Conseil d'État, 6ème et 1ère sous-sections réunies, 24/04/2013, 349109
Date de décision | 24 avril 2013 |
Num | 349109 |
Juridiction | |
Formation | 6ème et 1ère sous-sections réunies |
Rapporteur | M. Didier Ribes |
Commissaire | Mme Suzanne von Coester |
Avocats | SCP GADIOU, CHEVALLIER |
Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 9 mai et 9 août 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, présentés pour M. B... M'A..., demeurant... ; M. M'A... demande au Conseil d'État :
1°) d'annuler l'arrêt n° 07/00060 du 7 mai 2010 par lequel la cour régionale des pensions de Paris a infirmé le jugement du 19 septembre 2007 du tribunal départemental des pensions de Paris et a déclaré irrecevable sa demande tendant à percevoir une pension de retraite en sa qualité d'ancien combattant ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à ses conclusions d'appel ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;
Vu le décret n° 59-327 du 20 février 1959 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Didier Ribes, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Gadiou, Chevallier, avocat de M. M'A...,
- les conclusions de Mme Suzanne von Coester, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Gadiou, Chevallier, avocat de M. M'A... ;
1. Considérant qu'il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que, par un jugement du 19 septembre 2007, le tribunal départemental des pensions de Paris a, à la demande de M. M'A..., annulé le refus du ministre de la défense d'octroyer à l'intéressé une pension militaire d'invalidité à taux plein et lui a accordé cette pension à compter du 6 novembre 1993 avec intérêts et capitalisation des intérêts ; que, saisie en appel par le ministre de la défense, la cour régionale des pensions de Paris a opposé d'office l'irrecevabilité, fondée sur un défaut d'intérêt pour agir, de la demande de M. M'A... ; que la cour a déduit ce défaut d'intérêt de ce qu'elle n'était pas en mesure, compte tenu du caractère insuffisamment précis de la demande initiale, formée par un avocat agissant au nom de plusieurs dizaines de requérants, dont l'intéressé, de vérifier la qualité des personnes au nom desquelles cette demande collective était présentée ; que, par un arrêt du 7 mai 2010, contre lequel M. M'A... se pourvoit en cassation, la cour a, en conséquence, annulé le jugement du tribunal et rejeté la demande de M. M'A... ;
2. Considérant que la procédure suivie devant les juridictions des pensions est régie, dans le respect des exigences de l'article 6 § 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, par les dispositions du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, celles du décret du 20 février 1959 relatif aux juridictions des pensions et celles du code de procédure civile auxquelles les dispositions de ce décret renvoient expressément ; que, dans le silence de ces textes, il appartient aux tribunaux et cours des pensions, en raison de leur caractère de juridictions administratives, de faire application des règles générales de procédure applicables à ces dernières ; que le fait pour ces juridictions de se fonder sur des dispositions du code de procédure civile autres que celles mentionnées ci-dessus n'entache pas d'irrégularité leurs décisions, dès lors que ces dispositions peuvent être regardées comme traduisant ces règles ;
3. Considérant qu'aucune des dispositions du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, du décret du 20 février 1959 ou de celles du code de procédure civile auxquelles renvoie ce décret ne précise les conditions dans lesquelles le juge des pensions peut opposer d'office le défaut de qualité pour agir d'un requérant ; qu'il y a lieu, en pareil cas, de faire application de la règle générale de procédure applicable aux juridictions administratives selon laquelle le juge ne peut rejeter une demande pour ce motif, dès lors que cette irrecevabilité est régularisable, sans avoir invité son auteur à procéder à cette régularisation ; qu'il en va de même lorsque le juge d'appel entend opposer au requérant l'irrecevabilité de sa demande de première instance ;
4. Considérant qu'il ressort de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que la cour régionale des pensions de Paris a soulevé d'office la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité pour agir du requérant sans que l'intéressé ait été invité à régulariser sa demande ; que cette irrecevabilité était régularisable ; que, pour les raisons précédemment indiquées, M. M'A... est fondé à soutenir que l'arrêt qu'il attaque a été rendu au terme d'une procédure irrégulière et à demander, pour ce motif, son annulation ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt du 7 mai 2010 de la cour régionale des pensions de Paris est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour régionale des pensions de Paris.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. B... M'A... et au ministre de la défense.