Conseil d'Etat, 9 SS, du 28 octobre 1996, 160404, inédit au recueil Lebon

Information de la jurisprudence
Date de décision28 octobre 1996
Num160404
Juridiction
Formation9 SS
RapporteurM. Hourdin
CommissaireM. Loloum

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 26 juillet 1994 et 28 novembre 1994 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Jean-Marie Y..., demeurant 3, Square de l'Escaut à Maurepas (78310) ; M. Y... demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule la décision du 26 mai 1994 par laquelle le ministre de la défense a rejeté sa demande de révision de sa pension militaire de retraite ;
2°) condamne l'Etat à lui verser la somme de 15 000 F par application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Hourdin, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Boré, Xavier, avocat de M. Y...,
- les conclusions de M. Loloum, Commissaire du gouvernement ;

Considérant, en premier lieu, que par arrêté du 8 avril 1993 publié au Journal officiel du 10 avril 1993, pris en application du décret du 27 janvier 1988 modifié autorisant le ministre de la défense à déléguer, par arrêté, sa signature, dans le domaine des décisions portant notification de concession, d'attribution ou de rejet des pensions fondées sur l'invalidité, le décès ou la durée des services, au commissaire-colonel Bernard X... ;
Considérant que la décision du 26 mai 1994 par laquelle la demande de M. Y... tendant à la révision de sa pension militaire de retraite a été rejetée, est signée du commissaire-colonel X..., conformément aux dispositions de l'arrêté susmentionné du 8 avril 1993 ; qu'ainsi, le moyen tiré par le requérant de ce que la décision attaquée aurait été prise par une autorité incompétente manque en fait ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 55 du code des pensions civiles et militaires de retraite applicable en l'espèce : "La pension et la rente viagère d'invalidité sont définitivement acquises et ne peuvent être révisées ou supprimées à l'initiative de l'administration ou sur demande de l'intéressé que dans les conditions suivantes : à tout moment en cas d'erreur matérielle ; dans un délai de six mois à compter de la notification de la décision de concession initiale de la pension ou de la rente viagère, en cas d'erreur de droit ..." ;
Considérant que M. Y..., lieutenant de vaisseau de réserve servant dans l'aéronautique navale, a été rayé des cadres de l'armée le 1er octobre 1969 et a obtenu la jouissance immédiate d'une pension militaire de retraite rémunérant quinze années de services militaires ; que cette pension, liquidée au 3ème échelon du grade de lieutenant de vaisseau, a été révisée le 19 juillet 1976 pour tenir compte du nouveau classement hiérarchique et indiciaire prévu par le décret du 22 décembre 1975, puis à nouveau les 11 juillet 1977 et 8 avril 1991 pour octroyer à l'intéressé une majoration pour enfants ; que, les 3 janvier et 29 avril 1994, M. Y... a sollicité la révision de sa pension en se prévalant des dispositions de l'article L. 15 du code des pensions civiles et militaires de retraite pour demander que soit prise en compte dans la durée effective de ses services militaires l'année de congé qui lui avait été accordée en tant que personnel navigant de l'aéronautique navale du 1er octobre 1968 au 1er octobre 1969 ;
Considérant que M. Y... n'a demandé la révision de sa pension, pour le motif de droit indiqué ci-dessus, qu'après l'expiration du délai de six mois prévu à l'article L. 55 précité du code des pensions civiles et militaires de retraite ; que la pension qui lui a été concédée est donc devenue définitive, avec toutes les conséquences pécuniaires qui en sont inséparables ;
Considérant, en troisième lieu, que les conditions de calcul des droits à pension en fonction des seuls services effectifs ne sauraient, en tout état de cause, constituer une discrimination au sens des stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. Y... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par la décision attaquée, le ministre de la défense a rejeté sademande de révision de sa pension militaire de retraite ;
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, soit condamné à verser à M. Y... la somme de 15 000 F qu'il demande, exposée par lui et non comprise dans les dépens ;
Article 1er : La requête de M. Y... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Jean-Marie Y..., au ministre de la défense et au ministre de l'économie et des finances.