CAA de LYON, 4ème chambre - formation à 3, 20/04/2017, 15LY02680, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Mme C...A...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 20 juin 2014 par lequel le recteur de l'académie de Grenoble a mis fin à son stage dans le corps des adjoints administratifs de l'éducation nationale et de l'enseignement supérieur à compter du 1er septembre 2014 et l'a radiée de ce corps à cette même date.
Par un jugement n° 1404897 du 17 juin 2015, le tribunal administratif de Grenoble a annulé cet arrêté et condamné l'Etat à verser à Mme A...la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la cour
Par un recours et un mémoire complémentaire, enregistrés respectivement le 31 juillet 2015 et le 24 février 2016, le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche demande à la cour d'annuler ce jugement du 17 juin 2015 et de rejeter la demande présentée par Mme A...devant le tribunal administratif de Grenoble.
Elle soutient que :
- c'est à tort que le tribunal a estimé que Mme A...avait été licenciée pour insuffisance professionnelle en cours de stage dès lors que la date à laquelle est prise la décision de mettre fin au stage est sans incidence sur la date d'effet de cette décision ;
- l'arrêté du 20 juin 2014 constituait un licenciement en fin de stage qui n'avait pas à comporter de motivation et n'impliquait pas que l'intéressée soit mise à même de prendre connaissance de son dossier ;
- pour les autres moyens soulevés par Mme A...en première instance il se réfère aux mémoires produits par le recteur de l'académie de Grenoble enregistrés au greffe du tribunal les 10 octobre 2014 et 23 février 2015 ;
- le recours incident de Mme A...est irrecevable.
Par des mémoires en défense enregistrés les 22 septembre 2015 et 2 mars 2016, Mme C...A..., représentée par MeB..., conclut au rejet de la requête et demande en outre à la cour :
1°) d'enjoindre au recteur de l'académie de Grenoble sous astreinte de 100 euros passé le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, à titre principal, de la réintégrer en qualité de stagiaire dans le corps des adjoints administratifs de l'éducation nationale et de l'enseignement supérieur ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation à compter du 20 juin 2014 ;
2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que son licenciement est intervenu en cours de stage et ne pouvait intervenir sans communication préalable de son dossier ;
- l'arrêté du 20 juin 2014 est irrégulier au regard des dispositions de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 en ce que la mention de deux noms et de deux qualités ne permet pas d'identifier l'autorité signataire ;
- l'arrêté en litige n'est pas motivé en fait et cette absence de motivation révèle l'absence d'examen de ses aptitudes et comportement professionnels, constitutive d'un vice de légalité externe et d'une erreur de droit ;
- l'insuffisance professionnelle qui lui est reprochée n'est pas établie ; en tout état de cause, elle n'a pas été placée dans les conditions permettant à l'administration d'établir son inaptitude à exercer les fonctions correspondant à son grade ;
- son licenciement est entaché d'erreur d'appréciation ou, si la cour estime qu'il est intervenu en fin de stage, d'erreur manifeste d'appréciation.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- la loi n° 2008-492 du 26 mai 2008 ;
- le décret n° 94-874 du 7 octobre 1994 ;
- le décret 2006-1760 du 23 décembre 2006 ;
- le code de justice administrative ;
Par ordonnance du 8 mars 2016, l'instruction a été close au 25 mars 2016.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Michel,
- et les conclusions de M. Dursapt, rapporteur public.
1. Considérant que, par un arrêté du 27 août 2012, le recteur de l'académie de Grenoble a nommé à compter du 1er septembre 2012 Mme C...A...en qualité de stagiaire dans le corps des adjoints administratifs de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche à l'issue d'une procédure de recrutement organisée dans les conditions prévues par les articles L. 399 et suivants du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, dans leur rédaction issue de la loi du 26 mai 2008 relative aux emplois réservés et portant dispositions diverses relatives à la défense ; que, par un arrêté du même jour, Mme A...a été affectée à compter du 1er septembre 2012 jusqu'au 31 août 2013 au rectorat de l'académie de Grenoble où elle a été chargée de fonctions de secrétariat au cabinet du recteur ; qu'à l'issue de cette période, elle a été autorisée à effectuer un stage complémentaire d'une durée d'un an sur un poste d'accueil et de standardiste à la division de la logistique du rectorat ; que, par un arrêté du 20 juin 2014, le recteur a mis fin à son stage dans le corps des adjoints administratifs de l'éducation nationale et de l'enseignement supérieur à compter du 1er septembre 2014 et l'a radiée de ce corps à cette même date ; que, par un jugement du 17 juin 2015 dont le ministre chargé de l'éducation nationale relève appel, le tribunal administratif de Grenoble a annulé cet arrêté et enjoint au recteur de l'académie de Grenoble de réexaminer la situation de l'intéressée dans un délai de deux mois à compter de sa notification ; que MmeA..., qui conclut au rejet du recours, présente des conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au recteur de la réintégrer en qualité de stagiaire dans le corps des adjoints administratifs de l'éducation nationale et de l'enseignement supérieur ;
Sur le bien fondé du jugement attaqué :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 7 du décret du 7 octobre 1994 fixant les dispositions communes applicables aux stagiaires de l'Etat et de ses établissements publics : " Le fonctionnaire stagiaire peut être licencié pour insuffisance professionnelle lorsqu'il est en stage depuis un temps au moins égal à la moitié de la durée normale du stage. / La décision de licenciement est prise après avis de la commission administrative paritaire (...) " ; qu'aux termes du II. de l'article 12 du décret du 23 décembre 2006 relatif aux dispositions statutaires communes applicables aux corps d'adjoints administratifs des administrations de l'Etat : " - Les personnes nommées dans un corps d'adjoints administratifs à la suite d'une procédure de recrutement sans concours (...) sont nommées dans le grade correspondant à celui dans lequel le recrutement a été ouvert et accomplissent un stage d'une durée d'un an. / A l'issue du stage, les stagiaires dont les services ont donné satisfaction sont titularisés. / Les autres stagiaires peuvent, après avis de la commission administrative paritaire, être autorisés à effectuer un stage complémentaire d'une durée maximale d'un an. Si le stage complémentaire a été jugé satisfaisant, les intéressés sont titularisés. / Les adjoints administratifs (...) stagiaires (...) qui n'ont pas été autorisés à effectuer un stage complémentaire ou dont le stage complémentaire n'a pas été jugé satisfaisant sont soit licenciés s'ils n'avaient pas préalablement la qualité de fonctionnaire, soit réintégrés dans leur corps, cadre d'emplois ou emploi d'origine (...) " ;
3. Considérant que l'arrêté du 20 juin 2014 est intervenu alors que Mme A...n'avait pas achevé la durée complète du stage complémentaire qu'elle avait été autorisée à effectuer jusqu'au 31 août 2014, après avis de la commission administrative paritaire ; qu'ainsi l'arrêté litigieux mettant fin au stage de Mme A...constitue un licenciement pour insuffisance professionnelle en cours de stage, intervenu dans des conditions irrégulières en l'absence de motivation en fait de la décision le prononçant, ainsi que l'ont retenu à bon droit les premiers juges ;
4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre chargé de l'éducation nationale n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé l'arrêté du 20 juin 2014 du recteur de l'académie de Grenoble ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
5. Considérant, d'une part, que l'annulation d'une mesure de licenciement en cours de stage d'un fonctionnaire stagiaire n'implique pas nécessairement, à titre de mesure d'exécution, qu'il soit procédé à sa titularisation ; que c'est dès lors à bon droit que le tribunal a enjoint au recteur de l'académie de Grenoble de seulement réexaminer la situation de MmeA... ;
6. Considérant, d'autre part, que l'exécution du présent arrêt n'implique pas nécessairement la réintégration de Mme A...en qualité de stagiaire dans le corps des adjoints administratifs de l'éducation nationale et de l'enseignement supérieur ; qu'elle n'est, dès lors, pas fondée à demander à la cour de prononcer une telle mesure ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions de Mme A...doivent être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative du code de justice administrative :
8. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme A...et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Le recours du ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche est rejeté.
Article 2 : L'Etat versera à Mme A...la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions présentées par Mme A...est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche et à Mme C...A....
Délibéré après l'audience du 30 mars 2017, à laquelle siégeaient :
M. d'Hervé, président,
Mme Michel, président assesseur,
Mme Samson-Dye, premier conseiller.
Lu en audience publique le 20 avril 2017.
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N° 15LY02680