aux charges patronales afférentes ou, à défaut, majorée conformément aux dispositions de l'article L. 30 du code des pensions, dans un délai de quinze jours à compter du jugement à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ; 2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à ses conclusions de première instance ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 7 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu la Constitution, notamment son Préambule et ses articles 34, 61-1 et 62 ; Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ; Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ; Vu la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011, notamment son article 163 ; Vu la décision du 13 octobre 2010 par laquelle le Conseil d'Etat statuant au contentieux a renvoyé au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par M. A dans son mémoire enregistré le 21 juillet 2010 ; Vu la décision n° 2010-83 QPC du 13 janvier 2011 du Conseil constitutionnel statuant sur la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par M. A ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Séverine Larere, Maître des Requêtes, - les observations de Me Ricard, avocat de M. A, - les conclusions de Mme Claire Legras, rapporteur public ; La parole ayant été à nouveau donnée à Me Ricard, avocat de M. A ;Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que M. A, alors directeur départemental de la jeunesse et des sports de l'Essonne, a été victime, le 9 novembre 2001, à l'âge de cinquante-cinq ans, d'un accident qui a été déclaré imputable au service par arrêté du 25 juillet 2002 ; qu'il a été radié des cadres pour invalidité à compter du 1er mai 2007 et que le montant de sa pension a été fixé par décision du 3 décembre 2007 ; qu'il a contesté cette décision en tant qu'elle a plafonné, en application des dispositions du cinquième alinéa de l'article L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite, alors applicables, le montant de sa rente viagère d'invalidité et lui a accordé une majoration pour assistance d'une tierce personne dont le montant a été calculé de manière selon lui insuffisante ; qu'il se pourvoit en cassation contre le jugement du 18 février 2010 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande ; Sur le jugement attaqué, en tant qu'il concerne le montant de la majoration pour assistance d'une tierce personne : Considérant, en premier lieu, que le moyen tiré de ce que la minute du jugement ne serait pas signée par le magistrat ayant statué et le greffier manque en fait ; Considérant, en second lieu, que, devant le tribunal administratif, M. A demandait, au titre de l'assistance d'une tierce personne, que la rente viagère d'invalidité non plafonnée qui lui serait allouée soit majorée, dans le cadre de la responsabilité pour faute, d'une somme calculée conformément au salaire minimum conventionnel prévu, pour un assistant de vie, par la convention collective du 29 novembre 1999, complétée par le montant des charges patronales ; que le tribunal a rejeté ces conclusions au motif qu'aucun principe général ni aucune disposition législative ou réglementaire ne faisait obligation à l'administration de prendre en considération la faute qu'elle aurait commise, à la supposer établie, dans le calcul de la majoration spéciale au titre de l'assistance d'une tierce personne ; qu'ainsi, et contrairement à ce que soutient M. A, le jugement attaqué n'est pas entaché d'une omission à statuer sur ces conclusions ; Sur le jugement attaqué, en tant qu'il concerne le plafonnement de la rente viagère d'invalidité : Considérant qu'à l'appui de son pourvoi, M. A a demandé au Conseil d'Etat, en application de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, de renvoyer au Conseil constitutionnel la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution de la première phrase du cinquième alinéa de l'article L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraites, prévoyant que la rente viagère d'invalidité ajoutée à la pension rémunérant les services ne peut faire bénéficier le titulaire d'émoluments totaux supérieurs au traitement d'activité ; que, par décision n° 2010-83 QPC du 13 janvier 2011, le Conseil constitutionnel, saisi de la question par décision du Conseil d'Etat du 13 octobre 2010, a déclaré cette disposition contraire à la Constitution, au motif que l'application combinée de ce plafonnement avec celui applicable au cumul d'une pension de retraite et d'une majoration de pension pour charges de famille créait une différence de traitement non justifiée par l'objet de la loi ; que, pour permettre au législateur de remédier à l'inconstitutionnalité constatée, tout en préservant l'effet utile de sa décision à la solution des instances en cours, sur lesquelles les juridictions devaient surseoir à statuer, il a prévu que cette déclaration d'inconstitutionnalité prendrait effet à compter du 1er janvier 2012 et qu'il appartenait au législateur de prévoir une application des nouvelles dispositions à ces instances ; qu'à la suite de cette décision, l'article 163 de la loi du 28 décembre 2011 de finances pour 2012 a modifié les dispositions applicables au calcul des rentes d'invalidité servies aux fonctionnaires ; Considérant que, lorsque le Conseil constitutionnel, après avoir abrogé une disposition déclarée inconstitutionnelle, use du pouvoir que lui confèrent les dispositions de l'article 62 de la Constitution, soit de déterminer lui-même les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition a produit sont susceptibles d'être remis en cause, soit de décider que le législateur aura à prévoir une application aux instances en cours des dispositions qu'il aura prises pour remédier à l'inconstitutionnalité constatée, il appartient au juge, saisi d'un litige relatif aux effets produits par la disposition déclarée inconstitutionnelle, de les remettre en cause en écartant, pour la solution de ce litige, le cas échéant d'office, cette disposition, dans les conditions et limites fixées par le Conseil constitutionnel ou le législateur ; Considérant que, pour rejeter les conclusions de la demande de M. A tendant à l'octroi d'une rente d'invalidité non plafonnée, le tribunal administratif de Rouen s'est exclusivement fondé sur les dispositions du cinquième alinéa de l'article L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite ; qu'ainsi qu'il vient d'être dit, la première phrase de cet alinéa a été déclarée non conforme à la Constitution par le Conseil constitutionnel et remplacée par de nouvelles dispositions, issues de l'article 163 de la loi de finances pour 2012, lesquelles sont applicables au litige, conformément à la décision du Conseil constitutionnel ; qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus qu'afin de préserver l'effet utile de la décision du Conseil constitutionnel à la solution de l'instance ouverte par la demande de M. A, en permettant au juge du fond de remettre en cause, dans les conditions et limites définies par l'article 163 de la loi de finances pour 2012, les effets produits par les dispositions de l'article L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite mentionnées ci-dessus, il incombe au juge de cassation d'annuler, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, le jugement attaqué en tant qu'il statue sur le plafonnement de la rente viagère d'invalidité accordée à M. A ; que, par suite, celui est fondé à demander, dans cette seule mesure, l'annulation du jugement attaqué ; Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond, en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, dans les limites de la cassation prononcée ; Sur la question prioritaire de constitutionnalité dirigée contre les dispositions adoptées par la loi du 28 décembre 2011 : Considérant que le I de l'article 163 de la loi du 28 décembre 2011 modifie le code des pensions civiles et militaires de retraite ; que son II prévoit l'application des nouvelles dispositions aux fonctionnaires relevant de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales ainsi qu'aux ouvriers relevant du régime de retraite des ouvriers des établissements industriels de l'Etat, dans des conditions prévues par décret en Conseil d'Etat ; que les III et IV définissent les modalités d'entrée en vigueur de ces dispositions ; que M. A conteste la conformité à la Constitution de cet article en critiquant, d'une part, l'article L. 30 ter du code des pensions civiles et militaires de retraite, issu du 4° du I, et, d'autre part, les dispositions des paragraphes II et III de ce même article ; Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : " Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé, y compris pour la première fois en cassation, à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat (...) " ; qu'il résulte des dispositions de ce même article que le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux ; En ce qui concerne l'article L. 30 ter du code des pensions civiles et militaires de retraite : Considérant qu'aux termes de cet article : " Sans préjudice du plafond fixé au V de l'article L. 18, le montant total des prestations accordées au fonctionnaire invalide, à l'exclusion des majorations prévues aux articles L. 18 et L. 30 bis, ne peut excéder le montant du traitement mentionné à l'article L. 15 et revalorisé dans les conditions prévues à l'article L. 16. En cas de dépassement, le montant de chaque prestation est réduit à due proportion " ; que ces dispositions ont pour objet, en excluant notamment la majoration de pension accordée aux anciens fonctionnaires ayant élevé au moins trois enfants du plafonnement du montant total des prestations accordées au fonctionnaire invalide, de tirer les conséquences de la décision du Conseil constitutionnel du 13 janvier 2011 ; Considérant, en premier lieu, que par cette décision, le Conseil constitutionnel a expressément jugé que le législateur avait pu, sans méconnaître le principe d'égalité, soumettre à plafonnement le cumul d'une pension de retraite et d'une rente viagère d'invalidité ; que, par suite, M. A ne saurait soutenir que les dispositions de l'article L. 30 ter méconnaissent ce principe en ce qu'elles instituent un tel plafonnement ; Considérant, en deuxième lieu, que M. A soutient que la pension de retraite, d'une part, et la rente viagère d'invalidité, d'autre part, constituent, lorsque leurs conditions d'attribution sont remplies, des biens patrimoniaux protégés par le droit de propriété et que la réduction du montant de ces prestations qui résulte du plafonnement institué par l'article L. 30 ter du code des pensions civiles et militaires de retraite porte à ce droit une atteinte disproportionnée ; Considérant que, si un tel plafonnement n'a pas le caractère d'une privation du droit de propriété au sens de l'article 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, une créance est néanmoins susceptible de bénéficier de la protection des conditions d'exercice de ce droit garantie par les articles 2 et 4 de cette Déclaration ; que, toutefois, le montant de la créance dont est titulaire un fonctionnaire admis à la retraite pour invalidité s'apprécie à la date à laquelle il est mis fin, pour ce motif, à ses fonctions, au regard des dispositions légalement applicables à cette date ; que, la pension de retraite et la rente viagère d'invalidité étant liquidées en même temps, ce montant ne saurait, par suite, être supérieur à celui qui résulte du plafonnement prévu par les nouvelles dispositions de l'article L. 30 ter du code des pensions civiles et militaires de retraite ; qu'ainsi cet article, qui ne peut être regardé comme réduisant les droits patrimoniaux du fonctionnaire invalide, ne porte pas atteinte aux conditions d'exercice du droit de propriété ; Considérant, en troisième lieu, que, si le onzième alinéa du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, auquel renvoie la Constitution de 1958 implique la mise en oeuvre d'une politique de solidarité nationale en faveur des travailleurs retraités, le plafonnement du montant des prestations servies aux fonctionnaires invalides au niveau du traitement qu'ils percevaient en période d'activité n'a pas pour effet de priver de garanties légales les exigences résultant de cette disposition ; que le requérant n'est, dès lors, pas fondé à soutenir que ces dispositions ont été méconnues ; Considérant, en quatrième lieu, qu'il résulte de l'article 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen qu'en principe, tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer, le législateur pouvant toutefois, pour un motif d'intérêt général, apporter à ce principe des exclusions ou des limitations, à condition qu'il n'en résulte pas une atteinte disproportionnée aux droits des victimes d'actes fautifs ; que les dispositions de l'article L. 30 ter du code des pensions civiles et militaires de retraite ne font obstacle ni à ce que le fonctionnaire admis à la retraite pour invalidité obtienne de la collectivité qui l'emploie une indemnité complémentaire réparant les chefs de préjudice ne revêtant pas un caractère patrimonial, ni à ce qu'il engage une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage résultant de son invalidité contre cette collectivité en cas de faute de la part de celle-ci ; que, dans ces conditions, il ne saurait être sérieusement soutenu que ces dispositions méconnaissent le principe de responsabilité résultant de l'article 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ; Considérant, en cinquième lieu, que M. A ne peut utilement invoquer un prétendu principe de spécificité et d'autonomie de chaque prestation sociale, qui ne découle d'aucune règle ni d'aucun principe de valeur constitutionnelle ; que, contrairement à ce qu'il soutient, l'article 34 de la Constitution, en se référant, pour définir la compétence du législateur, aux garanties fondamentales accordées aux fonctionnaires et aux principes fondamentaux de la sécurité sociale ne reconnaît par lui-même aucune garantie fondamentale ni aucun principe fondamental qui s'imposeraient au législateur ; que le législateur ne s'étant nullement abstenu d'instituer les garanties nécessaires à la protection des droits et libertés reconnus par la Constitution, le requérant n'est pas fondé à soutenir qu'il aurait méconnu l'étendue de sa compétence ; Considérant, enfin, qu'un moyen tiré du défaut de compatibilité d'une disposition législative avec les engagements internationaux de la France ne saurait être regardé comme un moyen d'inconstitutionnalité ; que M. GEORGES ne saurait donc utilement invoquer, à l'appui de sa question prioritaire de constitutionnalité, la méconnaissance, par la disposition législative contestée, des stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou de son premier protocole additionnel, non plus que du principe de non-discrimination ; Considérant que, par suite, en tant qu'elle concerne les dispositions de l'article L. 30 ter du code des pensions civiles et militaires de retraite, la question soulevée, qui n'est pas nouvelle, ne présente pas un caractère sérieux ; En ce qui concerne les dispositions du II de l'article 163 de la loi du 28 décembre 2011 : Considérant que ces dispositions qui, ainsi qu'il a été dit, concernent les fonctionnaires relevant de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales et les ouvriers relevant du régime de retraite des ouvriers des établissements industriels de l'Etat, ne sont pas applicables au litige, dès lors que M. A ne relève d'aucune de ces deux catégories d'agents publics ; En ce qui concerne les dispositions du III du même article : Considérant que, selon ces dispositions : " Le présent article est applicable aux instances en cours à la date du 13 janvier 2011, la révision des pensions prenant effet à compter de la date de réception par l'administration de la demande qui est à l'origine de ces instances " ; que ces dispositions se bornent à mettre en oeuvre les exigences résultant de la décision n° 2010-83 QPC, notamment de son considérant 7, par lequel le Conseil constitutionnel a jugé, en application du deuxième alinéa de l'article 62 de la Constitution, qu'il appartenait au législateur de prévoir une application des dispositions législatives nouvelles devant se substituer aux dispositions législatives déclarées inconstitutionnelles par sa décision aux instances en cours à la date de cette décision ; que le requérant ne saurait, dès lors, soutenir que les dispositions du III de l'article 163 méconnaissent les droits et libertés garantis par la Constitution ; que, comme indiqué précédemment, il ne saurait utilement invoquer les stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de son premier protocole additionnel ; qu'ainsi, en tant qu'elle concerne le III de l'article 163 de la loi du 28 décembre 2011, la question posée, qui n'est pas nouvelle, ne présente pas un caractère sérieux ; Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée, le moyen tiré de ce que l'article 163 de la loi du 28 décembre 2011 porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution doit être écarté ; Sur le montant de la pension de retraite et de la rente viagère d'invalidité dues à M. A : Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, les dispositions de la première phrase du cinquième alinéa de l'article L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite ont été abrogées ; qu'en application du III de l'article 163 de la loi du 28 décembre 2011 de finances pour 2012, il y a lieu d'écarter ces dispositions pour statuer sur le montant des droits de M. A ; que les dispositions de l'article L. 30 ter du code, qui les ont remplacées, prévoient de nouvelles règles pour le calcul du plafonnement applicable au cumul d'une pension de retraite et d'une rente viagère d'invalidité ; qu'il en résulte que la décision du 3 décembre 2007 doit être annulée en tant qu'elle plafonne le montant cumulé de la pension de retraite, de la rente d'invalidité et de la majoration pour charges de famille concédées à M. A selon les règles définies par les anciennes dispositions de l'article L. 28 de ce code ; Considérant que les autres moyens invoqués par M. A à l'appui de sa demande, dirigés contre les dispositions de l'article L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite, sont inopérants dès lors qu'il est fait application, pour fixer le montant de ses droits, des dispositions de l'article L. 30 ter du même code ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le montant total des prestations auxquelles M. A a droit au titre de sa pension de retraite, de sa rente viagère d'invalidité et de la majoration pour charges de famille doit être calculé conformément aux dispositions de l'article L. 30 ter du code des pensions civiles et militaires de retraite ; Sur les conclusions à fin d'injonction : Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu, sans qu'il soit besoin de prononcer l'astreinte demandée, d'enjoindre au ministre chargé des pensions de procéder, dans un délai de trois mois à compter de la notification de la présente décision, à la liquidation de la pension de M. A, conformément aux dispositions de l'article L. 30 ter du code des pensions civiles et militaires de retraite ; Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros à verser à M. A en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;D E C I D E : -------------- Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par M. A dirigée contre l'article 163 de la loi du 28 décembre 2011 de finances pour 2012. Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Rouen du 18 février 2010 est annulé en tant qu'il statue sur les conclusions de M. A tendant au bénéfice d'une rente viagère d'invalidité non plafonnée. Article 3 : La décision du ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique du 3 décembre 2007 est annulée en tant qu'elle plafonne le montant cumulé de la pension de retraite, de la rente viagère d'invalidité et de la majoration pour charges de famille accordées à M. A selon les modalités fixées par les dispositions, alors applicables, du cinquième alinéa de l'article L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite. Article 4 : L'Etat versera à M. A une pension de retraite, une rente viagère d'invalidité et une majoration pour charges de famille calculées selon les modalités fixées par la présente décision. Article 5 : Il est enjoint au ministre de l'économie, des finances et du commerce extérieur de procéder, dans le délai de trois mois à compter de la notification de la présente décision, à la liquidation de la pension de retraite, de la rente viagère d'invalidité et de la majoration pour charges de famille auxquelles M. A a droit. Article 6 : L'Etat versera à M. A une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 7 : Le surplus des conclusions du pourvoi et de la demande de première instance de M. A est rejeté. Article 8 : La présente décision sera notifiée à M. Claude A, au ministre de l'économie, des finances et du commerce extérieur et au Premier ministre. Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel.
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 9ème sous-section jugeant seule, 21/05/2012, 338149, Inédit au recueil Lebon
Vu l'ordonnance n° 09PA06298 du 19 mars 2010 par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Paris a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, le pourvoi par lequel Mme Fatima A veuve C et M. Abdelkader B, domiciliés ... demandent : 1°) d'annuler l'ordonnance n° 0201394 du 31 décembre 2008 du président de la cinquième section du tribunal administratif de Paris en tant que, après avoir annulé la décision implicite du Premier ministre en tant qu'elle rejetait leur demande de réversion de la pension de Mme A veuve C et mis à la charge de l'Etat le versement, pour la période postérieure au 1er janvier 1997, des arrérages correspondant à la différence entre le montant de sa pension de réversion revalorisée et ce qui lui avait déjà été versé, ainsi que les intérêts capitalisés y afférents, elle a rejeté le surplus de leurs conclusions tendant, d'une part, à la revalorisation de la pension militaire de retraite et de la retraite du combattant de leur défunt époux et père M. Youssef C à compter du 3 juillet 1962 et au versement des arrérages correspondants, assortis des intérêts capitalisés, à M. Abdelkader B en sa qualité d'hériter et, d'autre part, à la revalorisation de la pension de Mme A veuve C à compter du 28 août 1991 ; 2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à leurs conclusions de première instance ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 500 euros au bénéfice de la SCP Barthélémy-Matuchansky-Vexliard désignée au titre de l'aide juridictionnelle, au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu la convention européenne sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le premier protocole additionnel à cette convention ; Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ; Vu la loi n° 48-1450 du 20 septembre 1948 ; Vu la loi n° 59-1454 du 26 décembre 1959 ; Vu la loi n° 62-873 du 31 juillet 1962 ; Vu la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ; Vu la loi n° 74-1129 du 30 décembre 1974 ; Vu la loi n° 79-1102 du 21 décembre 1979 ; Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; Vu la loi n° 2002-1576 du 30 décembre 2002, notamment son article 68 ; Vu la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010, notamment son article 211 ; Vu la décision n° 2010-1 QPC du Conseil constitutionnel du 28 mai 2010 ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Olivier Gariazzo, Maître des Requêtes en service extraordinaire, - les observations de la SCP Barthélemy, Matuchansky, Vexliard, avocat de Mme A et de M. Abdelkader B, - les conclusions de M. Frédéric Aladjidi, rapporteur public ; La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Barthélemy, Matuchansky, Vexliard, avocat de Mme A et de M. Abdelkader B ;Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que M. Youssef C, ressortissant algérien, rayé des contrôles de l'armée active en 1939 et dont la pension a été liquidée en 1948, est décédé le 28 août 1991 ; que par un courrier du 15 octobre 2001, Mme Fatima A, sa veuve, et M. Abdelkader B, représentant les héritiers de M. Youssef C, ont demandé au Premier ministre, d'une part, la revalorisation de la pension de réversion que détient Mme A du chef de son époux défunt au titre de sa pension militaire de retraite et de sa retraite du combattant, à un taux décristallisé, et le versement des arrérages correspondants et, d'autre part, la revalorisation de la pension militaire de retraite et de la retraite du combattant de M. Youssef C, à un taux décristallisé, et le versement des arrérages correspondants à ses héritiers ; que Mme Fatima A et M. Abdelkader B ont saisi le 16 avril 2002 le tribunal administratif d'une demande tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet née du silence gardé par le Premier ministre en tant qu'elle a refusé de faire droit à leurs prétentions et à enjoindre à l'Etat de procéder aux revalorisations demandées, et ont présenté un mémoire en réplique tendant en outre à la condamnation de l'Etat à leur verser la somme de 50 000 euros au titre des dommages et intérêts pour résistance abusive ; que, par arrêté du 6 février 2006, l'administration a procédé à l'octroi d'une pension de réversion à un taux décristallisé au titre de la pension militaire de retraite de M. Youssef C et aux rappels d'arrérages correspondants à compter du 1er janvier 1997 ; que Mme Fatima A et M. Abdelkader B se pourvoient en cassation contre l'ordonnance du 31 décembre 2008 du président de la cinquième section du tribunal administratif de Paris en tant que, par cette ordonnance, le tribunal, après avoir annulé la décision implicite du Premier ministre en tant qu'elle rejetait leur demande de réversion de la pension de Mme Fatima A et mis à la charge de l'Etat, pour la période postérieure au 1er janvier 1997, le versement des arrérages correspondant à la différence entre le montant de sa pension de réversion revalorisée et ce qui lui a déjà été versé, ainsi que les intérêts capitalisés y afférents, a rejeté le surplus des conclusions de leur demande tendant d'une part au versement des rappels d'arrérages dus au titre de la pension militaire de retraite et de la retraite du combattant de M. Youssef C, d'autre part au versement à Mme A des rappels d'arrérages de sa pension pour la période antérieure au 1er janvier 1997 ; Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi ; Considérant qu'aux termes du troisième alinéa de l'article R. 742-2 du code de justice administrative, dans sa rédaction issue du décret du 28 juillet 2005, applicable à la date de l'ordonnance attaquée : " Dans le cas prévu au 6° des articles R. 122-12 et R. 222-1, l'ordonnance vise la décision ou l'avis par lequel ont été tranchées ou examinées les questions identiques à celles que la requête présente à juger " ; Considérant que l'ordonnance du 31 décembre 2008 du président de la cinquième section du tribunal administratif de Paris, rendue sur le fondement du 6° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, ne comporte pas le visa de la décision ou de l'avis par lequel auraient été tranchées ou examinées les questions identiques à celles que la requête de Mme Fatima A et M. Abdelkader B présentait à juger ; que l'absence de cette mention, dans les visas comme dans les motifs de l'arrêt, est de nature à entacher d'irrégularité l'ordonnance attaquée ; que son article 4 doit, par suite, être annulé, en tant qu'il a rejeté les conclusions des requérants tendant d'une part au versement des rappels d'arrérages dus au titre de la pension militaire de retraite et de la retraite du combattant de M. Youssef C, d'autre part au versement à Mme A des rappels d'arrérages de sa pension pour la période antérieure au 1er janvier 1997 ; Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative et de régler, dans cette mesure, l'affaire au fond ; Sur les rappels d'arrérages de la pension de réversion de Mme A : Considérant qu'aux termes de l'article 68 de la loi du 30 décembre 2002 portant loi de finances rectificative pour 2002, applicable à la demande de pension de M. Youssef C : " I. Les prestations servies en application des articles (...) 71 de la loi de finances pour 1960 (n° 59-1454 du 26 décembre 1959) (...) sont calculées dans les conditions prévues aux paragraphes suivants. / (...) IV. Sous les réserves mentionnées au deuxième alinéa du présent IV et sans préjudice des prescriptions prévues aux articles L. 108 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, L. 74 du code des pensions civiles et militaires de retraite, dans sa rédaction issue de la loi n° 48-1450 du 20 septembre 1948 portant réforme du régime des pensions civiles et militaires et ouverture de crédits pour la mise en application de cette réforme, et L. 53 du même code, dans sa rédaction issue de la loi n° 64-1339 du 26 décembre 1964 portant réforme du code des pensions civiles et militaires de retraite (partie Législative), les dispositions des II et III sont applicables à compter du 1er janvier 1999. / Ce dispositif spécifique s'applique sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée et des contentieux contestant le caractère discriminatoire des textes visés au I, présentés devant les tribunaux avant le 1er novembre 2002 (...) " ; que ces dispositions n'ont ni pour objet ni pour effet de faire obstacle à ce que les règles de prescription mentionnées au premier alinéa du IV s'appliquent aux contentieux présentés devant les tribunaux avant le 1er novembre 2002 ; Considérant qu'aux termes de l'article L. 53 du code des pensions civiles et militaires de retraite, dans sa rédaction applicable à la date de demande de pension de Mme A : " Lorsque, par suite du fait personnel du pensionné, la demande de liquidation ou de révision de la pension est déposée postérieurement à l'expiration de la quatrième année qui suit celle de l'entrée en jouissance normale de la pension, le titulaire ne peut prétendre qu'aux arrérages afférents à l'année au cours de laquelle la demande a été déposée et aux quatre années antérieures " ; que les demandes tendant à la revalorisation des arrérages d'une pension cristallisée s'analysent comme des demandes de liquidation de pension au sens de ces dispositions ; qu'ainsi, compte tenu de la date de présentation de sa demande, soit le 15 octobre 2001, la date à partir de laquelle Mme A avait droit aux compléments d'arrérages de sa pension de réversion est celle du 1er janvier 1997 ; que, par suite, ses conclusions tendant à la révision de sa pension pour la période antérieure au 1er janvier 1997 ne peuvent qu'être rejetées ; Sur les conclusions de M. Abdelkader B tendant au versement de rappels d'arrérages au titre de la pension militaire de retraite et de la retraite du combattant de M. Youssef C : Considérant qu'aux termes de l'article L. 1 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " La pension est une allocation pécuniaire, personnelle et viagère accordée aux fonctionnaires (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions qu'en raison du caractère personnel d'une pension de retraite, celle-ci n'est due qu'au titulaire du droit à pension qui en fait la demande ; qu'il en va de même pour la retraite du combattant qui en constitue l'accessoire ; que ce droit ne constitue ainsi pas une créance qui pourrait être regardée comme un bien transmis aux héritiers lors du décès de ce bénéficiaire, hors le cas où ce dernier s'est prévalu de ce droit avant son décès, sans qu'un refus définitif ne lui ait été opposé ; que, par suite, si le décès du titulaire du droit à pension a normalement pour effet l'extinction définitive de ce droit qui était ouvert à son bénéfice exclusif, ses héritiers ne pouvant se prévaloir de ce droit, sauf pour obtenir le cas échéant une pension de réversion, il en va autrement dans l'hypothèse où le titulaire du droit a réclamé de son vivant, en saisissant l'administration ou en engageant une action contentieuse, la concession de sa pension, et qu'il n'a pas été statué définitivement sur sa demande ; que dans cette hypothèse, ses héritiers justifient d'un intérêt leur donnant qualité pour agir en vue de la reconnaissance de cet avantage ; Considérant qu'il est constant que M. Youssef C n'a pas présenté avant son décès de demande tendant à la revalorisation de sa pension militaire de retraite et de sa retraite du combattant ; que, par suite, les conclusions de M. Abdelkader B, agissant en qualité d'héritier de son père et tendant à ce que lui soient versés les rappels d'arrérages au titre de cette pension, ne peuvent qu'être rejetées ; Sur les conclusions à fin d'injonction : Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions tendant à enjoindre au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, et au ministre de la défense, de verser les arrérages correspondant à la revalorisation de la pension de réversion de Mme A au titre de la période précédant le 1er janvier 1997 ne peuvent qu'être rejetées ; Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Considérant qu'il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 par la SCP Barthélémy-Matuchansky-Vexliard, avocat de Mme A et M. Abdelkader B ;D E C I D E : -------------- Article 1er : L'article 4 de l'ordonnance du président de la cinquième section du tribunal administratif de Paris du 31 décembre 2008 est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de Mme A et de M. B tendant d'une part au versement des rappels d'arrérages dus au titre de la pension militaire de retraite et de la retraite du combattant de M. Youssef C, d'autre part au versement à Mme A des rappels d'arrérages de sa pension pour la période antérieure au 1er janvier 1997. Article 2 : Les conclusions de la demande de Mme A et de M. Abdelkader B présentée devant le tribunal administratif de Paris tendant d'une part au versement des rappels d'arrérages dus au titre de la pension militaire de retraite et de la retraite du combattant de M. Youssef C, et d'autre part au versement à Mme A des rappels d'arrérage de sa pension pour la période antérieure au 1er janvier 1997, sont rejetées. Article 3 : Les conclusions de l'avocat de Mme A et M. Abdelkader B tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme Fatima A, à M. Abdelkader B, au ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et du commerce extérieur, chargé du budget et au ministre de la défense.
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