CAA de PARIS, 6ème chambre, 28/03/2017, 16PA00459, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A...D...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 17 décembre 2013, par laquelle la directrice générale de l'office national des anciens combattants et des victimes de guerre (ONAC) ne lui a pas reconnu la qualité de combattant.
Par un jugement n° 1416725 du 22 décembre 2015 le tribunal administratif a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et des mémoires enregistrés au tribunal administratif les 1er février, 8 juin et 17 octobre 2016, M.D..., représenté par MeF..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 22 décembre 2015 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler la décision du 17 décembre 2013 de la directrice de l'ONAC ;
3°) d'enjoindre à l'ONAC de réexaminer sa demande ;
4°) de mettre à la charge de l'ONAC le versement d'une somme de 2 000 euros à verser à M. D...en application de L. 761-1 du code de justice administrative et d'une somme de 2 000 euros à verser à MeF..., son conseil, en application de ces dispositions et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sous réserve qu'elle renonce à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.
Il soutient que :
- la décision attaquée est insuffisamment motivée ;
- il n'est pas justifié d'une délégation dont bénéficierait la signataire de cette décision dont la qualité de directrice de l'office national des anciens combattants et des victimes de guerre n'est pas établie ;
- cette décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation dès lors que l'intéressé a fait partie des forces supplétives du 1er janvier 1961 au 1er août 1962 et qu'il n'est pas démontré qu'il n'aurait pas appartenu pendant trois mois consécutifs ou non à une unité combattante ;
- la décision litigieuse est aussi entachée d'erreur de fait ; le justificatif produit par le requérant établit qu'il faisait partie des forces supplétives du 1er janvier 1961 au 1er août 1962 ;
- le mémoire en défense de l'ONAC n'est pas recevable.
Par un mémoire en défense, enregistré le 15 septembre 2016, l'ONAC conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 17 octobre 2016, la clôture de l'instruction a été reportée au 2 novembre 2016.
M. D...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris du 8 avril 2016.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Labetoulle,
- les conclusions de M. Baffray, rapporteur public.
1. Considérant que M. D...a sollicité auprès de l'ONAC l'attribution de la carte de combattant ; que par décision du 17 décembre 2013 la directrice générale de l'ONAC a rejeté sa demande ; que l'intéressé a saisi le Tribunal administratif de Paris qui a rejeté sa demande par jugement du 22 décembre 2015 dont il interjette appel ;
2. Considérant que, contrairement à ce que soutient le requérant, le mémoire en défense de l'ONAC est signé par "le chef du département reconnaissance et réparation" M. C...B... qui avait été habilité pour défendre en justice par arrêté du 2 septembre 2013 régulièrement publié au journal officiel de la république française ;
Sur le bien-fondé du jugement :
3. Considérant que la décision attaquée vise notamment les dispositions applicables du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre et énumère les différentes conditions susceptibles d'ouvrir droit à la délivrance d'une carte de combattant en relevant à chaque fois que l'intéressé ne satisfait pas à ces conditions ; qu'elle contient ainsi l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde et est dés lors suffisamment motivée ; que par suite, le moyen tiré de son insuffisance de motivation manque en fait ;
4. Considérant que le requérant fait également valoir que la décision attaquée serait entachée d'incompétence ; que toutefois, ainsi que l'a à juste titre jugé le tribunal, le directeur général de l'office, en vertu de l'article R. 572-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, reçoit délégation de pouvoir du ministre de la défense dans certaines matières comme les décisions relatives à la carte ou à la retraite du combattant et aux indemnités et pécules qui y sont rattachés ; que, par décret du 19 décembre 2012 Mme G...E...a été nommée directrice générale de l'ONAC ; que ce décret a été publié au journal officiel du 21 décembre 2012 ; que la circonstance que l'exemplaire de ce décret versé au dossier ne comporte pas de signature ne permet pas d'en remettre en cause l'authenticité ; que dès lors, le moyen tiré de ce que la décision attaquée aurait été signée par une autorité incompétente manque en fait ;
5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 253 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, dans sa version alors en vigueur : "Il est créé une carte de combattant qui est attribuée dans les conditions fixées aux articles R. 223 à R. 235" ; qu'aux termes de l'article R. 223 de ce code : "La carte du combattant prévue à l'article L. 253 est attribuée à toutes les personnes qui justifient de la qualité de combattant dans les conditions déterminées par les articles R. 224 à R. 229" ; qu'aux termes de l'article R. 224 du même code "Sont considérés comme combattants : (...)D-Pour les opérations effectuées en Afrique du Nord entre le 1er janvier 1952 et le 2 juillet 1962 inclus : a) En Tunisie, à compter du 1er janvier 1952 ; b) Au Maroc, à compter du 1er juin 1953 ; c) En Algérie, à compter du 31 octobre 1954.
I.-Sont considérés comme des combattants les militaires des armées françaises et les membres des forces supplétives françaises :
1° Qui ont appartenu pendant trois mois, consécutifs ou non, à une unité combattante ou à une formation entrant dans l'une des catégories énumérées par l'arrêté interministériel prévu au troisième alinéa de l'article L. 253 bis et assimilée à une unité combattante ; Pour le calcul de la durée d'appartenance, les services accomplis au titre d'opérations antérieures se cumulent entre eux et avec ceux des opérations d'Afrique du Nord ; Des bonifications afférentes à des situations personnelles résultant du contrat d'engagement sont accordées pour une durée ne pouvant excéder dix jours, suivant les modalités d'application fixées par arrêtés des ministres intéressés ;
2° Qui ont appartenu à une unité ayant connu, pendant leur temps de présence, neuf actions de feu ou de combat ;
3° Qui ont pris part à cinq actions de feu ou de combat ;
4° Qui ont été évacués pour blessure reçue ou maladie contractée en service, alors qu'ils appartenaient à une unité combattante ou à une formation assimilée sans condition de durée de séjour dans cette unité ou formation ;
5° Qui ont reçu une blessure assimilée à une blessure de guerre quelle que soit l'unité ou la formation à laquelle ils ont appartenu, sans condition de durée de séjour dans cette unité ou formation ;
6° Qui ont été détenus par l'adversaire et privés de la protection des conventions de Genève.
II.-Les listes des unités combattantes des armées de terre, de mer et de l'air, de la gendarmerie et des services communs et des formations des forces supplétives françaises assimilées sont établies par le ministre de la défense sur les bases suivantes : Sont classées, pour une durée d'un mois, comme unités combattantes ou formations assimilées, les unités et formations impliquées dans au moins trois actions de feu ou de combat distinctes au cours d'une période de trente jours consécutifs. Les éléments détachés auprès d'une unité reconnue comme combattante suivent le sort de cette unité. Des bonifications afférentes à des opérations de combat limitativement désignées peuvent être accordées. La liste de ces opérations et bonifications est fixée par un arrêté conjoint du ministre de la défense et du secrétaire d'Etat aux anciens combattants" ; qu'aux termes de l'article L. 253 bis du même code dans sa version alors en vigueur : "Ont vocation à la qualité de combattant et à l'attribution de la carte du combattant, selon les principes retenus pour l'application du présent titre et des textes réglementaires qui le complètent, sous la seule réserve des adaptations qui pourraient être rendues nécessaires par le caractère spécifique de la guerre d'Algérie ou des combats en Tunisie et au Maroc entre le 1er janvier 1952 et le 2 juillet 1962 : les militaires des armées françaises, les membres des forces supplétives françaises, les personnes civiles possédant la nationalité française à la date de la présentation de leur demande qui ont pris part à des actions de feu ou de combat au cours de ces opérations. Une commission d'experts, comportant notamment des représentants des intéressés, est chargée de déterminer les modalités selon lesquelles la qualité de combattant peut, en outre, être reconnue, par dérogation aux principes visés à l'alinéa précédent, aux personnes ayant pris part à cinq actions de feu ou de combat ou dont l'unité aura connu, pendant leur temps de présence, neuf actions de feu ou de combat. Les adaptations visées au premier alinéa ci-dessus ainsi que les modalités d'application du présent article, et notamment les périodes à prendre en considération pour les différents théâtres d'opérations, seront fixées par décret en Conseil d'Etat ; un arrêté interministériel énumérera les catégories de formations constituant les forces supplétives françaises. Une durée des services d'au moins quatre mois dans l'un ou l'autre ou dans plusieurs des pays mentionnés au premier alinéa est reconnue équivalente à la participation aux actions de feu ou de combat exigée au cinquième alinéa" ;
6. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que sont considérés comme combattants, pour les opérations effectuées en Afrique du Nord entre le 1er janvier 1952 et le 2 juillet 1962 inclus, notamment les personnes ayant appartenu pendant trois mois, consécutifs ou non, à une unité combattante ou à une formation assimilée à une unité combattante ou satisfaisant à une autre des conditions posées par l'article R. 224 D précité et que par ailleurs pour une personne ayant servi en Algérie, en Tunisie ou au Maroc une durée de quatre mois de services dans l'un de ces pays est reconnue équivalente à la participation aux actions de feu ou de combat requises par ailleurs ;
7. Considérant qu'il ressort des pièces versées au dossier que si M. D...a servi dans l'armée française en qualité d'appelé il a été affecté à ce titre en Algérie au centre de sélection n° 10 du 11 janvier au 25 janvier 1961 sans que ce centre se soit vu reconnaitre la qualité d'unité combattante ; qu'il a ensuite servi en mer du 25 au 27 janvier 1961 puis a résidé en France jusqu'au 25 juin 1962 où il a à nouveau servi en mer jusqu'au 27 juin 1962, date à laquelle il est revenu en Algérie pour une permission libérable du 28 juin 1962 au 31 juillet 1962 ; qu'ainsi il ne rapporte pas la preuve, qui lui incombe, de ce qu'il aurait appartenu pendant trois mois,
consécutifs ou non, à une unité combattante ou à une formation assimilée à une unité combattante en application de l'article R. 224 D précité ni de ce qu'il aurait servi en Algérie pendant une durée de quatre mois, en application du dernier alinéa de l'article L. 253bis précité ; que par ailleurs il ne justifie ni n'allègue satisfaire à aucune autre des conditions posées par l'article R. 224 D ; qu'il n'est par suite pas fondé à soutenir que la décision contestée, qui se borne à constater qu'il n'entre pas dans les hypothèses visées par les dispositions précitées, serait entachée "d'erreur manifeste d'appréciation" ou "d'erreur de fait" ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du17 décembre 2013 par laquelle la directrice générale de l'ONAC ne lui a pas reconnu la qualité de combattant ; que ses conclusions à fins d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, en conséquence, qu'être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : la requête de M. D...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...D...et au ministre de la défense.
Copie en sera adressée pour information à la directrice générale de l'office national des anciens combattants et des victimes de guerre.
Délibéré après l'audience du 14 mars 2017, à laquelle siégeaient :
- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,
- M. Niollet président assesseur ,
- Mme Labetoulle, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 28 mars 2017.
Le rapporteur,
M-I. LABETOULLE Le président,
O. FUCHS TAUGOURDEAU
Le greffier,
T. ROBERT
La République mande et ordonne au ministre de la défense en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 16PA00459