CAA de LYON, 7ème chambre, 31/03/2022, 21LY01241, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. B... A... a demandé au tribunal des pensions militaires de Chambéry d'annuler la décision du 1er octobre 2018 par laquelle la ministre des armées a refusé de faire droit à sa demande de révision pour aggravation de sa pension militaire d'invalidité et d'enjoindre à la ministre des armées de faire droit à sa demande, en portant le taux global de sa pension à 60 %, subsidiairement, d'ordonner une expertise médicale.
Par un jugement n° 1907236 du 6 avril 2021, le tribunal administratif de Grenoble, à qui la demande a été transmise en application du décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018, a rejeté la demande de M. A....
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 21 avril 2021, M. A..., représenté par Me Stark, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 6 avril 2021 ;
2°) d'annuler la décision du 1er octobre 2018 ;
3°) de faire droit à sa demande de révision de pension en portant le taux global de cette dernière à 60 % ; subsidiairement, d'ordonner une expertise médicale afin d'établir son infirmité et le taux de celle-ci ;
4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le tribunal ne pouvait, sans erreur de droit, ne pas se placer à la date de sa demande de révision de pension, le 28 décembre 2016, pour écarter les éléments médicaux antérieurs ;
- l'expertise médicale de l'administration, confirmée par un certificat d'un médecin-psychiatre militaire, établit tous les éléments d'appréciation pour fixer à 10 % le taux d'aggravation de son infirmité à la date de sa demande de révision, portant ainsi son taux global à 60 % ;
- en tout état de cause, une nouvelle expertise ne pourrait que confirmer cette appréciation ;
- le tribunal a dénaturé les rapports d'expertises et a entaché son appréciation d'une erreur manifeste.
Par un mémoire, enregistré le 13 octobre 2021, la ministre des armées conclut au rejet de la requête.
Elle fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;
- le décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018 ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Josserand-Jaillet, président ;
- les conclusions de M. Chassagne, rapporteur public ;
- et les observations de Me Stark, pour M. A... ;
Considérant ce qui suit :
1. Engagé volontaire dans l'armée de terre le 6 février 2001, M. B... A..., né le 30 octobre 1981, a été rayé des contrôles le au grade de par voie de réforme. Un arrêté du 11 janvier 2016 lui a concédé une pension militaire d'invalidité au taux de 50 % pour une infirmité constituée par un syndrome de stress post-traumatique à la suite d'une opération extérieure en Afghanistan. Par une décision du 1er octobre 2018, la ministre des armées a rejeté la demande de M. A..., formée le 28 décembre 2016, tendant à la révision de sa pension pour aggravation de cette infirmité. M. A... demande à la cour l'annulation du jugement du 6 avril 2021 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, dans sa rédaction applicable au litige : " Ouvrent droit à pension : /1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; /2° Les infirmités résultant de maladies contractées par le fait ou à l'occasion du service ; / 3° L'aggravation par le fait ou à l'occasion du service d'infirmités étrangères au service ; / 4° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'accidents éprouvés entre le début et la fin d'une mission opérationnelle, y compris les opérations d'expertise ou d'essai, ou d'entraînement ou en escale, sauf faute de la victime détachable du service. " 3 Aux termes de l'article L. 29 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre en vigueur à la date de la demande de révision de la pension : " Le titulaire d'une pension d'invalidité concédée à titre définitif peut en demander la révision en invoquant l'aggravation d'une ou plusieurs des infirmités en raison desquelles cette pension a été accordée. / Cette demande est recevable sans condition de délai. / La pension ayant fait l'objet de la demande est révisée lorsque le pourcentage d'invalidité résultant de l'infirmité ou de l'ensemble des infirmités est reconnu supérieur de 10 p 100 au moins du pourcentage antérieur. / Toutefois, l'aggravation ne peut être prise en considération que si le supplément d'invalidité est exclusivement imputable aux blessures et aux maladies constitutives des infirmités pour lesquelles la pension a été accordée. / La pension définitive révisée est concédée à titre définitif ". En vertu des dispositions de l'article L. 6 du même code, aux termes desquelles " L'entrée en jouissance est fixée à la date du dépôt de la demande. ", l'évolution des infirmités pensionnées s'apprécie sur une période comprise entre la date initiale d'octroi de la pension et celle de dépôt de la demande de révision.
3. Il résulte de ces dispositions que, nonobstant la circonstance que, pour l'exercice de son office, le juge du contentieux des pensions militaires d'invalidité statue en plein contentieux, lorsque le titulaire d'une pension militaire d'invalidité pour infirmité sollicite sa révision du fait de l'aggravation de ses infirmités, l'évolution du degré d'invalidité s'apprécie à la date du dépôt de la demande de révision de la pension, laquelle lie le contentieux ultérieur.
4. Il est constant que, par un arrêté du 11 janvier 2016, devenu définitif après le rejet des recours de l'intéressé, une pension militaire d'invalidité a été concédée à compter du 8 octobre 2015 à M. A..., pour une infirmité consistant en un état de stress post-traumatique, diagnostiqué en mai 2012, caractérisé par un syndrome de répétition, des troubles de la personnalité, des difficultés relationnelles, un isolement social et une agoraphobie, trouvant son origine dans les conditions de sa participation à une opération extérieure en Afghanistan. La même décision a fixé le taux d'invalidité à 50 %.
5. En premier lieu, il résulte de ces circonstances que, s'agissant de la détermination de ce taux initial, a été pris en compte l'état de santé de M. A... à la date du dépôt de sa demande de pension, le 8 octobre 2015, au vu des éléments médicaux constatant cet état produits à l'instruction administrative de sa demande et, par suite, jusqu'à la date de la décision statuant sur cette dernière. Il suit de là que, ainsi que l'a à bon droit relevé le tribunal, le certificat médical du 28 juillet 2015 et l'attestation du psychologue du 21 avril 2015, s'ils étaient susceptibles d'apporter des éléments d'appréciation pour la fixation du taux d'invalidité initial, ne pouvaient en tout état de cause utilement être produits à l'appui d'une démonstration d'une aggravation de l'infirmité dont le taux d'invalidité n'a été fixé que par la décision du 11 janvier 2016.
6. En second lieu, il ne ressort pas de l'attestation du 1er février 2018 du médecin de l'administration ni du certificat médical du 25 octobre 2016 du médecin militaire, qui confirment l'ensemble des constatations médicales et notamment la pathologie post-traumatique au long cours dont souffre M. A... dans son existence, sa consistance, son étendue et l'intensité de ses manifestations invalidantes, une aggravation de ces dernières entre l'intervention de l'arrêté du 11 janvier 2016 fixant le taux de cette invalidité et la date du 28 décembre 2016 à laquelle l'intéressé en a demandé la révision, particulièrement par comparaison de ces constatations avec les éléments, portant sur la période antérieure, exposés dans les documents des 28 juillet 2015 et 21 avril 2015 dont M. A... se prévaut. Dès lors, quel que soit le taux évalué, pour avis, par les médecins auteurs de ces documents, pour l'invalidité résultant de l'infirmité pensionné, M. A..., n'établissant aucune aggravation de cette dernière et sans pouvoir déduire de ces estimations l'aggravation elle-même, n'est pas fondé à soutenir qu'il devait être porté à 60 % en augmentation de 10 % du taux initialement fixé.
7. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Il suit de là que, sans qu'il y ait lieu d'ordonner une expertise, sa requête doit être rejetée, dont les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la ministre des armées.
Délibéré après l'audience du 10 mars 2022 à laquelle siégeaient :
M. Josserand-Jaillet, président ;
M. Seillet, président assesseur ;
Mme Djebiri, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 mars 2022.
Le président, rapporteur,
D. Josserand-Jaillet Le président assesseur,
Ph. Seillet
La greffière,
A. Le Colleter
La République mande et ordonne à la ministre des armées, en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
N° 21LY01241 2
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