CAA de LYON, 7ème chambre, 19/01/2023, 22LY00733, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler la décision du 14 mai 2019 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande de révision de sa pension militaire d'invalidité.
Par un jugement n° 2001066 du 9 novembre 2021, le tribunal a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 9 mars 2022, M. C..., représenté par Me Thuriot, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement et la décision susmentionnée ;
2°) d'enjoindre à la ministre des armées de procéder au réexamen de sa demande de révision de sa pension militaire d'invalidité, eu égard à l'aggravation de son infirmité ;
3°) de condamner l'État aux entiers dépens.
Il soutient que la ministre a commis une erreur d'appréciation en considérant que l'aggravation de ses infirmités relève d'une cause étrangère non imputable aux blessures et aux maladies constitutives des infirmités pour lesquelles la pension a été accordée.
M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 16 février 2022.
Par une ordonnance du 29 juin 2022 la clôture de l'instruction a été fixée au 19 juillet 2022.
Le ministre des armées a produit après clôture le 19 décembre 2022, ce mémoire n'a pas été communiqué.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Djebiri, première conseillère ;
- et les conclusions de M. Rivière, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., né en 1936, qui a effectué son service militaire en Algérie, est titulaire d'une pension militaire d'invalidité concédée à titre définitif au taux de 45 % par arrêté ministériel du 29 mars 2016 pour deux infirmités correspondant, pour l'une, aux " séquelles de sa fracture de l'avant-bras gauche " en lien avec une blessure reçue en service, au taux de 30 % et, pour l'autre, à des " troubles psychiques de guerre " consécutifs au service lors de la guerre d'Algérie, au taux de 10 % (+5). Par une décision du 14 mai 2019, la ministre des armées a rejeté la demande de M. C..., formée le 1er décembre 2017, tendant à la révision de cette pension pour aggravation de ces infirmités. M. C... demande à la cour l'annulation du jugement du 9 novembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande d'annulation de cette décision.
2. Aux termes de l'article L. 154-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre en vigueur à la date de la demande de révision de la pension : " Le titulaire d'une pension d'invalidité concédée à titre définitif peut en demander la révision en invoquant l'aggravation d'une ou plusieurs des infirmités en raison desquelles cette pension a été accordée. / Cette demande est recevable sans condition de délai. / La pension ayant fait l'objet de la demande est révisée lorsque le pourcentage d'invalidité résultant de l'infirmité ou de l'ensemble des infirmités est reconnu supérieur de 10 p 100 au moins du pourcentage antérieur. / Toutefois, l'aggravation ne peut être prise en considération que si le supplément d'invalidité est exclusivement imputable aux blessures et aux maladies constitutives des infirmités pour lesquelles la pension a été accordée. / La pension définitive révisée est concédée à titre définitif ".
3. Il résulte de ces dispositions que le degré d'infirmité est déterminé au jour du dépôt de la demande de l'intéressé, sans qu'il soit possible de tenir compte d'éléments d'aggravation postérieurs à cette date. L'administration doit dès lors se placer à la date de la demande de pension pour évaluer le degré d'invalidité entraîné par l'infirmité invoquée. Par ailleurs, une pension acquise à titre définitif ne peut être révisée que si le degré d'invalidité résultant de l'infirmité ou de l'ensemble des infirmités est reconnu supérieur de 10 % au moins au pourcentage antérieur.
En ce qui concerne les séquelles de la fracture de l'avant-bras gauche :
4. S'agissant de ces séquelles, il résulte de l'instruction, en particulier de l'expertise médicale réalisée le 7 novembre 2018 par le docteur F..., désigné dans le cadre de la demande révision du taux de la pension militaire d'invalidité, que, hormis l'augmentation des douleurs dont se plaint M. C..., il n'y a pas d'aggravation fonctionnelle objective par rapport à l'expertise du 16 juin 2015 du docteur B..., et notamment que la flexion et l'extension des deux coudes demeurent identiques. Les éléments produits par l'intéressé ne permettent pas de remettre sérieusement en cause ces conclusions, notamment confirmées le 11 janvier 2019 par le médecin chargé des pensions militaires d'invalidité de la sous-direction des pensions du ministère des armées, le 13 février 2019 par la commission consultative médicale et le 9 mai 2019 par la commission de réforme des pensions militaires d'invalidité. Si dans un certificat du 16 janvier 2017 le docteur E..., médecin généraliste, indique que l'intéressé présente des douleurs importantes au niveau de l'avant-bras gauche en recrudescence depuis quelques mois, qui font suite à sa blessure de guerre et entraînent une consommation accrue d'antalgiques, il ne caractérise aucune aggravation de ses séquelles. Ne permettent pas davantage d'établir une telle aggravation la radiographie du coude, de l'avant-bras et du poignet gauches, qui conclut à un " aspect radiologique superposable ", le certificat du 26 juin 2020, postérieur à la demande de révision, du docteur D..., chirurgien orthopédiste, qui mentionne que l'intéressé présente des douleurs au niveau du coude et de l'avant-bras gauches et qu'il a été hospitalisé dans son service en urgence le 20 avril 2020 dans les suite d'une chute et qu'il présentait une fracture complexe de l'humérus gauche, fermée, sans troubles neuro-vasculaires, et un autre certificat du docteur E... du 8 octobre 2020, également postérieur à la demande de révision, qui précise que la douleur séquellaire est permanente et beaucoup plus intense. Sur ce point, la demande de M. C... ne peut donc qu'être rejetée.
En ce qui concerne le syndrome post traumatique :
5. M. C... soutient que ses prescriptions médicamenteuses sont liées aux séquelles qu'il a subies depuis de très longues années et aux cauchemars qu'il continue de subir en se remémorant son chauffeur tué sur le coup alors qu'il était responsable d'un véhicule blindé. Il résulte toutefois de l'instruction, et notamment des conclusions des experts des 16 juin 2015 et 7 novembre 2018, que M. C... souffre d'une pathologie post-traumatique au long cours et que si, comme l'a relevé la commission consultative médicale dans son avis du 13 février 2019, les manifestations invalidantes de sa pathologie post-traumatique se sont aggravées, cette aggravation n'est pas liée exclusivement à la pathologie pour laquelle une pension lui a été initialement accordée mais également à la survenance d'un grave évènement familial de la sphère privée. Dans ces conditions, et en l'absence d'éléments déterminants permettant de remettre en cause cette absence d'exclusivité, la demande présentée sur ce point par M. C... ne saurait davantage recevoir satisfaction.
6 Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision ministérielle du 14 mai 2019. Sa requête doit, dans l'ensemble de ses conclusions, être rejetée.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre des armées.
Délibéré après l'audience du 5 janvier 2023 à laquelle siégeaient :
M. Picard, président de chambre ;
M. Seillet, président assesseur ;
Mme Djebiri, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 janvier 2023.
La rapporteure,
C. DjebiriLe président,
V.-M. Picard
La greffière,
A. Le Colleter
La République mande et ordonne au ministre des armées, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
N° 22LY00733 2
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