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CAA de LYON, 3eme chambre - formation a 3, 17/06/2021, 19LY00984, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure Par trois requêtes, Mme D... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble : - d'annuler : o la lettre du maire de la ville de Chambéry du 17 juillet 2015, lui annonçant sa prochaine mise en invalidité à compter du 4 février 2015 et l'informant de l'émission prochaine d'un titre de recettes tendant au remboursement de ses traitements perçus de cette date jusqu'au 31 juillet 2015 ; o la décision de la ville de Chambéry du 28 juillet 2015, décidant de sa mise en invalidité à compter du 4 février 2015 ; o la décision de la ville de Chambéry du 10 mai 2016, rejetant son recours gracieux contre l'arrêté du 28 juillet 2015 décidant de sa mise en invalidité à compter du 4 février 2015 ; - et d'enjoindre à la ville de Chambéry de reconstituer sa carrière à compter du 4 février 2015 ; Par un jugement n° 1601038, 1603848, 1603850 du 31 décembre 2018, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté les demandes de Mme B.... Procédure devant la cour Par une requête enregistrée le 13 mars 2019, Mme B..., représentée par la SELARL Alban A..., agissant par Me A..., demande à la cour : 1°) d'annuler : - ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 31 décembre 2018 ; - la décision du 28 juillet 2015 par laquelle le maire de la commune de Chambéry l'a placée d'office en retraite pour invalidité à compter du 4 février 2015, ensemble la décision du 10 mai 2016 ayant rejeté son recours gracieux contre cette décision ; - la décision du maire de la commune de Chambéry ordonnant le remboursement des salaires perçus du 4 février 2015 au 31 juillet 2015 ; 2°) d'enjoindre à la commune de Chambéry de reconstituer sa carrière ; 3°) de mettre à la charge de la commune de Chambéry la somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - c'est à tort que le tribunal administratif de Grenoble a écarté le moyen tiré de l'irrégularité de la composition de la commission de réforme comme dépourvu des précisions nécessaires à l'appréciation de son bien-fondé ; la commission était irrégulièrement composée dès lors qu'un spécialiste n'était pas présent ; - c'est à tort que le tribunal administratif de Grenoble a écarté le moyen tiré de la rétroactivité illégale de sa mise à la retraite ; sa mise à la retraite d'office a été prise en méconnaissance de l'article 30 du décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 ; - l'avis conforme de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales pour sa mise en retraite rétroactive n'a pas été sollicité ni émis en méconnaissance de l'alinéa 2 de l'article 31 du décret du 26 décembre 2003. Par un mémoire en défense enregistré le 25 février 2021, la commune de Chambéry représentée par la SCP C..., agissant par Me C... conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge de Mme B... la somme de 2 000 euros au titre des frais non compris dans les dépens. Elle soutient que les moyens soulevés par Mme B... ne sont pas fondés. Par ordonnance du 1er mars 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 16 mars 2021. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ; - le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales ; - le code de justice administrative. Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience. Après avoir entendu au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Pierre Thierry, premier conseiller, - les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public, Considérant ce qui suit : 1. Recrutée en 1997 par la commune de Chambéry pour des fonctions d'agent d'entretien, Mme B... a été affectée à partir de 2007, en tant qu'adjointe administrative territoriale, à des fonctions d'agent d'accueil. Souffrant de plusieurs affections, elle a été placée en congé de maladie ordinaire à compter du 13 mai 2013, puis, en juin 2014, en disponibilité d'office pour maladie. Le comité médical, réuni pour avis le 22 octobre 2013, l'ayant considérée comme inapte définitivement à toutes fonctions, la commune de Chambéry a engagé à son sujet une procédure de mise à la retraite d'office. Le 3 février 2015, la commission de réforme a rendu un avis favorable à sa mise en retraite d'office pour invalidité et inaptitude absolue et définitive à toutes fonctions, sans aucun reclassement possible. Suite à l'avis rendu le 15 juillet 2015 par la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL), favorable à sa retraite pour invalidité à compter du 4 février 2015, le maire de la commune de Chambéry l'a informée, par un courrier du 17 juillet 2015, de sa décision de mettre en oeuvre cette mesure. Cette décision a été formalisée par un arrêté du 28 juillet 2015 la plaçant d'office à la retraite pour invalidité à compter du 4 février 2015. Par un titre de recettes du 19 août 2015, il a été, consécutivement, demandé à Mme B... de rembourser les demi-traitements qui lui avaient été versés pour la période postérieure au 4 février 2015. Après avoir demandé au tribunal administratif de Grenoble l'annulation du courrier du 17 juillet 2015, Mme B... a formé, le 4 mars 2016, un recours gracieux contre l'arrêté 28 juillet 2015 que le maire de la commune de Chambéry a rejeté par une décision du 10 mai 2016. Mme B... relève appel du jugement rendu le 31 décembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Grenoble, a rejeté ses trois demandes d'annulation dirigées contre le courrier du 17 juillet 2015, l'arrêté du 28 juillet 2015 et la décision du 10 mai 2016 du maire de la commune de Chambéry ainsi que contre le titre de recettes du 19 août 2015. Sur la régularité du jugement : 2. En se bornant à soutenir en première instance que " la commission de réforme départementale en sa séance du 03/02/2015 était irrégulièrement composée. " et qu'" Il incombera à la collectivité de justifier de la régularité de la composition de la commission et notamment de la présence d'un spécialiste agrée. " sans se prévaloir de la méconnaissance d'aucun texte ou principe, ni même préciser quel spécialiste aurait dû, selon ses allégations, siéger lors de la séance de la commission de réforme, Mme B... n'a pas assorti son moyen des précisions nécessaires à l'appréciation de son bien-fondé. C'est par suite, contrairement à ce qui est soutenu, à bon droit qu'il a été écarté comme démuni de précision par le tribunal administratif de Grenoble. Sur les conclusions à fin d'annulation : 3. En premier lieu, si Mme B... réitère en appel le moyen tiré de l'irrégularité de la composition de la commission de réforme du 3 février 2015, elle n'a, pas davantage qu'en première instance, précisé le ou les textes ou principes dont elle entend invoquer la méconnaissance, non plus que la nature des compétences du spécialiste qui aurait, selon le moyen, dû être présent lors de la séance de la commission de réforme. Le moyen, dépourvu des précisions nécessaires à l'appréciation de son bien-fondé, ne peut dès lors qu'être écarté. 4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 30 du décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 susvisé : " Le fonctionnaire qui se trouve dans l'impossibilité définitive et absolue de continuer ses fonctions par suite de maladie, blessure ou infirmité grave dûment établie peut être admis à la retraite soit d'office, soit sur demande. (...) La mise en retraite d'office pour inaptitude définitive à l'exercice de l'emploi ne peut être prononcée qu'à l'expiration des congés de maladie, des congés de longue maladie et des congés de longue durée dont le fonctionnaire bénéficie en vertu des dispositions statutaires qui lui sont applicables, sauf dans les cas prévus à l'article 39 si l'inaptitude résulte d'une maladie ou d'une infirmité que son caractère définitif et stabilisé ne rend pas susceptible de traitement. En aucun cas, elle ne pourra avoir une date d'effet postérieure à la limite d'âge du fonctionnaire sous réserve de l'application des articles 1er-1 à 1er-3 de la loi du 13 septembre 1984 susvisée. ". L'article 39 du même décret dispose que : " Le fonctionnaire qui se trouve dans l'incapacité permanente de continuer ses fonctions en raison d'une invalidité ne résultant pas du service peut être mis à la retraite par anticipation soit sur demande, soit d'office dans les délais prévus au troisième alinéa de l'article 30. L'intéressé a droit à la pension rémunérant les services prévue au 2° de l'article 7 et au 2° du I de l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite sous réserve que ses blessures ou maladies aient été contractées ou aggravées au cours d'une période durant laquelle il acquérait des droits à pension. Par dérogation à l'article 19, cette pension est revalorisée dans les conditions fixées à l'article L. 341-6 du code de la sécurité sociale. (...) ". Par un arrêt n° 17LY01542 du 12 mars 2017, revêtu de l'autorité de la chose jugée, la cour administrative d'appel de Lyon a jugé que Mme B..., atteinte d'une grave pathologie la mettant dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, et déclarée définitivement inapte à toute fonction, ne pouvait prétendre au bénéfice d'un congé de longue maladie ou de longue durée, lesquels ne peuvent être accordés qu'aux agents susceptibles d'être jugés aptes à la reprise d'un emploi. Il est par ailleurs constant que l'intéressée, en disponibilité d'office, avait épuisé les congés de maladie auxquels elle avait droit à la date de sa mise à la retraite. Enfin, Mme B... étant définitivement inapte à toute fonction et sans reclassement possible, n'entre pas dans la catégorie des fonctionnaires concernés par les dispositions de l'article 39 précitées. Elle n'est dès lors pas fondée à se prévaloir d'une méconnaissance des dispositions précitées de l'article 30 du décret du 26 décembre 2003. 5. En troisième lieu, aux termes de l'article 2 de ce même décret " (...) L'admission à la retraite est prononcée, après avis de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales, par l'autorité qui a qualité pour procéder à la nomination. ". Contrairement à ce qui est soutenu, la CNRACL a rendu un avis sur la situation de Mme B... le 15 juillet 2015. La requérante n'est ainsi pas fondée à se prévaloir d'une méconnaissance de ces dispositions. 6. En quatrième lieu, les décisions administratives ne peuvent légalement disposer que pour l'avenir. Par suite, en l'absence de disposition législative l'y autorisant, l'administration ne peut, même lorsqu'elle est saisie d'une demande de l'intéressé en ce sens, déroger à cette règle générale et conférer un effet rétroactif à une décision d'admission à la retraite, à moins qu'il ne soit nécessaire de prendre une mesure rétroactive pour tirer les conséquences de la survenance de la limite d'âge, pour placer l'agent dans une situation régulière ou pour remédier à une illégalité. 7. S'il ne ressort d'aucune pièce du dossier que Mme B... était atteinte par la limite d'âge à la date de sa mise d'office à la retraite, il ressort en revanche de ces mêmes pièces que Mme B... a, par un arrêté du 17 juillet 2014, été placée en disponibilité d'office dans l'attente de l'aboutissement de la procédure de mise à la retraite d'office en raison de son invalidité et inaptitude absolue et définitive à toutes fonctions. Par suite, ainsi que l'a jugé à bon droit le tribunal administratif de Grenoble, l'arrêté du 28 juillet 2015 avait pour objet et a eu pour effet de procéder à la régularisation de sa situation au regard de sa retraite. Le moyen tiré de l'illégalité du caractère rétroactif de son placement d'office à la retraite à compter du 4 février 2015 doit dès lors être écarté. 8. Il résulte de ce qui précède que les conclusions à fin d'annulation de la décision plaçant d'office Mme B... à la retraite pour invalidité doivent être rejetées. Elle n'est par suite pas fondée à se prévaloir de l'illégalité de cette décision pour demander l'annulation du titre de recettes qui lui a été délivré afin d'obtenir le paiement des traitements qui lui ont été versés postérieurement au 3 février 2015. 9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par son jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté ses demandes. Sur les conclusions à fin d'injonction et sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 10. Les conclusions à fin d'annulation de Mme B... devant être rejetées, il s'ensuit que doivent l'être également, d'une part, ses conclusions à fin d'injonction, puisque la présente décision n'appelle ainsi aucune mesure d'exécution, et d'autre part, celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ces dispositions faisant obstacle à ce que la cour fasse bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge. 11. Il n'y pas a lieu, par ailleurs et dans les circonstances de l'espèce, en application de ces mêmes dispositions, de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de Mme B... la somme demandée au titre des frais non compris dans les dépens par la commune de Chambéry. DECIDE : Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée. Article 2 : Les conclusions de la commune de Chambéry relatives aux frais non compris dans les dépens sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... B... et à la commune de Chambéry. Délibéré après l'audience du 18 mai 2021 à laquelle siégeaient : M. Jean-Yves Tallec, président de chambre, M. Gilles Fédi, président-assesseur, M. Pierre Thierry, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 juin 2021. No 19LY009842
Cours administrative d'appel
Lyon
CAA de NANTES, 6eme chambre, 15/06/2021, 19NT04579, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... C... a demandé au tribunal des pensions militaires d'invalidité de Caen d'annuler la décision du 13 juillet 2018 de la ministre des armées rejetant sa demande de revalorisation de sa pension militaire d'invalidité pour aggravation de ses infirmités et reconnaissance d'un taux d'invalidité de 10 % au titre d'une hypoacousie bilatérale. Par un jugement n° 19/00001 du 20 septembre 2019, le tribunal des pensions militaires d'invalidité de Caen a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et des mémoires enregistrés les 29 novembre 2019, 3 février 2020, 11 décembre 2020 et 14 janvier 2021, M. C..., représenté par Me D..., demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal des pensions militaires d'invalidité de Caen du 20 septembre 2019 ; 2°) d'annuler la décision du 13 juillet 2018 ; 3°) de fixer son taux d'invalidité à 20 % au titre des séquelles qu'il conserve à la suite de la fracture du tibia droit et à 25 % pour les séquelles concernant la jambe droite ; 4°) de fixer son taux d'invalidité au titre de l'hypoacousie bilatérale dont il est atteint à 10 %, de sorte que sa pension soit calculée sur la base d'un taux global de 55 % à compter du 5 juillet 2017 ; 5°) le cas échéant, d'ordonner une expertise aux fins de déterminer ses taux d'invalidité et le lien de causalité entre l'hypoacousie bilatérale dont il souffre et le service ; 6°) de mettre à la charge de l'Etat les entiers dépens ainsi que le versement de la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - le jugement attaqué est insuffisamment motivé ; il ne motive pas le rejet de sa demande d'expertise ; - son taux d'invalidité a évolué dans le temps ; ses déplacements qui requièrent l'usage de cannes anglaises sont limités ; ses douleurs se sont accrues ; ses taux d'invalidité doivent être fixés à 25 % pour sa jambe gauche et à 20 % pour sa jambe droite ; - le traumatisme qu'il a subi en 1968 lors d'un exercice de tir est à l'origine d'une hypoacousie bilatérale importante ; elle a été constatée par le médecin en chef Hardelin, le 27 juillet 1993 ; le taux de cette infirmité doit être évalué à 10 %. Par des mémoires, enregistrés les 13 octobre 2020, 4 janvier 2021 et 1er février 2021, la ministre des armées conclut au rejet de la requête. Elle soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 ; - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme B..., - et les conclusions de M. Lemoine, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. M. C..., qui est né le 12 avril 1943, a intégré l'armée à la suite de son service militaire en 1965. Il a été rayé des contrôles au 1er janvier 1994 pour occuper les fonctions de directeur d'établissements privés de soins. Au cours de sa carrière militaire, il a été victime, le 2 mars 1970, d'une fracture du tibia droit et, le 13 septembre 1983, d'une fracture tibio-tarsienne au niveau de la jambe gauche. Par un arrêté du 11 mai 1982, une pension militaire d'invalidité lui a été concédée au taux de 25 %, à raison de 15 % pour les séquelles de la fracture tibia-tarsienne gauche, laquelle a été traitée par une ostéosynthèse à l'origine de sa raideur à la cheville, et de 10 % au titre des séquelles de la fracture du tibia droit. M. C... soutient également conserver des séquelles auditives à la suite des exercices de tir qu'il encadrait à Nantes entre 1966 et 1968. Le 5 juillet 2017, l'intéressé a sollicité la révision de sa pension militaire d'invalidité pour aggravation de ses infirmités au niveau des membres inférieurs ainsi que la prise en compte de sa perte d'audition. Par une décision du 13 juillet 2018, la ministre des armées a rejeté ses deux demandes. L'intéressé a saisi le tribunal des pensions militaires d'invalidité de Caen, lequel, par un jugement du 20 septembre 2019, a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision et à la revalorisation de sa pension militaire d'invalidité. Le 29 octobre 2019, M. C... a relevé appel de ce jugement devant la cour régionale des pensions de Caen, laquelle a transféré ce dossier à la présente cour, devenue compétente pour statuer sur ce type de litige à compter du 1er novembre 2019 en vertu de la loi du 13 juillet 2018 relative à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025 et portant diverses dispositions intéressant la défense. 2. Aux termes de l'article L. 154-1 du code des pension militaire d'invalidité et des victimes de guerre : " Le titulaire d'une pension d'invalidité concédée à titre définitif peut en demander la révision en invoquant l'aggravation d'une ou plusieurs des infirmités en raison desquelles cette pension a été accordée. / Cette demande est recevable sans condition de délai. / La pension ayant fait l'objet de la demande est révisée lorsque le pourcentage d'invalidité résultant de l'infirmité ou de l'ensemble des infirmités est reconnu supérieur de 10 points par rapport au pourcentage antérieur./ Toutefois, l'aggravation ne peut être prise en considération que si le supplément d'invalidité est exclusivement imputable aux blessures et aux maladies constitutives des infirmités pour lesquelles la pension a été accordée./ La pension définitive révisée est concédée à titre définitif. ". 3. S'il ne peut prétendre au bénéfice de la présomption légale d'imputabilité, le demandeur de la pension doit apporter la preuve de l'existence d'une relation certaine et directe de cause à effet entre les troubles qu'il invoque et des circonstances particulières du service à l'origine de l'affection. Cette preuve ne saurait résulter de la seule circonstance que l'infirmité soit apparue durant le service, ni d'une hypothèse médicale, ni d'une vraisemblance, ni d'une probabilité, aussi forte soit-elle, ni des conditions générales de service partagées par l'ensemble des militaires servant dans la même unité. 4. En premier lieu, pour examiner la demande de revalorisation de la pension militaire d'invalidité de M. C..., le docteur Tricaud a été désigné en qualité d'expert. Le 13 février 2018, ce médecin a constaté que l'intéressé présentait une voûte plantaire " accentuée ", qui pouvait être compensée par le port de semelles orthopédiques. Il a estimé que les douleurs ressenties à la marche par M. C... étaient liées à sa morphologie et non à sa fracture du tibia droit. L'expert n'a en outre constaté ni amyotrophie musculaire, ni une mobilité anormale de sa cheville. Au vu de ce constat et compte tenu des recommandations du guide-barème des invalidités, retenant un taux d'invalidité compris entre 0 et 10% pour des raideurs de l'articulation tibia-tarsienne " avec angle de mobilité favorable, le pied conservant des mouvements qui oscillent de 15° autour de l'angle droit ", l'expert a estimé que le taux de 10 % retenu pour cette infirmité n'était pas sous-évalué. S'agissant de la jambe gauche, l'expert a constaté qu'il existait une ankylose de la cheville pour les mouvements en varus ou valgus en rapport avec l'accident de 1983, que la flexion plantaire était conservée à 30° et la flexion dorsale à 10°. Au vu du guide-barème qui prévoit un taux de 10% à 30% pour des raideurs articulaires " avec angle de mobilité défavorable (pied talus ou équin) ", l'expert a considéré que le taux de 15 % précédemment retenu était évalué justement en raison de l'impossibilité pour le requérant de mettre le pied en varus ou valgus mais de l'absence d'équin ou de talus. 5. Pour contester cette expertise, le requérant se prévaut notamment d'une attestation de son médecin traitant, datée du 2 juin 2017, dans laquelle il est indiqué qu'il présente " une aggravation de ses douleurs du pied droit et de la cheville gauche ", sans aucune autre précision. Il produit également un certificat d'un rhumatologue en date du 23 novembre 2016 se bornant à lui prescrire des semelles orthopédiques ainsi qu'un nouveau traitement médicamenteux destinés à réduire ses douleurs aux chevilles. Par suite, le requérant n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, d'une aggravation de ses douleurs et infirmités aux membres inférieurs. En outre, contrairement à ce que soutient M. C..., il ne ressort pas des pièces du dossier que l'expertise réalisée par le docteur Tricaud n'aurait pas été menée sérieusement et dans des conditions satisfaisantes, par un médecin compétent, quand bien même celui-ci n'était ni rhumatologue, ni chirurgien orthopédiste. 6. En second lieu, M. C..., qui se plaint d'une hypoacousie qu'il impute à son exposition entre 1966 et 1968 à des tirs répétés sans protection auditive, a été examiné le 27 mars 2018 par le docteur Rupin, expert oto-rhino-laryngologiste (ORL). Lors de son audiogramme effectué le jour même, ce spécialiste a constaté des pertes auditives moyennes de 18,75 décibels à droite et de 16,25 décibels à gauche, insuffisantes pour lui accorder un taux d'invalidité au vu des recommandations du guide-barème des invalidités. Ce spécialiste a également constaté que, sur la meilleure oreille, M. C... présentait une perte de sélectivité venant majorer de 10% son taux d'invalidité à la condition cependant d'établir le lien de causalité direct et certain entre cette infirmité et les circonstances particulières du service. 7. Pour contester les résultats de cette expertise et la décision du 13 juillet 2018 lui refusant l'octroi d'une pension militaire d'invalidité pour cette infirmité, M. C... ne se prévaut d'aucun fait précis. Il soutient seulement avoir été soumis à une exposition prolongée à des tirs d'entraînement et plus particulièrement avoir subi un traumatisme sonore en 1968 à la suite duquel il serait resté sourd d'une oreille " pendant plus d'une heure ". Il est toutefois constant que l'intéressé n'a fait l'objet d'aucun constat médical contemporain à cette date, ni d'aucune inscription au registre des constatations au cours de ces deux années. Le bon de consultation du service des armées en date du 27 juillet 1993 dont il se prévaut ne fait en effet état que d'un " examen ORL systématique " et d'une " visite de départ ". Par ailleurs, le requérant produit un certificat de son médecin généraliste du 5 novembre 1996 indiquant qu'il présente une hypoacousie nécessitant un examen en commission de réforme ainsi qu'un exemplaire de sa demande présentée en ce sens le 14 novembre 1996. Cependant si, l'audiogramme réalisé par le docteur Bézard le 2 octobre 1997 montre des pertes auditives moyennes de 10 décibels à droite et de 6,25 décibels à gauche, ce seul document ne permet pas d'établir un quelconque lien entre cette infirmité et le service, alors qu'il est constant que M. C... avait quitté l'armée au 31 décembre 1993, soit plusieurs années auparavant, et qu'il était alors âgé de 54 ans. Dans ces conditions, M. C... ne peut être regardé comme apportant la preuve qui lui incombe de l'imputabilité au service de la perte auditive dont il est atteint. 8. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner une nouvelle expertise médicale, que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui est suffisamment motivé, le tribunal des pensions militaires d'invalidité de Caen a rejeté sa demande. Sur les frais liés au litige : 9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à M. C... de la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. C... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et à la ministre des armées. Délibéré après l'audience du 28 mai 2021, à laquelle siégeaient : - M. Gaspon, président de chambre, - M. Coiffet, président-assesseur, - Mme B..., première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 15 juin 2021. La rapporteure, V. GELARDLe président, O. GASPON La greffière, P. CHAVEROUX La République mande et ordonne à la ministre des armées en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 19NT04579
Cours administrative d'appel
Nantes
CAA de BORDEAUX, 1ere chambre - formation a 3, 17/06/2021, 19BX00693, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme G... E... a demandé au tribunal administratif de Toulouse de la décharger du paiement des sommes de 128 346 euros et 4 164 euros qui lui ont été réclamées respectivement par les titres de perception n° 0001298 du 16 juillet 2014 et n° 0001792 du 2 septembre 2014 émis par le centre de gestion des retraites de Toulouse. Par un jugement n° 1500835 du 13 décembre 2018, le tribunal administratif de Toulouse a déchargé Mme E... du paiement de la somme de 4 164 euros réclamée par le titre de perception n° 0001792 du 2 septembre 2014 et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande. Procédure devant la cour : I - Par une requête, enregistrée sous le n° 19BX00693 le 22 février 2019, régularisée le 21 mai 2019, Mme G... E..., représentée par Me D..., demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 13 décembre 2018 en tant qu'il n'a pas fait droit à sa demande tendant à la décharge du paiement de la somme de 128 346 euros qui lui a été réclamée par le titre de perception n° 0001298 du 16 juillet 2014 ; 2°) d'annuler ce titre de perception et de la décharger du paiement de la somme de 128 346 euros ; 3°) de mettre à la charge de l'État le paiement de la somme de 1 200 euros à verser à son conseil en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Elle soutient que : - le jugement est irrégulier faute d'avoir été signé en application de l'article R. 741-7 du code de justice administrative ; - le titre exécutoire litigieux, qui ne mentionne pas avec une précision suffisante les bases de liquidation de la créance, est entaché d'un défaut de motivation ; - le titre exécutoire litigieux ne comporte ni signature, ni la mention des nom, prénom et qualité de son auteur en méconnaissance des dispositions de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration et du B du V de l'article 55 de la loi n° 2010-1658 du 29 décembre 2010. Par des mémoires en défense, enregistrés les 24 et 29 octobre 2019, le directeur régional des finances publiques de la région Occitanie et du département de la Haute-Garonne, représenté par Me H..., conclut au rejet de la requête. Il soutient que : - la cour n'est pas compétente en application du 7° de l'article R. 811-1 du code de justice administrative ; - les moyens soulevés par Mme E... ne sont pas fondés. Mme E... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 20 mars 2019. II. Par une requête, enregistrée sous le n° 19BX00724 le 22 février 2019, régularisée le 21 mai 2019, Mme E..., représentée par Me D..., demande à la cour de surseoir à l'exécution du jugement du tribunal administratif de Toulouse du 13 décembre 2018 en tant qu'il n'a pas fait droit à sa demande tendant à la décharge du paiement de la somme de 128 346 euros qui lui a été réclamée par le titre de perception n° 0001298 du 16 juillet 2014. Elle soutient que les conditions posées par l'article R. 811-15 du code de justice administrative sont remplies dès lors que le jugement attaqué est tant irrégulier que mal-fondé. Par un mémoire en défense, enregistré le 10 septembre 2019, le directeur régional des finances publiques de la région Occitanie et du département de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par Mme E... ne sont pas fondés, au regard de l'article R. 811-17 du code de justice administrative. Mme E... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 20 mars 2019. Vu les autres pièces des dossiers. Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - la loi n° 2010-1658 du 29 décembre 2010 ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 ; - le code de justice administrative. La présidente de la chambre a décidé, en application de l'article R. 222-29 du code de justice administrative, d'inscrire la demande de sursis à exécution présentée par Mme E... au rôle d'une chambre siégeant en formation de jugement. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. B... C..., - les conclusions de M. Romain Roussel, rapporteur public, - et les observations de Mme E.... Une note en délibéré présentée pour Mme E... représentée par Me D..., a été enregistrée le 27 mai 2021. Considérant ce qui suit : 1. Mme E..., professeure certifiée, a été mise à la retraite d'office pour invalidité à compter du 24 septembre 2007 par décision du recteur de l'académie de Versailles du 8 février 2007. La cour administrative d'appel de Versailles, par un arrêt du 2 février 2012, a annulé cette décision et a enjoint au ministre de l'éducation nationale de réintégrer l'intéressée dans ses fonctions. Le recteur de l'académie de Versailles a cependant, par une décision du 3 avril 2013, de nouveau placé Mme E... à la retraite d'office pour invalidité à compter du 24 septembre 2007. Après l'annulation de cette décision par un jugement du tribunal administratif de Versailles du 10 février 2014, devenu définitif, le recteur a réintégré Mme E... dans ses fonctions à compter du 24 septembre 2007 et reconstitué sa carrière, par un arrêté du 23 avril 2014. Par voie de conséquence, la pension civile dont bénéficiait Mme E... a été annulée et il a été constaté un indu de pension pour la période allant du 1er octobre 2007 au 30 mai 2014. Deux titres de perception ont ainsi été émis à l'encontre de Mme E... par le centre de gestion des retraites de Toulouse les 16 juillet et 2 septembre 2014 en vue de recouvrer les sommes respectives de 128 346 euros et de 4 164 euros. Par jugement du 13 décembre 2018, le tribunal administratif de Toulouse a déchargé Mme E... du paiement de la somme de 4 164 euros qui lui était réclamée par le titre de perception n° 0001792 du 2 septembre 2014. Par sa requête enregistrée sous le n° 19BX00693, Mme E... relève appel de ce jugement en tant qu'il n'a pas fait droit à sa demande tendant à l'annulation du titre de perception n° 0001298 du 16 juillet 2014 et à la décharge du paiement de la somme de 128 346 euros. Par sa requête enregistrée sous le n° 19BX00724, Mme E... demande à la cour de sursoir, dans cette mesure, à l'exécution du même jugement du tribunal. Ces deux requêtes ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour qu'elles fassent l'objet d'un seul arrêt. Sur l'exception d'incompétence : 2. Aux termes de l'article R. 811-1 du code de justice administrative : " Toute partie présente dans une instance devant le tribunal administratif (...) peut interjeter appel contre toute décision juridictionnelle rendue dans cette instance. / Toutefois, le tribunal administratif statue en premier et dernier ressort : (...) 7° Sur les litiges en matière de pensions de retraite des agents publics ;(...) ". 3. Il résulte de l'instruction que le titre de perception litigieux a été émis en vue de recouvrer un indu de pension civile en conséquence de l'annulation de la décision portant mise en retraite d'office de Mme E... et de sa réintégration avec effet rétroactif et reconstitution de sa carrière, ordonnée par le juge administratif. Ainsi, le présent litige qui n'a pas trait aux droits à pension eux-mêmes, ne présente pas le caractère d'un litige en matière de pension de retraite d'un agent public au sens des dispositions citées ci-dessus, dans lequel le tribunal statue en premier et dernier ressort. Dès lors, l'exception d'incompétence d'appel de la cour opposée par l'intimé doit être écartée. Sur la régularité du jugement : 4. Aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ". 5. Il ressort des pièces du dossier que la minute du jugement attaqué a été signée par le rapporteur, le président et le greffier, conformément aux prescriptions précitées. La circonstance que l'ampliation du jugement qui a été notifiée à Mme E... ne comporte pas ces signatures est sans incidence sur la régularité de ce jugement. Sur le bien-fondé du jugement : 6. En premier lieu, aux termes de l'article 24 du décret du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique : " (...) Toute créance liquidée faisant l'objet d'une déclaration ou d'un ordre de recouvrer indique les bases de la liquidation. (...) ". Ainsi, l'État ne peut mettre en recouvrement une créance sans indiquer, soit dans le titre de perception lui-même, soit par une référence précise à un document joint à ce titre ou précédemment adressé au débiteur, les bases et les éléments de calcul sur lesquels il se fonde pour déterminer le montant de la créance. 7. Il résulte de l'instruction que le titre de perception du 16 juillet 2014, après avoir identifié Mme E... comme la redevable de la créance, mentionne en objet la nature de cette créance " suite à l'annulation de la pension n° 31110-08090121A (arrêté du 11 juin 2014) ", la période concernée par le trop-perçu allant " du 01/10/2007 au 30/05/2014 " et précise son montant en mentionnant " le montant brut payé de 140 576,06 euros ", les déductions à opérer, soit la " déduction CSG : 7 472,67 euros, déduction CRDS : 566,09 euros, CASA : 27,56 euros " pour aboutir à " un montant à recouvrer arrondi à l'euro le plus proche de 128 346 euros ". Mme E..., dont il n'est pas contesté qu'elle avait reçu notification de sa pension en définitive annulée par voie de conséquence de son action contentieuse exercée à l'encontre de sa mise à la retraite d'office, était ainsi en mesure de vérifier et de contester les bases de liquidation, et partant, le montant de sa créance. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation du titre de perception litigieux doit être écarté. 8. En second lieu, aux termes de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Toute décision prise par une administration comporte la signature de son auteur ainsi que la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celuici ". Le V de l'article 55 de la loi du 29 décembre 2010 de finances rectificatives pour 2010 prévoit que pour l'application de ces dispositions " aux titres de perception délivrés par l'Etat en application de l'article L. 252 A du livre des procédures fiscales, afférents aux créances de l'Etat ou à celles qu'il est chargé de recouvrer pour le compte de tiers, la signature figure sur un état revêtu de la formule exécutoire, produit en cas de contestation ". 9. Il résulte de ces dispositions, d'une part, que le titre de perception individuel délivré par l'Etat doit mentionner les nom, prénom et qualité de l'auteur de cette décision, d'autre part, qu'il appartient à l'autorité administrative de justifier, en cas de contestation, que l'état revêtu de la formule exécutoire comporte la signature de cet auteur. Ces dispositions n'imposent pas, en revanche, de faire figurer sur cet état les nom, prénom et qualité du signataire. 10. Il résulte de l'instruction que le titre de perception du 16 juillet 2014 notifié à Mme E... mentionne, au titre de l'ordonnateur, le prénom, le nom et la qualité de la " responsable recette " dont il ressort des pièces du dossier que cette dernière bénéficiait, par décision du 8 juillet 2014 régulièrement publiée au recueil des actes administratifs de la préfecture du 10 juillet suivant, d'une délégation de signature de l'administratrice générale des finances publiques, responsable du pôle pilotage et ressources de la direction régionale des finances publiques de la région Midi-Pyrénées et du département de la Haute-Garonne, auteur de l'état revêtu de la formule exécutoire, lequel a été signé, en vertu d'une délégation consentie par la même décision, par la responsable du centre de services partagés de la direction régionale des finances publiques. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions citées au point 8 doit être écarté. 11. Enfin, Mme E... se borne à déclarer reprendre en appel les moyens qu'elle a soulevés devant les premiers juges, sans assortir ses moyens des précisions nécessaires à l'appréciation de leur bien-fondé. Par suite, ces moyens doivent être écartés. 12. Il résulte de tout ce qui précède que Mme E... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation du titre de perception n° 0001298 du 16 juillet 2014 et à la décharge du paiement de la somme de 128 346 euros. Sur les conclusions tendant au sursis à exécution du jugement : 13. Par le présent arrêt, la cour statuant sur les conclusions de la requête de Mme E... tendant à l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il n'a pas fait droit à ses conclusions tendant à l'annulation du titre de perception du 16 juillet 2014 et à la décharge du paiement de la somme de 128 346 euros, les conclusions de sa requête tendant à ce qu'il soit sursis, dans cette mesure, à l'exécution de ce jugement deviennent sans objet. Par suite, il n'y a pas lieu d'y statuer. Sur les frais liés au litige : 14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas partie perdante à l'instance, la somme demandée par Mme E... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. DÉCIDE : Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 19BX00724. Article 2 : La requête n° 19BX00693 est rejetée. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme G... E... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance. Copie en sera transmise pour information au directeur régional des finances publiques de la région Midi-Pyrénées et du département de la Haute-Garonne. Délibéré après l'audience du 17 mai 2021 à laquelle siégeaient : Mme Marianne Hardy, présidente, M. Didier C..., président-assesseur, Mme F... A..., première conseillère, Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 juin 2021. Le rapporteur, Didier C... La présidente, Marianne HardyLa greffière, Sophie Lecarpentier La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. 2 N° 19BX00693, 19BX00724
Cours administrative d'appel
Bordeaux
Conseil d'État, 9ème chambre, 17/06/2021, 431473, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille, d'une part, d'annuler les décisions du 4 septembre 2015 et du 18 novembre 2015 par lesquelles le maire de Sénas et la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL) ont rejeté ses demandes tendant à la révision de sa pension et de son droit à rente viagère d'invalidité sur la base d'un taux d'invalidité de 60%, d'autre part, de condamner la commune de Sénas à lui verser des indemnités de 10 000 et 30 000 euros en réparation respectivement du préjudice subi du fait du taux d'invalidité retenu et du préjudice qu'elle estime avoir subi du fait que le salaire versé durant sa période d'activité n'était pas en adéquation avec le poste qu'elle avait réellement occupé, et enfin, de condamner la CNRACL à lui verser 15 000 euros en réparation du préjudice qu'elle a subi du fait d'une carence fautive dans la fixation de son taux d'invalidité. Par un jugement n°s 1508969, 1600423 du 17 mai 2017, le tribunal administratif de Marseille a rejeté ses demandes. Par une ordonnance n° 17MA03020 du 4 juin 2019, le président de la cour administrative d'appel de Marseille a transmis les conclusions présentées par la requérante au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative. Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 6 juin et 17 octobre 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme B... demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ; 3°) de mettre à la charge de la Caisse des dépôts et consignations la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme C... D..., conseillère d'Etat, - les conclusions de Mme Emilie Bokdam-Tognetti, rapporteure publique ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Rousseau, Tapie, avocat de Mme B... et à la SCP L. Poulet, Odent, avocat de la Caisse des dépôts et consignations ; Considérant ce qui suit : 1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme B... a exercé les fonctions d'adjointe d'animation territoriale de deuxième classe de la commune de Sénas jusqu'au 1er décembre 2011, date de son admission à la retraite pour invalidité. Elle s'est vu concéder une pension de retraite par une décision du directeur de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL) dont elle a accusé réception le 17 janvier 2012. Par un jugement du 17 mai 2017, le tribunal administratif de Marseille a rejeté les demandes de Mme B... tendant d'une part, à l'annulation des décisions du 4 septembre 2015 et du 18 novembre 2015 par lesquelles le maire de la commune de Sénas et la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL) ont rejeté ses demandes du 29 juillet 2015 et du 22 octobre 2015 tendant à la révision de sa pension et de sa rente viagère d'invalidité ainsi que des décisions initiales de concession et fixant le décompte de sa pension, d'autre part, à condamner cette commune à lui verser la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice qu'elle a subi du fait du taux d'invalidité retenu et de 30 000 euros en réparation du préjudice qu'elle a subi du fait de l'insuffisante rémunération perçue à raison du poste qu'elle a réellement occupé et, enfin, de condamner la CNRACL à lui verser la somme totale de 15 000 euros en réparation du préjudice qu'elle a subi du fait de la carence fautive dont elle a fait preuve en déterminant son taux d'invalidité. Par une ordonnance du 4 juin 2019, la présidente de la cour administrative d'appel de Marseille a transmis au Conseil d'Etat le pourvoi formé par Mme B... contre ce jugement. Sur le jugement en tant qu'il statue sur la demande de révision de la pension d'invalidité : 2. Il ressort des pièces du dossier soumis au tribunal que Mme B... soulevait, au soutien de ses conclusions relatives à la décision du maire rejetant sa demande, deux moyens tirés, d'une part, de l'erreur sur son taux d'invalidité et, d'autre part, de l'erreur sur l'indice retenu pour la liquidation de sa pension, du fait d'une prise en compte insuffisante des responsabilités professionnelles qu'elle a exercées avant sa radiation des cadres. C'est toutefois sans omettre de répondre aux conclusions de Mme B... ni, d'ailleurs, en méconnaître la portée que le tribunal a regardé ces conclusions comme étant exclusivement dirigées contre le refus du maire de revaloriser la pension d'invalidité. C'est par suite sans erreur de droit que le tribunal a jugé que le maire était tenu de rejeter cette demande de révision de la pension, dès lors qu'il ressortait des dispositions de l'article 62 du décret du 26 décembre 2003 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales, exclusivement applicables, que seule cette caisse était compétente pour procéder, le cas échéant, à une telle révision. Les conclusions de la requête dirigées contre le jugement en tant qu'il statue sur la demande d'annulation de refus du maire de réviser la pension d'invalidité ne peuvent, par suite, qu'être rejetées. Sur le jugement en tant qu'il statue sur les conclusions indemnitaires : 3. Aux termes de l'article R 351-4 du code de justice administrative : " Lorsque tout ou partie des conclusions dont est saisi un tribunal administratif, une cour administrative d'appel ou le Conseil d'Etat relève de la compétence d'une de ces juridictions administratives, le tribunal administratif, la cour administrative d'appel ou le Conseil d'Etat, selon le cas, est compétent, nonobstant les règles de répartition des compétences entre juridictions administratives, (...) pour rejeter la requête en se fondant sur l'irrecevabilité manifeste de la demande de première instance. " Aux termes de l'article R 811-1 du code de justice administrative : " Toute partie présente dans une instance devant le tribunal administratif ou qui y a été régulièrement appelée, alors même qu'elle n'aurait produit aucune défense, peut interjeter appel contre toute décision juridictionnelle rendue dans cette instance. / Toutefois, le tribunal administratif statue en premier et dernier ressort : / (...) 7° Sur les litiges en matière de pensions de retraite des agents publics ; / 8° Sauf en matière de contrat de la commande publique sur toute action indemnitaire ne relevant pas des dispositions précédentes, lorsque le montant des indemnités demandées n'excède pas le montant déterminé par les articles R. 222-14 et R. 222-15 ; / (...). " Ce dernier montant est de 10 000 euros. 4. C'est sans commettre d'erreur de droit ni dénaturer les pièces du dossier qui lui était soumis que le tribunal, qui ne s'est pas fondé sur l'incompétence du maire pour rejeter les demandes indemnitaires qui lui étaient soumises, a jugé par une motivation suffisante, que Mme B... n'avait adressé de demande préalable ni à la commune de Sénas, ni à la CNRACL et que, par suite, les demandes indemnitaires adressées au tribunal étaient irrecevables. Les conclusions dirigées contre le jugement en tant qu'il statue sur les conclusions indemnitaires ne peuvent dès lors qu'être rejetées, y compris celles tendant au versement par la commune d'une somme de 30 000 euros en réparation de l'insuffisante rémunération des services accomplis par l'intéressée durant sa période d'activité. Sur le jugement en tant qu'il statue sur la légalité de la décision initiale de la CNRACL de concession et fixant le montant de la pension : 5. Aux termes du premier alinéa de l'article R. 421-1 du code de justice administrative dans sa rédaction applicable au présent litige : " Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée ". Il résulte des dispositions de l'article R. 421-5 du même code que ce délai n'est opposable qu'à la condition d'avoir été mentionné, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision. 6. Toutefois, le principe de sécurité juridique, qui implique que ne puissent être remises en cause sans condition de délai des situations consolidées par l'effet du temps, fait obstacle à ce que puisse être contestée indéfiniment une décision administrative individuelle qui a été notifiée à son destinataire, ou dont il est établi, à défaut d'une telle notification, que celui-ci en a eu connaissance. En une telle hypothèse, si le non-respect de l'obligation d'informer l'intéressé sur les voies et les délais de recours, ou l'absence de preuve qu'une telle information a bien été fournie, ne permet pas que lui soient opposés les délais de recours fixés par le code de justice administrative, le destinataire de la décision ne peut exercer de recours juridictionnel au-delà d'un délai raisonnable. L'irrecevabilité d'un recours contre une décision individuelle dont son destinataire a eu connaissance, fondée sur le fait qu'il est exercé au-delà d'un délai raisonnable, ne peut être régulièrement soulevée d'office qu'après qu'ont été respectées les dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, nonobstant l'existence d'une fin de non-recevoir fondée sur la tardiveté de la requête au regard des dispositions citées au point 2. 7. Il ressort des pièces de procédure devant le tribunal administratif que si était opposée en défense à Mme B... une fin de non-recevoir tirée de la tardiveté de sa requête, en tant qu'elle était dirigée contre la décision lui concédant une pension et en fixant le montant, au regard des délais fixés par le code de justice administrative, il est constant que c'est sans mettre à même Mme B... d'en discuter que le tribunal a soulevé d'office l'irrecevabilité de sa requête, au motif qu'elle était exercée au-delà d'un délai raisonnable. Il y a lieu, par suite, d'annuler le jugement en tant qu'il statue sur ces conclusions et de régler dans cette mesure l'affaire au fond, sur le fondement de l'article L. 821-2 du code de justice administrative. 8. Il résulte de l'instruction que le décompte de pension dont Mme B... demande l'annulation lui a été notifié le 17 janvier 2012, à l'appui de la décision de concession de sa pension, et que cette notification ne comportait pas la mention des voies et délais de recours. Le délai de deux mois fixé par l'article R. 421-1 du code de justice administrative ne lui était donc pas opposable. Mme B... indique, en premier lieu, avoir formé auprès de la CNRACL une réclamation par courriel le 25 mai 2013, en deuxième lieu, s'être soumise, au cours du premier trimestre 2014, à une nouvelle expertise dont elle a cru, en toute bonne foi, qu'elle permettrait de voir réviser le taux d'incapacité initialement retenu et, en troisième lieu, avoir saisi un conseil de la défense de ses intérêts, lequel a cessé d'exercer sans l'en informer ni mener la procédure à son terme. Les éléments avancés par Mme B... ne sont pas au nombre des circonstances particulières de nature à justifier le délai de plus de trois ans dans lequel l'intéressée a saisi le tribunal, le 9 novembre 2015, délai qui excédait ainsi le délai raisonnable durant lequel son recours, qu'il soit regardé comme dirigé contre ce décompte ou contre la décision de concession de pension notifiée le même jour, pouvait être exercé. Ainsi, la fin de non-recevoir opposée par la CNRACL tirée de la tardiveté des conclusions à fin d'annulation de Mme B... doit être accueillie et les conclusions de Mme B... dirigées contre la décision notifiée le 17 janvier 2012 ne peuvent par suite qu'être rejetées. 9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme que demande Mme B... à ce titre.D E C I D E : -------------- Article 1er : Le jugement du 17 mai 2017 du tribunal administratif de Marseille est annulé en tant qu'il statue sur la légalité de la décision initiale de la CNRACL de concession et fixant le montant de la pension. Article 2 : Les conclusions présentées à ce titre devant le tribunal administratif de Marseille sont rejetées. Article 3 : Le surplus des conclusions du pourvoi est rejeté. Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme A... B..., au maire de la commune de Sénas et à la Caisse des dépôts et consignations.ECLI:FR:CECHS:2021:431473.20210617
Conseil d'Etat
CAA de NANTES, 6eme chambre, 15/06/2021, 19NT04033, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. F... J... a demandé au tribunal des pensions militaires d'invalidité de Rennes d'annuler la décision du 23 septembre 2016 par laquelle le ministre de la défense a rejeté sa demande tendant à l'obtention d'une pension militaire d'invalidité. Par un jugement n° 16/00028 du 5 mars 2019, le tribunal des pensions militaires d'invalidité de Rennes a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 25 avril 2019 au greffe de la cour régionale des pensions de Rennes et des mémoires complémentaires enregistrés les 2 et 5 novembre 2020, sous le n° 19NT04033 devant la présente cour, M. J..., représenté par Me H..., demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal des pensions militaires d'invalidité de Rennes du 5 mars 2019 ; 2°) de lui accorder le bénéfice d'une pension militaire d'invalidité au titre de l'infirmité " séquelles de traumatisme de l'épaule droite ", au taux d'invalidité de 10% à compter du jour de la demande, soit le 26 mai 2014 ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son avocat, de la somme de 2 000 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique. Il soutient que : - en ne prenant pas en compte les conclusions complétives du rapport circonstancié de l'accident du 16 juillet 2013 mentionnant sa blessure du 16 juillet 2009, le tribunal a fait une appréciation erronée des faits de la cause ; - l'existence de sollicitation du corps médical entre le 16 juillet 2009 et le 12 février 2013 est établie ; - les attestations produites du 21 décembre 2018 démontrent la réalité des blessures subies ; - il s'est blessé le 16 juillet 2009 lors d'un déchargement de caisses d'outillage très lourdes, ce que confirment les témoignages produits. Par des mémoires en défense, enregistrés le 2 septembre 2019 au greffe de la cour régionale des pensions de Rennes et le 18 novembre 2020 devant la présente cour, la ministre des armées conclut au rejet de la requête. Elle soutient que les moyens soulevés par M. J... ne sont pas fondés. M. J... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 20 septembre 2019. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendu au cours de l'audience publique : - le rapport de M. B..., - et les conclusions de M. Lemoine, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. M. J..., major de l'armée de terre en service dans les troupes de marine, a sollicité, le 20 mai 2014, le bénéfice d'une pension militaire d'invalidité en raison d'un syndrome de la coiffe des rotateurs de l'épaule droite, du fait d'une subluxation du tendon du long biceps provoquée, selon lui, le 16 juillet 2009, par le port de caisses de matériel alors qu'il était en mission en dehors du sol national. Sa demande a été rejetée par une décision du ministre de la défense du 23 septembre 2016. Par sa requête visée ci-dessus, M. J... relève appel du jugement du tribunal des pensions militaires d'invalidité de Rennes du 5 mars 2019 ayant rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision et sollicite le bénéfice d'une pension militaire d'invalidité au taux d'invalidité de 10% à compter du jour de sa demande, soit le 26 mai 2014. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 2. Aux termes de l'article L.2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, alors en vigueur : " Ouvrent droit à pension : 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; 2° Les infirmités résultant de maladies contractées par le fait ou à l'occasion du service ; 3° L'aggravation par le fait ou à l'occasion du service d'infirmités étrangères au service ; 4° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'accidents éprouvés entre le début et la fin d'une mission opérationnelle, y compris les opérations d'expertise ou d'essai, ou d'entraînement ou en escale, sauf faute de la victime détachable du service. ". Aux termes de l'article L.3 du même code : " Lorsqu'il n'est pas possible d'administrer ni la preuve que l'infirmité ou l'aggravation résulte d'une des causes prévues à l'article L. 2, ni la preuve contraire, la présomption d'imputabilité au service bénéficie à l'intéressé à condition : 1° S'il s'agit de blessure, qu'elle ait été constatée avant le renvoi du militaire dans ses foyers ; 2° S'il s'agit d'une maladie, qu'elle n'ait été constatée qu'après le quatre-vingt-dixième jour de service effectif et avant le soixantième jour suivant le retour du militaire dans ses foyers ; 3° En tout état de cause, que soit établie, médicalement, la filiation entre la blessure ou la maladie ayant fait l'objet de la constatation et l'infirmité invoquée. (...) / La présomption définie au présent article s'applique exclusivement aux constatations faites, (...) au cours d'une expédition déclarée campagne de guerre (...) ". 3. Il résulte de ces dispositions que, s'il ne peut prétendre au bénéfice de la présomption légale d'imputabilité, le demandeur d'une pension doit rapporter la preuve de l'existence d'un fait précis ou de circonstances particulières de service à l'origine de l'affection qu'il invoque. Cette preuve ne saurait résulter de la seule circonstance que l'infirmité soit apparue durant le service, ni d'une hypothèse médicale, ni d'une vraisemblance, ni d'une probabilité, aussi forte soit-elle. 4. Pour rapporter la preuve que le syndrome de la coiffe des rotateurs de l'épaule droite a été provoqué par le port de caisses de matériel, alors qu'il était en mission en dehors du sol national le 16 juillet 2009, M. J... produit les témoignages de M. A..., mécanicien, du 5 avril 2017, de M. D... et de Mme G..., militaires, du 5 et du 23 avril 2017, de M. I..., mécanicien armement, établi le 24 mars 2020 et de M. E..., rédigé le 26 mars 2020, en poste en Afghanistan au même moment que l'intéressé. Il produit également le témoignage de M. C..., médecin militaire, rédigé le 21 décembre 2018. Il se prévaut enfin d'un rapport circonstancié du 16 juillet 2013 au terme duquel l'intéressé a sollicité le corps médical le lendemain des faits en question. 5. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que les attestations produites ont été établies, pour les plus récentes, en 2017, soit huit ans après les faits invoqués. M. C..., médecin militaire, précise en particulier qu'il a réalisé de très nombreuses consultations pendant cette période et a pris en charge de nombreuses victimes. Il indique vaguement se souvenir avoir pris en charge un soldat français travaillant en atelier, qui s'était plaint de son épaule droite après le port de charges lourdes dans la journée, tout en attestant que M. J..., avec qui il n'avait plus de contact après ce séjour en Afghanistan, " puisse correspondre à ce patient " dont il avait gardé souvenir parmi d'autres. Figurent également au dossier médico-administratif du requérant, un compte-rendu de visite médicale du 1er avril 2010, rédigé par le Dr Jousseaume, au terme duquel M. J... signale n'avoir aucun problème médical depuis sa visite précédente, ne prendre aucun médicament et n'avoir consulté aucun médecin. A la question " avez-vous des informations à signaler concernant votre état de santé après ces missions ou séjours ' ", l'intéressé a répondu " non ". M. J... a été déclaré apte à servir, à faire campagne sans restriction au terme de cette visite. Lors de la visite annuelle du 9 février 2011, l'examen locomoteur n'a révélé aucune anomalie sur les membres supérieurs et l'intéressé a de nouveau été déclaré apte à servir sans restriction. Lors de la visite annuelle réalisée le 16 janvier 2012, il est noté, dans l'onglet " examen clinique " : " pas de doléance ". A la question " avez-vous consulté un médecin ' Si oui pour quel motif ' ", l'intéressé a répondu " oui - entorse ". De fait, M. J... ne s'est plaint d'aucun problème à l'épaule jusqu'au 12 février 2013, date de la première mention au livret médical d'une " douleur de l'épaule droite ". Le rapport circonstancié établi le 16 juillet 2013, soit 4 ans après les faits relatés, ne démontre pas la filiation entre la blessure et l'infirmité invoquée. S'il est noté sur ce document que l'intéressé a sollicité le corps médical le lendemain des faits, puis une fois rentré de mission, le dossier médical de M. J... ne fait état d'aucune consultation le lendemain des faits allégués à l'infirmerie du camp, ni au retour de l'intéressé d'Afghanistan. Enfin, la copie d'une séance de soin en ostéopathie effectuée le 15 avril 2010 produite, ne saurait constituer une justification d'avoir consulté le corps médical avant 2013 pour soulager la blessure en cause, ce document n'indiquant nullement pour quelle pathologie l'intéressé a consulté. Dans ces conditions, la filiation entre la blessure ou la maladie ayant fait l'objet de la constatation et l'infirmité invoquée n'est pas établie. 6. Il résulte de tout ce qui précède que M. J... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal des pensions militaires d'invalidité de Rennes a rejeté sa demande. Sur les frais liés au litige : 7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à M. J... de la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. J... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la ministre des armées et à M. F... J.... Délibéré après l'audience du 28 mai 2021, à laquelle siégeaient : - M. Gaspon, président de chambre, - M. Coiffet, président-assesseur, - M. B..., premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 juin 2021. Le rapporteur, F. B...Le président, O. GASPON La greffière, P. CHAVEROUX La République mande et ordonne à la ministre des armées en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 19NT03865
Cours administrative d'appel
Nantes
CAA de BORDEAUX, 2eme chambre (formation a 3), 15/06/2021, 19BX03958, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme C... G... veuve D... a demandé au tribunal des pensions militaires de Bordeaux d'annuler la décision du 1er août 2017 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande de pension de réversion. Par un jugement du 16 mai 2019, le tribunal a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 11 juillet 2019 par la cour régionale des pensions de Bordeaux et des mémoires enregistrés les 20 mars et 14 décembre 2020 devant la présente cour, Mme G..., représentée par Me L..., demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler la décision de la ministre des armées du 1er août 2017 ; 3°) d'enjoindre à la ministre des armées de procéder à la liquidation de la pension de réversion ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement au profit de son conseil d'une somme de 1 000 euros au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique. Dans le dernier état de ses écritures, elle soutient que : - l'identité de personne entre M. H... ben Khamdi et M. K... D... n'est plus contestée ; - les actes qu'elle a produits ont été établis par des officiers d'état-civil assermentés et suffisent à démontrer l'identité de personne entre le pensionné et son époux ; les quelques différences invoquées en défense entre les actes de concordance du 11 novembre 2013 et du 2 mars 2018 relèvent de simples erreurs de transcription entre la langue arabe et la langue française ; la circonstance que ni son acte de naissance ni celui de son époux ne portent la mention de leur mariage résulte de ce que cette obligation n'a été imposée par la loi marocaine que pour les mariages célébrés à compter de 2002. Par des mémoires en défense enregistrés les 21 février 2020, 13 novembre 2020 et 22 janvier 2021, la ministre des armées conclut au rejet de la requête. Dans le dernier état de ses écritures, elle fait valoir que : - eu égard au numéro matricule figurant sur le livret militaire et le brevet de retraite du combattant établi le 3 décembre 1990, il est admis que M. H... ben Khamdi a pris le nom de K... D... ; - toutefois, les attestations de concordance établies le 11 novembre 2013 et en 2018 diffèrent sur la transcription de la filiation de M. H... ben Khamdi et l'année d'établissement de l'acte d'état-civil, les date et lieu de naissance de l'ancien militaire figurant sur le brevet de retraite du combattant ne correspondent pas à ceux de ces attestations de concordance, et la copie intégrale de l'acte de naissance de M. D... du 17 mars 2015 comporte un nom qui ne correspond pas exactement à celui de l'acte de naissance ainsi qu'un lieu de naissance différent ; ces dissemblances empêchent d'établir l'identité de personne entre le titulaire de la pension militaire d'invalidité et l'époux de Mme G... ; - l'acte de naissance, le certificat de non remariage et l'attestation de non divorce produits par Mme G... ne justifient pas de son mariage avec l'ancien militaire, qui ne figure sur aucun des actes de naissance établis en 2015, et alors que le lieu de naissance de Mme G... est désigné tantôt comme le douar M'J..., tantôt comme le douar Merrakine. Mme G... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision modificative du 18 mars 2021. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code civil ; - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 ; - la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 ; - le décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme B..., - les conclusions de Mme Beuve Dupuy, rapporteure publique, - et les observations de Me E..., représentant Mme G.... Considérant ce qui suit : 1. Par une décision du 1er août 2017, la ministre des armées a rejeté la demande de réversion de la pension militaire d'invalidité de M. K... D... présentée le 27 février 2014 par Mme G... au motif qu'il ne pouvait y avoir identité de personne entre l'époux de cette dernière et le soldat K... D..., titulaire de la pension depuis 1948 et décédé en 2009. Mme G... relève appel du jugement du 16 mai 2019 par lequel le tribunal des pensions militaires de Bordeaux a rejeté sa demande d'annulation de cette décision. Sur les conclusions à fin d'annulation : 2. Aux termes de l'article 47 du code civil : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité. " 3. Il ressort des pièces du dossier, et notamment du numéro matricule figurant sur le livret militaire de " M. H... ben Khamdi présumé né en 1925 " et sur le brevet de retraite du combattant décerné à " M. K... D... (H... ben Khamdi) né en 1925 " que M. H... ben Khamdi, titulaire de la pension militaire d'invalidité dont Mme G... sollicite la réversion, a pris le nom de K... D..., ce qui n'est plus contesté. 4. Dans le dernier état de ses écritures, la ministre des armées conteste l'identité de personne entre M. D... et l'époux de Mme G.... Cette dernière a notamment produit une copie certifiée conforme de son acte de mariage avec " M. K... fils I... ben el-Hamedi " dressé le 16 septembre 1952, un certificat de monogamie selon lequel elle a été " la seule épouse du défunt Abdeslam D... " et une attestation de non remariage " depuis le décès de son mari feu K... D... décédé le 06/02/2009 ". Ces documents établis par des officiers d'état-civil suffisent à apporter la preuve de son mariage avec l'ancien militaire H... ben Khamdi, décédé le 6 février 2009, qui avait pris le nom de K... D..., ce dernier nom étant en outre mentionné comme le nom de famille de leurs enfants par les notaires chargés de la succession, qui ont bien identifié Mme G... comme sa veuve. Les diverses transcriptions en français du nom du père de M. D..., orthographié Lhimdi, el-Hamedi, L'Yahamadi, el Lhimdi ou Khamdi, ne sont pas de nature à faire douter de l'identité de personne avec l'époux de Mme G.... L'inscription des naissances à l'état-civil n'ayant été instituée au Maroc qu'en 1950, le fait que l'acte de naissance de M. D..., qui précise sa filiation, lui attribue une année de naissance (1920) différente de celle des autres documents (1925), ne saurait davantage faire douter de ce que la requérante est bien la veuve du militaire titulaire de la pension dont elle sollicite la réversion. Il en va de même de l'existence de confusions entre les lieux de naissance et le lieu de résidence des époux sur la demande de pension et les attestations de concordance. 5. Il résulte de ce qui précède que Mme G... est fondée à demander l'annulation du jugement du tribunal des pensions militaires de Bordeaux du 16 mai 2019 et de la décision de la ministre des armées du 1er août 2017. Sur les conclusions à fin d'injonction : 6. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. / La juridiction peut également prescrire d'office cette mesure. " 7. Le 3° de l'article L. 43, devenu le 1° de l'article L. 141-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, ouvre droit à pension pour le conjoint survivant lorsque le militaire est décédé en jouissance d'une pension définitive ou temporaire correspondant à une invalidité égale ou supérieure à 60 %. En l'espèce, M. D... était titulaire d'une pension pour une invalidité fixée à 85 %. Par suite, l'annulation de la décision de rejet de la demande de Mme G..., fondée sur le seul motif qu'elle n'établirait pas être la veuve de M. D..., implique qu'il soit fait droit à sa demande. Dès lors, il y a lieu d'enjoindre à la ministre des armées de procéder à la liquidation des droits à pension de réversion de Mme G... dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt. Sur les frais exposés à l'occasion du litige : 8. Mme G... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son conseil peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros, à verser à Me L... sous réserve de son renoncement à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement du tribunal des pensions militaires de Bordeaux du 16 mai 2019 et la décision de la ministre des armées du 1er août 2017 sont annulés. Article 2 : Il est enjoint à la ministre des armées de procéder à la liquidation des droits à pension de réversion de Mme G... dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt. Article 3 : L'Etat versera à Me L... une somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de son renoncement à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... G... veuve D... et à la ministre des armées. Délibéré après l'audience du 1er juin 2021 à laquelle siégeaient : Mme Catherine Girault, présidente, Mme Anne B..., présidente-assesseure, Mme A... F..., conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 juin 2021. La rapporteure, Anne B... La présidente, Catherine GiraultLa greffière, Virginie Guillout La République mande et ordonne à la ministre des armées en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. 5 N° 19BX03958
Cours administrative d'appel
Bordeaux
Conseil d'État, 8ème chambre, 16/06/2021, 437685, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : M. D... C... a demandé au tribunal des pensions de Paris l'annulation de l'arrêté du 6 septembre 2010 par lequel le ministre de la défense a octroyé une pension de réversion à sa mère Mme B... A..., veuve C..., en tant qu'il ne prévoyait pas le bénéfice des majorations instituées par les articles L. 51 et L. 52-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre. Par un jugement n° 11/00087 du 5 juin 2014, ce tribunal a rejeté sa demande. Par un arrêt n° 14/14669 du 24 février 2017, la cour régionale des pensions de Paris, sur appel de M. C..., a réformé ce jugement et lui a accordé la somme de 267 212,80 euros au titre des arrérages et intérêts moratoires relatifs à la pension de réversion octroyée à sa mère, Mme B... A..., veuve C.... Par une décision n° 410303 du 6 avril 2018, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a annulé cet arrêt et renvoyé l'affaire à la cour régionale des pensions de Versailles. Par un arrêt n° 18/01836 du 2 juillet 2019, cette cour a rejeté l'appel de M. C... comme porté devant une juridiction incompétente pour en connaître. Par un pourvoi, enregistré le 15 janvier 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. C... demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler cet arrêt ; 2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à la SCP Ricard, Bendel-Vasseur, Ghnassia, son avocat, au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et son premier protocole additionnel ; - le code des pensions militaire d'invalidité et des victimes de la guerre ; - la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Hervé Cassagnabère, conseiller d'Etat, - les conclusions de Mme Karin Ciavaldini, rapporteure publique ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Ricard, Bendel-Vasseur, Ghnassia, avocat de M. C... et autres ; Vu la note en délibéré, enregistrée le 6 mai 2021, présentée par M. C... ; Considérant ce qui suit : 1. M. C... se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 2 juillet 2019 par lequel la cour régionale des pensions de Versailles a rejeté comme porté devant une juridiction incompétente pour en connaître l'appel qu'il avait formé contre le jugement du 5 juin 2014 par lequel le tribunal des pensions de Paris a rejeté sa contestation de l'arrêté du 6 septembre 2010 octroyant une pension de réversion à sa mère Mme B... A..., veuve C..., 2. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. C... demandait à titre principal la prise en compte, pour le calcul de la pension de réversion attribuée à sa mère, des majorations prévues par les articles L. 51 et L. 52-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, alors applicables, attribuées sous certaines conditions aux conjoints survivants des grands invalides. Il sollicitait également la prise en compte de ces majorations dans l'assiette du calcul des intérêts moratoires, ainsi que le versement d'une indemnité en compensation de l'érosion monétaire. Sur l'arrêt en tant qu'il se prononce sur les conclusions tendant à l'octroi d'une indemnité compensant l'érosion monétaire : 3. En premier lieu, il résulte des termes du jugement du 5 juin 2014 que le tribunal des pensions de Paris s'était déclaré incompétent pour connaître des conclusions de M. C... tendant l'octroi d'une indemnité visant à compenser les effets de l'érosion monétaire. Par suite, ne peut qu'être en tout état de cause écarté le moyen tiré de ce que la cour régionale des pensions aurait rendu son arrêt au terme d'une procédure irrégulière en soulevant d'office le moyen tiré son incompétence pour connaître de ces conclusions, sans en avoir informé au préalable les parties et les avoir invitées à présenter leurs observations. 4. En second lieu, les dispositions de l'article L. 711-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, dans leur version en vigueur à la date de l'arrêt attaqué, attribuaient compétence aux tribunaux des pensions et cours régionales de pensions pour connaître des seules contestations auxquelles donne lieu l'application des dispositions aujourd'hui codifiées au livre Ier et aux titres Ier à III du livre II de ce code. Dès lors qu'aucune de ces dispositions ne prévoit la possibilité d'attribuer une somme en vue de compenser les effets de l'érosion monétaire, la cour régionale des pensions de Versailles n'a pas commis d'erreur de droit en rejetant les conclusions indemnitaires présentées à ce titre comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître. Sur l'arrêt en tant qu'il se prononce sur les conclusions tendant à l'application des dispositions des articles L. 51 et L. 52-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre : 5. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. C... sollicitait, à titre principal, la prise en compte des majorations de pension prévues par les dispositions des articles L. 51 et L. 52-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, alors en vigueur, attribuées sous certaines conditions aux conjoints survivants des grands invalides, reprises aux articles L. 141-19 et L. 141-20 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre. La contestation ainsi formée était relative à l'application des dispositions du livre Ier du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre et devait en conséquence être jugée en premier ressort par le tribunal des pensions et en appel par la cour régionale des pensions. Par suite, la cour régionale des pensions de Versailles a méconnu la portée des dispositions de l'article L. 711-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, dans leur version alors applicable, en s'estimant incompétente pour connaître de la requête de M. C.... 6. Il résulte de ce qui précède que M. C... est fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque en tant qu'il a statué sur les conclusions tendant à l'application des dispositions des articles L. 51 et L. 52-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre. 7. Il incombe au Conseil d'Etat de régler l'affaire au fond, dans la mesure de la cassation ainsi prononcée, en application du second alinéa de l'article L. 821-2 du code de justice administrative. 8. Il ne résulte pas de l'instruction et il n'est d'ailleurs pas soutenu par M. C... que Mme B... A... veuve C... aurait sollicité le bénéfice des majorations prévues par les articles L. 51 et L. 52-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre avant son décès, intervenu en 1986. Dans ces conditions, et alors même qu'une pension d'invalidité accordée aux anciens combattants et victimes de la guerre et à leurs ayants-droit, qui sont des allocations pécuniaires personnelles, constituent pour leurs bénéficiaires des créances qui doivent être regardées comme des biens transmis aux héritiers lors du décès de leurs bénéficiaires ainsi que les droits qui leurs sont attachés, M. C... n'a pas qualité pour agir en vue de la reconnaissance de ces avantages. Il n'est, dès lors, pas davantage fondé à solliciter la prise en compte de ces majorations pour le calcul des intérêts moratoires qu'il réclame. 9. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal des pensions de Paris a rejeté sa demande. 10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.D E C I D E : -------------- Article 1er : L'arrêt de la cour régionale des pensions de Versailles du 2 juillet 2019 est annulé en tant qu'il a statué sur les conclusions tendant au bénéfice des dispositions des articles L. 51 et L. 52-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre. Article 2 : L'appel formée par M. C... devant la cour régionale des pensions de Versailles est rejeté. Article 3 : Le surplus des conclusions du pourvoi de M. C... et ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés. Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. D... C... et à la ministre des armées. ECLI:FR:CECHS:2021:437685.20210616
Conseil d'Etat
CAA de MARSEILLE, 8ème chambre, 22/06/2021, 19MA05065, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme B... E... a demandé au tribunal des pensions de Marseille d'annuler la décision du 8 septembre 2016 par laquelle le ministre de la défense a refusé de faire droit à sa demande du 5 mai 2015 tendant au bénéfice d'une pension de conjoint survivant d'une victime civile des événements s'étant déroulés en Algérie entre le 31 octobre 1954 et le 29 septembre 1962. Par un jugement n° 17/00068 du 24 janvier 2019, le tribunal des pensions de Marseille a annulé la décision du ministre de la défense du 8 septembre 2016 et accordé à Mme B... E..., à compter du 5 mai 2015, un droit à pension du chef du décès de son époux M. G... E..., mort pour la France le 25 juillet 1959. Procédure devant la Cour : Par un recours et un mémoire, enregistrés le 4 avril et le 26 septembre 2019 par la cour régionale des pensions d'Aix-en Provence, et un mémoire, enregistré le 30 mars 2020 par la cour administrative d'appel de Marseille après transmission à la Cour du dossier, en application des dispositions du décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018 portant transfert de compétence entre juridictions de l'ordre administratif, la ministre des armées demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal des pensions de Marseille du 24 janvier 2019 ; 2°) de rejeter les demandes formulées par M. A... E.... La ministre soutient que : - les demandes incidentes formulées par M. E..., sans rapport avec le litige, sont irrecevables ; - Mme E..., n'étant pas de nationalité française, ne pouvait prétendre à l'obtention d'une pension pour conjoint survivant de victime civile de la guerre d'Algérie. Par un mémoire, enregistré le 30 décembre 2019 par le greffe de la Cour, M. A... E... informe la Cour qu'il reprend l'instance en tant qu'ayant droit de sa mère Mme B... E..., décédée le 23 août 2018, et demande à ce que les droits de cette dernière soient transférés à ses soeurs, Mmes C... E... et D... E.... Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 63-778 du 31 juillet 1963 de finances rectificative pour 1963, modifiée par la loi n° 64-1330 du 26 décembre 1964 portant prise en charge et revalorisation de droits et avantages sociaux consentis à des français ayant résidé en Algérie, modifiée par la décision du Conseil constitutionnel n° 2015-530 QPC du 23 mars 2016 ; - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; - la décision du Conseil constitutionnel n°2017-690 QPC du 8 février 2018 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme F..., - et les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. Mme B... E..., décédée le 23 août 2018, était veuve de M. G... E..., né le 12 mars 1926 et décédé le 25 juillet 1959 en Algérie. Par décision du 8 septembre 2016, le ministre de la défense a rejeté sa demande tendant au bénéfice d'une pension de conjoint survivant d'une victime civile des événements s'étant déroulés en Algérie entre le 31 octobre 1954 et le 29 septembre 1962. Par jugement du 24 janvier 2019, le tribunal des pensions de Marseille a annulé cette décision et fait droit à la demande de Mme E... à compter du 5 mai 2015. La ministre des armées relève appel de ce jugement. Sur la recevabilité des conclusions incidentes formées par M. E... : 2. Il ressort des pièces du dossier que, devant les premiers juges, Mme B... E... s'est bornée à demander l'annulation de la décision du ministre de la défense rejetant sa demande de pension de conjoint survivant. Les conclusions de M. A... E..., son fils, qui reprend en appel, en sa qualité d'ayant-droit, l'instance initiée par l'intéressée, tendant à ce que le droit à pension de sa mère soit transféré à ses soeurs, présentent le caractère de conclusions nouvelles en appel, ainsi que le relève la ministre. Elles sont en conséquence irrecevables et ne peuvent qu'être écartées. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 3. Aux termes de l'article 13 de la loi du 31 juillet 1963, dans sa version en vigueur à la date de la décision attaquée, modifiée par la décision n° 2015-530 QPC du 23 mars 2016 : " Sous réserve de la subrogation de l'Etat dans les droits des victimes ou de leurs ayants cause, les personnes de nationalité française, ayant subi en Algérie depuis le 31 octobre 1954 et jusqu'au 29 septembre 1962 des dommages physiques du fait d'attentat ou de tout autre acte de violence en relation avec les évènements survenus sur ce territoire ont, ainsi que leurs ayants cause de nationalité française, droit à pension (...) ". Toutefois, l'article 1er de la décision du Conseil constitutionnel n° 2017-690 QPC du 8 février 2018 a supprimé les mots " de nationalité française " figurant deux fois au premier alinéa de cet article. Cette déclaration d'inconstitutionnalité, qui a pris effet à la date de publication de la décision, s'applique aux instances en cours à cette date. 4. Il est constant que M. G... E... est décédé le 5 juillet 1959, victime civile d'un attentat perpétré en Algérie, et a été reconnu de ce fait " Mort pour la France " par décision du 14 mars 2014 de l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre. En application de l'article 13 précité de la loi du 31 juillet 1963, sa veuve pouvait bénéficier, à compter de la date de sa demande, d'une pension en qualité de conjointe de victime civile d'un attentat en relation avec la guerre qui s'est déroulée en Algérie entre le 31 octobre 1954 et jusqu'au 29 septembre 1962, sans que puisse lui être opposée la circonstance qu'elle ne possédait pas, à la date de sa demande, la nationalité française, cette exception ayant été déclarée inconstitutionnelle par la décision du Conseil constitutionnel du 8 février 2018. 5. Il résulte de ce qui précède que la ministre n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal des pensions de Marseille a annulé la décision du ministre de la défense du 8 septembre 2016. D É C I D E : Article 1er : Le recours de la ministre des armées est rejetée. Article 2 : Les demandes incidentes présentées par M. E... sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la ministre des armées et à M. A... E.... Délibéré après l'audience du 8 juin 2021, où siégeaient : - M. Badie, président, - M. d'Izarn de Villefort, président assesseur, - Mme F..., première conseillère. Rendu public par mise à disposition du greffe, le 22 juin 2021. 4 N° 19MA05065
Cours administrative d'appel
Marseille
CAA de NANTES, 6eme chambre, 15/06/2021, 19NT03558, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Rennes, d'une part, de condamner l'Etat à lui verser la somme totale de 223 926, 35 euros avec intérêts à compter de sa réclamation préalable et capitalisation des intérêts, en réparation des préjudices subis du fait de la reconnaissance de l'imputabilité au service de sa maladie et des actes de harcèlement qu'il a subis ainsi que des dysfonctionnements dans la gestion de sa situation administrative, d'autre part, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n° 1605579 du 1er juillet 2019, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 2 septembre 2019, M. A..., représenté par Me E..., demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement n° 1605579 du 1er juillet 2019 du tribunal administratif de Rennes ; 2°) de condamner le rectorat de l'académie de Rennes à lui verser la somme totale de 237 762 euros au titre des préjudices subis ; 3°) de mettre à la charge du rectorat de l'académie de Rennes une somme de 3000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - les très nombreux actes de harcèlement qu'il a subis, l'inaction des services académiques face à ses doléances et à sa situation administrative ainsi que les dysfonctionnements dans la gestion de sa situation administrative sont constitutifs d'une faute de nature à engager la responsabilité de l'administration ; les premiers juges ont à tort pris en compte son comportement pour qualifier l'absence de harcèlement et n'ont pas tenu compte des différents rapports des médecins qui l'ont suivi ou expertisé ; il peut prétendre à obtenir une somme de 30 000 euros au titre du préjudice moral subi de l'année 2007 à l'année 2010. - il a droit à la réparation de ses préjudices complémentaires du fait de la reconnaissance de l'imputabilité au service de sa maladie notamment la réparation des souffrances morales et physiques, des préjudices esthétiques et des troubles dans les conditions d'existence, ainsi que des préjudices patrimoniaux d'une autre nature que ceux réparés forfaitairement et des préjudices personnels, même en l'absence de faute de la collectivité ; il sollicite ainsi les sommes de 1 476,73 euros au titre des dépenses de santé, 10 000 euros au titre de l'incidence professionnelle, 110 685,28 euros au titre des pertes de gains professionnels, 60 600 au titre des souffrances morales endurées et des troubles dans les conditions d'existence, enfin la somme de 25 000 euros au titre de son préjudice d'agrément. Par un mémoire en défense et un mémoire complémentaire, enregistrés les 11 et 14 septembre 2020, le recteur de l'académie de Rennes conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens présentés par M. A... ne sont pas fondés. Vu les autres pièces des dossiers. Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. D..., - les conclusions de M. Lemoine, rapporteur public, - et les observations de Me F..., substituant Me E..., représentant M. A.... Considérant ce qui suit : 1. M. A..., professeur agrégé hors classe d'éducation musicale et chant choral, a exercé ses fonctions au collège Paul-le-Flem de Pleumeur-Bodou de 1987 à 2010, puis au collège Yves-Coppens de Lannion à compter du 1er septembre 2010. Il a été placé en congé de longue durée à compter du 8 novembre 2011. A la suite de sa demande du 19 juin 2015, sa maladie a été reconnue imputable au service par un arrêté du 8 janvier 2016, pour des arrêts de travail du 7 novembre 2012 au 7 août 2016. Par un second arrêté du 19 avril 2016, cette période a été étendue du 8 novembre 2011 au 7 août 2016. 2. M. A... a saisi le tribunal administratif de Rennes d'une demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme totale de 223 926,35 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter de sa réclamation préalable, en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait de la reconnaissance de l'imputabilité au service de sa maladie, des actes de harcèlement dont il estime être victime ainsi que des dysfonctionnements dans la gestion de sa situation administrative. Il relève appel du jugement du 1er juillet 2019 par lequel cette juridiction a rejeté ses demandes. Sur les conclusions indemnitaires : 3. Les dispositions qui instituent, en faveur des fonctionnaires victimes d'accidents de service ou de maladies professionnelles, une rente d'invalidité en cas de mise à la retraite et une allocation temporaire d'invalidité en cas de maintien en activité doivent être regardées comme ayant pour objet de réparer les pertes de revenus et l'incidence professionnelle résultant de l'incapacité physique causée par un accident de service ou une maladie professionnelle. Les dispositions instituant ces prestations déterminent forfaitairement la réparation à laquelle les fonctionnaires concernés peuvent prétendre, au titre de ces chefs de préjudice, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions. Ces dispositions ne font, en revanche, obstacle ni à ce que le fonctionnaire qui subit, du fait de l'invalidité ou de la maladie, des préjudices patrimoniaux d'une autre nature ou des préjudices personnels, obtienne de la personne publique qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice, ni à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre la collectivité, dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette collectivité. En ce qui concerne la responsabilité pour faute de l'Etat : 4. Aux termes du premier alinéa de l'article 6 quinquiès de la loi du 13 juillet 1983, dans sa rédaction alors applicable : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. / Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la rémunération, la formation, l'évaluation, la notation, la discipline, la promotion, l'affectation et la mutation ne peut être prise à l'égard d'un fonctionnaire en prenant en considération : / 1° Le fait qu'il ait subi ou refusé de subir les agissements de harcèlement moral visés au premier alinéa ; / 2° Le fait qu'il ait exercé un recours auprès d'un supérieur hiérarchique ou engagé une action en justice visant à faire cesser ces agissements ; / 3° Ou bien le fait qu'il ait témoigné de tels agissements ou qu'il les ait relatés. / Est passible d'une sanction disciplinaire tout agent ayant procédé ou ayant enjoint de procéder aux agissements définis ci-dessus. ". 5. Il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement. Il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile. 6. Pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'agent auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral. En revanche, la nature même des agissements en cause exclut, lorsque l'existence d'un harcèlement moral est établie, qu'il puisse être tenu compte du comportement de l'agent qui en a été victime pour atténuer les conséquences dommageables qui en ont résulté pour lui. Le préjudice résultant de ces agissements pour l'agent victime doit alors être intégralement réparé. Il découle de l'énoncé même de ces principes que les premiers juges étaient fondés, contrairement à ce que M. A... soutient, à tenir compte de son propre comportement pour caractériser ou non les faits avancés de harcèlement moral. 7. En premier lieu, M. A... soutient qu'il convenait, pour retenir le harcèlement dont il estime être victime, de tenir compte des rapports des différents médecins qui ont assuré son suivi ou expertisé son état de santé. Il ressort des pièces versées au dossier, que les premiers juges ont précisément discuté, que si les rapports médicaux des 7 décembre 2015, 8 juillet 2016 et 10 août 2017, établis par des médecins psychiatres, mentionnent que les troubles de M. A... sont en lien avec le service, reconnaissant ainsi le caractère professionnel de la maladie, ils ne suffisent pas à établir l'existence d'un harcèlement moral, alors que les rapports du docteur Lemarié des juillet 2016 et 10 août 2017 indiquent que l'intéressé présente " un état anxio-dépressif réactionnel, proche d'une dépression d'épuisement (burn-out) ". De la même manière, le rapport du docteur Cointot, dont M. A... se prévaut, qui indique " que les difficultés du requérant sont liées aux relations entretenues avec sa hiérarchie ", ne fait que rendre compte du ressenti de l'intéressé et ne comporte la référence à aucun fait précis et n'est pas non plus de nature, ainsi que l'ont estimé justement les premiers juges, à faire présumer l'existence d'agissements de harcèlement moral. 8. En deuxième lieu, M. A... soutient, en versant des photographies à l'appui de son argumentation, qu'il a connu une détérioration de ses conditions de travail consistant dans les dérangements qui ont affecté la salle d'enseignement musical où il intervenait. Il ressort des pièces du dossier qu'à deux reprises, au mois de novembre 2009, sont restés, avant son arrivée dans l'une des salles mises à sa disposition par l'établissement et dont les caractéristiques permettent les réunions, d'abord, le 16 novembre, un chariot multimédia dans le sas entre les deux salles de musique dans lesquelles il devait exercer le lendemain puis, le 23 novembre, un plateau de café, des tasses, un panneau de présentation et deux tee-shirts. Ces éléments que la cheffe d'établissement avait d'ailleurs consignés dans un rapport du 15 mars 2010, et que confirment les clichés versés au dossier ainsi que le courriel du 11 janvier 2012 produit par le requérant qui signale " l'existence de matériels déconnectés dans sa salle ", ne sauraient caractériser une volonté de harcèlement. 9. En troisième lieu, M. A... soutient qu'il est victime de critiques systématiques s'agissant de son travail ainsi que de reproches de tous ordres et que son action auprès des élèves est dépréciée par la principale du collège Paul-Le-Flem. Si le requérant se plaint à cet égard du refus qui lui a été opposé de suivre un stage sur l'histoire des arts, il ressort cependant des pièces du dossier que ce refus était motivé par le fait qu'il détenait déjà une certification dans cette matière et qu'il est l'expression d'un choix de sa hiérarchie alors que d'autres enseignants étaient inscrits à ce stage. S'il évoque également l'interruption d'un de ses cours par le principal adjoint, cette situation s'explique par le fait qu'il s'agissait de venir chercher une élève que sa mère, représentante légale, avait demandé à récupérer. Si M. A... avance également qu'il aurait été déchargé de ses responsabilités de professeur principal par sa cheffe d'établissement sans en avoir été prévenu et sans motifs, il ne l'établit pas en se bornant à produire un cliché d'un tableau présent en salle des professeurs, hors de tout contexte et non daté, sur lequel le nom d'un autre enseignant aurait figuré. Ainsi, aucun des éléments reprochés par M. A... à sa hiérarchie ne saurait caractériser des faits constitutifs de harcèlement moral. Quant aux critiques que son attitude aurait suscité, il est établi tout d'abord qu'à la suite d'un incident survenu lors d'échanges avec des élèves allemands en 2008 qu'il a refusé de prendre immédiatement en charge, il a eu un comportement vindicatif et agressif à l'égard de la direction de l'établissement. Ensuite, il ressort des pièces du dossier que, le 24 novembre 2009, M. A... a également agressé verbalement la principale adjointe à l'origine de l'oubli, évoqué au point précédent, de différents objets dans la salle mise à sa disposition et qu'il a jeté sur le sol de la cour de l'établissement ces objets oubliés. Enfin, la demande d'explication par la principale du collège, seule démarche initiée par l'administration, sur un fait survenu le 8 avril 2008 où des élèves ont vu des images de femmes nues sur l'écran de l'ordinateur du requérant, ce dernier ayant alors indiqué qu'il s'agissait d'un courriel non sollicité de sa part, était fondée et ne peut être regardée comme un acte de harcèlement. 10. En quatrième lieu, M. A... soutient qu'il aurait été victime de rétention de documents concernant tant des prestations accessoires effectuées à l'université en complément de son activité d'enseignant au collège que des documents relatifs à des primes exceptionnelles. D'une part, il est constant que les documents portant sur les prestations accessoires en question ont bien été signés par l'administration. Si les validations sont intervenues avec un certain retard, comme l'indique le rectorat, alors qu'il n'est au demeurant aucunement établi que ce retard aurait porté atteinte aux activités du requérant auprès de l'université, cette circonstance ne révèle aucun harcèlement à son encontre. D'autre part, s'il s'est enquis du paiement de deux heures supplémentaires effectuées et d'indemnités de professeur principal dues pour un mois, respectivement 4 mois et 2 mois après le fait générateur de ses prestations, les délais mis pour traiter administrativement ces tâches ne constituent en aucune façon des faits caractérisant une situation de harcèlement. 11. En cinquième lieu, M. A... reproche également au rectorat des incidents de paiement qui constitueraient des comportements fautifs à son égard. Il ressort cependant des pièces versées au dossier que l'interruption de traitement dont le requérant a fait l'objet au titre du mois de décembre 2013 ne peut être considérée comme fautive eu égard au changement de situation de l'intéressé, qui venait de faire l'objet d'une prolongation de son congé de longue maladie, à la période spécifique de clôture de gestion des traitements en fin d'année civile et, enfin, au fait qu'informée de la situation de l'intéressé, l'administration lui a versé un acompte dès le 30 décembre 2013, dans l'attente de la régularisation de son traitement. Les incidents de paie de l'année 2015 relèvent quant à eux de défaut de paiement de compléments de salaire devant être versés par la mutuelle du requérant dans le cadre de son congé de longue durée et qui ne relevaient donc pas de la responsabilité du rectorat. 12. En sixième lieu, et par ailleurs, il n'est pas établi que le signalement de la situation potentiellement suicidaire de M. A... auprès des services de gendarmerie le 23 décembre 2013, et ce après un appel téléphonique de l'intéressé le même jour aux services du rectorat évoquant " les difficultés de paiement " mentionnées au point précédent pourrait être considéré comme une volonté manifestée par son administration de lui nuire et serait ainsi fautif. 13. En septième lieu, il n'est pas contesté qu'un courrier adressé à M. A... a été ouvert par la secrétaire de la principale du collège en avril 2009, et que cela s'était déjà produit une première fois en 2008. Toutefois, cette circonstance relève de la simple erreur dès lors que ces courriers, qui d'ailleurs ne comportaient pas la seule identité de l'intéressé, ni l'indication de leur caractère personnel, mais également celle du collège, portaient sur des taxes dues à la SACEM qui pouvaient concerner l'intendance du collège. Si le requérant invoque également le caractère confidentiel d'autres courriers liés à des missions académiques qui n'auraient pas dû être ouverts ou transiter par son chef d'établissement, il n'apporte aucun élément concret à l'appui de ses allégations. Dans ces conditions, M. A... ne saurait ainsi sérieusement avancer, eu égard à la très faible occurence des faits incriminés, que " son courrier était systématiquement ouvert ". L'existence d'un harcèlement à son encontre n'est ici pas davantage caractérisée. 14. En huitième, et dernier lieu, si M. A... évoque l'inaction des services académiques face à ses saisines concernant sa situation et l'absence de règlement par ce dernier de " la situation conflictuelle dans laquelle il se trouvait ", il ne l'établit pas. La circonstance que le recteur n'aurait pas répondu à des courriers et courriels, qui ne sont pas davantage produits en appel qu'en première instance, ne permettent pas d'établir l'existence d'un harcèlement dès lors que les faits à l'origine de ces saisines ne sont, eux-mêmes, pas établis. 15. Il résulte de ce qui a été dit aux points 6 à 14 que l'ensemble des faits invoqués par M. A..., s'ils témoignent d'une situation professionnelle qui n'était pas sereine ou d'erreur de gestion administrative, ne sont pas susceptibles de faire présumer l'existence du harcèlement moral dont il aurait été victime. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir, ainsi que l'ont estimé les premiers juges qui ne se sont pas mépris sur l'application des principes en cause rappelés aux points 5 et 6, que la responsabilité pour faute de l'Etat serait engagée tant en raison du harcèlement moral lui-même que de l'absence de réaction du recteur d'académie à la suite des alertes dont il aurait été informé. En l'absence de toute faute, les conclusions indemnitaires à hauteur de 30 000 euros au titre du préjudice moral invoqué, présentées sur ce fondement, qui s'inscrivent dans le cadre des principes rappelées au point 3, ne peuvent qu'être rejetées. En ce qui concerne la responsabilité sans faute de l'Etat : 16. Il résulte des énonciations du point 3, que la responsabilité de l'Etat peut être engagée à l'égard du fonctionnaire, même en l'absence de faute, dans l'hypothèse où celui-ci démontrerait avoir subi, du fait de la pathologie d'origine professionnelle dont il souffre, des préjudices personnels ou des préjudices patrimoniaux d'une autre nature, pour ces derniers, que ceux réparés forfaitairement par l'allocation d'une rente viagère d'invalidité en cas de mise à la retraite ou d'une allocation temporaire d'invalidité en cas de maintien en activité. Sur les préjudices à caractère patrimonial : 17. En premier lieu, M. A... sollicite la réparation, d'une part, des préjudices liés à l'incidence professionnelle de son état de santé pour le montant de 10 000 euros et, d'autre part, " des pertes de gains professionnels " depuis son placement en congé de maladie, à savoir la perte des rémunérations complémentaires liées tant à ses différentes sujétions et fonctions au sein de l'établissement où il exerçait qu'à des interventions extérieures à l'université de Rennes 2 et à des missions pour le ministère de l'éducation, et ce, pour un montant total de 110 685,28 euros correspondant à une somme annuelle moyenne de 13 835,66 euros non perçue au cours des huit années passées en congé de maladie. 18. Les dispositions des articles L. 27 et L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite et 65 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat qui instituent, en faveur des fonctionnaires victimes d'accidents de service ou de maladies professionnelles, l'allocation temporaire d'invalidité, puis, majorant la pension civile de retraite, la rente viagère d'invalidité doivent être regardées comme ayant pour objet de réparer les pertes de revenus et l'incidence professionnelle résultant de l'incapacité physique causée par un accident de service ou une maladie professionnelle. Les dispositions instituant ces prestations déterminent forfaitairement la réparation à laquelle les fonctionnaires concernés peuvent prétendre, au titre de ces chefs de préjudice, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions. 19. Au cas d'espèce, d'une part, il ressort des pièces versées au dossier que M. A..., après avoir bénéficié d'une allocation temporaire d'invalidité du 8 août 2017 au 30 avril 2019, bénéficie d'une pension de retraite au titre de l'invalidité depuis le 1er mai 2019 et perçoit, depuis lors, une rente viagère d'invalidité ramenée à un montant de 13 988,60 euros en application de l'article L. 28 du code des pensions évoqué plus haut. Dans ces conditions, les demandes de M. A... qui tendent à la réparation des préjudices liés, d'une part, à l'incidence professionnelle de son état de santé et, d'autre part, à la perte de rémunérations liées aux différentes sujétions et fonctions - professeur principal, heures supplémentaires effectives et heures supplémentaires années - qui pouvaient lui être confiées au sein de l'établissement où il exerçait, qui sont réparées forfaitairement par l'application des dispositions précitées du code des pensions ne peuvent qu'être rejetées. 20. D'autre part, en revanche, et contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, M. A... peut effectivement prétendre obtenir de la personne publique qui l'emploie une indemnité complémentaire réparant la perte de revenus liée à l'exercice d'activités extérieures et accessoires à son activité professionnelle principale, ce chef de préjudice à caractère patrimonial n'étant pas indemnisé, compte tenu des conditions posées à leur octroi et de leur mode de calcul, par la rente viagère d'invalidité ou l'allocation temporaire d'invalidité. S'il ressort des pièces versées au dossier que M. A..., avait signé, pendant quatre années consécutives depuis 2008, un contrat de vacation de 64 heures avec l'université de Rennes 2 et qu'il a cessé ses interventions après son arrêt de travail de novembre 2011, ce préjudice, eu égard notamment à la nature accessoire de ces activités dont la reconduction n'est pas un droit pour l'agent, demeure purement éventuel. La demande présentée par M. A... sur ce point sera également rejetée. 21. En second lieu, M. A... demande la prise en charge de ses frais de cure thermale pour un montant total de 1 476,73 euros. Il ressort des pièces versées au dossier que si ces frais ont bien été présentés pour paiement par le rectorat lorsque la demande formée par l'intéressé a été reçue après reconnaissance du caractère professionnel de sa pathologie par un arrêté du 8 janvier 2016, l'application de la prescription quadriennale a cependant conduit au rejet des dépenses engagées pour les mois de mai 2011 et avril 2012, rejet dont le requérant a été informé par un courriel du 7 novembre 2016. Sur les préjudices personnels : 22. En premier lieu, M. A... soutient également qu'il a subi des souffrances morales et des troubles dans les conditions d'existence évalués à hauteur de 60 000 euros. Toutefois, il n'établit pas davantage en appel qu'en première instance l'existence de ces préjudices. 23. En second lieu, M. A..., professeur agrégé d'éducation musicale et chant choral, soutient que " la musique constituait le centre de sa vie " et que du fait de sa maladie psychique, il a pendant quatre ans, ce que confirment plusieurs rapports médicaux, renoncé totalement à jouer d'un instrument et à chanter. Il sera fait une juste appréciation du préjudice d'agrément ainsi subi, compte tenu notamment du taux d'incapacité permanente partielle de 30% reconnu, en l'évaluant à la somme de 4000 euros, puis en fixant la réparation de cet élément de préjudice à ce montant. 24. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède, d'une part, que le rectorat de l'académie de Rennes est condamné à verser à M. A... la somme de 4000 euros au titre de son préjudice d'agrément et que, d'autre part, M. A... est fondé à demander la réformation du jugement attaqué dans cette seule mesure. Sur les frais liés au litige : 25. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. DECIDE : Article 1er : L'Etat est condamné à verser à M. A... la somme de 4000 euros. Article 2 : Le jugement n° 1605579 du tribunal administratif de Rennes en date du 1er juillet 2019 est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er. Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A... est rejeté. Article 4 : L'Etat versera la somme de 1500 euros à M. A... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et au recteur de l'académie de Rennes. Délibéré après l'audience du 28 mai 2021, à laquelle siégeaient : - M. Gaspon, président de chambre, - M. D..., président assesseur, - Mme B..., première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 juin 2021 Le rapporteur, O. D...Le président, O. GASPON La greffière, P. CHAVEROUX La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 1 N° 19NT03558 2 1
Cours administrative d'appel
Nantes
CAA de MARSEILLE, 7eme chambre - formation a 3, 11/06/2021, 18MA05442, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé par le ministre de la défense suite à son recours préalable devant la commission des recours des militaires du 26 février 2015 et de condamner l'Etat à lui verser les sommes de 148 956 euros et de 50 000 euros au titre de ses préjudices financier et moral, assorties des intérêts au taux légal à compter de sa demande d'indemnisation préalable. Par un jugement n° 1502893 du 22 octobre 2018, le tribunal administratif de Toulon a, à l'article 1er, condamné l'Etat à lui verser la somme de 158 956 euros assortie des intérêts au taux légal à compter de la date de réception de la demande préalable du 1er décembre 2014, à l'article 2, mis à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et à l'article 3, rejeté le surplus des conclusions de la requête de M. B.... Procédure devant la Cour : Par une requête, enregistrée le 21 décembre 2018 sous le n° 18MA05442, la ministre des armées demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 22 octobre 2018 ; 2°) et de rejeter la demande de M. B.... Elle soutient que : - la perte de revenu de M. B... ayant été entièrement réparée par le versement d'une pension militaire d'invalidité (PMI), aucune somme ne saurait lui être allouée à ce titre ; - aucune somme ne saurait lui être versée au titre de sa perte de retraite ; - la somme de 10 000 euros accordée par le jugement attaqué au titre du préjudice moral est excessive. Par un mémoire en défense, enregistré le 9 avril 2019, M. B... représenté par Me C... conclut, à titre principal, au rejet de la requête et, à titre subsidiaire, à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 158 794,13 euros au titre de ses préjudices financier et moral, assortie des intérêts à compter du 1er décembre 2014, date de la demande d'indemnisation préalable et de mettre à la charge de ce dernier la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - à titre principal, les moyens soulevés par la ministre des armées ne sont pas fondés ; - à titre subsidiaire, son préjudice financier est évalué à la somme de 143 838,13 euros résultant de l'absence de reconnaissance du lien d'imputabilité au service de l'affection et de l'absence de liquidation des droits à congés de longue durée pour maladie définis à l'article L. 4138-12 du code de la défense ; - il n'y a pas lieu de déduire le montant accordé au titre de la pension d'invalidité miliaire ; - il justifie d'une perte de retraite évaluée à 4 956 euros ; - le tribunal a estimé à juste titre son préjudice moral à la somme de 10 000 euros. Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrégularité du jugement attaqué dès lors que le tribunal n'a pas appelé à l'instance le ministre du budget en charge du paiement des pensions militaires et a ainsi méconnu les dispositions de l'article R. 66 du code des pensions civiles et militaires de retraite. Par un mémoire, enregistré le 8 février 2021, M. B... a présenté des observations sur le moyen susceptible d'être relevé d'office. Il soutient que : - compte tenu de la nature indemnitaire du contentieux, le ministre de l'économie est étranger à la présente procédure ; - la ministre des armées n'a pas contesté le montant de l'indemnisation demandée ; - le service de retraite du ministre de l'économie et des finances a déjà été consulté et n'a pas jugé utile d'intervenir. Par un mémoire, enregistré le 23 février 2021, la ministre des armées a présenté des observations sur le moyen susceptible d'être relevé d'office. Elle soutient que le jugement est irrégulier dès lors qu'il a été rendu sans que le ministre des finances n'ait été appelé à la cause. Par un mémoire, enregistré le 7 avril 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance a présenté des observations sur le moyen susceptible d'être relevé d'office. Il soutient que : - le jugement attaqué est irrégulier en ce qu'il n'a pas respecté les dispositions de l'article R. 66 du code des pensions civiles et militaires de retraite ; - la demande de M. B... concernant sa perte de retraite est prescrite en application de l'article L. 55 du code des pensions civiles et militaires de retraite. Le mémoire présenté pour M. B..., enregistré le 20 avril 2020, n'a pas été communiqué. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de la défense ; - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme D..., - les conclusions de M. Chanon, rapporteur public ; - et les observations de Me C... représentant M. B.... Une note en délibéré présentée pour M. B... a été enregistrée le 4 juin 2021. Considérant ce qui suit : 1. M. B..., lieutenant-colonel au sein de l'Armée de terre, a développé, à compter de l'année 2007, des troubles anxieux et dépressifs. Par une décision du 1er décembre 2009, le ministre de la défense lui a refusé l'octroi d'une pension militaire d'invalidité au motif que sa maladie n'était pas imputable au service. M. B... a alors contesté cette décision devant le tribunal des pensions militaires du Var et la Cour régionale des pensions militaires, qui ont rejeté sa demande. Toutefois, par une décision du 22 septembre 2014, le Conseil d'Etat a reconnu sa maladie comme imputable au service. L'intéressé a formé une demande préalable d'indemnisation des préjudices consécutifs à l'absence de reconnaissance de l'imputabilité de sa maladie au service le 1er décembre 2014, implicitement rejetée par le ministre de la défense. Il a formé un recours préalable obligatoire à l'encontre de cette décision de rejet devant la commission des recours des militaires le 26 février 2015. Par le jugement du 22 octobre 2018, le tribunal a, à l'article 1er, condamné l'Etat à verser à M. B... la somme de 158 956 euros assortie des intérêts au taux légal à compter de la date de réception de la demande préalable du 1er décembre 2014, à l'article 2, mis à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et à l'article 3, rejeté le surplus des conclusions de la requête de M. B.... La ministre des armées doit être regardée comme relevant appel de l'article 1er de ce jugement. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : En ce qui concerne la responsabilité de l'Etat : 2. Il résulte de l'instruction que par une décision n° 366628 du 22 septembre 2014, le Conseil d'Etat a annulé la décision du 1er décembre 2009 par laquelle le ministre de la défense a refusé à M. B... le bénéfice d'une pension militaire d'invalidité en estimant que la preuve de l'imputabilité au service de sa pathologie devait être regardée comme établie. Dans ces conditions, l'administration, en refusant la prise en compte de l'imputabilité au service de la pathologie de M. B... au titre du calcul de sa retraite et de ses droits à congés, a commis une faute de nature à engager sa responsabilité, au demeurant non contestée par la ministre des armées. En ce qui concerne l'application du forfait de pension opposée par la ministre des armées : 3. Aux termes de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre : " Ouvrent droit à pension : / 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; / 2° Les infirmités résultant de maladies contractées par le fait ou à l'occasion du service ; / 3° L'aggravation par le fait ou à l'occasion du service d'infirmités étrangères au service (...) ". 4. Eu égard à la finalité qui lui est assignée par les dispositions de l'article L. 1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre et aux éléments entrant dans la détermination de son montant, tels qu'ils résultent des dispositions des articles L. 8 bis à L. 40 du même code, la pension militaire d'invalidité doit être regardée comme ayant pour objet de réparer, d'une part, les pertes de revenus et l'incidence professionnelle de l'incapacité physique et, d'autre part, le déficit fonctionnel, entendu comme l'ensemble des préjudices à caractère personnel liés à la perte de la qualité de la vie, aux douleurs permanentes et aux troubles ressentis par la victime dans ses conditions d'existence personnelles, familiales et sociales, à l'exclusion des souffrances éprouvées avant la consolidation, du préjudice esthétique, du préjudice sexuel, du préjudice d'agrément lié à l'impossibilité de continuer à pratiquer une activité spécifique, sportive ou de loisirs, et du préjudice d'établissement lié à l'impossibilité de fonder une famille. Lorsqu'elle est assortie de la majoration prévue à l'article L. 18 du code, la pension a également pour objet la prise en charge des frais afférents à l'assistance par une tierce personne. 5. En instituant la pension militaire d'invalidité, le législateur a entendu déterminer forfaitairement la réparation à laquelle les militaires peuvent prétendre, au titre des préjudices mentionnés ci-dessus, dans le cadre de l'obligation qui incombe à l'Etat de les garantir contre les risques qu'ils courent dans l'exercice de leur mission. Cependant, si le titulaire d'une pension a subi, du fait de l'infirmité imputable au service, d'autres préjudices que ceux que cette prestation a pour objet de réparer, il peut prétendre à une indemnité complémentaire égale au montant de ces préjudices. En outre, dans l'hypothèse où le dommage engage la responsabilité de l'Etat à un autre titre que la garantie contre les risques courus dans l'exercice des fonctions, et notamment lorsqu'il trouve sa cause dans des soins défectueux dispensés dans un hôpital militaire, l'intéressé peut prétendre à une indemnité complémentaire au titre des préjudices que la pension a pour objet de réparer, si elle n'en assure pas une réparation intégrale. Lorsqu'il est saisi de conclusions en ce sens, il incombe au juge administratif de déterminer le montant total des préjudices que la pension a pour objet de réparer, avant toute compensation par cette prestation, d'en déduire le capital représentatif de la pension et d'accorder à l'intéressé une indemnité égale au solde, s'il est positif. 6. La ministre des armées soutient que M. B... a perçu une pension militaire d'invalidité pour la période du 23 juin 2008 au 22 juin 2017 qui répare les pertes de revenus et l'incidence professionnelle de l'incapacité physique, ainsi que le déficit fonctionnel, qui doit s'imputer sur l'indemnisation de ses préjudices économiques. Toutefois, M. B... n'a pas demandé l'indemnisation de préjudices non réparés par une pension militaire d'invalidité, sur le fondement de la responsabilité sans faute ou de la responsabilité pour faute de droit commun, mais des préjudices résultant de l'illégalité fautive du refus d'octroi d'une pension militaire d'invalidité mentionnée au point 2. Par suite, la ministre des armées n'est pas fondée à opposer à l'intimé la règle du forfait de pension. En ce qui concerne les préjudices : S'agissant du préjudice financier lié à la perte de rémunération pendant le congé de longue durée pour maladie : 7. L'article L. 4138-12 du code de la défense prévoit que : " Le congé de longue durée pour maladie est attribué, après épuisement des droits de congé de maladie ou des droits du congé du blessé prévus aux articles L. 4138-3 et L. 4138-3-1, pour les affections dont la liste est fixée par décret en Conseil d'Etat. / Lorsque l'affection survient du fait ou à l'occasion de l'exercice des fonctions ou à la suite de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, ce congé est d'une durée maximale de huit ans. Le militaire perçoit, dans les conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, sa rémunération pendant cinq ans, puis une rémunération réduite de moitié les trois années qui suivent. / Dans les autres cas, ce congé est d'une durée maximale de cinq ans et le militaire de carrière perçoit, dans les conditions définies par décret en Conseil d'Etat, sa rémunération pendant trois ans, puis une rémunération réduite de moitié les deux années qui suivent. (...) / Le militaire placé en congé de longue durée pour maladie continue à figurer sur la liste d'ancienneté, concourt pour l'avancement à l'ancienneté et, dans les cas visés au deuxième alinéa du présent article, pour l'avancement au choix. Le temps passé en congé est pris en compte pour l'avancement et pour les droits à pension de retraite. (...) ". Aux termes de l'article R. 4138-56 du même code : " Le militaire ayant bénéficié de la totalité de ses droits à congés de longue durée pour maladie est, s'il demeure dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, radié des cadres ou rayé des contrôles pour réforme définitive après avis de la commission mentionnée au 4° de l'article L. 4139-14. (...) ". 8. En premier lieu, il résulte de l'instruction qu'en application de l'article L. 4138-12 du code de la défense visé au point 7, M. B... a été placé en congé de longue durée pour maladie du 7 mai 2008 au 6 mai 2013. Pendant cette période, il a perçu un plein traitement pendant trois ans puis un demi traitement pendant deux ans. Toutefois, du fait de la reconnaissance de l'imputabilité au service de sa pathologie par la décision du Conseil d'Etat du 22 décembre 2014 mentionnée au point 2, l'intimé aurait dû bénéficier, en application du 2ème alinéa de l'article L. 4138-12 du code de la défense précité, d'une solde complète pendant cinq ans de mai 2008 à mai 2013 et d'une solde diminuée de moitié pendant trois ans, de juin 2013 à juin 2016. Par suite, la faute de l'administration reconnue au point 2 est à l'origine, pour M. B..., d'un préjudice financier. 9. En deuxième lieu, concernant la période indemnisable allant du 7 mai 2011 au 6 mai 2013 pendant laquelle M. B... a perçu une demi-traitement au lieu d'un plein traitement, il résulte de l'instruction que son préjudice financier s'établit à la somme de 40 300,33 euros, calculée à partir d'une solde moyenne mensuelle de 4 441,85 euros, résultant de la moyenne des soldes versées de juillet 2010, date à laquelle l'intéressé a bénéficié d'un avancement d'indice, à avril 2011 après déduction des sommes réellement perçues par lui durant cette période. 10. En troisième lieu, M. B... ayant épuisé ses droits à congé maladie en l'absence d'imputabilité au service, il a été radié des cadres d'office à compter du 6 juin 2013. Cependant, comme il a été dit au point 8, il avait encore droit à un congé à demi-traitement jusqu'au 7 mai 2016. Si le préjudice pour la période de trois mois à demi-traitement jusqu'en 2016 doit être évalué à la somme de 103 537,80 euros, comme le fait valoir l'intimé, soit 36 mois à 2 876,05 euros, il convient de déduire de ce montant celui de 91 479,96 euros, correspondant à la pension de retraite dont il a bénéficié pendant la même période, d'un montant de 2 541,11 euros mensuel selon le titre de pension produit par la ministre des armées. La somme totale due pour cette seconde période doit ainsi être fixée à 12 057,84 euros. 11. Par suite, il sera fait une juste appréciation de la perte de rémunération de M. B... pendant son congé de longue durée pour maladie à 40 300, 33 euros et 12 057,84 euros, soit un total de 52 358,17 euros. 12. Si la ministre des armées soutient que la pension militaire d'invalidité à un taux d'invalidité de 50 %, dont a bénéficié M. B... du 23 juin 2008 au 22 juin 2017, d'un montant total de 40 042,01 euros doit être déduite de la somme mentionnée au point 11, cette pension était due à l'intéressé indépendamment de ses droits à congé de maladie et de traitement correspondant. Par ailleurs, cette somme est étrangère à un quelconque déficit fonctionnel et ne répare pas une perte de revenus, ni l'incidence professionnelle de l'incapacité physique que M. B... a également subie, mais seulement une erreur dans l'attribution de ses congés de longue durée pour maladie en raison de la reconnaissance de l'imputabilité au service de sa pathologie. Il s'en suit que ce moyen doit être écarté. S'agissant du préjudice financier lié à la perte de retraite : 13. L'article L. 55 du code des pensions civiles et militaires de retraite dispose que : " Sous réserve du b de l'article L. 43, la pension et la rente viagère d'invalidité sont définitivement acquises et ne peuvent être révisées ou supprimées à l'initiative de l'administration ou sur demande de l'intéressé que dans les conditions suivantes : / A tout moment en cas d'erreur matérielle ; / Dans un délai d'un an à compter de la notification de la décision de concession initiale de la pension ou de la rente viagère, en cas d'erreur de droit. (...) ". 14. Si cette dernière disposition permet notamment de redresser toute erreur de droit concernant la détermination de la situation administrative du fonctionnaire retraité au jour de son admission à la retraite et ayant eu une influence sur la liquidation de sa pension, il appartient à l'autorité chargée de cette liquidation de vérifier, sous le contrôle du juge, l'existence et la portée des erreurs alléguées, sans que les intéressés puissent se prévaloir de droits acquis qu'ils tiendraient d'actes intervenus postérieurement à la date de leur admission à la retraite et modifiant rétroactivement leur situation administrative à cette date, pour des motifs autres que l'exécution d'une loi, d'un règlement ayant légalement un effet rétroactif ou d'une décision du juge de l'excès de pouvoir. 15. La ministre des armées et le ministre de l'économie, des finances et de la relance soutiennent que la demande de réparation de perte de retraite de M. B... à hauteur de 4 956 euros est prescrite en application de l'article L. 55 du code des pensions civiles et militaires de retraite. Toutefois, M. B... ne demande pas la révision de sa pension mais la réparation du préjudice financier résultant d'une mise à la retraite d'office plus tôt qu'elle n'aurait dû l'être du fait de l'illégalité fautive de la décision du 1er décembre 2009. Dès lors, il n'y a pas lieu de faire application de ce délai de prescription. Si la ministre des armées soutient que l'intimé ne produit aucun élément à l'appui du calcul du montant de 4 956 euros, M. B... verse au débat une évaluation de la pension qu'il aurait dû toucher de 2 801 euros brut mensuel et effectuée à partir du simulateur du service des retraites de l'Etat dont le montant n'est pas contesté par la ministre des armées qui ne propose aucune autre évaluation. En outre, il résulte de l'instruction que l'intéressé a perçu, depuis le 2 juillet 2013, une pension de retraite de 2 541,11 euros brut mensuel. Par suite, il sera fait une juste appréciation de l'indemnité à laquelle il a droit en condamnant l'Etat à lui verser la somme de 4 956 euros au titre de ce préjudice. S'agissant du préjudice moral : 16. Il résulte de l'instruction que M. B... a subi un préjudice moral en lien avec la faute mentionnée au point 2. Le tribunal a fait une juste appréciation de ce préjudice en lui accordant la somme de 10 000 euros, laquelle n'est pas disproportionnée. 17. Il résulte de tout ce qui précède que la ministre des armées est seulement fondée à demander que l'indemnité de 158 956 euros, que le tribunal administratif l'a condamnée à verser à M. B..., soit ramenée à la somme de 67 314,17 euros. Sur les intérêts : 18. M. B... a droit aux intérêts au taux légal correspondant à l'indemnité de 67 314,17 euros à compter de la date de réception de sa demande préalable du 1er décembre 2014 par la ministre des armées. Sur les frais liés au litige : 19. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. B... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. D É C I D E : Article 1er : La somme de 158 956 euros que la ministre des armées a été condamnée à verser à M. B... par l'article 1er du jugement du tribunal administratif de Toulon du 22 octobre 2018 est ramenée à la somme de 67 314,17 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter de la date de réception de la demande préalable du 1er décembre 2014. Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Toulon du 22 octobre 2018 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt. Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la ministre des armées, à M. A... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance. Délibéré après l'audience du 28 mai 2021, où siégeaient : - M. Pocheron, président de chambre, - M. Guidal, président assesseur, - Mme D..., première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 11 juin 2021. 2 N° 18MA05442 nl
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Marseille