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CAA de BORDEAUX, 2ème chambre, 07/04/2022, 19BX04088, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. D... B... a demandé au tribunal des pensions de Pau d'annuler la décision du 19 décembre 2016 par laquelle le ministre de la défense a rejeté sa demande de révision de sa pension militaire d'invalidité pour aggravation des quatre infirmités pensionnées et pour des infirmités nouvelles. Par un jugement du 13 décembre 2018, le tribunal a ordonné une expertise sur l'aggravation de l'infirmité " séquelles de traumatisme lombaire " et a rejeté le surplus de la demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 7 février 2019 et des mémoires enregistrés le 18 septembre 2019 et les 31 mars et 7 octobre 2020, M. B..., représenté par la SCP Tucoo-Chala, doit être regardé comme demandant à la cour : 1°) de réformer ce jugement en tant qu'il a rejeté ses demandes relatives à l'aggravation de l'infirmité " hypoacousie bilatérale " et aux infirmités nouvelles " acouphènes " et " otorrhée chronique ", et de réformer dans cette mesure la décision du ministre de la défense du 19 décembre 2016 ; 2°) d'ordonner une expertise médicale afin de déterminer les taux des infirmités " hypoacousie bilatérale ", " acouphènes " et " otorrhée chronique " au 28 décembre 2015, date de la demande ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - l'expert a constaté une aggravation de l'hypoacousie bilatérale justifiant un appareillage audio-prothétique stéréophonique " à prendre en charge au titre de l'article 115 ", et l'administration n'apporte la preuve de l'existence ni d'une cause étrangère, ni d'une affection distincte ; dans le dernier état des connaissances médicales, une surdité sono-traumatique peut s'aggraver par dégradation cochléaire même en l'absence de nouvelle exposition à un milieu bruyant ; le lien de l'aggravation avec le service est ainsi établi ; - l'expert a conclu à une hypoacousie bilatérale de 35,5 décibels pour chaque oreille sans fixer le taux d'invalidité correspondant ; dès lors qu'il n'appartenait pas à l'administration de se substituer à un médecin pour fixer elle-même ce taux à 5 % à partir du guide-barème, c'est à tort que le tribunal a rejeté sa demande d'expertise ; - un examen audiométrique réalisé le 6 octobre 2015 par le docteur C... a relevé une perte auditive de 47,5 décibels à droite et de 53,5 décibels à gauche, correspondant à un taux de 15 à 25 % selon le guide-barème, et un certificat du 15 octobre 2015 a conclu à une surdité bilatérale de perception marquée sur les fréquences aiguës, avec une perte auditive de 55 % à droite et 59 % à gauche, soit une surdité binauriculaire de 55,53 %, ainsi qu'un important trouble de l'intelligibilité à gauche ; c'est à tort que le tribunal a écarté ces pièces au motif que la méthodologie du médecin qu'il a sollicité serait différente de celle de l'expert, sans ordonner une expertise ; - en fixant le taux d'aggravation à 5 %, l'administration a fait une application défavorable du guide-barème selon lequel une perte auditive moyenne de 30 à 39 décibels correspond à un taux compris entre 5 et 10 %. Par des mémoires en défense enregistrés les 18 juin 2019, 8 octobre 2019, 13 août 2020 et 20 novembre 2020, la ministre des armées conclut au rejet de la requête. Elle fait valoir que : - M. B... ne produit aucun élément médical le concernant, permettant d'établir un lien entre un traumatisme sonore subi à l'occasion du service et l'aggravation de l'hypoacousie bilatérale ; - si l'expert n'a pas fixé le taux d'invalidité de l'hypoacousie comme il lui était demandé, il a réalisé un examen audiométrique montrant une perte auditive moyenne de 37,5 décibels pour les deux oreilles, ce qui correspond à un taux de 5 % selon l'évaluation prévue au guide-barème ; l'aggravation de l'hypoacousie bilatérale retenue par l'expert correspond à une chute très sévère de la " voix osseuse " sur les sons aigus, alors que les fréquences les plus touchées, de 3 000 à 8 000 hertz, sont sans influence sur le taux d'invalidité conformément au guide-barème ; - l'administration s'est fondée sur l'avis émis le 9 août 2016 par la commission médicale présidée par un médecin, dont la pertinence ne saurait être contesté ; - les résultats d'examen audiométrique produits par M. B... ne peuvent être pris en compte dès lors qu'ils ne correspondent pas à la méthode de calcul propre aux pensions militaires d'invalidité et que la doctrine médicale reconnaît qu'une hypoacousie sono-traumatique ne s'aggrave pas par elle-même si le sujet n'est plus soumis à des traumatismes sonores ; - les résultats de l'examen réalisé par le docteur C... correspondent, en application du guide-barème, à un taux d'invalidité de 15 %, et non de 15 à 25 % comme l'affirme M. B... ; les audiogrammes réalisés tant par ce médecin que par l'expert aboutissent à des pertes auditives moyennes inférieures à 50 décibels ne pouvant donner lieu à un taux compris entre 10 % et 25 %, et ceux de l'expert aboutissent sans ambiguïté à un taux de 5 % ; - aucun élément n'est produit pour contester l'évaluation à 0 % des taux d'invalidité des infirmités nouvelles " acouphènes " et " otorrhée chronique " ; - l'absence d'imputabilité au service de l'aggravation de l'hypoacousie ne faisant aucun doute, la demande d'expertise ne peut qu'être rejetée. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 ; - le décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme A..., - et les conclusions de Mme Gallier, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. M. B..., incorporé le 14 janvier 1963 et rayé des contrôles le 21 octobre 1989 au grade de capitaine technicien de l'armée de terre, est titulaire d'une pension militaire d'invalidité définitive, concédée au taux de 75 % par arrêté du 16 février 1998, avec jouissance à compter du 30 mars 1990, pour les infirmités de séquelles de méniscectomie du genou droit, de séquelles de fracture fermée de la cuisse droite, de séquelles de traumatisme lombaire et d'hypoacousie bilatérale. Les 29 mai et 20 octobre 2015, il en a sollicité la révision pour aggravation des quatre infirmités pensionnées et pour la prise en compte des infirmités nouvelles d'acouphènes et d'otorrhées chroniques. Par une décision du 19 décembre 2016, le ministre de la défense a rejeté sa demande. M. B... a contesté cette décision devant le tribunal des pensions de Pau, lequel, par un jugement du 13 décembre 2018, a ordonné une expertise sur les séquelles de traumatisme lombaire et a rejeté le surplus de sa demande. Il relève appel de ce jugement en tant seulement que ce rejet porte sur l'aggravation de l'hypoacousie bilatérale et sur les infirmités nouvelles d'acouphènes et d'otorrhées chroniques. La procédure a été transmise à la cour administrative d'appel de Bordeaux en application de la loi du 13 juillet 2018 susvisée. 2. Les conclusions tendant à la réformation du jugement en tant qu'il a rejeté les demandes relatives aux infirmités nouvelles d'acouphènes et d'otorrhées chroniques évaluées à 0 % par l'expert ne sont assorties d'aucun moyen. Par suite, elles ne peuvent qu'être rejetées. 3. Aux termes de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre applicable à la date de la demande : " Ouvrent droit à pension : 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; / (...). " Aux termes de l'article L. 3 du même code : " Lorsqu'il n'est pas possible d'administrer ni la preuve que l'infirmité ou l'aggravation résulte d'une des causes prévues à l'article L. 2, ni la preuve contraire, la présomption d'imputabilité au service bénéficie à l'intéressé à condition : / (...) / 3° En tout état de cause, que soit établie, médicalement, la filiation entre la blessure ou la maladie ayant fait l'objet de la constatation et l'infirmité invoquée " Enfin, l'article L. 29 dispose : " Le titulaire d'une pension d'invalidité concédée à titre définitif peut en demander la révision en invoquant l'aggravation d'une ou plusieurs infirmités en raison desquelles cette pension a été accordée. / Cette demande est recevable sans condition de délai. / La pension ayant fait l'objet de la demande est révisée lorsque le degré d'invalidité résultant de l'infirmité ou de l'ensemble des infirmités est reconnu supérieur de 10 % au moins du pourcentage antérieur. / Toutefois, l'aggravation ne peut être prise en considération que si le supplément d'invalidité est exclusivement imputable aux blessures et aux maladies constitutives des infirmités pour lesquelles la pension a été accordée. / La pension définitive révisée est concédée à titre définitif. " Il résulte de ces dispositions que le droit à pension est destiné à réparer toutes les conséquences des faits de service dommageables telles qu'elles se révèlent par suite de l'évolution physiologique, pour autant qu'aucune cause étrangère, telle qu'une affection distincte de l'affection pensionnée, ne vienne, pour sa part, aggraver l'état de l'intéressé. Ainsi l'aggravation de l'infirmité initiale, si elle est seulement due au vieillissement, peut justifier une révision du taux de la pension. En revanche, si le vieillissement cause une nouvelle infirmité, distincte de l'infirmité pensionnée, qui contribue à l'aggravation de celle-ci, les dispositions précitées de l'article L. 154-1 font obstacle à cette révision, dès lors que l'aggravation est due à une cause étrangère à l'infirmité pensionnée. 4. Il résulte de l'instruction que l'infirmité d'hypoacousie bilatérale pensionnée au taux de 10 % par arrêté du 16 février 1998 incluait une hypoacousie de 15 décibels à droite et 11,25 décibels à gauche correspondant à un taux de 0 % et une perte de sélectivité au taux de 10 %, en lien avec des blessures reçues en service le 24 novembre 1969 et le 10 septembre 1982. L'expert missionné par l'administration, qui a noté que M. B... a continué à pratiquer le tir de 1990 à 1995 au centre d'entraînement pour les réservistes à Bayonne, a conclu à une aggravation de l'hypoacousie bilatérale justifiant un appareillage audio prothétique stéréophonique à prendre en charge au titre de l'article L. 115 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, selon lequel l'Etat doit gratuitement aux titulaires d'une pension d'invalidité attribuée au titre de ce code " les prestations médicales, paramédicales, chirurgicales et pharmaceutiques nécessitées par les infirmités qui donnent lieu à pension, en ce qui concerne exclusivement les accidents et complications résultant de la blessure ou de la maladie qui ouvre droit à pension. " Il a ainsi, implicitement mais nécessairement, admis que l'aggravation de l'hypoacousie imputable au service était seulement due au vieillissement, et non à la contribution d'une nouvelle infirmité, distincte de l'infirmité pensionnée, ce que la ministre des armées ne conteste pas utilement en se bornant à faire valoir, sans tenir compte de l'évolution due au vieillissement, qu'une hypoacousie sono-traumatique ne s'aggrave pas lorsque le sujet n'est plus soumis à des traumatismes sonores. 5. Selon le guide-barème annexé au code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " La perte auditive résulte de deux éléments distincts, qui peuvent coexister ou non : la perte de sensibilité, facteur quantitatif, et la perte de sélectivité, facteur qualitatif. Dans le premier cas le sujet entend et comprend sans suppléance mentale dès que le locuteur élève la voix au-dessus de son seuil d'intelligibilité globale, dans le second, le sujet ne comprend jamais sans effort, quel que soit le niveau d'intensité de la voix du locuteur. / L'évaluation de la perte auditive s'effectue généralement par des procédés dits acoumétriques, ou au cours d'examens dits audiométriques. / (...). " 6. L'expert qui a examiné M. B... le 21 août 2016 pour l'instruction de la demande de révision de la pension a constaté à l'audiogramme tonal une hypoacousie de perception bilatérale avec chute très sévère de la " voix osseuse " sur les sons aigus, et ce dès 2 000 hertz, avec une perte auditive moyenne de 37,5 décibels à droite et à gauche, et à l'audiogramme vocal une perte de discrimination de 25-30 % à droite et de 70-80 % à gauche. Il a omis de fixer le taux correspondant à l'aggravation de la perte auditive moyenne, lequel a été évalué à 5 % par l'avis de la commission consultative médicale repris par l'administration pour rejeter la demande. Toutefois, l'aggravation de 5 % ainsi retenue, avec un maintien à 10 % du taux correspondant à la perte de sélectivité alors qu'une importante perte de discrimination a été constatée, ne rend pas compte d'une évolution justifiant selon l'expert la nécessité d'un appareillage. Dans ces circonstances, sans qu'il soit besoin d'ordonner une nouvelle expertise, le taux d'aggravation de l'infirmité d'hypoacousie doit être fixé à 10 %, et M. B... est fondé à demander la réformation du jugement du tribunal des pensions de Pau du 13 décembre 2018 et de la décision du ministre de la défense du 19 décembre 2016 en tant qu'ils ont rejeté la demande correspondante. 7. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. / La juridiction peut également prescrire d'office cette mesure. " Il résulte de ce qui a été dit au point précédent que la ministre des armées est tenue de faire droit à la demande de M. B... tendant à la prise en compte de l'aggravation de l'infirmité d'hypoacousie bilatérale en portant le taux d'invalidité à 20 % à compter du 20 octobre 2015, date d'enregistrement de sa demande. Par suite, il y a lieu de lui enjoindre de procéder à la liquidation des droits à pension correspondants dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt. 8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement du tribunal des pensions de Pau du 13 décembre 2018 et la décision du ministre de la défense du 19 décembre 2016 sont annulés en tant qu'ils ont rejeté la demande de M. B... relative à l'aggravation de l'infirmité d'hypoacousie bilatérale. Article 2 : Il est enjoint à la ministre des armées de procéder à la liquidation des droits à pension de M. B... en tenant compte de l'infirmité d'hypoacousie bilatérale au taux de 20 % à compter du 20 octobre 2015 dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt. Article 3 : L'Etat versera à M. B... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B... et à la ministre des armées. Délibéré après l'audience du 15 mars 2022 à laquelle siégeaient : Mme Catherine Girault, présidente, Mme Anne Meyer, présidente-assesseure, Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 avril 2022. La rapporteure, Anne A... La présidente, Catherine GiraultLa greffière, Virginie Guillout La République mande et ordonne à la ministre des armées en ce qui la concerne et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. 2 N° 19BX04088
Cours administrative d'appel
Bordeaux
CAA de DOUAI, 3ème chambre, 07/04/2022, 21DA00869, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lille de condamner la commune de Liévin à lui verser la somme totale de 118 038,22 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis et de mettre à la charge de cette commune la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les dépens. Par un jugement n° 1807920 du 19 mars 2021, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et des mémoires complémentaires, enregistrés les 21 avril, 1er juillet, 30 août et 29 décembre 2021, M. A..., représenté par Me Mougel, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) de condamner la commune de Liévin à lui verser la somme totale de 118 038,22 euros en réparation de divers préjudices qu'il estime avoir subis ; 3°) de mettre à la charge de la commune de Liévin la somme de 3 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les dépens. Il soutient que : - les premiers juges ont omis de se prononcer sur la responsabilité sans faute de la commune de Liévin qu'il invoquait dans ses écritures ; - la commune de Liévin engage, d'une part, sa responsabilité pour faute du fait de la méconnaissance de son obligation de sécurité en sa qualité d'employeur et du défaut d'entretien normal de la voirie, et, d'autre part, sa responsabilité sans faute au titre de son accident du 19 janvier 2016 qui a été reconnu imputable au service ; - il sollicite l'indemnisation d'un préjudice économique, le versement de la somme de 7 158,22 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire, de 65 880 euros au titre du déficit fonctionnel permanent, de 7 000 euros au titre des souffrances endurées, de 3 000 euros au titre du préjudice esthétique, de 30 000 euros au titre du préjudice moral et de 5 000 euros au titre du préjudice d'agrément. Par des mémoires en défense, enregistrés les 17 juin et 29 octobre 2021, la commune de Liévin, représentée par Me Dutat, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que le moyen tiré de la faute qu'elle aurait commise en n'établissant pas de document unique de prévention des risques est nouveau en appel et donc irrecevable, qu'aucun des moyens soulevés dans la requête n'est fondé et qu'en tout état de cause, l'imprudence commise par l'appelant est de nature à exonérer intégralement la commune de son éventuelle responsabilité. La procédure a été communiquée à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Artois et à la caisse primaire d'assurance maladie de Flandres qui n'ont pas produit de mémoire. Par une ordonnance du 24 janvier 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 18 février 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - le code du travail ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Nil Carpentier-Daubresse, premier conseiller, - les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public, - et les observations de Me Yarroudh Feurion pour M. A.... Une note en délibéré, présentée pour M. A..., représenté par Me Mougel, a été enregistrée le 25 mars 2022. Considérant ce qui suit : 1. M. A..., technicien principal de 2ème classe, était employé à la commune de Liévin, en dernier lieu sur des fonctions de responsable. Le 19 janvier 2016, vers 9 heures, il a chuté alors qu'il traversait le parking du siège administratif de la commune. Cet accident, qui a été reconnu imputable au service le 26 mai 2016 avec un taux d'incapacité physique permanente de 27 %, lui a causé une hernie discale. M. A... a adressé à la commune de Liévin une réclamation indemnitaire préalable qui a été implicitement rejetée. Il relève appel du jugement du 19 mars 2021 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'indemnisation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait de cet accident. 2. Compte tenu des conditions posées à son octroi et de son mode de calcul, l'allocation temporaire d'invalidité doit être regardée comme ayant pour objet de réparer les pertes de revenus et l'incidence professionnelle résultant de l'incapacité physique causée par un accident de service ou une maladie professionnelle. Les dispositions qui instituent ces prestations déterminent forfaitairement la réparation à laquelle les fonctionnaires concernés peuvent prétendre, au titre de ces chefs de préjudice, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions. Elles ne font en revanche pas obstacle à ce que le fonctionnaire qui subit, du fait de l'invalidité ou de la maladie, des préjudices patrimoniaux d'une autre nature ou des préjudices personnels, obtienne de la personne publique qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice. Elles ne font pas non plus obstacle à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre la personne publique, dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette personne ou à l'état d'un ouvrage public dont l'entretien lui incombait. Sur la régularité du jugement : 3. M. A... soutient que les premiers juges ont omis de se prononcer sur la responsabilité sans faute de la commune de Liévin qu'il invoquait dans ses écritures. Il résulte des écritures de première instance de l'intéressé que la responsabilité sans faute de la commune de Liévin avait été invoquée, de sorte que les premiers juges ont entaché leur jugement d'irrégularité en ne se prononçant pas sur ce fondement de responsabilité. Par suite, ce jugement doit, dans cette mesure, être annulé. 4. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Lille en tant qu'elle concerne la responsabilité sans faute de la commune de Liévin et de statuer, par la voie de l'effet dévolutif de l'appel, pour le surplus des conclusions de la requête. Sur la responsabilité sans faute : 5. Ainsi qu'il a été dit au point 1, l'accident de M. A... survenu le 19 janvier 2016 a été reconnu imputable au service le 26 mai 2016 avec un taux d'incapacité physique permanente de 27 %. Il peut ainsi solliciter de la personne publique qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant des préjudices patrimoniaux d'une autre nature que ceux réparés par l'allocation temporaire d'invalidité ou des préjudices personnels. En ce qui concerne le partage de responsabilité : 6. Il résulte de l'instruction qu'après avoir exercé durant de nombreuses années, les fonctions de municipal de la commune de Liévin, M. A... travaillait depuis près de six mois au siège administratif de cette commune à proximité directe duquel s'est produite la chute dont il a été victime le 19 janvier 2016 vers 9 heures. Il résulte également de l'instruction que, ce jour, M. A... avait les bras chargés de dossiers, qu'il y avait du verglas et que l'intéressé a emprunté l'accès situé à l'arrière du bâtiment alors qu'il n'était pas en possession du badge lui permettant d'entrer par cette porte. Dans ces conditions, l'accident de service survenu le 19 janvier 2016 étant en partie imputable à la faute de M. A..., il sera fait une juste appréciation de la part de responsabilité lui incombant en la fixant à 50 % des conséquences dommageables résultant de cet accident. En ce qui concerne les préjudices subis : 7. L'expert désigné par le tribunal administratif de Lille a établi son rapport le 6 avril 2018 et a fixé la date de consolidation de l'état de santé de M. A... au 16 mai 2017. S'agissant du préjudice financier : 8. Si M. A... sollicite l'indemnisation d'un préjudice correspondant à une perte d'indemnité, il n'apporte aucun élément de nature à établir l'existence de celui-ci. Par suite, sa demande à ce titre doit, en tout état de cause, être rejetée. S'agissant du déficit fonctionnel temporaire : 9. Il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise, que M. A... a subi un déficit fonctionnel temporaire partiel à hauteur de 50 % du 16 janvier au 23 février 2016, soit 38 jours, un déficit fonctionnel total du 24 au 27 février 2016 du fait de son hospitalisation, soit 3 jours, un déficit fonctionnel temporaire partiel à hauteur de 66 % du 28 février au 30 avril 2016, soit 62 jours, et un déficit fonctionnel partiel à hauteur de 25 % du 1er mai 2016 au 16 mai 2017, date de consolidation de son état de santé, soit 380 jours. Il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en retenant un montant total de 2 000 euros, ramené à 1 000 euros après application du partage de responsabilité retenu précédemment. S'agissant du déficit fonctionnel permanent : 10. Il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise, que M. A... a une paralysie du nerf sciatique poplité externe compensée par un appareillage au niveau du membre inférieur droit ainsi qu'une raideur active et une gêne douloureuse au niveau rachidien. Ainsi qu'il a été dit précédemment, la commune de Liévin lui a reconnu un taux d'incapacité physique permanente de 27 % et la date de consolidation a été fixée au 16 mai 2017. Il sera fait une juste appréciation de ce chef de préjudice, M. A... étant âgé de quarante-neuf ans à la date de consolidation de son état de santé, en l'évaluant à la somme de 40 000 euros, ramenée à 20 000 euros après application du partage de responsabilité retenu précédemment. S'agissant des souffrances endurées : 11. Il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise qui a évalué ce poste de préjudice à 3,5 sur une échelle de 7, que M. A... a subi une intervention chirurgicale pour une hernie discale, qu'il a fait l'objet de soins et de rééducation fonctionnelle et qu'il a une sensation douloureuse l'obligeant à recourir à des antalgiques. Il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en retenant un montant de 5 000 euros, ramené à 2 500 euros après application du partage de responsabilité retenu précédemment. S'agissant du préjudice esthétique : 12. Le rapport d'expertise a évalué à 2 sur une échelle de 7 le préjudice esthétique permanent. Eu égard à son atteinte motrice au niveau du membre inférieur droit contraignant l'appelant notamment au port d'une orthèse dynamique de releveur, il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en retenant la somme de 1 500 euros. Par suite, la somme allouée à M. A... s'élève à 750 euros après application du partage de responsabilité retenu précédemment. S'agissant du préjudice moral : 13. Il résulte de l'instruction, notamment des attestations versées au dossier, que la dégradation de l'état de santé de M. A... a eu une incidence sur son moral. Il sera fait une juste appréciation de ce chef de préjudice en retenant un montant de 1 000 euros, ramené à 500 euros après application du partage de responsabilité retenu précédemment. S'agissant du préjudice d'agrément : 14. Il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise et des attestations versées au dossier, que M. A... n'a plus de capacités physiques optimales lui permettant une pratique régulière des activités sportives qu'il exerçait jusqu'alors, qu'il présente une déficience à la marche, à la course, aux déplacements prolongés ainsi qu'une inaptitude aux activités exigeant l'intégrité fonctionnelle des membres inférieurs. Il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en retenant un montant total de 3 000 euros, ramené à 1 500 euros après application du partage de responsabilité retenu précédemment. 15. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... est fondé à solliciter la condamnation de la commune de Liévin à lui verser la somme totale de 26 250 euros en réparation des préjudices résultant de son accident imputable au service survenu le 19 janvier 2016. Sur la responsabilité pour faute : 16. M. A... invoque la responsabilité pour faute de la commune de Liévin du fait, d'une part, de la méconnaissance de son obligation de sécurité en sa qualité d'employeur et, d'autre part, du défaut d'entretien normal de la voirie dont il était usager. Toutefois, il n'établit pas qu'il pourrait prétendre, sur le fondement de la responsabilité pour faute, à une indemnisation complémentaire au titre des préjudices qu'il invoque, à celle octroyée au point précédent. 17. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée par la commune de Liévin, que M. A... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à ce que la commune de Liévin soit condamnée à lui verser une somme complémentaire au titre de sa responsabilité pour faute. Sur les dépens : 18. Aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat. Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagée entre les parties (...) ". 19. Compte tenu de ce qui précède la somme de 840 euros toutes taxes comprises correspondant aux frais de l'expertise, liquidés et taxés par l'ordonnance n° 1708442 du président du tribunal administratif de Lille du 12 avril 2018 doit être mise à la charge définitive de la commune de Liévin. Sur les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 20. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de M. A... qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante au titre des frais exposés par la commune de Liévin et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Liévin la somme de 2 000 euros à verser à M. A... au titre de ces mêmes dispositions. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Lille en date du 19 mars 2021 est annulé en tant qu'il a omis de se prononcer sur la responsabilité sans faute de la commune de Liévin. Article 2 : La commune de Liévin est condamnée à verser à M. A... la somme de 26 250 euros. Article 3 : Les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 840 euros toutes taxes comprises, sont mis à la charge définitive de la commune de Liévin. Article 4 : La commune de Liévin versera à M. A... la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 5 : Le surplus des conclusions présentées par M. A... devant le tribunal administratif de Lille et de celles présentées devant la cour est rejeté. Article 6 : Les conclusions présentées par la commune de Liévin au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à M. A..., à la commune de Liévin, à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Artois et à la caisse primaire d'assurance maladie de Flandres. Délibéré après l'audience publique du 24 mars 2022 à laquelle siégeaient : - Mme Ghislaine Borot, présidente de chambre, - M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur, - M. Nil Carpentier-Daubresse, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 avril 2022. Le rapporteur, Signé : N. Carpentier-Daubresse La présidente de chambre, Signé : G. Borot La greffière, Signé : C. Huls-Carlier La République mande et ordonne au préfet du Pas-de-Calais en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme La greffière, C. Huls-Carlier 1 2 N°21DA00869 1 3 N°"Numéro"
Cours administrative d'appel
Douai
CAA de TOULOUSE, 2ème chambre, 12/04/2022, 19TL24675, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse de condamner la commune de Léguevin (Haute-Garonne) à l'indemniser d'une somme de 1 203 euros, correspondant à la perte de traitement qu'il a subie lors de son placement en demi-traitement entre le 1er octobre 2009 et le 31 janvier 2010, et de condamner cette même commune à lui payer la somme de 78 483,18 euros au titre du montant du prêt immobilier qu'il a contracté pour l'acquisition d'une propriété immobilière en raison de l'illégalité de l'arrêté du 10 août 2010 l'admettant à faire valoir ses droits à la retraite, lesdites sommes étant assorties des intérêts au taux légal à compter de sa demande indemnitaire préalable. Par un jugement n°1702442 du 10 mai 2019, le tribunal administratif de Toulouse a condamné la commune de Léguevin à verser à M. A... la somme correspondant aux arriérés de rémunération à plein traitement dus entre le 1er octobre 2009 et le 31 janvier 2010, assortie des intérêts au taux légal à compter de la date de réception de la demande en paiement du requérant le 27 janvier 2017, mis à sa charge une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et rejeté le surplus des conclusions de la requête. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 3 décembre 2019 au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux sous le n° 19BX04675 puis le 16 janvier 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n° 19TL24675, M. A..., représenté par Me Debaisieux, demande à la cour : 1°) de réformer le jugement n°1702442 du 10 mai 2019 en ce qu'il a rejeté le surplus de sa demande ; 2°) de condamner la commune de Léguevin à lui verser la somme de 78 483,18 euros, majorée des intérêts au taux légal à compter de sa demande indemnitaire initiale ; 3°) de mettre à la charge de la commune de Léguevin la somme de 2 400 euros sur le fondement des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - sa requête n'est pas tardive, dès lors qu'il a déposé une demande d'aide juridictionnelle dans le délai de recours contentieux ; - le tribunal a méconnu la portée des dispositions de l'article 30 du décret n°2003-1306 du 26 décembre 2003 dès lors que la mise à la retraite pour invalidité peut être prononcée d'office, à l'expiration des congés de longue maladie ou de longue durée dont l'agent peut bénéficier, ce qui est son cas ; - il entre dans les prévisions de l'article 36 du même décret, que le tribunal a inexactement interprété, donnant droit à une pension de retraite de la caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales et il incombait à son employeur de mettre en œuvre la procédure correspondante ; - sa reprise d'activité a été très majoritairement induite par la décision de le placer en congé maladie ordinaire à la date de sa consolidation médico-légale, en méconnaissance de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 ; le poste sur lequel a été effectuée la reprise n'avait d'adapté que le nom ; - le lien de causalité entre la privation de son droit à une retraite pour invalidité et l'illégalité des décisions du maire ne saurait être contesté ; il a été privé de la possibilité d'une prise en charge par l'assurance adossée à son prêt immobilier des mensualités d'amortissement de celui-ci en raison de sa mise à la retraite du fait de la limite d'âge et non pour invalidité. Par un mémoire en défense, enregistré le 20 mai 2020, la commune de Léguevin, représentée par la SCP Darribère, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. A... une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle fait valoir que : - les difficultés de M. A... pour régler les mensualités d'amortissement d'un emprunt contracté pour l'acquisition d'une maison de ville sont sans rapport avec sa position statutaire ; - M. A... ne pouvait bénéficier d'une mise à la retraite pour invalidité, dès lors qu'il n'a pas été reconnu inapte définitivement à tout poste et qu'il a repris une activité compatible avec son état de santé. Par une ordonnance du 1er septembre 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 1er octobre 2021. Par une ordonnance en date du 7 janvier 2022, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué à la cour administrative d'appel de Toulouse le jugement de la requête de M. A.... Par une décision du 3 octobre 2019, M. A... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle au taux de 25 %. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée ; - le décret n°2003-1306 du 26 décembre 2003 ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Thierry Teulière, premier conseiller, - les conclusions de Mme Sylvie Cherrier, rapporteure publique, - les observations de Me Debaisieux, représentant M. A..., et les observations de Me Darribère, représentant la commune de Léguevin. Considérant ce qui suit : 1. M. A..., titularisé le 1er novembre 2000 dans le grade d'adjoint technique de 2ème classe, exerçait des fonctions d'agent d'entretien au sein des services de la commune de Léguevin (Haute-Garonne). Victime d'un accident de service survenu le 14 avril 2008, il a été placé en congé pour accident de service jusqu'au 29 juin 2009 puis en congé de maladie ordinaire jusqu'au 31 janvier 2010. A la suite de l'avis du comité médical départemental du 13 janvier 2010 favorable à une reprise à temps partiel thérapeutique à 50 %, M. A... a repris le travail sur un poste de vaguemestre du 1er février au 31 août 2010. L'intéressé a demandé à être admis à faire valoir ses droits à la retraite. Par un arrêté du 10 août 2010, le maire de Léguevin a admis M. A... à faire valoir ses droits à la retraite à compter du 1er septembre 2010 et l'a radié des cadres de la collectivité à compter de cette date. Sa réclamation indemnitaire préalable du 27 janvier 2017 ayant été implicitement rejetée, M. A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse de condamner la commune de Léguevin à l'indemniser d'une somme de 1 203 euros, correspondant à la perte de traitement qu'il a subie lors de son placement en demi-traitement entre le 1er octobre 2009 et le 31 janvier 2010, et de condamner cette même commune à lui payer la somme de 78 483,18 euros au titre du montant du prêt immobilier qu'il a contracté pour l'acquisition d'une propriété immobilière en raison de l'illégalité de l'arrêté du 10 août 2010 l'admettant à faire valoir ses droits à la retraite. Le tribunal administratif de Toulouse a condamné la commune à verser à M. A... la somme correspondant aux arriérés de rémunération à plein traitement dus entre le 1er octobre 2009 et le 31 janvier 2010, assortie des intérêts au taux légal à compter de la date de réception de la demande en paiement du requérant le 27 janvier 2017, mis à sa charge une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et rejeté le surplus des conclusions de la requête. M. A... relève appel de ce jugement. Sur le bien-fondé du jugement : 2. D'une part, aux termes de l'article 30 du décret du 26 décembre 2003 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales : " Le fonctionnaire qui se trouve dans l'impossibilité définitive et absolue de continuer ses fonctions par suite de maladie, blessure ou infirmité grave dûment établie peut être admis à la retraite soit d'office, soit sur demande. / (...) / La mise en retraite d'office pour inaptitude définitive à l'exercice de l'emploi ne peut être prononcée qu'à l'expiration des congés de maladie, des congés de longue maladie et des congés de longue durée dont le fonctionnaire bénéficie en vertu des dispositions statutaires qui lui sont applicables, sauf dans les cas prévus à l'article 39 si l'inaptitude résulte d'une maladie ou d'une infirmité que son caractère définitif et stabilisé ne rend pas susceptible de traitement. (...) ". Aux termes de l'article 31 de ce décret : " Une commission de réforme est constituée dans chaque département pour apprécier la réalité des infirmités invoquées, la preuve de leur imputabilité au service, les conséquences et le taux d'invalidité qu'elles entraînent, l'incapacité permanente à l'exercice des fonctions. (...) / Le pouvoir de décision appartient dans tous les cas à l'autorité qui a qualité pour procéder à la nomination, sous réserve de l'avis conforme de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales. / (...) / La Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales peut, à tout moment, obtenir la communication du dossier complet de l'intéressé, y compris les pièces médicales. Tous renseignements médicaux ou pièces médicales dont la production est indispensable pour l'examen des droits définis au présent titre pourront être communiqués, sur leur demande, aux services administratifs dépendant de l'autorité à laquelle appartient le pouvoir de décision ainsi qu'à ceux de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales. / (...) ". Aux termes de l'article 36 de ce décret : " Le fonctionnaire qui a été mis dans l'impossibilité permanente de continuer ses fonctions en raison d'infirmités résultant de blessures ou de maladies contractées ou aggravées, soit en service, soit en accomplissant un acte de dévouement dans un intérêt public, soit en exposant ses jours pour sauver la vie d'une ou plusieurs personnes, peut être mis à la retraite par anticipation soit sur sa demande, soit d'office, à l'expiration des délais prévus au troisième alinéa de l'article 30 et a droit à la pension rémunérant les services prévue au 2° de l'article 7 et au 2° du I de l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite. ". Aux termes de l'article 39 de ce décret : " Le fonctionnaire qui se trouve dans l'incapacité permanente de continuer ses fonctions en raison d'une invalidité ne résultant pas du service peut être mis à la retraite par anticipation soit sur demande, soit d'office dans les délais prévus au troisième alinéa de l'article 30 (...) ". 3. Il résulte de ces dispositions que lorsqu'un fonctionnaire territorial, ayant épuisé ses droits aux congés de maladie, de longue maladie et de longue durée, se trouve définitivement inapte à l'exercice de tout emploi, il est admis à la retraite, soit d'office, soit à sa demande, après avis de la commission de réforme. 4. D'autre part, il résulte des dispositions combinées de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée, de l'article 81 de cette loi et des articles 30 et 36 du décret précité que le fonctionnaire dont les blessures ou la maladie proviennent d'un accident de service, et qui se trouve dans l'incapacité permanente de continuer ses fonctions au terme d'un délai de douze mois à compter de sa mise en congé de maladie, sans pouvoir bénéficier d'un congé de longue maladie ou d'un congé de longue durée, doit bénéficier de l'adaptation de son poste de travail ou, si celle-ci n'est pas possible, être mis en mesure de demander son reclassement dans un emploi d'un autre corps ou cadre d'emplois, s'il a été déclaré en mesure d'occuper les fonctions correspondantes. S'il ne demande pas son reclassement ou si celui-ci n'est pas possible, il peut être mis d'office à la retraite par anticipation. 5. Il résulte de l'instruction que M. A... a subi un accident imputable au service, le 14 avril 2008, et qu'il a en conséquence été placé en congé pour accident de service puis en congé de maladie ordinaire pour la période du 14 avril 2008 au 31 janvier 2010. Il a conservé des séquelles de cet accident, évaluées à un taux d'incapacité permanente partielle fixé à 15 %. Le rapport médical du docteur C... du 27 juillet 2009 a conclu à l'inaptitude de M. A... à l'exercice de sa profession mais à son aptitude à un reclassement après avis du médecin du travail. Ce dernier a suggéré, le 31 août 2009, à l'issue d'une visite médicale, une reprise du travail à temps partiel thérapeutique. M. A... a alors sollicité cette reprise par une lettre du 12 octobre 2009. Le comité médical départemental, réuni le 13 janvier 2010, s'est prononcé en faveur d'une reprise du travail à temps partiel thérapeutique à 50 % à compter du 13 janvier 2010 puis de son renouvellement jusqu'au 31 août 2010, veille de la mise à la retraite pour ancienneté d'âge et de service de M. A..., dans un second avis du 20 mai 2010. Le 12 mars 2010, la commission départementale de réforme a, quant à elle, estimé l'agent inapte à l'exercice de sa profession actuelle. 6. M. A... n'apporte aucun élément de nature à infirmer l'avis de la commission de réforme qui ne l'a pas déclaré définitivement inapte à tout emploi. Dès lors, il n'est pas fondé à soutenir qu'il devait être mis à la retraite d'office pour invalidité, en application de l'article 30 du décret précité. Par ailleurs, il résulte de l'instruction que l'intéressé a fait l'objet d'une affectation en raison de son état de santé puisqu'il a repris une activité à temps partiel sur un poste de vaguemestre dont il n'est pas établi qu'il aurait été inadapté à son état. Il n'est pas non plus établi que les séquelles de son accident de service, évaluées à 15 % avant sa mise à la retraite, auraient été de nature à justifier une mise à la retraite anticipée pour invalidité. Par suite, M. A... n'est pas davantage fondé à soutenir qu'il devait être mis à la retraite par anticipation en application de l'article 36 du décret précité. 7. Il résulte de ce qui précède qu'en ne prononçant pas son admission à la retraite pour invalidité, le maire n'a pas commis d'illégalité fautive de nature à engager la responsabilité de la commune de Léguevin à l'égard de M. A.... Par suite, M. A..., qui ne précise pas, par ailleurs, quelle information relative à sa situation au regard des textes législatifs et réglementaires relatifs aux pensions civiles et militaires ne lui aurait pas été délivrée, n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande de réparation du préjudice financier constitué par l'absence de prise en charge par l'assurance invalidité de son prêt immobilier des mensualités d'amortissement de ce prêt. Sur les frais liés au litige : 8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Léguevin, qui n'a pas la qualité de partie perdante, verse à M. A... une somme que celui-ci réclame au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. 9. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de la commune de Léguevin présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D E C I D E : Article 1er : La requête M. A... est rejetée. Article 2 : Les conclusions de la commune de Léguevin tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la commune de Léguevin. Délibéré après l'audience du 29 mars 2022 à laquelle siégeaient : Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre, Mme Blin, présidente assesseure, M. Teulière, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 avril 2022. Le rapporteur, T. Teulière La présidente, A. Geslan-Demaret Le greffier, F. Kinach La République mande et ordonne au préfet de la Haute-Garonne en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent jugement. 2 N°19TL24675
Cours administrative d'appel
Toulouse
CAA de BORDEAUX, 3ème chambre, 11/04/2022, 19BX03384, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe de condamner la commune des Abymes à lui verser la somme de 95 000 euros en réparation des préjudices que lui ont causés les fautes commises par cette commune dans la gestion de sa fin de carrière. Par un jugement n° 1800772 du 21 mai 2019, le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté cette demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 14 août 2019 et un mémoire enregistré 5 février 2021, M. A..., représenté par Me Deporcq, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de la Guadeloupe du 21 mai 2019 ; 2°) de condamner la commune des Abymes à lui verser la somme de 95 000 euros assortie des intérêts capitalisés, en réparation des préjudices que lui ont causés les fautes commises par cette commune dans la gestion de sa fin de carrière ; 3°) de mettre à la charge de la commune des Abymes la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - sa requête est recevable ; - la commune a commis des fautes en le plaçant à la retraite d'office à compter du 14 février 2016 en méconnaissance des formalités légales nonobstant sa demande de maintien en activité faite le 25 août 2015 et en s'abstenant d'effectuer en temps utile les démarches lui permettant de percevoir sa pension de retraite ainsi qu'en ne procédant pas à la reconstitution de sa carrière en temps utile pour sa prise en compte dans le calcul de cette pension ; - il justifie de la réalité et du montant de ses préjudices. Par des mémoires enregistrés les 4 janvier et 4 mars 2021, la commune des Abymes, représentée par Me Lafay, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. A... au titre des frais exposés pour l'instance. Il soutient que la requête est irrecevable dès lors qu'elle ne comporte aucun moyen dirigé contre le jugement attaqué ; qu'en outre les moyens invoqués ne sont pas fondés. Par ordonnance du 5 février 2021, la clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 5 mars 2021 à 12h. Un mémoire a été enregistré pour la commune des Abymes le 10 mars 2022 postérieurement à la clôture de l'instruction. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 ; - le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 ; - le décret n° 2009-1744 du 30 décembre 2009 ; - le code de justice administrative. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. C..., - les conclusions de Mme Le Bris, rapporteure publique, - et les observations de Me C..., représentant M A.... Considérant ce qui suit : 1. M. A... a été recruté par la commune des Abymes en qualité de contractuel en 1982. Il a été titularisé au grade de conducteur territorial par un arrêté du 22 janvier 1991. La commune des Abymes a procédé à la reconstitution de sa carrière par arrêté du 15 juin 2015. Par arrêté en date du 5 janvier 2016, M. A... a été admis à faire valoir ses droits à la retraite à compter du 14 février 2016. M. A... relève appel du jugement du 21 mai 2019 par lequel le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté sa demande tendant à ce que la commune des Abymes (Guadeloupe) soit condamnée à lui verser la somme de 95 000 euros en réparation des préjudices que lui ont causés les fautes commises par cette commune dans la gestion de sa fin de carrière et, en particulier, l'impossibilité de percevoir sa pension de retraite. 2. En premier lieu, M. A..., né le 13 février 1951, a été atteint par la limite d'âge le 13 février 2016. Il résulte de l'instruction qu'il a présenté une demande de prolongation d'activité " une fois rétabli dans son bon droit " par une lettre datée du 28 août 2015. M. A... entend se prévaloir des dispositions de l'article 4 du décret n° 2009-1744 du 30 décembre 2009 pris pour l'application de l'article 1-3 de la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 relative à la limite d'âge dans la fonction publique et le secteur public, aux termes desquelles le silence gardé par l'administration pendant plus de trois mois sur la demande de prolongation d'activité vaut décision implicite d'acceptation. Toutefois, il résulte du titre même de ce décret ainsi que de son article 1er que ces dispositions ne sont applicables qu'aux fonctionnaires appartenant à des corps ou des cadres d'emplois dont la limite d'âge est inférieure à 65 ans, ce qui n'est pas le cas de M. A..., dont la situation, en sa qualité de conducteur territorial, est régie par les dispositions de droit commun de l'article 1-1 de la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 selon lequel les intéressés peuvent " lorsqu'ils atteignent les limites d'âge applicables aux corps auxquels ils appartiennent, sur leur demande, sous réserve de l'intérêt du service et de leur aptitude physique, être maintenus en activité. " Ces dispositions ne prévoient pas de délai particulier concernant les demandes de maintien en activité et ne prévoient pas davantage un régime d'acceptation tacite. 3. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est fondé à soutenir ni que la prétendue tardiveté de sa demande de prolongation d'activité au regard des dispositions de l'article 4 du décret n° 2009-1744 du 30 décembre 2009 résulterait de fautes commises par la commune des Abymes ni qu'une décision implicite d'acceptation serait née du silence gardé par l'administration sur sa demande. En outre, faute d'avoir demandé à la commune de lui communiquer les motifs de la décision implicite rejetant cette demande, il n'est pas davantage fondé à soutenir que cette décision n'est pas motivée. Enfin, la circonstance que l'administration n'ait pas accusé réception de cette demande, à la supposer établie, demeure sans incidence sur la légalité de la décision rejetant cette demande. 4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 2 du décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 : " Les fonctionnaires mentionnés à l'article 1er peuvent prétendre à pension au titre du présent décret dans les conditions définies aux articles 25 et 26 après avoir été radiés des cadres soit d'office, soit sur leur demande. / Ces fonctionnaires doivent être admis d'office à la retraite dès qu'ils atteignent la limite d'âge qui leur est applicable, sous réserve de l'application des articles 1er-1 à 1er-3 de la loi du 13 septembre 1984 susvisée et sans préjudice des dispositions de l'article 10 du présent décret relatif au maintien temporaire en fonctions. L'admission à la retraite est prononcée, après avis de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales, par l'autorité qui a qualité pour procéder à la nomination. " L'article 59 du même décret précise que : " I. - L'attribution d'une pension, d'une rente viagère d'invalidité ou de la majoration spéciale prévue à l'article 34 est subordonnée à la présentation d'une demande adressée au directeur général de la Caisse des dépôts et consignations. La demande d'attribution d'une pension doit être adressée au moins six mois avant la date souhaitée pour l'admission à la retraite. L'employeur doit faire parvenir au moins trois mois avant la date de radiation des cadres du fonctionnaire le dossier afférent à une demande d'attribution de pension. ". 5. Il résulte de la lettre que la caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL) a adressé à la commune des Abymes le 5 février 2016 que cette dernière lui a adressé le dossier de demande de pension concernant M. A... le 5 janvier 2016, soit moins de trois mois avant la date de radiation des cadres en méconnaissance des dispositions précitées de l'article 59 du décret du 26 décembre 2003 et que ce dossier était incomplet. Toutefois, il résulte de l'instruction et n'est aucunement contesté par M. A... que, par lettre du 26 novembre 2015, la commune l'a invité à lui apporter les pièces nécessaires au traitement de son dossier de départ en retraite et qu'elle lui a adressé le 18 décembre suivant une lettre de relance insistant sur l'urgence de cette démarche mais que celui-ci n'a produit les pièces demandées et signé sa demande de pension ni lors de l'entretien qui s'est tenu le 26 janvier 2016 ni ultérieurement. Ainsi, la transmission tardive d'un dossier par ailleurs incomplet ne permettant pas à M. A... de percevoir sa pension de retraite ne résulte pas d'une négligence de la commune mais, uniquement, du refus de l'appelant de lui communiquer les pièces permettant de compléter son dossier et de le communiquer à la CNRACL dans les délais légaux. Par suite, celui-ci n'est pas fondé à soutenir qu'il ne perçoit aucune pension de retraite en raison des manquements qu'aurait commis la commune. 6. En troisième et dernier lieu, si M. A... soutient que les fautes commises par la commune dans la gestion administrative de sa carrière lui auraient causé un préjudice financier qui n'aurait pas été réparé par l'arrêté du 15 juin 2015 portant reconstitution de carrière, ce moyen n'est pas assorti des précisions permettant d'en apprécier la portée. 7. Il résulte de tout ce qui précède et sans qu'il soit besoin d'examiner la recevabilité de la requête, que M. A... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont considéré qu'il n'était pas établi que la commune des Abymes avait commis des fautes en lien direct et certain avec les préjudices dont il se prévaut et ont, par voie de conséquence, rejeté ses conclusions indemnitaires. Par suite, sa requête doit être rejetée, y compris ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. 8. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de la commune des Abymes tendant à l'application des mêmes dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DÉCIDE : Article 1er : la requête de M. A... est rejetée. Article 2 : les conclusions de la commune des Abymes tendant à l'application des mêmes dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la commune des Abymes. Délibéré après l'audience du 14 mars 2022 à laquelle siégeaient : M. Didier Artus, président, Mme Frédéric Faïck, président-assesseur, M. Manuel Bourgeois, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 11 avril 2022. Le rapporteur, Manuel C... Le président, Didier Artus La greffière, Sylvie Hayet La République mande et ordonne au préfet de la Guadeloupe en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. N°19BX03384 2
Cours administrative d'appel
Bordeaux
CAA de MARSEILLE, 4ème chambre, 05/04/2022, 20MA00081, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme C... B... a demandé au tribunal administratif de Bastia d'annuler le titre de recette n° 4466 émis à son encontre par le département de la Haute-Corse et rendu exécutoire le 22 octobre 2015, de la décharger de la somme de 25 107, 39 euros mise à sa charge par ce titre et de condamner la collectivité de Corse, venant aux droits du département, à lui verser la somme de 19 222, 84 euros en réparation des préjudices qu'elle dit avoir subis du fait des négligences commises par le département. Par un jugement n° 1601068 du 7 novembre 2019, le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande et a mis à sa charge la somme de 1 000 euros à verser à la collectivité de Corse sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Procédure devant la Cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés le 7 janvier 2020 et le 3 mars 2022, Mme B..., représenté par Me Perino Scarcella, demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bastia du 7 novembre 2019 ; 2°) d'annuler le titre de recette n° 4466 émis à son encontre par le département de la Haute-Corse et rendu exécutoire le 22 octobre 2015, ainsi que l'avis des sommes à payer ; 3°) de la décharger de la somme de 25 107, 39 euros mise à sa charge par ce titre ; 4°) de condamner la collectivité de Corse, venant aux droits du département, à lui verser la somme de 19 222, 84 euros en réparation des préjudices qu'elle dit avoir subis du fait des négligences commises par le département ; 5°) de mettre à la charge de la collectivité de Corse la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - sa demande dirigée contre le titre exécutoire est recevable, puisqu'elle a produit l'avis des sommes à payer, seul acte qui lui a été notifié ; - le titre exécutoire en litige est affecté d'un vice de forme, faute de comporter la signature de son auteur, fût-elle électronique, en méconnaissance de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000, devenu l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration, dont les dispositions ont été reprises à l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales, et pour le défendeur de justifier que la signature électronique alléguée a été certifiée ; - le titre exécutoire ne comporte pas les bases de liquidation, à défaut de préciser les modalités de calcul pour chacune des quatorze périodes visées ; - en ce qu'il constitue le retrait de décisions individuelles créatrices de droits, prises non pas sous l'empire d'une erreur de liquidation, mais volontairement par l'administration, conformément aux dispositions statutaires applicables, plus de quatre mois après leur prononcé, le titre exécutoire, qui aurait dû être précédé d'une procédure contradictoire, en application de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration, est illégal ; - l'engagement qu'elle a pris le 29 août 2014 de rembourser les sommes versées jusqu'à la liquidation de sa pension de retraite, sous la contrainte et dans un état de fragilité psychologique, est sans incidence sur l'illégalité de ce retrait ; - en lui versant des sommes qui ne lui étaient pas dues, puis en en exigeant le remboursement, en tardant à traiter son dossier de demande d'admission à la retraite, et en omettant d'informer la caisse nationale de retraite des agents de collectivités locales du jugement annulant l'arrêté du 31 août 2015, le département a commis une faute de nature à engager sa responsabilité à son égard ; - le préjudice subi, évalué à la somme de 19 222, 84 euros, tenant compte de la renonciation du département à exiger d'elle la somme de 5 884, 55 euros pour la période du 1er août 2014 au 4 novembre 2014, correspond à la somme dont elle a été privée pendant la période en litige et aux préjudice moral et troubles dans les conditions d'existence subis ; - c'est à tort que le tribunal l'a condamnée à verser à la collectivité de Corse une somme au titre des frais d'instance, l'introduction de sa demande, certes rejetée par les premiers juges, ayant été nécessaire pour que l'administration renonce à une partie de sa créance. Par des mémoires en défense, enregistrés les 6 janvier et 4 mars 2022, la collectivité de Corse, venant aux droits du département de la Haute-Corse en application de l'article L. 4421-1 du code général des collectivités territoriales, représentée par Me Muscatelli, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de son auteur la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, en soutenant que les moyens d'appel ne sont pas fondés. Par ordonnance du 18 février 2022 la clôture d'instruction a été fixée au 7 mars 2022, à 12 heures. Une lettre du 15 mars 2022, prise sur le fondement de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, a informé les parties de ce que la Cour était susceptible de fonder son arrêt sur le moyen, relevé d'office, tiré du non-lieu à statuer sur les conclusions tendant à l'annulation du titre exécutoire et à la décharge totale de la somme ainsi recouvrée, en tant qu'elles concernent la somme de 5 884,55 euros, pour la période du 27 juillet 2014 au 4 novembre 2014. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des collectivités territoriales ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - la loi n° 84-56 du 26 janvier 1984 ; - le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. A..., - et les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. Attachée principale de la fonction publique territoriale, en poste au département de la ..., Mme B... a été déclarée par la commission de réforme le 4 novembre 2014, inapte de manière définitive et absolue à ses fonctions et à toutes fonctions, à compter du 25 juillet 2014. Dans l'attente de l'avis de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL), le président du ... de ... l'a mise en disponibilité d'office pour raison de santé par arrêté du 26 novembre 2014, à compter du 25 juillet 2014. Alors que la CNRACL a donné un avis favorable à sa radiation des cadres pour invalidité à compter du 5 novembre 2014, le président du ... de ... l'a admise à faire valoir ses droits à la retraite pour invalidité à compter du 5 novembre 2014, par arrêté du 31 août 2015 qui prononce en même temps sa radiation des cadres à compter de la même date. Par arrêté du 22 octobre 2015, l'admission à la retraite de Mme B... et sa radiation des cadres pour invalidité ont été déclarées imputables au service. Par un titre de recette émis et rendu exécutoire le 22 octobre 2015, le président du ... de ... a réclamé à Mme B... le remboursement de la somme de 25 107, 39 euros au titre des salaires qu'elle a perçus pour la période du 25 juillet 2014 jusqu'à septembre 2015 inclus. Par un jugement du 7 novembre 2019, dont Mme B... relève appel, le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant d'une part à l'annulation de ce titre de recette ainsi qu'à sa décharge de l'obligation de payer la somme de 25 107, 39 euros, et d'autre part à la condamnation de la collectivité de Corse, venue aux droits du département de la ... en application de l'article L. 4421-1 du code général des collectivités territoriales, à lui verser cette même somme en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait des fautes commises par le département dans la gestion de son dossier de retraite et du retard pris dans son traitement. Sur l'étendue du litige : 2. Il résulte de l'instruction qu'un état de reversement du 29 décembre 2016, qui annule et remplace l'état du 12 octobre 2015, a ramené la somme réclamée à Mme B..., initialement fixée à 25 107, 39 euros par le titre exécutoire en litige, à la somme de 19 222, 84 euros, due pour la période du 5 novembre 2014 au 22 octobre 2015. Il résulte du bordereau de situation des produits locaux non soldés dus à la trésorerie, daté du 19 janvier 2017, que le même jour, un mandat a été pris en faveur de Mme B... pour lui verser la somme de 5 884, 55 euros, correspondant aux sommes perçues par elle pour la période du 27 juillet 2014 au 4 novembre 2014 dont le recouvrement était recherché par le titre en litige. Il suit de là que les conclusions de Mme B... tendant à l'annulation de ce titre et à la décharge de l'obligation de payer la somme de 25 107, 39 euros ont perdu leur objet en tant qu'elles concernent la somme de 5 884, 55 euros, pour la période du 27 juillet 2014 au 4 novembre 2014. Sur l'opposition à exécution : En ce qui concerne la recevabilité de la demande de première instance : 3. En produisant l'avis des sommes à payer qui se réfère au titre émis par le président du conseil départemental de la ... et rendu exécutoire le 22 octobre 2015 et qui est le seul acte à lui avoir été notifié, Mme B... doit être regardée comme ayant dûment produit ce titre dont elle demande l'annulation, conformément aux dispositions de l'article R. 421-1 du code de justice administrative. En ce qui concerne le bien-fondé de la créance : 4. Aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. (...). ". L'article 7 du décret du 26 décembre 2003 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales dispose que : " Le droit à pension est acquis : / 1° Aux fonctionnaires après deux années accomplies de services civiles et militaires effectifs. / / 2° Sans condition de durée de services aux fonctionnaires rayés des cadres pour invalidité résultant ou non de l'exercice des fonctions. ". Aux termes des dispositions de l'article 17 du décret n°87-602 du 30 juillet 1987 pris pour l'application de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif à l'organisation des comités médicaux, aux conditions d'aptitude physique et au régime des congés de maladie des fonctionnaires territoriaux, dans sa rédaction issue du décret n° 2011-1245 du 5 octobre 2011 : "Lorsque le fonctionnaire a obtenu pendant une période de douze mois consécutifs des congés de maladie d'une durée totale de douze mois, il ne peut, à l'expiration de sa dernière période de congé, reprendre son service sans l'avis favorable du comité médical. En cas d'avis défavorable, il est soit mis en disponibilité, soit reclassé dans un autre emploi, soit, s'il est reconnu définitivement inapte à l'exercice de tout emploi, admis à la retraite après avis de la commission de réforme. Le paiement du demi-traitement est maintenu, le cas échéant, jusqu'à la date de la décision de reprise de service, de reclassement, de mise en disponibilité ou d'admission à la retraite. / Le fonctionnaire qui, à l'expiration de son congé de maladie, refuse sans motif valable lié à son état de santé le poste qui lui est assigné peut être licencié après avis de la commission administrative paritaire. ". Enfin, aux termes de l'article 37 du même décret : " Le fonctionnaire ne pouvant, à l'expiration de la dernière période de congé de longue maladie ou de longue durée, reprendre son service est soit reclassé dans un autre emploi (...), soit mis en disponibilité, soit admis à la retraite après avis de la commission de réforme (...) Pendant toute la durée de la procédure requérant soit l'avis du comité médical, soit l'avis de la commission de réforme, soit l'avis de ces deux instances, le paiement du demi-traitement est maintenu jusqu'à la date de la décision de reprise de service ou de réintégration, de reclassement, de mise en disponibilité ou d'admission à la retraite. ". 5. Il résulte de ces dispositions que lorsque le fonctionnaire, à l'issue d'un congé de longue maladie ou de longue durée ne peut reprendre ses fonctions, il a droit au versement d'un demi-traitement pendant la durée de la procédure nécessitant l'avis du comité médical ou de la commission de réforme ou, le cas échéant, de la CNRACL pour ce qui concerne son admission à la retraite. La circonstance que la décision prononçant la reprise d'activité, le reclassement, la mise en disponibilité ou l'admission à la retraite rétroagisse à la date de fin des congés de maladie n'a pas pour effet de retirer le caractère créateur de droits du maintien du demi-traitement prévu par les dispositions de l'article 37 du décret du 30 juillet 1987. Par suite, le demi-traitement versé au titre de cet article ne présente pas un caractère provisoire et reste acquis à l'agent alors même que celui-ci a, par la suite, été placé rétroactivement dans une position statutaire n'ouvrant pas par elle-même droit à ce versement. Il s'ensuit, plus particulièrement, que lorsque l'agent est admis rétroactivement à la retraite par la CNRACL et qu'à ce titre, il bénéficie effectivement d'un versement d'arriérés de pension, son employeur n'est pas pour autant en droit de demander le reversement de ces demi-traitements qui restent acquis à l'agent. 6. Il résulte de l'instruction que, dès le 24 juillet 2006, Mme B... a été placée en position de congé de longue durée, dont la dernière prolongation, pour la période du 25 janvier au 24 juillet 2014, a reçu l'avis favorable de la commission départementale de réforme le 22 avril 2014. A l'épuisement de ses droits à congé de longue durée, le 24 juillet 2014, et jusqu'à la date de son admission à la retraite pour invalidité, prononcée par arrêté du 22 octobre 2015 à compter du 5 novembre 2014, Mme B... avait donc droit, ainsi qu'elle le soutient, au paiement d'un demi-traitement mensuel en application de l'article 37 du décret du 30 juillet 1987, malgré son placement d'office en disponibilité pour raison de santé à compter du 25 juillet 2014, par arrêté du 26 novembre 2014, décidé sans maintien du traitement. Même si une pension de retraite a été versée rétroactivement à l'agent à compter du 5 novembre 2014, le demi-traitement qui lui a été servi par le département de la ... à compter de cette même date, lui était définitivement acquis en application de la règle rappelée au point 5. Le département de la ... était donc redevable de cette somme dès lors qu'aucune disposition législative ou règlementaire ne permet d'adapter cette règle dans l'hypothèse où un fonctionnaire bénéficierait sur une même période et de manière cumulative d'une pension de retraite, versée rétroactivement par la suite après avis favorable de la CNRACL, et d'un demi-traitement servi par la collectivité sur le fondement de l'article 37 précité. 7. Certes, il résulte également de l'instruction que, par lettre du 29 août 2014, reçue par les services du département de ... le 4 septembre, Mme B... s'est engagée à rembourser le département de toutes les sommes qu'elle percevrait de lui jusqu'à la liquidation de sa pension de retraite, dans le cadre de la procédure d'admission à la retraite pour invalidité et dès son placement en disponibilité d'office pour raison de santé à compter du 25 juillet 2014. Toutefois, compte tenu du caractère statutaire de la règle rappelée au point 5, ni cet engagement à rembourser l'intégralité des sommes reçues au terme de cette période, ni son acceptation par le département, ne sont de nature à conférer aux versements un caractère révocable, insusceptible de créer à son bénéfice un droit à leur maintien. 8. Dans ces conditions, en réclamant à Mme B..., par le titre en litige, le remboursement de la somme de 19 222, 84 euros, perçue sur la période du 5 novembre 2014 au 22 octobre 2015, le président du ... de ... doit être regardé non pas comme ayant procédé à la récupération de sommes versées du fait d'une simple erreur de liquidation, comme le soutient la collectivité de Corse, mais comme ayant retiré implicitement mais nécessairement une décision créatrice de droits, laquelle n'a pas été obtenue au moyen d'une fraude. Par suite, Mme B... est fondée à prétendre que ce titre est illégal pour n'avoir pas été précédé d'une procédure contradictoire conformément à l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration, applicable aux relations entre l'administration et ses agents, et pour méconnaissance des conditions de retrait d'une décision légale créatrice de droits posées par l'article L. 242-1 du même code. Elle est donc fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bastia a rejeté le surplus de son opposition à exécution, et à demander l'annulation de ce titre et la décharge de l'obligation de payer la somme de 19 222, 84 euros. Sur les conclusions indemnitaires : 9. D'une part, il résulte de l'instruction que, alors que les droits à congé de longue durée de Mme B..., pour maladie imputable au service, expiraient le 24 juillet 2014, le département de ... l'a invitée le 19 mai 2014, soit trois semaines après l'avis favorable du comité médical à la dernière prolongation de son congé, à lui faire connaître ses intentions dans les plus brefs délais, " compte tenu des délais d'instruction de la commission départementale de réforme ". Par lettre du 1er juin 2014, reçue le 9 juin, Mme B... a indiqué, en réponse, souhaiter son admission à la retraite pour invalidité à compter du 25 juillet 2014. La requérante ne livre aucun élément de nature à établir que son employeur aurait dû prendre attache avec elle à une date antérieure au 19 mai 2014. Il ne résulte en outre d'aucune des pièces du dossier que le département de ... aurait alors tardé à saisir de la demande de Mme B... la commission départementale de réforme, qui a rendu le 4 novembre 2014 un avis la déclarant inapte de manière définitive et absolue à ses fonctions et à toutes fonctions, à compter du 25 juillet 2014. S'il ressort du formulaire de demande de pension d'invalidité, qui porte la date du 13 avril 2015 avec la signature de la requérante attestant ainsi de l'exactitude des informations, et le cachet du département daté, de manière peu lisible, du 3 mars ou 3 mai 2015, que cette demande a été présentée le 5 janvier 2015, Mme B... indique elle-même que les services du département ont rencontré des difficultés pour collecter l'ensemble des informations relatives à sa carrière, auprès de ses précédents employeurs. L'allégation de Mme B..., selon laquelle son dossier, adressé par le département à la CNRACL par courrier simple, aurait été égaré, n'est pas assortie des éléments de précision suffisants pour permettre d'en apprécier la portée sur le délai de traitement de sa demande d'admission à la retraite. La circonstance, avancée par l'appelante sans être contredite, que la caisse n'a pas eu connaissance de la totalité du jugement du tribunal administratif du 15 octobre 2009, reconnaissant l'imputabilité de sa maladie au service, demeure sans incidence sur le délai dans lequel est intervenu l'arrêté rectificatif du 22 octobre 2015 l'admettant à la retraite pour invalidité, dès lors que la caisse a émis un avis favorable à l'admission dès le 20 août 2015, visé par l'arrêté initial d'admission à la retraite du 31 août 2015. Ainsi, et alors que la renonciation par le département à recouvrer auprès d'elle la somme de 5 884, 55 euros n'est pas de nature, par elle-même, à révéler une reconnaissance de comportement fautif, Mme B... n'est pas fondée à prétendre que son employeur aurait accusé un retard fautif dans le traitement de son dossier de demande d'admission à la retraite pour invalidité. 10. D'autre part, Mme B..., qui n'invoque pas le caractère fautif du titre exécutoire en litige, ne peut rechercher la responsabilité pour faute de la collectivité de Corse en se prévalant du retard mis par le département de la ... pour exiger par ce titre le remboursement de la somme qu'elle a perçue du 5 novembre 2014 au 22 octobre 2015 et qu'elle qualifie d'indue, dès lors que, ainsi qu'il a été dit aux points 5 à 7, cette somme correspond à un avantage financier auquel elle avait droit. 11. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bastia a rejeté ses conclusions indemnitaires. Sur les frais liés au litige : 12. D'une part, le présent arrêt annulant le jugement attaqué en tant qu'il a rejeté les prétentions de Mme B... dirigées contre le titre exécutoire du 22 octobre 2015, c'est à tort que les premiers juges ont mis à sa charge, par l'article 2 de ce jugement, la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par la collectivité de Corse et non compris dans les dépens. Il y a donc lieu d'annuler également le jugement attaqué dans cette mesure. 13. D'autre part, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de Mme B..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, au titre des frais exposés par la collectivité de Corse et non compris dans les dépens. Les conclusions présentées à ce titre par la collectivité doivent donc être rejetées. En revanche, il y a lieu, sur le fondement des mêmes dispositions, de mettre à la charge de la collectivité de Corse, au bénéfice de Mme B..., la somme de 1 500 euros. DECIDE : Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de Mme B... tendant à l'annulation du titre exécutoire du 22 octobre 2015 et à la décharge de l'obligation de payer la somme de 25 107, 39 euros, en tant qu'elles portent sur la somme de 5 884, 55 euros. Article 2 : Le titre émis et rendu exécutoire le 22 octobre 2015 par le président du conseil départemental de la ... est annulé en tant qu'il porte sur la somme de 19 222, 84 euros. Article 3 : Mme B... est déchargée de l'obligation de payer la somme de 19 222, 84 euros résultant du titre exécutoire du 22 octobre 2015. Article 4 : Le jugement attaqué est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt. Article 5 : La collectivité de Corse versera à Mme B... la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 6 : Le surplus des conclusions de Mme B... et les conclusions de la collectivité de Corse présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés. Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B... et à la collectivité de Corse. Délibéré après l'audience du 22 mars 2022, où siégeaient : - M. Badie, président, - M. Revert, président assesseur, - M. Ury, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 avril 2022. N° 20MA000812
Cours administrative d'appel
Marseille
CAA de BORDEAUX, 2ème chambre, 07/04/2022, 19BX04358, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal des pensions de Pau d'annuler l'arrêté de la ministre des armées du 3 avril 2018, d'une part, en ce qu'il porte refus d'octroi d'une pension militaire d'invalidité au titre des infirmités de séquelles d'écrasement du pouce droit, séquelles de traumatisme de la hanche gauche et séquelles de traumatismes du genou droit, d'autre part, en ce qu'il lui concède une pension à titre temporaire s'agissant de l'infirmité de séquelles de traumatisme de l'épaule gauche, et de lui accorder le bénéfice d'une demi-part supplémentaire de quotient familial. Par un jugement n° 2019/24 du 22 août 2019, le tribunal des pensions de Pau a reconnu à M. B... le droit à une pension militaire d'invalidité au titre des infirmités de séquelles du traumatisme du pouce droit et séquelles de traumatisme de la hanche gauche et a rejeté le surplus de ses demandes. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 21 octobre 2019, M. B..., représenté par Me Peneau, a demandé à la cour régionale des pensions militaires d'invalidité de Pau : 1°) de réformer ce jugement en tant qu'il n'a fait que partiellement droit à ses demandes; 2°) de lui reconnaître un droit à une pension militaire d'invalidité au titre de l'infirmité de séquelles de traumatismes du genou droit; 3°) de convertir sa pension temporaire au titre des séquelles de traumatisme de l'épaule gauche en pension définitive au taux de 20 % à compter du 3 juin 2018 ou, à titre subsidiaire, de lui accorder le renouvellement de sa pension temporaire dans l'attente d'un examen médical; 4°) de fixer son taux global d'invalidité à 72 %; 5°) de lui accorder le bénéfice d'une demi-part supplémentaire de quotient familial. Il soutient que : - le jugement doit être confirmé s'agissant des infirmités de séquelles de traumatisme du pouce droit et de séquelles de traumatisme de la hanche gauche, au titre desquelles un droit à pension au taux de 10 % chacune lui a été reconnu à titre temporaire; - le tribunal a écarté à tort sa demande de pension au titre des séquelles de traumatismes du genou droit; cette infirmité est imputable aux accidents de service survenus les 13 décembre 1993 et 9 octobre 1997; l'expert désigné par l'administration a, à deux reprises, retenu un lien entre l'infirmité et les accidents en cause; cette analyse est confortée par les mentions figurant sur son dossier médical militaire lors des accidents de 1993 et 1997; plusieurs avis médicaux reconnaissent l'imputabilité de l'infirmité aux accidents; le stade avancé de sa pathologie tend à montrer son ancienneté; il a pu supporter les douleurs au niveau du genou droit grâce à sa masse musculaire qui permettait la compensation des fragilités articulaires; le taux d'invalidité afférent à cette infirmité doit être évalué à 10 %, ainsi que le préconise le médecin expert; - la pension concédée à titre temporaire au titre des séquelles de traumatisme de l'épaule gauche devait devenir définitive à l'issue de la première période triennale s'agissant d'une infirmité résultant d'une blessure, et alors que cette infirmité est permanente; l'administration tardant à convertir sa pension temporaire en pension définitive, il se trouve privé d'une partie de sa pension; - son taux global d'invalidité doit être fixé à 72 % après mise en œuvre de la règle de Balthazar; - en vertu de l'instruction fiscale publiée au Bulletin BOI-IR-LIQ-10-20-20-20-20160229, il a droit à la demi-part supplémentaire de quotient familial attribuée aux bénéficiaires de pensions militaires d'invalidité à un taux supérieur à 40 %. Par un acte de transmission des dossiers, en application des dispositions du décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018 portant transfert de compétence entre juridictions de l'ordre administratif, la cour administrative d'appel de Bordeaux a été saisie de la requête de M. B..., enregistrée sous le n° 19BX04358. Par des mémoires en défense, enregistrés les 9 décembre 2020 et 3 mai 2021, la ministre des armées conclut au rejet de la requête. Elle soutient que : - la pension concédée au titre des séquelles de traumatisme de l'épaule gauche a été à juste titre concédée à titre temporaire pour une période de trois ans à compter du 4 juin 2015; l'arrêté du 3 avril 2018 ne s'est pas prononcé sur la conversion de cette pension temporaire en pension définitive; la pension afférente à cette infirmité a été concédée à titre définitif à compter du 4 juin 2018 par un arrêté du 27 janvier 2020; - les constatations médicales établies à la suite des accidents de service survenus en 1993 et 1997 ne mentionnent pas de rupture du ligament croisé antérieur du genou droit; lors d'une consultation médicale du 6 janvier 1994, les douleurs avaient complètement disparu; le requérant présentait une distorsion ligamentaire antérieurement à l'accident du 13 décembre 1993 et a présenté à plusieurs reprises des gonalgies droites en mai 1994 et septembre 1996, sans lien avec les accidents de 1993 et 1997; lors d'une consultation médicale du 22 octobre 1997, les radiographies étaient normales et l'intéressé ne présentait qu'une petite douleur sous rotulienne; il n'existe donc aucune filiation médicale entre les accidents de 1993 et 1997 et l'infirmité invoquée; le requérant ne démontre pas avoir poursuivi de soins entre ces accidents et sa demande de pension formulée en 2015, ni avoir fait état d'une pathologie du genou droit; un examen réalisé le 15 février 2014 a conclu à l'absence de contre-indication à la pratique du sport; l'arrêt de travail du 25 février 2014 pour un épanchement du genou ne précise pas quel genou est concerné; l'expert ayant examiné M. B... n'assortit ses conclusions d'aucune démonstration médicale; le certificat médical établi le 12 septembre 2018 ne conclut pas que la rupture du ligament croisé antérieur du genou droit serait en relation directe et certaine avec les accidents invoqués; - l'infirmité liée au genou droit n'étant pas imputable au service, le taux global d'invalidité de M. B... ne saurait être porté à 72 % comme il le demande; - le litige relatif à l'attribution d'une demi-part supplémentaire de quotient familial ne porte pas sur la mise en œuvre du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre; l'irrecevabilité retenue par le tribunal doit ainsi être confirmée. Par un mémoire enregistré le 8 janvier 2021, M. B..., représenté par Me Peneau, conclut aux mêmes fins que la requête et demande à la cour de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 800 euros au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative. Il soutient en outre que l'expert désigné par l'administration ne s'est pas borné à relayer ses doléances mais s'est prononcé sur la base des éléments médicaux, de sorte que la charge de la preuve repose sur l'administration, et que l'absence de suivi médical de sa pathologie, imputable à l'administration, ne saurait lui être opposée. Par une ordonnance du 3 mai 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 4 juin 2021. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, - et les conclusions de Mme Kolia Gallier, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. M. B..., lieutenant-colonel dans l'armée de l'air, rayé des cadres le 12 mars 2019, s'est vu concéder une pension militaire d'invalidité versée à titre temporaire au taux de 10 % pour la période du 5 avril 2012 au 4 avril 2015 au titre des séquelles d'une entorse du genou gauche. Par des demandes des 7 mai et 4 juin 2015 et 26 janvier, 10 mars et 8 septembre 2016, il a sollicité le renouvellement de cette pension, la révision de sa pension au titre des infirmités nouvelles de séquelles de traumatisme de l'épaule gauche, de séquelles de traumatisme du pouce droit, de séquelles de traumatismes du genou droit et de séquelles de traumatisme de la hanche gauche, ainsi qu'au titre d'une aggravation de l'infirmité de séquelles de l'entorse du genou gauche. Par un arrêté de la ministre des armées du 3 avril 2018, une pension militaire d'invalidité lui a été concédée au taux global de 35 % pour les infirmités de séquelles de traumatisme de l'épaule gauche (20%) et de séquelles d'entorse du genou gauche (10% +5). Cette pension lui a été concédée à titre définitif s'agissant de l'infirmité de séquelles d'entorse du genou gauche et à titre temporaire pour la période du 4 juin 2015 au 3 juin 2018 s'agissant de l'infirmité nouvelle de séquelles de traumatisme de l'épaule gauche. Ce même arrêté a rejeté les autres demandes de l'intéressé. 2. M. B... a demandé au tribunal des pensions de Pau d'annuler l'arrêté de la ministre des armées du 3 avril 2018, d'une part, en ce qu'il porte refus d'octroi d'une pension militaire d'invalidité au titre des infirmités de séquelles de traumatisme du pouce droit, de de la hanche gauche et du genou droit, d'autre part, en ce qu'il lui concède une pension à titre temporaire s'agissant de l'infirmité de séquelles de traumatisme de l'épaule gauche. Il a en outre demandé au tribunal de lui accorder le bénéfice d'une demi-part supplémentaire de quotient familial. Par un jugement du 22 août 2019, le tribunal des pensions de Pau a reconnu à M. B... le droit à une pension militaire d'invalidité au titre des infirmités de séquelles du traumatisme du pouce droit et de séquelles de traumatisme de la hanche gauche et a rejeté le surplus de ses demandes. M. B... relève appel de ce jugement en tant qu'il n'a fait que partiellement droit à sa requête et demande à la cour de lui reconnaître un droit à une pension militaire d'invalidité au titre de l'infirmité " séquelles de traumatismes du genou droit ", de convertir sa pension temporaire au titre des séquelles de traumatisme de l'épaule gauche en pension définitive au taux de 20 % à compter du 3 juin 2018 ou, à titre subsidiaire, de lui accorder le renouvellement de sa pension temporaire dans l'attente d'un examen médical, de fixer son taux global d'invalidité à 72 % et de lui accorder le bénéfice d'une demi-part supplémentaire de quotient familial. Sur les conclusions tendant à la conversion en pension définitive de la pension temporaire concédée au titre des séquelles de traumatisme de l'épaule gauche : 3. Aux termes de l'article L. 7 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, dans sa rédaction alors applicable : " Il y a droit à pension définitive quand l'infirmité causée par la blessure ou la maladie est reconnue incurable. Il y a droit à pension temporaire si elle n'est pas reconnue incurable (...) ". Aux termes de l'article L. 8 de ce code : " La pension temporaire est concédée pour trois années. Elle est renouvelable par périodes triennales après examens médicaux./Au cas où la ou les infirmités résultent uniquement de blessures, la situation du pensionné doit, dans un délai de trois ans, à compter du point de départ légal défini à l'article L. 6, être définitivement fixée soit par la conversion à un taux supérieur, égal ou inférieur au taux primitif, de la pension temporaire en pension définitive, sous réserve toutefois de l'application de l'article L. 29, soit, si l'invalidité a disparu ou est devenue inférieure au degré indemnisable par la suppression de toute pension (...) ". 4. Ainsi qu'il a été dit, l'arrêté en litige du 3 avril 2018 a concédé à M. B... une pension temporaire pour la période du 4 juin 2015 au 3 juin 2018 s'agissant de l'infirmité de séquelles de traumatisme de l'épaule gauche, en lien avec une blessure. Le requérant, qui ne soutient pas que l'infirmité en cause devait être reconnue incurable à la date du 4 juin 2015, se plaint de ce qu'elle n'a pas été définitivement fixée à l'issue de la période triennale. Cependant, l'arrêté en litige a été édicté le 3 avril 2018, soit antérieurement à l'échéance de cette période triennale. Par un arrêté du 27 janvier 2020, la ministre des armées a converti cette pension temporaire en pension définitive à compter du 4 juin 2018, au taux de 20 % maintenu. Par suite, les conclusions de M. B... tendant à la conversion de sa pension temporaire en pension définitive ou, à titre subsidiaire, au renouvellement de cette pension, ont perdu leur objet. Sur les conclusions tendant au bénéfice d'une demi-part supplémentaire de quotient familial : 5. Le tribunal des pensions de Pau a rejeté comme irrecevable la demande de M. B... tendant, sur le fondement d'une instruction fiscale, au bénéfice d'une demi-part supplémentaire de quotient familial. 6. Il n'appartient pas au juge d'appel, devant lequel l'appelant ne conteste pas l'irrecevabilité opposée à ses conclusions par les juges de premier ressort, de rechercher d'office si cette irrecevabilité a été soulevée à bon droit. Or, M. B... ne conteste pas l'irrecevabilité qui a été opposée par le tribunal à sa demande. Par suite, ses conclusions réitérées en appel ne peuvent être accueillies. Sur les conclusions tendant à la révision de la pension au titre de l'infirmité nouvelle de séquelles de traumatismes du genou droit : 7. Aux termes de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, applicable à la date de la demande de pension : " Ouvrent droit à pension : / 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service / (...) ". Aux termes de l'article L. 3 du même code : " Lorsqu'il n'est pas possible d'administrer ni la preuve que l'infirmité ou l'aggravation résulte d'une des causes prévues à l'article L. 2, ni la preuve contraire, la présomption d'imputabilité au service bénéficie à l'intéressé à condition: / 1° S'il s'agit de blessure, qu'elle ait été constatée avant le renvoi du militaire dans ses foyers; / (...) / 3° En tout état de cause, que soit établie, médicalement, la filiation entre la blessure ou la maladie ayant fait l'objet de la constatation et l'infirmité invoquée. / Un dossier médical doit être constitué pour chaque recrue lors de son examen par le conseil de révision et lors de son incorporation dans les conditions déterminées par décret. " Pour l'application de ces dispositions, une infirmité doit être regardée comme résultant d'une blessure lorsqu'elle trouve son origine dans une lésion soudaine, consécutive à un fait précis de service. 8. Il résulte de ces dispositions que, s'il ne peut prétendre au bénéfice de la présomption légale d'imputabilité, le demandeur d'une pension doit rapporter la preuve de l'existence d'un fait précis ou de circonstances particulières de service à l'origine de l'affection qu'il invoque. Cette preuve ne saurait résulter de la seule circonstance que l'infirmité est apparue durant le service, ni d'une probabilité même forte, d'une vraisemblance ou d'une simple hypothèse médicale. 9. Il résulte de l'instruction que M. B... présente une limitation de la flexion du genou droit à 130° et des gonalgies droites. Cette infirmité est en rapport avec une rupture du ligament croisé antérieur associé à une méniscopathie médiale de grade 3 et une chondropathie fémorale latérale de grade 4, diagnostiquées par une IRM du genou droit du 20 février 2015. L'intéressé fait valoir que cette infirmité est imputable aux traumatismes du genou droit survenus les 13 décembre 1993 et 9 octobre 1997 au cours d'activités sportives en service. Cependant, il résulte des mentions portées sur le livret médical militaire de l'intéressé et sur le registre des constatations des blessures, infirmités et maladies survenues pendant le service qu'à la suite du traumatisme survenu le 13 décembre 1993 au cours d'une séance de judo, il a présenté une distension des ligaments croisés du genou droit lui occasionnant des douleurs, lesquelles avaient disparu dès le 6 janvier suivant. Selon ces mêmes pièces, il s'est blessé au genou droit le 9 octobre 1997 au cours d'un tournoi de football inter-unités et a présenté une entorse du genou droit avec atteinte du ligament latéral interne, guérie dès la fin du mois d'octobre 1997, l'intéressé étant alors asymptomatique et l'examen radiologique " strictement normal ". Ainsi, aucun des constats médicaux contemporains de ces accidents ne mentionne une rupture ligamentaire. Par ailleurs, s'il est exact que l'expert médical désigné par l'administration a retenu un lien direct entre ces accidents et l'infirmité en cause, il s'est cependant borné à indiquer que M. B... présentait, d'après les résultats de l'IRM, des séquelles d'un traumatisme ancien du genou droit, sans expliquer les raisons le conduisant à retenir une filiation médicale entre les blessures des 13 décembre 1993 et 9 octobre 1997 et l'infirmité. Le requérant, qui n'a jamais consulté ni reçu de soins en rapport avec un état pathologique de son genou droit entre 1997 et 2014, ne produit par ailleurs aucun élément médical de nature à démontrer une telle filiation. Dans ces conditions, et comme l'a estimé le tribunal des pensions, M. B... ne rapporte pas la preuve de l'existence d'un fait précis ou de circonstances particulières de service à l'origine de l'affection invoquée. Sur les conclusions relatives au taux d'invalidité global : 10. Les conclusions de M. B... tendant à ce qu'un droit à pension lui soit reconnu au titre de l'infirmité de séquelles de traumatismes du genou droit étant rejetées, celles tendant à ce que son taux d'invalidité global soit porté à 72 % ne peuvent qu'être rejetées. 11. Il résulte de tout ce qui précède, d'une part, qu'il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. B... tendant à la conversion de la pension concédée à titre temporaire au titre des séquelles de traumatisme de l'épaule gauche en pension définitive au taux de 20 % à compter du 3 juin 2018 ou, subsidiairement, au renouvellement de cette pension temporaire, d'autre part, que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal des pensions de Pau a rejeté ses demandes tendant à la reconnaissance d'un droit à une pension militaire d'invalidité au titre de l'infirmité " séquelles de traumatismes du genou droit ", et au bénéfice d'une demi-part part supplémentaire de quotient familial. Sur les frais exposés à l'occasion du litige : 12. Les dispositions de l'article L. 761-1 font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'a pas la qualité de partie perdante, le versement de quelque somme que ce soit au titre des frais exposés par M. B... et non compris dans les dépens. DECIDE : Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. B... tendant à la conversion de la pension concédée à titre temporaire au titre des séquelles de traumatisme de l'épaule gauche en pension définitive au taux de 20 % à compter du 3 juin 2018 ou, subsidiairement, au renouvellement de cette pension temporaire. Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B... est rejeté. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié M. A... B... et à la ministre des armées. Délibéré après l'audience du 15 mars 2022 à laquelle siégeaient : Mme Catherine Girault, présidente, Mme Anne Meyer, présidente-assesseure, Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 7 avril 2022. La rapporteure, Marie-Pierre Beuve Dupuy La présidente, Catherine Girault La greffière, Virginie Guillout La République mande et ordonne à la ministre des armées en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. 2 N° 19BX04358
Cours administrative d'appel
Bordeaux
CAA de LYON, 7ème chambre, 31/03/2022, 21LY01237, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure M. A... B... a demandé au tribunal des pensions militaires de Grenoble d'annuler la décision du 7 août 2018 par laquelle la ministre des armées a refusé de faire droit à sa demande de révision pour aggravation de sa pension militaire d'invalidité et de porter le taux global de sa pension à 40 %, subsidiairement, d'ordonner une expertise médicale. Par un jugement n° 1907277 du 22 février 2021, le tribunal administratif de Grenoble, à qui la demande a été transmise en application du décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018, a rejeté la demande de M. B.... Procédure devant la cour Par une requête, enregistrée le 20 avril 2021, M. B..., représenté par Me Moumni, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 22 février 2021 ; 2°) de réformer la décision du 7 août 2018 et de faire droit à sa demande de révision de sa pension au titre d'une hypoacousie bilatérale et d'acouphènes permanents en fixant à 15 % le taux global d'invalidité résultant de l'aggravation ; 3°) avant-dire-droit, d'ordonner une expertise aux fins de déterminer le taux de ses infirmités, l'ampleur de leur aggravation et l'imputabilité de cette dernière au service ; 4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 3 000 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de la renonciation par son conseil à la part participative de l'État à l'aide juridictionnelle. Par un mémoire récapitulatif, enregistré le 21 décembre 2021, M. B... conclut aux mêmes fins que sa requête. Il soutient que : - il établit l'aggravation de ses pertes auditives constituant ses infirmités à la date de sa demande de révision de pension ; - la valeur de ses pertes auditives résultant de la moyenne des constats effectués par les audiogrammes qu'il a subis conduit à un taux d'aggravation de l'invalidité d'au moins 15 % ; - il ne peut être soutenu médicalement que l'hypoacousie d'origine sono-traumatique n'est pas évolutive ; en tout état de cause, à supposer qu'elle soit due au seul vieillissement, l'aggravation de l'infirmité justifie une révision du taux ; - l'aggravation n'a aucune cause extérieure ; - les circonstances de son dossier, et notamment les faiblesses de l'expertise qu'il a subie, établissent l'utilité d'une expertise judiciaire. Par un mémoire en défense, enregistré le 22 octobre 2021, et un mémoire complémentaire, enregistré le 28 janvier 2022, la ministre des armées conclut au rejet de la requête. Elle soutient que : - les séquelles du traumatisme sonore subi par M. B... sont insusceptibles d'évolution dans le temps ; M. B... n'établit pas, ainsi qu'il lui incombe, le lien entre l'aggravation de ses infirmités et le service, qu'il a quitté en 1974 ; - à supposer que puissent être pris en compte les acouphènes au titre desquels aucune demande de révision n'a été formée, M. B... n'établit aucune aggravation de ces derniers ; - quel que soit le barème de référence à considérer, M. B... ne justifie pas d'une aggravation de ses infirmités à un taux excédant le seuil minimal de 10 % ; - l'utilité de la demande d'expertise n'est pas justifiée. M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 12 mai 2021. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018 ; - le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Josserand-Jaillet, président ; - et les conclusions de M. Chassagne, rapporteur public ; Considérant ce qui suit : 1 Alors qu'il effectuait son service national dans l'armée de terre, M. B... a été victime d'un accident de service le 1973. Une pension militaire d'invalidité, renouvelée à l'identique en 1980, lui a été concédée initialement par un arrêté du 23 août 1977 au taux global de 25 % pour, d'une part, une hypoacousie bilatérale au taux de 2 % associée à une perte de sélectivité au taux de 10 %, et, d'autre part, des acouphènes, au taux de 10 %. Par une décision du 7 août 2018, la ministre des armées a rejeté la demande de M. B..., formée le 10 mars 2017, tendant à la révision de sa pension pour aggravation de la perte auditive. M. B... fait appel du jugement du 22 février 2021 par lequel le tribunal administratif de Grenoble, sur renvoi, en application du décret du 28 décembre 2018, du tribunal des pensions militaires de Grenoble saisi initialement, a rejeté son recours contre ce refus. 2 En premier lieu, aux termes de l'article L. 121-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " Ouvrent droit à pension : /1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; (...) / 3° L'aggravation par le fait ou à l'occasion du service d'infirmités étrangères au service ; (...). " Aux termes de l'article L. 121-2 du même code : " Est présumée imputable au service : / 1° Toute blessure constatée par suite d'un accident, quelle qu'en soit la cause, dans le temps et le lieu du service, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, en l'absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant l'accident du service ; (...) / 3° Toute maladie désignée par les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1, L. 461-2 et L. 461-3 du code de la sécurité sociale et contractée dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le militaire de ses fonctions dans les conditions mentionnées à ces tableaux ; (...). " L'article L. 121-2-3 dudit code précise que " La recherche d'imputabilité est effectuée au vu du dossier médical constitué pour chaque militaire lors de son examen de sélection et d'incorporation. Dans tous les cas, la filiation médicale doit être établie entre la blessure ou la maladie ayant fait l'objet de la constatation et l'infirmité invoquée. " 3 Il résulte de ces dispositions que le demandeur d'une pension, s'il ne peut prétendre au bénéfice de la présomption légale d'imputabilité au service, doit rapporter la preuve de l'existence d'un fait précis ou de circonstances particulières de service à l'origine de l'affection qu'il invoque. Cette preuve ne saurait résulter de la seule circonstance que l'infirmité soit apparue durant le service, ni d'une hypothèse médicale, ni d'une vraisemblance, ni d'une probabilité, aussi forte soit-elle. 4 En deuxième lieu, en vertu de l'article L. 154-1 du même code : " Le titulaire d'une pension d'invalidité concédée à titre définitif peut en demander la révision en invoquant l'aggravation d'une ou plusieurs des infirmités en raison desquelles cette pension a été accordée. / Cette demande est recevable sans condition de délai. / La pension ayant fait l'objet de la demande est révisée lorsque le pourcentage d'invalidité résultant de l'infirmité ou de l'ensemble des infirmités est reconnu supérieur de 10 points par rapport au pourcentage antérieur. / Toutefois, l'aggravation ne peut être prise en considération que si le supplément d'invalidité est exclusivement imputable aux blessures et aux maladies constitutives des infirmités pour lesquelles la pension a été accordée. / La pension définitive révisée est concédée à titre définitif. " 5 Il résulte de ces dispositions que lorsque le titulaire d'une pension militaire d'invalidité pour infirmité sollicite sa révision du fait de l'aggravation de ses infirmités, l'évolution du degré d'invalidité s'apprécie à la date du dépôt de la demande de révision de la pension, comparativement à l'état de cette invalidité à la date de la dernière décision de concession en fixant le taux. Le droit à pension est destiné à réparer toutes les conséquences des faits de service dommageables telles qu'elles se révèlent par suite de l'évolution physiologique, pour autant qu'aucune cause étrangère, telle qu'une affection distincte de l'affection pensionnée, ne vienne, pour sa part, aggraver l'état de l'intéressé. Au cas où une première infirmité reconnue imputable au service a concouru, avec une affection ou un fait étranger au service, à provoquer, après le service, une infirmité nouvelle, celle-ci n'ouvre droit à pension que s'il est établi que l'infirmité antécédente a été la cause directe et déterminante de l'infirmité nouvelle. Ainsi, l'aggravation de l'infirmité initiale, si elle est seulement due au vieillissement, peut justifier une révision du taux de la pension. En revanche, si le vieillissement cause une nouvelle infirmité, distincte de l'infirmité pensionnée, qui contribue à l'aggravation de celle-ci, les dispositions précitées de l'article L. 154-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre font obstacle à cette révision, dès lors que l'aggravation est due à une cause étrangère à l'infirmité pensionnée. 6 D'autre part, aux termes de l'article L. 121-4 du même code : " Les pensions sont établies d'après le taux d'invalidité résultant de l'application des guides barèmes mentionnés à l'article L. 125-3. " L'article L. 121-5 précise que " La pension est concédée : / 1° Au titre des infirmités résultant de blessures, si le taux d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse 10 % ; / 2° Au titre d'infirmités résultant de maladies associées à des infirmités résultant de blessures, si le taux global d'invalidité atteint ou dépasse 30 % ; / 3° Au titre d'infirmités résultant exclusivement de maladie, si le taux d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse : - a) 30 % en cas d'infirmité unique ; - b) 40 % en cas d'infirmités multiples. / Aucune pension n'est concédée en deçà d'un taux d'invalidité de 10 %. " 7 Il suit de ce qui vient d'être dit au point 5 que l'appréciation de l'évolution de l'hypoacousie bilatérale et de la perte de sélectivité, constituant l'infirmité n° 1 au titre de laquelle, exclusivement, a été présentée la demande de révision de M. B..., doit porter sur la période écoulée entre le 25 février 1991 et le 9 mars 2017. 8 A l'appui de sa critique des conclusions de l'expertise pratiquée par le Dr D... le 12 juin 2018, M. B... ne peut en premier lieu utilement invoquer le caractère lacunaire, selon ses affirmations, des observations concernant les acouphènes constituant l'infirmité n° 2, dès lors que sa demande de révision ne portait en tout état de cause, ainsi qu'il est dit au point précédent, que sur l'infirmité n° 1, constituée par l'hypoacousie et la perte de sélectivité. En second lieu, la seule circonstance que l'expert ait reporté dans le corps de son rapport une valeur erronée, supérieure à celle relevée par l'audiogramme qu'il avait pratiqué et qui est resté annexé au document, est, comme l'a relevé le tribunal, sans influence sur la valeur référentielle de cette expertise. 9 Il résulte de l'instruction, et notamment des audiogrammes réalisés respectivement le 14 février 2017 par le Dr C... et le 12 juin 2018 par le Dr D..., celui-ci dans le cadre de l'expertise médicale demandée par l'administration pour l'instruction de la demande de M. B..., que les capacités auditives de l'intéressé s'étaient notablement dégradées durant la période mentionnée au point 7. 10 Il est toutefois constant que, si M. B... a été victime du traumatisme sonore générateur de son infirmité le 23 novembre 1973 au cours de son service national actif, sa radiation des contrôles le 1974 a eu pour effet de le soustraire à toute nouvelle exposition à un événement susceptible d'aggraver cette infirmité ou d'y ajouter une nouvelle composante en lien avec le service. Par ailleurs, les pièces du dossier ne révèlent aucun événement extérieur venu s'ajouter au traumatisme initial. Dans ces conditions, l'état de l'infirmité de M. B... doit être regardé comme consolidé au plus tard à la date du 25 février 1991 à laquelle sa pension a été renouvelée au même taux d'invalidité. Enfin, aucun des éléments médicaux produits à l'instance ne fait état d'un caractère évolutif de l'hypoacousie non plus que de la perte de sélectivité, la stabilité de celles-ci étant attestée entre 1973 et 1991. 11 Par la production d'éléments relatifs à des tiers ou des renvois à des débats généraux dans la littérature médicale, seulement susceptibles de montrer que les séquelles de traumatismes sonores ne régressent que très rarement dans le temps, il n'établit pas un caractère évolutif défavorable spontané de l'infirmité qu'il a reçue en service à l'âge de vingt-et-un ans. Enfin, nonobstant la circonstance qu'elle se produit sur un terrain déjà altéré, il n'apporte pas d'éléments qui infirmeraient, à l'âge de soixante-cinq ans, l'étiologie, telle qu'elle est documentée dans la science médicale, de la dégradation de ses capacités auditives subsistantes par le vieillissement physiologique. Par suite, M. B... n'établit pas le lien de filiation, au sens de l'article L. 121-2-3 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre précité, entre ses pertes de capacité auditives additionnelles à l'infirmité pensionnée n° 1 dont il souffre et cette dernière. Dès lors, il n'est pas fondé à demander l'annulation du refus de la ministre des armées en tant qu'elle a rejeté sa demande de révision à ce titre. 12 Il résulte de ce qui précède que M B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Il suit de là que, sans qu'il y ait lieu d'ordonner une expertise, sa requête doit être rejetée, dont les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à la ministre des armées. Délibéré après l'audience du 10 mars 2022 à laquelle siégeaient : M. Josserand-Jaillet, président ; M. Seillet, président assesseur ; Mme Djebiri, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 mars 2022. Le président, rapporteur, D. Josserand-Jaillet Le président assesseur, Ph. Seillet La greffière, A. Le Colleter La République mande et ordonne à la ministre des armées, en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition, La greffière, N° 21LY01237 2 al
Cours administrative d'appel
Lyon
CAA de MARSEILLE, 4ème chambre, 05/04/2022, 20MA00076, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Marseille, d'une part, d'annuler la décision du 20 juin 2017 par laquelle le directeur général adjoint des services chargé des ressources humaines de la commune de ... a reconnu l'imputabilité au service de la crise d'épilepsie survenue le 2 avril 2014 et fixé au 2 avril 2016 la date de consolidation de son état de santé, subsidiairement, d'ordonner une expertise médicale, et, d'autre part, d'annuler l'arrêté du 19 mars 2018 par lequel le maire de la commune de ... l'a placée en congé maladie pour accident du travail du 3 avril 2014 au 2 avril 2016, en congé de maladie ordinaire du 3 avril 2016 au 2 avril 2017, puis en disponibilité d'office à compter du 3 avril 2017 jusqu'à nouvelle décision à intervenir et, subsidiairement, d'ordonner une expertise médicale. Par un jugement nos 1705915, 1803958 du 4 novembre 2019, le tribunal administratif de ... a rejeté l'ensemble des demandes de Mme C.... Procédure devant la Cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés le 3 janvier 2020 et le 14 janvier 2022, Mme C..., représentée par Me Rabbé, demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler la décision du 20 juin 2017 par laquelle le directeur général adjoint des services chargé des ressources humaines de la commune de ... a reconnu l'imputabilité au service de la crise d'épilepsie survenue le 2 avril 2014 et fixé au 2 avril 2016 la date de consolidation de son état de santé et l'arrêté du 19 mars 2018 par lequel le maire de la commune de ... l'a placée en congé maladie pour accident de service du 3 avril 2014 au 2 avril 2016, en congé de maladie ordinaire du 3 avril 2016 au 2 avril 2017, puis en disponibilité d'office à compter du 3 avril 2017 jusqu'à nouvelle décision à intervenir ; 3°) d'enjoindre à la ville de ... de la placer en congé de maladie pour accident de service du 3 avril 2014 au 1er juin 2020, date de sa mise à la retraite pour invalidité, et de reconstituer ses droits en conséquence, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ; 4°) de mettre à la charge de la ville de ... une somme de 4 350 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - le jugement est irrégulier dès lors que les premiers juges ont omis de statuer sur le moyen, pourtant d'ordre public, tiré de l'incompétence du signataire de la décision du 20 juin 2017 ; - les premiers juges ont méconnu leur office en jugeant inopérants les moyens soulevés à l'encontre de la décision du 19 mars 2018 ; - la compétence du signataire de la décision du 20 juin 2017 n'est pas établie ; - il n'est établi ni que la décision du 20 juin 2017 a été prise après que la commission de réforme a rendu son avis dès lors qu'elle n'a pas eu notification d'une copie de cet avis, ni que la commission de réforme a été régulièrement composée ; - il n'apparaît pas que le médecin chargé de la prévention au sein de son service a été informé de sa réunion et de son objet, ce qui l'a privée d'une garantie ; - les deux décisions attaquées sont entachées d'erreur d'appréciation en tant qu'elles fixent la date de consolidation de son état de santé au 2 avril 2016. Par lettre du 14 décembre 2021, la commune de ... a été mise en demeure, sur le fondement de l'article R. 612-3 du code de justice administrative de produire ses observations sur la requête de Mme C... dans un délai d'un mois. En application du 3ème alinéa de l'article L. 612-3 du code de justice administrative, un avis d'audience portant clôture immédiate de l'instruction a été émis le 2 mars 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ; - l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme A..., - et les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. Mme C... relève appel du jugement du 4 novembre 2019 par lequel le tribunal administratif de ... a rejeté ses requêtes tendant à l'annulation, d'une part, de la décision prise le 20 juin 2017 par le directeur général adjoint des services chargé des ressources humaines de la commune de ... reconnaissant l'imputabilité au service de la crise d'épilepsie dont elle a été victime le 2 avril 2014 et fixant la date de consolidation de son état au 2 avril 2016 et, d'autre part, de l'arrêté du maire de cette commune en date du 19 mars 2018 la plaçant en congé de maladie au titre de l'accident reconnu imputable au service, du 3 avril 2014 au 2 avril 2016, puis en congé de maladie ordinaire du 3 avril 2016 au 2 avril 2017, enfin en disponibilité d'office à compter du 3 avril 2017. Sur les conclusions dirigées contre la décision du 20 juin 2017 : 2. Aux termes de l'article 18 du décret du 14 mars 1986 : " Le médecin chargé de la prévention attaché au service auquel appartient le fonctionnaire dont le cas est soumis au comité médical ou à la commission de réforme est informé de la réunion et de son objet. Il peut obtenir, s'il le demande, communication du dossier de l'intéressé. Il peut présenter des observations écrites ou assister à titre consultatif à la réunion ; il remet obligatoirement un rapport écrit dans les cas prévus aux articles 26, 32, 34 et 43 ci-dessous " et aux termes de l'article 15 de l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière : " Le secrétariat de la commission informe le médecin du service de médecine professionnelle et préventive, pour la fonction publique territoriale, (...), compétent à l'égard du service auquel appartient le fonctionnaire dont le cas est soumis à la commission. (...) Ces médecins peuvent obtenir, s'ils le demandent, communication du dossier de l'intéressé. Ils peuvent présenter des observations écrites ou assister à titre consultatif à la réunion de la commission. Ils remettent obligatoirement un rapport écrit dans les cas prévus au premier alinéa des articles 21 et 23 ci-dessous. ". 3. D'une part, il résulte de ces dispositions que le médecin de prévention n'est pas tenu de remettre un rapport à la commission de réforme lorsqu'elle doit seulement statuer sur la date de consolidation de l'état de santé de l'agent, et non sur l'imputabilité au service d'un accident ou d'une maladie. D'autre part, si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie. 4. Il ressort des pièces du dossier, d'une part, que la crise d'épilepsie dont a été victime Mme C... a été reconnue, sans que la commission de réforme se prononce préalablement, par décision du 6 mars 2017 prise par la commune de ... après annulation, par jugement du tribunal administratif de ... du 25 janvier 2017, d'une première décision, en date du 16 juillet 2014, par laquelle la commune de ... avait refusé de reconnaître l'imputabilité au service de cet accident. D'autre part, il ressort des pièces du dossier qu'à la suite de la décision du 6 mars 2017, la commission de réforme a été réunie aux seules fins de déterminer la date de consolidation de l'état de santé de Mme C..., qu'elle a proposé, par avis du 20 juin 2020, de fixer au 2 avril 2016. Par décision du 20 juin 2017, la commune de ... a confirmé la décision du 6 mars 2017 en tant qu'elle a reconnu l'imputabilité au service de l'accident du 2 avril 2014 et fixé au 2 avril 2016 la date de consolidation de l'état de santé de l'intéressée. Mme C... soutient que cette décision a été prise au terme d'une procédure irrégulière dès lors que le médecin de prévention n'avait pas été informé de la tenue de la commission de réforme, en méconnaissance des dispositions citées au point 2 de l'arrêt. 5. Si, ainsi qu'il a été dit au point 3, le médecin de prévention n'était pas tenu de remettre un rapport écrit, il n'est pas contesté qu'il n'a pas été informé de la tenue de la réunion de la commission de réforme devant statuer sur le cas de Mme C... et n'a donc pas, de la sorte, été mis à même de présenter le cas échéant des observations écrites ou d'assister, comme il en a la possibilité, à titre consultatif à la réunion. Dès lors, la consultation de la commission de réforme a été irrégulièrement menée et une telle irrégularité a été, en l'espèce, de nature à priver effectivement Mme C... d'une garantie. Dans ces conditions, la décision attaquée a été prise au terme d'une procédure irrégulière. 6. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement attaqué ni sur les autres moyens de la requête dirigés contre la décision contestée, que Mme C... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de ... a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 20 juin 2017, en tant qu'elle fixe la date de consolidation de son état de santé au 2 avril 2016. Sur les conclusions dirigées contre la décision du 19 mars 2018 : 7. Aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " Le fonctionnaire en activité a droit :/ ... 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident, même après la date de radiation des cadres pour mise à la retraite. Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales (...) " ; que l'article 72 de la même loi dispose que : " La disponibilité est prononcée, soit à la demande de l'intéressé, soit d'office à l'expiration des congés prévus aux 2° (...) de l'article 57 ... ". 8. En raison des effets qui s'y attachent, l'annulation pour excès de pouvoir d'un acte administratif, qu'il soit ou non réglementaire, emporte, lorsque le juge est saisi de conclusions recevables, l'annulation par voie de conséquence des décisions administratives consécutives qui n'auraient pu légalement être prises en l'absence de l'acte annulé ou qui sont en l'espèce intervenues en raison de l'acte annulé. Il en va ainsi, notamment, des décisions qui ont été prises en application de l'acte annulé et de celles dont l'acte annulé constitue la base légale. 9. L'arrêté du maire de ... du 19 mars 2018, en tant qu'il limite à la période du 3 avril 2014 au 2 avril 2016 le placement de l'intéressée en congé pour accident de service, et la place en congé maladie ordinaire du 3 avril 2016 au 2 avril 2017, puis en disponibilité pour maladie à compter du 3 avril 2017, est consécutif à la décision du 20 juin 2017 en tant qu'elle fixe la date de consolidation de l'état de santé de Mme C... au 2 avril 2016. L'annulation de la décision du 20 juin 2017, au point 6 du présent arrêt implique ainsi nécessairement l'annulation, dans ces limites, de l'arrêté du maire de ... du 19 mars 2018. 10. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement attaqué ni sur les autres moyens soulevés à l'encontre de cet arrêté, que Mme C... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de ... a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du maire de ... du 19 mars 2018, en tant qu'il limite à la période du 3 avril 2014 au 2 avril 2016 son placement en congé pour accident de service, et la place en congé maladie ordinaire du 3 avril 2016 au 2 avril 2017, puis en disponibilité pour maladie à compter du 3 avril 2017. Sur les conclusions à fin d'injonction : 11. Compte tenu des motifs retenus pour annuler la décision du maire de ... du 20 juin 2017 en tant qu'elle fixe la date de consolidation de son état de santé consécutif à son accident de service au 2 avril 2014, ainsi que l'arrêté du maire de ... du 19 mars 2018, il convient seulement, en application des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, d'enjoindre à la commune de ... de procéder au réexamen de la situation de Mme C..., afin de déterminer la date de consolidation de son état de santé, après avoir réuni une nouvelle commission de réforme et en avoir préalablement informé le médecin de prévention, ainsi que ses droits à congés maladie pour accident de service entre le 3 avril 2016 et le 1er juin 2020, date à laquelle elle a été admise à faire valoir ses droits à une pension de retraite pour invalidité, dans un délai qu'il convient de fixer à trois mois à compter de la date de la notification de l'arrêt. Sur les frais liés au litige : 12. En application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 2 000 euros sera mise à la charge de la commune de .... D É C I D E : Article 1er : La décision du maire de ... du 20 juin 2017, en tant qu'elle fixe la date de consolidation de l'état de Mme C... au 2 avril 2016, et l'arrêté du maire de ... du 19 mars 2018, en tant qu'il limite à la période du 3 avril 2014 au 2 avril 2016 son placement en congé pour accident de service, la place en congé maladie ordinaire du 3 avril 2016 au 2 avril 2017, puis en disponibilité pour maladie à compter du 3 avril 2017, sont annulés. Article 2 : Le jugement nos 17005915 et 1803958 du 4 novembre 2019 du tribunal administratif de ... est annulé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt. Article 3 : Il est enjoint à la commune de ... de procéder au réexamen de la situation de Mme C... afin de déterminer la date de consolidation de son état de santé ainsi que ses droits à congés maladie pour accident de service entre le 3 avril 2016 et le 1er juin 2020, dans les conditions précisées au point 11. Article 4 : L'Etat versera à Mme C... une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... C... et à la commune de .... Délibéré après l'audience du 22 mars 2022, où siégeaient : - M. Badie, président, - M. Revert, président assesseur, - Mme Renault, première conseillère. Rendu public par mise à disposition du greffe, le 5 avril 2022. 2 N° 20MA00076
Cours administrative d'appel
Marseille
CAA de MARSEILLE, 4ème chambre, 05/04/2022, 19MA05835, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. D... A... a demandé au tribunal des pensions de Montpellier d'annuler la décision de la ministre des armées du 22 octobre 2018 en tant que celle-ci a rejeté sa demande de révision de sa pension militaire d'invalidité pour infirmités nouvelles. Par un jugement n° 19/00008 du 30 octobre 2019, le tribunal des pensions de Montpellier a rejeté sa demande. Procédure devant la Cour : Par un arrêt avant dire droit n° 19MA05835 du 20 avril 2021, la Cour, statuant sur l'appel de M. A... contre le jugement du tribunal des pensions de Montpellier du 30 octobre 2019, a ordonné une expertise aux fins d'examiner son poignet droit, de déterminer si l'accident survenu en service en 1978 a pu contribuer à l'apparition d'une arthrose du poignet droit et à l'infirmité dont était atteint M. A... à la date du 27 novembre 2014 et, dans l'affirmative, dans quelle mesure, et d'évaluer le taux d'invalidité de cette infirmité en précisant le cas échéant la part imputable au service. Par ordonnance du 4 juin 2021, la présidente de la Cour a désigné le professeur B... en qualité d'expert. Par ordonnance du 25 août 2021, la présidente de la Cour a désigné comme expert le docteur C..., en lieu et place du professeur B.... L'expert a remis son rapport le 2 février 2022. Ce rapport a été communiqué aux parties, qui ont été invitées à produire leurs observations, le 10 février 2022. Par ordonnance du 15 février 2022, la présidente de la Cour a liquidé et taxé les frais de l'expertise à la somme de 1 200 euros toutes taxes comprises. Par des mémoires complémentaires, enregistrés les 2 et 11 mars 2022, M. A... persiste dans ses précédentes écritures, et demande, subsidiairement, la prise en charge complète des médicaments et soins liés à sa pathologie et l'ouverture à ce titre d'un livret de prise en charge, et la réparation de son préjudice moral, ses souffrances physiques, ses gênes dans les actes de la vie courante, son préjudice d'agrément, les frais de courrier et de transport, en lui allouant la somme de 29 700 euros. Il soutient que : - il prend acte de l'imputabilité de son infirmité au service telle que reconnue par l'expert, mais également s'interroge sur le taux d'invalidité retenu, inférieur à celui de l'avis de la commission de réforme du 16 octobre 2018 ; - la minoration du taux d'invalidité accordé pour la pension dont il bénéficie déjà est injuste et obsolète ; - ses prétentions indemnitaires sont recevables. Par un mémoire complémentaire, enregistré le 7 mars 2022, la ministre des armées conclut au rejet des conclusions indemnitaires de M. A... et s'en remet à la sagesse de la Cour pour son droit à pension pour l'infirmité " raideur globale d'un traumatisme du poignet droit évoluant vers une arthrose radio-cubitale " à un taux d'invalidité de 30%. La ministre soutient que : - le rapport d'expertise judiciaire est entaché d'une erreur de plume ; - un avis du médecin chef du 1er mars 2022 montre qu'un taux de 30 % peut être alloué au titre de l'infirmité en cause ; - les conclusions indemnitaires sont nouvelles en appel et n'ont pas donné lieu à demande d'indemnisation préalable, de sorte qu'elles sont irrecevables. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Revert, - les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public, - et les observations de M. A.... Considérant ce qui suit : 1. M. A..., titulaire d'une pension militaire d'invalidité au taux de 15 %, a, le 27 novembre 2014, demandé la révision de cette pension pour aggravation et infirmités nouvelles, dont une raideur globale d'un traumatisme du poignet droit évoluant vers une arthrose radio-cubitale. La ministre des armées a rejeté cette demande par une décision du 22 octobre 2018 que l'intéressé a contestée devant le tribunal des pensions de Montpellier, en tant seulement qu'elle portait sur cette infirmité, évaluée au taux documentaire de 35 %. Sur appel formé par M. A... contre le jugement du tribunal des pensions de Montpellier du 30 octobre 2019 rejetant sa demande, la Cour a, par arrêt avant dire droit, ordonné une expertise aux fins d'examiner le poignet droit de M. A..., de déterminer si l'accident survenu en service en 1978 a pu contribuer à l'apparition d'une arthrose du poignet droit et à l'infirmité dont était atteint M. A... à la date du 27 novembre 2014 et, dans l'affirmative, dans quelle mesure, et d'évaluer le taux d'invalidité de cette infirmité en précisant le cas échéant la part imputable au service. Sur les droits à pension de M. A... 2. Aux termes de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, dans sa rédaction en vigueur au jour de la demande de pension de M. A... : " Ouvrent droit à pension : / (...) 3° L'aggravation par le fait ou à l'occasion du service d'infirmités étrangères au service ; (...) ". Aux termes de l'article L. 3 du même code : "Lorsqu'il n'est pas possible d'administrer ni la preuve que l'infirmité ou l'aggravation résulte d'une des causes prévues à l'article L. 2, ni la preuve contraire, la présomption d'imputabilité au service bénéficie à l'intéressé à condition : / 1° S'il s'agit d'une blessure, qu'elle ait été constatée avant le renvoi du militaire dans ses foyers ; / 2° S'il s'agit d'une maladie, qu'elle n'ait été constatée qu'après le quatre-vingt-dixième jour de service effectif et avant le trentième jour suivant le retour du militaire dans ses foyers ; / 3° En tout état de cause, que soit établie, médicalement, la filiation entre la blessure ou la maladie ayant fait l'objet de la constatation et l'infirmité invoquée (...) / La présomption définie au présent article s'applique exclusivement aux constatations faites, soit pendant le service accompli au cours de la guerre 1939-1945, soit au cours d'une expédition déclarée campagne de guerre, soit pendant le service accompli par les militaires pendant la durée légale compte tenu des délais prévus aux précédents alinéas (...)". 3. Il résulte clairement du rapport d'expertise judiciaire du 2 février 2022, rédigé après examen de M. A... le 19 novembre 2021, que la raideur sévère du poignet droit avec quasi arthrodèse dont il souffre au jour de sa demande de pension, et qui se manifeste par une limitation franche des amplitudes articulaires en flexions dorsales et palmaires du poignet, est directement liée, médicalement, à la chute dont il a été victime le 1er juin 1978 lors d'un exercice sportif au cours de son service militaire. Si, ainsi que le relève la ministre des armées, ni le bulletin d'observation médicale du 2 juin 1978, établi après l'ostéosynthèse des deux os de l'avant-bras droit de M. A..., ni la déclaration sur l'honneur de ce dernier et sa première demande de pension militaire d'invalidité du 20 juillet 1978, ne font mention d'une lésion ou d'une douleur du poignet droit, il ressort de l'examen des clichés radiographiques de ce poignet réalisés un mois après l'accident, qu'y apparaissait d'ores et déjà, selon l'expert judiciaire, une révulsion osseuse au niveau de la styloïde radiale, témoignant ainsi à ce niveau d'une lésion ligamentaire. Le même rapport d'expertise, qui relève qu'une autre radiographie du 14 avril 1982 a retrouvé une calcification au niveau de la pointe de la styloïde radiale droite et que le type de lésion ligamentaire dont était atteint le poignet droit de M. A... impacte la dynamique des os du carpe et se manifeste des années après, explique de cette manière, et non par la survenue d'un accident domestique le 7 janvier 2006, que l'intéressé ait dû consulter un chirurgien-orthopédiste dès 2008 pour des douleurs au poignet et une arthrose radio-carpienne. Ce rapport d'expertise, qui permet ainsi de dépasser les contradictions apparentes existant entre les avis et expertises produits par M. A... au soutien de sa demande, et les conclusions de l'expert médical désigné par la ministre, datées du 22 février 2018, et d'établir un lien certain et direct entre l'accident de service du 1er juin 1978 et la raideur sévère du poignet droit avec quasi arthrodèse, propose de retenir à ce titre un taux d'invalidité de 15 %. Eu égard à l'ankylose quasi complète de la flexion extension du poignet dont souffre M. A..., et compte tenu de l'ensemble des pièces du dossier, notamment de l'avis de la commission de réforme du 26 octobre 2018, ainsi que des préconisations du guide-barème en matière de raideurs articulaires, il y a lieu de juger que M. A... a droit au bénéfice d'une pension militaire d'invalidité pour la raideur sévère du poignet droit, au taux de 30 % à compter du 27 novembre 2014, date de sa demande de pension. 4. Il résulte de ce qui précède que M. A... est fondé à demander l'annulation du jugement querellé et de la décision en litige. Sur la pension militaire d'invalidité dont bénéficie déjà M. A... : 5. Si, en s'interrogeant dans ses dernières écritures sur le caractère juste et toujours actuel du taux d'invalidité de 15 % qui lui a été attribué par le ministre en charge des armées dans sa décision du 6 octobre 1981 pour lui accorder une pension militaire d'invalidité, au titre des séquelles de fracture de l'avant-bras droit, M. A... a entendu contester pour la première fois la décision du 22 octobre 2018 en tant qu'elle a rejeté sa demande de pension pour aggravation de cette infirmité, de telles conclusions, qui n'ont pas été présentées au tribunal des pensions, sont ainsi irrecevables et doivent être rejetées. Sur les conclusions subsidiaires : 6. Les conclusions de M. A... à fin de réparation par l'Etat des différents préjudices qu'il estime avoir subis du fait du refus de réviser sa pension, présentées pour la première fois en appel et n'ayant pas donné lieu à une demande d'indemnisation adressée à l'administration, sont pour ce double motif irrecevables et doivent être rejetées, comme le soutient la ministre. 7. Il doit en aller de même, pour les mêmes raisons, des prétentions de M. A... tendant à la prise en charge des médicaments et soins liés à sa pathologie, ainsi qu'à l'ouverture d'un livret de prise en charge. Sur les frais et honoraires de l'expertise : 8. Il résulte de ce qui précède que les frais et honoraires de l'expertise ordonnée par la Cour, avant dire droit, liquidés et taxés pour un montant de 1 200 euros par une ordonnance de la présidente de la présente Cour du 15 février 2022, doivent être mis à la charge de l'État. DECIDE : Article 1er : Le jugement n° 19/00008 du 30 octobre 2019 du tribunal des pensions de Montpellier et la décision de la ministre des armées du 22 octobre 2018 sont annulés. Article 2 : M. A... bénéficiera d'une pension militaire d'invalidité pour raideur sévère du poignet droit au taux de 30 %, à compter du 27 novembre 2014. Article 3 : Les frais d'expertise de la présente instance, liquidés à la somme de 1 200 euros, sont mis à la charge de l'État. Article 4 : Le surplus des conclusions de M. A... est rejeté. Article 5: Le présent arrêt sera notifié à M. D... A... et à la ministre des armées. Copie en sera adressée à M. C..., expert. Délibéré après l'audience du 22 mars 2022, où siégeaient : - M. Badie, président, - M. Revert, président assesseur, - M. Ury, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 avril 2022. N° 19MA058352
Cours administrative d'appel
Marseille
CAA de BORDEAUX, 2ème chambre, 07/04/2022, 19BX04605, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... a demandé au tribunal des pensions militaires de Toulouse d'annuler l'arrêté du ministre de la défense du 7 avril 2015 en ce qu'il fixe à 20 % le taux d'invalidité résultant de l'infirmité de psychosyndrome post-traumatique au titre de laquelle une pension militaire d'invalidité lui a été définitivement concédée à compter du 19 avril 2015. Par un jugement n°19/8 du 16 avril 2019, le tribunal des pensions militaires de Toulouse a ordonné avant dire droit une expertise médicale. Par un jugement n° 19/34 du 3 octobre 2019, le tribunal des pensions militaires de Toulouse a annulé l'arrêté du ministre de la défense du 7 avril 2015 en ce qu'il fixe à 20 % le taux d'invalidité résultant de l'infirmité de psychosyndrome post-traumatique et ordonné à la ministre des armées de liquider, à compter du 19 avril 2015, la pension militaire d'invalidité de M. A... pour l'infirmité de psycho syndrome post traumatique au taux de 50 %. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 29 novembre 2019, la ministre des armées demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du 3 octobre 2019 du tribunal des pensions militaires de Toulouse; 2°) de rejeter la demande présentée par M. A... devant le tribunal des pensions militaires de Toulouse. Elle soutient que : - l'invalidité de M. A... a été étudiée le 30 décembre 2014 dans le cadre de l'étude du renouvellement de sa pension au titre du psychosyndrome post traumatique de guerre; l'expert a relevé que l'intéressé pratiquait des activités, n'avait pas de suivi psychiatrique ou psychologique et, après avoir décrit ses troubles, a proposé un taux d'invalidité de 20 %, soit un taux identique à celui préconisé lors de l'expertise du 10 septembre 2012 ; l'analyse comparative des deux expertises ne révèle pas d'aggravation notable du syndrome de M. A... ; une augmentation du taux d'invalidité de 30 % n'est pas justifiée ; - M. A... n'avait pas fait état, lors de son examen en décembre 2014, de l'irritabilité forte impactant sa vie personnelle et familiale relevée par l'expert; l'évaluation de son infirmité doit être faite à la date du 19 avril 2015; l'expert, qui n'indique pas s'être placé à cette date, a apprécié l'état de santé de M. A... au 4 juillet 2019, date de l'examen médical; - il convient de tenir compte de l'état antérieur de M. A... ; ce dernier est par ailleurs pensionné pour un syndrome de traumatisme crânien se manifestant pas une labilité thymique et caractérielle; une même infirmité ne saurait être pensionnée deux fois. Par un mémoire en défense, enregistré le 25 janvier 2022, M. A..., représenté par Me At, conclut au rejet de la requête. Il soutient que l'expert désigné par le tribunal des pensions a évalué le taux d'invalidité résultant de son infirmité psychique à 50 %; la pension concédée au titre de cette infirmité a été portée au taux de 50 % par un arrêté du 30 décembre 2019. Par une ordonnance du 27 janvier 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 14 février 2022. Un mémoire a été présenté pour la ministre des armées le 15 février 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre; - le décret du 10 janvier 1992 déterminant les règles et barèmes pour la classification et l'évaluation des troubles psychiques de guerre; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, - et les conclusions de Mme Kolia Gallier, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. M. A..., adjudant-chef dans l'armée de terre, rayé des contrôles le 5 septembre 1971, s'est vu octroyer une pension militaire d'invalidité au taux global de 55 % à compter du 19 avril 2012 pour, notamment, un psychosyndrome post-traumatique consécutif à sa participation à la guerre d'Algérie. S'agissant de ce trouble psychique, la pension lui a été concédée à titre temporaire pour la période du 19 avril 2012 au 19 avril 2015 au taux de 20 %. Par un arrêté du 7 avril 2015, le ministre de la défense a converti cette pension temporaire en pension définitive à compter du 19 avril 2015 en maintenant à 20 % le taux d'invalidité résultant de l'infirmité. Par un jugement du 3 octobre 2019, le tribunal des pensions militaires de Toulouse, après avoir ordonné avant dire droit une expertise médicale, a estimé que le pourcentage d'invalidité résultant du psychosyndrome post-traumatique devait être évalué à 50 % à la date du 19 avril 2015. Le tribunal a en conséquence annulé l'arrêté du ministre de la défense du 7 avril 2015 en ce qu'il fixe à 20 % le taux d'invalidité résultant d'un psychosyndrome post-traumatique et ordonné à la ministre des armées de liquider, à compter du 19 avril 2015, la pension militaire d'invalidité de M. A... afférente à cette infirmité au taux de 50 %. La ministre des armées relève appel de ce jugement. 2. Aux termes de l'article L. 8 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, dans sa rédaction applicable au présent litige : " La pension temporaire est concédée pour trois années. Elle est renouvelable par périodes triennales après examens médicaux. /Au cas où la ou les infirmités résultent uniquement de blessures, la situation du pensionné doit, dans un délai de trois ans, à compter du point de départ légal défini à l'article L. 6, être définitivement fixée soit par la conversion à un taux supérieur, égal ou inférieur au taux primitif, de la pension temporaire en pension définitive, sous réserve toutefois de l'application de l'article L. 29, soit, si l'invalidité a disparu ou est devenue inférieure au degré indemnisable par la suppression de toute pension (...) ". L'expiration de la période triennale n'a pas légalement pour effet de faire convertir automatiquement et au même taux une pension temporaire en pension définitive, cette conversion ne pouvant intervenir qu'après que l'intéressé ait été soumis à un examen médical spécial, constatant le degré de son invalidité à la date d'expiration de cette période. 3. Aux termes de l'article L. 9 de ce même code : " (...) / Le taux de la pension définitive ou temporaire est fixé, dans chaque grade, par référence au degré d'invalidité apprécié de 5 en 5 jusqu'à 100 %. (...) Pour l'application du présent article, un décret (...) détermine les règles et barèmes pour la classification des infirmités d'après leur gravité. (...) ". L'article L. 10 précise que " Les degrés de pourcentage d'invalidité figurant aux barèmes prévus par le quatrième alinéa de l'article L. 9 sont : / a) Impératifs, en ce qui concerne les amputations et les exérèses d'organe; / b) Indicatifs dans les autres cas. / Ils correspondent à l'ensemble des troubles fonctionnels et tiennent compte, quand il y a lieu, de l'atteinte de l'état général. ". Selon le guide barème annexé au décret du 10 janvier 1992 déterminant les règles et barèmes pour la classification et l'évaluation des troubles psychiques de guerre : " L'attribution des pourcentages d'invalidité en matière de troubles psychiques présente d'importantes difficultés de mesure. En général, il est possible de quantifier (par des échelles à intervalles ou ordinales relativement rigoureuses) un degré d'invalidité dans le domaine somatobiologique proprement dit où l'expert s'appuie sur la notion d'intégrité physique (anatomique, physiologique et fonctionnelle). (...). En matière de troubles psychiques, ces pourcentages seront utilisés comme un code. Les éléments de celui-ci constituent une échelle nominale, dont les différents termes reçoivent à la fois une définition précise et explicite, s'appuyant sur des critères simples et généraux définissant le niveau d'altération du fonctionnement existentiel. Dans cette échelle, en pratique expertale, on peut distinguer six niveaux de troubles de fonctionnement décelables, qui seront évalués comme suit : - absence de troubles décelables : 0 p. 100; - troubles légers : 20 p. 100; - troubles modérés : 40 p. 100; - troubles intenses : 60 p. 100; - troubles très intenses : 80 p. 100; - déstructuration psychique totale avec perte de toute capacité existentielle propre, nécessitant une assistance de la société : 100 p. 100 ". 4. L'expertise psychiatrique diligentée par l'administration en décembre 2014, soit à l'issue de la période triennale au titre de laquelle une pension avait été concédée à titre temporaire à M. A... à raison de son psychosyndrome post-traumatique, décrit des reviviscences dont la fréquence est estimée à une fois par semaine, des troubles du sommeil, des cauchemars deux à trois fois par mois, le développement d'une hypervigilance, une réactivité à certains détails, une irritabilité, un repli sur soi et des ruminations anxieuses. L'expert précise que M. A... n'a pas de suivi psychiatrique ou psychologique et prend un traitement médicamenteux indiqué pour les troubles anxieux généralisés. L'expertise ordonnée avant dire droit par le tribunal des pensions militaires de Toulouse, dont le rapport a été remis le 5 août 2019, décrit une symptomatologie similaire, ajoutant que M. A... a nourri des idées suicidaires et a peur d'être égorgé. Il ne résulte ni de la rédaction de cette expertise ni d'aucun autre élément que l'expert aurait évalué l'état psychique de M. A... à la date de son rapport et non à celle d'expiration de la période triennale, alors au demeurant que la symptomatologie qu'il décrit est semblable à celle décrite par l'expertise psychiatrique de décembre 2014. Dans ces conditions, et alors même que l'intéressé présente des troubles de l'humeur séquellaires d'un traumatisme crânien pour lesquels il est également pensionné, c'est à juste titre que les premiers juges, suivant sur ce point les préconisations de l'expertise ordonnée avant dire droit, ont fixé le taux d'invalidité résultant du psychosyndrome post-traumatique à 50 %, ce taux correspondant à un trouble psychique entre modéré et intense selon le guide-barème. 5. Il résulte de ce qui précède que la ministre des armées n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal des pensions militaires de Toulouse a annulé l'arrêté du ministre de la défense du 7 avril 2015 en ce qu'il fixe à 20 % le taux d'invalidité résultant de l'infirmité de psychosyndrome post-traumatique et lui a ordonné de liquider, à compter du 19 avril 2015, la pension militaire d'invalidité de M. A... pour l'infirmité de psychosyndrome post-traumatique au taux de 50 %. DECIDE : Article 1er : La requête de la ministre des armées est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la ministre des armées et à M. B... A.... Délibéré après l'audience du 15 mars 2022 à laquelle siégeaient : Mme Catherine Girault, présidente, Mme Anne Meyer, présidente-assesseure, Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 7 avril 2022. La rapporteure, Marie-Pierre Beuve Dupuy La présidente, Catherine Girault La greffière, Virginie Guillout La République mande et ordonne à la ministre des armées en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. 2 N° 19BX04605
Cours administrative d'appel
Bordeaux