Conseil d'Etat, 1ère sous-section jugeant seule, du 3 octobre 2003, 253999, inédit au recueil Lebon

Information de la jurisprudence
Date de décision03 octobre 2003
Num253999
Juridiction
Formation1ERE SOUS-SECTION JUGEANT SEULE
PresidentM. Arrighi de Casanova
RapporteurM. Nicolas Boulouis
CommissaireM. Stahl

Vu le recours du MINISTRE DE LA DEFENSE, enregistré le 7 février 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat ; le MINISTRE DE LA DEFENSE demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 3 décembre 2002 par lequel la cour régionale des pensions de Bordeaux a confirmé le jugement du 19 octobre 2000 du tribunal des pensions de la Dordogne reconnaissant à M. Jean-Philippe X le droit à une pension militaire d'invalidité à un taux de 10 % pour acouphènes ;


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;

Vu le décret n° 59-327 du 20 février 1959 ;

Vu le code de justice administrative ;


Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Boulouis, Maître des Requêtes,

- les conclusions de M. Stahl, Commissaire du gouvernement ;





Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre que, s'il ne peut prétendre au bénéfice de la présomption légale d'imputabilité, le demandeur d'une pension doit rapporter la preuve de l'existence d'un fait précis ou de circonstances particulières de service à l'origine de l'affection qu'il invoque ;

Considérant que pour reconnaître droit à pension à M. X au taux de 10 % pour des acouphènes, la cour régionale des pensions de Bordeaux s'est fondée sur le rapport de l'expert et sur des attestations du commandant du groupement d'instruction auquel appartenait l'intéressé, ainsi que sur divers documents faisant seulement état de traumatismes sonores répétés subis par M. X dans le cadre de ses fonctions d'instructeur de tir en 1968, sans se référer à un accident traumatique particulier ; que, si l'arrêt attaqué fait état d'une attestation du supérieur hiérarchique de l'intéressé en date du 16 août 2000 qui évoque un jet maladroit de grenade par une recrue que celui-ci encadrait, il ne fait mention d'aucun élément précis quant aux circonstances de cet incident ; qu'ainsi, en se fondant sur des documents ne faisant pas ressortir l'existence d'un fait précis de service à l'origine des troubles invoqués par M. X, la cour a méconnu les dispositions de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; que, par suite, le MINISTRE DE LA DEFENSE est fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, par application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au fond ;

Considérant que si M. X fait valoir qu'il aurait été victime d'un accident traumatique en mars 1968, alors qu'il exerçait les fonctions d'instructeur de tir, il n'apporte pas d'éléments suffisamment probants à l'appui de ses allégations ; qu'en particulier, le seul document faisant état d'un tel incident date d'août 2000 et n'est pas circonstancié ; que les conditions générales de service en qualité d'instructeur de tir ne sauraient être regardées comme constitutives d'un fait précis de service seul de nature à ouvrir droit à pension en application de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; que, par suite, le MINISTRE DE LA DEFENSE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal départemental des pensions de la Dordogne a reconnu à M. X droit à pension pour des acouphènes ;



D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt de la cour régionale des pensions de Bordeaux en date du 3 décembre 2002 est annulé.

Article 2 : Le jugement du 19 octobre 2000 du tribunal départemental des pensions de la Dordogne est annulé en tant qu'il reconnaît droit à pension à M. X au taux de 10 % pour des acouphènes.

Article 3 : La demande présentée par M. devant le tribunal départemental des pensions de la Dordogne tendant à ce qu'il lui soit reconnu droit à pension pour acouphènes est rejetée.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DE LA DEFENSE et à M. Jean-Philippe X.