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Conseil d'État, 7ème SSJS, 10/07/2015, 383373, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Mme B...A...a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler la décision du 21 juin 2010 par laquelle la caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL) a rejeté sa demande de départ à la retraite anticipée en qualité de fonctionnaire ayant plus de quinze ans de service et de mère de trois enfants, et à ce qu'il soit enjoint à la CNRACL de réexaminer sa demande en la faisant bénéficier de la jouissance immédiate à la retraite en application des dispositions de l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite. Par un jugement n° 1008117 du 25 février 2014, le tribunal administratif de Versailles a rejeté la demande de MmeA.... Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 4 août, 3 novembre 2014 et 24 juin 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme A...demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à ses conclusions de première instance ; 3°) de mettre à la charge de la CNRACL le versement de la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ; - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - la loi n° 2004-1485 du 30 décembre 2004 ; - la loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 ; - le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Charline Nicolas, auditeur, - les conclusions de M. Bertrand Dacosta, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Tiffreau, Marlange, de la Burgade, avocat de Mme A...et à la SCP Odent, Poulet, avocat de la caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales ;1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond, que, le 24 février 2010, MmeA..., fonctionnaire territoriale, a sollicité un départ anticipé à la retraite avec jouissance immédiate du droit de pension, sur le fondement de l'article 25 du décret du 26 décembre 2003 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales ; que, par une décision du 21 juin 2010, le directeur général de la caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales a rejeté sa demande, au motif que l'intéressée, mère de trois enfants, ne remplissait pas les conditions requises par ce texte faute d'avoir interrompu son activité, ni au moment de l'arrivée au foyer des deux enfants de son conjoint, ni postérieurement à la date à laquelle elle les a adoptés ; que Mme A...se pourvoit en cassation contre le jugement du 25 février 2014 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté ses conclusions dirigées contre cette décision ; 2. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article 25 du décret du 26 décembre 2003 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales : " Les dispositions du I de l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite s'appliquent aux fonctionnaires territoriaux " ; qu'aux termes du 3° du I de l'article 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite, dans sa rédaction applicable au litige : " I. - La liquidation de la pension intervient : (...) 3° Lorsque le fonctionnaire civil est parent de trois enfants vivants, ou décédés par faits de guerre, ou d'un enfant vivant, âgé de plus d'un an et atteint d'une invalidité égale ou supérieure à 80 %, à condition qu'il ait, pour chaque enfant, interrompu son activité dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. Sont assimilées à l'interruption d'activité mentionnée à l'alinéa précédent les périodes n'ayant pas donné lieu à cotisation obligatoire dans un régime de retraite de base, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. Sont assimilés aux enfants mentionnés au premier alinéa les enfants énumérés au II de l'article L. 18 que l'intéressé a élevés dans les conditions prévues au III dudit article " ; qu'en vertu des I et II de l'article R. 37 du même code, applicables au litige, le bénéfice des dispositions précitées du 3° du I de l'article L. 24 est subordonné à une interruption d'activité d'une durée continue au moins égale à deux mois dans le cadre d'un congé pour maternité, d'un congé pour adoption, d'un congé parental, d'un congé de présence parentale, ou d'une disponibilité pour élever un enfant de moins de huit ans ; que l'article R. 13 du même code pose les mêmes conditions d'interruption d'activité pour l'octroi du bénéfice de bonification pour enfant prévu au b de l'article L. 12 du même code ; 3. Considérant, en premier lieu, que le moyen tiré de ce que la condition d'interruption d'activité de deux mois posée à l'article R. 37 du code des pensions civiles et militaires de retraite pour l'octroi du bénéfice en cause et à l'article R. 13 du même code pour l'octroi de la bonification pour enfant prévue à l'article L. 12 du même code méconnaîtrait l'article 157 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne est nouveau en cassation et doit, par suite, être écarté ; 4. Considérant, en deuxième lieu, que si Mme A...soutient avoir présenté devant le tribunal administratif un moyen précisément tiré de ce que la décision litigieuse méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il ressort de ses écritures que ces stipulations étaient simplement évoquées à l'appui des moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 14 de cette convention et de celles de l'article 1er du premier protocole auxquels le tribunal a répondu ; que, par suite, le tribunal n'a, contrairement à ce qui est soutenu, entaché son jugement ni d'erreur de droit ni d'insuffisance de motivation ; 5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 1er du premier protocole à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. (...) " et que, selon l'article 14 de cette convention : " La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente Convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation. " ; que la loi de finances rectificative du 30 décembre 2004 a modifié l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite, en conditionnant l'octroi du bénéfice de départ anticipé avec jouissance immédiate à une condition d'interruption d'activité ; que l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite, en tant qu'il s'applique à des demandes postérieures à l'entrée en vigueur de cette loi, n'a pas d'effet rétroactif et ne saurait dès lors être regardé comme méconnaissant les stipulations précitées de l'article 1er du premier protocole à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que par suite en écartant le moyen que MmeA..., qui sollicitait un départ anticipé avec liquidation à compter du 2 février 2011, date postérieure à l'entrée en vigueur de ces dispositions, tirait de la méconnaissance de ces stipulations, le tribunal administratif n'a commis ni erreur de droit, ni erreur de qualification juridique ; que doit également être écarté, par voie de conséquence, le moyen tiré de l'erreur de droit qu'aurait commise le tribunal administratif en jugeant que l'article L. 24 du même code et les dispositions réglementaires prises pour son application méconnaîtraient les stipulations de l'article 1er du premier protocole à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales combinées avec celles de l'article 14 de la même convention ; 6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le pourvoi de Mme A... doit être rejeté, y compris ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;D E C I D E : -------------- Article 1er : Le pourvoi de Mme A...est rejeté. Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme B...A...et à la caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales.ECLI:FR:CESJS:2015:383373.20150710
Conseil d'Etat
CAA de DOUAI, 2e chambre - formation à 3, 22/09/2015, 14DA01528, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme A...C...a demandé au tribunal administratif de Lille de condamner l'Etat, d'une part, à lui rembourser des dépenses de prescriptions médicales et des frais de cure et, d'autre part, à lui verser une somme de 171 300 euros, augmentée des intérêts légaux, en réparation des souffrances physiques et morales, du préjudice esthétique, des troubles dans les conditions d'existence et du préjudice économique résultant de l'accident de service dont elle a été victime le 26 juin 1981. Par un jugement n° 0706052 du 7 juillet 2011, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Par un arrêt n° 11DA01514 du 4 avril 2013, la cour administrative d'appel de Douai a rejeté la requête tendant à l'annulation de ce jugement. Par une décision n° 370725 du 27 août 2014, le Conseil d'Etat a annulé l'arrêt de la cour administrative d'appel de Douai en tant qu'il statuait sur les souffrances physiques subies par Mme C...et a renvoyé, dans cette mesure, l'affaire devant cette cour. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés le 18 mars 2015 et le 28 août 2015, Mme C..., représentée par Me B..., demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement n° 0706052 du tribunal administratif de Lille ; 2°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 171 300 euros augmentée des intérêts légaux en réparation de l'ensemble des préjudices subis suite à l'accident de service dont elle a été victime le 26 juin 1981 ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. ---------------------------------------------------------------------------------------------------------- Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - le code de justice administrative ; Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Lavail Dellaporta, président-assesseur, - et les conclusions de M. Guyau, rapporteur public. 1. Considérant que Mme C...a été victime le 26 juin 1981 d'un grave accident de la circulation reconnu comme imputable au service ; que par un arrêt devenu définitif du 4 novembre 1986, la cour d'appel de Douai a condamné le tiers responsable, d'une part, à verser à l'Etat la somme de 1 792 325,26 francs correspondant à la créance de ce dernier au titre des diverses prestations et pensions d'invalidité servies à son agent et, d'autre part, à verser à Mme C...une somme de 170 829,70 francs dont 100 000 francs au titre des souffrances endurées ; qu'à la suite de l'aggravation de certains de ses préjudices et après que sa demande ait été rejetée par l'administration, Mme C...a saisi le tribunal administratif de Lille d'une demande tendant notamment à la condamnation de l'Etat à lui verser une somme totale de 171 300 euros au titre de la réparation du préjudice économique ainsi que de l'aggravation des souffrances physiques et morales, du préjudice esthétique et des troubles dans les conditions d'existence ; que par un arrêt rendu le 4 avril 2013, la cour administrative d'appel de Douai a confirmé le jugement du 7 juillet 2011 par lequel le tribunal administratif de Lille avait rejeté la demande de l'intéressée ; que par une décision du 27 août 2014, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a annulé cet arrêt en tant seulement qu'il statuait sur les souffrances physiques subies par Mme C...au motif que la cour avait inexactement qualifié les faits de l'espèce en jugeant que les traumatismes secondaires consécutifs aux deux chutes de janvier et de décembre 2005 ne présentaient pas un lien direct et certain avec l'accident de trajet de 1981 et a renvoyé, dans cette mesure, l'affaire à la cour ; Sur les conclusions indemnitaires : 2. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit au point 1 que l'arrêt du 4 avril 2013 rendu par la cour administrative d'appel de Douai est devenu définitif en tant qu'il rejetait la demande de la requérante portant sur l'indemnisation de l'aggravation de ses préjudices économiques, esthétiques, moraux ainsi que de ses troubles dans les conditions d'existence ; que, par suite, Mme C...n'est pas fondée à réclamer à nouveau l'indemnisation des mêmes préjudices à l'occasion du renvoi partiel de cette affaire devant la juridiction ; 3. Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport du médecin expert agréé du 30 juin 2005 et du certificat médical du médecin généraliste qui a examiné la requérante le 21 août 2006, d'une part, que les chutes dont a été victime Mme C...le 31 janvier 2005 et le 11 décembre 2005 résultent de malaises liés aux séquelles de la triple fracture de l'axis dont elle a été victime lors de son accident de trajet et, d'autre part, que les complications des fractures subies lors de ces chutes sont liées à une ostéoporose très évoluée, résultant des nombreux traitements médicamenteux administrés depuis l'accident ; que, par suite, le ministre des finances et des comptes publics n'est pas fondé à soutenir que les traumatismes secondaires consécutifs aux chutes précitées ne présenteraient pas un lien direct et certain avec l'accident de trajet survenu en 1981 ; 4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que les traumatismes secondaires provoqués par les deux chutes du 31 janvier 2005 et du 11 décembre 2005 ont consisté en une fracture de l'extrémité supérieure de l'humérus gauche et de deux côtes ; que, dans les circonstances de l'espèce, il sera fait une juste appréciation des souffrances physiques endurées par la requérante en lui allouant une somme de 5 000 euros majorée des intérêts au taux légal à compter du 1er décembre 2005, date de réception par l'administration de sa demande indemnitaire ; 5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme C... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la réparation de l'aggravation de son préjudice physique ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de Mme C...tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; DÉCIDE : Article 1er : L'Etat versera à Mme C...une somme de 5 000 euros majorée des intérêts légaux à compter du 1er décembre 2005. Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme C...est rejeté. Article 3 : Le jugement du 7 juillet 2011 du tribunal administratif de Lille est réformé en ce qu'il est contraire au présent arrêt. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...C...et au ministre des finances et des comptes publics. '' '' '' '' 3 N°14DA01528
Cours administrative d'appel
Douai
Conseil d'État, 2ème SSJS, 22/07/2015, 390808, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : M. B...A..., à l'appui de sa demande contestant le rejet opposé le 18 décembre 2012 à sa demande de révision pour aggravation de la pension militaire d'invalidité dont il est titulaire, a produit un mémoire, enregistré le 5 mars 2015 au greffe du tribunal des pensions de Paris, en application de l'article 23-1 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, par lequel il soulève une question prioritaire de constitutionnalité. Par un jugement n° 15/00005 du 29 mai 2015, enregistré le 8 juin 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le tribunal des pensions de Paris, avant qu'il soit statué sur la requête de M.A..., a décidé, par application des dispositions de l'article 23-2 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, de transmettre au Conseil d'Etat la question de la conformité de l'article L. 29 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre aux droits et libertés garantis par la Constitution. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la Constitution, notamment son article 61-1 ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ; - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Camille Pascal, conseiller d'Etat, - les conclusions de M. Xavier Domino, rapporteur public ; 1. Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 23-4 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel que, lorsqu'une juridiction relevant du Conseil d'Etat a transmis à ce dernier, en application de l'article 23-2 de cette même ordonnance, la question de la conformité à la Constitution d'une disposition législative, le Conseil constitutionnel est saisi de cette question de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux ; 2. Considérant qu'aux termes du 3ème alinéa de l'article L. 29 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre : " La pension ayant fait l'objet de la demande est révisée lorsque le degré d'invalidité résultant de l'infirmité ou de l'ensemble des infirmités est reconnu supérieur de 10 % au moins du pourcentage antérieur " ; 3. Considérant que, pour demander au Conseil d'Etat de renvoyer au Conseil constitutionnel la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution de ces dispositions de l'article L. 29, M. A...soutient qu'en ce qu'elles ne permettent la révision de la pension que lorsque l'aggravation est supérieure à 10 % au moins du pourcentage d'invalidité antérieur, elles méconnaissent, d'une part, le principe de responsabilité et le droit à la réparation intégrale du préjudice qui découle de l'article 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, d'autre part, le principe d'égalité résultant des articles 1er et 6 de la Déclaration ; 4. Considérant, en premier lieu, ainsi que le Conseil constitutionnel l'a jugé, que s'il résulte de l'article 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen qu'en principe tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer, le législateur peut toutefois, pour un motif d'intérêt général, apporter à ce principe des exclusions ou des limitations, à condition qu'il n'en résulte pas une atteinte disproportionnée aux droits des victimes d'actes fautifs ; que l'objectif d'intérêt général qui s'attache au droit à réparation due aux militaires, aux victimes de la guerre et aux victimes d'actes de terrorisme ainsi qu'à leurs ayants droit institué par le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre est de nature à justifier l'absence de prise en considération, en dessous d'un seuil défini par le législateur, de certaines aggravations des infirmités ou maladies pensionnées ; 5. Considérant, en second lieu, que le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit ; que la seule circonstance que, dans le régime des pensions militaires d'invalidité qui est propre aux militaires, aux victimes civiles de la guerre et aux victimes d'actes de terrorisme, il existe un seuil d'aggravation en deçà duquel la demande d'aggravation ne peut être accueillie ne suffit pas, au regard de l'objet de la loi, à caractériser une atteinte au principe d'égalité ; 6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la question soulevée, qui n'est pas nouvelle, ne présente pas un caractère sérieux ; qu'il n'y a, par suite, pas lieu de la renvoyer au Conseil constitutionnel ;D E C I D E : -------------- Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité transmise par le tribunal des pensions de Paris. Article 2 : La présente décision sera notifiée à M.A..., au ministre de la défense et au tribunal des pensions de Paris. Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel et au Premier ministre.ECLI:FR:CESJS:2015:390808.20150722
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 7ème SSJS, 10/07/2015, 385806, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision du 13 septembre 2013 par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté sa demande tendant à la révision de sa pension civile de retraite en vue d'y inclure la bonification pour enfants prévue par le b de l'article L. 12 du code des pensions civiles et militaires de retraite. Par une ordonnance n° 1306976 du 19 septembre 2014, le tribunal administratif de Marseille a rejeté cette requête. Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 19 novembre 2014 et 18 février 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler cette ordonnance ; 2°) réglant l'affaire au fond, d'enjoindre au ministre des finances et des comptes publics de revaloriser sa pension de retraite à compter du 14 novembre 1996 pour prendre en compte la bonification mentionnée au b de l'article L. 12 du code des pensions civiles et militaires de retraite, avec intérêt au taux légal entre le 22 juillet 2013 et la date de leur versement, et capitalisation desdits intérêts ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Charline Nicolas, auditeur, - les conclusions de M. Bertrand Dacosta, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Didier, Pinet, avocat de M. B...;1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. B...a obtenu la concession d'une pension civile de retraite par un arrêté du 28 octobre 1996, notifié le 14 novembre 1996 ; qu'il a sollicité la révision de sa pension le 22 juillet 2013 ; que par l'ordonnance attaquée du 19 septembre 2014, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de M. B...tendant à l'annulation du refus du ministre de l'intérieur de faire droit à sa demande de révision ; 2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " ... les présidents des formations de jugement peuvent, par ordonnance : (...) 6° Statuer sur les requêtes relevant d'une série, qui, sans appeler de nouvelle appréciation ou qualification de faits, présentent à juger en droit, pour la juridiction saisie, des questions identiques à celles qu'elle a déjà tranchées ensemble par une même décision passée en force de chose jugée (...) " ; 3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 55 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " La pension et la rente viagère d'invalidité sont définitivement acquises et ne peuvent être révisées à l'initiative de l'administration ou sur demande de l'intéressé que dans les conditions suivantes : / A tout moment en cas d'erreur matérielle ; / Dans un délai d'un an à compter de la notification de la décision de concession initiale de la pension ou de la rente viagère, en cas d'erreur de droit. " ; 4. Considérant qu'en rappelant, selon les termes de la décision rendue par le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, le 10 août 2005 sous le n° 266936, conformément aux dispositions de l'article R. 222-1 cité ci-dessus, que les dispositions précitées de l'article L. 55, en vertu desquelles le requérant dispose, en cas d'erreur de droit, d'un délai d'un an pour solliciter une révision de cette pension, avaient pour seul objet de provoquer la révision par l'administration d'une pension concédée et non de prolonger le délai de recours contentieux direct contre l'arrêté de concession, pour écarter le moyen tiré de ce que la notification de la concession de pension était irrégulière, le tribunal a fait une exacte appréciation des écritures du requérant, a suffisamment motivé sa décision et n'a commis aucune erreur de droit, dès lors que le recours du requérant portait sur le refus de révision de la pension, et non sur le titre de pension ; que, par suite, le pourvoi de M. B...doit être rejeté ;D E C I D E : -------------- Article 1er : Le pourvoi de M. B...est rejeté. Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. A...B..., au ministre de l'intérieur et au ministre des finances et des comptes publics.ECLI:FR:CESJS:2015:385806.20150710
Conseil d'Etat
CAA de MARSEILLE, 8ème chambre - formation à 3, 16/06/2015, 14MA00646, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme H...B...a demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner le centre hospitalier du pays d'Aix au versement d'une somme de 262 383 euros en réparation des préjudices qu'elle a subis du fait de sa maladie qu'elle estime imputable au service et de mettre à la charge de celui-ci le paiement d'une somme de 8 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n° 1103483 du 2 décembre 2013, le tribunal administratif de Marseille a mis hors de cause la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône et rejeté la requête de MmeB.... Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 10 février 2014, MmeB..., représentée par Me G... I...demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement précité rendu le 2 décembre 2013 par le tribunal administratif de Marseille ; 2°) de condamner le centre hospitalier du pays d'Aix à lui verser une somme globale de 262 383 euros au titre des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait de sa maladie ; 3°) de mettre à la charge du centre hospitalier du pays d'Aix le paiement d'une somme de 8 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient : - que le centre hospitalier a commis plusieurs fautes ; qu'elle a manipulé des produits dangereux dans des locaux inadaptés et avec des équipements de protection insuffisants ; que le personnel d'encadrement, la formation et les consignes de sécurité étaient insuffisants ; que le centre hospitalier ne pouvait ignorer les risques qu'elle encourrait et n'a pas eu de réponse adaptée auxdits risques ; - qu'il existe un lien de causalité entre l'exercice de son activité professionnelle et sa maladie ; - que doivent être réparés même sans faute les souffrances physiques et morales, les préjudices esthétique et d'agrément ; que l'incapacité temporaire et l'incapacité permanente ne sont pas indemnisées par la réparation forfaitaire ; - que doivent être indemnisés le déficit fonctionnel temporaire, l'incapacité permanente partielle, les souffrances endurées, les souffrances morales, le préjudice d'agrément ainsi que le préjudice financier professionnel. Par une ordonnance du 3 février 2015, la clôture d'instruction a été fixée au 7 mars 2015. Par un mémoire en défense, enregistré le 9 février 2015 par télécopie et le 11 février 2015 par courrier, le centre hospitalier intercommunal Aix-Pertuis venant aux droits du centre hospitalier du pays d'Aix, représenté par Me C...D..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de Mme B...le paiement d'une somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que les moyens de la requête sont infondés. Par une ordonnance en date du 25 mars 2015 l'instruction a été rouverte. Par lettres en date des 25 mars 2015 et 15 avril 2015, la Cour a adressé une mesure d'instruction à MmeB.... Par mémoires enregistrés les 15 avril 2015 et 23 avril 2015, Mme B...a produit des pièces. Vu : - les autres pièces du dossier ; Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ; - le code de la sécurité sociale ; - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - le code de justice administrative. Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme J..., - les conclusions de Mme Massé-Degois, rapporteur public, - et les observations de Me I... représentant Mme B.... 1. Considérant que Mme B...a été recrutée le 2 mai 1989 par le centre hospitalier du pays d'Aix aux droits duquel vient le centre hospitalier intercommunal Aix-Pertuis et a été titularisée en qualité de préparatrice en pharmacie un an plus tard ; qu'elle a exercé ses fonctions au sein de la "salle blanche" et était chargée, notamment, de la préparation des produits cytostatiques destinés aux chimiothérapies ; qu'à compter de l'année 1998, elle a commencé à souffrir d'une asthénie importante ; qu'en 2001, une maladie de Waldenström a été diagnostiquée ; qu'elle a été placée en congé de longue durée imputable au service du 12 octobre 2001 au 11 octobre 2009 et mise à la retraite pour invalidité par décision du 24 février 2010, à compter du 12 octobre 2009 ; que Mme B...a saisi le tribunal administratif de Marseille d'une requête tendant à la réparation intégrale des préjudices qu'elle estimait avoir subis du fait de sa maladie ; que, par un jugement en date du 2 décembre 2013, le tribunal administratif de Marseille, après avoir jugé que la maladie de Mme B...ne pouvait être regardée comme étant imputable au service, a rejeté sa requête ; que Mme B...interjette appel dudit jugement ; Sur l'imputabilité au service : 2. Considérant qu'aux termes de l'article 41 de la loi susvisée du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 4° A un congé de longue durée, en cas de tuberculose, maladie mentale, affection cancéreuse, poliomyélite ou déficit immunitaire grave et acquis, de trois ans à plein traitement et de deux ans à demi-traitement. Le fonctionnaire conserve ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. / Si la maladie ouvrant droit à congé de longue durée a été contractée dans l'exercice des fonctions, les périodes fixées ci-dessus sont respectivement portées à cinq ans et trois ans (...) " ; 3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la commission de réforme, appelée à se prononcer sur la situation de Mme B...a, après avoir entendu le médecin du travail, estimé, par avis en date des 28 avril 2004 et 11 janvier 2005, que la maladie de l'intéressée était imputable à l'exercice de son activité professionnelle ; que, d'ailleurs, le centre hospitalier du pays d'Aix, lui-même, avait reconnu cette imputabilité et accordé à Mme B...un congé de longue durée pour maladie imputable au service, rémunéré à plein traitement pendant 5 ans et à demi-traitement pendant 3 ans ; que ledit centre hospitalier ne contestait d'ailleurs pas, en première instance, l'imputabilité au service de la maladie de la requérante ; que, par ailleurs, si le docteur A...a, dans le cadre des différentes prolongations du congé de maladie accordées à l'intéressée, après avoir indiqué que Mme B...avait été exposée, de manière durable, à des produits toxiques dans le cadre de son activité professionnelle, estimé qu'il n'existait pas de relation directe et certaine même si celle-ci était possible, il a, d'une part, ajouté que la rareté de cette maladie pouvait expliquer l'impossibilité de corrélation statistique, et, d'autre part, fixé, le 23 octobre 2008, le taux d'IPP de Mme B..." consécutif à sa maladie reconnue, contractée et imputable au service " ; que, par ailleurs, il ressort du rapport d'expertise établi par le docteur Viallat le 5 février 2004 que l'exposition prolongée, d'une part, aux produits cytostatiques et, d'autre part, aux aldéhydes formiques utilisés pour désinfecter la salle blanche, considérés comme potentiellement cancérogènes, " constitue un faisceau d'arguments suffisants pour considérer que la maladie de Waldenström contractée par la patiente l'a été en service de façon directe " ; que ledit médecin a conclu que " si on admet que la maladie de Waldeström a été induite par la profession de MmeF..., il est évidemment impensable qu'elle puisse reprendre le même type d'exposition " ; qu'enfin, il résulte du rapport établi par le docteur Salze le 8 juin 2009 que la case " oui " pour " infirmité imputable " a été cochée ; que ledit médecin a, par ailleurs, rempli la page 5 du formulaire AF3, laquelle ne doit être remplie que si l'agent a eu " un accident de service " ; 4. Considérant qu'il résulte des rapports d'expertise concordants susmentionnés, de l'exposition avérée et prolongée de la requérante à des substances cancérogènes, de l'absence de manifestation antérieure de la maladie, et de la décision même du centre hospitalier d'accorder à Mme B...un congé de longue durée imputable au service, qu'en dépit des considérations du docteurA..., la maladie de la requérante doit, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, être regardée comme étant en lien direct et certain avec son activité professionnelle ; Sur la responsabilité du centre hospitalier intimé : 5. Considérant, d'une part, qu'en vertu des articles L. 27 et L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite, les fonctionnaires civils de l'Etat qui se trouvent dans l'incapacité permanente de continuer leurs fonctions en raison d'infirmités résultant de blessures ou de maladies contractées ou aggravées en service peuvent être radiés des cadres par anticipation et ont droit au versement d'une rente viagère d'invalidité cumulable avec la pension rémunérant les services ; que les articles 30 et 31 du décret du 9 septembre 1965 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales, puis les articles 36 et 37 du décret du 26 décembre 2003 ayant le même objet, ont prévu des règles comparables au profit des fonctionnaires soumis à la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ; 6. Considérant, d'autre part, que l'article 80 de la loi du 9 janvier 1986 impose aux établissements de santé d'allouer aux fonctionnaires atteints d'une invalidité résultant d'un accident de service entraînant une incapacité permanente d'au moins 10% ou d'une maladie professionnelle une allocation temporaire d'invalidité cumulable avec leur traitement et versée à compter de la date de reprise des fonctions ; que l'article 4 du décret du 24 décembre 1963 relatif à l'attribution de l'allocation temporaire d'invalidité aux agents permanents des collectivités locales et de leurs établissements publics, puis l'article 4 du décret du 2 mai 2005 relatif à l'attribution de l'allocation temporaire d'invalidité aux fonctionnaires relevant de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière, ont prévu que le montant de l'allocation est fixé à la fraction du traitement brut afférent à l'indice 100 correspondant au taux d'invalidité ; 7. Considérant que, compte tenu des conditions posées à leur octroi et de leur mode de calcul, la rente viagère d'invalidité et l'allocation temporaire d'invalidité doivent être regardées comme ayant pour objet de réparer les pertes de revenus et l'incidence professionnelle résultant de l'incapacité physique causée par un accident de service ou une maladie professionnelle ; que les dispositions, rappelées ci-dessus, qui instituent ces prestations, déterminent forfaitairement la réparation à laquelle les fonctionnaires concernés peuvent prétendre, au titre de ces chefs de préjudice, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions ; que ces dispositions ne font en revanche obstacle ni à ce que le fonctionnaire qui subit, du fait de l'invalidité ou de la maladie, des préjudices patrimoniaux d'une autre nature ou des préjudices personnels, obtienne de la personne publique qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice, ni à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre la personne publique, dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette personne ; 8. Considérant que MmeB..., estimant que le centre hospitalier du pays d'Aix a commis à son égard plusieurs fautes, demande la réparation intégrale de l'ensemble du dommage qu'elle estime avoir subi ; 9. Considérant qu'il n'est pas contesté par le centre hospitalier intimé qu'avant 1998, année au cours de laquelle Mme B...a présenté les premiers signes de la maladie de Waldenström, les agents travaillant en salle blanche ne disposaient ni de masques ou de lunettes de protection ni de seringues à verrou, ce qui était de nature à favoriser les inhalations ou projections de produits toxiques et que, par ailleurs, des gants leur étaient certes fournis mais en quantité insuffisante ; qu'en outre, il n'est également pas contesté et ressort au demeurant d'une note établie par le secrétaire du comité d'hygiène et de sécurité que, jusqu'en octobre 1998, mois au cours duquel les préparateurs en pharmacie ont pu poursuivre leur activité dans une nouvelle zone à atmosphère contrôlée de 80 m², laquelle a d'ailleurs, jusqu'en mai 2002, révélé de nombreuses malfaçons qui ont engendré plusieurs accidents du travail dont celui déclaré par Mme B...le 10 août 1999, les conditions de travail au sein de la salle blanche étaient " des plus rudimentaires " et " la sécurité des plus précaires " voire inexistante ; que, de 1992 à 1994, les agents ont, d'ailleurs, été amenés à travailler dans la salle d'hématologie qui n'avait nullement été conçue pour l'exercice de l'activité professionnelle de la requérante ; que, par ailleurs, par lettre en date du 15 septembre 1994, l'attention du directeur du centre hospitalier a été attirée par le personnel de la salle blanche à la suite d'une visite conduite en présence d'un représentant de l'APAVE, organisme spécialisé dans la maîtrise des risques, sur les dysfonctionnements des hottes et, par suite, sur les difficultés d'évacuation du formol utilisé pour la désinfection de la salle ; qu'il ne ressort d'aucune des pièces du dossier que le centre hospitalier intimé aurait alors remédié aux difficultés ainsi signalées ; qu'enfin, si le centre hospitalier du pays d'Aix fait valoir que les préparateurs en pharmacie d'Aix formaient depuis plus de 15 ans leurs collègues d'autres hôpitaux, il n'est pas établi que Mme B...aurait, elle-même, été formée lors de sa prise de fonctions en 1989 ou postérieurement et aurait été alertée, avant le déclenchement de sa maladie, sur les dangers de l'utilisation et de la manipulation, d'une part, des produits cytostatiques destinés aux traitements de chimiothérapie et, d'autre part, du formol ; que le centre hospitalier du pays d'Aix ne pouvait ignorer les risques, dont il résulte des pièces du dossier et notamment de l'expertise réalisée par le Dr A...le 12 février 2003 qu'ils étaient connus, découlant de l'exposition de ses agents à ces substances ; 10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme B...est fondée à soutenir que le centre hospitalier du pays d'Aix a commis une faute de nature à engager sa responsabilité ; que Mme B...peut ainsi prétendre à la réparation intégrale des préjudices subis ; Sur les préjudices subis par MmeB... : En ce qui concerne les préjudices extra-patrimoniaux : Quant aux préjudices temporaires : 11. Considérant que Mme B...a dû effectuer 6 cures de chimiothérapie et a souffert, en outre, d'une neuropathie périphérique très invalidante, d'une grande asthénie et de troubles dépressifs ; qu'il sera fait une juste évaluation du déficit fonctionnel temporaire subi entre le 12 octobre 2001 et la date de consolidation de sa maladie le 12 octobre 2009, que n'a pas eu pour objet de compenser l'allocation temporaire d'invalidité dont aurait bénéficié la requérante, en l'évaluant à la somme de 200 euros par mois, soit 19 200 euros sur la période considérée ; Quant aux préjudices permanents : 12. Considérant, en premier lieu, que l'expert désigné par le tribunal des affaires de sécurité sociales des Bouches-du-Rhône, le docteur Melin, a évalué les souffrances physiques de la requérante, en ce comprises ses souffrances psychiatriques, à 3,5 sur une échelle de 7 ; qu'il sera fait une juste évaluation de ce chef de préjudice en l'évaluant à la somme de 5 000 euros ; 13. Considérant, en deuxième lieu, que du fait de sa maladie, Mme B...a, indépendamment des souffrances psychiatriques précédemment réparées, supporté un préjudice moral qu'il y a lieu d'évaluer à la somme de 5 000 euros ; 14. Considérant, en troisième lieu, que le préjudice d'agrément de l'intéressée, dont il n'est pas contesté qu'elle pratiquait un certain nombre d'activités sportives et ne peut plus rendre visite à sa fille qui réside à l'étranger, peut être évalué à la somme de 2 000 euros ; 15. Considérant, en dernier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que l'incapacité permanente partielle totale dont reste atteinte Mme B...au titre de la maladie de Waldenström et des conséquences de celle-ci, dont une dépression réactionnelle, est de 31,60% ; qu'il sera fait, étant donné de l'âge de la requérante au moment de la consolidation de sa maladie, une juste appréciation de ce poste de préjudice en l'évaluant à la somme de 45 000 euros ; En ce qui concerne les préjudices patrimoniaux professionnels : 16. Considérant qu'aux termes de l'article L.28 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " Le fonctionnaire civil radié des cadres dans les conditions prévues à l'article L. 27 a droit à une rente viagère d'invalidité cumulable, selon les modalités définies à l'article L. 30 ter, avec la pension rémunérant les services (...) / Le montant de la rente d'invalidité est fixé à la fraction du traitement ou de la solde de base définis à l'article L. 15 égale au pourcentage d'invalidité. Si le montant de ce traitement ou de cette solde de base dépasse un montant correspondant à la valeur de l'indice majoré 681 au 1er janvier 2004, revalorisé dans les conditions prévues à l'article L. 341-6 du code de la sécurité sociale, la fraction dépassant cette limite n'est comptée que pour le tiers. Toutefois, il n'est pas tenu compte de la fraction excédant dix fois ce montant brut. / Le taux d'invalidité est déterminé compte tenu d'un barème indicatif fixé par décret. / La rente d'invalidité est liquidée, concédée, payée et revalorisée dans les mêmes conditions que la pension prévue à l'article L. 27 (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 15 dudit code : " I.-Aux fins de liquidation de la pension, le montant de celle-ci est calculé en multipliant le pourcentage de liquidation tel qu'il résulte de l'application de l'article L. 13 par le traitement ou la solde soumis à retenue afférents à l'indice correspondant à l'emploi, grade, classe et échelon effectivement détenus depuis six mois au moins par le fonctionnaire ou militaire au moment de la cessation des services valables pour la retraite ou, à défaut, par le traitement ou la solde soumis à retenue afférents à l'emploi, grade, classe et échelon antérieurement occupés d'une manière effective, sauf s'il y a eu rétrogradation par mesure disciplinaire. / La condition des six mois ne sera pas opposée en cas de décès ou bien lorsque l'agent n'est plus en service par suite, dans l'un et l'autre cas, d'un accident survenu en service ou à l'occasion du service. / Le traitement ou la solde des personnels qui accomplissent des services à temps partiel prévus à l'avant-dernier alinéa de l'article L. 5 sont ceux auxquels les intéressés pourraient prétendre s'ils accomplissaient des services à plein temps (...) " ; 17. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que par une décision en date du 24 mars 2010, la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL) a refusé d'attribuer à Mme B...une rente viagère d'invalidité ; que Mme B...a contesté ce refus ; que, par un jugement en date du 2 décembre 2013, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa requête ; que Mme B...a, toutefois, interjeté appel dudit jugement et demandé qu'il soit enjoint à la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales de lui allouer une rente viagère d'invalidité à compter de l'entrée en jouissance de sa pension ; que, par arrêt de la Cour en date du 5 juin 2015, le dossier de la demande de Mme B...a été transmis au Conseil d'Etat ; que le droit à indemnisation de Mme B...au titre des pertes de traitements et de primes ainsi que de la perte de chance d'une évolution professionnelle est conditionné, tant dans son principe que, le cas échéant, dans son montant, par le sort qui sera réservé à sa demande de rente viagère d'invalidité ; que, par suite, le droit à réparation des postes de préjudices patrimoniaux professionnels dont Mme B...fait état n'est, à ce jour, pas certain et ne peut ouvrir droit à indemnisation ; 18. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté ses conclusions indemnitaires ; qu'il y a lieu, par suite, d'annuler ledit jugement et de condamner le centre hospitalier intercommunal Aix-Pertuis venant aux droits et obligations du centre hospitalier du pays d'Aix à verser à Mme B...la somme globale de 76 200 euros ; Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 19. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ; 20. Considérant que les dispositions précitées font obstacle à ce que Mme B...qui n'est pas la partie perdante, soit condamnée à verser au centre hospitalier intercommunal Aix-Pertuis la somme qu'il demande ; qu'il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du centre hospitalier intercommunal Aix-Pertuis le paiement d'une somme de 2 000 euros qui sera versée à Mme B...en application desdites dispositions ; DECIDE : Article 1er : Le jugement n° 1103483 rendu le 2 décembre 2013 par le tribunal administratif de Marseille est annulé. Article 2 : Le centre hospitalier intercommunal Aix-Pertuis venant aux droits et obligations du centre hospitalier du pays d'Aix est condamné à verser à Mme B...la somme de 76 200 euros (soixante seize mille deux cents euros). Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté. Article 4 : Le centre hospitalier intercommunal Aix-Pertuis versera à Mme B...la somme de 2 000 euros (deux mille euros) en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 5 : Les conclusions présentées par le centre hospitalier intercommunal Aix-Pertuis en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme H...B..., au centre hospitalier intercommunal Aix-Pertuis et à la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône. Délibéré après l'audience du 12 mai 2015, à laquelle siégeaient : - M. Renouf, président, président assesseur, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, - M. E...et Mme J..., premiers conseillers. Lu en audience publique, le 16 juin 2015. '' '' '' '' N° 14MA006462
Cours administrative d'appel
Marseille
CAA de MARSEILLE, 9ème chambre - formation à 3, 26/06/2015, 13MA02540, Inédit au recueil Lebon
Vu la décision du 14 mai 2013 par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Marseille a admis Mme B...au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ; Vu la requête, enregistrée le 24 juin 2013 sur télécopie confirmée le lendemain, présentée pour Mme C...B..., demeurant ... par la SCP d'avocats Becque, Monestier, Dahan, Pons-Serradeil ; Mme B...demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement n° 1201113 rendu le 15 février 2013 par le tribunal administratif de Montpellier, qui a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Saint-Estève à lui payer la somme de 35 000 euros en réparation des conséquences d'un accident dont elle a été victime le 24 septembre 2009 ; 2°) de condamner la commune de Saint-Estève à lui verser la somme totale de 35 000 euros en réparation des préjudices consécutifs à cet accident ; 3°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Estève le remboursement de la somme de 135 euros qu'elle a réglée au titre des frais d'expertise et de la somme de 1 500 euros qu'elle a réglée au titre des frais d'avocat, ainsi que le paiement de la somme de 1 196 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative à verser à son avocat, qui renonce dans ce cas à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle ; Elle soutient que : - le jugement est irrégulier au regard de l'article R. 741-7 du code de justice administrative, dès lors qu'il n'est pas signé ; - l'accident dont elle a été victime le 24 septembre 2009 est imputable à une faute de la commune, en raison de l'état de la chaussée qui menait de l'entrée de la mairie à la seule place réservée aux personnes handicapées existant alors et dont l'entretien relevait de la commune ; cet état excédait les sujétions auxquelles doivent s'attendre les usagers normalement attentifs, ainsi que l'attestent les documents produits ; le défaut d'entretien est d'autant plus caractérisé qu'il méconnaît les textes - décret n° 2006-1658 et arrêté du 15 janvier 2007- relatifs à l'accessibilité des voiries pour les personnes handicapées, ainsi que l'article 6 sexies de la loi n° 83-634 relatif aux obligations pesant sur les employeurs de travailleurs handicapés ; la commune n'a pas pris les mesures appropriées pour lui permettre d'accéder en toute sécurité sur son lieu de travail ainsi qu'elle l'a d'ailleurs implicitement reconnu en prenant des mesures depuis pour lui éviter d'emprunter la chaussée à l'origine de son accident ; - sa connaissance des lieux n'exonère pas la commune de sa responsabilité ; elle n'a commis aucune faute d'inattention, et même, en l'admettant, une telle faute ne serait pas de nature à exonérer totalement la commune de sa responsabilité ; - le préjudice subi est exclusivement imputable à la chute dont elle a été victime en raison de l'état de la chaussée, son état antérieur n'ayant d'incidence que sur son rétablissement et non sur les lésions qui lui ont été causées ; - le rapport d'expertise souffre de nombreuses incohérences, ainsi qu'elle l'a indiqué dans les observations présentées au greffe du tribunal, et la réalité des préjudices subis comme la jurisprudence applicable en la matière conduit à fixer les indemnités de la manière suivante : 1 500 euros au titre de l'incapacité temporaire partielle, 7 000 euros au titre du pretium doloris, 5 000 euros au titre des troubles dans les conditions d'existence, 20 000 euros au titre de l'incapacité permanente partielle et 1 500 euros au titre du préjudice esthétique ; Vu le jugement attaqué ; Vu, enregistrées le 22 juillet 2013, les observations présentées par la caisse primaire d'assurance maladie des Pyrénées-Orientales et la demande de régularisation du 30 avril 2015, notifiée le 4 mai 2015, invitant ladite caisse à régulariser son mémoire en le faisant présenter par un avocat ; Vu le mémoire en défense, enregistré le 1er octobre 2013, présenté pour la commune de Saint-Estève, représentée par son maire en exercice, par la SCP d'avocats Sylvain Donnève ; la commune de Saint-Estève conclut : 1°) à titre principal, au rejet de la requête ; 2°) en tout état de cause, à ce que l'indemnisation soit limitée à la somme de 150 euros au titre du préjudice d'agrément ; 3°) à titre subsidiaire, à ce que la réparation au titre de l'incapacité temporaire partielle soit limitée à hauteur de 20 %, et celle au titre de l'incapacité permanente partielle à 3 % ; 4°) en toute hypothèse, à ce que les frais d'expertise et d'avocat engagés par Mme B... restent à sa charge et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à sa charge au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; Elle fait valoir que : - le jugement n'est pas irrégulier ; - le trottoir sur lequel Mme B...a chuté ne présentait que des défauts mineurs provoqués par les racines des platanes plantés devant l'entrée de la mairie ; l'intéressée pouvait accéder à son lieu de travail sans difficulté particulière ; en tout état de cause, les défauts ne pouvaient être supprimés qu'en procédant au déracinement des platanes et à la réfection totale de la chaussée, travaux occasionnant non seulement des charges disproportionnées, que les employeurs n'ont pas à prendre en charge au titre de l'article 6 sexies invoqué par la requérante, mais également des perturbations longues dans l'accès à la mairie pour les personnes handicapées ; les procès-verbaux fournis par la requérante ne permettent pas d'établir l'état défectueux du revêtement au jour de la chute, dont le lieu exact n'est pas précisé ; en l'absence de faute de la commune, seuls les préjudices consécutifs au pretium doloris, au préjudice esthétique et d'agrément sont susceptibles de faire l'objet d'une réparation de la part de la commune ; - la chute de la requérante ne peut avoir été provoquée que par une faute d'inattention de sa part ; - les conclusions du rapport d'expertise établi le 15 septembre 2010 doivent seules être prises en compte, les observations faites par la requérante n'en établissant pas le caractère infondé ; - par suite, la réparation éventuelle des préjudices ne pourra excéder celles proposées dans les conclusions ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ; Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires ; Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ; Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ; Vu le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités ; Vu le décret n° 2006-1658 du 21 décembre 2006 relatif aux prescriptions techniques pour l'accessibilité de la voirie et des espaces publics ; Vu l'arrêté du 15 janvier 2007 portant application du décret n° 2006-1658 du 21 décembre 2006 relatif aux prescriptions techniques pour l'accessibilité de la voirie et des espaces publics ; Vu le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 mai 2015 : - le rapport de Mme Busidan, premier conseiller ; - les conclusions de M. Roux, rapporteur public ; - et les observations de MeA..., pour MmeB... ; 1. Considérant que MmeB..., agent administratif qualifié territorial titulaire à temps non complet, exerçant ses fonctions au sein des services de la commune de Saint-Estève, relève appel du jugement rendu le 15 février 2013 par le tribunal administratif de Montpellier, qui a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Saint-Estève à l'indemniser de l'ensemble des préjudices qu'elle impute à l'accident de service dont elle a été victime le 24 septembre 2009 ; Sur la recevabilité des conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie : 2. Considérant qu'en vertu des dispositions combinées des articles R. 811-7 et R. 431-32 du code de justice administrative, les mémoires en appel doivent être présentés, à peine d'irrecevabilité, par un avocat ou un avocat au Conseil d'Etat ; que les conclusions, présentées par la caisse primaire d'assurance maladie des Pyrénées-Orientales, tendant au remboursement des débours exposés pour MmeB..., n'ont pas été présentées par un avocat, en méconnaissance de ces dispositions ; que, malgré la demande de régularisation du 30 avril 2015, notifiée le 4 mai 2015, qui lui a été présentée par le greffe de la Cour, la caisse n'a pas régularisé ses écritures ; que, dès lors, ses conclusions sont irrecevables et doivent, comme telles, être rejetées ; Sur la régularité du jugement : 3. Considérant qu'il ressort de l'examen de la minute du jugement attaqué qu'elle comporte les signatures des trois personnes désignées par les dispositions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative ; que la circonstance que ces trois signatures ne figurent pas sur l'expédition du jugement notifiée aux parties est sans incidence sur la régularité du jugement, cette expédition ne devant d'ailleurs être signée que du greffier en chef en vertu de l'article R. 751-2 du même code ; Sur le bien- fondé du jugement : 4. Considérant que les dispositions qui instituent, en faveur des fonctionnaires victimes d'accidents de service ou de maladies professionnelles, une rente d'invalidité en cas de mise à la retraite et une allocation temporaire d'invalidité en cas de maintien en activité déterminent forfaitairement la réparation à laquelle les intéressés peuvent prétendre, au titre des conséquences patrimoniales de l'atteinte à l'intégrité physique, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions ; qu'elles ne font, en revanche, obstacle ni à ce que le fonctionnaire qui a enduré, du fait de l'accident ou de la maladie, des dommages ne revêtant pas un caractère patrimonial, tels que des souffrances physiques ou morales, un préjudice esthétique ou d'agrément ou des troubles dans les conditions d'existence, obtienne de la collectivité qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice, ni à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre la collectivité, dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette collectivité ou à l'état d'un ouvrage public dont l'entretien lui incomberait ; 5. Considérant, en premier lieu, que MmeB..., qui souffre de la maladie de Little, pathologie affectant l'autonomie de ses déplacements, et qui a été reconnue travailleur handicapé par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées, fait valoir que l'état de la chaussée, sur laquelle elle a chuté au sortir de son travail en gagnant la seule place de stationnement réservée aux personnes handicapées existant à l'époque et située devant la mairie, présentait un défaut d'entretien, notamment au regard des dispositions du décret susvisé du 21 décembre 2006 relatif aux prescriptions techniques pour l'accessibilité de la voirie et des espaces publics et de l'arrêté susvisé du 15 janvier 2007 pris pour son application, qui prévoient des cheminements praticables, sans obstacle pour le pied ; 6. Considérant cependant, que le procès-verbal de constat versé en appel a été établi trois ans et demi après les faits et ne peut attester de l'état de ladite chaussée à la date de l'accident ; qu'au vu des autres documents, notamment photographiques, versés au dossier, il ne résulte pas de l'instruction que les défectuosités de la chaussée, qui sont de simples fissures du revêtement, auraient constitué un obstacle, et que le cheminement n'aurait pas été praticable pour une personne handicapée ; qu'ainsi, alors que MmeB..., qui travaillait depuis 2006 au sein des services communaux, ne pouvait ignorer les imperfections du cheminement et qu'elle ne soutient, ni même n'allègue, avoir, avant sa chute, attiré l'attention de son employeur sur les difficultés du trajet qu'elle empruntait jusqu'au stationnement réservé, les défectuosités affectant l'ouvrage au jour de l'accident ne peuvent être regardées comme constituant un danger excédant les sujétions normales auxquelles doivent s'attendre des usagers, même handicapés ; que la circonstance que la commune a créé, après l'accident, une nouvelle place pour personne handicapée située à l'arrière de la mairie et permettant à l'intéressée d'accéder à son travail par la porte d'entrée de service, n'est pas de nature, par elle-même, à révéler l'existence, au jour de l'accident, d'un défaut d'entretien normal de la voie dont la commune avait la charge ; 7. Considérant, en deuxième lieu, que l'article 6 sexies de la loi susvisée du 13 juillet 1983 dispose que : " Afin de garantir le respect du principe d'égalité de traitement à l'égard des travailleurs handicapés, les employeurs visés à l'article 2 prennent, en fonction des besoins dans une situation concrète, les mesures appropriées pour permettre aux travailleurs mentionnés aux 1°, 2°, 3°, 4°, 9°, 10° et 11° de l'article L. 323-3 du code du travail d'accéder à un emploi ou de conserver un emploi correspondant à leur qualification, de l'exercer et d'y progresser ou pour qu'une formation adaptée à leurs besoins leur soit dispensée, sous réserve que les charges consécutives à la mise en oeuvre de ces mesures ne soient pas disproportionnées, notamment compte tenu des aides qui peuvent compenser en tout ou partie les dépenses supportées à ce titre par l'employeur. " ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que, dans les circonstances où elle s'est produite, la chute dont Mme B... a été victime puisse être regardée comme présentant un lien direct avec un manquement déterminé de la commune de Saint-Estève aux obligations qui lui incombent au titre de ces dispositions ; qu'à cet égard, la création, déjà évoquée au point précédent, d'une nouvelle place pour personne handicapée, ne suffit pas à révéler l'existence d'une faute commise par la commune au regard desdites obligations et qui serait à l'origine directe de la chute de la requérante ; 8. Considérant, par suite, que c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé qu'aucune faute ne pouvait être retenue à l'encontre de la commune de Saint-Estève, employeur de MmeB... ; qu'en revanche, en vertu des principes rappelés au point 4 du présent arrêt, l'absence de faute commise par la commune employeur ne fait pas obstacle à la réparation par la commune, ainsi d'ailleurs qu'elle le reconnaît elle-même, des souffrances physiques ou morales subies par l'intéressée et de ses éventuels préjudices esthétique ou d'agrément ; 9. Considérant que si le rapport de l'expertise ordonnée en référé, établi le 15 septembre 2010, est entaché d'une erreur de plume sur la date de la consolidation de l'état de Mme B..., cette erreur matérielle est sans incidence sur l'évaluation à laquelle l'expert a procédé des préjudices subis par l'intéressée ; qu'il a ainsi évalué à 4 sur 7 les souffrances physiques endurées par Mme B...avant consolidation et ne fait état d'aucun préjudice esthétique ; que Mme B...ne conteste pas utilement ces évaluations en se bornant, d'une part, à faire valoir que "l'indemnisation au titre de la douleur semble nettement sous-évaluée" et d'autre part, à "s'étonner qu'un individu qui se retrouve en fauteuil roulant n'ait aucun préjudice esthétique", alors qu'il résulte de l'instruction, notamment du procès-verbal de constat établi le 15 juin 2010 versé au dossier par l'intéressée, que celle-ci se déplaçait, à cette date, sans fauteuil roulant, ni béquilles ou cannes ; que, dans ces conditions, il sera fait une juste appréciation des préjudices indemnisables invoqués par Mme B...consécutivement à sa chute du 24 septembre 2009, en condamnant la commune de Saint-Estève à lui verser la somme de 6 000 euros au titre des souffrances physiques et morales subies ; 10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme B...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande indemnitaire et à demander l'annulation de ce jugement ainsi que la condamnation de la commune de Saint-Estève à lui verser une indemnité de 6 000 euros ; Sur les dépens : 11. Considérant que, pour l'application de l'article R. 761-1 du code de justice administrative, il y a lieu, au titre des dépens, de mettre à la charge définitive de la commune de Saint-Estève, les frais d'expertise, taxés et liquidés par ordonnance du président du tribunal administratif de Montpellier du 11 octobre 2010 à la somme de 300 euros ; Sur les frais non compris dans les dépens : 12. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que la commune de Saint-Estève demande sur leur fondement au titre de ses frais non compris dans les dépens soit mise à la charge de Mme B... qui n'est, dans la présente instance, ni tenue aux dépens, ni partie perdante ; 13. Considérant que Mme B...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi susvisée du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que l'avocat de Mme B...renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de la commune de Saint-Estève le versement à Me D...de la somme de 1 196 euros ; que, par contre, en l'absence de tout document établissant le montant des frais d'avocat réglés par Mme B...en première instance, ses conclusions tendant à ce que la commune de Saint-Estève lui verse une somme de 1 500 euros au titre des frais non compris dans les dépens exposés devant les premiers juges ne peuvent, en tout état de cause, qu'être rejetées ; D E C I D E : Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 15 février 2013 est annulé. Article 2 : La commune de Saint-Estève est condamnée à verser à Mme B...la somme de 6 000 (six mille) euros. Article 3 : Les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 300 euros par ordonnance du président du tribunal administratif de Montpellier du 11 octobre 2010, sont mis à la charge définitive de la commune de Saint-Estève. Article 4 : La commune de Saint-Estève versera à Me D...la somme de 1 196 (mille cent quatre-vingt-seize) euros, en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve qu'il renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle. Article 5 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté. Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...B..., à la commune de Saint-Estève et à la caisse primaire d'assurance maladie des Pyrénées-Orientales. Délibéré après l'audience du 29 mai 2015, à laquelle siégeaient : M. Boucher, président de chambre ; M. Portail, président-assesseur ; Mme Busidan, premier conseiller ; Lu en audience publique, le 26 juin 2015. '' '' '' '' 2 N° 13MA02540
Cours administrative d'appel
Marseille
CAA de MARSEILLE, 8ème chambre - formation à 3, 10/07/2015, 13MA04401, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. D...B...a demandé au tribunal administratif de Montpellier, d'une part, d'annuler la décision du 28 septembre 2011 par laquelle le recteur de l'académie de Montpellier a refusé de reconstituer sa carrière par l'attribution d'un congé maladie pour accident de service avec allocation de plein traitement et de condamner l'Etat à lui payer la somme de 46 746,71 euros en réparation des préjudices subis en raison des fautes commises par l'administration dans la gestion et la reconstitution de sa carrière et, d'autre part, d'annuler l'arrêté du 8 décembre 2011 par lequel le recteur de l'académie de Montpellier l'a admis à la retraite pour invalidité à compter du 16 octobre 2010 ; Par un jugement n° 1105258-1105865 du 27 septembre 2013, le tribunal administratif de Montpellier a annulé la décision du 28 septembre 2011 du recteur de l'académie de Montpellier en tant qu'elle a refusé à M. B...l'attribution d'un congé maladie pour accident de service avec allocation d'un plein traitement jusqu'à sa mise à la retraite le 16 octobre 2010, a condamné l'Etat à verser à M.B..., outre la somme de 13 036 euros, assortie des intérêts à compter du 6 septembre 2011, correspondant au demi-traitement non versé au cours de la période du 16 janvier 2010 au 15 octobre 2010 et à la réparation des troubles subis dans ses conditions d'existence, une somme, assortie des intérêts à compter du 6 septembre 2011, correspondant à la moitié de la part fixe de l'indemnité de suivi et d'orientation des élèves dont M. B...a été privé au cours de la période du 16 janvier 2010 au 15 octobre 2010 ainsi qu'une somme de 1 500 euros au titre des frais d'instance ; Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés le 13 novembre 2011 et le 7 avril 2015, M.B..., représenté par MeC..., demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 27 septembre 2013 en tant qu'il rejette ses conclusions de première instance dirigées contre l'arrêté du 8 décembre 2011 le plaçant de manière rétroactive à la retraite et en tant qu'il limite le montant des indemnités allouées ; 2°) d'annuler l'arrêté du 8 décembre 2011 et la décision du 28 septembre 2011 du recteur de l'académie de Montpellier ; 3°) d'enjoindre au recteur de l'académie de Montpellier de procéder au réexamen de sa situation dans le délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir sous astreinte et de procéder à la reconstitution, à compter du 16 octobre 2010, de sa carrière et de ses droits sociaux et à pension de retraite ; 4°) de condamner l'Etat à lui payer 44 096 euros à parfaire en réparation des préjudices subis en lien avec les conséquences de l'accident de service et aux illégalités fautives commises par l'administration, somme devant être assortie des intérêts légaux à compter du 6 septembre 2011 ; 5°) de mettre à la charge de l'Etat, outre les dépens, la somme de 2 500 euros hors taxes au titre des frais d'instance ; Il soutient que : - le jugement est entaché d'une erreur de droit et d'une contradiction de motifs dans la mesure où un agent victime d'un accident de service peut bénéficier d'un congé au-delà de la durée d'une année jusqu'à ce qu'il soit en état à reprendre le service ou jusqu'à sa mise à la retraite ; - aucun texte ne prévoit la possibilité de placer un agent, à l'expiration d'un congé de maladie ordinaire, à la retraite de manière rétroactive y compris dans le cas où cet agent a demandé à être placé à la retraite ; - le recteur n'était pas en situation de compétence liée pour prononcer sa mise à la retraite pour invalidité ; - le jugement encourt l'annulation en ce qu'il a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 8 décembre 2011 ; - le jugement encourt l'annulation en ce qu'il limite son placement effectif à la retraite ; - le jugement encourt l'annulation en tant qu'il limite le montant de l'indemnisation des préjudices dès lors qu'il était en droit de prétendre à un plein traitement au-delà du 16 octobre 2010 et à l'indemnité d'ISOE à un taux plein jusqu'à la date de sa mise à la retraite ; - contrairement à ce qu'a jugé le tribunal qui a rejeté ses conclusions à fin d'injonction, l'annulation de la décision du 28 septembre 2011 implique la reconstitution de sa carrière ainsi que la régularisation de ses droits sociaux et à pension ; - l'arrêté du 8 décembre 2011 a été signé par une personne non habilitée ; - l'arrêté du 8 décembre 2011 qui se fonde sur un avis de la commission de réforme du 27 octobre 2011 est irrégulier dans la mesure où cet avis a été annulé et remplacé par un avis du 13 décembre 2011 qui avait été sollicité par l'administration elle-même ; - en sa qualité de victime d'un accident de service, il devait percevoir un plein traitement jusqu'à la date de son placement à la retraite pour invalidité soit à compter du 14 décembre 2011 ; - la négligence de l'administration ne saurait justifier la rétroactivité d'un acte ; - il est fondé à obtenir la condamnation de l'Etat à l'indemniser de la perte de traitement subie au cours de la période débutant le 16 octobre 2010 et terminant à la date de son placement effectif à la retraite déduction faite de la pension de retraite, soit la somme de 33 496 euros ; - il est fondé à obtenir la condamnation de l'Etat à l'indemniser de la perte de l'indemnité ISOE à compter du 16 octobre 2010 pendant trois années, soit la somme de 3 600 euros ; - il est fondé à obtenir la réparation de son préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence subis à hauteur de 10 000 euros ; Par un mémoire en défense, enregistré le 12 janvier 2015, la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur de la recherche conclut au rejet de la requête. Elle soutient que : - l'auteure de l'acte du 8 décembre 2011 bénéficiait d'une délégation de signature régulièrement publiée au recueil des actes administratifs de la région Languedoc-Roussillon n° 51 de septembre 2011 ; - l'acte du 8 décembre 2011 n'est entaché d'aucun vice de procédure dès lors que l'avis de la commission de réforme du 13 décembre 2011, postérieur, est sans influence sur l'arrêté en litige ; - l'acte du 8 décembre 2011 déroge au principe de non-rétroactivité des actes administratifs en vue de procéder à la régularisation de la situation administrative de M. B...qui ne se trouvait plus en congé maladie et qui avait demandé la régularisation de sa situation ; - dès lors que M. B...n'établit pas qu'il ne remplissait pas les conditions légales pour être admis à la retraite dès le 16 octobre 2010, l'administration n'était pas tenue de le maintenir en position d'activité sous le régime de congé de maladie ordinaire imputable au service ; - le tribunal a suffisamment réparé le préjudice moral de M. B...et les troubles dans les conditions d'existence subis en lui allouant la somme de 3 000 euros ; Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires, - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, - le décret n° 85-986 du 16 septembre 1985, - le décret n° 86-442 du 14 mars 1986, - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de MmeE..., - les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public, - et les observations de MeC..., représentant M.B.... 1. Considérant qu'après épuisement de ses congés de maladie ordinaire, M.B..., professeur de lycée professionnel affecté depuis le 1er septembre 2006 à Perpignan, placé en situation de demi-traitement à compter du 16 janvier 2010, a, à sa demande, été placé à la retraite pour invalidité à compter du 16 octobre 2010 par un arrêté en date du 8 décembre 2011 du recteur de l'académie de Montpellier ; que par un jugement n° 1105258-1105865 du 27 septembre 2013, le tribunal administratif de Montpellier a, d'une part, annulé la décision du 28 septembre 2011 du recteur de l'académie de Montpellier en tant qu'elle refuse à M. B...l'attribution d'un congé maladie pour accident de service avec allocation d'un plein traitement jusqu'à sa mise à la retraite le 16 octobre 2010, d'autre part, condamné l'Etat à verser à M. B..., outre la somme de 13 036 euros, assortie des intérêts à compter du 6 septembre 2011, correspondant au demi-traitement non versé au cours de la période du 16 janvier 2010 au 15 octobre 2010 et à la réparation des troubles subis dans ses conditions d'existence, une somme, assortie des intérêts à compter du 6 septembre 2011, correspondant à la moitié de la part fixe de l'indemnité de suivi et d'orientation des élèves dont M. B...a été privé au cours de la période du 16 janvier 2010 au 15 octobre 2010 ainsi qu'une somme de 1 500 euros au titre des frais d'instance et, enfin, rejeté le surplus des conclusions dont il était saisi par M.B... ; 2. Considérant, en premier lieu, que le jugement dont relève appel M. B...a estimé qu'il résultait des dispositions de l'article 27 du décret du 14 mars 1986, de l'article R. 36 du code des pensions civiles et militaires, de l'article 51 de la loi du 11 janvier 1984 et de l'article 43 du décret du 16 septembre 1985 " que le fonctionnaire qui a épuisé ses droits au congé de maladie ordinaire et qui a été jugé définitivement inapte à l'exercice de tout emploi ne peut prétendre au bénéfice d'un congé de longue maladie ou de longue durée, lesquels ne peuvent être accordés qu'aux agents susceptibles d'être jugés aptes à la reprise d'un emploi, et est rayé des cadres et que si les décisions administratives ne peuvent légalement disposer que pour l'avenir, s'agissant des décisions relatives à la carrière des fonctionnaires, des militaires ou des magistrats, l'administration peut, en dérogation à cette règle, leur conférer une portée rétroactive dans la stricte mesure nécessaire pour assurer la continuité de la carrière de l'agent intéressé ou procéder à la régularisation de sa situation " ; que ce jugement a, par ailleurs, annulé la décision du 28 septembre 2011 du recteur de l'académie de Montpellier en tant qu'elle refuse à M. B...l'attribution d'un congé maladie pour accident de service avec allocation d'un plein-traitement jusqu'à sa mise à la retraite le 16 octobre 2010 après avoir estimé qu'il ressortait des pièces du dossier que l'inaptitude définitive au service de M. B...est en tout ou partie imputable aux infirmités résultant des deux accidents de service intervenus en 2000 et 2007 pour conclure que c'était ainsi par une inexacte application des dispositions de l'article 34 de la loi susvisée du 11 janvier 1984 que l'administration avait privé M. B...de la moitié de son traitement mensuel du 15 janvier 2009 au 15 octobre 2010, correspondant aux neuf derniers mois de son congé de maladie ordinaire précédant sa mise à la retraite pour invalidité ; qu'enfin, ledit jugement a estimé qu'en plaçant M.B..., sur sa demande, à la retraite pour invalidité, à compter du 16 octobre 2010, date non contestée de l'épuisement de ses droits à congés de maladie " ordinaires " prévus au 2° de l'article 34 précité de la loi du 11 janvier 1984, le recteur de l'académie de Montpellier avait, par la décision du 8 décembre 2011, nécessairement procédé à la régularisation de la position statutaire de l'intéressé, dès lors, que, d'une part, ce dernier ne pouvait plus être placé en congés de longue maladie ou de longue durée et, d'autre part, qu'il n'est ni établi ni même soutenu que le placement en disponibilité d'office de ce dernier, du 16 octobre 2010 jusqu'à la notification de la décision le mettant à la retraite, aurait constitué une position administrative alternative régulière ou aurait été plus avantageux pour l'intéressé ; que ce faisant, et contrairement à ce que soutient M.B..., le tribunal n'a entaché son jugement d'aucune contradiction de motifs ; 3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 27 du décret susvisé du 14 mars 1986 : " Lorsque, à l'expiration de la première période de six mois consécutifs de congé de maladie, un fonctionnaire est inapte à reprendre son service, le comité médical est saisi pour avis de toute demande de prolongation de ce congé dans la limite des six mois restant à courir. / Lorsqu'un fonctionnaire a obtenu pendant une période de douze mois consécutifs des congés de maladie d'une durée totale de douze mois, il ne peut, à l'expiration de sa dernière période de congé, reprendre son service sans l'avis favorable du comité médical : en cas d'avis défavorable il est soit mis en disponibilité, soit reclassé dans un autre emploi, soit, s'il est reconnu définitivement inapte à l'exercice de tout emploi, admis à la retraite après avis de la commission de réforme. Le paiement du demi-traitement est maintenu, le cas échéant, jusqu'à la date de la décision d'admission à la retraite (...)." ; que l'article R. 36 du code des pensions civiles et militaires dispose : " La jouissance de la pension de retraite ou de la solde de réforme peut être antérieure à la date de la décision de radiation des cadres lorsque cette décision doit nécessairement avoir un effet rétroactif en vue soit d'appliquer des dispositions statutaires obligeant à placer l'intéressé dans une position administrative régulière, soit de tenir compte de la survenance de la limite d'âge, soit de redresser une illégalité. " ; que l'article 51 de la loi susvisée du 11 janvier 1984 dispose : " La disponibilité est la position du fonctionnaire qui, placé hors de son administration ou service d'origine, cesse de bénéficier, dans cette position, de ses droits à l'avancement et à la retraite (...) " ; qu'aux termes de l'article 43 du décret du 16 septembre 1985 : " La mise en disponibilité ne peut être prononcée d'office qu'à l'expiration des droits statutaires à congés de maladie prévus à l'article 34 (2°, 3° et 4°) de la loi du 11 janvier 1984 susvisée et s'il ne peut, dans l'immédiat, être procédé au reclassement du fonctionnaire dans les conditions prévues à l'article 63 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée (...) " ; que selon l'article 34 de la loi susvisée du 11 janvier 1984 dans sa version alors applicable : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L.27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident. (...)" ; 4. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que le fonctionnaire qui a épuisé ses droits au congé de maladie ordinaire et qui a été jugé définitivement inapte à l'exercice de tout emploi ne peut prétendre au bénéfice d'un congé de longue maladie ou de longue durée, lesquels ne peuvent être accordés qu'aux agents susceptibles d'être jugés aptes à la reprise d'un emploi, et est rayé des cadres ; que si les décisions administratives ne peuvent légalement disposer que pour l'avenir, s'agissant des décisions relatives à la carrière des fonctionnaires, des militaires ou des magistrats, l'administration peut, en dérogation à cette règle, leur conférer une portée rétroactive dans la stricte mesure nécessaire pour assurer la continuité de la carrière de l'agent intéressé ou procéder à la régularisation de sa situation ; 5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M.B..., qui a été victime, le 18 octobre 2007, d'un accident reconnu imputable au service pour lequel la date de sa consolidation a été fixée au 15 octobre 2009, a été placé, à compter de cette date jusqu'au 15 octobre 2010, en congé de maladie ordinaire avec demi-traitement à compter du 16 janvier 2010 ; qu'à la suite de la demande présentée par M. B...le 7 avril 2010 en vue de son placement à la retraite pour invalidité, le recteur de l'académie de Montpellier a saisi la commission départementale de réforme, laquelle a, le 29 avril 2010, déclaré M B...inapte à l'exercice de ses fonctions et à tout reclassement et s'est prononcée, le 27 octobre 2011, pour sa mise à la retraite pour invalidité ; qu'en ayant placé M.B..., à sa demande, à la retraite pour invalidité, à compter du 16 octobre 2010, date non contestée de l'épuisement de ses droits à congés de maladie " ordinaires " prévus au 2° de l'article 34 précité de la loi du 11 janvier 1984, le recteur de l'académie de Montpellier a, par la décision contestée du 8 décembre 2011, nécessairement procédé à la régularisation de la position statutaire de l'intéressé, dès lors, que, d'une part, ce dernier ne pouvait plus être placé en congés de longue maladie ou de longue durée et, d'autre part, qu'il n'est ni établi ni même soutenu que le placement en disponibilité d'office de ce dernier, du 16 octobre 2010 jusqu'à la notification de la décision le mettant à la retraite, aurait constitué une position administrative alternative régulière ou aurait été plus avantageux pour l'intéressé ; qu'il s'ensuit, qu'ainsi que l'a jugé le tribunal, le recteur de l'académie de Montpellier étant placé en situation de compétence liée pour arrêter, avec l'effet rétroactif dont s'agit, la décision en litige, tous les moyens développés par M. B...à l'appui de ces conclusions aux fins d'annulation de la décision du 8 décembre 2011 doivent être écartés ; 6. Considérant, en troisième lieu, qu'ainsi que l'ont relevé les premiers juges, il ressort des pièces du dossier, depuis le rapport remis par le Dr A...le 12 mars 2010 et le rapport de l'expert psychiatrique en date du 4 mai 2011 sur lequel se fonde l'avis de la commission de réforme en date du 13 décembre 2011 qui annule et remplace l'avis du 27 octobre précédent, que l'inaptitude définitive au service de M. B...est en tout ou partie imputable aux infirmités résultant des deux accidents de service intervenus en 2000 et 2007 et que les troubles médicaux, qui ne sont pas imputables au service, ne sont en tout état de cause pas de nature à placer l'intéressé dans l'incapacité d'exercer ses fonctions et que c'est donc par une inexacte application des dispositions précitées de l'article 34 de la loi susvisée du 11 janvier 1984 que l'administration a privé M. B...de la moitié de son traitement mensuel, soit 1 140 euros, du 15 janvier 2009 au 15 octobre 2010, correspondant aux neuf derniers mois de son congé de maladie ordinaire précédant sa mise à la retraite pour invalidité ; qu'ainsi, c'est à bon droit que, par le jugement dont il est relevé appel, et non contesté sur ce point par l'intimé, que l'administration a été condamnée à indemniser M. B...à hauteur de 10 036 euros correspondant à la moitié du traitement mensuel qui, à tort, ne lui a pas été versée au cours de la seule période du 15 janvier 2009 au 15 octobre 2010 ; que c'est également à bon droit, que, par le jugement dont il est relevé appel, et non contesté sur ce point par l'intimé, que l'administration a été condamnée à verser à M. B...la moitié de la part fixe de l'indemnité de " suivi et d'orientation des élèves" (ISOE) dont il a été privé au cours de la seule période du 15 janvier 2009 au 15 octobre 2010 ; 7. Considérant, en quatrième lieu, qu'il ne résulte pas de l'instruction qu'en arrêtant à 3 000 euros le montant de la réparation des troubles qu'a subis M. B...dans ses conditions d'existence consécutifs aux conséquences négatives pour sa situation financière alors délicate, de son placement erroné à demi-traitement au cours de la période de janvier à octobre 2010 après avoir tenu compte du versement à l'intéressé le 24 mars 2011 d'une aide exceptionnelle non remboursable de 1 500 euros par le directeur départemental des services de l'éducation nationale des Pyrénées-Orientales, que les premiers ont fait une insuffisante évaluation de ce poste de préjudice ; que, par ailleurs, ainsi que l'ont estimé les juges de première instance, faute d'établir le préjudice moral dont il se prévaut du fait de l'absence de décision sur son déroulement de carrière jusqu'à la date de l'arrêté le plaçant à la retraite pour invalidité du 8 décembre 2011, M. B... n'est pas fondé à en obtenir la réparation ; 8. Considérant, en dernier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que le présent arrêt, qui rejette les conclusions de M. B...aux fins d'annulation de la décision du 8 décembre 2011 du recteur de l'académie de Montpellier, n'appelle aucune mesure d'exécution ; qu'il s'ensuit que les conclusions de M. B...aux fins de réexamen de sa situation doivent être écartées ; 9. Considérant que les dispositions des articles L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soient mises à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, les sommes demandées par M. B...à ce titre ; D E C I D E : Article 1er : La requête de M. B...est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...B...et à la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur de la recherche. Délibéré après l'audience du 23 juin 2015, à laquelle siégeaient : - M. Gonzales, président de chambre, - MmeE..., première conseillère, - Mme Baux, premier conseiller. Lu en audience publique, le 10 juillet 2015. '' '' '' '' 2 N° 13MA04401
Cours administrative d'appel
Marseille
CAA de NANTES, 4ème chambre, 30/06/2015, 13NT02723, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. D...B...a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler, d'une part, la décision du 11 mai 2012 par laquelle le directeur de La Poste l'a mis d'office à la retraite ainsi que la décision du 23 octobre 2012 rejetant son recours gracieux, d'autre part, la décision du 24 octobre 2012 annulant et remplaçant la décision du 11 mai 2012. Par un jugement n° 1202459 du 22 juillet 2013, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et des mémoires, enregistrés le 24 septembre 2013, le 14 avril 2014 et le 2 mars 2015, M.B..., représenté par MeF..., demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Caen du 22 juillet 2013 ; 2°) de faire droit à ses conclusions de première instance ; 3°) de mettre à la charge de La Poste la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - le jugement est entaché d'une omission à statuer ; - la décision du 24 octobre 2012 est insuffisamment motivée ; - l'appréciation de son aptitude est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; - La Poste n'a pas satisfait à l'obligation de reclassement. Par un mémoire en défense, enregistré le 14 avril 2014, La Poste, représentée par Me E..., conclut : - au rejet de la requête ; - à ce que soit mise à la charge de M. B...la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - le jugement est régulier : le tribunal s'est prononcé sur l'aptitude de M. B...; - la décision est motivée ; - la recherche de reclassement a été suffisante. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Madelaine, - les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public, - les observations de MeA..., représentant La Poste. 1. Considérant que M. B...a été recruté le 20 août 1985 par La Poste en qualité de contrôleur et reclassé le 1er juillet 1993 en qualité d'" agent technique et de gestion niveau 2 " (ATG2) ; qu'à compter d'avril 2006, sa santé s'est dégradée ; qu'ayant épuisé ses droits à congé de maladie ordinaire et ne pouvant reprendre ses fonctions, il a été placé en disponibilité d'office ; que, par une décision du 11 mai 2012, La Poste a placé d'office M. B...à la retraite en raison de son inaptitude définitive à l'exercice de ses fonctions de guichetier ; qu'à la suite du recours gracieux de ce dernier, rejeté le 23 octobre 2012, La Poste a, par une décision du 24 octobre 2012, retiré celle du 11 mai 2012, et l'a admis à faire valoir ses droits à la retraite à compter du 1er juin 2012 ; que M. B...relève appel du jugement du 22 juillet 2013 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ; Sur la régularité du jugement : 2. Considérant que, contrairement à ce que soutient le requérant, les premiers juges se sont prononcés sur le bien-fondé de l'appréciation portée par La Poste sur son aptitude à exercer les fonctions de son grade, en relevant qu'il " ressor[tait] des pièces du dossier que, si celui-ci est inapte à l'exercice de ses fonctions de guichetier dès lors qu'il souffre d'une névrose dépressive lui rendant impossible le contact avec le public, il est toutefois apte à l'exercice de tâches administratives " ; que, dès lors, M. B...n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué serait entaché d'une omission à statuer ; Sur les conclusions à fin d'annulation : 3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1er de la loi susvisée du 11 juillet 1979 : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) - retirent ou abrogent une décision créatrice de droits (...) " ; que l'article 3 de la même loi précise : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ; que la décision du 24 octobre 2012 vise notamment les dispositions applicables du code des pensions civiles et militaires de retraite ainsi que les avis de la commission de réforme, par lesquels celle-ci " a constaté l'inaptitude définitive de M. B...à l'exercice de ses fonctions " et " a déclaré que la mise à la retraite d'office était justifiée ", et dont elle s'approprie les motifs ; qu'ainsi, cette décision est suffisamment motivée au regard des dispositions précitées, quand bien même elle ne ferait pas état des raisons pour lesquelles le reclassement de M. B...n'a pas été possible ; 4. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 63 de la loi susvisée du 11 janvier 1984 : " Lorsque les fonctionnaires sont reconnus, par suite d'altération de leur état physique, inaptes à l'exercice de leurs fonctions, le poste de travail auquel ils sont affectés est adapté à leur état physique. Lorsque l'adaptation du poste de travail n'est pas possible, ces fonctionnaires peuvent être reclassés dans des emplois d'un autre corps s'ils ont été déclarés en mesure de remplir les fonctions correspondantes " ; qu'aux termes de l'article L. 29 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " Le fonctionnaire civil qui se trouve dans l'incapacité permanente de continuer ses fonctions en raison d'une invalidité ne résultant pas du service et qui n'a pu être reclassé dans un autre corps en application de l'article 63 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précitée peut être radié des cadres par anticipation soit sur sa demande, soit d'office ; (...) " ; 5. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées que, lorsqu'un fonctionnaire est reconnu, par suite de l'altération de son état physique, inapte à l'exercice de ses fonctions, il incombe à l'administration de rechercher si le poste occupé par ce fonctionnaire ne peut être adapté à son état physique ou, à défaut, de lui proposer une affectation dans un autre emploi de son grade compatible avec son état de santé ; que, si le poste ne peut être adapté ou si l'agent ne peut être affecté dans un autre emploi de son grade, il incombe à l'administration de l'inviter à présenter une demande de reclassement dans un emploi d'un autre corps ; qu'il n'en va autrement que si l'état de santé du fonctionnaire le rend totalement inapte à l'exercice de toute fonction administrative ; 6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'état de santé de M. B...a justifié son placement en congé de maladie ordinaire à compter du 24 avril 2006 ; que le médecin de prévention, saisi de la situation de l'intéressé après qu'il a été déclaré apte à reprendre ses fonctions, a préconisé l'affectation sur un poste administratif hors guichet, sans contact avec le public ; qu'affecté sur un tel poste, en mai et juin 2007, dans deux bureaux différents de l'agglomération caennaise, M. B...n'a pas réussi à s'intégrer dans ces structures ; qu'il n'a pas donné suite à l'accord qu'il avait obtenu de réalisation d'un bilan professionnel auprès d'un organisme extérieur ; que les recherches d'un poste adapté auprès des structures du Groupe La Poste ont été infructueuses, tant en raison de l'inexistence de fonctions correspondant aux compétences résiduelles de l'intéressé que de ses réticences à rejoindre les postes qui lui étaient proposés ; qu'invité à participer à un forum mobilité, il ne s'est pas rendu au rendez-vous qui avait été fixé ; qu'il n'a enfin pas donné suite aux appels à candidature, qui lui étaient transmis par les services de La Poste, sur des emplois susceptibles de lui convenir ; que la commission de reclassement a assuré de 2008 à 2012 un suivi de la situation de l'intéressé, sans parvenir à dégager un poste adapté ou à assurer son reclassement ; qu'ainsi l'employeur de M.B..., qui n'était pas tenu à une obligation de résultat, doit être regardé, dans les circonstances de l'espèce, comme ayant satisfait aux obligations pesant sur lui en application des dispositions de l'article 63 de la loi du 11 janvier 1984 cité au point 4 du présent arrêt ; 7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande ; Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 8. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que La Poste, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à verser à M. B...la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit à la demande de La Poste tendant au remboursement des frais de même nature qu'elle a supportés ; DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : Les conclusions de La Poste tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B...et à La Poste. Délibéré après l'audience du 9 juin 2015, à laquelle siégeaient : - M. Lainé, président de chambre, - Mme Loirat, président-assesseur, - M. Madelaine, faisant fonctions de premier conseiller. Lu en audience publique, le 30 juin 2015. Le rapporteur, B. MADELAINE Le président, L. LAINÉ Le greffier, M. C... La République mande et ordonne au ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. '' '' '' '' 2 N° 13NT02723
Cours administrative d'appel
Nantes
Conseil d'État, 8ème SSJS, 29/06/2015, 387025, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Par un mémoire, enregistré le 9 avril 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté en application de l'article 23-5 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, M. A...demande au Conseil d'Etat, à l'appui de son pourvoi tendant à l'annulation de l'arrêt du 7 novembre 2014 de la cour régionale des pensions de Rennes rejetant son appel contre le jugement du 12 décembre 2013 par lequel le tribunal des pensions militaires a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 26 septembre 2011 du ministre de la défense rejetant sa demande de paiement d'une pension militaire d'invalidité en raison d'un adénome carcinome bronchique diagnostiqué en 2009 qu'il impute au service, de renvoyer au Conseil constitutionnel la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des articles L. 2, L. 3, L. 25 et R. 60 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ; - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre et notamment ses articles L. 2, L. 3, L. 25 et R. 60 ; - le code de la sécurité sociale ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Esther de Moustier, maître des requêtes, - les conclusions de M. Benoît Bohnert, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à Me Blondel, avocat de M. A...; 1. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : " Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé, y compris pour la première fois en cassation, à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat (...) " ; qu'il résulte des dispositions de ce même article que le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux ; 2. Considérant, en premier lieu, que M. A...soutient que les dispositions de l'article R. 60 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre porteraient atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution en tant qu'elles ne prévoient pas au bénéfice des militaires, en cas de différend sur l'imputabilité au service d'une affection, l'équivalent de la saisine obligatoire par le juge du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles prévue à l'article R. 142-24-2 du code de la sécurité sociale ; que ces dispositions ne sont pas de nature législative ; que, dès lors, la question que soulève le requérant n'est pas au nombre de celles qui peuvent être transmises au Conseil constitutionnel en application de l'article 61-1 de la Constitution ; 3. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre : " Ouvrent droit à pension : / 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; / 2° Les infirmités résultant de maladies contractées par le fait ou à l'occasion du service ; (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 3 du même code : " Lorsqu'il n'est pas possible d'administrer ni la preuve que l'infirmité ou l'aggravation résulte d'une des causes prévues à l'article L. 2, ni la preuve contraire, la présomption d'imputabilité au service bénéficie à l'intéressé à condition : / 1° S'il s'agit de blessure, qu'elle ait été constatée avant le renvoi du militaire dans ses foyers ; / 2° S'il s'agit d'une maladie, qu'elle n'ait été constatée qu'après le quatre-vingt-dixième jour de service effectif et avant le soixantième jour suivant le retour du militaire dans ses foyers ; / 3° En tout état de cause, que soit établie, médicalement, la filiation entre la blessure ou la maladie ayant fait l'objet de la constatation et l'infirmité invoquée (...) " ; que l'article L. 25 de ce code précise que : " Toute décision comportant attribution de pension doit être motivée et faire ressortir les faits et documents ou les raisons d'ordre médical établissant que l'infirmité provient de l'une des causes indiquées à l'article L. 2 ou lorsque la pension est attribuée par présomption le droit de l'intéressé à cette présomption et l'absence de preuve contraire. / Toute décision comportant rejet de pension doit être également motivée et faire ressortir qu'il n'est pas établi que l'infirmité provient de l'une des causes indiquées à l'article L. 2, ou, lorsque l'intéressé a droit à la présomption, les faits, documents ou raisons d'ordre médical dont résulte la preuve contraire détruisant cette présomption. / La notification des décisions prises en vertu de l'article L. 24, premier alinéa, du présent code, doit mentionner que le délai de recours contentieux court à partir de cette notification et que les décisions confirmatives à intervenir n'ouvrent pas de nouveau délai de recours. " ; 4. Considérant que, pour demander au Conseil d'Etat de renvoyer au Conseil constitutionnel la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des articles L. 2, L. 3 et L. 25 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, M. A...soutient que ces dispositions, applicables aux militaires, conduisent à une rupture d'égalité entre les personnes auxquelles elles s'appliquent et les personnes auxquelles s'appliquent, pour la reconnaissance des maladies professionnelles, les dispositions du code de la sécurité sociale, dès lors qu'elles ne prévoient pas, en cas de différend portant sur l'imputabilité au service de l'affection, l'équivalent de la saisine obligatoire par le juge du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles prévue à l'article R. 142-24-2 du code de la sécurité sociale ; qu'il soutient qu'en méconnaissant le principe d'égalité, ces dispositions méconnaissent également les droits de la défense garantis par l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 et les droits à la protection de la santé et à la sécurité matérielle prévus à l'alinéa 11 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 dès lors qu'il serait plus difficile aux militaires qu'aux personnes auxquelles s'appliquent, pour la reconnaissance des maladies professionnelles, les dispositions du code de la sécurité sociale d'apporter la preuve de l'imputabilité au service de leur affection en l'absence d'avis équivalent à celui du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles ; 5. Considérant, toutefois, que les dispositions précitées n'ont ni pour objet ni pour effet d'organiser la procédure contentieuse applicable devant les juridictions des pensions ; que, dès lors, le requérant ne peut utilement faire valoir qu'elles méconnaitraient les principes qu'il invoque au motif que les juridictions des pensions militaires ne sont pas tenues de procéder à une consultation équivalente à celle du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles prévue à l'article R. 142-24-2 du code de la sécurité sociale ; qu'au demeurant la circonstance que les dispositions en cause retiennent des conditions et des modalités de reconnaissance de l'imputabilité au service des maladies contractées par le fait ou à l'occasion du service qui diffèrent de celles fixées par le code de la sécurité sociale pour les personnes régies par ce code n'est pas de nature, au regard de l'objet de ces dispositions, à caractériser une atteinte au principe d'égalité ; que, par suite, la question soulevée, qui n'est pas nouvelle, ne présente pas un caractère sérieux ; qu'ainsi, il n'y a pas lieu de la renvoyer au Conseil constitutionnel ; D E C I D E : -------------- Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par M.A.... Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. B...A...et au ministre de la défense. Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel et au Premier ministre. ECLI:FR:CESJS:2015:387025.20150629
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 8ème SSJS, 29/06/2015, 370980, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Mme B...D...veuve C...a demandé au tribunal départemental des pensions de Haute-Corse, d'une part, d'annuler la décision de refus opposée le 23 juillet 2009 par le ministre de la défense à sa demande tendant à la révision, sur la base du grade de lieutenant-colonel, de sa pension de veuve au taux de réversion qui lui a été servie au titre du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, et d'autre part, d'ordonner la révision de la pension militaire d'invalidité de M. A...C..., sur cette même base, depuis sa cessation d'activité le 16 septembre 1998, et de condamner le ministre de la défense à lui régler le reliquat des sommes dues au titre de la pension militaire d'invalidité de M. C...de la date du 16 septembre 1998 jusqu'à son décès le 10 septembre 2008, et enfin, d'ordonner la révision, sur cette même base, de la pension de réversion d'invalidité qui lui est servie, avec effet rétroactif au jour du décès de son époux. Par un jugement n° 11/00062 du 15 octobre 2012, le tribunal des pensions de Bastia a rejeté cette demande. Par un arrêt n° 12/0035 du 17 juin 2013, la cour régionale des pensions de Bastia a infirmé ce jugement, ordonné la révision de la pension militaire d'invalidité du lieutenant-colonel Joseph C... à compter de sa cessation définitive d'activité le 19 septembre 1998 et jugé que le ministre de la défense devra régler à Mme C...le reliquat des sommes dues au titre de la pension militaire d'invalidité de son défunt mari calculée en fonction de son grade entre le 16 septembre 1998 et le 10 septembre 2008, date de son décès. Par un pourvoi, enregistré le 6 août 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de la défense demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler cet arrêt ; 2°) réglant l'affaire au fond, d'annuler le jugement du 15 octobre 2012 du tribunal des pensions de Bastia et de rejeter la demande de MmeC.... Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Esther de Moustier, maître des requêtes, - les conclusions de M. Benoît Bohnert, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à Me Carbonnier, avocat de Mme D...;1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis à la cour régionale des pensions de Bastia que M. A...C..., rayé des contrôles de l'armée active le 19 février 1997, a bénéficié d'une pension militaire de retraite et d'une pension militaire d'invalidité jusqu'à son décès, survenu le 10 septembre 2008 ; qu'il percevait ainsi une pension de nature mixte au sens de l'article L. 34 du code des pensions civiles et militaires de retraite ; que, le 17 décembre 2008, MmeC..., sa veuve, a présenté une demande tendant à obtenir la révision de la pension de réversion qui lui a été servie à la suite du décès de son époux ; que cette demande a été rejetée par une décision du ministre de la défense du 23 juillet 2009 ; que ce dernier se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 17 juin 2013 par lequel la cour régionale des pensions de Bastia, statuant sur l'appel de MmeC..., a infirmé le jugement du 15 octobre 2012 du tribunal des pensions de Bastia ayant rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 23 juillet 2009 et a fait droit aux conclusions de sa requête ; 2. Considérant qu'en vertu de l'article L. 79 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, les juridictions des pensions ne sont compétentes que sur les contestations soulevées par l'application du livre Ier et du livre II de ce code ; que les pensions mixtes de retraite et d'invalidité sont prévues par le code des pensions civiles et militaires de retraite ; que le contentieux de ces pensions relève de la compétence du juge administratif de droit commun, à l'exception des questions relatives à l'existence, à l'origine médicale et au degré de l'invalidité, lesquelles doivent être tranchées par la juridiction des pensions ; 3. Considérant que la pension de veuve dont est titulaire Mme C...constitue une pension mixte de retraite et d'invalidité ; que sa demande tendant à ce que cette pension fasse l'objet d'une révision dans les mêmes conditions que celles appliquées à la pension militaire de retraite que percevait M. C...ne portait sur aucune des questions qui relèvent de la juridiction des pensions ; qu'il en résulte qu'en n'annulant pas d'office pour incompétence le jugement du 15 octobre 2012 du tribunal des pensions de Bastia statuant sur la demande de MmeC..., la cour régionale des pensions de Bastia a entaché son arrêt d'erreur de droit ; que, par suite, le ministre de la défense est fondé à en demander l'annulation ; 4. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ; 5. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, le tribunal des pensions de Bastia n'était pas compétent pour statuer sur la demande de MmeC... ; que son jugement doit, par suite, être annulé ; 6. Considérant que, lorsqu'en la qualité de juge d'appel que lui confère l'application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, le Conseil d'Etat annule un jugement rendu en première instance au motif que la juridiction administrative saisie n'était pas compétente, il peut, soit, en vertu des dispositions de l'article R. 351-1 du même code, attribuer le jugement de l'affaire à la juridiction administrative compétente en première instance, soit évoquer et statuer immédiatement sur la demande présentée en première instance ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par MmeC... ; 7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 34 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " Les militaires qui ont été atteints en service d'infirmités susceptibles d'ouvrir droit à pension au titre du code des pensions militaires d'invalidité reçoivent la pension dudit code afférente à leur grade (...) " ; que, selon l'article R. 50 du même code : " La pension du code des pensions militaires d'invalidité attribuée aux militaires mentionnés à l'article L. 34 est calculée sur la base du grade détenu à la date de la radiation des cadres " ; 8. Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. C...était titulaire d'une pension militaire de retraite et d'une pension militaire d'invalidité concédées sur la base du grade de commandant qu'il détenait à la date de sa radiation des cadres, le 19 février 1997 ; que, s'il a été admis par un arrêt du Conseil d'Etat du 25 juillet 2007, par application de l'article L. 79 du code des pensions civiles et militaires de retraite, à voir sa pension militaire de retraite révisée sur la base du grade de lieutenant-colonel à compter du 17 septembre 1998 afin qu'il soit tenu compte de son engagement spécial au titre de la réserve accompli du 10 mars au 16 septembre 1998, cette circonstance est sans influence sur le calcul et le montant de la pension militaire d'invalidité qu'il percevait en application des dispositions précitées du code des pensions civiles et militaires de retraite dont il résulte que la pension militaire d'invalidité dont bénéficie le militaire qui y a droit est liquidée sur le grade atteint à la fin de la période d'activité au cours de laquelle a eu lieu l'évènement ouvrant droit à pension ; 9. Considérant, par suite, que MmeC..., qui a obtenu la réversion des pensions dont M. C...était titulaire, ne peut prétendre à la révision, sur la base du grade de lieutenant-colonel, de sa pension de veuve concédée au titre du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; que, dès lors, elle n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par sa décision du 23 juillet 2009, le ministre de la défense a rejeté sa demande ; qu'il convient, par voie de conséquence, de rejeter sa demande ainsi que ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; D E C I D E : -------------- Article 1er : L'arrêt du 17 juin 2013 de la cour régionale des pensions de Bastia et le jugement du 15 octobre 2012 du tribunal des pensions de Bastia sont annulés. Article 2 : La demande de Mme C...et ses conclusions présentées devant le Conseil d'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre de la défense et à Mme B... D... veuveC....ECLI:FR:CESJS:2015:370980.20150629
Conseil d'Etat