Cour administrative d'appel de Nantes, 3e chambre, du 21 octobre 1999, 95NT01162, inédit au recueil Lebon
Vu le recours et le mémoire ampliatif, enregistrés au greffe de la Cour les 10 août et 24 octobre 1995, présentés par le ministre de l'économie et des finances ;
Le ministre demande à la Cour :
1 ) d'annuler le jugement n 93-1375 du 8 juin 1995 par lequel le Tribunal administratif d'Orléans a, à la demande de M. Michel X..., annulé la décision implicite du trésorier-payeur général d'Indre-et-Loire refusant de faire droit à sa demande de majoration du montant de sa pension prévue par le code des pensions civiles et militaires de retraite en faveur des sapeurs-pompiers de Paris et a condamné l'Etat à verser, avec intérêts à compter du 12 mars 1993, les arrérages de la majoration de sa pension qui lui sont dus depuis le 1er janvier 1986 ;
2 ) de rejeter la demande de M. X... ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 septembre 1999 :
- le rapport de Mme LISSOWSKI, premier conseiller,
- et les conclusions de M. MILLET, commissaire du gouvernement ;
Sur la fin de non-recevoir opposée par M. X... au recours du ministre de l'économie et des finances :
Considérant que le jugement du Tribunal administratif d'Orléans du 8 juin 1995 a été notifié au ministre de l'économie et des finances le 30 juin 1995 ; que, dès lors, le recours qu'il a formé à l'encontre de ce jugement, enregistré au greffe de la Cour le 10 août 1995 a été présenté, contrairement à ce qu'allègue M. X..., dans les délais impartis par les articles R.106 et R.229 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ; que la fin de non-recevoir opposée par M. X... doit, dès lors, être écartée ;
Sur les conclusions du ministre de l'économie et des finances :
Considérant que M. X..., caporal-chef la brigade des sapeurs-pompiers de Paris, a reçu notification le 27 mars 1986, de son brevet de pension militaire de retraite qui lui a été attribué par arrêté du 3 février 1986, à l'issue de sa radiation des cadres, après avoir accompli treize ans de service, portés à quinze ans pour tenir compte de son service militaire, puis à dix-huit ans par le jeu des bénéfices de campagne ; qu'il a saisi l'administration, le 11 mars 1993, d'une demande tendant au bénéfice de la majoration de pension prévue par l'article L.83 du code des pensions civiles et militaires de retraite en faveur des sapeurs-pompiers de Paris, en se prévalant de l'arrêt Dufour du 14 juin 1991 par lequel le Conseil d'Etat a admis que cette majoration, qui procède de la volonté du législateur de prendre en compte les difficultés particulières de leur service, s'ajoute au montant de la pension, même si, par l'effet des dispositions des articles L.13 à L.23 du code, celle-ci a été élevée au montant garanti prévu par l'article L.17 ;
Considérant, en premier lieu, que le paiement de la majoration de pension prévue en faveur des militaires officiers et non officiers des sapeurs-pompiers de Paris n'est pas un acte détachable des opérations de liquidation de pension ; que, par suite, les litiges auxquels il donne lieu ne peuvent faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir mais seulement du recours prévu par l'article L.55 du code des pensions susvisé ;
Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L.55 du code des pensions civiles et militaires de retraite : "La pension et la rente viagère d'invalidité sont définitivement acquises et, ne peuvent être révisées ou supprimées à l'initiative de l'administration ou sur demande de l'intéressé que dans les conditions suivantes : - à tout moment en cas d'erreur matérielle ; - dans un délai d'un an à compter de la notification de la décision de concession initiale de la pension ou de la rente viagère, en cas d'erreur de droit" ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que si l'administration n'a pas procédé au paiement de cette majoration, alors même qu'elle avait porté cette mention sur le titre de pension délivré à l'intéressé, cette omission ne relevait pas d'une pure erreur matérielle mais de l'erreur de droit qu'elle avait commise, et qui a d'ailleurs été sanctionnée par le Conseil d'Etat dans son arrêt Dufour du 14 avril 1991, en refusant d'ajouter ladite majoration au montant de la pension de l'intéressé au motif que celle-ci, d'un montant trop faible, ayant déjà été élevée au montant garanti par l'article L.17 du code, ne pouvait bénéficier d'une nouvelle majoration ;
Considérant qu'il est constant que le requérant, qui, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, a reçu notification de l'arrêté du 3 février 1986 procédant à la liquidation de sa pension le 27 mars 1986, n'en a demandé la révision que le 11 mars 1993 ; que, dès lors, cette demande de majoration, fondée sur l'erreur de droit commise par l'administration, a été présentée après l'expiration des délais impartis par l'article L.55 ; qu'elle n'était donc pas recevable ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre de l'économie et des finances est fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal a fait droit à la demande de M. X... ;
Sur les conclusions d'appel incident de M. X... :
Considérant que M. X... soutient que l'Etat doit, en raison de l'erreur de droit commise à son détriment, être condamné à réparer le préjudice subi qui est égal au montant des arrérages de pension dont il a été privé ; que, toutefois, ces conclusions, présentées pour la première fois en appel, sont irrecevables et doivent, par suite, être rejetées ;
Sur les conclusions de M. X... tendant à l'application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant que les dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à M. X... la somme qu'il demande au titre des frais exposés par celui-ci et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement du 8 juin 1995 du Tribunal administratif d'Orléans est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. Michel X... devant le Tribunal administratif d'Orléans, ses conclusions d'appel incident et ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et à M. Michel X....