Conseil d'Etat, 3 SS, du 15 mars 1995, 142445, inédit au recueil Lebon

Information de la jurisprudence
Date de décision15 mars 1995
Num142445
Juridiction
Formation3 SS
RapporteurMme Burguburu
CommissaireM. Toutée

Vu la requête, enregistrée le 4 novembre 1992 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Rémy X..., demeurant ... ; M. X... demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement en date du 21 août 1992 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du directeur interdépartemental des anciens combattants et victimes de guerre de Strasbourg en date du 2 août 1990 refusant de lui reconnaître la qualité d'incorporé de force dans l'armée allemande ;
2°) annule pour excès de pouvoir cette décision ;
3°) ordonne à l'administration de prescrire une enquête sur le comportement de la commission interdépartementale et de produire l'ensemble des dossiers des anciens membres du R.A.D. ;
.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des pensions civiles d'invalidité et des victimes de la guerre ;
Vu la loi n° 95-125 du 8 février 1995 ;
Vu l'arrêté du 10 mai 1954 modifié par l'arrêté du 2 mai 1984 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Burguburu, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Toutée, Commissaire du gouvernement ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision du 2 août 1990 refusant de reconnaître à M. X... la qualité d'incorporé de force dans l'armée allemande :
Considérant qu'aux termes de l'article 2 de l'arrêté susvisé du 10 mai 1954 modifié par l'arrêté du 2 mai 1984 : "1. Les Alsaciens et les Mosellans incorporés de force dans l'armée allemande, dans des conditions exclusives de tout acte de volonté caractérisé, peuvent se voir reconnaître cette qualité ( ...) par décision du secrétaire d'Etat auprès du ministre de la défense, chargé des anciens combattants, après avis du commissaire de la République intéressé. Un certificat ( ...) sera délivré par le directeur interdépartemental territorialement compétent. Le commissaire de la République est assisté d'une commission interdépartementale itinérante ( ...). Si l'avis du commissaire de la République est défavorable, la commission est obligatoirement consultée ( ...). 2. Ce certificat pourra également être délivré, sur leur demande, aux Alsaciens et Mosellans qui ont été affectés dans des formations paramilitaires allemandes dont la liste est fixée notamment aux articles A. 166 et A. 167 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, et qui ont été engagés sous commandement militaire dans des combats" ;
Sur la légalité externe de la décision attaquée :
Considérant que les moyens tirés par M. X... de ce que certains des membres de la commission interdépartementale qui a donné un avis sur sa demande manqueraient d'impartialité, de ce qu'il n'aurait pas été entendu par cette commission et de ce que la décision attaquée ne serait pas suffisamment motivée reposent sur une cause juridique distincte de celle qui fondait les moyens de sa demande de première instance dans laquelle il s'était borné à critiquer la légalité interne de la décision ; que ces prétentions constituent une demande nouvelle irrecevable en appel ;
Sur la légalité interne de la décision attaquée :
Considérant que, s'il ressort des pièces du dossier que M. X... a été incorporé de force dans l'organisation R.A.D. le 11 juillet 1944, il est constant que cette formation ne faisait pas partie de la Wehrmacht ; que, dès lors, la demande de M. X... devait être examinée au regard de l'article 2-2 précité de l'arrêté du 10 mai 1954 modifié dont les dispositions ont pu légalement subordonner dans le cas qu'elles visent la délivrance du certificat à la condition d'un engagement sous commandement militaire dans des combats ; que M. X... n'établit pas, ni d'ailleurs n'allègue, avoir été engagé dans des combats sous commandement militaire ; qu'il ne peut donc prétendre au bénéfice des dispositions de l'article 2-2 de l'arrêté du 10 mai 1954 modifié ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X... n'est pas fondéà soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande dirigée contre la décision lui refusant la qualité d'incorporé de force dans l'armée allemande ;
Sur les conclusions à fin d'injonctions :

Considérant qu'en dehors du cas prévu par l'article 77 de la loi susvisée du 8 février 1995 dont les dispositions ne sont pas applicables en l'espèce, il n'appartient pas au Conseil d'Etat d'adresser des injonctions à l'administration ; que, dès lors, les conclusions de M. X... tendant à ce que le Conseil d'Etat ordonne à l'administration de conduire une enquête sur l'impartialité des membres de la commission interdépartementale et de produire l'ensemble des dossiers de demande de reconnaissance de la qualité d'incorporé de force dans l'armée allemande présentés par les anciens membres des unités R.A.D. sont irrecevables ;
Article 1er : La requête de M. X... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Rémy X... et au ministre des anciens combattants et victimes de guerre.