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CAA de BORDEAUX, 2ème chambre, 29/02/2024, 21BX02979, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. C... B... a demandé au tribunal des pensions de Saint-Denis d'annuler la décision du 3 août 2018 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande de pension militaire d'invalidité pour l'infirmité de cervicalgies. Par un jugement n° 1901577 du 29 mars 2021, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 13 juillet 2021 et des mémoires enregistrés les 3 mai, 24 mai et 2 juillet 2022, M. B..., représenté par Me Lemée, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) de lui accorder un droit à pension au taux de 10 % pour l'infirmité de cervicalgies, ou à titre subsidiaire d'ordonner une expertise avant dire droit. Il soutient que : - la présentation de sa requête par l'application Télérecours citoyens vaut signature électronique ; - il limite sa demande aux cervicalgies, et le litige pour lequel l'administration invoque l'autorité de la chose jugée ne portait pas sur cette infirmité ; - l'infirmité de " cervicalgies avec mobilité quasi normale " retenue par l'administration ne correspond ni aux limitations conséquentes en rotation et en flexion avec douleurs et névralgies cervico-brachiales intermittentes décrites par l'expert, ni à l'imagerie mettant en évidence un état très dégradé du rachis cervical ; les névralgies ont été confirmées par une IRM réalisée en urgence pour suspicion d'AVC et sont évaluées à 15 à 40 % par le guide barème ; les imageries médicales et l'expertise démontrent une immobilisation partielle de la tête et du tronc ; il présente une limitation fonctionnelle dans ses activités sportives ; les cervicalgies doivent ainsi être évaluées à 10 % ; - selon le docteur D..., l'atteinte des dorsales et des cervicales constitue une complication de la blessure initiale ; s'il a quitté le service actif le 6 juin 2000, il a servi dans la réserve opérationnelle durant plus de deux mois par an de 2002 à 2018 ; il a continué à sauter en parachute jusqu'en 2007 et a participé à trois opérations extérieures en 2011, 2012 et 2015 ; le traumatisme lombaire du 3 mai 1989 a causé des lésions sur l'ensemble du rachis, même si le vieillissement a pu les aggraver ; ainsi, l'infirmité de cervicalgies est en lien avec l'accident du 3 mai 1989. Par des mémoires en défense enregistrés les 8 février, 13 mai, 14 juin et 18 juillet 2022, le ministre des armées conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que : - la requête d'appel non signée est irrecevable ; - la présente instance ne saurait concerner d'autres pathologies que celle qui a fait l'objet de la décision du 3 août 2018 ; - la précédente demande de pension pour l'infirmité de cervicalgies a été rejetée par une décision du 12 septembre 2012, et le recours contentieux de M. B... a été définitivement rejeté ; eu égard à l'autorité de la chose jugée, la nouvelle demande présentée le 4 novembre 2016 pour la même infirmité était irrecevable, alors même que l'administration l'a instruite ; - le taux de 10 % ouvrant droit à pension correspond à des signes fonctionnels non décrits par l'expert ; les névralgies cervico-brachiales intermittentes ne correspondent pas à celles pour lesquelles le guide barème retient un taux de 15 à 40 % ; - les radiographies témoignent de lésions arthrosiques dégénératives dues au vieillissement, lesquelles ne trouvent pas leur origine dans un traumatisme particulier et ne constituent pas le prolongement des lombalgies indemnisées ; en l'absence de preuve de l'existence d'un fait précis à l'origine de l'affection invoquée, les multiples microtraumatismes subis par les militaires servant dans les unités parachutistes ne sauraient être regardées comme des circonstances particulières de service pour l'application de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; M. B... ne démontre pas avoir été victime d'un traumatisme durant ses périodes de réserve ; l'imputabilité des cervicalgies au traumatisme lombaire du 3 mai 1989 n'est pas établie, et au demeurant, M. B... est pensionné pour des lombalgies en lien avec un accident survenu le 2 juin 1982. M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 14 octobre 2021. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme A..., - les conclusions de Mme Isoard, rapporteure publique, - et les observations de Me Lemée, représentant M. B.... Considérant ce qui suit : 1. M. B..., engagé dans l'armée le 26 janvier 1972 et radié des cadres pour admission à la retraite le 6 juin 2000 au grade de capitaine, est titulaire d'une pension militaire d'invalidité définitive, concédée au taux de 10 % par arrêté du 16 janvier 2012, avec jouissance à compter du 26 janvier 2001, pour l'infirmité de lombalgies chroniques avec raideur du rachis en lien avec une blessure survenue en service et constatée le 2 juin 1982. Le 4 novembre 2016, il en a sollicité la révision pour la prise en compte de l'infirmité de cervicalgies. Par une décision du 3 août 2018, la ministre des armées a rejeté sa demande sans qu'il soit besoin de rechercher l'origine de cette infirmité, au motif que le taux d'invalidité était inférieur à 10 %. M. B... a contesté cette décision devant le tribunal des pensions de Saint-Denis. La procédure a été transmise au tribunal administratif de La Réunion en application de la loi du 13 juillet 2018 susvisée. M. B... relève appel du jugement du 29 mars 2021 par lequel ce tribunal a rejeté sa demande. 2. Aux termes de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, applicable à la date de la demande de pension : " Ouvrent droit à pension : 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; / 2° Les infirmités résultant de maladies contractées par le fait ou à l'occasion du service (...) ". Aux termes de l'article L. 3 du même code : " Lorsqu'il n'est pas possible d'administrer ni la preuve que l'infirmité ou l'aggravation résulte d'une des causes prévues à l'article L. 2, ni la preuve contraire, la présomption d'imputabilité au service bénéficie à l'intéressé à condition : 1° S'il s'agit de blessure, qu'elle ait été constatée avant le renvoi du militaire dans ses foyers ; 2° S'il s'agit d'une maladie, qu'elle n'ait été constatée qu'après le quatre-vingt-dixième jour de service effectif et avant le soixantième jour suivant le retour du militaire dans ses foyers ; 3° En tout état de cause, que soit établie, médicalement, la filiation entre la blessure ou la maladie ayant fait l'objet de la constatation et l'infirmité invoquée. (...) ". Aux termes de l'article L. 4 de ce code : " Les pensions sont établies d'après le degré d'invalidité. Sont prises en considération les infirmités entraînant une invalidité égale ou supérieure à 10 %. Il est concédé une pension : / 1° Au titre des infirmités résultant de blessures, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse 10 % ; / (...). " 3. La première demande de pension militaire d'invalidité présentée par M. B... pour l'infirmité de cervicalgies a été rejetée par une décision du 12 septembre 2012 au motif que le taux de 10 % n'était pas atteint, après une expertise réalisée le 9 juin 2011 qui n'a rattaché les cervicalgies à aucun événement survenu en service. Dans sa seconde demande enregistrée le 4 novembre 2016, M. B... a invoqué une aggravation de son état. L'expert qui l'a examiné le 2 mai 2018 a constaté à l'examen clinique un enraidissement du rachis cervical avec une limitation de l'inclinaison latérale, de la rotation ainsi que de l'extension et de la flexion, alors que les radiographies mettaient en évidence une ostéophytose (excroissance osseuse en lien avec une cervicarthrose) C6-C7, des lésions étagées d'arthrose entre C4 et D7 et une hernie C4-C5. Si l'expert a relevé que M. B... avait été victime de nombreux microtraumatismes dans le cadre de son activité de parachutiste, il a précisé que les cervicalgies ne pouvaient être rattachées à aucun traumatisme particulier, ce que le requérant, pensionné pour des lombalgies en lien avec une blessure constatée le 2 juin 1982, ne conteste pas utilement en invoquant un autre traumatisme du 3 mai 1989, non documenté, ayant causé des douleurs intenses au niveau lombaire, et en indiquant, sans se prévaloir d'aucun accident, qu'il a continué à sauter en parachute jusqu'en 2007 dans le cadre de ses services dans la réserve opérationnelle. Dans ces circonstances, et alors que les cervicalgies sont en lien avec des lésions dégénératives d'arthrose documentées pour la première fois par une radiographie du 1er décembre 2008, l'existence d'un lien de causalité avec une blessure ou un accident survenu en service ne peut être regardée comme établie. 4. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée en défense ni d'ordonner une nouvelle expertise, que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté sa demande. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre des armées. Délibéré après l'audience du 6 février 2024 à laquelle siégeaient : Mme Catherine Girault, présidente, Mme Anne Meyer, présidente-assesseure, M. Olivier Cotte, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 février 2024. La rapporteure, Anne A... La présidente, Catherine GiraultLa greffière, Virginie Guillout La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21BX02979
Cours administrative d'appel
Bordeaux
Conseil d'État, 6ème chambre, 06/03/2024, 464086, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : M. B... A... a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler la décision du 24 avril 2017 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande de pension militaire d'invalidité pour les cervicalgies, la discarthrose cervicale et les séquelles de la fracture du gros orteil droit dont il souffre. Par un jugement n° 1903894 du 30 juin 2020, le tribunal administratif a rejeté sa demande. Par un arrêt n° 20NT02718 du 15 mars 2022, la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté l'appel formé par M. A... contre ces jugements. Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 16 mai et 12 juillet 2022, M. A... demande au Conseil d'État : 1°) d'annuler cet arrêt ; 2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Laëtitia Malleret, maîtresse des requêtes en service extraordinaire, - les conclusions de Mme Maïlys Lange, rapporteure publique ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Le Guerer, Bouniol-Brochier, avocat de M. A... ;Considérant ce qui suit : 1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A..., qui a servi dans la Légion étrangère de 2001 à 2004, a demandé, le 8 janvier 2015, le bénéfice d'une pension militaire d'invalidité au titre, d'une part, des cervicalgies à caractère chronique, discarthrose cervicale étagée de C4 à C7 qu'il impute à l'accident de service dont il a été victime le 13 mai 2002 à Djibouti et, d'autre part, des séquelles fonctionnelles qu'il a conservées à la suite d'une fracture de la deuxième phalange du gros orteil droit survenue le 22 octobre 2003 en Côte d'Ivoire dans le cadre d'un entraînement sportif. Par une décision du 24 avril 2017, le ministre de la défense a rejeté sa demande au motif, d'une part, que la première infirmité entraînait un taux d'invalidité de 20 %, inférieur au minimum de 30 % ouvrant droit à pension pour les maladies contractées en temps de paix, et, d'autre part, que la seconde infirmité entraînait un taux d'invalidité de 8 %, inférieur au seuil de 10 % requis pour l'ouverture du droit à pension au titre des accidents de service. M. A... a attaqué cette décision devant le tribunal administratif d'Orléans qui, par un jugement du 30 juin 2020, a rejeté sa demande. Par un arrêt du 15 mars 2022 contre lequel M. A... se pourvoit en cassation, la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté son appel formé contre ces deux jugements. 2. D'une part, aux termes de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre dans sa rédaction applicable au litige : " Ouvrent droit à pension : 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; / 2° Les infirmités résultant de maladies contractées par le fait ou à l'occasion du service ; / 3° L'aggravation par le fait ou à l'occasion du service d'infirmités étrangères au service ; / 4° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'accidents éprouvés entre le début et la fin d'une mission opérationnelle, y compris les opérations d'expertise ou d'essai, ou d'entraînement ou en escale, sauf faute de la victime détachable du service ". L'article L. 3 du même code dispose : " Lorsqu'il n'est pas possible d'administrer ni la preuve que l'infirmité ou l'aggravation résulte d'une des causes prévues à l'article L. 2, ni la preuve contraire, la présomption d'imputabilité au service bénéficie à l'intéressé à condition : / 1° S'il s'agit de blessure, qu'elle ait été constatée avant le renvoi du militaire dans ses foyers ; / 2° S'il s'agit d'une maladie, qu'elle n'ait été constatée qu'après le quatre-vingt-dixième jour de service effectif et avant le soixantième jour suivant le retour du militaire dans ses foyers ; / 3° En tout état de cause, que soit établie, médicalement, la filiation entre la blessure ou la maladie ayant fait l'objet de la constatation et l'infirmité invoquée (...) ". 3. Il résulte de ces dispositions que, s'il ne peut prétendre au bénéfice de la présomption légale d'imputabilité, le demandeur d'une pension doit rapporter la preuve de l'existence d'un fait précis ou de circonstances particulières de service à l'origine de l'affection qu'il invoque. Cette preuve ne saurait résulter de la seule circonstance que l'infirmité soit apparue durant le service, ni d'une hypothèse médicale, ni d'une vraisemblance, ni d'une probabilité, aussi forte soit-elle. 4. D'autre part, aux termes de l'article L. 4 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre alors en vigueur : " Les pensions sont établies d'après le degré d'invalidité. / Sont prises en considération les infirmités entraînant une invalidité égale ou supérieure à 10 %. / Il est concédé une pension : / 1° Au titre des infirmités résultant de blessures, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse 10 % ; / 2° Au titre d'infirmités résultant de maladies associées à des infirmités résultant de blessures, si le degré total d'invalidité atteint ou dépasse 30 % ; / 3° Au titre d'infirmité résultant exclusivement de maladie, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse : 30 % en cas d'infirmité unique (...) ". Aux termes de l'article L. 5 du même code : " Par dérogation aux dispositions de l'article L. 4, les pensionnés ou postulants à pension à raison d'infirmités résultant de blessures reçues ou de maladies contractées par le fait ou à l'occasion du service accompli : / (...) Soit (...) au cours d'opérations ouvrant droit au bénéfice de campagne double ou en captivité, ont droit à pension si l'invalidité constatée atteint le minimum de 10 % (...) ". S'agissant des cervicalgies : 5. En premier lieu, en jugeant, en se fondant notamment sur un avis du médecin chargé des pensions militaires d'invalidité du centre d'expertise médicale et de commission de réforme sur le droit à pension d'invalidité du 26 aout 2016 ainsi que sur les conclusions d'une expertise du 20 novembre 2018 diligentée par le tribunal des pensions militaires d'invalidité, que le requérant n'établissait pas que les pathologies diagnostiquées en 2007 présenteraient un lien direct et certain avec l'accident qu'il a subi dans le cadre de ses fonctions le 13 mai 2002, la cour n'a ni commis d'erreur de droit ni dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis. 6. En deuxième lieu, il résulte de ce qui vient d'être dit qu'en estimant qu'un supplément d'instruction sur ce point ne présenterait pas un caractère utile, la cour s'est livrée à une appréciation souveraine des circonstances de l'espèce qui n'est entachée ni d'une dénaturation des pièces du dossier qui lui était soumis, ni d'une erreur de droit. 7. Enfin, aux termes de l'article L. 121-6 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, dont les dispositions n'étaient pas applicables à la date à laquelle M. A... a présenté sa demande : " Par dérogation aux dispositions de l'article L. 121-5, ont droit à pension, dès que l'invalidité constatée atteint le minimum de 10 %, les militaires dont les infirmités résultent de maladies contractées par le fait ou à l'occasion du service lorsque celui-ci est accompli (...) 3° En opérations extérieures (...) ". 8. S'il appartient au juge administratif, saisi d'une demande dirigée contre une décision refusant le bénéfice d'une pension, de rechercher si des dispositions législatives et réglementaires intervenues postérieurement au fait générateur à la date duquel les droits à pension de l'intéressé doivent être normalement appréciés sont susceptibles d'affecter ces droits dès lors que le législateur a entendu leur donner une telle portée, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions de l'article L. 121-6 soulevé par le requérant devant les juges du fond était inopérant dès lors que la cour avait jugé que l'existence d'un lien de causalité direct et certain entre les cervicalgies et l'accident invoqué n'était pas établi. Il convient, par suite et ainsi que le soutient le ministre des armées, de l'écarter pour ce motif, qui doit être substitué à celui retenu par les juges du fond. S'agissant des séquelles de la fracture de l'orteil droit : 9. Aux termes du premier alinéa de l'article R. 621-1 du code de justice administrative : " La juridiction peut, soit d'office, soit sur la demande des parties ou de l'une d'elles, ordonner, avant dire droit, qu'il soit procédé à une expertise sur les points déterminés par sa décision (...) ". Il incombe, en principe, au juge de statuer au vu des pièces du dossier, le cas échéant après avoir demandé aux parties les éléments complémentaires qu'il juge nécessaires à son appréciation. Il ne lui revient d'ordonner une expertise que lorsqu'il n'est pas en mesure de se prononcer au vu des pièces et éléments qu'il a recueillis et que l'expertise présente ainsi un caractère utile. 10. En estimant, au vu notamment des éléments fournis par l'expert désigné par le tribunal des pensions militaires d'invalidité dans son rapport du 20 novembre 2018, qu'une nouvelle expertise relative au taux d'invalidité de cette infirmité ne présenterait pas un caractère utile, la cour s'est livrée à une appréciation souveraine des circonstances de l'espèce qui n'est entachée ni d'une dénaturation des pièces du dossier qui lui était soumis, ni d'une erreur de droit. 11. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque. Ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être également rejetées.D E C I D E : -------------- Article 1er : Le pourvoi de M. A... est rejeté. Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. B... A... et au ministre des armées. Délibéré à l'issue de la séance du 18 janvier 2024 où siégeaient : M. Stéphane Hoynck, assesseur, présidant ; M. Cyril Roger-Lacan, conseiller d'Etat et Mme Laëtitia Malleret, maîtresse des requêtes en service extraordinaire-rapporteure. Rendu le 6 mars 2024. Le président : Signé : M. Stéphane Hoynck La rapporteure : Signé : Mme Laëtitia Malleret La secrétaire : Signé : Mme Laïla KouasECLI:FR:CECHS:2024:464086.20240306
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 2ème - 7ème chambres réunies, 05/03/2024, 471604, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision par laquelle la ministre des armées a implicitement rejeté sa demande de pension de victime civile de la guerre d'Algérie, et de lui accorder la pension sollicitée à compter du 2 février 2016. Par un jugement n° 1905560 du 6 octobre 2020, ce tribunal a rejeté sa demande. Par un arrêt n° 20BX03962 du 22 décembre 2022, la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté l'appel formé par M. B... contre ce jugement. Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 22 février et 23 mai 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler cet arrêt ; 2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la loi n° 63-778 du 31 juillet 1963 ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Julien Eche, maître des requêtes, - les conclusions de Mme Dorothée Pradines, rapporteure publique, La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Foussard, Froger, avocat de M. B... ; Considérant ce qui suit : 1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. B... a présenté le 2 février 2016 une demande tendant à l'octroi d'une pension au titre de victime civile de la guerre d'Algérie. Sa demande ayant été implicitement rejetée par la ministre des armées, il a formé un recours que le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté par un jugement du 6 octobre 2020. M. B... se pourvoit en cassation contre l'arrêt par lequel la cour administrative de Bordeaux a rejeté l'appel qu'il avait formé contre ce jugement. 2. Aux termes des dispositions de l'article 13 de la loi du 31 juillet 1963 de finances rectificative pour 1963, applicables à la date de la demande et reprises aux articles L.113-6 et L.124-11 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " (...) les personnes (...) ayant subi en Algérie depuis le 31 octobre 1954 et jusqu'au 29 septembre 1962 des dommages physiques du fait d'attentat ou de tout autre acte de violence en relation avec les évènements survenus sur ce territoire ont, ainsi que leurs ayants cause de nationalité française à la même date, droit à pension. / Ouvrent droit à pension, les infirmités ou le décès résultant : / 1° De blessures reçues ou d'accidents subis du fait d'attentat ou de tout autre acte de violence en relation avec les évènements d'Algérie mentionnés à l'alinéa premier ; / 2° De maladies contractées du fait d'attentat ou de tout autre acte de violence en relation avec les évènements précités ; / (...) ". Il résulte de ces dispositions, éclairées par les travaux parlementaires de la loi du 13 juillet 1963, que les dommages physiques ouvrant droit à pension sur leur fondement, qui comprennent les infirmités résultant de blessures et de maladies survenues du fait d'attentat ou de tout autre acte de violence, incluent les affections d'ordre psychique trouvant leur origine dans de tels actes. 3. Par suite, en jugeant que la maladie psychiatrique dont est atteint M. B..., qu'il impute aux circonstances de la disparition de son père en Algérie en juin 1962, ne pouvait ouvrir droit à pension au titre de ces dispositions au motif qu'elles excluent une telle maladie de leur champ d'application, la cour administrative d'appel de Bordeaux a commis une erreur de droit. 4. Il résulte de ce qui précède que M. B... est, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque. 5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros à verser M. B... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.D E C I D E : -------------- Article 1er : L'arrêt du 22 décembre 2022 de la cour administrative d'appel de Bordeaux est annulé. Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Bordeaux. Article 3 : L'Etat versera à M. B... une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. A... B... et au ministre des armées. Délibéré à l'issue de la séance du 12 février 2024 où siégeaient : M. Pierre Collin, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. Nicolas Boulouis, M. Olivier Japiot, présidents de chambre ; Mme Anne Courrèges, M. Géraud Sajust de Bergues, M. Gilles Pellissier, M. Jean-Yves Ollier, M. Frédéric Gueudar Delahaye, conseillers d'Etat et M. Julien Eche, maître des requêtes-rapporteur. Rendu le 5 mars 2024. Le président : Signé : M. Pierre Collin Le rapporteur : Signé : M. Julien Eche La secrétaire : Signé : Mme Eliane EvrardECLI:FR:CECHR:2024:471604.20240305
Conseil d'Etat
CAA de VERSAILLES, 3ème chambre, 08/02/2024, 21VE01061, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme Ruth Edjenguele a demandé au tribunal administratif de Versailles, d'une part, d'annuler la décision implicite du ministre de la transition écologique et solidaire rejetant sa demande de reconnaissance d'imputabilité au service des congés de maladie pris depuis le 13 janvier 2014 ou d'attribution d'un congé pour invalidité temporaire imputable au service et d'enjoindre à l'État de prononcer cette imputabilité ou, à défaut, de se prononcer à nouveau sur sa demande et, d'autre part, de condamner l'État à lui verser la somme de 65 830 euros. Par un jugement n° 1903252 du 8 février 2021, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et des mémoires enregistrés les 8 avril et 25 juin 2021 et le 19 juillet 2023, Mme A..., représentée par Me Arvis, avocat, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler le rejet implicite du ministre de la transition écologique et solidaire de sa demande formée le 27 décembre 2018 ; 3°) d'enjoindre au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires de prononcer la reconnaissance de l'imputabilité au service de ses congés de maladie pris depuis le 13 janvier 2014, ou l'attribution d'un congé pour invalidité temporaire imputable au service à compter de la même date ou, à défaut, de se prononcer à nouveau sur sa demande dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ; 4°) d'enjoindre également au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires de lui attribuer ses droits à congés annuels depuis l'année 2017 ou, à défaut, de se prononcer à nouveau sur sa demande dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ; 5°) de condamner l'État à lui verser la somme de 65 830 euros, sauf à parfaire, avec intérêts de droit à compter de la date de réception de la demande préalable et capitalisation de ces intérêts à compter de la date anniversaire de cet événement et à chacune des échéances annuelles successives postérieures ; 6°) de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la minute du jugement n'est pas signée en méconnaissance de l'article R. 741-7 du code de justice administrative ; - les premiers juges ont omis de statuer sur sa demande tendant à l'annulation du refus de régularisation de ses droits à congés depuis l'année 2017 ; ils ont ainsi insuffisamment motivé leur réponse sur ce point ; - les premiers juges ont omis de répondre aux moyens de légalité externe et interne soulevés à l'encontre du refus d'imputabilité de ses congés maladie au service ; - les premiers juges ont omis de répondre au moyen tiré de la faute de l'Etat dans la gestion des demandes de formation en ce qu'elle concernait le refus d'autorisation d'absence pour participer aux épreuves du concours interne d'attaché ; - le jugement attaqué est insuffisamment motivé, en méconnaissance de l'article L. 9 du code de justice administrative, concernant le refus de la formation " gestion conflits ", des sessions " coopérations échanges " et de la demande de congé de formation professionnelle ; - aucune exception de la chose jugée ne peut lui être opposée s'agissant du refus de reconnaissance d'imputabilité de ses congés au service ; la circonstance que le tribunal et la cour aient déjà statué sur une demande précédente ne pouvait faire obstacle à ce qu'elle présente une nouvelle demande ; les précédents juges n'ont jamais statué au fond sur sa demande de reconnaissance ; au contraire, l'administration devait, pour l'exécution de la précédente annulation, statuer à nouveau sur sa demande ; l'administration n'a pas respecté l'injonction précédente de réexaminer sa demande dans les deux mois ; - le rejet implicite de sa demande du 27 décembre 2018 sur ce point n'a pas été précédé d'un avis de la commission de réforme ; ce rejet est illégal et entaché d'une erreur d'appréciation dès lors que son état est en lien direct et essentiel avec l'accident du 13 janvier 2014 qui lui a causé une lésion psychologique ; cet accident a eu lieu sur son lieu de travail à l'occasion d'un différend avec sa supérieure ; la dégradation de ses conditions de travail ressort de plusieurs pièces du dossier et, notamment, du rapport d'expertise commandé par l'administration ; en outre, le rapport remis à la commission de réforme ne comprenait aucun rapport du médecin de prévention alors que celui-ci avait alerté à plusieurs reprises sur la dégradation de ses conditions de travail ; ses congés maladie du 14 janvier 2014 au 8 novembre 2015 sont donc imputables au service ; - elle est en droit de bénéficier d'une indemnisation pour les divers préjudices qu'elle a subis ; - en premier lieu, du fait de l'illégalité de l'évaluation professionnelle de 2012 et des refus successifs de lui attribuer des réductions d'ancienneté alors qu'aucun motif n'était avancé pour lui refuser ces réductions, que le compte-rendu d'entretien professionnel comportait des incohérences et des commentaires sans lien avec sa manière de servir, était entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ou portaient sur des reproches qui ne pouvaient pas lui être imputés, comme l'utilisation de l'application OCTET, ses statistiques montrant qu'elle se situait au moins dans la moyenne et que des réductions ont été proposées à des agents moins bien classés ; - en deuxième lieu, du fait de la gestion fautive de ses demandes de formation ; l'administration a refusé sa participation à la formation " gestion des conflits ", même si une formation similaire existait à Paris, et aux sessions coopérations-échanges, qui n'était pas d'une durée excessive, sans motif légitime ; elle lui a également refusé, sans raison valable, une autorisation d'absence pour les épreuves du concours interne d'attaché d'administration ; en outre, alors qu'elle a sollicité un congé de formation professionnelle le 15 janvier 2015, la réponse tardive du service des ressources humaines, après la date de début de la formation, a empêché son inscription en brevet de technicien supérieur en économie sociale et familiale ; - en troisième lieu, du fait du harcèlement moral ainsi que d'un dépassement anormal du pouvoir hiérarchique ; elle a subi des agissements vexatoires de la part de sa cheffe de service ; sa hiérarchie, qui ne souhaitait pas son affectation à Versailles, l'a mise en difficulté dans l'accomplissement de ses missions ; ces agissements ont perduré à son retour en novembre 2015 ; aucun travail ne lui a été confié et elle n'a pas pu récupérer ses affaires personnelles ; aucun matériel adéquat ne lui a été fourni ; l'administration n'apporte aucun élément de nature à établir que ces agissements sont étrangers à tout harcèlement ; - son préjudice est d'abord financier puisqu'elle a subi un retour d'au moins trois ans dans sa progression d'échelon, soit environ 20 000 euros de pertes ; il est ensuite lié aux frais d'avocat qu'elle a dû engager, pour 5 830 euros, indépendamment des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative ; elle a subi également un préjudice de carrière, en étant écartée du concours interne d'attaché, alors qu'elle avait une chance sérieuse de le réussir, à hauteur de 20 000 euros ; elle a connu des troubles dans les conditions d'existence et un préjudice moral indemnisable à hauteur de 20 000 euros ; - à sa reprise de fonctions en décembre 2016, elle a constaté que l'application Casper qui gère les horaires variables affichait un solde négatif, alors que son compteur horaire affichait un excédent de 99h59 ; elle n'a bénéficié d'aucune récupération pour ces heures ; les dysfonctionnements de l'application n'ont jamais été corrigés ; le refus de régulariser est entaché d'une erreur de droit et d'une rupture d'égalité dès lors qu'elle est placée dans une situation défavorable par rapport à ses collègues secrétaires administratifs. Par des mémoires en défense enregistrés les 25 avril 2022 et 22 décembre 2023, la ministre de la transition écologique conclut au rejet de la requête. Elle fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code civil ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Liogier, - les conclusions de M. Illouz, rapporteur public, - et les observations de Me Arvis, représentant Mme A.... Considérant ce qui suit : 1. Mme Ruth Edjenguele, secrétaire d'administration et de contrôle de classe normale du développement durable 7ème échelon, affectée à la direction de la régulation des transports routiers de la direction régionale et interdépartementale de l'équipement et de l'aménagement d'Île-de-France, a demandé, par un courrier du 27 décembre 2018, au ministre de la transition écologique et solidaire de reconnaître l'imputabilité au service de ses congés maladie depuis le 13 janvier 2014, de régulariser ses droits à congés à compter de 2017 et de l'indemniser à raison de plusieurs préjudices à hauteur de 65 830 euros. Elle fait appel du jugement du 8 février 2021 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté, d'une part, sa demande tendant à l'annulation du rejet implicite de cette demande et, d'autre part, ses conclusions indemnitaires. Sur la régularité du jugement : 2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ". 3. Il ressort des pièces du dossier que la minute du jugement attaqué a été signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience, conformément aux prescriptions de l'article R. 741-7 précité du code de justice administrative. Par suite, le moyen tiré de ce que la minute du jugement attaqué n'est pas été signée ne peut qu'être écarté. 4. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier de première instance, ainsi que des visas et des motifs du jugement attaqué, que le tribunal administratif a expressément traité, au point 7. du jugement attaqué, la question de la responsabilité de l'État à raison de la " gestion fautive des demandes de formation ". Dans le cadre de ce fondement de responsabilité, Mme A... se prévalait, notamment, du refus d'une autorisation d'absence pour le concours interne d'attaché. S'il est vrai, comme le soutient la requérante, que les premiers juges n'ont pas expressément écarté ce fait, il ne s'agissait toutefois que d'un argument au soutien de la démonstration de la même faute, commise par l'État dans la gestion de ses demandes de formation, invoquée dans le cadre des conclusions tendant à ce que la responsabilité de l'État soit engagée à raison de cette faute. Ainsi, il ne s'agissait pas d'une faute distincte. Les premiers juges n'étaient pas tenus de répondre à tous les arguments invoqués au soutien de la même faute. Le tribunal administratif ayant répondu, par suite, à la faute alléguée, tenant à cette gestion fautive, le moyen tiré de ce que le jugement serait entaché d'une omission à statuer sur ce point ne peut qu'être écarté. 5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". 6. Il ressort des motifs du jugement attaqué que les premiers juges, après avoir précisé au point 1. que Mme A... était affectée en Ile-de-France, ont considéré que le refus de l'inscrire à une formation à Clermont-Ferrand pouvait être fondé sur le motif tiré de ce qu'une formation identique se tenait à Paris, le jugeant, ainsi, nécessairement légitime et proportionné. De même, s'agissant des sessions " coopérations-échanges ", les premiers juges ont estimé que la durée de deux semaines de la formation était " excessive " au regard de l'intérêt du service eu égard " aux missions prioritaires de contrôle " de la requérante, détaillant ainsi suffisamment leur réponse sur ce point. Enfin, pour la demande de congé de formation professionnelle, contrairement à que soutient la requérante, il ne ressort pas des pièces du dossier de première instance, qu'il y aurait eu débat entre les parties sur la date de constitution du dossier par Mme A... et sur la date de réponse de l'administration. Dès lors, en estimant que le délai entre ces deux dates n'était pas suffisant pour permettre " une instruction rapide " de sa demande par l'administration, les premiers juges ont suffisamment motivé leur réponse sur ce point également. Il résulte de ce qui précède que les moyens tirés de l'insuffisance de motivation du jugement doivent être écartés. 7. En quatrième lieu, aux termes de l'article 1351 du code civil : " L'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même ; que la demande soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes parties, et formée par elles et contre elles en la même qualité ". L'autorité de chose jugée s'attache non seulement au dispositif mais encore aux motifs qui en constituent le support nécessaire. 8. Par un jugement n°1505392 du 15 mai 2017, le tribunal administratif de Versailles a annulé la décision du 20 mai 2015 par laquelle le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident dont Mme A... s'est déclarée victime le13 janvier 2014 et des congés de maladie pris en conséquence, dès lors que le motif du lien direct et exclusif de la pathologie avec le service, avancé par le ministre, était illégal. Ce jugement a été confirmé en appel par un arrêt, devenu définitif, nos 17VE02260 et 17VE02465 du 8 novembre 2018 de la cour administrative d'appel de Versailles, qui a écarté la demande de substitution de motifs du ministre, a confirmé l'illégalité du premier motif fondant le refus et, enfin, a constaté des irrégularités dans la procédure d'édiction du refus, en l'absence de rapport du médecin de prévention devant la commission de réforme saisie pour avis. Compte tenu de ce précédent jugement, confirmé en appel, les premiers juges ont considéré que l'autorité de la chose jugée faisait obstacle à ce que Mme A... demande l'annulation d'un nouveau refus à l'encontre d'une demande similaire de reconnaissance d'imputabilité au service de ses congés maladie mais qu'elle pouvait, si elle s'y croyait fondée, demander au juge l'exécution de l'arrêt du 8 novembre 2018 qui enjoignait à l'administration de réexaminer sa demande. Les premiers juges ont donc écarté comme irrecevables les conclusions de Mme A... tendant à l'annulation du rejet implicite de sa demande de reconnaissance d'imputabilité au service des congés de maladie pris à l'issue d'un accident dont elle s'est déclarée victime le 13 janvier 2014. 9. Toutefois, s'il était loisible à Mme A... de s'adresser au juge de l'exécution pour obtenir l'exécution de l'arrêt nos 17VE02260 - 17VE02465 du 8 novembre 2018, il ressort des pièces du dossier, ainsi qu'il vient d'être dit, que l'administration était ressaisie de l'examen de la demande de reconnaissance de Mme A... en raison de l'annulation, devenue définitive, de sa décision du 20 mai 2015. Or, le motif d'annulation retenu dans le précédent litige ne faisant pas obstacle à ce que l'administration reprenne régulièrement la même décision, et Mme A... était recevable à contester la nouvelle décision, prise en exécution de la précédente annulation contentieuse et sollicitée par son courrier du 27 décembre 2018, sans que ne puisse lui être opposée, dans le cadre de cette nouvelle demande, l'autorité de chose jugée par le jugement du 15 mai 2017 du tribunal administratif de Versailles, confirmé en appel. Dans ces conditions, c'est à tort que les premiers juges ont écarté comme irrecevables les conclusions de Mme A..., en accueillant l'exception de chose jugée opposée en défense. Par suite, le jugement attaqué, en tant qu'il a rejeté les conclusions de Mme A... à l'encontre du refus de reconnaissance d'imputabilité au service de congés maladie résultant d'un accident de service, est irrégulier et doit être annulé. 10. En dernier lieu, il ressort des pièces du dossier de première instance, ainsi qu'il a été dit au point 1, que Mme A... demandait également l'annulation du rejet implicite de sa demande du 27 décembre 2018 de régulariser ses droits à congés à compter de 2017. Or, il ressort des visas du jugement attaqué que les premiers juges n'ont pas visé ces conclusions comme des conclusions d'annulation, mais comme des conclusions à fin d'injonction. En outre, il ressort des motifs du jugement attaqué que le tribunal a statué sur ces conclusions au stade des conclusions indemnitaires, en contradiction tant avec les écritures de Mme A... qu'avec les visas du jugement. Par suite, le jugement attaqué, en tant qu'il s'est mépris sur la portée des écritures de Mme A... et a, ainsi, omis de statuer sur les conclusions de Mme A... tendant à l'annulation du rejet implicite de régulariser ses congés, est irrégulier et doit être annulé. 11. Il y a lieu de statuer, immédiatement, par la voie de l'évocation sur les conclusions de Mme A... à fin d'annulation et de statuer, par l'effet dévolutif de l'appel, sur ses conclusions indemnitaires. Sur les conclusions à fin d'annulation : En ce qui concerne le refus d'imputabilité au service des congés maladie : 12. Lorsque le silence gardé par l'administration sur une demande dont elle a été saisie a fait naître une décision implicite de rejet, une décision explicite de rejet intervenue postérieurement se substitue à la première décision. En l'espèce, les conclusions de Mme A... dirigées contre le refus implicite de sa demande de reconnaissance d'imputabilité au service du 27 décembre 2018 doivent être regardées comme dirigées contre la décision explicite du 15 mars 2021 par laquelle la directrice régionale et interdépartementale de l'équipement et de l'aménagement d'Ile-de-France a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident survenu le 13 janvier 2014. 13. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que la commission de réforme a, au cours d'une séance du 8 octobre 2020, examiné à nouveau la demande de Mme A... de reconnaissance de l'imputabilité au service de l'accident du 13 janvier 2014, après avoir eu connaissance du rapport du médecin de prévention, ainsi que le montre le courriel du 29 juin 2020 versé au dossier. Par suite, les moyens tirés du défaut de consultation de la commission de réforme et de transmission à cette commission du rapport du médecin de prévention manquent en fait et doivent être écartés. 14. En second lieu, aux termes de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État, dans sa version applicable au présent litige : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. (...) Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident (...) ". 15. Constitue un accident de service, pour l'application des dispositions citées au point précédent, un évènement survenu à une date certaine, par le fait ou à l'occasion du service, dont il est résulté une lésion, quelle que soit la date d'apparition de celle-ci. Sauf à ce qu'il soit établi qu'il aurait donné lieu à un comportement ou à des propos excédant l'exercice normal du pouvoir hiérarchique, lequel peut conduire le supérieur hiérarchique à adresser aux agents des recommandations, remarques, reproches ou à prendre à leur encontre des mesures disciplinaires, un entretien ou tout autre échange professionnel entre un agent et son supérieur hiérarchique ne saurait être regardé comme un événement soudain et violent susceptible d'être qualifié d'accident de service, quels que soient les effets qu'il a pu produire sur l'agent. 16. Il ressort des pièces du dossier que le vendredi 10 janvier 2014, une discussion houleuse s'est engagée entre Mme A... et sa supérieure hiérarchique, avec qui elle entretenait des relations difficiles depuis plusieurs semaines, s'agissant d'un fond de dossier égaré. Au retour du week-end, le lundi 13 janvier suivant, Mme A... ne parvenant pas à retrouver le dossier, sa supérieure lui a adressé un courriel à la suite duquel Mme A... a fait un malaise, puis a été placée en arrêt maladie. Or, si le courriel était rédigé dans des termes sévères et si certains agents de la chaine hiérarchique ont été mis en copie du courriel, ni les reproches qui lui ont été adressés à cette occasion ni les termes utilisés par sa supérieure n'ont excédé l'exercice normal de l'autorité hiérarchique. La circonstance que Mme A... ait fait un malaise à la suite de cet échange n'est pas, par elle-même, de nature à établir qu'elle aurait été victime d'un accident de service. En outre, il ressort des pièces du dossier, ainsi que l'a relevé la commission de réforme dans son avis du 8 octobre 2020, que le différend de l'intéressée avec sa supérieure hiérarchique apparait comme " la manifestation de la décompensation d'un état pathologique " qui était antérieur à ce conflit. Dans ces conditions, dès lors que l'événement survenu le 13 janvier 2014 ne constitue pas un accident de service, en refusant de reconnaître son imputabilité au service, ainsi que des congés maladie qui s'en sont suivis, la directrice régionale et interdépartementale de l'équipement et de l'aménagement d'Ile-de-France n'a pas fait une inexacte application des dispositions précitées. Par suite, Mme A... n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision de rejet du 15 mars 2021. En ce qui concerne le refus de régularisation des droits à congés : 17. Mme A... soutient, tout d'abord, que le refus de régulariser ses droits à congés méconnaît les dispositions du décret du 25 août 2000 relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail dans la fonction publique de l'État, dès lors qu'à son retour en décembre 2016, le solde horaire sur l'application Casper était négatif alors que le compteur horaire affichait un excédent de 99h59 et qu'elle n'a pu bénéficier d'aucune journée de récupération à raison de ces heures. Toutefois, s'il est manifeste que des dysfonctionnements techniques ont eu lieu sur l'application, il ne ressort pas des pièces du dossier que le solde négatif de -383h30 au 1er janvier 2017 serait anormal, alors que l'administration soutient, sans être contredite, que ce solde était antérieur au départ en congé de formation de Mme A..., ni que le solde positif de 99h59 apparaissant pour les mois de janvier à mars 2017, dont elle se prévaut, serait avéré alors que les pointages effectués montrent un excédent d'heures effectuées, pour ces mois-là, entre 8 et 13 heures mensuellement. En outre, il ressort des pièces du dossier qu'une régularisation de son dossier a eu lieu en avril 2017, les soldes devenant, à compter de cette date, cohérents avec les pointages réalisés. Par ailleurs, contrairement à ce que soutient Mme A..., il ressort des captures d'écran produites au dossier qu'elle a bénéficié d'une demi-journée de récupération en décembre 2017, puis à six reprises entre janvier et août 2018 mais qu'elle a, ensuite, à nouveau accumulé des déficits horaires ne permettant pas la prise de journées de récupération. Enfin, si Mme A... soutient qu'il y a une rupture d'égalité de traitement entre agents de même grade, aucune pièce du dossier ne permet de l'établir. Par suite, sa demande tendant à l'annulation du refus implicite de régulariser ses droits à congés doit être rejetée. Sur les conclusions indemnitaires : 18. En premier lieu, Mme A... soutient que la responsabilité de l'administration est engagée du fait de l'illégalité de son évaluation professionnelle de l'année 2012. Or, il ressort des termes de ce compte-rendu que le supérieur hiérarchique a mentionné les objectifs de contrôles et le nombre de contrôles réalisés, correspondant à environ 70% de l'objectif fixé. Le compte-rendu relève également un manque de rigueur dans la rédaction des procès-verbaux et invite à des progrès dans l'adaptation de la requérante aux évolutions techniques. Il ressort par ailleurs de ce compte-rendu que les cases cochées, au deuxième ou troisième niveau sur les quatre existants, ne sont pas incohérentes avec les appréciations littérales et les reproches qui lui sont faits. La circonstance que le supérieur ait fait mention de son arrêt maladie du mois de juin, de la mise en place de l'application Greco-Web qui a posé des difficultés et de la nécessaire disponibilité des forces de l'ordre pour les contrôles, éléments permettant de contextualiser les résultats de Mme A..., n'est pas de nature à entacher ce compte-rendu d'incohérences. Par ailleurs, s'il est constant que des difficultés techniques ont eu lieu sur l'application Greco-web en fin d'année 2012, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette circonstance aurait pu, à elle seule, expliquer la non-atteinte des objectifs de la requérante, les pièces apportées se limitant à des échanges sur des problèmes techniques en 2013 et 2014 engendrant des indisponibilités limitées de l'application, insusceptibles d'avoir influencé ses résultats de 2012, et à un document démontrant qu'un seul contrôle effectué par Mme A... en 2012 n'avait pas pu être intégré dans l'application, bien en-deçà du nombre de contrôles qu'elle n'a pas clôturés dans l'année et, en tout état de cause, inférieur au nombre de contrôles non pris en compte pour d'autres de ses collègues placés dans une situation similaire. Si Mme A... se plaint de ce que les contrôles sont attribués par la hiérarchie, elle n'établit pas que cette attribution l'aurait particulièrement pénalisée, en se bornant à produire un échange de courriels avec sa supérieure, daté de 2013, au sujet d'un contrôle qui lui a été refusé et un autre sur lequel elle ne s'est pas rendue alors qu'il lui avait été attribué. De même, l'attestation de son collègue et le message syndical, s'ils évoquent des difficultés et des tensions dans l'équipe à la suite d'un déménagement scindant l'équipe en deux groupes, aucun élément ne permet de faire le lien avec les résultats personnels de Mme A... et, par suite, d'établir que le compte-rendu professionnel de l'année 2012 serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation. Mme A... n'est donc pas fondée à soutenir que l'administration aurait entaché son compte-rendu d'entretien professionnel au titre de l'année 2012 d'une illégalité fautive de nature à engager sa responsabilité. 19. En deuxième lieu, la requérante soutient que la responsabilité de l'administration se trouve engagée du fait de l'illégalité des refus successifs de lui attribuer une réduction d'ancienneté. Toutefois, Mme A... n'assortit son moyen des précisions suffisantes de nature à en apprécier le bien-fondé que s'agissant de l'année 2012. Pour cette année-là, Mme A... n'est pas fondée à soutenir qu'il serait illégal dès lors qu'il se fonde sur un compte-rendu professionnel lui-même illégal car, ainsi qu'il vient d'être dit, ce compte-rendu n'était entaché d'aucune erreur manifeste d'appréciation. En outre, contrairement à ce que soutient la requérante, le rejet du 11 décembre 2013 de son recours gracieux formulé à l'encontre du refus de réduction d'ancienneté, qui explicite les motifs de ce refus, est fondé sur la non-atteinte des objectifs de contrôles et les difficultés de la requérante face aux évolutions techniques. Les autres éléments mentionnés dans le courrier, comme l'utilisation de l'outil OCTET, portent sur l'année 2013 pour mettre en exergue que l'évolution postérieure de son travail ne permet pas d'accueillir favorablement sa demande de révision. Si la requérante allègue que son rendu se trouvait dans la moyenne et que des agents moins bien classés ont eu droit à une réduction d'ancienneté, cette circonstance, non établie de façon probante par des tableaux non contextualisés, ne permettrait, en tout état de cause, pas de considérer que le refus dont elle a fait l'objet serait illégal ou constituerait une rupture d'égalité dès lors que l'attribution d'une réduction d'ancienneté peut également résulter d'autres facteurs que le rendu statistique des contrôleurs. Il suit de là que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que l'administration aurait engagé sa responsabilité en lui refusant illégalement des réductions d'ancienneté. 20. En troisième lieu, Mme A... soutient que la gestion de ses demandes de formation par son employeur serait fautive et de nature à engager la responsabilité de l'État. Toutefois, s'agissant de la formation " gestion des conflits " à Clermont-Ferrand, il résulte de l'instruction qu'une formation similaire se tenait à Paris alors que la requérante était affectée en Ile-de-France, et l'administration fait valoir, sans être contredite, que les formations dispensées en Ile-de-France sont prioritaires en vertu d'une note de service du 29 février 2012 applicable à tous les agents. En outre, s'agissant des sessions " coopérations-échanges " d'une durée de deux semaines, la longueur de la formation, eu égard aux missions prioritaires de contrôle incombant à la requérante, qui ne remplissait pas ses objectifs de contrôle, a été jugée contraire aux intérêts du service. Par ailleurs, Mme A... ne conteste pas que l'autorisation d'absence pour passer les épreuves du concours interne d'attaché de son ministère, qui n'est pas de droit, ne lui a été refusée qu'en raison d'une autre autorisation d'absence qui lui avait déjà été octroyée la même année pour le concours d'entrée à l'IRA de Bastia et que le règlement intérieur, applicable à l'ensemble des agents de sa direction, prévoit une autorisation de droit à hauteur d'un jour par an, le surplus étant à la discrétion de la hiérarchie. Enfin, en ce qui concerne la demande de congé de formation professionnelle afin de passer le brevet de technicien supérieur en économie sociale et familiale, il est constant que la requérante a déposé sa demande de congé le 15 janvier 2015, accordée par une décision du 29 mai 2015, notifié le 3 juin 2015 après le début de la formation. Toutefois, il résulte de l'instruction que l'organisme responsable de la formation, après l'avoir vainement contactée le 20 avril, lui a refusé l'entrée en formation au motif que le dossier administratif et financier devait être réglé, Mme A... n'établissant pas que, sur ce point, l'administration aurait tardé de façon excessive à traiter sa demande. Il résulte d'ailleurs de l'instruction que la requérante a effectivement bénéficié d'un congé de formation professionnelle pour passer un DUT carrières sociales option assistance sociale qui lui a été accordé du 1er septembre au 9 décembre 2016. 21. En quatrième lieu, aux termes de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, dans sa rédaction alors en vigueur : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. / Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la formation, la notation, la discipline, la promotion, l'affectation et la mutation ne peut être prise à l'égard d'un fonctionnaire en prenant en considération : / 1° Le fait qu'il ait subi ou refusé de subir les agissements de harcèlement moral visés au premier alinéa ; / 2° Le fait qu'il ait exercé un recours auprès d'un supérieur hiérarchique ou engagé une action en justice visant à faire cesser ces agissements ;/3° Ou bien le fait qu'il ait témoigné de tels agissements ou qu'il les ait relatés. / Est passible d'une sanction disciplinaire tout agent ayant procédé ou ayant enjoint de procéder aux agissements définis ci-dessus. / Les dispositions du présent article sont applicables aux agents non titulaires de droit public. ". 22. Il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement. Il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile. Pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'administration auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral. Pour être qualifiés de harcèlement moral, ces agissements doivent être répétés et excéder les limites de l'exercice normal du pouvoir hiérarchique. 23. Mme A... soutient qu'elle a subi des faits de harcèlement moral provenant de sa supérieure hiérarchique. Toutefois, si Mme A... affirme qu'elle aurait été dénigrée et placée en difficulté à dessein par sa hiérarchie, cela ne résulte pas de l'instruction. En particulier, si le ton employé dans le courriel du 13 janvier 2014 de sa supérieure à la suite duquel Mme A... a fait un malaise, est ferme, ce courriel est isolé et ne dépasse pas le cadre normal du pouvoir hiérarchique, ainsi qu'il a été dit au point 16. Par ailleurs, si Mme A... soutient que le harcèlement a perduré à son retour de congé maladie, qu'elle se serait trouvée isolée et privée de travail, que ses mails auraient été supprimés, qu'elle se serait vu opposer un refus de délivrance d'une carte de circulation ou attribuer un ordinateur ayant une batterie défaillante, ces circonstances ne sont établies par aucune pièce probante versée aux débats. 24. Néanmoins, il résulte de l'instruction que Mme A... entretenait des rapports difficiles avec sa supérieure hiérarchique et ses collègues qui ont conduit à des arrêts de travail réguliers pour " anxiété " puis un arrêt maladie de longue durée à compter du 13 janvier 2014, après une altercation par courriel avec cette supérieure, pour un " état dépressif sévère ", ainsi qu'il ressort de l'expertise psychiatrique demandée par l'administration en septembre 2014. Il résulte également de l'instruction que les médecins de prévention ont, à trois reprises, entre 2010 et 2013, estimé que les conditions de travail de Mme A... étaient " dégradées " et demandaient à ce qu'elles soient améliorées. Enfin, il résulte des termes du rapport issu de l'enquête administrative diligentée par l'administration dans le cadre des conflits de Mme A... avec sa hiérarchie que la requérante est probablement isolée sur son lieu de travail et que la situation a été " difficile et douloureuse ". Ces éléments suffisent à faire présumer l'existence d'agissements constitutifs d'un harcèlement moral. 25. Toutefois, ces derniers faits ne peuvent être appréciés sans tenir compte du comportement de l'intéressée et de l'intérêt du service. Or, il ressort des termes du même rapport d'enquête produit au dossier, remis en janvier 2015 après audition de Mme A..., que les inspecteurs n'ont relevé aucun manquement grave du fonctionnement de la chaîne hiérarchique " si ce n'est des difficultés à régler, en amont, avec suffisamment de fermeté un problème singulier, lié à un agent qui n'est manifestement plus apte à exercer des fonctions de contrôle des transports terrestres ". En outre, s'il ressort effectivement d'un courriel du 11 février 2013 que sa supérieure hiérarchique n'était pas favorable à sa venue dans l'équipe de Versailles, il ne résulte pas des termes de ce courriel, qui note l'absence de concertation et d'information en amont de la direction, ainsi qu'une incohérence à affecter un agent à distance de ses lieux de contrôle, que ce désaccord serait lié à la personne de Mme A... ou qu'elle nourrissait une quelconque animosité à son égard. Il résulte également de l'instruction, ainsi qu'il a été notamment rappelé au point 18, que Mme A... rencontrait des difficultés pour remplir ses objectifs de contrôle, et montrait une inaptitude à s'adapter aux évolutions techniques nécessaires à la bonne réalisation des contrôles. De même, s'il est constant que sa supérieure a, à plusieurs reprises, refusé de valider ses horaires de travail et ses demandes d'affectation sur certains contrôles, il ne résulte pas de l'instruction que ces décisions auraient été prises à tort, alors que la requérante devait se conformer à la décision du 26 mars 2013 relative à son affectation à Versailles, qui fixe son secteur d'intervention et exige qu'elle s'organise pour du co-voiturage avec les contrôleurs concernés. Enfin, il résulte de l'instruction que Mme A... connaissait déjà des difficultés avec sa hiérarchie dans ses affectations précédentes, ce qui a conduit, selon ses propres termes, à ce qu'elle accepte d'être affectée à Versailles, à la faveur d'une réorganisation, dans un souci d'apaisement. Dans ces conditions, les faits, relevés au point 24 ne peuvent pas être qualifiés de harcèlement moral et ne constituent pas une faute susceptible d'engager la responsabilité de l'État. Par suite, les conclusions indemnitaires présentées à ce titre ne peuvent être que rejetées. 26. En conséquence, Mme A... n'est pas fondée à demander la condamnation de l'État à l'indemniser des préjudices dont elle demande réparation ni à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté ses demandes indemnitaires. Sur les conclusions à fin d'injonction : 27. Il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à demander l'annulation du rejet de sa demande de reconnaissance d'imputabilité au service de l'événement du 13 janvier 2014 et du rejet de sa demande de régularisation de ses congés. En conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent qu'être écartées. Sur les frais liés à l'instance : 28. L'État n'étant pas partie perdante, les conclusions présentées par Mme A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administratives ne peuvent qu'être rejetées. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement n° 1903252 du 8 février 2021 du tribunal administratif de Versailles en tant qu'il a rejeté les conclusions à fin d'annulation présentées par Mme A... est annulé. Article 2 : La demande de Mme A... présentée devant le tribunal administratif de Versailles, tendant à l'annulation du rejet de ses demandes de reconnaissance d'imputabilité au service de l'événement du 13 janvier 2014 et des congés maladie qui s'en sont suivis et de régularisation de ses congés, est rejetée. Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Ruth Edjenguele et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Délibéré après l'audience du 23 janvier 2024, à laquelle siégeaient : Mme Besson-Ledey, présidente, Mme Danielian, présidente assesseure, Mme Liogier, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 février 2024. La rapporteure, C. LiogierLa présidente, L. Besson-Ledey La greffière, A. Audrain-Foulon La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme La greffière, N°21VE01061 2
Cours administrative d'appel
Versailles
CAA de BORDEAUX, 6ème chambre, 08/02/2024, 22BX02005, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme C... Biron a demandé au tribunal administratif de Bordeaux : - d'annuler la décision implicite de la commune de Teuillac et la décision du 20 juillet 2018 de la communauté de communes Couserans-Pyrénées rejetant sa réclamation indemnitaire préalable et sa demande tendant à ce que sa situation soit régularisée avec sa mutuelle, au regard de ses salaires et de son avancement, ainsi que sa demande tendant à être placée à la retraite pour invalidité imputable au service à défaut d'un reclassement ; - de condamner la commune de Teuillac et la communauté de communes Couserans-Pyrénées à lui verser la somme de 335 704,21 euros en réparation de l'ensemble de ses préjudices découlant de sa maladie, la somme de 10 000 euros en réparation de son préjudice moral et des troubles subis dans ses conditions d'existence ainsi que la somme de 60 000 euros au titre de l'allocation temporaire d'invalidité ; - de condamner la commune de Teuillac à lui payer une somme qui ne saurait être inférieure à 30 000 euros au titre des rémunérations qui auraient dû lui être versées pendant ses congés de maladie imputables au service ; - d'enjoindre à la commune de Teuillac de régulariser sa situation au titre de la mutuelle nationale territoriale et d'enjoindre à la commune de Teuillac et à la communauté de communes Couserans-Pyrénées de régulariser sa situation au titre de l'avancement et de la retraite et de procéder à liquidation et au versement de l'allocation temporaire d'invalidité qui lui est due, et de la placer à la retraite pour invalidité imputable au service avec un taux qui ne serait être inférieur à 30 %, sauf reclassement possible. Par un jugement n° 1804139 du 22 septembre 2021, le tribunal administratif de Bordeaux a condamné la communauté de communes Couserans-Pyrénées à verser à Mme Biron la somme de 119 980, 70 euros, a condamné la commune de Teuillac à verser à Mme Biron la somme de 5 000 euros et a annulé la décision implicite par laquelle le maire de la commune de Teuillac a refusé de verser à Mme Biron la fraction des traitements dont elle a été illégalement privée. Le tribunal a enjoint à la commune de Teuillac de payer à Mme Biron le complément de rémunération correspondant à la fraction des traitements dont elle a été illégalement privée et a condamné la communauté de communes de Couserans-Pyrénées à verser à la commune de Teuillac la somme de 720,36 euros, ainsi que la somme correspondant aux traitements payés par cette dernière à Mme Biron pendant la période du 9 décembre 2007 au 31 décembre 2019 et les frais d'expertise. Procédure devant la Cour : I. Sous le n° 21BX04225, par une requête et des mémoires, enregistrés, les 16 novembre 2021, 25 octobre 2023, la communauté de communes Couserans-Pyrénées, représentée par la société Urbi et Orbi avocats, agissant par Me Magrini, demande à la Cour : 1°) de réformer partiellement le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 22 septembre 2021 précité ; 2°) de limiter sa condamnation au versement à la commune de Teuillac de la somme correspondant seulement aux traitements payés par cette dernière à Mme Biron pendant la période du 9 décembre 2007 au 31 décembre 2017, et non jusqu'au 31 décembre 2019, et de réformer le jugement en ce qu'il a de contraire à l'arrêt à intervenir ; 3°) de mettre à la charge de la commune de Teuillac une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - en jugeant qu'elle devait supporter la charge des traitements de Mme Biron entre le 9 décembre 2007 et le 31 décembre 2019, le tribunal a commis une erreur d'appréciation ; d'une part, le comportement de la commune de Teuillac a été de nature à retarder la reprise de l'agent, son reclassement ou sa mise à la retraite ; d'autre part, la commune de Teuillac a été plus que négligente dans la gestion de la carrière de Mme Biron ; ainsi dès la fin de sa reprise à mi-temps thérapeutique le 10 avril 2011, la commune de Teuillac aurait dû engager la procédure permettant d'établir son aptitude à exercer ses fonctions et examiner si elle pouvait bénéficier de l'adaptation de son poste de travail ou être mise en mesure de demander son reclassement si elle était déclarée en mesure d'occuper les fonctions correspondantes ; or, il s'est passé quatre années durant lesquelles la commune n'a rien mis en œuvre pour entamer le reclassement de l'agent ou procéder à une mise à la retraite pour invalidité ; - en outre, par un avis du 17 février 2016, le comité médical départemental a indiqué que l'agent était inapte à ses fonctions ; par courrier du 28 avril 2016, la commune a alors demandé à l'agent d'engager une procédure de reclassement mais cette demande n'a pas été suivie d'effet ; rien ne s'est alors passé avant l'année 2018 ; les premiers juges ont estimé que la procédure de reclassement aurait pu aboutir le 31 décembre 2019 commettant une erreur d'appréciation dès lors qu'elle aurait pu aboutir dans le délai raisonnable d'un an, soit au 31 décembre 2017. Par des mémoires en défense, enregistrés le 7 août 2023 et le 14 novembre 2023, la commune de Teuillac, représentée par la SCP Kappelhoff-Lançon-Valdes, agissant par Me Valdes, conclut : - à la confirmation du jugement attaqué en ce qu'il a d'une part condamné la communauté de communes Couserans-Pyrénées à réparer l'entier préjudice de Mme Biron et d'autre part déclaré recevable son action récursoire à l'encontre de la communauté de communes ; - à la réformation du jugement attaqué en ce qu'il a limité la période de remboursement des traitements dus à Mme Biron par la communauté de communes Couserans-Pyrénées à la commune de Teuillac jusqu'au 31 décembre 2019 et non jusqu'à sa mise en retraite ; - à la condamnation de la communauté de communes à lui rembourser, d'une part, la somme de 388 165,56 euros correspondant aux traitements versés à Mme Biron par la commune de Teuillac depuis 2007 jusqu'à sa mise à la retraite pour invalidité et, d'autre part, la somme de 720,36 euros correspondant à la facture de la cure thermale de Mme Biron et à la note de consultation du docteur A... ; - et, en outre, à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de la communauté de communes de Couserans-Pyrénées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés ; Mme Biron a sollicité sa reprise du travail pour la fin de l'année 2015 ainsi que la réalisation d'un bilan de compétences en 2016 mais n'a jamais donné suite au courrier du 28 avril 2016 de la commune de Teuillac lui demandant de produire son bilan de compétence afin de pouvoir procéder à une recherche de reclassement ; la commission de réforme a ensuite rendu le 4 avril 2018 un avis d'inaptitude définitive à toute fonction et, par un avis du 6 juin 2018, elle a rendu un avis favorable à sa mise à la retraite pour invalidité imputable au service ; ces éléments démontrent que la commune de Teuillac s'est particulièrement préoccupée de son agent et a été active dans la gestion de son dossier ; - s'agissant du versement des salaires, à ce jour et depuis 2007, la commune de Teuillac a versé à Mme Biron la somme de 318 361,15 euros à titre de traitements ; la Cour doit dès lors condamner la communauté de communes à lui rembourser cette somme ; - au regard des pièces versées, la communauté de communes doit être condamnée à rembourser à la commune de Teuillac la somme de 69 804,41 euros, soit un total de 388 156,56 euros correspondant au versement de son traitement depuis 2007 jusqu'à sa mise en retraite pour invalidité, ainsi que les frais de cure thermale. Par ordonnance du 26 octobre 2023, la clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 27 novembre 2023. Par un courrier du 21 décembre 2023, les parties ont été informées, qu'en application de l'article L. 611-7 du code de justice administrative, la Cour était susceptible de se fonder sur le moyen soulevé d'office tiré de l'irrecevabilité des conclusions incidentes présentées par la commune de Teuillac tendant à la condamnation de la communauté de communes de Couserans-Pyrénées à lui verser la somme de 720,36 euros correspondant à une cure thermale. II. Sous le n° 22BX02005, par un courrier du 21 février 2022, Mme C... Biron, représentée par la société d'avocats Cabinet Laveissière, agissant par Me Laveissière, a demandé à la Cour l'exécution du jugement du tribunal administratif de Bordeaux n° 1804139 du 22 septembre 2021. Par un courrier du 1er juin 2022, la commune de Teuillac, représentée par la SCP Kappelhoff-Lançon-Valdes, agissant par Me Valdes, a fait valoir, d'une part, que les sommes de 5 000 euros et 1 200 euros ont été versées à Mme Biron, d'autre part, que la communauté de communes Couserans-Pyrénées ne lui a toujours pas versé la somme de 223 303,74 euros correspondant aux traitements payés à Mme Biron du 9 décembre 2007 au 31 décembre 2019, ainsi que les frais de cure thermale. Par une ordonnance du 30 août 2022, une procédure juridictionnelle a été ouverte sous le n° 22BX02005 en vue de prescrire, s'il y a lieu, les mesures nécessaires à l'exécution du jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 22 septembre 2021. Par un mémoire, enregistré le 10 novembre 2022, Mme Biron demande à la Cour d'enjoindre à la communauté de communes Couserans-Pyrénées d'exécuter le jugement attaqué dans le délai d'un mois, sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de l'arrêt à intervenir, et, en outre, à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de cette dernière sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un mémoire en défense, enregistré le 19 octobre 2023, la communauté de communes de Couserans-Pyrénées, représentée par la société Urbi et Orbi avocats, agissant par Me Magrini, demande à la Cour de prononcer un non-lieu à statuer dès lors qu'elle a exécuté le jugement. Elle indique que la somme totale de 122 280,70 euros a été mise en paiement le 13 janvier 2023. Par ordonnance du 19 octobre 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 27 novembre 2023. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 ; - le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ; - le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ; - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - le code des communes ; - le code de la sécurité sociale ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Au cours de l'audience publique, ont été entendus : - le rapport de Mme B..., - les conclusions de M. Duplan, rapporteur public, - les observations de Me Brouquières, substituant Me Magrini, pour la communauté de communes Couserans-Pyrénées, Me Valdes pour la commune de Teuillac et Me Roncin, substituant Me Laveissière, pour Mme Biron. Vu la note en délibéré, enregistrée le 9 janvier 2024, présentée par la commune de Teuillac dans le dossier 21BX04225. Considérant ce qui suit : 1. Mme C... Biron, agent territorial spécialisé des écoles maternelles (ATSEM), titularisée par un arrêté du 10 août 2005 du président de la communauté de communes du canton de Massat (Ariège), a présenté dans le courant de l'année 2006, à l'âge de 32 ans, des paresthésies des deux mains puis des membres inférieurs, symptomatiques de ce qui a alors été diagnostiqué comme une méningo-radiculite. Mme Biron a ensuite été recrutée à compter du 1er août 2007, par voie de mutation, par la commune de Teuillac (Gironde). Elle a subi des récidives de polyradiculonévrite aux mois de novembre et décembre 2007 et a été placée en congé maladie ordinaire à compter du 9 décembre 2007, puis en congé de longue maladie à compter du 7 janvier 2014, après avoir été reconnue comme travailleur handicapé le 1er septembre 2009 par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées. Par un jugement du 4 février 2013, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé un premier arrêté du maire de Teuillac du 29 avril 2010 refusant de reconnaître comme imputable au service la pathologie contractée par Mme Biron et lui a enjoint de réexaminer la demande de l'intéressée. Par un jugement du 6 octobre 2015, le tribunal a annulé un deuxième arrêté du maire de Teuillac du 4 avril 2014 rejetant de nouveau la demande de Mme Biron d'imputabilité au service de sa pathologie. Dans l'intervalle, et après une expertise médicale, qui a conclu à la contamination par la fièvre Q ou méningo-encéphalite à Coxiella Borneti de Mme Biron dans le cadre des fonctions exercées au sein de l'école de Soulan, la commission départementale de réforme a reconnu, le 22 janvier 2014, l'imputabilité au service de sa maladie à compter du 1er janvier 2006. Par un troisième arrêté du 30 octobre 2014, la commune de Teuillac a reconnu que la pathologie de Mme Biron était imputable au service accompli au sein de la communauté de communes. Par un jugement du 13 octobre 2015, confirmé par un arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 16 octobre 2017, le tribunal a rejeté la demande présentée par la communauté de communes, tendant à l'annulation de ce dernier arrêté. 2. Par un courrier du 22 mai 2018, Mme Biron a adressé une réclamation indemnitaire à la commune de Teuillac et à la communauté de communes Couserans-Pyrénées et leur a demandé de procéder à la régularisation de sa situation administrative et financière, et de la placer à la retraite pour invalidité imputable au service, sauf si un reclassement était possible. Elle a demandé au tribunal l'annulation de la décision implicite née le 24 juillet 2018 du silence gardé par le maire de la commune de Teuillac sur ses demandes de versement de traitements, de l'allocation temporaire d'invalidité et de non placement à la retraite pour invalidité, et l'annulation de la décision du 20 juillet 2018 par laquelle le président de la communauté de communes Couserans-Pyrénées a rejeté ces mêmes demandes. Elle a également sollicité la condamnation des collectivités en cause à réparer les divers préjudices qu'elle a subis et qu'il leur soit enjoint de procéder à la régularisation de sa situation administrative et financière. 3. Par un jugement du 22 septembre 2021, le tribunal administratif de Bordeaux a condamné la communauté de communes Couserans-Pyrénées à verser à Mme Biron la somme de 119 980,70 euros au titre de divers préjudices, a condamné la commune de Teuillac à verser à Mme Biron la somme de 5 000 euros au titre de son préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence, a annulé la décision implicite par laquelle la commune de Teuillac a refusé de payer à Mme Biron la fraction des traitements dont elle a été illégalement privée. Le tribunal a enjoint à la commune de Teuillac de payer à Mme Biron le complément de rémunération correspondant à la fraction des traitements dont elle a été illégalement privée et a condamné la communauté de communes de Couserans-Pyrénées à verser à la commune de Teuillac la somme de 720,36 euros, ainsi que la somme correspondant aux traitements payés par cette dernière à Mme Biron pendant la période du 9 décembre 2007 au 31 décembre 2019 et a mis à sa charge les frais d'expertise. 4. Par sa requête n° 21BX04225, la communauté de communes Couserans-Pyrénées fait appel de ce jugement dont elle demande la réformation en tant seulement qu'il l'a condamnée à verser les traitements dus à Mme Biron jusqu'au 31 décembre 2019 et demande que le terme du versement de ces traitements soit fixé au 31 décembre 2017. La commune de Teuillac conclut au rejet de cette requête et, par la voie de l'appel incident, demande que la condamnation de la communauté de communes au paiement des traitements dus à Mme Biron soit prolongée jusqu'à sa mise à la retraite pour invalidité et que la somme de 720,36 euros correspondant à une cure thermale soit mise à la seule charge de la communauté de communes de Couserans-Pyrénées. Par la requête n° 22BX02005, Mme Biron et la commune de Teuillac demandent l'exécution du jugement. Sur la requête n° 21BX04225 : En ce qui concerne la recevabilité : 5. La commune de Teuillac réitère devant la Cour ses conclusions tendant à la condamnation de la communauté de communes de Couserans-Pyrénées à lui verser la somme de 720,36 euros correspondant à une cure thermale. Ainsi que les parties en ont été informées par courrier du 21 décembre 2023, de telles conclusions sont irrecevables dès lors que la commune de Teuillac a déjà obtenu satisfaction devant le tribunal sur ce point et ne justifie par suite pas d'un intérêt pour agir. En ce qui concerne le bien-fondé du jugement : 6. D'une part, aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " Le fonctionnaire en activité a droit : / (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants (...) / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident. (...) La collectivité est subrogée dans les droits éventuels du fonctionnaire victime d'un accident provoqué par un tiers jusqu'à concurrence du montant des charges qu'elle a supportées ou supporte du fait de cet accident. Elle est admise à poursuivre directement contre le responsable du dommage ou son assureur le remboursement des charges patronales afférentes aux rémunérations maintenues ou versées audit fonctionnaire pendant la période d'indisponibilité de celui-ci (...) ". 7. D'autre part, aux termes de l'article 81 de la même loi : " Les fonctionnaires territoriaux reconnus, par suite d'altération de leur état physique, inaptes à l'exercice de leurs fonctions peuvent être reclassés dans les emplois d'un autre cadre d'emploi ou corps s'ils ont été déclarés en mesure de remplir les fonctions correspondantes. / Le reclassement est subordonné à la présentation d'une demande par l'intéressé ". Aux termes de l'article 30 du décret du 26 décembre 2003 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la caisse nationale de retraites des agents des collectivités territoriales : " Le fonctionnaire qui se trouve dans l'impossibilité définitive et absolue de continuer ses fonctions par suite de maladie, blessure ou infirmité grave dûment établie peut être admis à la retraite soit d'office, soit sur demande. / Lorsque l'admission à la retraite pour invalidité intervient après que les conditions d'ouverture du droit à une pension de droit commun sont remplies par ailleurs, la liquidation des droits s'effectue selon la réglementation la plus favorable pour le fonctionnaire. / La mise en retraite d'office pour inaptitude définitive à l'exercice de l'emploi ne peut être prononcée qu'à l'expiration des congés de maladie, des congés de longue maladie et des congés de longue durée dont le fonctionnaire bénéficie en vertu des dispositions statutaires qui lui sont applicables, sauf dans les cas prévus à l'article 39 si l'inaptitude résulte d'une maladie ou d'une infirmité que son caractère définitif et stabilisé ne rend pas susceptible de traitement. En aucun cas, elle ne pourra avoir une date d'effet postérieure à la limite d'âge du fonctionnaire sous réserve de l'application des articles 1er-1 à 1er-3 de la loi du 13 septembre 1984 susvisée ". Aux termes de l'article 36 du même décret : " Le fonctionnaire qui a été mis dans l'impossibilité permanente de continuer ses fonctions en raison d'infirmités résultant de blessures ou de maladies contractées ou aggravées, soit en service, soit en accomplissant un acte de dévouement dans un intérêt public, soit en exposant ses jours pour sauver la vie d'une ou plusieurs personnes, peut être mis à la retraite par anticipation soit sur sa demande, soit d'office, à l'expiration des délais prévus au troisième alinéa de l'article 30 et a droit à la pension rémunérant les services prévue au 2° de l'article 7 et au 2° du I de l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite (...) ". 8. En application de ces dispositions, la collectivité au service de laquelle se trouvait l'agent lors de l'accident de service doit supporter les conséquences financières de la rechute consécutive à cet accident, alors même que cette rechute est survenue alors qu'il était au service d'une nouvelle collectivité. La collectivité qui employait l'agent à la date de l'accident doit ainsi prendre en charge non seulement les honoraires médicaux et les frais exposés par celui-ci qui sont directement entraînés par la rechute mais aussi le remboursement des traitements qui lui ont été versés par la collectivité qui l'emploie à raison de son placement en congé de maladie ordinaire, de congé de longue maladie ou de congé de longue durée, dès lors que ce placement a pour seule cause la survenue de la rechute consécutive à l'accident de service. Si la collectivité qui l'emploie est tenue de verser à son agent les traitements qui lui sont dus, elle est cependant fondée à demander à la collectivité qui l'employait à la date de l'accident, par une action récursoire, le remboursement de ceux de ces traitements qui sont liés à la rechute ainsi que des éventuels honoraires médicaux et frais qu'elle aurait pris en charge du fait de cette rechute. Cette action récursoire ne peut être exercée, s'agissant des traitements, qu'au titre de la période qui est raisonnablement nécessaire pour permettre la reprise par l'agent de son service ou, si cette reprise n'est pas possible, son reclassement dans un emploi d'un autre corps ou cadre d'emplois ou encore, si l'agent ne demande pas son reclassement ou si celui-ci n'est pas possible, pour que la collectivité qui l'emploie prononce sa mise d'office à la retraite par anticipation. 9. Il résulte également des dispositions combinées citées aux points 5 et 6, que le fonctionnaire dont les blessures ou la maladie proviennent d'un accident de service, d'une maladie contractée ou aggravée en service ou de l'une des autres causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, et qui se trouve dans l'incapacité permanente de continuer ses fonctions au terme d'un délai de douze mois à compter de sa mise en congé de maladie, sans pouvoir bénéficier d'un congé de longue maladie ou d'un congé de longue durée, doit bénéficier de l'adaptation de son poste de travail ou, si celle-ci n'est pas possible, être mis en mesure de demander son reclassement dans un emploi d'un autre corps ou cadre d'emplois, s'il a été déclaré en mesure d'occuper les fonctions correspondantes. S'il ne demande pas son reclassement ou si celui-ci n'est pas possible, il peut être mis d'office à la retraite par anticipation. L'administration a l'obligation de maintenir l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre le service ou jusqu'à sa mise à la retraite. 10. La communauté de communes de Couserans-Pyrénées soutient que la date du 31 décembre 2019, qui correspond selon les premiers juges à celle à laquelle il était raisonnable de penser que Mme Biron aurait pu être reclassée, est entachée d'erreur d'appréciation et doit être ramenée au 31 décembre 2017. La commune de Teuillac, par la voie de l'appel incident, soutient qu'elle n'a commis aucune faute ou retard dans la prise en charge de la situation de Mme Biron et demande la réformation du jugement en tant qu'il a fixé au 31 décembre 2019 et non à la date de la mise en retraite pour invalidité de Mme Biron la fin de la prise en charge des traitements de Mme Biron par la communauté de communes Couserans-Pyrénées. 11. Il résulte des points 5 et 6 et il n'est d'ailleurs pas contesté que la communauté de communes de Couserans-Pyrénées doit verser à Mme Biron les traitements dont cette dernière a été illégalement privée à compter du 9 décembre 2007, date de son placement en congé de maladie, et que les traitements effectivement versés par la commune de Teuillac à Mme Biron durant ses périodes d'arrêts de travail doivent être mis à la charge de la communauté de communes de Couserans-Pyrénées, dans la mesure où elle a fait elle-même toutes diligences pour mettre un terme à ces arrêts de travail. 12. Il résulte de l'instruction, et notamment du tableau récapitulatif produit par la commune de Teuillac, qui n'a pas fait l'objet de contestation, que cette dernière a payé à Mme Biron les sommes dues au titre des traitements durant ses périodes d'arrêts de travail. Il résulte également de l'instruction qu'en dehors d'une période de reprise de ses fonctions d'ATSEM à mi-temps thérapeutique du 11 octobre 2010 au 10 avril 2011, Mme Biron a été placée, sans discontinuité, en congé de maladie pour accident de service depuis le 9 décembre 2007. Le 18 janvier 2010, elle a bénéficié de la reconnaissance de sa qualité de travailleur handicapé par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées, dont l'équipe disciplinaire avait constaté que les possibilités pour Mme Biron d'obtenir ou de conserver un emploi étaient réduites. Après que sa maladie a été reconnue imputable au service par la commune de Teuillac par un arrêté du 30 octobre 2014, Mme Biron a informé le maire de la commune de son souhait de reprendre une activité sur un poste aménagé avant de demander le 24 octobre 2015 à cette même autorité de transmettre à la commission de réforme sa demande de mise à la retraite pour invalidité. Le 17 février 2016, le comité médical départemental a reconnu Mme Biron inapte à ses fonctions d'ATSEM et la commune de Teuillac lui a alors demandé, le 26 avril 2016, de lui transmettre les documents nécessaires à la recherche de son reclassement, sans obtenir de réponse. Or, il ne résulte pas de l'instruction qu'entre avril 2016 et le 23 novembre 2017, date de saisine de la commission de réforme pour qu'elle se prononce sur son aptitude à l'exercice de ses fonctions, la commune de Teuillac aurait engagé une procédure ni sollicité l'avis d'aucune instance consultative, ni d'un médecin expert quant à la situation administrative et médicale de son agent. Il résulte également de l'instruction que ce n'est que le 13 décembre 2018 que la commune de Teuillac a transmis à la caisse nationale de retraite des agents des collectivités territoriales (CNRACL) un dossier d'études des droits à pension pour invalidité de Mme Biron. 13. Ainsi, il appartenait à la commune de Teuillac dès le courant de l'année 2016 d'engager la procédure permettant d'établir, après consolidation de son état de santé, l'aptitude de Mme Biron à reprendre son service et d'examiner si elle pouvait, le cas échéant, bénéficier de l'adaptation de son poste de travail ou, à défaut, être mise en mesure de demander son reclassement dans un emploi. Ainsi, l'ensemble de ces procédures pouvaient aboutir au plus tard au 31 décembre 2018, si elles avaient été menées avec une diligence adéquate par la commune de Teuillac. 14. Dans ces conditions, la communauté de communes de Couserans-Pyrénées est fondée à demander la réformation du jugement sur ce point et à demander que seuls les traitements que la commune de Teuillac justifie avoir versés à Mme Biron entre le 9 décembre 2007 et le 31 décembre 2018 soient mis à sa charge. Le jugement doit par suite être réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt. Sur la requête n° 22BX02005 : 15. A la demande de Mme Biron, le président de la Cour a, par une ordonnance du 30 août 2022, décidé l'ouverture d'une procédure juridictionnelle en vue de l'exécution du jugement n° 1804139 du 21 septembre 2021 qui fait l'objet du présent arrêt. 16. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. La juridiction peut également prescrire d'office cette mesure. ". Aux termes de l'article L. 911-4 du même code : " En cas d'inexécution d'un jugement ou d'un arrêt, la partie intéressée peut demander à la juridiction, une fois la décision rendue, d'en assurer l'exécution. (...) Elle peut fixer un délai d'exécution et prononcer une astreinte. ". 17. Il appartient au juge saisi d'une demande d'exécution d'une décision de justice sur le fondement de l'article L. 911-4 d'apprécier l'opportunité de compléter les mesures déjà prescrites ou qu'il prescrit lui-même par la fixation d'un délai d'exécution et le prononcé d'une astreinte suivi, le cas échéant, de la liquidation de celle-ci, en tenant compte tant des circonstances de droit et de fait existant à la date de sa décision que des diligences déjà accomplies par les parties tenues de procéder à l'exécution de la chose jugée ainsi que de celles qui sont encore susceptibles de l'être. 18. En premier lieu, il résulte de l'instruction que Mme Biron a perçu la somme de 119 980,70 euros en réparation de ses préjudices découlant de sa maladie d'origine professionnelle et la somme de 1 100 euros pour les frais d'expertise et la somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que l'établit le mandat de paiement émis le 13 janvier 2023 par la communauté de communes de Couserans-Pyrénées. 19. En deuxième lieu, le tribunal a condamné la commune de Teuillac à verser à Mme Biron la somme de 5 000 euros au titre de son préjudice moral et a enjoint à la commune de Teuillac de payer à Mme Biron le complément de rémunération correspondant à la fraction des traitements dont elle a été illégalement privée. Il résulte de la lettre de la commune de Teuillac du 1er juin 2022, non contestée par Mme Biron, que la commune de Teuillac a versé à Mme Biron les sommes de 5 000 euros et 1 200 euros en application du jugement précité ainsi que les traitements dont elle a été illégalement privée jusqu'à sa mise à la retraite. 20. Par suite, le jugement n° 1804139 du 21 septembre 2021 dont il n'était pas fait appel de ces condamnations a été exécuté sur ces points. Il n'y a dès lors plus lieu d'y statuer. 21. En troisième lieu, le tribunal a condamné la communauté de communes de Couserans-Pyrénées à verser à la commune de Teuillac la somme de 720,36 euros et il ne résulte pas de l'instruction que la communauté de communes a exécuté le jugement sur ce point. Par suite, il y a lieu d'enjoindre à la communauté de communes de verser à la commune de Teuillac la somme de 720,36 euros correspondant à une cure thermale, sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la période de deux mois suivant la notification du présent arrêt. 22. En dernier lieu, le tribunal a condamné la communauté de communes de Couserans-Pyrénées à verser à la commune de Teuillac les sommes correspondant aux traitements payés par cette dernière à Mme Biron durant la période du 9 décembre 2007 au 31 décembre 2019. Par le présent arrêt, la Cour réforme partiellement le jugement n° 1804239 du 22 septembre 2021 du tribunal administratif de Bordeaux sur ce point. Par suite, dans les circonstances de l'espèce, les conclusions tendant à l'exécution du jugement sur ce point présentées par la commune de Teuillac sont rejetées. Sur les frais d'instance : 23. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de la communauté de communes de Couserans-Pyrénées qui n'est pas la partie perdante dans l'instance n° 21BX04225, la somme demandée par la commune de Teuillac au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de la commune de Teuillac la somme demandée au même titre par la communauté de communes de Couserans-Pyrénées. Au titre de l'instance n° 22BX02005, il y a lieu de mettre à la charge de la communauté de communes Couserans-Pyrénées une somme de 1 000 euros à verser à Mme Biron en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DECIDE : Article 1er : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 22BX02005 en tant qu'elles concernent la demande de Mme Biron. Article 2 : La communauté de communes de Couserans-Pyrénées est condamnée à verser à la commune de Teuillac les sommes correspondantes aux traitements payés par cette dernière à Mme Biron pendant la période du 9 décembre 2007 au 31 décembre 2018. Article 3 : Le jugement n° 1804239 du 22 septembre 2021 du tribunal administratif de Bordeaux est réformé en ce qu'il a de contraire aux articles 1er et 2 du présent arrêt. Article 4 : Il est enjoint à la communauté de communes Couserans-Pyrénées de verser à la commune de Teuillac la somme de 720,36 euros, sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt. Article 5 : la communauté de communes Couserans-Pyrénées versera à Mme Biron une somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 6 : Le surplus des conclusions des requêtes est rejeté. Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à la communauté de communes Couserans-Pyrénées, à la commune de Teuillac, à Mme C... Biron, à la CPAM du Tarn et à la CPAM de la Gironde. Délibéré après l'audience du 8 janvier 2024 à laquelle siégeaient : Mme Ghislaine Markarian, présidente, M. Frédéric Faïck, président-assesseur, Mme Caroline Gaillard, première conseillère, Rendu public par mise à disposition au greffe, le 8 février 2024. La rapporteure, Caroline B... La présidente, Ghislaine Markarian La greffière, Catherine JussyLa République mande et ordonne au préfet de la Gironde en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. N° 21BX04225-22BX02005 2
Cours administrative d'appel
Bordeaux
CAA de BORDEAUX, 6ème chambre, 08/02/2024, 21BX04225, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme C... Biron a demandé au tribunal administratif de Bordeaux : - d'annuler la décision implicite de la commune de Teuillac et la décision du 20 juillet 2018 de la communauté de communes Couserans-Pyrénées rejetant sa réclamation indemnitaire préalable et sa demande tendant à ce que sa situation soit régularisée avec sa mutuelle, au regard de ses salaires et de son avancement, ainsi que sa demande tendant à être placée à la retraite pour invalidité imputable au service à défaut d'un reclassement ; - de condamner la commune de Teuillac et la communauté de communes Couserans-Pyrénées à lui verser la somme de 335 704,21 euros en réparation de l'ensemble de ses préjudices découlant de sa maladie, la somme de 10 000 euros en réparation de son préjudice moral et des troubles subis dans ses conditions d'existence ainsi que la somme de 60 000 euros au titre de l'allocation temporaire d'invalidité ; - de condamner la commune de Teuillac à lui payer une somme qui ne saurait être inférieure à 30 000 euros au titre des rémunérations qui auraient dû lui être versées pendant ses congés de maladie imputables au service ; - d'enjoindre à la commune de Teuillac de régulariser sa situation au titre de la mutuelle nationale territoriale et d'enjoindre à la commune de Teuillac et à la communauté de communes Couserans-Pyrénées de régulariser sa situation au titre de l'avancement et de la retraite et de procéder à liquidation et au versement de l'allocation temporaire d'invalidité qui lui est due, et de la placer à la retraite pour invalidité imputable au service avec un taux qui ne serait être inférieur à 30 %, sauf reclassement possible. Par un jugement n° 1804139 du 22 septembre 2021, le tribunal administratif de Bordeaux a condamné la communauté de communes Couserans-Pyrénées à verser à Mme Biron la somme de 119 980, 70 euros, a condamné la commune de Teuillac à verser à Mme Biron la somme de 5 000 euros et a annulé la décision implicite par laquelle le maire de la commune de Teuillac a refusé de verser à Mme Biron la fraction des traitements dont elle a été illégalement privée. Le tribunal a enjoint à la commune de Teuillac de payer à Mme Biron le complément de rémunération correspondant à la fraction des traitements dont elle a été illégalement privée et a condamné la communauté de communes de Couserans-Pyrénées à verser à la commune de Teuillac la somme de 720,36 euros, ainsi que la somme correspondant aux traitements payés par cette dernière à Mme Biron pendant la période du 9 décembre 2007 au 31 décembre 2019 et les frais d'expertise. Procédure devant la Cour : I. Sous le n° 21BX04225, par une requête et des mémoires, enregistrés, les 16 novembre 2021, 25 octobre 2023, la communauté de communes Couserans-Pyrénées, représentée par la société Urbi et Orbi avocats, agissant par Me Magrini, demande à la Cour : 1°) de réformer partiellement le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 22 septembre 2021 précité ; 2°) de limiter sa condamnation au versement à la commune de Teuillac de la somme correspondant seulement aux traitements payés par cette dernière à Mme Biron pendant la période du 9 décembre 2007 au 31 décembre 2017, et non jusqu'au 31 décembre 2019, et de réformer le jugement en ce qu'il a de contraire à l'arrêt à intervenir ; 3°) de mettre à la charge de la commune de Teuillac une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - en jugeant qu'elle devait supporter la charge des traitements de Mme Biron entre le 9 décembre 2007 et le 31 décembre 2019, le tribunal a commis une erreur d'appréciation ; d'une part, le comportement de la commune de Teuillac a été de nature à retarder la reprise de l'agent, son reclassement ou sa mise à la retraite ; d'autre part, la commune de Teuillac a été plus que négligente dans la gestion de la carrière de Mme Biron ; ainsi dès la fin de sa reprise à mi-temps thérapeutique le 10 avril 2011, la commune de Teuillac aurait dû engager la procédure permettant d'établir son aptitude à exercer ses fonctions et examiner si elle pouvait bénéficier de l'adaptation de son poste de travail ou être mise en mesure de demander son reclassement si elle était déclarée en mesure d'occuper les fonctions correspondantes ; or, il s'est passé quatre années durant lesquelles la commune n'a rien mis en œuvre pour entamer le reclassement de l'agent ou procéder à une mise à la retraite pour invalidité ; - en outre, par un avis du 17 février 2016, le comité médical départemental a indiqué que l'agent était inapte à ses fonctions ; par courrier du 28 avril 2016, la commune a alors demandé à l'agent d'engager une procédure de reclassement mais cette demande n'a pas été suivie d'effet ; rien ne s'est alors passé avant l'année 2018 ; les premiers juges ont estimé que la procédure de reclassement aurait pu aboutir le 31 décembre 2019 commettant une erreur d'appréciation dès lors qu'elle aurait pu aboutir dans le délai raisonnable d'un an, soit au 31 décembre 2017. Par des mémoires en défense, enregistrés le 7 août 2023 et le 14 novembre 2023, la commune de Teuillac, représentée par la SCP Kappelhoff-Lançon-Valdes, agissant par Me Valdes, conclut : - à la confirmation du jugement attaqué en ce qu'il a d'une part condamné la communauté de communes Couserans-Pyrénées à réparer l'entier préjudice de Mme Biron et d'autre part déclaré recevable son action récursoire à l'encontre de la communauté de communes ; - à la réformation du jugement attaqué en ce qu'il a limité la période de remboursement des traitements dus à Mme Biron par la communauté de communes Couserans-Pyrénées à la commune de Teuillac jusqu'au 31 décembre 2019 et non jusqu'à sa mise en retraite ; - à la condamnation de la communauté de communes à lui rembourser, d'une part, la somme de 388 165,56 euros correspondant aux traitements versés à Mme Biron par la commune de Teuillac depuis 2007 jusqu'à sa mise à la retraite pour invalidité et, d'autre part, la somme de 720,36 euros correspondant à la facture de la cure thermale de Mme Biron et à la note de consultation du docteur A... ; - et, en outre, à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de la communauté de communes de Couserans-Pyrénées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés ; Mme Biron a sollicité sa reprise du travail pour la fin de l'année 2015 ainsi que la réalisation d'un bilan de compétences en 2016 mais n'a jamais donné suite au courrier du 28 avril 2016 de la commune de Teuillac lui demandant de produire son bilan de compétence afin de pouvoir procéder à une recherche de reclassement ; la commission de réforme a ensuite rendu le 4 avril 2018 un avis d'inaptitude définitive à toute fonction et, par un avis du 6 juin 2018, elle a rendu un avis favorable à sa mise à la retraite pour invalidité imputable au service ; ces éléments démontrent que la commune de Teuillac s'est particulièrement préoccupée de son agent et a été active dans la gestion de son dossier ; - s'agissant du versement des salaires, à ce jour et depuis 2007, la commune de Teuillac a versé à Mme Biron la somme de 318 361,15 euros à titre de traitements ; la Cour doit dès lors condamner la communauté de communes à lui rembourser cette somme ; - au regard des pièces versées, la communauté de communes doit être condamnée à rembourser à la commune de Teuillac la somme de 69 804,41 euros, soit un total de 388 156,56 euros correspondant au versement de son traitement depuis 2007 jusqu'à sa mise en retraite pour invalidité, ainsi que les frais de cure thermale. Par ordonnance du 26 octobre 2023, la clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 27 novembre 2023. Par un courrier du 21 décembre 2023, les parties ont été informées, qu'en application de l'article L. 611-7 du code de justice administrative, la Cour était susceptible de se fonder sur le moyen soulevé d'office tiré de l'irrecevabilité des conclusions incidentes présentées par la commune de Teuillac tendant à la condamnation de la communauté de communes de Couserans-Pyrénées à lui verser la somme de 720,36 euros correspondant à une cure thermale. II. Sous le n° 22BX02005, par un courrier du 21 février 2022, Mme C... Biron, représentée par la société d'avocats Cabinet Laveissière, agissant par Me Laveissière, a demandé à la Cour l'exécution du jugement du tribunal administratif de Bordeaux n° 1804139 du 22 septembre 2021. Par un courrier du 1er juin 2022, la commune de Teuillac, représentée par la SCP Kappelhoff-Lançon-Valdes, agissant par Me Valdes, a fait valoir, d'une part, que les sommes de 5 000 euros et 1 200 euros ont été versées à Mme Biron, d'autre part, que la communauté de communes Couserans-Pyrénées ne lui a toujours pas versé la somme de 223 303,74 euros correspondant aux traitements payés à Mme Biron du 9 décembre 2007 au 31 décembre 2019, ainsi que les frais de cure thermale. Par une ordonnance du 30 août 2022, une procédure juridictionnelle a été ouverte sous le n° 22BX02005 en vue de prescrire, s'il y a lieu, les mesures nécessaires à l'exécution du jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 22 septembre 2021. Par un mémoire, enregistré le 10 novembre 2022, Mme Biron demande à la Cour d'enjoindre à la communauté de communes Couserans-Pyrénées d'exécuter le jugement attaqué dans le délai d'un mois, sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de l'arrêt à intervenir, et, en outre, à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de cette dernière sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un mémoire en défense, enregistré le 19 octobre 2023, la communauté de communes de Couserans-Pyrénées, représentée par la société Urbi et Orbi avocats, agissant par Me Magrini, demande à la Cour de prononcer un non-lieu à statuer dès lors qu'elle a exécuté le jugement. Elle indique que la somme totale de 122 280,70 euros a été mise en paiement le 13 janvier 2023. Par ordonnance du 19 octobre 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 27 novembre 2023. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 ; - le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ; - le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ; - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - le code des communes ; - le code de la sécurité sociale ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Au cours de l'audience publique, ont été entendus : - le rapport de Mme B..., - les conclusions de M. Duplan, rapporteur public, - les observations de Me Brouquières, substituant Me Magrini, pour la communauté de communes Couserans-Pyrénées, Me Valdes pour la commune de Teuillac et Me Roncin, substituant Me Laveissière, pour Mme Biron. Vu la note en délibéré, enregistrée le 9 janvier 2024, présentée par la commune de Teuillac dans le dossier 21BX04225. Considérant ce qui suit : 1. Mme C... Biron, agent territorial spécialisé des écoles maternelles (ATSEM), titularisée par un arrêté du 10 août 2005 du président de la communauté de communes du canton de Massat (Ariège), a présenté dans le courant de l'année 2006, à l'âge de 32 ans, des paresthésies des deux mains puis des membres inférieurs, symptomatiques de ce qui a alors été diagnostiqué comme une méningo-radiculite. Mme Biron a ensuite été recrutée à compter du 1er août 2007, par voie de mutation, par la commune de Teuillac (Gironde). Elle a subi des récidives de polyradiculonévrite aux mois de novembre et décembre 2007 et a été placée en congé maladie ordinaire à compter du 9 décembre 2007, puis en congé de longue maladie à compter du 7 janvier 2014, après avoir été reconnue comme travailleur handicapé le 1er septembre 2009 par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées. Par un jugement du 4 février 2013, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé un premier arrêté du maire de Teuillac du 29 avril 2010 refusant de reconnaître comme imputable au service la pathologie contractée par Mme Biron et lui a enjoint de réexaminer la demande de l'intéressée. Par un jugement du 6 octobre 2015, le tribunal a annulé un deuxième arrêté du maire de Teuillac du 4 avril 2014 rejetant de nouveau la demande de Mme Biron d'imputabilité au service de sa pathologie. Dans l'intervalle, et après une expertise médicale, qui a conclu à la contamination par la fièvre Q ou méningo-encéphalite à Coxiella Borneti de Mme Biron dans le cadre des fonctions exercées au sein de l'école de Soulan, la commission départementale de réforme a reconnu, le 22 janvier 2014, l'imputabilité au service de sa maladie à compter du 1er janvier 2006. Par un troisième arrêté du 30 octobre 2014, la commune de Teuillac a reconnu que la pathologie de Mme Biron était imputable au service accompli au sein de la communauté de communes. Par un jugement du 13 octobre 2015, confirmé par un arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 16 octobre 2017, le tribunal a rejeté la demande présentée par la communauté de communes, tendant à l'annulation de ce dernier arrêté. 2. Par un courrier du 22 mai 2018, Mme Biron a adressé une réclamation indemnitaire à la commune de Teuillac et à la communauté de communes Couserans-Pyrénées et leur a demandé de procéder à la régularisation de sa situation administrative et financière, et de la placer à la retraite pour invalidité imputable au service, sauf si un reclassement était possible. Elle a demandé au tribunal l'annulation de la décision implicite née le 24 juillet 2018 du silence gardé par le maire de la commune de Teuillac sur ses demandes de versement de traitements, de l'allocation temporaire d'invalidité et de non placement à la retraite pour invalidité, et l'annulation de la décision du 20 juillet 2018 par laquelle le président de la communauté de communes Couserans-Pyrénées a rejeté ces mêmes demandes. Elle a également sollicité la condamnation des collectivités en cause à réparer les divers préjudices qu'elle a subis et qu'il leur soit enjoint de procéder à la régularisation de sa situation administrative et financière. 3. Par un jugement du 22 septembre 2021, le tribunal administratif de Bordeaux a condamné la communauté de communes Couserans-Pyrénées à verser à Mme Biron la somme de 119 980,70 euros au titre de divers préjudices, a condamné la commune de Teuillac à verser à Mme Biron la somme de 5 000 euros au titre de son préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence, a annulé la décision implicite par laquelle la commune de Teuillac a refusé de payer à Mme Biron la fraction des traitements dont elle a été illégalement privée. Le tribunal a enjoint à la commune de Teuillac de payer à Mme Biron le complément de rémunération correspondant à la fraction des traitements dont elle a été illégalement privée et a condamné la communauté de communes de Couserans-Pyrénées à verser à la commune de Teuillac la somme de 720,36 euros, ainsi que la somme correspondant aux traitements payés par cette dernière à Mme Biron pendant la période du 9 décembre 2007 au 31 décembre 2019 et a mis à sa charge les frais d'expertise. 4. Par sa requête n° 21BX04225, la communauté de communes Couserans-Pyrénées fait appel de ce jugement dont elle demande la réformation en tant seulement qu'il l'a condamnée à verser les traitements dus à Mme Biron jusqu'au 31 décembre 2019 et demande que le terme du versement de ces traitements soit fixé au 31 décembre 2017. La commune de Teuillac conclut au rejet de cette requête et, par la voie de l'appel incident, demande que la condamnation de la communauté de communes au paiement des traitements dus à Mme Biron soit prolongée jusqu'à sa mise à la retraite pour invalidité et que la somme de 720,36 euros correspondant à une cure thermale soit mise à la seule charge de la communauté de communes de Couserans-Pyrénées. Par la requête n° 22BX02005, Mme Biron et la commune de Teuillac demandent l'exécution du jugement. Sur la requête n° 21BX04225 : En ce qui concerne la recevabilité : 5. La commune de Teuillac réitère devant la Cour ses conclusions tendant à la condamnation de la communauté de communes de Couserans-Pyrénées à lui verser la somme de 720,36 euros correspondant à une cure thermale. Ainsi que les parties en ont été informées par courrier du 21 décembre 2023, de telles conclusions sont irrecevables dès lors que la commune de Teuillac a déjà obtenu satisfaction devant le tribunal sur ce point et ne justifie par suite pas d'un intérêt pour agir. En ce qui concerne le bien-fondé du jugement : 6. D'une part, aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " Le fonctionnaire en activité a droit : / (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants (...) / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident. (...) La collectivité est subrogée dans les droits éventuels du fonctionnaire victime d'un accident provoqué par un tiers jusqu'à concurrence du montant des charges qu'elle a supportées ou supporte du fait de cet accident. Elle est admise à poursuivre directement contre le responsable du dommage ou son assureur le remboursement des charges patronales afférentes aux rémunérations maintenues ou versées audit fonctionnaire pendant la période d'indisponibilité de celui-ci (...) ". 7. D'autre part, aux termes de l'article 81 de la même loi : " Les fonctionnaires territoriaux reconnus, par suite d'altération de leur état physique, inaptes à l'exercice de leurs fonctions peuvent être reclassés dans les emplois d'un autre cadre d'emploi ou corps s'ils ont été déclarés en mesure de remplir les fonctions correspondantes. / Le reclassement est subordonné à la présentation d'une demande par l'intéressé ". Aux termes de l'article 30 du décret du 26 décembre 2003 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la caisse nationale de retraites des agents des collectivités territoriales : " Le fonctionnaire qui se trouve dans l'impossibilité définitive et absolue de continuer ses fonctions par suite de maladie, blessure ou infirmité grave dûment établie peut être admis à la retraite soit d'office, soit sur demande. / Lorsque l'admission à la retraite pour invalidité intervient après que les conditions d'ouverture du droit à une pension de droit commun sont remplies par ailleurs, la liquidation des droits s'effectue selon la réglementation la plus favorable pour le fonctionnaire. / La mise en retraite d'office pour inaptitude définitive à l'exercice de l'emploi ne peut être prononcée qu'à l'expiration des congés de maladie, des congés de longue maladie et des congés de longue durée dont le fonctionnaire bénéficie en vertu des dispositions statutaires qui lui sont applicables, sauf dans les cas prévus à l'article 39 si l'inaptitude résulte d'une maladie ou d'une infirmité que son caractère définitif et stabilisé ne rend pas susceptible de traitement. En aucun cas, elle ne pourra avoir une date d'effet postérieure à la limite d'âge du fonctionnaire sous réserve de l'application des articles 1er-1 à 1er-3 de la loi du 13 septembre 1984 susvisée ". Aux termes de l'article 36 du même décret : " Le fonctionnaire qui a été mis dans l'impossibilité permanente de continuer ses fonctions en raison d'infirmités résultant de blessures ou de maladies contractées ou aggravées, soit en service, soit en accomplissant un acte de dévouement dans un intérêt public, soit en exposant ses jours pour sauver la vie d'une ou plusieurs personnes, peut être mis à la retraite par anticipation soit sur sa demande, soit d'office, à l'expiration des délais prévus au troisième alinéa de l'article 30 et a droit à la pension rémunérant les services prévue au 2° de l'article 7 et au 2° du I de l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite (...) ". 8. En application de ces dispositions, la collectivité au service de laquelle se trouvait l'agent lors de l'accident de service doit supporter les conséquences financières de la rechute consécutive à cet accident, alors même que cette rechute est survenue alors qu'il était au service d'une nouvelle collectivité. La collectivité qui employait l'agent à la date de l'accident doit ainsi prendre en charge non seulement les honoraires médicaux et les frais exposés par celui-ci qui sont directement entraînés par la rechute mais aussi le remboursement des traitements qui lui ont été versés par la collectivité qui l'emploie à raison de son placement en congé de maladie ordinaire, de congé de longue maladie ou de congé de longue durée, dès lors que ce placement a pour seule cause la survenue de la rechute consécutive à l'accident de service. Si la collectivité qui l'emploie est tenue de verser à son agent les traitements qui lui sont dus, elle est cependant fondée à demander à la collectivité qui l'employait à la date de l'accident, par une action récursoire, le remboursement de ceux de ces traitements qui sont liés à la rechute ainsi que des éventuels honoraires médicaux et frais qu'elle aurait pris en charge du fait de cette rechute. Cette action récursoire ne peut être exercée, s'agissant des traitements, qu'au titre de la période qui est raisonnablement nécessaire pour permettre la reprise par l'agent de son service ou, si cette reprise n'est pas possible, son reclassement dans un emploi d'un autre corps ou cadre d'emplois ou encore, si l'agent ne demande pas son reclassement ou si celui-ci n'est pas possible, pour que la collectivité qui l'emploie prononce sa mise d'office à la retraite par anticipation. 9. Il résulte également des dispositions combinées citées aux points 5 et 6, que le fonctionnaire dont les blessures ou la maladie proviennent d'un accident de service, d'une maladie contractée ou aggravée en service ou de l'une des autres causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, et qui se trouve dans l'incapacité permanente de continuer ses fonctions au terme d'un délai de douze mois à compter de sa mise en congé de maladie, sans pouvoir bénéficier d'un congé de longue maladie ou d'un congé de longue durée, doit bénéficier de l'adaptation de son poste de travail ou, si celle-ci n'est pas possible, être mis en mesure de demander son reclassement dans un emploi d'un autre corps ou cadre d'emplois, s'il a été déclaré en mesure d'occuper les fonctions correspondantes. S'il ne demande pas son reclassement ou si celui-ci n'est pas possible, il peut être mis d'office à la retraite par anticipation. L'administration a l'obligation de maintenir l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre le service ou jusqu'à sa mise à la retraite. 10. La communauté de communes de Couserans-Pyrénées soutient que la date du 31 décembre 2019, qui correspond selon les premiers juges à celle à laquelle il était raisonnable de penser que Mme Biron aurait pu être reclassée, est entachée d'erreur d'appréciation et doit être ramenée au 31 décembre 2017. La commune de Teuillac, par la voie de l'appel incident, soutient qu'elle n'a commis aucune faute ou retard dans la prise en charge de la situation de Mme Biron et demande la réformation du jugement en tant qu'il a fixé au 31 décembre 2019 et non à la date de la mise en retraite pour invalidité de Mme Biron la fin de la prise en charge des traitements de Mme Biron par la communauté de communes Couserans-Pyrénées. 11. Il résulte des points 5 et 6 et il n'est d'ailleurs pas contesté que la communauté de communes de Couserans-Pyrénées doit verser à Mme Biron les traitements dont cette dernière a été illégalement privée à compter du 9 décembre 2007, date de son placement en congé de maladie, et que les traitements effectivement versés par la commune de Teuillac à Mme Biron durant ses périodes d'arrêts de travail doivent être mis à la charge de la communauté de communes de Couserans-Pyrénées, dans la mesure où elle a fait elle-même toutes diligences pour mettre un terme à ces arrêts de travail. 12. Il résulte de l'instruction, et notamment du tableau récapitulatif produit par la commune de Teuillac, qui n'a pas fait l'objet de contestation, que cette dernière a payé à Mme Biron les sommes dues au titre des traitements durant ses périodes d'arrêts de travail. Il résulte également de l'instruction qu'en dehors d'une période de reprise de ses fonctions d'ATSEM à mi-temps thérapeutique du 11 octobre 2010 au 10 avril 2011, Mme Biron a été placée, sans discontinuité, en congé de maladie pour accident de service depuis le 9 décembre 2007. Le 18 janvier 2010, elle a bénéficié de la reconnaissance de sa qualité de travailleur handicapé par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées, dont l'équipe disciplinaire avait constaté que les possibilités pour Mme Biron d'obtenir ou de conserver un emploi étaient réduites. Après que sa maladie a été reconnue imputable au service par la commune de Teuillac par un arrêté du 30 octobre 2014, Mme Biron a informé le maire de la commune de son souhait de reprendre une activité sur un poste aménagé avant de demander le 24 octobre 2015 à cette même autorité de transmettre à la commission de réforme sa demande de mise à la retraite pour invalidité. Le 17 février 2016, le comité médical départemental a reconnu Mme Biron inapte à ses fonctions d'ATSEM et la commune de Teuillac lui a alors demandé, le 26 avril 2016, de lui transmettre les documents nécessaires à la recherche de son reclassement, sans obtenir de réponse. Or, il ne résulte pas de l'instruction qu'entre avril 2016 et le 23 novembre 2017, date de saisine de la commission de réforme pour qu'elle se prononce sur son aptitude à l'exercice de ses fonctions, la commune de Teuillac aurait engagé une procédure ni sollicité l'avis d'aucune instance consultative, ni d'un médecin expert quant à la situation administrative et médicale de son agent. Il résulte également de l'instruction que ce n'est que le 13 décembre 2018 que la commune de Teuillac a transmis à la caisse nationale de retraite des agents des collectivités territoriales (CNRACL) un dossier d'études des droits à pension pour invalidité de Mme Biron. 13. Ainsi, il appartenait à la commune de Teuillac dès le courant de l'année 2016 d'engager la procédure permettant d'établir, après consolidation de son état de santé, l'aptitude de Mme Biron à reprendre son service et d'examiner si elle pouvait, le cas échéant, bénéficier de l'adaptation de son poste de travail ou, à défaut, être mise en mesure de demander son reclassement dans un emploi. Ainsi, l'ensemble de ces procédures pouvaient aboutir au plus tard au 31 décembre 2018, si elles avaient été menées avec une diligence adéquate par la commune de Teuillac. 14. Dans ces conditions, la communauté de communes de Couserans-Pyrénées est fondée à demander la réformation du jugement sur ce point et à demander que seuls les traitements que la commune de Teuillac justifie avoir versés à Mme Biron entre le 9 décembre 2007 et le 31 décembre 2018 soient mis à sa charge. Le jugement doit par suite être réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt. Sur la requête n° 22BX02005 : 15. A la demande de Mme Biron, le président de la Cour a, par une ordonnance du 30 août 2022, décidé l'ouverture d'une procédure juridictionnelle en vue de l'exécution du jugement n° 1804139 du 21 septembre 2021 qui fait l'objet du présent arrêt. 16. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. La juridiction peut également prescrire d'office cette mesure. ". Aux termes de l'article L. 911-4 du même code : " En cas d'inexécution d'un jugement ou d'un arrêt, la partie intéressée peut demander à la juridiction, une fois la décision rendue, d'en assurer l'exécution. (...) Elle peut fixer un délai d'exécution et prononcer une astreinte. ". 17. Il appartient au juge saisi d'une demande d'exécution d'une décision de justice sur le fondement de l'article L. 911-4 d'apprécier l'opportunité de compléter les mesures déjà prescrites ou qu'il prescrit lui-même par la fixation d'un délai d'exécution et le prononcé d'une astreinte suivi, le cas échéant, de la liquidation de celle-ci, en tenant compte tant des circonstances de droit et de fait existant à la date de sa décision que des diligences déjà accomplies par les parties tenues de procéder à l'exécution de la chose jugée ainsi que de celles qui sont encore susceptibles de l'être. 18. En premier lieu, il résulte de l'instruction que Mme Biron a perçu la somme de 119 980,70 euros en réparation de ses préjudices découlant de sa maladie d'origine professionnelle et la somme de 1 100 euros pour les frais d'expertise et la somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que l'établit le mandat de paiement émis le 13 janvier 2023 par la communauté de communes de Couserans-Pyrénées. 19. En deuxième lieu, le tribunal a condamné la commune de Teuillac à verser à Mme Biron la somme de 5 000 euros au titre de son préjudice moral et a enjoint à la commune de Teuillac de payer à Mme Biron le complément de rémunération correspondant à la fraction des traitements dont elle a été illégalement privée. Il résulte de la lettre de la commune de Teuillac du 1er juin 2022, non contestée par Mme Biron, que la commune de Teuillac a versé à Mme Biron les sommes de 5 000 euros et 1 200 euros en application du jugement précité ainsi que les traitements dont elle a été illégalement privée jusqu'à sa mise à la retraite. 20. Par suite, le jugement n° 1804139 du 21 septembre 2021 dont il n'était pas fait appel de ces condamnations a été exécuté sur ces points. Il n'y a dès lors plus lieu d'y statuer. 21. En troisième lieu, le tribunal a condamné la communauté de communes de Couserans-Pyrénées à verser à la commune de Teuillac la somme de 720,36 euros et il ne résulte pas de l'instruction que la communauté de communes a exécuté le jugement sur ce point. Par suite, il y a lieu d'enjoindre à la communauté de communes de verser à la commune de Teuillac la somme de 720,36 euros correspondant à une cure thermale, sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la période de deux mois suivant la notification du présent arrêt. 22. En dernier lieu, le tribunal a condamné la communauté de communes de Couserans-Pyrénées à verser à la commune de Teuillac les sommes correspondant aux traitements payés par cette dernière à Mme Biron durant la période du 9 décembre 2007 au 31 décembre 2019. Par le présent arrêt, la Cour réforme partiellement le jugement n° 1804239 du 22 septembre 2021 du tribunal administratif de Bordeaux sur ce point. Par suite, dans les circonstances de l'espèce, les conclusions tendant à l'exécution du jugement sur ce point présentées par la commune de Teuillac sont rejetées. Sur les frais d'instance : 23. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de la communauté de communes de Couserans-Pyrénées qui n'est pas la partie perdante dans l'instance n° 21BX04225, la somme demandée par la commune de Teuillac au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de la commune de Teuillac la somme demandée au même titre par la communauté de communes de Couserans-Pyrénées. Au titre de l'instance n° 22BX02005, il y a lieu de mettre à la charge de la communauté de communes Couserans-Pyrénées une somme de 1 000 euros à verser à Mme Biron en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DECIDE : Article 1er : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 22BX02005 en tant qu'elles concernent la demande de Mme Biron. Article 2 : La communauté de communes de Couserans-Pyrénées est condamnée à verser à la commune de Teuillac les sommes correspondantes aux traitements payés par cette dernière à Mme Biron pendant la période du 9 décembre 2007 au 31 décembre 2018. Article 3 : Le jugement n° 1804239 du 22 septembre 2021 du tribunal administratif de Bordeaux est réformé en ce qu'il a de contraire aux articles 1er et 2 du présent arrêt. Article 4 : Il est enjoint à la communauté de communes Couserans-Pyrénées de verser à la commune de Teuillac la somme de 720,36 euros, sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt. Article 5 : la communauté de communes Couserans-Pyrénées versera à Mme Biron une somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 6 : Le surplus des conclusions des requêtes est rejeté. Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à la communauté de communes Couserans-Pyrénées, à la commune de Teuillac, à Mme C... Biron, à la CPAM du Tarn et à la CPAM de la Gironde. Délibéré après l'audience du 8 janvier 2024 à laquelle siégeaient : Mme Ghislaine Markarian, présidente, M. Frédéric Faïck, président-assesseur, Mme Caroline Gaillard, première conseillère, Rendu public par mise à disposition au greffe, le 8 février 2024. La rapporteure, Caroline B... La présidente, Ghislaine Markarian La greffière, Catherine JussyLa République mande et ordonne au préfet de la Gironde en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. N° 21BX04225-22BX02005 2
Cours administrative d'appel
Bordeaux
CAA de BORDEAUX, 6ème chambre, 08/02/2024, 22BX01557, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Le groupe hospitalier de La Rochelle-Ré-Aunis a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler, d'une part, le titre exécutoire émis le 25 octobre 2019 par le Fonds pour l'insertion des personnes handicapées dans la fonction publique (FIPHFP) pour le recouvrement de la somme de 352 896 euros, d'autre part, la décision du 5 mars 2020 du directeur du fonds rejetant sa réclamation présentée contre ce titre, et enfin, la décision du 2 février 2021 rejetant sa nouvelle réclamation formée à la suite d'une dernière notification du titre exécutoire mis à jour. Le groupe hospitalier La Rochelle-Ré-Aunis a également demandé au tribunal de le décharger de l'obligation de payer la somme en litige. Par un jugement n°s 2000994-2100883 du 12 avril 2022, le tribunal a rejeté ses demandes. Procédure devant la Cour : Par une requête, enregistrée le 7 juin 2022, le groupe hospitalier de La Rochelle-Ré-Aunis, représenté par la SCP Drouineau, Veyrier, Le Lain, Verger, agissant par Me Drouineau, demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers n° 2000994, 2100883 du 12 avril 2022 ; 2°) d'annuler le titre exécutoire en litige ; 3°) de le décharger de l'obligation de payer la somme de 352 896 euros ; 4°) de mettre à la charge du Fonds pour l'insertion des personnes handicapées dans la fonction publique une somme de 3 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - le titre exécutoire a été émis par une autorité incompétente ; - le titre exécutoire est entaché d'un vice de forme dès lors qu'il ne comporte pas le nom, le prénom et la qualité de l'autorité qui l'a émis ; par ailleurs, le bordereau du titre exécutoire en litige n'a pas été produit, ce qui ne permet pas de vérifier s'il a bien été signé ; - le titre exécutoire a été émis en méconnaissance de l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt n° 16BX01151 de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 6 février 2018, qui avait annulé un précédent titre exécutoire émis le 3 mai 2013 pour le recouvrement de la même somme ; aucun changement dans les circonstances de fait ou de droit n'est intervenu entre temps pour justifier l'émission du titre contesté ; - la créance portée sur le titre exécutoire procède d'une erreur de droit au regard des dispositions du décret n° 89-376 du 8 juin 1989 relatif au reclassement des fonctionnaires pour raison de santé ; la réglementation applicable permet d'intégrer les fonctionnaires ayant bénéficié d'un aménagement de leur poste de travail pour des raisons médicales dans le décompte annuel des bénéficiaires de l'obligation d'emploi des travailleurs handicapés à déclarer au FIPHFP ; les agents concernés n'ont pas bénéficié d'un simple aménagement de leur poste de travail dès lors qu'ils ont été changés de service ; c'est à tort que le FIPHFP a estimé que les agents concernés devaient être exclus du décompte des bénéficiaires de l'obligation d'emploi ; - si le titre exécutoire précise qu'il annule et remplace un précédent titre émis en 2013 en se fondant sur une créance détenue par le Fonds pour l'insertion des personnes handicapées dans la fonction publique (FIPHFP), le Conseil d'Etat n'a pas, par sa décision du 4 octobre 2019, reconnu le bien-fondé d'une telle créance ; - le contrôle effectué par le FIPHFP est entaché d'incohérences dès lors qu'il a comptabilisé différemment, au titre des bénéficiaires de l'obligation d'emploi, des agents placés dans la même situation ; il n'a pas procédé à un examen au cas par cas des agents concernés par cette comptabilisation ; de même, le FIPHP a remboursé dans un premier temps la contribution avant de reprendre le titre exécutoire en litige en déclarant le mettre à jour. Par un mémoire en défense, enregistré le 10 mai 2023, le Fonds pour l'insertion des personnes handicapées dans la fonction publique (FIPHP), représenté par la SCP Normand et Associés, agissant par Me Boussier, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge du groupe hospitalier au titre des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que les moyens de la requête sont infondés. Par ordonnance du 11 mai 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 19 juin 2023 à 12h00. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code du travail ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ; - l'ordonnance n° 2007-329 du 12 mars 2007 ; - le décret n° 89-376 du 8 juin 1989 ; - le décret n° 2006-501 du 3 mai 2006 ; - le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 ; - l'arrêté du 20 octobre 2015 portant nomination du directeur du fonds pour l'insertion des personnes handicapées dans la fonction publique ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. B..., - les conclusions de M. Duplan, rapporteur public, - et les observations de Me Porchet pour le groupe hospitalier La Rochelle-Ré-Aunis et de Me de Waziers pour le Fonds pour l'insertion des personnes handicapées dans la fonction publique. Considérant ce qui suit : 1. Dans le cadre de l'application des dispositions du code du code du travail relatives à l'obligation d'emploi des travailleurs handicapés, le groupe hospitalier de La Rochelle-Ré-Aunis a adressé en 2012 au Fonds pour l'insertion des personnes handicapées dans la fonction publique (FIPHFP) sa déclaration portant sur le nombre de ses agents employés en qualité de bénéficiaires de l'obligation d'emploi des personnes handicapées au titre de l'année 2011 en vue du calcul de sa contribution annuelle. Après avoir contrôlé cette déclaration, le FIPHFP a estimé que certains des agents déclarés ne pouvaient être comptabilisés comme bénéficiaires de l'obligation d'emploi, et a recalculé en conséquence le montant dû par le groupe hospitalier au titre de sa contribution annuelle pour l'emploi de travailleurs handicapés. En conséquence, le FIPHFP a adressé à l'établissement hospitalier, par courrier du 3 mai 2013, un titre exécutoire d'un montant de 352 896 euros. Ce titre exécutoire a cependant été annulé, à la demande du groupe hospitalier La Rochelle-Ré-Aunis, par un arrêt de la Cour n° 16BX01151 du 6 février 2018, devenu définitif après rejet du pourvoi formé par le FIPHFP par une décision du Conseil d'Etat n° 419162 du 4 octobre 2019. 2. Le 25 octobre 2019, le FIPHFP a émis un nouveau titre exécutoire mettant à la charge du groupe hospitalier de La Rochelle-Ré-Aunis la même somme de 352 896 euros. La réclamation que le groupe hospitalier a adressée, le 10 décembre 2019, à l'encontre de ce titre a été rejetée par une décision du directeur du FIPHFP du 5 mars 2020. Le 15 septembre 2020, le directeur du FIPHFP a procédé à une nouvelle notification du titre exécutoire mis à jour et la nouvelle réclamation que le groupe hospitalier a effectuée à l'encontre de ce titre, le 9 novembre 2020, a été rejetée le 2 février 2021. Le groupe hospitalier de La Rochelle-Ré-Aunis a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler le titre exécutoire du 25 octobre 2019, d'annuler les décisions des 5 mars 2020 et 2 février 2021 rejetant ses réclamations préalables et de le décharger de l'obligation de payer la somme de 352 896 euros. Par un jugement rendu le 12 avril 2022, dont le groupe hospitalier de La Rochelle Ré-Aunis relève appel, le tribunal a rejeté ces demandes. Sur la légalité du titre exécutoire du 25 octobre 2019 : En ce qui concerne la régularité du titre exécutoire : 3. En premier lieu, le titre exécutoire émis le 25 octobre 2019 est signé par le directeur du FIPHFP, M. A... C..., nommé par arrêté ministériel du 20 octobre 2015, publié au Journal officiel de la République française le 24 octobre suivant. Il résulte des dispositions du 10° de l'article 18 du décret du 3 mai 2006 relatif au FIPHFP, que le directeur de cet établissement est compétent pour émettre les titres exécutoires prévus au dernier alinéa du IV de l'article L. 323-8-6-1 du code du travail relatif à la contribution annuelle due par les employeurs au titre de leur obligation d'emploi des travailleurs handicapés. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte manque en fait. 4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Toute décision prise par une administration comporte la signature de son auteur ainsi que la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci ". Les titres exécutoires émis par les personnes publiques doivent, en vertu de ces dispositions, être signés et comporter les prénom, nom et qualité de leur auteur. 5. Toutefois, il résulte des articles L. 100-1 et L. 100-3 du code des relations entre le public et l'administration que les dispositions de ce code ne s'appliquent pas, sauf exception, aux relations entre personnes morales de droit public. Les dispositions précitées de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration ne sont ainsi pas applicables dans un litige opposant deux personnes publiques. Dès lors, il ne peut être utilement soutenu qu'un titre exécutoire émis par un établissement public à l'encontre d'un autre établissement public méconnaîtrait cette disposition. Par suite, le moyen tiré de ce que le titre exécutoire du 25 octobre 2019 émis par le FIPHFP, qui est un établissement public administratif, à l'encontre du groupe hospitalier de La Rochelle-Ré-Aunis, qui est également un établissement public administratif, ne comporte pas les mentions requises par l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration est inopérant. En tout état de cause, de telles mentions figurent bien sur le titre exécutoire du 25 octobre 2019 en litige. En ce qui concerne le bien-fondé du titre exécutoire : 6. En premier lieu, l'annulation d'un titre exécutoire pour un motif de régularité en la forme n'implique pas nécessairement, compte tenu de la possibilité d'une régularisation par l'administration, l'extinction de la créance litigieuse, à la différence d'une annulation prononcée pour un motif mettant en cause le bien-fondé du titre. Il en résulte que, lorsque le requérant choisit de présenter, outre des conclusions tendant à l'annulation d'un titre exécutoire, des conclusions aux fins de décharge de la somme correspondant à la créance de l'administration, il incombe au juge administratif d'examiner prioritairement les moyens mettant en cause le bien-fondé du titre qui seraient de nature, étant fondés, à justifier le prononcé de la décharge. Dans le cas où il ne juge fondé aucun des moyens qui seraient de nature à justifier le prononcé de la décharge mais retient un moyen mettant en cause la régularité formelle du titre exécutoire, le juge n'est tenu de se prononcer explicitement que sur le moyen qu'il retient pour annuler le titre et en statuant ainsi, son jugement écarte nécessairement les moyens qui assortissaient la demande de décharge de la somme litigieuse. 7. Dans son arrêt du 6 février 2018, la Cour a annulé le titre exécutoire émis le 3 mai 2013 pour un motif de forme tiré du défaut d'indication des bases de liquidation de la créance dans le titre lui-même, ou par référence à un document joint ou précédemment adressé au débiteur. Ce faisant, la Cour a implicitement écarté les autres moyens soulevés par le groupe hospitalier de La Rochelle-Ré-Aunis mettant en cause le bien-fondé de la créance. Alors même que la Cour a prononcé la décharge de l'obligation de payer la somme en litige, le motif de forme qu'elle a retenu n'impliquait pas l'extinction de la créance en litige et laissait ouverte à l'administration la possibilité d'émettre un nouveau titre exécutoire de régularisation. Par suite, en prenant le titre exécutoire en litige du 25 octobre 2019, le FIPHFP n'a pas méconnu l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt de la Cour du 6 février 2018. 8. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 5212-2 du code du travail dans sa rédaction alors applicable : " Tout employeur emploie, dans la proportion de 6 % de l'effectif total de ses salariés, à temps plein ou à temps partiel, des travailleurs handicapés (...) mentionnés à l'article L. 5212-13 ". L'article L. 323-2 du code du travail, demeuré en vigueur par application de l'article 13 de l'ordonnance du 12 mars 2007 relative à la partie législative du nouveau code du travail, dispose que : " L'Etat et (...) les collectivités territoriales et leurs établissements publics (...) y compris ceux qui sont énumérés à l'article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière, sont assujettis (...) à l'obligation d'emploi instituée par l'article L. 323-1 ; les dispositions des articles des articles L. 323-3, L. 323-4-1, L. 323-5, L. 323-8 et L. 323-8-6-1 leur sont applicables (...). ". Aux termes de l'article L. 323-5 du code du travail : " (...) les titulaires d'un emploi réservé attribué en application des dispositions du chapitre IV du titre III du livre III du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre sont pris en compte pour le calcul du nombre de bénéficiaires de l'obligation d'emploi instituée par l'article L. 323-1. / Dans les collectivités et organismes mentionnés à l'article L. 323-2, sont également pris en compte pour le calcul du nombre de bénéficiaires de cette obligation : les agents qui ont été reclassés en application (...) des articles 71 à 75 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 (...) - les agents qui bénéficient d'une allocation temporaire d'invalidité en application de l'article 80 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 (...) ". Aux termes de l'article L. 323-8-6-1 du même code : " (...) II. - Les employeurs mentionnés à l'article L. 323-2 peuvent s'acquitter de l'obligation d'emploi instituée par cet article, en versant au fonds pour l'insertion des personnes handicapées dans la fonction publique une contribution annuelle pour chacun des bénéficiaires de la présente section qu'ils auraient dû employer. (...) IV.- La contribution mentionnée au II du présent article est due par les employeurs mentionnés à l'article L. 323-2. / Elle est calculée en fonction du nombre d'unités manquantes constatées au 1er janvier de l'année écoulée. Le nombre d'unités manquantes correspond à la différence entre le nombre total de personnes rémunérées par l'employeur auquel est appliquée la proportion de 6 %, arrondi à l'unité inférieure, et celui des bénéficiaires de l'obligation d'emploi prévue à l'article L. 323-2 qui sont effectivement rémunérés par l'employeur. (...) / Le montant de la contribution est égal au nombre d'unités manquantes, multiplié par un montant unitaire. Ce montant ainsi que ses modalités de modulation sont identiques, sous réserve des spécificités de la fonction publique, à ceux prévus pour la contribution définie à l'article L. 323-8-2 (...) ". 9. Il résulte des dispositions de l'article L. 323-5 précité du code du travail que, en sus des agents dont la qualité de travailleur handicapé a été reconnue, sont pris en compte, pour le calcul du nombre de bénéficiaires de l'obligation d'emploi instituée par l'article L. 5212-2 du code du travail, les titulaires d'un emploi réservé attribué en application du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, les agents bénéficiaires d'une allocation temporaire d'invalidité, ainsi que les agents qui ont été reclassés en application de l'article 71 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière. 10. Aux termes de l'article 71 de la loi du 9 janvier 1986, dans sa version antérieure à l'ordonnance n° 2017-1447 du 25 novembre 2020 portant diverses mesures en matière de santé et de famille dans la fonction publique, applicable en l'espèce : " Lorsque les fonctionnaires sont reconnus, par suite d'altération de leur état physique, inaptes à l'exercice de leurs fonctions, le poste de travail auquel ils sont affectés est adapté à leur état physique. Lorsque l'adaptation du poste de travail n'est pas possible, ces fonctionnaires peuvent être reclassés dans des emplois d'un autre corps, s'ils ont été déclarés en mesure de remplir les fonctions correspondantes. Le reclassement est subordonné à la présentation d'une demande par l'intéressé. ". Aux termes de l'article 1er du décret du 8 juin 1989 relatif au reclassement des fonctionnaires de la fonction publique hospitalière pour raisons de santé : " Lorsqu'un fonctionnaire n'est plus en mesure d'exercer ses fonctions, de façon temporaire ou permanente, et si les nécessités du service ne permettent pas un aménagement des conditions de travail, l'autorité investie du pouvoir de nomination, après avis du médecin du travail, dans l'hypothèse où l'état du fonctionnaire n'a pas nécessité l'octroi d'un congé de maladie, ou du comité médical, si un tel congé a été accordé, peut affecter ce fonctionnaire dans un poste de travail correspondant à son grade dans lequel les conditions de service sont de nature à permettre à l'intéressé d'assurer ses fonctions ". Aux termes de l'article 2 du même décret : " Dans le cas où l'état physique d'un fonctionnaire, sans lui interdire d'exercer toute activité, ne lui permet pas de remplir les fonctions correspondant aux emplois de son grade, l'intéressé peut présenter une demande de reclassement dans un emploi relevant d'un autre grade de son corps ou dans un emploi relevant d'un autre corps. / L'autorité investie du pouvoir de nomination recueille l'avis du comité médical départemental ". 11. Il résulte des dispositions combinées de l'article L. 323-5 du code du travail et de l'article 71 de la loi du 9 janvier 1986 que sont comptabilisés au titre des bénéficiaires de l'obligation d'emploi des travailleurs handicapés les agents ayant fait l'objet d'un reclassement pour raison médicale dans un autre corps ou cadre d'emplois, selon la procédure définie à l'article 2 du décret du 8 juin 1989. En revanche, les agents qui ont bénéficié d'une simple adaptation de leur poste de travail, même pour raison médicale, ne peuvent être pris en compte au titre des bénéficiaires de l'obligation d'emploi, quels que soient les efforts administratifs et financiers fournis par leur employeur. 12. Il résulte de l'instruction que, par une lettre du 19 octobre 2012, le FIPHFP a demandé au groupe hospitalier de La Rochelle Ré-Aunis de lui adresser un tableau détaillant, pour chaque travailleur déclaré comme bénéficiaire de l'obligation d'emploi, l'identité de l'agent, la qualification de celui-ci et, en ce qui concerne ceux de ces agents déclarés comme ayant été reclassés, les éléments justifiant la procédure de reclassement suivie. A l'issue de son contrôle, le FIPHFP a fait connaître à l'établissement hospitalier, dans un courrier du 18 mars 2013, sa décision ne pas retenir 32 agents comme bénéficiaires de l'obligation d'emploi au motif que ces derniers avaient obtenu un simple aménagement de leur poste de travail pour raison médicale et non un reclassement en application des dispositions de l'article 71 de la loi du 9 janvier 1986 et de l'article 2 du décret du 8 juin 1989. 13. Selon le groupe hospitalier de La Rochelle-Ré-Aunis, les 32 agents concernés ont été affectés sur un poste aménagé pour des raisons médicales, avec changement de service pour certains, et doivent ainsi être regardés comme bénéficiaires de l'obligation d'emploi instituée par l'article L. 5212-2 du code du travail. Toutefois, pas plus en appel qu'en première instance, le groupe hospitalier de La Rochelle-Ré-Aunis n'apporte d'éléments permettant d'estimer que ces adaptations ou changements d'affectation auraient eu lieu dans le cadre d'une procédure de reclassement dont la mise en œuvre est subordonnée à une demande de l'agent et implique la consultation du comité médical départemental ainsi qu'un changement de corps ou de cadre d'emplois de l'agent concerné. Et il résulte de la règle rappelée au point 11 que la seule circonstance que certains agents ont été affectés sur des postes aménagés, compte tenu des restrictions d'aptitude émises par le service de santé au travail, ne suffit pas à les faire regarder comme ayant fait l'objet d'un reclassement et, partant, comme bénéficiaires de l'obligation d'emploi prévue à l'article L. 5212-2 du code du travail. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit soulevé par le groupe hospitalier de La Rochelle-Ré-Aunis doit être écarté. 14. En troisième lieu, il résulte de l'instruction que le FIPHFP a, le 10 septembre 2020, remboursé au groupe hospitalier La Rochelle-Ré-Aunis la somme de 352 986 euros à la suite du rejet par le Conseil d'Etat du pourvoi en cassation contre l'arrêt de la cour du 6 février 2018 ayant annulé le titre exécutoire émis le 3 mai 2013 pour défaut d'indication des bases de liquidation de la créance. Il résulte du point 6 du présent arrêt que ce motif d'illégalité, touchant à la régularité du titre exécutoire, n'a pas eu pour effet d'éteindre la créance détenue par le FIPHFP à l'encontre de l'établissement. Dans ces conditions, le remboursement auquel le FIPHFP a procédé ne faisait pas obstacle à l'émission d'un nouveau titre exécutoire dans des conditions régulières, quand bien même ce remboursement est intervenu postérieurement à celui-ci en vue d'assurer l'exécution de la chose jugée. 15. En quatrième et dernier lieu, à l'appui de son moyen tiré de ce que la décision du Conseil d'Etat n° 419162 du 4 octobre 2019 qui a rejeté le pourvoi formé contre l'arrêt précité du 6 février 2018, ne pouvait pas fonder le titre exécutoire en litige, le groupe hospitalier de La Rochelle Ré-Aunis ne se prévaut devant la Cour d'aucun élément de droit ou de fait nouveau par rapport à son argumentation présentée devant les premiers juges. De même, à l'appui de son moyen tiré des incohérences qui auraient entaché le contrôle exercé par le FIPHFP, l'appelant ne se prévaut pas davantage d'éléments de droit ou de fait autres que ceux exposés en première instance. Par suite, il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs pertinents du jugement attaqué. 16. Il résulte de tout ce qui précède que le groupe hospitalier de La Rochelle-Ré-Aunis n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté ses conclusions aux fins d'annulation du titre exécutoire en litige et, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins de décharge de la somme de 352 786 euros. Sur les frais d'instance : 17. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle aux conclusions présentées le groupe hospitalier La Rochelle-Ré-Aunis tendant à ce que le FIPHFP, qui n'est pas la partie perdante à l'instance, lui verse une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu de faire application de ces mêmes dispositions en mettant à la charge du groupe hospitalier de La Rochelle-Ré-Aunis une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par le FIPHFP et non compris dans les dépens. DECIDE Article 1er : La requête du groupe hospitalier de La Rochelle-Ré-Aunis est rejetée. Article 2 : Le groupe hospitalier de La Rochelle-Ré-Aunis versera au FIPHFP une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au groupe hospitalier de La Rochelle-Ré-Aunis et au fonds pour l'insertion des personnes handicapées dans la fonction publique (FIPHFP). Délibéré après l'audience du 8 janvier 2024 à laquelle siégeaient : Mme Ghislaine Markarian, présidente, M. Frédéric Faïck, président-assesseur, Mme Caroline Gaillard, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 février 2024. Le rapporteur, Frédéric B... La présidente, Ghislaine Markarian La greffière, Catherine Jussy La République mande et ordonne au ministre du Travail de la Santé et des Solidarités, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. N° 22BX01557 2
Cours administrative d'appel
Bordeaux
CAA de MARSEILLE, 5ème chambre, 09/02/2024, 22MA02830, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler la décision implicite de rejet de son recours préalable obligatoire dirigé contre la décision du 28 juillet 2017 de la ministre des armées en tant qu'elle a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de la 9ème période de congé de longue durée pour maladie dont elle a bénéficié, la décision du 3 avril 2018 par laquelle la ministre des armées a partiellement agréé le recours précité et décidé de soumettre son dossier au comité supérieur médical, en application de l'article R. 4138-50 du code de la défense, la décision du 14 octobre 2019 par laquelle la ministre des armées a rejeté son recours administratif préalable obligatoire formé contre la décision du 28 juillet 2017 en tant qu'elle ne reconnaît pas le lien au service de son congé de longue durée pour maladie, la décision du 14 septembre 2020 de la ministre des armées rejetant le recours administratif préalable obligatoire formé devant la commission des recours des militaires et dirigé contre l'arrêté du 24 octobre 2019 portant radiation des cadres pour réforme définitive, ainsi que cet arrêté du 24 octobre 2019. Par un jugement n° 2000124, 2002404, 2102841 du 20 septembre 2022, le tribunal administratif de Toulon a, à l'article 1er, rejeté les requêtes n° 2000124 et n° 2102841, à l'article 2, jugé qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions, présentées dans la requête n° 2002404, tendant à l'annulation de la décision du 24 octobre 2019 et de la décision implicite de rejet du recours administratif obligatoire formé contre cet acte et, à l'article 3, rejeté le surplus des conclusions de la requête n° 2002404. Procédure devant la Cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés les 17 novembre 2022 et 30 novembre 2023, sous le n° 22MA02830, Mme A..., représentée par Me Moumni, demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 20 septembre 2022 ; 2°) d'annuler les décisions de la ministre des armées contestées aux termes des requêtes n° 2000124, 2002404, 2102841 ; 3°) d'enjoindre au ministre des armées de reconnaître le lien au service de son affection et de prendre une décision d'attribution d'un congé de longue durée pour maladie en lien avec le service dans le délai d'un mois sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir et de reconnaître le lien au service de l'affection ayant motivé sa radiation pour réforme définitive et ce dans le même délai et la même astreinte ; 4°) de solliciter une expertise avant-dire droit si la Cour estime que l'état actuel du dossier ne permet pas d'apprécier l'existence d'un lien potentiel entre l'affection et le service ; 5°) de mettre à la charge de l'Etat, la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - les premiers juges ont commis une erreur de droit dès lors qu'ils ont recherché l'existence d'un lien de causalité exclusif entre l'affection ayant motivé le congé de longue durée pour maladie et le service alors que seul un lien de causalité direct doit être recherché ; - ce lien est suffisamment établi en l'espèce ; - l'apparition de la pathologie sur le temps et le lieu de service n'est pas douteuse dont la réalité n'est pas contestée ; - la procédure de pension militaire d'invalidité est de nature à entrer dans le faisceau d'indices ; - ses troubles de l'humeur sont secondaires à ses accidents de service et ont été constatés lors de la visite médicale permettant la mise en congé ; - les séquelles constatées lors de l'examen de sa demande de pension militaire d'invalidité comportaient notamment des troubles du caractère et thymie souvent dépressive avec hyperémotivité ; - elle ne présentait aucun antécédent psychiatrique avant l'entrée en service. Par un mémoire en défense, enregistré le 31 octobre 2023, le ministre des armées conclut au rejet de la requête de Mme A.... Il fait valoir que les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés. Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office tiré de l'irrecevabilité des conclusions à fin d'annulation de la décision implicite de rejet du recours préalable obligatoire formé le 20 septembre 2017 dirigé contre la décision du 28 juillet 2017 de la ministre des armées dès lors que la décision du 3 avril 2018 prise à la suite du recours administratif préalable de Mme A... s'est substituée nécessairement à cette décision et est seule susceptible d'être déférée au juge de la légalité. Des observations en réponse au moyen d'ordre public ont été produites le 24 janvier 2024 par le ministre des armées, et communiquées le même jour. Vu les autres pièces du dossier. Vu, - le code de la défense, - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Marchessaux, - et les conclusions de M. Guillaumont, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. Mme A... née le 6 novembre 1975 qui exerçait en qualité d'infirmière en soins généraux de premier grade de l'armée de l'air, a été victime le 24 septembre 2005 d'un accident de parachutisme lui occasionnant un choc hémorragique, une fracture du bassin et du thorax, une fracture de la cheville droite ainsi qu'un traumatisme crânien avec perte de connaissance. Des droits à pension militaire d'invalidité au taux de 60 % lui ont été ouverts à compter du 4 octobre 2008 à raison des infirmités résultant des blessures contractées en service. La requérante a bénéficié d'un congé longue maladie renouvelé au cours de la période du 23 octobre 2007 au 22 janvier 2010. Alors qu'elle avait repris le travail le 23 janvier 2010 sur un poste sédentaire au sein du centre de traitement de l'information médicale des armées à Saint-Mandé (Val-de-Marne), elle a été victime d'un accident de trajet le 29 janvier 2013 entraînant une fracture du poignet droit. A la suite d'un état dépressif médicalement constaté en juin 2013, elle a été placée en congé de maladie puis en congé de longue durée pour maladie au cours de la période du 16 juillet 2013 au 15 juillet 2017. Par une décision du 28 juillet 2017 prise après l'avis technique émis le 27 juillet 2017 par le médecin général inspecteur, le congé de longue durée pour maladie a été renouvelé pour une 9ème période allant du 16 juillet 2017 au 15 janvier 2018 inclus. Mme A... a formé un premier recours administratif préalable obligatoire enregistré le 20 septembre 2017 contre la décision du 28 juillet 2017 en tant qu'elle ne mentionne pas que la 9ème période de congé de longue durée pour maladie est imputable au service. Par une décision du 3 avril 2018, la ministre des armées a partiellement agréé le recours et a décidé de soumettre le dossier de Mme A... au comité supérieur médical. Lors de séance du 18 juin 2018, ce comité a considéré qu'il n'y avait pas de lien potentiel entre le service et la maladie de Mme A.... Par une décision du 22 janvier 2019, la direction centrale du service de santé des armées a agréé la demande de présentation devant une commission de réforme des militaires de l'intéressée. Mme A... a alors formé le 25 mars 2019 un deuxième recours administratif préalable obligatoire contre la décision du 22 janvier 2019, enregistré le 28 mars 2019. Par une décision du 14 octobre 2019, la ministre des armées a rejeté ce recours. Enfin, par une décision du 24 octobre 2019 rectifiée le 2 mars 2020, la ministre des armées a radié des cadres Mme A... pour réforme définitive à compter du 5 mars 2019. La requérante a formé contre cette décision un troisième recours administratif préalable obligatoire enregistré le 23 décembre 2019. Par une décision du 14 septembre 2020, la ministre des armées a rejeté ce recours préalable. Mme A... relève appel du jugement du 20 septembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Toulon a, à l'article 1er, rejeté les requêtes n° 2000124 et n° 2102841, à l'article 2, jugé qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions, présentées dans la requête n° 2002404, tendant à l'annulation de la décision du 24 octobre 2019 et de la décision implicite de rejet du recours administratif obligatoire formé contre cet acte et, à l'article 3, rejeté le surplus des conclusions de la requête n° 2002404. En ce qui concerne la recevabilité des conclusions tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet du recours préalable obligatoire formé le 20 septembre 2017 dirigé contre la décision du 28 juillet 2017 de la ministre des armées : 2. Aux termes du I de l'article R. 4125-1 du code de la défense, dans sa rédaction applicable à la date de la décision en litige : " Tout recours contentieux formé par un militaire à l'encontre d'actes relatifs à sa situation personnelle est précédé d'un recours administratif préalable, à peine d'irrecevabilité du recours contentieux. / Ce recours administratif préalable est examiné par la commission des recours des militaires, placée auprès du ministre de la défense. (...) ". Aux termes de l'article R. 4125-10 du même code : " Dans un délai de quatre mois à compter de sa saisine, la commission notifie à l'intéressé la décision du ministre compétent, ou le cas échéant, des ministres conjointement compétents. La décision prise sur son recours, qui est motivée en cas de rejet, se substitue à la décision initiale. (...) / L'absence de décision notifiée à l'expiration du délai de quatre mois vaut décision de rejet du recours formé devant la commission ". 3. L'institution par ces dispositions d'un recours administratif, préalable obligatoire à la saisine du juge, a pour effet de laisser à l'autorité compétente pour en connaître le soin d'arrêter définitivement la position de l'administration. Il s'ensuit que la décision prise à la suite du recours se substitue nécessairement à la décision initiale. Elle est seule susceptible d'être déférée au juge de la légalité. Si l'exercice d'un tel recours a pour but de permettre à l'autorité administrative, dans la limite de ses compétences, de remédier aux illégalités dont pourrait être entachée la décision initiale, sans attendre l'intervention du juge, la décision prise sur le recours n'en demeure pas moins soumise elle-même au principe de légalité. 4. Il ressort des pièces du dossier que Mme A... a formé, le 20 septembre 2017, un recours préalable obligatoire contre la décision du 28 juillet 2017 de la ministre des armées qui a fait l'objet d'une décision implicite de rejet puis d'une décision explicite du 3 avril 2018. Cette dernière décision, qui s'est nécessairement substituée à la décision implicite de rejet, est seule susceptible d'être déférée au juge de la légalité. Par suite, les conclusions de Mme A... doivent être regardées comme tendant à l'annulation de cette décision du 3 avril 2018 et celles tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet sont ainsi irrecevables et ne peuvent qu'être rejetées. En ce qui concerne la recevabilité des conclusions tendant à l'annulation de la décision du 24 octobre 2019 et de la décision implicite de rejet du recours préalable obligatoire formé contre cette décision : 5. Mme A... reprend en appel ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du 24 octobre 2019 et de la décision implicite de rejet du recours préalable obligatoire formé contre cette décision. Toutefois, elle ne conteste pas le non-lieu à statuer sur ces conclusions opposé par le tribunal dès lors que la décision expresse de rejet du 14 septembre 2020 s'est substituée à ces décisions. Par suite, ces conclusions doivent être rejetées comme irrecevables. En ce qui concerne la recevabilité des conclusions tendant à l'annulation de la décision du 14 octobre 2019 : 6. Le jugement n° 1801739 du 22 avril 2021 par lequel le tribunal a annulé la décision du 14 octobre 2019 a lui-même été annulé par un arrêt définitif n° 21MA02435 de la Cour administrative d'appel de Marseille du 15 octobre 2021. Par suite, la décision du 14 octobre 2019 a été rétablie rétroactivement dans l'ordonnancement juridique et l'exception de non-lieu à statuer, opposée par la ministre des armées, doit être écartée. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : En ce qui concerne la légalité des décisions des 3 avril 2018 et 14 octobre 2019 relatives à l'octroi d'un congé de longue durée pour maladie : 7. Aux termes de l'article L. 4138-12 du code de la défense, dans sa rédaction applicable : " Le congé de longue durée pour maladie est attribué, après épuisement des droits de congé de maladie ou des droits du congé du blessé prévus aux articles L. 4138-3 et L. 4138-3-1, pour les affections dont la liste est fixée par décret en Conseil d'Etat. / Lorsque l'affection survient du fait ou à l'occasion de l'exercice des fonctions ou à la suite de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, ce congé est d'une durée maximale de huit ans. Le militaire perçoit, dans les conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, sa rémunération pendant cinq ans, puis une rémunération réduite de moitié les trois années qui suivent / Dans les autres cas, ce congé est d'une durée maximale de cinq ans et le militaire de carrière perçoit, dans les conditions définies par décret en Conseil d'État, sa rémunération pendant trois ans, puis une rémunération réduite de moitié les deux années qui suivent (...) ". Aux termes de l'article R. 4138-47 du même code, dans sa rédaction alors en vigueur : " Le congé de longue durée pour maladie est la situation du militaire, qui est placé, au terme de ses droits à congé de maladie (...) dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions pour l'une des affections suivantes : (...) 3° Troubles mentaux et du comportement présentant une évolution prolongée et dont le retentissement professionnel ainsi que le traitement sont incompatibles avec le service ". L'article R. 4138-48 du même code dispose que : " Le congé de longue durée pour maladie est attribué, sur demande ou d'office, dans les conditions fixées à l'article L. 4138-12, par décision du ministre de la défense (...) sur le fondement d'un certificat médical établi par un médecin ou un chirurgien des hôpitaux des armées, par périodes de trois à six mois renouvelables ". Enfin, aux termes de l'article R. 4138-49 du même code : " La décision mentionnée à l'article R. 4138-48 précise si l'affection ouvrant droit à congé de longue durée pour maladie est survenue ou non du fait ou à l'occasion de l'exercice des fonctions (...) ". 8. Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service. 9. Il ressort des pièces du dossier que le 24 septembre 2005, Mme A... a été victime d'un grave accident de parachute qui a entraîné un choc hémorragique, une fracture du bassin et du thorax, une fracture de la cheville droite ainsi qu'un traumatisme crânien avec perte de connaissance à la suite duquel elle a été placée en congé de longue maladie. Lors de sa séance du 18 novembre 2008, la commission de réforme des pensions militaires d'invalidité lui a accordé un taux d'invalidité de 60 % dont 20 % pour " un syndrome subjectif des traumatisés crâniens avec troubles de l'attention et de la concentration, troubles mnésiques importants, troubles du caractère, thymie souvent dépressive avec hyperémotivité, sensations vertigineuses lors de changement de positions ". Elle a ainsi reconnu l'existence de troubles dépressifs en lien avec l'accident survenu en 2005. En 2011, la requérante est victime d'un accident de voiture qui selon une fiche de constatation initiale extraite de son livret médical du 19 juin 2013, mentionne qu'elle " déclenche un état dépressif " nécessitant un suivi psychiatrique depuis novembre 2012 avec prise de Séroplex. A la suite de son retour au travail, elle est victime, le 29 janvier 2013, d'une chute dans les escaliers à l'occasion d'un trajet de son travail à son domicile occasionnant une fracture du poignet et la pose de broche. Elle s'est vu attribuer un congé de longue durée pour maladie du 16 juillet 2013 au 15 juillet 2017. Par ailleurs, le médecin principal des armées relève, le 22 novembre 2016 : " Patiente ayant eu un accident de parachutisme avec multiples blessures. Une reprise du travail avait été effectuée mais avait pu difficilement être maintenue dans le temps du fait d'épisodes dépressifs récurrents nécessitant une prise en charge spécialisée plus rapprochée ". Le même médecin mentionne que : " il persiste une grave labilité émotionnelle avec des périodes d'effondrement dépressif. On perçoit un débordement émotionnel intense ". Ce certificat médical tend à confirmer que des troubles dépressifs présents depuis le premier accident de service survenu en 2005 ont fragilisé la reprise du travail de la requérante le 23 janvier 2010. Un autre médecin militaire, le Dr C... estimait, en novembre 2014, qu'il s'agit d'une " patiente âgée de 39 ans placée en congé de longue durée depuis un an et demi en raison d'un trouble de l'humeur d'évolution prolongée. Celui-ci s'organise autour du vécu douloureux et invalidant de divers accidents depuis 2005 et au retentissement somatique et psychologique toujours important ". Mme A... produit également un certificat médical établi le 18 avril 2022 par son médecin psychiatre, qui certifie l'avoir reçu régulièrement en consultation de septembre 2006 à octobre 2012 pour des troubles anxiodépressifs, associés à un accident de parachute. Dans ces conditions, Mme A... est fondée à soutenir que son état dépressif présente un lien direct avec son accident de service survenu le 24 septembre 2005. En ce qui concerne la légalité de la décision du 14 septembre 2020 relative à la radiation des cadres : 10. Aux termes de l'article L. 4139-14 du code de la défense : " La cessation de l'état militaire intervient d'office dans les cas suivants : / (...) 4° Pour réforme définitive, après avis d'une commission de réforme dont les modalités d'organisation et de fonctionnement sont fixées par décret en Conseil d'État ; (...) " et aux termes de l'article R. 4138-56 du même code : " Le militaire ayant bénéficié de la totalité de ses droits à congés de longue durée pour maladie est, s'il demeure dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, radié des cadres ou rayé des contrôles pour réforme définitive après avis de la commission mentionnée au 4o de l'article L. 4139-14 ". 11. Il ressort des pièces du dossier que pour prendre la décision en litige, la ministre des armées s'est fondée sur l'avis du comité supérieur médical du 18 juin 2018 concluant à l'absence de lien entre le service et l'affection de Mme A... et, et sur le fait que cette dernière avait dès lors épuisé ses droits au placement en congé de longue durée pour maladie. Toutefois, compte tenu de ce qui a été dit aux points 8 et 9 concernant le lien au service des troubles dépressifs de la requérante, cette décision est entachée d'une erreur de droit. 12. Il résulte de tout ce qui précède sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête et d'ordonner une expertise dès lors qu'elle ne revêtirait pas de caractère utile, que Mme A... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté ces demandes tendant à l'annulation des décisions des 3 avril 2018, 14 octobre 2019 et 14 septembre 2020. Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte : 13. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. La juridiction peut également prescrire d'office cette mesure ". 14. Le motif d'annulation des décisions contestées implique nécessairement, par application des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, d'enjoindre au ministre des armées, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, de reconnaître l'imputabilité au service de la pathologie de Mme A... et d'en tirer toutes les conséquences sur sa situation administrative, dans la mesure rendue nécessaire par l'attribution rétroactive de ses congés pour maladie imputable au service. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte. Sur les frais liés au litige : 15. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par Mme A... et non compris dans les dépens. D É C I D E : Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Toulon du 20 septembre 2022 et les décisions des 3 avril 2018, 14 octobre 2019 et 14 septembre 2020 sont annulés. Article 2 : Il est enjoint au ministre des armées de prendre un arrêté reconnaissant l'imputabilité au service de la maladie de Mme A... et d'en tirer toutes les conséquences sur sa situation administrative, dans la mesure rendue nécessaire par l'attribution rétroactive de ses congés pour maladie imputable au service, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Article 3 : L'Etat versera à Mme A... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme A... est rejeté. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre des armées. Délibéré après l'audience du 26 janvier 2024, où siégeaient : - Mme Chenal-Peter, présidente de chambre, - Mme Marchessaux, première conseillère, - Mme Poullain, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 9 février 2024. 2 2 N° 22MA02830 bb
Cours administrative d'appel
Marseille
CAA de BORDEAUX, 6ème chambre, 08/02/2024, 23BX02136, Inédit au recueil Lebon
Vu les procédures suivantes : Procédures contentieuses antérieures : Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 7 novembre 2019 par lequel le maire de Libourne a refusé de reconnaître imputables à l'accident de service du 4 décembre 2018 les arrêts de travail et soins à compter du 20 mars 2019. Par un jugement n° 1906239 du 20 octobre 2021, le tribunal administratif de Bordeaux a ordonné, avant-dire-droit, une expertise, puis par un jugement 12 octobre 2022, il a annulé l'arrêté du 7 novembre 2019 et a enjoint à la commune de Libourne de procéder à la reconnaissance de l'imputabilité au service des arrêts de travail de Mme A... à compter du 20 mars 2019 et à la reconstitution de sa carrière. Mme C... A... a également demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 14 octobre 2021 par lequel le maire de Libourne l'a placée en disponibilité d'office pour raison de santé du 14 septembre 2021 au 13 mars 2022. Par un jugement n° 2106201 du 7 juin 2023, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé l'arrêté du 14 octobre 2021 et a enjoint à la commune de Libourne de placer Mme A... en congé imputable au service pour la période du 14 septembre 2021 au 13 mars 2022 et de procéder à la reconstitution de sa carrière, en la rétablissant dans ses droits à pension et dans ses droits sociaux. Procédures devant la Cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés respectivement le 9 décembre 2022 et le 18 décembre 2023, sous le n° 22BX03035, la commune de Libourne, représentée par Me Bach, demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 12 octobre 2022 ; 2°) de rejeter la demande de première instance ; 3°) de mettre à la charge de Mme A... une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les entiers dépens, en ce compris les frais d'expertise. Elle soutient que : - l'accident du 5 octobre 2018 n'a eu aucune séquelle sur l'agent, qui était guérie, au 5 mars 2019 et a repris une activité normale du 5 au 20 mars 2019 ; - la guérison doit être distinguée de la simple consolidation, et aucune des conditions posées par la jurisprudence pour caractériser une rechute n'est remplie ; - Mme A... n'a pas davantage été victime d'un second accident de service, qu'elle n'a pas déclaré et ne souffre d'aucune entorse acromio-claviculaire et conflit sous-acromial, ni d'aucune autre lésion ; - aucun lien d'imputabilité direct et certain n'est établi entre l'accident de service et la pathologie ; - Mme A... n'a jamais déclaré de maladie imputable au service ; une entorse ne peut être qualifiée de maladie, pas plus que des douleurs ; - la condition d'invalidité prévue au IV de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983, applicable en l'espèce, n'est pas respectée. Par un mémoire en défense, enregistré le 11 novembre 2023, Mme C... A..., représentée par Me Baulimon, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la commune de Libourne le versement d'une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - les moyens tirés de l'absence de rechute et de maladie professionnelle sont inopérants ; - les autres moyens soulevés par la commune de Libourne ne sont pas fondés. La clôture de l'instruction a été fixée au 18 décembre 2023 à 12 heures par une ordonnance du 13 novembre 2023. Par une requête et un mémoire, enregistrés les 9 mai et 13 novembre 2023 sous le n° 23BX01254, la commune de Libourne, représentée par Me Bach, demande à la Cour : 1°) de prononcer le sursis à exécution du jugement du tribunal administratif de Bordeaux n° 1906239 du 12 octobre 2022 ; 2°) de mettre à la charge de Mme A... une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle reprend les mêmes moyens que dans l'instance enregistrée sous le n° 22BX03035. Par un mémoire en défense, enregistré le 8 octobre 2023, Mme C... A..., représentée par Me Baulimon, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la commune de Libourne le versement d'une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés. La clôture de l'instruction a été fixée au 13 novembre 2023 par une ordonnance du 10 octobre 2023. Par une requête et un mémoire, enregistrés respectivement le 28 juillet et le 18 décembre 2023 sous le n° 23BX02136, la commune de Libourne, représentée par Me Bach, demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Bordeaux n° 2106201 du 7 juin 2023 ; 2°) de rejeter la demande de première instance ; 3°) de mettre à la charge de Mme A... une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les dépens, en ce compris les frais d'expertise. Elle soutient que : - l'accident du 5 octobre 2018 n'a eu aucune séquelle sur l'agent, qui était guérie, au 5 mars 2019 et a repris une activité normale du 5 au 20 mars 2019 ; - la guérison doit être distinguée de la simple consolidation et aucune des conditions posées par la jurisprudence pour caractériser une rechute n'est remplie ; - Mme A... n'a pas davantage été victime d'un second accident de service, qu'elle n'a pas déclaré et ne souffre d'aucune entorse acromio-claviculaire et conflit sous-acromial, ni d'aucune autre lésion ; - aucun lien d'imputabilité direct et certain n'est établi entre l'accident de service et la pathologie ; - Mme A... n'a jamais déclaré de maladie imputable au service ; une entorse ne peut être qualifiée de maladie, pas plus que des douleurs ; - la condition d'invalidité prévue au IV de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983, applicable en l'espèce, n'est pas respectée. Par un mémoire en défense, enregistré le 11 novembre 2023, Mme C... A..., représentée par Me Baulimon, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la commune de Libourne une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - les moyens tirés de l'absence de rechute et de maladie professionnelle sont inopérants ; - les autres moyens soulevés par la commune de Libourne ne sont pas fondés. La clôture de l'instruction a été fixée au 18 décembre 2023 par une ordonnance du 13 novembre 2023. Par une requête, enregistrée le 28 juillet 2023 sous le n° 23BX02137, la commune de Libourne, représentée par Me Bach, demande à la Cour : 1°) de prononcer le sursis à exécution du jugement du tribunal administratif de Bordeaux n° 2106201 du 7 juin 2023 ; 2°) de mettre à la charge de Mme A... une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle reprend les mêmes moyens que dans l'instance enregistrée sous le n° 23BX02136. Par un mémoire en défense, enregistré le 13 novembre 2023, Mme C... A..., représentée par Me Baulimon, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la commune de Libourne le versement d'une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés. La clôture de l'instruction a été fixée au 13 novembre 2023 par une ordonnance du 10 octobre 2023. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - l'ordonnance n° 2017-53 du 9 janvier 2017 ; - le décret n° 2019-301 du 10 avril 2019 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Au cours de l'audience publique, ont été entendus : - le rapport de M. B..., - et les conclusions de M. Duplan, rapporteur public ; - et les observations de Me Bach, pour la commune de Libourne. Vu les notes en délibéré, enregistrées le 9 janvier 2024, présentées pour la commune de Libourne dans les quatre instances. Considérant ce qui suit : 1. Mme C... A..., adjointe technique territoriale, exerce ses fonctions dans le service de la propreté urbaine de la commune de Libourne. Le 4 décembre 2018, elle a été victime pendant son travail d'un traumatisme à l'épaule droite qui a été considéré comme imputable au service par un arrêté du maire de Libourne du 31 décembre 2018. Le 5 mars 2019, elle a repris ses fonctions. Le 20 mars 2019, elle a présenté un certificat médical de rechute de son accident de service. Suivant l'avis défavorable émis par la commission de réforme, réunie le 16 octobre 2019, le maire de Libourne a refusé de reconnaître les arrêts et soins à compter du 20 mars 2019 imputables au service et l'a placée en congé de maladie ordinaire à compter de cette date, par un arrêté du 7 novembre 2019. Si Mme A... a repris ponctuellement le travail, elle a notamment été placé en congé de maladie ordinaire du fait de sa pathologie à l'épaule droite du 14 septembre 2020 au 13 septembre 2021. Après avis du comité médical départemental en date du 6 octobre 2021, elle a été placée en disponibilité d'office pour raisons de santé du 14 septembre 2021 au 13 mars 2022, par un arrêté du maire de Libourne en date du 14 octobre 2021. Mme A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux l'annulation des arrêtés des 7 novembre 2019 et 14 octobre 2021. Par jugement avant-dire droit en date du 20 octobre 2021, le tribunal a ordonné une expertise. Le rapport d'expertise a été déposé au greffe le 15 avril 2022 et complété le 10 juillet 2022. Par un jugement du 12 octobre 2022, le tribunal a annulé l'arrêté du 7 novembre 2019 et enjoint à la commune de Libourne de procéder à la reconnaissance de l'imputabilité au service des arrêts de travail de Mme A... à compter du 20 mars 2019 et à la reconstitution de sa carrière. La commune de Libourne relève appel de ce jugement par la requête enregistrée sous le n° 22BX03035, et demande que soit ordonné le sursis à son exécution par la requête enregistrée sous le n° 23BX01254. Par un jugement du 7 juin 2023, le tribunal a annulé l'arrêté du 14 octobre 2021 et a enjoint à la commune de Libourne de placer Mme A... en congé imputable au service pour la période du 14 septembre 2021 au 13 mars 2022 et de procéder à la reconstitution de sa carrière, en la rétablissant dans ses droits à pension et dans ses droits sociaux. Mme A... relève appel de ce jugement par la requête enregistrée sous le n°23BX02136, et demande que soit ordonné le sursis à son exécution, par la requête enregistrée sous le n° 23BX02137. 2. Les affaires enregistrées sous les numéros 22BX03035, 23BX01254, 23BX02136, et 23BX02137 concernent la situation d'un même agent et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt. 3. L'application des dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires résultant de l'ordonnance du 19 janvier 2017 était manifestement impossible en l'absence d'un texte réglementaire fixant, notamment, les conditions de procédure applicables à l'octroi du nouveau congé pour invalidité temporaire imputable au service. Ces dispositions ne sont ainsi entrées en vigueur, en tant qu'elles s'appliquent à la fonction publique territoriale, qu'à la date d'entrée en vigueur, le 12 avril 2019, du décret du 10 avril 2019 relatif au congé pour invalidité temporaire imputable au service dans la fonction publique territoriale, décret par lequel le pouvoir réglementaire a pris les dispositions réglementaires nécessaires pour cette fonction publique et dont l'intervention était, au demeurant, prévue, sous forme de décret en Conseil d'Etat, par le VI de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 résultant de l'article 10 de l'ordonnance du 19 janvier 2017. Il en résulte que les dispositions de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 dans leur rédaction antérieure à celle résultant de l'ordonnance du 19 janvier 2017 sont demeurées applicables jusqu'à l'entrée en vigueur du décret du 10 avril 2019, et que la commune de Libourne ne pouvait, sans commettre d'erreur de droit, fonder le refus d'imputabilité à l'accident de service survenu antérieurement à cette date sur l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983. 4. Toutefois, lorsqu'il constate que la décision contestée devant lui aurait pu être prise, en vertu du même pouvoir d'appréciation, sur le fondement d'un autre texte que celui dont la méconnaissance est invoquée, le juge de l'excès de pouvoir peut substituer ce fondement à celui qui a servi de base légale à la décision attaquée, sous réserve que l'intéressé ait disposé des garanties dont est assortie l'application du texte sur le fondement duquel la décision aurait dû être prononcée. 5. Aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans sa version applicable à la date de l'accident de service : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. (...) / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident (...) Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales (...) ". Le droit, prévu par ces dispositions, de conserver l'intégralité du traitement est soumis à la condition que la maladie mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'accomplir son service soit en lien direct, mais non nécessairement exclusif, avec un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de ses fonctions. 6. Il ressort des pièces du dossier que, le 4 décembre 2018, alors qu'elle descendait du toit d'un véhicule de nettoyage en prenant appui sur l'une de ses portières, Mme A... a chuté lorsque celle-ci s'est ouverte, ce qui lui a occasionné un traumatisme de l'épaule droite caractérisé par un phénomène de " traction contre résistance ". Même si aucune lésion organique n'a été révélée par l'échographie puis l'IRM passés les 23 janvier et 4 mars 2019 et qu'aucune indication chirurgicale n'a été alors posée, les douleurs provoquées ont justifié la prescription de quinze séances de rééducation et plus de deux mois d'arrêts de travail, son médecin traitant ayant retenu le 4 mars 2019 " une guérison apparente avec possibilité de rechute ultérieure ". Mme A... a repris son activité le 5 mars 2019 mais a présenté un certificat médical de rechute de son accident du travail à compter du 20 mars 2019 pour une récidive des douleurs. Si le diagnostic d'entorse acromio-claviculaire posé par ce certificat n'a pas été confirmé par les examens postérieurs et est réfuté par l'expert désigné par le tribunal, il est constant que Mme A..., lors de la reprise de ses fonctions, a été affectée sur un poste consistant à vider les poubelles et collecter les encombrants, et sollicitant ainsi son épaule alors que le médecin du travail, lors de la visite de reprise en date du 13 mars 2019, avait interdit le port de charges supérieures à 5 kg et les manutentions répétées. L'expert, qui a conclu à l'absence d'éléments médicaux permettant de rattacher le nouvel arrêt de travail à l'accident de service, au motif de l'absence de lésion organique et de séquelle identifiée, affirme néanmoins, dans son complément d'expertise du 10 juillet 2022 comme " probable qu'une activité manuelle relativement physique soit à l'origine d'une majoration de [sa] plainte algique ". En outre, devant la persistance des douleurs, Mme A... sera finalement opérée le 12 août 2021 d'une bursectomie sous-acromiale, une acromioplastie et une ténotomie du biceps. Enfin, il n'est fait état d'aucun autre état antérieur expliquant que l'intéressée, âgée seulement de 29 ans lors de son accident, souffre, à compter du 20 mars 2019, de la même symptomatologie algique que celle ayant suivi son traumatisme de l'épaule, reconnue imputable au service. Dans ces conditions, les arrêts et soins postérieurs au 20 mars 2019 doivent être regardés présentent un lien direct avec l'accident de service initial du 4 décembre 2018. 7. La commune de Libourne ne peut se prévaloir utilement des dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983, qui, ainsi qu'il a été dit, ne sont pas applicables ratione temporis au présent litige. 8. Il résulte de ce qui précède que la commune de Libourne n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par son jugement du 12 octobre 2022, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé l'arrêté du 7 novembre 2019, puis, par voie de conséquence, l'arrêté du 14 octobre 2021 par son jugement du 7 juin 2023. Sur les dépens de première instance : 9. Il résulte de ce qui précède que la commune de Libourne n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 12 octobre 2022, le tribunal administratif de Bordeaux a mis à sa charge, conformément aux dispositions de l'article R. 761-1 du code de justice administrative, les frais et honoraires de l'expertise, liquidés et taxés à la somme de 845 euros par une ordonnance de la présidente du tribunal du 25 avril 2022. Sur les conclusions aux fins de sursis : 10. Le présent arrêt statuant sur les appels de la commune de Libourne dirigés contre les jugements n° 1906239 du 12 octobre 2022 et n° 2106201 du 7 juin 2023 du tribunal administratif de Bordeaux, les conclusions des requêtes n° 23BX01254 et n° 23BX02137 tendant ce qu'il soit sursis à leur exécution ont perdu leur objet. Il n'y a donc pas lieu de statuer sur ces conclusions. Sur les frais de l'instance : 11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme A..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la commune de Libourne demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la commune de Libourne une somme globale de 2 000 euros au titre des frais exposés par Mme A... et non compris dans les dépens. DECIDE : Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions des requêtes n°23BX01254 et n° 23BX02137. Article 2 : Les requêtes n°s 22BX03035 et 23BX02136 de la commune de Libourne sont rejetées. Article 3 : La commune de Libourne versera à Mme A... une somme globale de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Libourne et à Mme C... A.... Délibéré après l'audience du 8 janvier 2024 à laquelle siégeaient : Mme Ghislaine Markarian, présidente, M. Frédéric Faïck, président assesseur, M. Julien Dufour, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 8 février 2024. Le rapporteur, Julien B... La présidente, Ghislaine Markarian La greffière, Catherine Jussy La République mande et ordonne au préfet de la Gironde en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. N°22BX03035-23BX01254-23BX02136-23BX02137 2
Cours administrative d'appel
Bordeaux
CAA de BORDEAUX, 6ème chambre, 08/02/2024, 22BX03035, Inédit au recueil Lebon
Vu les procédures suivantes : Procédures contentieuses antérieures : Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 7 novembre 2019 par lequel le maire de Libourne a refusé de reconnaître imputables à l'accident de service du 4 décembre 2018 les arrêts de travail et soins à compter du 20 mars 2019. Par un jugement n° 1906239 du 20 octobre 2021, le tribunal administratif de Bordeaux a ordonné, avant-dire-droit, une expertise, puis par un jugement 12 octobre 2022, il a annulé l'arrêté du 7 novembre 2019 et a enjoint à la commune de Libourne de procéder à la reconnaissance de l'imputabilité au service des arrêts de travail de Mme A... à compter du 20 mars 2019 et à la reconstitution de sa carrière. Mme C... A... a également demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 14 octobre 2021 par lequel le maire de Libourne l'a placée en disponibilité d'office pour raison de santé du 14 septembre 2021 au 13 mars 2022. Par un jugement n° 2106201 du 7 juin 2023, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé l'arrêté du 14 octobre 2021 et a enjoint à la commune de Libourne de placer Mme A... en congé imputable au service pour la période du 14 septembre 2021 au 13 mars 2022 et de procéder à la reconstitution de sa carrière, en la rétablissant dans ses droits à pension et dans ses droits sociaux. Procédures devant la Cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés respectivement le 9 décembre 2022 et le 18 décembre 2023, sous le n° 22BX03035, la commune de Libourne, représentée par Me Bach, demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 12 octobre 2022 ; 2°) de rejeter la demande de première instance ; 3°) de mettre à la charge de Mme A... une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les entiers dépens, en ce compris les frais d'expertise. Elle soutient que : - l'accident du 5 octobre 2018 n'a eu aucune séquelle sur l'agent, qui était guérie, au 5 mars 2019 et a repris une activité normale du 5 au 20 mars 2019 ; - la guérison doit être distinguée de la simple consolidation, et aucune des conditions posées par la jurisprudence pour caractériser une rechute n'est remplie ; - Mme A... n'a pas davantage été victime d'un second accident de service, qu'elle n'a pas déclaré et ne souffre d'aucune entorse acromio-claviculaire et conflit sous-acromial, ni d'aucune autre lésion ; - aucun lien d'imputabilité direct et certain n'est établi entre l'accident de service et la pathologie ; - Mme A... n'a jamais déclaré de maladie imputable au service ; une entorse ne peut être qualifiée de maladie, pas plus que des douleurs ; - la condition d'invalidité prévue au IV de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983, applicable en l'espèce, n'est pas respectée. Par un mémoire en défense, enregistré le 11 novembre 2023, Mme C... A..., représentée par Me Baulimon, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la commune de Libourne le versement d'une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - les moyens tirés de l'absence de rechute et de maladie professionnelle sont inopérants ; - les autres moyens soulevés par la commune de Libourne ne sont pas fondés. La clôture de l'instruction a été fixée au 18 décembre 2023 à 12 heures par une ordonnance du 13 novembre 2023. Par une requête et un mémoire, enregistrés les 9 mai et 13 novembre 2023 sous le n° 23BX01254, la commune de Libourne, représentée par Me Bach, demande à la Cour : 1°) de prononcer le sursis à exécution du jugement du tribunal administratif de Bordeaux n° 1906239 du 12 octobre 2022 ; 2°) de mettre à la charge de Mme A... une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle reprend les mêmes moyens que dans l'instance enregistrée sous le n° 22BX03035. Par un mémoire en défense, enregistré le 8 octobre 2023, Mme C... A..., représentée par Me Baulimon, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la commune de Libourne le versement d'une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés. La clôture de l'instruction a été fixée au 13 novembre 2023 par une ordonnance du 10 octobre 2023. Par une requête et un mémoire, enregistrés respectivement le 28 juillet et le 18 décembre 2023 sous le n° 23BX02136, la commune de Libourne, représentée par Me Bach, demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Bordeaux n° 2106201 du 7 juin 2023 ; 2°) de rejeter la demande de première instance ; 3°) de mettre à la charge de Mme A... une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les dépens, en ce compris les frais d'expertise. Elle soutient que : - l'accident du 5 octobre 2018 n'a eu aucune séquelle sur l'agent, qui était guérie, au 5 mars 2019 et a repris une activité normale du 5 au 20 mars 2019 ; - la guérison doit être distinguée de la simple consolidation et aucune des conditions posées par la jurisprudence pour caractériser une rechute n'est remplie ; - Mme A... n'a pas davantage été victime d'un second accident de service, qu'elle n'a pas déclaré et ne souffre d'aucune entorse acromio-claviculaire et conflit sous-acromial, ni d'aucune autre lésion ; - aucun lien d'imputabilité direct et certain n'est établi entre l'accident de service et la pathologie ; - Mme A... n'a jamais déclaré de maladie imputable au service ; une entorse ne peut être qualifiée de maladie, pas plus que des douleurs ; - la condition d'invalidité prévue au IV de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983, applicable en l'espèce, n'est pas respectée. Par un mémoire en défense, enregistré le 11 novembre 2023, Mme C... A..., représentée par Me Baulimon, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la commune de Libourne une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - les moyens tirés de l'absence de rechute et de maladie professionnelle sont inopérants ; - les autres moyens soulevés par la commune de Libourne ne sont pas fondés. La clôture de l'instruction a été fixée au 18 décembre 2023 par une ordonnance du 13 novembre 2023. Par une requête, enregistrée le 28 juillet 2023 sous le n° 23BX02137, la commune de Libourne, représentée par Me Bach, demande à la Cour : 1°) de prononcer le sursis à exécution du jugement du tribunal administratif de Bordeaux n° 2106201 du 7 juin 2023 ; 2°) de mettre à la charge de Mme A... une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle reprend les mêmes moyens que dans l'instance enregistrée sous le n° 23BX02136. Par un mémoire en défense, enregistré le 13 novembre 2023, Mme C... A..., représentée par Me Baulimon, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la commune de Libourne le versement d'une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés. La clôture de l'instruction a été fixée au 13 novembre 2023 par une ordonnance du 10 octobre 2023. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - l'ordonnance n° 2017-53 du 9 janvier 2017 ; - le décret n° 2019-301 du 10 avril 2019 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Au cours de l'audience publique, ont été entendus : - le rapport de M. B..., - et les conclusions de M. Duplan, rapporteur public ; - et les observations de Me Bach, pour la commune de Libourne. Vu les notes en délibéré, enregistrées le 9 janvier 2024, présentées pour la commune de Libourne dans les quatre instances. Considérant ce qui suit : 1. Mme C... A..., adjointe technique territoriale, exerce ses fonctions dans le service de la propreté urbaine de la commune de Libourne. Le 4 décembre 2018, elle a été victime pendant son travail d'un traumatisme à l'épaule droite qui a été considéré comme imputable au service par un arrêté du maire de Libourne du 31 décembre 2018. Le 5 mars 2019, elle a repris ses fonctions. Le 20 mars 2019, elle a présenté un certificat médical de rechute de son accident de service. Suivant l'avis défavorable émis par la commission de réforme, réunie le 16 octobre 2019, le maire de Libourne a refusé de reconnaître les arrêts et soins à compter du 20 mars 2019 imputables au service et l'a placée en congé de maladie ordinaire à compter de cette date, par un arrêté du 7 novembre 2019. Si Mme A... a repris ponctuellement le travail, elle a notamment été placé en congé de maladie ordinaire du fait de sa pathologie à l'épaule droite du 14 septembre 2020 au 13 septembre 2021. Après avis du comité médical départemental en date du 6 octobre 2021, elle a été placée en disponibilité d'office pour raisons de santé du 14 septembre 2021 au 13 mars 2022, par un arrêté du maire de Libourne en date du 14 octobre 2021. Mme A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux l'annulation des arrêtés des 7 novembre 2019 et 14 octobre 2021. Par jugement avant-dire droit en date du 20 octobre 2021, le tribunal a ordonné une expertise. Le rapport d'expertise a été déposé au greffe le 15 avril 2022 et complété le 10 juillet 2022. Par un jugement du 12 octobre 2022, le tribunal a annulé l'arrêté du 7 novembre 2019 et enjoint à la commune de Libourne de procéder à la reconnaissance de l'imputabilité au service des arrêts de travail de Mme A... à compter du 20 mars 2019 et à la reconstitution de sa carrière. La commune de Libourne relève appel de ce jugement par la requête enregistrée sous le n° 22BX03035, et demande que soit ordonné le sursis à son exécution par la requête enregistrée sous le n° 23BX01254. Par un jugement du 7 juin 2023, le tribunal a annulé l'arrêté du 14 octobre 2021 et a enjoint à la commune de Libourne de placer Mme A... en congé imputable au service pour la période du 14 septembre 2021 au 13 mars 2022 et de procéder à la reconstitution de sa carrière, en la rétablissant dans ses droits à pension et dans ses droits sociaux. Mme A... relève appel de ce jugement par la requête enregistrée sous le n°23BX02136, et demande que soit ordonné le sursis à son exécution, par la requête enregistrée sous le n° 23BX02137. 2. Les affaires enregistrées sous les numéros 22BX03035, 23BX01254, 23BX02136, et 23BX02137 concernent la situation d'un même agent et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt. 3. L'application des dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires résultant de l'ordonnance du 19 janvier 2017 était manifestement impossible en l'absence d'un texte réglementaire fixant, notamment, les conditions de procédure applicables à l'octroi du nouveau congé pour invalidité temporaire imputable au service. Ces dispositions ne sont ainsi entrées en vigueur, en tant qu'elles s'appliquent à la fonction publique territoriale, qu'à la date d'entrée en vigueur, le 12 avril 2019, du décret du 10 avril 2019 relatif au congé pour invalidité temporaire imputable au service dans la fonction publique territoriale, décret par lequel le pouvoir réglementaire a pris les dispositions réglementaires nécessaires pour cette fonction publique et dont l'intervention était, au demeurant, prévue, sous forme de décret en Conseil d'Etat, par le VI de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 résultant de l'article 10 de l'ordonnance du 19 janvier 2017. Il en résulte que les dispositions de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 dans leur rédaction antérieure à celle résultant de l'ordonnance du 19 janvier 2017 sont demeurées applicables jusqu'à l'entrée en vigueur du décret du 10 avril 2019, et que la commune de Libourne ne pouvait, sans commettre d'erreur de droit, fonder le refus d'imputabilité à l'accident de service survenu antérieurement à cette date sur l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983. 4. Toutefois, lorsqu'il constate que la décision contestée devant lui aurait pu être prise, en vertu du même pouvoir d'appréciation, sur le fondement d'un autre texte que celui dont la méconnaissance est invoquée, le juge de l'excès de pouvoir peut substituer ce fondement à celui qui a servi de base légale à la décision attaquée, sous réserve que l'intéressé ait disposé des garanties dont est assortie l'application du texte sur le fondement duquel la décision aurait dû être prononcée. 5. Aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans sa version applicable à la date de l'accident de service : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. (...) / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident (...) Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales (...) ". Le droit, prévu par ces dispositions, de conserver l'intégralité du traitement est soumis à la condition que la maladie mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'accomplir son service soit en lien direct, mais non nécessairement exclusif, avec un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de ses fonctions. 6. Il ressort des pièces du dossier que, le 4 décembre 2018, alors qu'elle descendait du toit d'un véhicule de nettoyage en prenant appui sur l'une de ses portières, Mme A... a chuté lorsque celle-ci s'est ouverte, ce qui lui a occasionné un traumatisme de l'épaule droite caractérisé par un phénomène de " traction contre résistance ". Même si aucune lésion organique n'a été révélée par l'échographie puis l'IRM passés les 23 janvier et 4 mars 2019 et qu'aucune indication chirurgicale n'a été alors posée, les douleurs provoquées ont justifié la prescription de quinze séances de rééducation et plus de deux mois d'arrêts de travail, son médecin traitant ayant retenu le 4 mars 2019 " une guérison apparente avec possibilité de rechute ultérieure ". Mme A... a repris son activité le 5 mars 2019 mais a présenté un certificat médical de rechute de son accident du travail à compter du 20 mars 2019 pour une récidive des douleurs. Si le diagnostic d'entorse acromio-claviculaire posé par ce certificat n'a pas été confirmé par les examens postérieurs et est réfuté par l'expert désigné par le tribunal, il est constant que Mme A..., lors de la reprise de ses fonctions, a été affectée sur un poste consistant à vider les poubelles et collecter les encombrants, et sollicitant ainsi son épaule alors que le médecin du travail, lors de la visite de reprise en date du 13 mars 2019, avait interdit le port de charges supérieures à 5 kg et les manutentions répétées. L'expert, qui a conclu à l'absence d'éléments médicaux permettant de rattacher le nouvel arrêt de travail à l'accident de service, au motif de l'absence de lésion organique et de séquelle identifiée, affirme néanmoins, dans son complément d'expertise du 10 juillet 2022 comme " probable qu'une activité manuelle relativement physique soit à l'origine d'une majoration de [sa] plainte algique ". En outre, devant la persistance des douleurs, Mme A... sera finalement opérée le 12 août 2021 d'une bursectomie sous-acromiale, une acromioplastie et une ténotomie du biceps. Enfin, il n'est fait état d'aucun autre état antérieur expliquant que l'intéressée, âgée seulement de 29 ans lors de son accident, souffre, à compter du 20 mars 2019, de la même symptomatologie algique que celle ayant suivi son traumatisme de l'épaule, reconnue imputable au service. Dans ces conditions, les arrêts et soins postérieurs au 20 mars 2019 doivent être regardés présentent un lien direct avec l'accident de service initial du 4 décembre 2018. 7. La commune de Libourne ne peut se prévaloir utilement des dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983, qui, ainsi qu'il a été dit, ne sont pas applicables ratione temporis au présent litige. 8. Il résulte de ce qui précède que la commune de Libourne n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par son jugement du 12 octobre 2022, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé l'arrêté du 7 novembre 2019, puis, par voie de conséquence, l'arrêté du 14 octobre 2021 par son jugement du 7 juin 2023. Sur les dépens de première instance : 9. Il résulte de ce qui précède que la commune de Libourne n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 12 octobre 2022, le tribunal administratif de Bordeaux a mis à sa charge, conformément aux dispositions de l'article R. 761-1 du code de justice administrative, les frais et honoraires de l'expertise, liquidés et taxés à la somme de 845 euros par une ordonnance de la présidente du tribunal du 25 avril 2022. Sur les conclusions aux fins de sursis : 10. Le présent arrêt statuant sur les appels de la commune de Libourne dirigés contre les jugements n° 1906239 du 12 octobre 2022 et n° 2106201 du 7 juin 2023 du tribunal administratif de Bordeaux, les conclusions des requêtes n° 23BX01254 et n° 23BX02137 tendant ce qu'il soit sursis à leur exécution ont perdu leur objet. Il n'y a donc pas lieu de statuer sur ces conclusions. Sur les frais de l'instance : 11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme A..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la commune de Libourne demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la commune de Libourne une somme globale de 2 000 euros au titre des frais exposés par Mme A... et non compris dans les dépens. DECIDE : Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions des requêtes n°23BX01254 et n° 23BX02137. Article 2 : Les requêtes n°s 22BX03035 et 23BX02136 de la commune de Libourne sont rejetées. Article 3 : La commune de Libourne versera à Mme A... une somme globale de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Libourne et à Mme C... A.... Délibéré après l'audience du 8 janvier 2024 à laquelle siégeaient : Mme Ghislaine Markarian, présidente, M. Frédéric Faïck, président assesseur, M. Julien Dufour, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 8 février 2024. Le rapporteur, Julien B... La présidente, Ghislaine Markarian La greffière, Catherine Jussy La République mande et ordonne au préfet de la Gironde en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. N°22BX03035-23BX01254-23BX02136-23BX02137 2
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