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CAA de PARIS, 4ème chambre, 15/06/2020, 18PA02160, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme D... A... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 10 janvier 2017 lui notifiant son titre de pension d'invalidité et lui refusant le bénéfice de la retraite pour travailleur handicapé avec un départ anticipé au 1er décembre 2016 et de transformer sa pension d'invalidité en pension de retraite majorée de 25% au titre de travailleur handicapé ou, à défaut, de lui accorder un versement annuel de 7 000 euros en supplément de sa pension d'invalidité ou, à défaut, de lui accorder le versement d'une somme de 210 000 euros au même titre correspondant à une durée de versement de trente ans ou, à défaut, de lui verser des dommages et intérêts. Par un jugement n° 1703540/5-2 du 26 avril 2018, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête, enregistrée le 26 juin 2018, Mme A..., représentée par la SELAFA Cabinet Cassel, demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement n° 1703540/5-2 du 26 avril 2018 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; 2°) d'annuler la décision de la Banque de France la plaçant en retraite pour invalidité à compter du 1er décembre 2016 ; 3°) d'annuler la décision implicite de rejet de sa demande tendant au bénéfice d'un départ anticipé à la retraite en qualité de travailleur handicapé à compter du 1er décembre 2016 ; 4°) d'enjoindre à la Banque de France de procéder à son placement à la retraite en qualité de travailleur handicapé avec un départ anticipé au 1er décembre 2016, à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ; 5°) de mettre à la charge de la Banque de France le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - le courrier du 2 janvier 2017 lui notifiant son titre de pension pour invalidité n'est pas motivé quant au refus de faire droit à sa demande de départ anticipé à la retraite en qualité de travailleur handicapé ; - qu'elle aurait dû bénéficier d'une retraite en qualité de travailleur handicapé à compter du 1er décembre 2016 dès lors que le point de départ de sa pathologie est antérieur à 1980 et ne peut être fixé à la date du 4 mars 1993, date retenue à tort par le chef de la médecine administrative et la commission de retraite. Par un mémoire en défense, enregistré le 26 mars 2019, la Banque de France, représentée par la SCP Delvolvé-Trichet, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de Mme A... une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience en application des dispositions de l'article 8 de l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif. Le rapport de Mme Mach, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique. Considérant ce qui suit : 1. Mme A..., secrétaire comptable à la Banque de France, souffre de troubles bipolaires, d'un handicap visuel et de diverses douleurs et a été reconnue travailleur handicapé par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées avec un taux d'incapacité supérieur ou égal à 50% et strictement inférieur à 80%. Mme A... a demandé à plusieurs reprises à bénéficier d'un départ anticipé à la retraite en qualité de travailleur handicapé à compter du 1er décembre 2016, lesquelles demandes ont fait l'objet de rejets implicites. A l'issue de son placement en congé de maladie jusqu'au 30 novembre 2016 et après avis de la commission de réforme, Mme A... a été admise à la retraite pour invalidité à compter du 1er décembre 2016. Mme A... doit être regardée comme ayant demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision prononçant sa mise à la retraite pour invalidité ainsi que la décision implicite de rejet de sa demande tendant au bénéfice d'un départ anticipé à la retraite en qualité de travailleur handicapé à compter du 1er décembre 2016. Elle relève appel du jugement du 26 avril 2018 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Sur les conclusions relatives à la décision prononçant la mise à la retraite pour invalidité : 2. Mme A... ne soulève en appel aucun moyen à l'encontre de la décision prononçant sa mise à la retraite pour invalidité. Par suite, elle n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort, que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision prononçant sa mise à la retraite pour invalidité. Sur les conclusions relatives à la décision refusant le bénéfice d'un départ anticipé à la retraite en qualité de travailleur handicapé : 3. Aux termes de l'article R. 811-1 du code de justice administrative : " (...) le tribunal administratif statue en premier et dernier ressort : / (...) 7° Sur les litiges en matière de pensions de retraite des agents publics (...) ". La contestation par un agent public du refus de lui faire bénéficier d'un départ anticipé à la retraite en qualité de travailleur handicapé constitue un litige en matière de pensions pour lequel le tribunal administratif est compétent en premier et dernier ressort. 4. Il résulte de ces dispositions que le jugement attaqué a été rendu en dernier ressort en tant qu'il a statué sur la demande de Mme A... tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet de sa demande tendant au bénéfice d'un départ anticipé à la retraite en qualité de travailleur handicapé à compter du 1er décembre 2016. Par suite, les conclusions de la requête de Mme A... tendant à l'annulation de ce jugement en tant qu'il rejette ses conclusions à fin d'annulation de cette décision et à fin d'injonction correspondantes ont le caractère d'un pourvoi en cassation et relèvent ainsi de la compétence du Conseil d'Etat. Il y a lieu, dès lors, de renvoyer ces conclusions ainsi que les conclusions accessoires relatives aux frais liés au litige au Conseil d'Etat. DECIDE : Article 1er : Les conclusions de la requête de Mme A... relatives à la décision prononçant sa mise à la retraite pour invalidité sont rejetées. Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme A... est transmis au Conseil d'Etat. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... A..., à la Banque de France et au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat. Délibéré après l'audience du 29 mai 2020, à laquelle siégeaient : - Mme B..., présidente, - M. Mantz, premier conseiller, - Mme Mach, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 15 juin 2020. La présidente, M. B...La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 18PA02160
Cours administrative d'appel
Paris
Conseil d'État, 2ème - 7ème chambres réunies, 10/06/2020, 437866, Publié au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Par un arrêt n° 19NT04180 du 17 janvier 2020, enregistré le 21 janvier 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la cour administrative d'appel de Nantes, avant de statuer sur les conclusions de la requête présentées par M. A... B... tendant à la prise en charge d'actes de kinésithérapie à visée analgésique prescrits par son médecin traitant, a décidé, par application des dispositions de l'article L. 113-1 du code de justice administrative, de transmettre le dossier de cette demande au Conseil d'Etat, en soumettant à son examen les deux questions suivantes : 1°) Les dispositions de l'article L. 711-5 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, dans leur rédaction issue de la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 relative à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025 et portant diverses dispositions intéressant la défense, doivent-elles être interprétées comme dispensant, par dérogation aux règles fixées par l'article R. 811-7 du code de justice administrative, les requérants agissant dans le cadre d'une action contentieuse en matière de pensions militaires d'invalidité et de victimes de guerre de l'obligation de se faire représenter par un avocat ' 2°) En cas de réponse négative à la première question, y a-t-il lieu de considérer, eu égard aux modalités d'entrée en vigueur de la loi du 13 juillet 2018 prévues par son article 51, que l'obligation de ministère d'avocat est également applicable aux requêtes enregistrées devant les cours régionales des pensions avant le 1er novembre 2019 puis transférées aux cours administratives d'appel à cette date, alors que les requérants étaient, jusqu'à ce transfert, dispensés du ministère d'avocat ' .............................................................. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 ; - le décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018 ; - le code de justice administrative et l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Sébastien Gauthier, maître des requêtes en service extraordinaire, - les conclusions de Mme Sophie Roussel, rapporteur public ; Vu la note en délibéré, enregistrée le 22 mai 020, présentée par M. A... B... ; REND L'AVIS SUIVANT1. Aux termes de l'article L. 711-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, dans la rédaction, applicable à compter du 1er novembre 2019, que lui a donnée la loi du 13 juillet 2018 relative à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025 et portant diverses dispositions intéressant la défense : " Les recours contentieux contre les décisions individuelles prises en application du livre Ier et des titres Ier à III du livre II sont introduits, instruits et jugés conformément aux dispositions du code de justice administrative, sous réserve du présent chapitre. " L'article L. 711-5 du même code dispose que " Le demandeur comparaît en personne et peut présenter des observations orales. Il peut se faire assister ou représenter par la personne de son choix ". Aux termes de l'article R. 811-7 du code de justice administrative : " Sous réserve des dispositions de l'article L. 774-8, les appels ainsi que les mémoires déposés devant la cour administrative d'appel doivent être présentés, à peine d'irrecevabilité, par l'un des mandataires mentionnés à l'article R. 431-2 ". 2. Il résulte des dispositions, citées ci-dessus, de l'article L. 711-5 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, éclairées par les travaux parlementaires préalables à l'adoption de la loi du 13 juillet 2018, que le législateur a entendu maintenir le droit dont disposait le pensionné, antérieurement à leur entrée en vigueur et depuis la loi du 31 mars 1919, d'être représenté par la personne de son choix ou de ne pas être représenté dans les litiges visés à l'article L. 711-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre. 3. Ainsi, alors même que l'article R. 811-7 du code de justice administrative ne mentionne pas de dispense de ministère d'avocat pour ces contentieux, l'obligation d'avoir recours à ce ministère ne s'impose pas devant les cours administratives d'appel saisies de ces litiges. Au demeurant, ne s'applique pas davantage, pour ces contentieux en cassation, l'obligation d'être représenté devant le Conseil d'Etat par un avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation. 4. Compte tenu de la réponse apportée à la première question, la seconde question est dépourvue d'objet.Le présent avis sera notifié à la cour administrative d'appel de Nantes, à M. A... B... et à la ministre des armées. Il sera publié au Journal officiel de la République française.ECLI:FR:CECHR:2020:437866.20200610
Conseil d'Etat
CAA de VERSAILLES, 6ème chambre, 05/06/2020, 17VE01232, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... C... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé par le département de la Seine-Saint-Denis sur sa demande tendant à bénéficier de la protection fonctionnelle, à la communication de son dossier administratif et de son dossier médical, à la saisine du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT), à l'ouverture d'une enquête administrative interne et à la reconnaissance de l'imputabilité au service de sa pathologie, de condamner le département de la Seine-Saint-Denis à lui verser la somme de 20 000 euros en réparation de son préjudice moral, de son préjudice de carrière et de son préjudice de santé et à prendre en charge l'ensemble des frais de justice qu'il a exposés et de lui enjoindre, enfin, de mettre en oeuvre la protection fonctionnelle, au besoin sous astreinte. Par un jugement n° 1600482 du 17 février 2017, le Tribunal administratif de Montreuil a prononcé un non-lieu à statuer sur la demande de M. C... tendant à la communication de son dossier administratif, a annulé la décision implicite refusant de lui accorder la protection fonctionnelle et la communication de son dossier médical, a condamné le département de la Seine-Saint-Denis à lui verser la somme de 3 000 euros en réparation de son préjudice tiré du trouble dans les conditions d'existence, a mis à sa charge une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et a rejeté le surplus de la demande. Procédure devant la Cour : Par une requête enregistrée le 14 avril 2017, M. C..., représenté par Me Mazza, avocat, demande à la Cour : 1° d'annuler partiellement ce jugement en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la reconnaissance de faits de harcèlement moral, à la saisine du CHSCT, à la mise en oeuvre de la protection fonctionnelle et n'a pas condamné son employeur pour manquement à l'obligation de protection ; 2° de condamner le département de la Seine-Saint-Denis, au titre de la responsabilité pour faute, du fait des agissements de harcèlement moral et de manquement à l'obligation de protection tirée de l'article L. 4121-1 du code du travail, à lui verser une somme de 17 000 euros en réparation de son préjudice moral, de carrière et de santé ; 3° de condamner le département de la Seine-Saint-Denis à prendre en charge les frais de justice qu'il a exposés à hauteur provisoire de 5 516 euros au stade de la requête ; 4° d'enjoindre au département de la Seine-Saint-Denis de mettre en oeuvre la protection fonctionnelle à son égard, au besoin sous astreinte, et de rétablir des conditions de travail conformes aux restrictions médicales et à son état de santé ; 5° de mettre à la charge du département de la Seine-Saint-Denis le versement d'une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les entiers dépens. Il soutient que : - le jugement attaqué est insuffisamment motivé pour n'avoir pas répondu au moyen tiré de la faute commise par le département au regard de son obligation de garantir la sécurité physique et mentale de ses agents et pour avoir relevé son état de "vulnérabilité particulière" sans le justifier ; - le refus du département de la Seine-Saint-Denis de saisir le CHSCT afin qu'il mène une enquête, qui méconnaît les dispositions des articles 38, 39 et 41 du décret n° 85-603 du 10 juin 1985 relatif à l'hygiène et à la sécurité au travail, est illégal et fautif ; - il a été victime d'une situation de harcèlement moral résultant d'attitudes agressives à son encontre, de mesures de déstabilisation, d'une absence de prise en compte de son état de santé, de son isolement et de l'absence de promotion au titre de son déroulement de carrière, sans que repose sur lui la preuve de l'existence d'une situation de harcèlement moral dès lors qu'il lui suffisait de rapporter une simple présomption ; en outre, il ne lui incombait pas de démontrer l'existence d'une faute de l'administration résultant d'une intention de nuire, condition qui n'est pas exigée pour caractériser des faits de harcèlement moral ; - le département de la Seine-Saint-Denis a méconnu ses obligations résultant des dispositions de l'article L. 4121-1 du code du travail pour n'avoir pas assuré sa sécurité ni protégé sa santé physique et mentale ; - ces illégalités commises par l'administration constituent des fautes qui engagent sa responsabilité ; - il est fondé à demander la réparation de son préjudice moral subi du fait d'agissements constitutifs de harcèlement moral pour un montant de 5 000 euros, de son préjudice de carrière à hauteur de 5 000 euros et de son préjudice de santé à hauteur de 10 000 euros ; - au titre de la protection fonctionnelle le département aurait dû prendre en charge les frais et honoraires qu'il a déboursés pour un montant de 5 516 euros. ............................................................................................ Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - le code du travail ; - la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal ; - la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ; - le décret n° 85-603 du 10 juin 1985 relatif à l'hygiène et à la sécurité au travail ainsi qu'à la médecine professionnelle et préventive dans la fonction publique territoriale ; - le code de justice administrative et l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif, modifiée. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. A..., - et les conclusions de M. Errera, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. M. C..., titulaire du grade d'ingénieur territorial principal, exerce les fonctions de gestionnaire d'applications au sein de la direction des systèmes d'information du département de la Seine-Saint-Denis. Par un courrier du 18 septembre 2015, reçu le 21 septembre, il a demandé au président du conseil départemental de lui accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle en raison de faits de harcèlement moral dont il estimait être victime, de reconnaître sa pathologie en maladie professionnelle, de saisir le CHSCT pour manquement à une obligation de sécurité, de l'indemniser à hauteur de 20 000 euros en réparation des préjudices moral, de carrière et de santé qu'il indiquait avoir subis en conséquence de cette situation de harcèlement et de la méconnaissance par la collectivité de son obligation de sécurité, et de lui communiquer enfin son dossier administratif et son dossier médical. A la suite du silence conservé par l'administration, M. C... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler la décision implicite par laquelle le président du conseil départemental de la Seine-Saint-Denis a implicitement refusé de faire droit à ses demandes et de condamner l'administration à l'indemniser des préjudices subis. Par un jugement du 17 février 2017, le Tribunal a annulé la décision implicite refusant de lui accorder la protection fonctionnelle et la communication de son dossier médical, a condamné le département de la Seine-Saint-Denis à lui verser la somme de 3 000 euros en réparation de son préjudice tiré du trouble dans les conditions d'existence, a mis à la charge du département une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et a rejeté le surplus de sa demande. M. C... relève appel de ce jugement en tant qu'il ne lui a pas donné entièrement satisfaction et le département de la Seine-Saint-Denis, par la voie d'un appel incident, demande la réformation de ce jugement en tant qu'il a annulé la décision implicite du 21 novembre 2015 rejetant la demande de M. C... tendant à la communication de son dossier médical et à bénéficier de la protection fonctionnelle, et qu'il l'a condamné à verser à l'intéressé la somme de 3 000 euros. Sur la régularité du jugement attaqué : 2. M. C... soutient que le jugement attaqué est insuffisamment motivé pour n'avoir pas répondu au moyen tiré de la faute commise par le département au regard de son obligation de garantir la sécurité physique et mentale de ses agents. Toutefois, le tribunal, qui n'était pas tenu de répondre à l'ensemble des arguments présentés au soutien de ce moyen, y a répondu par une appréciation motivée, aux points 25 et 26. En outre, les premiers juges ont pu relever, au vu de l'ensemble des pièces du dossier et notamment des pièces médicales évoquées dans le jugement, que l'état de santé de l'intéressé présentait une "vulnérabilité particulière", sans être tenus de justifier davantage leur appréciation. Dès lors, M. C... n'est pas fondé à soutenir que le jugement du 17 février 2017 serait irrégulier. Sur les conclusions à fin d'annulation : En ce qui concerne l'appel principal de M. C... : S'agissant de la décision refusant de saisir le CHSCT et d'ouvrir une enquête : 3. En premier lieu, aux termes de l'article 33-1 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires à la fonction publique territoriale, dans sa rédaction alors en vigueur : " I.- Un comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail est créé dans les mêmes conditions que celles prévues pour les comités techniques par les premier à quatrième alinéas de l'article 32.(...) / II.- Le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail a pour mission : 1° De contribuer à la protection de la santé physique et mentale et de la sécurité des agents dans leur travail et à l'amélioration des conditions de travail ; 2° De veiller à l'observation des prescriptions légales prises en ces matières. / Le comité est réuni par son président à la suite de tout accident mettant en cause l'hygiène ou la sécurité ou ayant pu entraîner des conséquences graves. (...) ". Selon les dispositions de l'article 5-2 du décret n° 85-603 du 10 juin 1985 relatif à l'hygiène et à la sécurité au travail ainsi qu'à la médecine professionnelle et préventive dans la fonction publique territoriale : " Si un membre du comité mentionné à l'article 37 constate, notamment par l'intermédiaire d'un agent qui s'est retiré d'une situation de travail définie au premier alinéa de l'article 5-1, qu'il existe une cause de danger grave et imminent, il en avise immédiatement l'autorité territoriale et consigne cet avis dans le registre établi dans les conditions fixées à l'article 5-3. / Il est procédé à une enquête immédiate par l'autorité territoriale, en compagnie du membre du comité mentionné à l'article 37 ayant signalé le danger. L'autorité territoriale prend les mesures nécessaires pour remédier à la situation et informe le comité des décisions prises. / En cas de divergence sur la réalité du danger ou la façon de le faire cesser, le comité mentionné à l'article 37 est réuni en urgence dans un délai n'excédant pas vingt-quatre heures. L'inspecteur du travail est informé de cette réunion et peut y assister. (...) ". Aux termes de l'article 41 de ce même décret : " Le comité procède, dans le cadre de sa mission d'enquête en matière d'accidents du travail, d'accidents de service ou de maladies professionnelles ou à caractère professionnel, à une enquête à l'occasion de chaque accident du travail, chaque accident de service ou de chaque maladie professionnelle ou à caractère professionnel au sens des 3° et 4° de l'article 6. (...) ". Les points 3° et 4° de l'article 6 de ce décret auxquels renvoie cet article concernent les accidents de service graves ou maladie professionnelle ou à caractère professionnel grave ayant entraîné mort d'homme, ou paraissant devoir entraîner une incapacité permanente, ou ayant révélé l'existence d'un danger grave, même si les conséquences ont pu en être évitées ainsi que l'accident de service ou la maladie professionnelle ou à caractère professionnel présentant un caractère répété à un même poste de travail, ou à des postes de travail similaires, ou dans une même fonction, ou des fonctions similaires. Enfin, selon les termes de l'article 58 de ce décret : " Le comité se réunit au moins trois fois par an sur convocation de son président, à son initiative, ou dans le délai maximum d'un mois, sur demande écrite de deux représentants titulaires du personnel lorsque le comité comprend au plus quatre représentants titulaires et de trois représentants dans les autres cas. / En outre, le comité est réuni par son président à la suite de tout accident dans les conditions prévues par le II de l'article 33-1 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée (...) ". 4. M. C... soutient que la décision du président du conseil départemental de la Seine-Saint-Denis rejetant implicitement sa demande du 18 décembre 2015 en vue de la saisine du CHSCT afin que cette instance mène une enquête, serait entachée d'une erreur de droit pour méconnaître les dispositions des articles 38, 39 et 41 du décret n° 85-603 du 10 juin 1985 relatif à l'hygiène et à la sécurité au travail. Il résulte des dispositions rappelées au point précédent, et notamment des termes de l'article 33-1 de la loi du 26 janvier 1984 et 58 du décret du 10 juin 1985, que l'administration est tenue de réunir le CHSCT à la suite de tout accident mettant en cause l'hygiène ou la sécurité, ou ayant pu entraîner des conséquences graves. Si M. C... avait précédemment été placé en arrêt pour accident du travail à compter du 9 avril 2012 jusqu'au 1er juillet 2013, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'à la date à laquelle est survenue la décision en litige, soit le 21 novembre 2015, l'intéressé aurait été victime d'un nouvel accident du travail ou d'une maladie professionnelle répondant aux conditions de saisine de cette instance paritaire. Au surplus, il résulte des dispositions des articles 5-2 et 41 du décret précité que le CHSCT procède à une enquête lorsqu'un agent est soumis à une cause de danger grave et imminent, ainsi qu'à l'occasion d'accident du travail ou de maladie professionnelle ayant entraîné mort d'homme, ou paraissant devoir entraîner une incapacité permanente, ou ayant révélé l'existence d'un danger grave, ou encore présentant un caractère répété à un même poste de travail, ou à des postes de travail similaires, ou dans une même fonction, ou des fonctions similaires. M. C... ne démontrant pas avoir été dans l'une de ces situations à la date de la décision litigieuse, il n'est pas fondé à soutenir que la décision refusant de saisir le CHSCT en vue de l'ouverture d'une enquête par ce comité serait entachée d'une erreur de droit. 5. En deuxième lieu, si M. C... déclare en appel reprendre la totalité de ses écritures de première instance à l'encontre de cette décision, par lesquelles il avait également soulevé le moyen tiré du détournement de pouvoir, il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision contestée aurait été prise pour des motifs étrangers à l'intérêt du service. 6. Il résulte de ce qui précède que les conclusions aux fins d'annulation de la décision implicite refusant la saisine du CHSCT en vue de l'ouverture d'une enquête, doivent être rejetées. En ce qui concerne l'appel incident du département de la Seine-Saint-Denis : S'agissant de la décision implicite refusant d'accorder à M. C... le bénéfice de la protection fonctionnelle : 7. Le département de la Seine-Saint-Denis soutient que la décision implicite rejetant la demande que M. C... avait formulée dans son courrier du 18 septembre 2015, tendant au bénéfice de la protection fonctionnelle n'avait pas à être motivée, et par suite, n'était pas illégale. 8. Aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, alors en vigueur : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir ". Aux termes de l'article 5 de cette loi : " Une décision implicite intervenue dans des cas où une décision explicite aurait dû être motivée n'est pas illégale du seul fait qu'elle n'est pas assortie de cette motivation. Toutefois, à la demande de l'intéressé formulée dans les délais du recours contentieux, les motifs de toute décision implicite de rejet devront lui être communiqués dans le mois suivant cette demande ". 9. Comme l'ont relevé les premiers juges, le bénéfice de la protection fonctionnelle constitue un droit pour les agents en remplissant les conditions. Par conséquent, la décision implicite née le 21 novembre 2015 refusant à M. C... le bénéfice de la protection fonctionnelle devait être motivée en application des dispositions visées au point précédent. Par un courrier en recommandé avec avis de réception daté du 20 janvier 2016, M. C... a demandé au département communication des motifs de cette décision implicite de rejet. Le département de la Seine Saint-Denis n'ayant pas répondu à cette demande de communication des motifs dans le délai d'un mois qui lui était imparti par l'article 5 de la loi du 11 juillet 1979, ni pris de décision expresse de rejet de la demande dont il avait été saisi, il n'est pas fondé à soutenir, par la voie de l'appel incident, que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a annulé, pour défaut de motivation, sa décision refusant d'accorder à M. C... le bénéfice de la protection fonctionnelle. S'agissant de la décision implicite refusant de communiquer à M. C... son dossier médical : 10. Aux termes de l'article 1er de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal, alors en vigueur : " (...) Sont considérés comme documents administratifs, au sens des chapitres Ier, III et IV du présent titre, quels que soient leur date, leur lieu de conservation, leur forme et leur support, les documents produits ou reçus, dans le cadre de leur mission de service public, par l'Etat, les collectivités territoriales ainsi que par les autres personnes de droit public ou les personnes de droit privé chargées d'une telle mission (...) ". Selon les dispositions de l'article 2 de cette même loi : " Sous réserve des dispositions de l'article 6, les autorités mentionnées à l'article 1er sont tenues de communiquer les documents administratifs qu'elles détiennent aux personnes qui en font la demande, dans les conditions prévues par le présent titre ". 11. Si M. C... disposait d'un droit d'accéder à son dossier médical, ce droit d'accès n'était pas opposable au département de la Seine-Saint-Denis dès lors que cette collectivité ne détenait pas ce document administratif, protégé par le secret médical, et n'était donc pas tenue, en application des dispositions rappelées au point précédent, de le communiquer à l'intéressé. Par suite, la décision du président du conseil départemental de la Seine-Saint-Denis refusant implicitement de communiquer à l'intéressé son dossier médical n'avait pas à être motivée en application des dispositions citées au point 8. Par conséquent, le département défendeur est fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Montreuil a annulé cette décision en retenant le moyen tiré du défaut de motivation. Il s'ensuit, à défaut d'autre moyen contre la décision implicite refusant de communiquer à M. C... son dossier médical, que le département de la Seine-Saint-Denis est fondé à demander l'annulation du jugement en tant qu'il a fait droit aux conclusions de M. C... tendant à l'annulation de cette décision. Sur les conclusions indemnitaires : En ce qui concerne l'appel principal et la responsabilité pour faute du département de la Seine-Saint-Denis : 12. En premier lieu, M. C... soutient qu'il a été victime d'une situation de harcèlement moral résultant d'attitudes agressives à son encontre, de mesures de déstabilisation, d'une absence de prise en compte de son état de santé, de son isolement et de l'absence de promotion au titre de son déroulement de carrière, cette faute engageant la responsabilité du département de la Seine-Saint-Denis. 13. Aux termes du premier alinéa de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. ". Ces dispositions établissent à la charge de l'administration une obligation de protection de ses agents dans l'exercice de leurs fonctions, à laquelle il ne peut être dérogé que pour des motifs d'intérêt général. Cette obligation de protection a pour objet, non seulement de faire cesser les attaques auxquelles l'agent est exposé, mais aussi d'assurer à celui-ci une réparation adéquate des torts qu'il a subis. La mise en oeuvre de cette obligation peut notamment conduire l'administration à assister son agent dans l'exercice des poursuites judiciaires qu'il entreprendrait pour se défendre. Il appartient dans chaque cas à l'autorité administrative compétente de prendre les mesures lui permettant de remplir son obligation vis-à-vis de son agent, sous le contrôle du juge et compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce. 14. Il appartient à l'agent public qui soutient avoir été victime de faits constitutifs de harcèlement moral, lorsqu'il entend contester le refus opposé par l'administration dont il relève à une demande de protection fonctionnelle fondée sur de tels faits de harcèlement, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles d'en faire présumer l'existence. Il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile. Pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'agent auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral. Enfin, pour être qualifiés de harcèlement moral, de tels faits répétés doivent excéder les limites de l'exercice normal du pouvoir hiérarchique. 15. M. C... soutient tout d'abord avoir été victime d'agissements de harcèlement moral en raison de l'attitude agressive de collègues de travail, faisant état du comportement de son chef de service, de la secrétaire de ce dernier et d'un collègue de travail dont il a partagé le bureau. Si des tensions ont parfois pu survenir, notamment lorsqu'un collègue lui a demandé en septembre 2010 de cesser de travailler en musique dans leur bureau commun, ou lorsque la secrétaire du service a refusé le 26 mars 2012 de le saluer après qu'un incident fut survenu quelques jours plus tôt à l'occasion de la transmission d'une demande de formation, ces faits isolés, qui ne sauraient être qualifiés "d'agression", ne constituent pas des agissements répétés au sens des dispositions de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983. En outre, si l'intéressé fait état d'un entretien survenu le 18 septembre 2009 avec son supérieur hiérarchique au cours duquel il aurait connu une crise d'angoisse, il n'apporte aucun élément établissant que sa réaction aurait résulté de l'attitude de sa hiérarchie. De plus, comme l'ont relevé les premiers juges, la circonstance que M. C... ait été placé en congé de longue maladie du 18 septembre 2009 au 17 septembre 2010 ne révèle pas, à elle seule, une situation de harcèlement moral. 16. L'intéressé soutient ensuite avoir fait l'objet de mesures de déstabilisation, pour avoir été inscrit par erreur le 3 mai 2007 à une formation qu'il n'avait pas sollicitée au lieu de celle qu'il avait demandée, pour avoir intégré un bureau collectif avec un collègue avec lequel il était en conflit lors de sa réintégration en septembre 2010, pour avoir subi une effraction de l'armoire qui lui avait été affectée et dans laquelle se trouvait du matériel professionnel, ou encore pour avoir été victime d'un accident de service le 6 avril 2012 à la suite d'une réunion. Comme l'ont relevé les premiers juges, il ne résulte pas de l'instruction que l'inscription de M. C... à une formation qu'il n'avait pas sollicitée ne relèverait pas d'un simple dysfonctionnement administratif, ni que sa hiérarchie connaissait ses différends avec le collègue devant partager avec lui un bureau commun lors de sa réintégration en septembre 2010. De plus, si son armoire personnelle et son vestiaire ont été forcés et du matériel dérobé en septembre 2010, son chef de service a demandé que la lumière soit faite sur cet incident et que l'ordinateur portable de M. C... soit remplacé. Enfin, il ne résulte pas de l'instruction que le chef de service de M. C... aurait tenté de le déstabiliser lors de la réunion du 6 avril 2012 en refusant d'aborder ses rapports avec la secrétaire du service. 17. M. C... soutient ensuite que son administration n'a pas pris en considération son état de santé pour avoir été affecté dans un bureau collectif en septembre 2010 en dépit des préconisations d'un médecin psychiatre et pour avoir été obligé de reprendre le service à temps complet à compter du 29 juin 2014. Il ressort toutefois de l'instruction que M. C... n'a demandé au médecin de prévention de prescrire un changement de bureau que le 20 janvier 2011 et il ne démontre pas avoir saisi sa hiérarchie ou le service des ressources humaines des difficultés rencontrées avant cette date. En outre, comme l'a relevé le jugement attaqué, l'intéressé ne démontre pas que son état de santé n'était pas compatible avec une activité à temps complet lors de sa reprise le 29 juin 2014 en dépit de l'absence de consolidation de son accident de service. Enfin, il apparaît que le département de la Seine-Saint-Denis a accédé à la demande de l'agent de bénéficier d'un congé maladie pour accident de service du 9 avril 2012 au 1er juillet 2013. 18. L'intéressé n'établit pas avoir été personnellement et systématiquement écarté des réunions de bureau à compter du mois de septembre 2010, et il ne ressort pas de l'instruction qu'il aurait été privé des moyens lui permettant d'accomplir ses missions. Par suite, il n'est pas démontré qu'il aurait fait l'objet de mesures d'isolement susceptibles de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé ou de compromettre son avenir professionnel. Si M. C... soutient enfin avoir subi des atteintes à ses droits statutaires pour n'avoir pas bénéficié d'une promotion au grade d'ingénieur au cours du mois de mai 2011, il ne disposait pas d'un droit à être nommé à ce grade supérieur, sur lequel il a, au demeurant été nommé avec effet au 1er janvier 2011 par arrêté du 1er octobre 2011. En outre, s'il fait état de l'absence de versement de la prime informatique au titre de l'année 2011, il ne démontre pas qu'il remplissait les conditions pour bénéficier de cette prime qui a également été refusée à d'autres agents du service. Enfin, le refus de l'administration de l'inscrire à une formation au mois d'octobre 2011 ne saurait constituer à elle seule un agissement constitutif de harcèlement moral. 19. Il ressort de l'ensemble des points précédents que les éléments de fait allégués par M. C... ne sont pas susceptibles de faire présumer l'existence d'un harcèlement moral constitutif d'une faute de nature à engager la responsabilité du département de la Seine-Saint-Denis. 20. En deuxième lieu, aux termes des dispositions du IV de l'article 11 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 : " IV. -La collectivité publique est tenue de protéger le fonctionnaire contre les atteintes volontaires à l'intégrité de la personne, les violences, les agissements constitutifs de harcèlement, les menaces, les injures, les diffamations ou les outrages dont il pourrait être victime sans qu'une faute personnelle puisse lui être imputée. Elle est tenue de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté ". 21. Il résulte de ce qui précède que les faits de harcèlement moral dont M. C... soutient avoir été victime ne sont pas établis par les seuls éléments qu'il produit. Par suite, il n'est pas fondé à soutenir que la responsabilité de l'administration serait engagée pour avoir refusé de lui accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle énoncé au point précédent, en raison de ces agissements. 22. En troisième lieu, l'intéressé soutient que l'administration aurait méconnu ses obligations résultant des dispositions de l'article L. 4121-1 du code du travail, pour n'avoir pas assuré sa sécurité ni protégé sa santé physique et mentale, commettant ainsi une faute engageant sa responsabilité. 23. Aux termes de l'article 23 de la loi du 13 juillet 1983 : " Des conditions d'hygiène et de sécurité de nature à préserver leur santé et leur intégrité physique sont assurées aux fonctionnaires durant leur travail. ". Aux termes de l'article 108-1 de la loi du 26 janvier 1984 : " Dans les services des collectivités et établissements mentionnés à l'article 2, les règles applicables en matière d'hygiène et de sécurité sont celles définies par les livres Ier à V de la quatrième partie du code du travail et par les décrets pris pour leur application, (...). Il peut toutefois y être dérogé par décret en Conseil d'Etat. ". Enfin, aux termes de l'article L. 4121-1 du code du travail dans sa rédaction alors en vigueur : " L'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Ces mesures comprennent : 1° Des actions de prévention des risques professionnels et de la pénibilité au travail ; 2° Des actions d'information et de formation ; 3° La mise en place d'une organisation et de moyens adaptés. / L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes. ". En application de ces dispositions, le département de la Seine-Saint-Denis a l'obligation générale d'assurer la sécurité et la protection de la santé des agents placés sous son autorité. 24. Comme il l'a été dit aux points 13 à 19, la situation de harcèlement moral à laquelle M. C... prétend avoir été exposé n'est pas établie. Il ne ressort pas non plus de l'instruction, et pour les mêmes motifs qu'exposés précédemment, que M. C... aurait été confronté à un climat de travail conflictuel, ayant engendré des comportements anormaux de nature à porter atteinte à la préservation de sa santé mentale et de son intégrité physique. Par suite, il n'est pas fondé à soutenir que le département de la Seine-Saint-Denis aurait méconnu son obligation de sécurité et de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité de ses agents prévue par les dispositions rappelées au point 23, et que l'administration aurait commis une faute de nature à engager sa responsabilité. 25. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté ses conclusions indemnitaires fondées sur les fautes commises à son égard par le département de la Seine-Saint-Denis. En ce qui concerne l'appel incident du département de Seine-Saint-Denis : 26. Le département de Seine-Saint-Denis soutient, par la voie de l'appel incident, que M. C... ne remplissait pas les conditions lui permettant de bénéficier d'une réparation de son préjudice moral au titre de la responsabilité sans faute, le critère tiré de l'anormalité du dommage n'étant pas rempli. 27. Les dispositions des articles L. 27 et L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite et 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, instituent, en faveur des fonctionnaires victimes d'accidents de service ou de maladies professionnelles, une rente viagère d'invalidité en cas de mise à la retraite et une allocation temporaire d'invalidité en cas de maintien en activité, qui doivent être regardées comme ayant pour objet de réparer les pertes de revenus et l'incidence professionnelle résultant de l'incapacité physique causée par un accident de service ou une maladie professionnelle. Les dispositions instituant ces prestations déterminent forfaitairement la réparation à laquelle les fonctionnaires concernés peuvent prétendre, au titre de ces chefs de préjudice, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions. Ces dispositions ne font en revanche obstacle ni à ce que le fonctionnaire qui subit, du fait de l'invalidité ou de la maladie, des préjudices patrimoniaux d'une autre nature ou des préjudices personnels, obtienne de la personne publique qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice ni à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre la collectivité, dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette collectivité. La circonstance que le fonctionnaire victime d'un accident de service ou d'une maladie professionnelle ne remplit pas les conditions auxquelles ces dispositions subordonnent l'obtention d'une rente ou d'une allocation temporaire d'invalidité fait obstacle à ce qu'il prétende, au titre de l'obligation de la collectivité qui l'emploie de le garantir contre les risques courus dans l'exercice de ses fonctions, à une indemnité réparant des pertes de revenus ou une incidence professionnelle. 28. En l'espèce, M. C... a, dans ses écritures devant les premiers juges, sollicité l'indemnisation d'un préjudice de santé a raison d'un trouble anxio-dépressif développé du fait des agissements de son employeur qui ont conduit à plusieurs arrêts maladie et à un congé de longue maladie l'ayant empêché de reprendre une activité à temps plein. Le préjudice dont il demande réparation est un préjudice de santé, dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il serait distinct du préjudice résultant de l'incidence professionnelle causée par ses arrêts maladie. Si celle-ci avait vocation à être réparée par l'allocation temporaire d'invalidité à condition que l'intéressé en remplisse les conditions, le département ne pouvait être condamné à indemniser le préjudice invoqué par l'agent en dehors du régime légal rappelé au point précédent, sur le fondement de la responsabilité sans faute, comme le fait valoir l'administration. Par suite, le département de la Seine Saint-Denis est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil l'a condamné à verser à M. C... la somme de 3 000 euros au titre de la responsabilité sans faute. Sur les conclusions tendant à enjoindre à l'administration d'accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle : 29. Le présent arrêt n'implique pas que la protection fonctionnelle soit accordée à l'intéressé. Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 30. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ". 31. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge des parties une quelconque somme en application de ces dispositions. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement n° 1600482 du Tribunal administratif de Montreuil en date du 17 février 2017 est annulé en tant qu'il a annulé la décision implicite refusant de communiquer à M. C... son dossier médical et qu'il a condamné le département de la Seine-Saint-Denis à lui verser une somme de 3 000 euros. Article 2 : Les demandes présentées par M. C... devant le Tribunal administratif de Montreuil tendant à l'annulation de la décision implicite refusant de lui communiquer son dossier médical et à la condamnation du département de la Seine-Saint-Denis à l'indemniser d'un préjudice de santé à raison d'un trouble anxio-dépressif développé du fait des agissements de son employeur ayant conduit à plusieurs arrêts maladie sont rejetées. Article 3 : La requête de M. C... et le surplus des conclusions du département de la Seine-Saint-Denis sont rejetés. N° 17VE01232 2
Cours administrative d'appel
Versailles
CAA de BORDEAUX, 1ère chambre, 14/05/2020, 18BX02866, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme E... D... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision du 11 décembre 2015 par laquelle le recteur de la région académique Nouvelle-Aquitaine a fixé au 30 juin 2015 la date de consolidation de son état de santé et son taux d'incapacité permanente à 0%, ainsi que la décision du 18 février 2016 portant rejet de son recours gracieux, et d'enjoindre au recteur de réexaminer sa situation sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la notification du jugement. Par un jugement n° 1601656 du 29 mai 2018, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté cette demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 19 juillet 2018 et un mémoire enregistré le 23 septembre 2019, Mme D..., représentée par le Cabinet ARCC, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du 29 mai 2018 du tribunal administratif de Bordeaux ; 2°) d'annuler la décision du 11 décembre 2015 par laquelle le recteur de la région académique Nouvelle-Aquitaine a fixé au 30 juin 2015 la date de consolidation de son état de santé et son taux d'incapacité permanente à 0%, ainsi que la décision du 18 février 2016 portant rejet de son recours gracieux ; 3°) d'enjoindre au recteur de lui octroyer le bénéfice de l'imputabilité au service de l'invalidité évaluée à 4 % par le médecin expert, sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat, au titre de la première instance, les entiers dépens et la somme de 1 200 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et au titre de l'appel la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la décision attaquée est entachée d'un vice de procédure dès lors qu'il n'est pas établi que les membres de la commission de réforme appelés à statuer sur son cas ont été convoqués par lettre recommandée avec accusé de réception, que la commission était irrégulièrement composée en l'absence de médecin spécialiste de rhumatologie en son sein et qu'elle n'a pas été entendue par la commission ; - la décision attaquée est entachée d'une erreur d'appréciation dès lors que l'expert judiciaire a conclu que le déficit fonctionnel permanent partiel imputable à l'accident pouvait être estimé à 1% ; - la décision attaquée est entachée d'erreur de droit dès lors que la totalité des séquelles fonctionnelles dont elle se trouve atteinte devait être reconnue imputable au service et non seulement la part directement imputable à l'accident de service. Par un mémoire en défense, enregistré le 16 août 2019, le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ; - l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. B... C..., - les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteur public, - et les observations de Me A..., représentant Mme D.... Considérant ce qui suit : 1. Mme D..., professeure des écoles, a subi un traumatisme du bras droit le 25 septembre 2014 lors d'une séance d'éducation physique et sportive organisée pour des enfants de maternelle. Par décision du 27 janvier 2015, prise après avis de la commission de réforme, le recteur de l'académie de Bordeaux a reconnu l'imputabilité au service de l'accident et a octroyé à Mme D... un congé de maladie à plein traitement du 26 septembre 2014 au 4 janvier 2015 ainsi que le bénéfice des dispositions du deuxième alinéa du 2° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984. Ce congé a été prolongé selon les mêmes modalités jusqu'au 30 juin 2015, date à laquelle le médecin traitant de Mme D... a fixé la consolidation de son état de santé, par décision du 10 avril 2015. Par une décision du 11 décembre 2015, également prise après avis de la commission de réforme, le recteur de l'académie de Bordeaux a fixé la date de consolidation de l'état de santé de Mme D... au 30 juin 2015 et son taux d'incapacité permanente à 0%. Mme D... a formé un recours gracieux à l'encontre de cette décision, qui a été rejeté le 18 février 2016. Par une ordonnance du 9 août 2016, le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux a désigné, à la demande de Mme D..., un expert ayant pour mission notamment d'indiquer à quelle date son état de santé pourrait être considéré comme consolidé et de déterminer l'importance et l'ampleur de ses éventuels préjudices. Mme D... relève appel du jugement du 29 mai 2018 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 11 décembre 2015 et 18 février 2016. Sur le bien-fondé du jugement : 2. Aucune disposition n'imposant que les membres de la commission de réforme soient convoqués par courrier adressé en recommandé avec accusé de réception, le moyen tiré de l'irrégularité des modalités de convocation de ses membres doit être écarté. 3. D'une part, aux termes de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 dans sa rédaction alors en vigueur : " Le fonctionnaire en activité a droit : / (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. Le bénéfice de ces dispositions est subordonné à la transmission par le fonctionnaire, à son administration, de l'avis d'arrêt de travail justifiant du bien-fondé du congé de maladie, dans un délai et selon les sanctions prévus en application de l'article 35. / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident (...) ". 4. D'autre part, aux termes de l'article 13 du décret du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires dans sa rédaction applicable : " La commission de réforme est consultée notamment sur : / 1. L'application des dispositions du deuxième alinéa des 2° et 3° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée ; / 2. L'imputabilité au service de l'affection entraînant l'application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 34 (4°) de la loi du 11 janvier susvisée ; / (...) 5. La réalité des infirmités résultant d'un accident de service ou d'une maladie professionnelle, la preuve de leur imputabilité au service et le taux d'invalidité qu'elles entraînent, en vue de l'attribution de l'allocation temporaire d'invalidité instituée à l'article 65 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée (...) ". 5. Enfin, aux termes de l'article 12 du même décret : " Dans chaque département, il est institué une commission de réforme départementale compétente à l'égard des personnels mentionnés à l'article 15. Cette commission, placée sous la présidence du préfet ou de son représentant, qui dirige les délibérations mais ne participe pas aux votes, est composée comme suit : (...) / 4. Les membres du comité médical prévu à l'article 6 du présent décret (...) ". Aux termes du deuxième alinéa de l'article 5 de ce décret, auquel renvoie sur ce point le deuxième alinéa de l'article 6 : " Ce comité comprend deux praticiens de médecine générale, auxquels est adjoint, pour l'examen des cas relevant de sa qualification, un spécialiste de l'affection pour laquelle est demandé le bénéfice du congé de longue maladie ou de longue durée prévu à l'article 34 (3e et 4e) de la loi du 11 janvier 1984 susvisée ". Aux termes de l'article 19 du même décret : " La commission de réforme ne peut délibérer valablement que si la majorité absolue des membres en exercice assiste à la séance ; un praticien de médecine générale ou le spécialiste compétent pour l'affection considérée doit participer à la délibération. / Les avis sont émis à la majorité des membres présents. / Lorsqu'un médecin spécialiste participe à la délibération conjointement avec les deux praticiens de médecine générale, l'un de ces deux derniers s'abstient en cas de vote (...) ". 6. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que la commission de réforme n'est pas tenue de s'adjoindre un médecin spécialiste lorsqu'elle est saisie comme en l'espèce des conséquences d'une pathologie imputable au service ayant donné lieu à des congés de maladie ordinaires. Au demeurant, il n'est pas contesté que lors de l'examen de la situation de Mme D..., la commission de réforme disposait notamment, parmi plusieurs certificats médicaux et comptes-rendus de consultations et d'examens, d'un rapport d'expertise établi le 14 octobre 2015 par le docteur Ducloux, rhumatologue, lequel reconnaissait l'imputabilité au service de l'accident et concluait à l'absence de lésion traumatique et de séquelle indemnisable. Si la requérante soutient que les précédents comptes-rendus d'examen du docteur Ducloux en date des 25 novembre 2014 et 18 février 2015 étaient eux-mêmes contradictoires dans la mesure où le premier concluait à l'absence de lien entre l'état clinique de Mme D... et l'accident alors que le second indique le contraire, ce qui justifiait que la commission de réforme s'adjoigne la présence d'un médecin spécialiste pour examiner sa situation, il ressort des mentions du certificat du 18 février 2015 que le docteur Ducloux s'est borné à tirer les conséquences de l'avis de la commission de réforme, qui est intervenu avant la décision du 27 janvier 2015 par laquelle le recteur de l'académie de Bordeaux a reconnu l'imputabilité au service de l'accident et postérieurement à son premier examen du 25 novembre 2014. Compte tenu de l'ensemble de ce qui précède, il ne ressort pas des pièces du dossier que la présence d'un médecin spécialiste était nécessaire lors du passage devant la commission de réforme. Par suite, le moyen tiré de ce que la commission de réforme était irrégulièrement composée doit être écarté. 7. Aux termes de l'article 19 du décret du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires : " (...) Le fonctionnaire est invité à prendre connaissance, personnellement ou par l'intermédiaire de son représentant, de la partie administrative de son dossier. Un délai minimum de huit jours doit séparer la date à laquelle cette consultation est possible de la date de la réunion de la commission de réforme ; il peut présenter des observations écrites et fournir des certificats médicaux. / La commission de réforme, si elle le juge utile, peut faire comparaître le fonctionnaire intéressé. Celui-ci peut se faire accompagner d'une personne de son choix ou demander qu'une personne de son choix soit entendue par la commission de réforme ". 8. Il résulte de ces dispositions que l'audition du fonctionnaire intéressé constitue une simple faculté laissée à l'appréciation de la commission de réforme. Au surplus, il ressort des pièces du dossier que Mme D... a été informée de la date de la séance de la commission de réforme, le 3 décembre 2015, par deux courriers du 5 et du 16 novembre 2015, qu'elle a accusé réception de ce dernier le 19 novembre, soit dans un délai suffisant au regard des dispositions précitées et que ces deux courriers l'informaient de la possibilité qui lui était offerte de consulter son dossier, de présenter toutes observations ou pièces qu'elle jugerait utile et de faire entendre un médecin ou la personne de son choix. Dès lors, le moyen tiré de ce que Mme D... aurait été privée de la possibilité de faire valoir ses droits doit être écarté. 9. Aux termes de l'article 34 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique d'Etat : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) / 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident (...) ". 10. Il est constant que l'accident dont a été victime Mme D... le 25 septembre 2014 a été reconnu imputable au service. Par ailleurs, si l'existence d'un état antérieur, même évolutif, ne permet d'écarter l'imputabilité au service de l'état d'un agent que lorsqu'il apparaît que cet état a déterminé, à lui seul, l'incapacité professionnelle de l'intéressé, il n'en résulte pas que le taux d'incapacité résultant d'un accident de service aggravant un état antérieur doive inclure le taux d'incapacité résultant de cet état antérieur. 11. L'expert judiciaire qui a examiné Mme D... le 27 janvier 2017 a relevé que les lésions depuis la date de consolidation étaient stables et retient comme séquelles imputables à l'accident une aggravation d'une tendinopathie calcifiante du tendon du muscle sus épineux préexistante ainsi qu'une atteinte du contingent sensitif du nerf musculo-cutané sur un état antérieur de cervicarthrose et a évalué le déficit fonctionnel permanent imputable à l'accident à 1%. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que le compte-rendu de l'examen radiographique du 30 septembre 2014 indique la présence d'une " tendinopathie chronique calcifiante du tendon du muscle sus-épineux, sans rupture ni fissure " , que le compte-rendu de la radiographie effectuée le 4 décembre 2014 mentionne une " absence de calcification notable en regard de la coiffe des rotateurs ", que le compte-rendu de l'examen d'imagerie par résonance magnétique pratiqué le 23 février 2015 mentionne une : " cicatrisation avec évolution favorable et régression des phénomènes inflammatoires ", que le compte-rendu radiographique du 7 janvier 2016 indique seulement : " tendon long du biceps tout à fait respecté sans épanchement (...) l'articulation acromio-claviculaire n'est pas douloureuse avec une petite hypertrophie capsulaire ". Enfin, le compte-rendu de l'examen électro-neuro myographique réalisé le 9 mars 2016 indique que l'examen : " montre simplement après moult vérifications une relative diminution du potentiel sensitif du musculo-cutané droit par rapport au côté gauche sans dénervation dans le biceps et surtout sans trouble objectif dans son territoire " et conclut " on ne trouve en revanche aucune anomalie en C7 qui correspondrait à l'irradiation dans les 3ème et 4ème doigts (...) donc un examen qui explique incomplètement les symptômes actuels ". Par ailleurs, lors de ses examens du 25 novembre 2014 et du 18 février 2015 et du 14 octobre 2015 le docteur Ducloux notait qu'aucune lésion traumatique n'avait été documentée à la suite de cet événement et indiquait dans son compte-rendu du 14 octobre 2015 que " L'accident de service est à l'origine d'une dolorisation d'un état antérieur (...). Il n'y a pas eu de lésion traumatique. La calcification a disparu sur les radiographies de décembre 2014. Il n'y a aucune séquelle indemnisable ". Au regard de l'ensemble de ces éléments, qui témoignent de l'absence de lésion traumatique, de la difficulté à caractériser une atteinte du contingent sensitif du nerf musculo-cutané et de l'évolution favorable de l'état de santé peu de temps après l'accident, attestée par les comptes-rendus du 23 février 2015, du 7 janvier 2016 et du 9 mars 2016, Mme D... n'est pas fondée à soutenir, en dépit des conclusions de l'expertise judiciaire menée le 27 janvier 2017, réalisée plus de deux ans après l'accident, que la décision attaquée serait entachée d'une erreur d'appréciation en tant qu'elle a fixé son taux d'incapacité permanente partielle à 0%. 12. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande. Il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter ses conclusions à fins d'injonction et d'astreinte. Sur les frais liés au litige : 13. Les frais de l'expertise ordonnée par le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux, liquidés et taxés à la somme de 700 euros, ont été mis à la charge de Mme D... par le tribunal. Compte tenu de ce qui précède, il y a lieu de les laisser à sa charge définitive. 14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demande la requérante au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. DECIDE : Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée. Article 2 : Les frais de l'expertise ordonnée par le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux, liquidés et taxés à la somme de 700 euros, sont mis à la charge définitive de Mme D.... Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... D... et au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse. Délibéré après l'audience du 27 février 2020 à laquelle siégeaient : Mme Brigitte Phémolant, président, M. Didier Salvi, président-assesseur, M. B... C..., premier conseiller. Lu en audience publique, le 14 mai 2020. Le président, Brigitte Phémolant La République mande et ordonne au ministre de l'éducation et de la jeunesse, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 18BX02866
Cours administrative d'appel
Bordeaux
CAA de BORDEAUX, 2ème chambre, 09/06/2020, 18BX01577, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. G... A... C... a demandé au tribunal administratif de Poitiers de condamner le centre hospitalier Nord Deux-Sèvres à lui verser la somme de 28 758,90 euros en réparation des préjudices nés de l'accident dont il a été victime le 18 décembre 2009 sur son lieu de travail. Par un jugement n° 1503076 du 22 février 2018, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté la demande de M. A... C.... Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 17 avril 2018, M. A... C..., représenté par Me F..., demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 22 février 2018 ; 2°) de condamner le centre hospitalier Nord Deux-Sèvres à lui verser la somme de 29 801,74 euros en réparation des préjudices nés de l'accident dont il a été victime le 18 décembre 2009 sur son lieu de travail, assortie des intérêts et de leur capitalisation à compter de la date d'introduction de sa requête ; 3°) de mettre à la charge du centre hospitalier Nord Deux-Sèvres le paiement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens. Il soutient que : - il a été victime d'un accident de travail le 18 décembre 2009 en quittant un bâtiment administratif du site hospitalier de Bressuire où il travaillait ; - la pathologie de l'épaule droite qu'il a présentée n'a toutefois pas été reconnue comme imputable à cet accident ; - c'est à tort que le tribunal administratif a considéré qu'il demandait l'indemnisation des préjudices consécutifs à cette pathologie de l'épaule droite ; - c'est également à tort qu'il n'a pas examiné sa demande indemnitaire au titre de la responsabilité de droit commun du centre hospitalier ; - la responsabilité de l'établissement est susceptible d'être engagée au titre des dommages de travaux publics et à raison du défaut d'entretien normal de l'ouvrage ; - sa chute résulte d'un défaut de déneigement de l'escalier du bâtiment administratif ; - il n'a commis aucune faute d'inattention ; - il est en droit d'obtenir, au titre de cette responsabilité de droit commun, la réparation de l'ensemble de ses préjudices et, en tout état de cause, de ses préjudices patrimoniaux d'une autre nature que ceux réparés par la rente viagère d'invalidité et l'allocation temporaire d'invalidité ainsi que de ses préjudices personnels, à raison du risque subi dans l'exercice de ses fonctions ; - il est dès lors fondé à solliciter : - le remboursement des frais d'ostéopathie qu'il a dû engager à hauteur d'une somme de 596 euros ; - l'indemnisation de l'incidence professionnelle de son accident à hauteur de 10 000 euros dès lors qu'il a dû faire valoir ses droits à la retraite de manière prématurée ; - l'indemnisation de son déficit fonctionnel temporaire à raison de 1 573,74 euros ; - la réparation des souffrances endurées à hauteur de 4 000 euros ; - le versement de la somme de 11 360 euros au titre du déficit fonctionnel permanent ; - l'indemnisation de son préjudice d'agrément pour 2 272 euros. Vu l'ordonnance du 6 août 2014 par laquelle le président du tribunal administratif de Poitiers a taxé à 701 euros les frais de l'expertise confiée au professeur Gayet. Par une ordonnance du 15 mai 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 27 juin 2019 à 12 heures. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code civil ; - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - le code de la sécurité sociale ; - le code de la santé publique ; - la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ; - l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. E... ; - et les conclusions de Mme Chauvin, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. M. A... C..., qui exerçait les fonctions de directeur adjoint du centre hospitalier Nord Deux-Sèvres, a été victime le 18 décembre 2009 d'une chute dans l'escalier extérieur alors qu'il quittait un bâtiment administratif du site de Bressuire. Cet accident a été reconnu comme imputable au service par une décision du 15 septembre 2011 du directeur de l'établissement, avec un taux d'incapacité permanente partielle de 8 % et une consolidation de l'état de santé de l'intéressé au 12 septembre 2010. Estimant que la responsabilité du centre hospitalier était engagée pour défaut d'entretien normal de l'ouvrage, M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Poitiers la condamnation de l'établissement hospitalier à l'indemniser des différents préjudices en lien avec sa chute, à hauteur d'une somme totale de 28 758,90 euros. Il relève appel du jugement du 22 février 2018 par lequel le tribunal administratif a rejeté l'ensemble de ses demandes et sollicite, en appel, la condamnation du centre hospitalier du Nord Deux-Sèvres à lui verser une indemnité actualisée à 29 801,74 euros. Sur la responsabilité : 2. Les dispositions des articles L. 27 et L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite et 41 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière qui instituent, en faveur des fonctionnaires victimes d'accidents de service ou de maladies professionnelles, une rente viagère d'invalidité en cas de mise à la retraite et une allocation temporaire d'invalidité en cas de maintien en activité doivent être regardées comme ayant pour objet de réparer les pertes de revenus et l'incidence professionnelle résultant de l'incapacité physique causée par un accident de service ou une maladie professionnelle. Les dispositions instituant ces prestations déterminent forfaitairement la réparation à laquelle les fonctionnaires concernés peuvent prétendre, au titre de ces chefs de préjudice, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions. Ces dispositions ne font en revanche obstacle ni à ce que le fonctionnaire qui subit, du fait de l'invalidité ou de la maladie, des préjudices patrimoniaux d'une autre nature ou des préjudices personnels, obtienne de la personne publique qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice, ni à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre la personne publique, dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette personne ou à l'état d'un ouvrage public dont l'entretien lui incombait. 3. La circonstance que le fonctionnaire victime d'un accident de service ou d'une maladie professionnelle ne remplit pas les conditions auxquelles les dispositions mentionnées ci-dessus subordonnent l'obtention d'une rente ou d'une allocation temporaire d'invalidité fait obstacle à ce qu'il prétende, au titre de l'obligation de la collectivité qui l'emploie de le garantir contre les risques courus dans l'exercice de ses fonctions, à une indemnité réparant des pertes de revenus ou une incidence professionnelle. En revanche, elle ne saurait le priver de la possibilité d'obtenir de cette collectivité la réparation de préjudices d'une autre nature, dès lors qu'ils sont directement liés à l'accident ou à la maladie, ou la réparation intégrale de ses préjudices en cas de faute de cette même collectivité. 4. Il résulte de l'instruction que l'accident de service dont M. A... C... a été victime le 18 décembre 2009, reconnu comme imputable au service, a entraîné une incapacité permanente partielle (IPP) fixée après une double expertise contradictoire à 8 %, la pathologie de l'épaule droite que M. A... C... a présentée ultérieurement, en cours d'année 2010, n'ayant pas été reconnue comme étant en lien avec cet accident de service par les experts sollicités tant par l'administration que par le tribunal administratif en septembre 2012. Si, comme l'a justement relevé le tribunal, cette circonstance faisait obstacle à l'octroi d'une allocation temporaire d'invalidité au profit de l'intéressé et, par suite, d'une indemnité réparant les pertes de revenus ou une incidence professionnelle en l'absence de faute de son établissement employeur, elle ne privait M. A... C... ni de la possibilité d'obtenir la réparation d'autres préjudices qu'il invoquait, même en l'absence de faute, ni de celle d'obtenir la réparation intégrale du dommage dès lors que son accident serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de l'établissement ou à l'état de l'ouvrage public lui appartenant. 5. Pour rejeter les demandes indemnitaires de M. A... C..., les premiers juges ont estimé qu'il ne pouvait pas être établi de lien direct entre la pathologie de l'épaule droite dont souffre l'intéressé et l'accident de service du 18 décembre 2009. Toutefois, il ressortait des écritures du requérant, d'une part, qu'il recherchait l'engagement de la responsabilité de droit commun du centre hospitalier à raison d'un défaut d'entretien normal de l'ouvrage, et d'autre part qu'il sollicitait, à ce titre, l'indemnisation des préjudices subis à la suite de l'accident de service " à l'exclusion des préjudices liés à sa pathologie de l'épaule droite ", l'intéressé ayant expressément renoncé à la reconnaissance de cette dernière pathologie comme imputable au service. D'ailleurs, il avait sollicité et obtenu du juge des référés du tribunal l'organisation d'une nouvelle expertise, dont le rapport a été déposé le 21 juillet 2014, aux fins d'évaluer l'ensemble des préjudices subis en distinguant la part imputable à l'accident de celle ayant pour origine toute autre cause ou pathologie. Il suit de là que M. A... C... est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté ses demandes indemnitaires au seul motif d'une absence de lien de causalité entre ces dernières et sa pathologie de l'épaule droite, dont il est constant qu'elle n'est pas imputable à l'accident de service et pour laquelle M. A... C... ne sollicitait pas de réparation, et sans examiner, de surcroît, l'existence ou non d'un dommage imputable à une faute de l'établissement ou à l'état de l'ouvrage dont celui-ci avait la garde. 6. Il y a lieu, dès lors, pour la cour d'annuler le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 22 février 2018 et, statuant par la voie de l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les conclusions indemnitaires de première instance et d'appel de M. A... C.... 7. Il résulte de l'instruction, notamment des déclarations du requérant et de l'attestation du directeur du centre hospitalier Nord Deux-Sèvres du 5 juillet 2017, que l'intéressé a été victime, en cours de journée du 18 décembre 2009, d'une chute dans les escaliers d'accès au bâtiment administratif du site de Bressuire qui avaient été rendus glissants en raison de la présence de verglas à la suite de chutes de neige survenues le jour précédant. Cet escalier, qui constituait l'accès principal au bâtiment administratif en cause, n'avait pas été déneigé le matin de l'accident, plusieurs heures avant la survenance de celui-ci, alors que les données météorologiques produites témoignent de températures en dessous de 0° C la nuit précédente. Il n'est pas établi que M. A... C..., en sa qualité d'usager, aurait fait preuve d'inattention en empruntant cet escalier, alors qu'il a chuté sur la première marche en sortant du bâtiment. Dans ces conditions, le requérant est fondé à soutenir que le centre hospitalier de Nord Deux-Sèvres n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, de l'entretien normal de l'ouvrage au moment des faits. Il suit de là que la responsabilité de l'établissement est susceptible d'être engagée à raison de ce défaut d'entretien normal, M. A... C... étant, à raison de la faute commise et ainsi qu'il a été dit aux points 3 et 4, en droit de solliciter la réparation intégrale du préjudice en lien avec les conséquences dommageables de cet accident. Sur la réparation des préjudices : 8. En premier lieu, si M. A... C... sollicite la prise en charge de frais relatifs à des séances d'ostéopathie réalisées en 2015 et 2016, la seule production de deux factures et d'une attestation du 19 novembre 2015 du praticien les ayant réalisées ne saurait suffire à établir le caractère nécessaire de ces dépenses de santé en lien direct avec le dommage subi en 2009, et ce alors que l'état de M. A... C... a été regardé comme consolidé le 12 septembre 2010. La circonstance qu'il a été victime d'une rechute, le 26 septembre 2016, à une date postérieure au début de ces séances d'ostéopathie, ne saurait davantage établir de lien avec le dommage, en l'absence, en particulier, de toute prescription médicale en ce sens. Il suit de là que M. A... C... n'est pas fondé à solliciter une indemnisation à ce titre. 9. En deuxième lieu, M. A... C... sollicite l'indemnisation d'un préjudice d'incidence professionnelle au motif que l'accident de service ne lui a pas permis de prétendre à un emploi fonctionnel de chef d'établissement avant son départ à la retraite. Toutefois, si M. A... C... a bénéficié de l'agrément pour accéder aux emplois fonctionnels de chef d'établissement à compter du mois de juin 2010, il ne soutient pas avoir été empêché de postuler et n'établit pas avoir dû renoncer à un tel emploi à raison de son accident de service, alors que son état était regardé comme consolidé le 12 septembre 2010, avec un taux d'incapacité permanente partielle de 8 % dont il ne résulte pas de l'instruction, notamment des différents rapports d'expertise, qu'il aurait été incompatible avec la poursuite de l'exercice de fonctions de direction. D'ailleurs, M. A... C... a repris ses fonctions à l'issue de son arrêt de travail, le 25 février 2010, et a fait valoir ses droits à la retraite à l'âge légal, le 29 avril 2013. Dans ces conditions, l'incidence professionnelle invoquée n'est pas établie. 10. En troisième lieu, il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expertise ordonnée par le juge des référés, dont le rapport a été déposé le 10 juillet 2014, que M. A... C... a été atteint, en lien avec l'accident, d'un déficit fonctionnel temporaire partiel de classe 3 (50 %) de trois mois, du 21 décembre 2009 au 21 mars 2010, et d'un déficit fonctionnel de classe 1 (10 %) du 22 mars 2010 au 12 septembre 2010, date de consolidation de son état. Il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en le fixant à la somme de 840 euros. 11. En quatrième lieu, il résulte du rapport d'expertise précité que M. A... C... a enduré des souffrances physiques, en particulier des dorsalgies, en lien avec son accident qui peuvent être évaluées à deux sur une échelle de sept. Il en sera fait une juste appréciation en les indemnisant à hauteur d'une somme de 1 800 euros. 12. En cinquième lieu, le déficit fonctionnel permanent en lien avec le dommage subi peut, à la suite de l'expert désigné par le tribunal, être fixé à 4 %, soit 1 % pour des douleurs au niveau de la métacarpophalangienne du cinquième doigt de la main droite et 3 % pour des douleurs dorsales déclenchées de façon intermittente par des causes précises et une discrète raideur segmentaire active. Si M. A... C..., âgé de 59 ans à la date de consolidation de son état de santé, conteste le taux ainsi retenu, il ne saurait se borner à se référer à l'évaluation du taux d'incapacité permanente partielle fixé immédiatement à la suite de son accident et avant consolidation à 8 % par l'expert désigné par l'établissement, dès lors que le taux de déficit fonctionnel permanent correspond à un taux définitif fixé après consolidation de l'état de santé, ainsi que l'a souligné l'expert judiciaire. Dans ces conditions, il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en le fixant à la somme de 4 000 euros. 13. En sixième et dernier lieu, M. A... C... fait état, sans être contredit, de ce que les séquelles de l'accident dont il a été victime ne lui permettent plus d'assurer la totalité de ses activités de loisir d'attelage et d'entretien des chevaux qu'il possède, notamment du fait de la limitation de ses capacités de port de charges à 25 kg. Dans ces conditions, ce préjudice d'agrément, à caractère limité, sera justement indemnisé en le fixant à la somme de 600 euros. 14. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la régularité du jugement de première instance, que M. A... C... est fondé à demander la condamnation du centre hospitalier Nord Deux-Sèvres à lui verser une indemnité d'un montant total de 7 240 euros. Sur les intérêts et leur capitalisation : 15. M. A... C... a droit aux intérêts à compter du 14 décembre 2015, date d'introduction de sa requête devant le tribunal administratif, et à leur capitalisation à compter du 14 décembre 2016, date à laquelle une année entière d'intérêts était due, ainsi qu'à chaque échéance annuelle ultérieure. Sur les dépens de l'instance : 16. Il y a lieu, d'office, de mettre à la charge définitive du centre hospitalier Nord Deux-Sèvres les frais de l'expertise ordonnée par le tribunal administratif de Poitiers en référé, taxés à la somme de 701 euros par une ordonnance du président du tribunal, en date du 6 août 2014, sous le n° 1302577. Sur les frais exposés par les parties à l'occasion du litige : 17. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du centre hospitalier Nord Deux-Sèvres le paiement à M. A... C... de la somme globale de 2 000 euros qu'il demande sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D É C I D E : Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Poitiers n° 1503076 du 22 février 2018 est annulé. Article 2 : Le centre hospitalier Nord Deux-Sèvres est condamné à verser à M. A... C... une somme de 7 240 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 14 décembre 2015 et de la capitalisation de ces intérêts à compter du 14 décembre 2016 et à chaque échéance annuelle ultérieure. Article 3 : Les frais de l'expertise, taxés et liquidés à la somme de 701 euros, sont mis à la charge définitive du centre hospitalier Nord Deux-Sèvres. Article 4 : Le centre hospitalier Nord Deux-Sèvres versera à M. A... C... une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 5 : Le surplus des conclusions de M. A... C... est rejeté. Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. G... A... C... et au centre hospitalier Nord Deux-Sèvres. Délibéré après l'audience du 12 mai 2020 à laquelle siégeaient : Mme B... D..., présidente, M. Thierry E..., premier conseiller, Mme Marie-Pierre Beuve-Dupuy, premier conseiller. Lu en audience publique, le 9 juin 2020. La présidente, Anne D... La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. 3 No 18BX01577
Cours administrative d'appel
Bordeaux
CAA de BORDEAUX, 1ère chambre, 14/05/2020, 18BX02617, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme D... E... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision du 4 janvier 2016 par laquelle le recteur de l'académie de Toulouse a rejeté sa demande du 2 juillet 2015 tendant à l'annulation de sa mise à la retraite et à sa réintégration, ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux à l'encontre de cette décision du 4 janvier 2016, d'annuler sa demande d'admission à la retraite du 26 janvier 2015 et d'enjoindre à l'administration de la réintégrer en reconstituant sa carrière. Par un jugement n° 1602755 du 6 juin 2018, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté cette demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 6 juillet 2018, Mme E..., représentée par Me B..., demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse ; 2°) de faire droit à sa demande ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - l'arrêté du 21 avril 2015 est entaché d'erreur de droit dès lors que sa demande de mise à la retraite a été effectuée alors que son consentement était altéré, sur la base d'informations lacunaires ou erronées, et qu'elle est par la suite revenue expressément sur cette demande ; - l'arrêté du 21 avril 2015 est entaché d'un vice de procédure dès lors que l'administration était tenue de lui proposer un reclassement sur un poste aménagé ; - l'avis du comité médical départemental du Tarn du 17 septembre 2015 a été rendu selon une procédure irrégulière et est entaché d'un défaut de motivation ; - l'avis de la commission de réforme du 15 décembre 2015 est entaché d'un vice de procédure dès lors que son représentant n'a pas été convoqué ; - la décision du 4 janvier 2016 est entachée d'erreur d'appréciation dès lors que son aptitude à reprendre ses fonctions a été constatée par le médecin expert mandaté par la commission de réforme. Par un mémoire en défense, enregistré le 13 août 2019, le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse conclut au rejet de la requête. Il soutient que : - la requête présentée devant le tribunal administratif est tardive ; - les moyens invoqués ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ; - l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. A... C..., - et les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. Mme E..., chargée d'enseignement d'éducation physique et sportive de classe exceptionnelle depuis le 1er septembre 1997, a été placée en congé de longue maladie fractionné à compter du 27 février 2009. Ce congé devait prendre fin au 3 juillet 2015. Le 29 janvier 2015, Mme E... a demandé sa mise à la retraite pour invalidité à l'issue de ce congé. Par arrêté du 21 avril 2015, après avis du comité médical départemental du 19 mars 2015, la rectrice de l'académie de Toulouse l'a admise à faire valoir ses droits à la retraite à compter du 3 juillet 2015. Par courrier du 2 juillet 2015, Mme E... a demandé l'annulation de sa mise à la retraite et sa réintégration. Cette demande a été expressément rejetée par la rectrice par arrêté du 4 janvier 2016, pris après avis du comité médical départemental et de la commission de réforme. Par courrier du 2 mars 2016, par l'intermédiaire de son conseil, Mme E... a demandé à la rectrice de l'académie de Toulouse d'annuler cette décision du 4 janvier 2016 et de faire droit à sa demande de réintégration. Elle relève appel du jugement du 6 juin 2018 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions. Sur la régularité du jugement : 2. Aux termes de l'article L. 110-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Sont considérées comme des demandes au sens du présent code les demandes et les réclamations, y compris les recours gracieux ou hiérarchiques, adressées à l'administration ". Aux termes de l'article R. 421-5 du code de justice administrative : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision ". Il résulte de la combinaison de ces dispositions qu'une erreur entachant l'indication des voies et délais de recours, qui doit figurer, en vertu des dispositions législatives précitées, dans la notification d'une décision de rejet d'un recours gracieux, rend inopposable le délai de recours qui eût couru en l'absence d'erreur et qu'un tribunal administratif ne peut rejeter, comme tardive et par suite irrecevable, une demande tendant à l'annulation d'une décision que si le demandeur a été averti, dans la notification de cette décision, en des termes dépourvus d'ambiguïté, des voies et délais de recours dont il disposait effectivement. 3. Il ressort des pièces du dossier que la notification de la décision du 4 janvier 2016 de la rectrice de l'académie de Toulouse en réponse à la demande de Mme E... du 2 juillet 2015 indiquait notamment qu'un recours gracieux conservant le délai de recours contentieux pouvait être formé contre cette nouvelle décision. Si le tribunal a estimé que le recours gracieux formé le 4 mars 2016 à l'encontre de cette décision du 4 janvier 2016 constituait un second recours gracieux insusceptible de conserver le délai de recours à l'encontre de la décision du 21 avril 2015, la mention des voies et délais figurant dans la notification de la décision du 4 janvier 2016 faisait obstacle à ce que l'absence de conservation du délai de recours contentieux pût être opposée à la demande de Mme E.... Mme E... est, par suite, fondée à soutenir que c'est à tort que sa requête a été regardée comme irrecevable et rejetée, pour ce motif, par le jugement attaqué qui se trouve de ce fait entaché d'irrégularité et doit être annulé. 4. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la requête présentée par Mme E... devant le tribunal administratif de Toulouse. Sur les conclusions en annulation : 5. Les conclusions de Mme E... doivent être interprétées comme tendant à l'annulation de la décision du 21 avril 2015 l'admettant à faire valoir ses droits à la retraite et à l'annulation de la décision du 4 janvier 2016 portant rejet de sa demande d'annulation de cette décision et de réintégration ainsi que de celle du 4 mai 2016 rejetant implicitement son recours gracieux à l'encontre de cette dernière décision. En ce qui concerne l'arrêté du 21 avril 2015 : 6. Aux termes de l'article L. 29 du code des pensions civiles et militaires de retraite, dans sa rédaction applicable : " Le fonctionnaire civil qui se trouve dans l'incapacité permanente de continuer ses fonctions en raison d'une invalidité ne résultant pas du service et qui n'a pu être reclassé dans un autre corps en application de l'article 63 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précitée peut être radié des cadres par anticipation soit sur sa demande, soit d'office (...) ". 7. La circonstance que Mme E... ait changé d'avis et demandé l'annulation de sa mise à la retraite par courrier du 2 juillet 2015, soit la veille de la date de prise d'effet de l'arrêté du 21 avril 2015, n'est pas de nature à faire regarder ce dernier, dont la légalité s'apprécie à la date de sa signature, comme entaché d'erreur de droit ou reposant sur des faits matériellement inexacts. 8. Il ressort des pièces du dossier que la demande de mise à la retraite pour invalidité à l'issue de son congé de longue maladie, formulée par Mme E... le 29 janvier 2015, était claire et non équivoque et ne faisait état d'aucune volonté de sa part de reprendre le travail à l'issue de son congé de longue maladie. Par ailleurs, l'avis du comité médical départemental du 19 mars 2015, dont les termes sont repris par celui du 17 septembre 2015, faisait état d'une inaptitude totale et définitive à tout poste de travail. Enfin, si Mme E... soutient que l'administration était tenue de lui proposer un poste adapté en raison de l'amélioration de son état de santé résultant d'une intervention chirurgicale subie au mois de mai 2015, cette circonstance est postérieure à l'arrêté du 21 avril 2015 et la requérante produit seulement pour étayer cette affirmation un courrier faisant état de la réalisation d'une " infiltration échoguidée de la bourse calcanéenne droite " qui ne se prononce pas sur son état de santé général ni sur son aptitude au travail. Dès lors, le moyen tiré de ce que l'administration aurait dû proposer à la requérante un poste adapté doit être écarté. 9. Si Mme E... fait désormais valoir, en produisant un certificat médical émanant d'un médecin psychiatre, que son discernement était altéré " en décembre et janvier 2015 ", ce certificat, qui est peu circonstancié et a été établi le 9 juin 2015 postérieurement à la notification de l'arrêté du 21 avril 2015, alors que la requérante ne fournit aucun élément permettant d'expliquer pourquoi elle n'est pas revenue sur sa demande à compter du mois de février 2015, ne permet pas de regarder comme établie une telle altération de son discernement. Par ailleurs, la requérante ne fournit aucun élément à l'appui de ses affirmations selon lesquelles elle aurait effectué cette demande en raison d'informations erronées ou lacunaires concernant sa situation et le montant de sa future pension et n'indique pas davantage en quoi ces erreurs ou omissions l'auraient déterminée à faire cette demande. Par suite, le moyen tiré de ce que sa demande de mise à la retraite aurait été entachée d'un vice du consentement doit être écarté. En ce qui concerne l'arrêté du 4 janvier 2016 : 10. L'avis du comité médical départemental, qui ne lie pas l'administration, n'a pas le caractère d'une décision, et aucune disposition législative ou réglementaire n'impose sa motivation. Par suite, le moyen tiré de ce que l'avis du comité médical départemental du 15 septembre 2015 serait entaché d'irrégularité de ce fait doit être écarté. 11. Il ne résulte d'aucune disposition que le comité médical départemental soit tenu de se prononcer sur la base des éléments médicaux soumis à la commission de réforme en vue de l'examen de la situation de l'intéressé. Par suite, le moyen tiré de ce que l'avis du comité médical départemental serait irrégulier faute pour lui d'avoir attendu les résultats de l'expertise effectuée le 16 octobre 2015 par le docteur Gonzales en vue de la séance de la commission de réforme du 15 décembre 2015 doit être écarté. 12. Aux termes de l'article 19 du décret du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires : " (...) Le fonctionnaire est invité à prendre connaissance, personnellement ou par l'intermédiaire de son représentant, de la partie administrative de son dossier. Un délai minimum de huit jours doit séparer la date à laquelle cette consultation est possible de la date de la réunion de la commission de réforme ; il peut présenter des observations écrites et fournir des certificats médicaux. / La commission de réforme, si elle le juge utile, peut faire comparaître le fonctionnaire intéressé. Celui-ci peut se faire accompagner d'une personne de son choix ou demander qu'une personne de son choix soit entendue par la commission de réforme. / L'avis formulé en application du premier alinéa de l'article L. 31 du code des pensions civiles et militaires de retraite doit être accompagné de ses motifs. / Le secrétariat de la commission de réforme informe le fonctionnaire : / -de la date à laquelle la commission de réforme examinera son dossier ; / - de ses droits concernant la communication de son dossier et la possibilité de se faire entendre par la commission de réforme, de même que de faire entendre le médecin et la personne de son choix (...) ". 13. Si Mme E... soutient que l'avis de la commission de réforme du 15 décembre 2015 est irrégulier faute pour son représentant d'avoir été convoqué, il ne résulte pas des dispositions précitées que la commission de réforme soit tenue de procéder à une telle convocation. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que Mme E... a été dûment informée de la date de la séance de la commission de réforme par courrier du préfet du Tarn du 26 novembre 2015, lequel mentionnait notamment qu'elle pouvait être entendue par la commission, faire intervenir un médecin de son choix en séance et se faire assister par un conseiller. Enfin, il ressort des mentions manuscrites portées sur le procès-verbal de la séance de la commission que la requérante était présente et s'était fait accompagner. Par suite, le moyen tiré de ce que Mme E... n'a pas été mise à même de faire valoir ses droits lors de la séance de la commission de réforme doit être écarté. 14. L'article L. 242-4 du code des relations entre le public et l'administration dispose que : " Sur demande du bénéficiaire de la décision, l'administration peut, selon le cas et sans condition de délai, abroger ou retirer une décision créatrice de droits, même légale, si son retrait ou son abrogation n'est pas susceptible de porter atteinte aux droits des tiers et s'il s'agit de la remplacer par une décision plus favorable au bénéficiaire ". Si, lorsque les conditions prévues par ces dispositions sont réunies, l'auteur d'une décision peut, sans condition de délai, faire droit à une demande de retrait présentée par son bénéficiaire, il n'est toutefois pas tenu de procéder à un tel retrait, alors même que la décision serait entachée d'illégalité. Il appartient ainsi à l'auteur de la décision d'apprécier, sous le contrôle du juge, s'il peut procéder ou non au retrait, compte tenu tant de l'intérêt de celui qui l'a saisi que de celui du service. 15. Il ressort des pièces du dossier que pour refuser de faire droit à la demande de Mme E..., le recteur s'est fondé sur l'avis du comité médical départemental du 17 septembre 2015, qui a émis un avis défavorable et a confirmé son avis du 19 mars 2015 la déclarant inapte totalement et définitivement à tout poste de travail, ainsi que sur l'avis défavorable de la commission de réforme du 15 décembre 2015, laquelle a également émis un avis défavorable à la demande de Mme E.... Mme E... fait valoir que le docteur Gonzales, missionné en vue de l'examen de sa situation par la commission de réforme, indiquait pour sa part à l'issue de l'examen conduit le 16 octobre 2015 que son état de santé lui permettait de reprendre son activité professionnelle à temps complet. Toutefois, cette expertise se borne à indiquer que l'examen ne retrouve pas d'anomalie ou de raideur, alors que la requérante souffre de polyarthrite rhumatoïde et se plaint lors des opérations d'expertise de douleurs diffuses, éléments que l'expert n'analyse pas ni n'indique en quoi ils pourraient affecter l'état de santé de Mme E.... Il ne précise pas non plus le rythme des soins de rééducation dont elle bénéficie et leur compatibilité avec un travail à temps complet. Dans ces conditions, ni les conclusions de cette expertise ni le fait que le directeur départemental de la cohésion sociale et de la protection des populations ait proposé à la commission de réforme d'émettre un avis favorable à la demande de Mme E... ne permettent de regarder la décision du 4 janvier 2016 comme entachée d'une erreur d'appréciation au regard de l'intérêt de Mme E... et de celui du service. 16. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir invoquée par le recteur et le ministre, que Mme E... n'est pas fondée à demander l'annulation des décisions qu'elle attaque. Ses conclusions aux fins d'injonction ne peuvent par suite qu'être également rejetées. Sur les frais exposés par les parties à l'occasion du litige : 17. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme que demande la requérante au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. DECIDE : Article 1er : Le jugement n° 1602755 du 6 juin 2018 du tribunal administratif de Toulouse est annulé. Article 2 : La demande présentée par Mme E... devant le tribunal administratif de Toulouse et le surplus des conclusions de la requête sont rejetés. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... E... et au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse. Délibéré après l'audience du 27 février 2020 à laquelle siégeaient : Mme Brigitte Phémolant, président, M. Didier Salvi, président-assesseur, M. A... C..., premier conseiller. Lu en audience publique, le 14 mai 2020. Le président, Brigitte Phémolant La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 18BX02617
Cours administrative d'appel
Bordeaux
CAA de BORDEAUX, 2ème chambre, 12/05/2020, 19BX03858, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme B... D... a demandé au tribunal des pensions militaires de Toulouse d'annuler la décision du 16 juin 2016 par laquelle le ministre de la défense a rejeté sa demande de renouvellement de sa pension d'invalidité. Par un jugement n° 1600023 du 18 avril 2017, le tribunal des pensions militaires de Toulouse a rejeté la requête. Procédure devant la cour : Par une requête et des mémoires enregistrés les 19 juin 2017, 11 août 2017, 9 mars 2019 et 3 juin 2019, Mme D..., représentée par Me C..., demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal des pensions militaires de Toulouse du 18 avril 2017 ; 2°) d'annuler la décision du ministre de la défense du 16 juin 2016 ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Elle soutient que : - le tribunal a considéré à tort que sa maladie ne présenterait pas un caractère incurable ; la curabilité de sa pathologie psychologique, qui s'est chronicisée, n'est pas démontrée ; elle verse des éléments médicaux établissant l'incurabilité de sa maladie ; l'expertise confirme le caractère incurable de sa maladie ; elle a droit à une pension à titre définitif ; - l'absence de suivi psychiatrique ne signifie pas qu'elle serait guérie, ni même que son état se serait amélioré ; elle suit un protocole de soins depuis le 9 juillet 2013 ; son état était stable avant l'édiction de la décision attaquée, de sorte que son taux d'invalidité ne saurait être ramené à un taux inférieur à celui de 30 % jusqu'alors attribué ; l'expertise confirme qu'elle reste atteinte d'une invalidité dont le taux est de 30 %. Par des mémoires en défense enregistrés les 15 septembre 2017, 16 mai 2019 et 1er juillet 2019, le ministre des armées conclut au rejet de la requête. Il soutient que : - la requérante, dont l'état s'est amélioré, n'apporte aucun élément médical justifiant une sous-estimation de son taux d'invalidité ; - la circonstance que l'infirmité de la requérante serait incurable n'a pas d'incidence sur le taux qu'il convient de retenir ; - l'expert a retenu un taux d'invalidité de 30 % par bienveillance, afin que la requérante puisse bénéficier d'un droit à pension. Par un arrêt avant-dire droit du 2 mars 2018, la cour régionale des pensions militaires de Toulouse a ordonné une expertise médicale, aux fins de l'éclairer sur le taux d'invalidité dont Mme D... reste atteinte et de déterminer si l'infirmité causée par sa maladie peut être considérée comme incurable. L'expert désigné a remis son rapport le 6 décembre 2018. Par une ordonnance du 13 novembre 2019, la clôture de l'instruction a été fixée au 4 décembre 2019 à 12 heures. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ; - l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme E... A..., - les conclusions de Mme Aurélie Chauvin, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. Mme D..., ancien adjudant-chef de l'armée de terre rayée des cadres à compter du 16 septembre 2011, s'est vue concéder à compter du 22 mars 2007 une pension militaire d'invalidité au taux de 30 % pour un syndrome anxiodépressif. Cette pension lui a été attribuée à titre temporaire pour une durée de trois ans, et renouvelée du 22 mars 2010 au 21 mars 2013 puis du 22 mars 2013 au 21 mars 2016. L'intéressée a sollicité le 10 septembre 2015 la conversion de sa pension temporaire en pension définitive. Par une décision du 16 juin 2016, le ministre de la défense a supprimé la pension de l'intéressée au motif que son invalidité, dont le taux était désormais de 20 %, était devenue inférieure au degré indemnisable. Mme D... relève appel du jugement du 18 avril 2017 par lequel le tribunal des pensions militaires de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision. Par un arrêt avant-dire droit du 2 mars 2018, la cour régionale des pensions militaires de Toulouse a ordonné une expertise médicale aux fins de l'éclairer sur le taux d'invalidité dont Mme D... reste atteinte et de déterminer si l'infirmité causée par sa maladie peut être considérée comme incurable. Sur les conclusions à fin d'annulation : 2. La loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 relative à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025 et portant diverses dispositions intéressant la défense, et le décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018 portant transfert de compétence entre juridictions de l'ordre administratif pris pour l'application de l'article 51 de la loi précitée, et portant diverses dispositions intéressant la défense ont eu pour effet de transférer aux juridictions administratives de droit commun le contentieux des pensions militaires d'invalidité. Par suite, la cour administrative d'appel de Bordeaux est compétente pour statuer sur l'appel transmis en l'état par la cour régionale des pensions de Toulouse. 3. Aux termes de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, applicable à la date de la décision en litige : " Ouvrent droit à pension : (...) 2° Les infirmités résultant de maladies contractées par le fait ou à l'occasion du service (...) ". Aux termes de l'article L. 4 de ce code : " Les pensions sont établies d'après le degré d'invalidité. Sont prises en considération les infirmités entraînant une invalidité égale ou supérieure à 10 %. Il est concédé une pension : (...) 3° Au titre d'infirmité résultant exclusivement de maladie, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse : 30 % en cas d'infirmité unique (...) ". Aux termes de l'article L. 6 du même code : " La pension prévue par le présent code est attribuée sur demande de l'intéressé après examen, à son initiative, par une commission de réforme selon des modalités fixées par décret en Conseil d'Etat. L'entrée en jouissance est fixée à la date du dépôt de la demande. ". Il résulte de ces dispositions que l'évaluation de l'invalidité au titre de laquelle la demande de pension est sollicitée doit être faite à la date de demande de la pension. L'article L. 7 de ce code disposait : " Il y a droit à pension définitive quand l'infirmité causée par la blessure ou la maladie est reconnue incurable. Il y a droit à pension temporaire si elle n'est pas reconnue incurable ". Aux termes de l'article L. 8 de ce code : " La pension temporaire est concédée pour trois années. Elle est renouvelable par périodes triennales après examens médicaux. (...) Au cas où une infirmité, ouvrant droit à pension, associée ou non à d'autres, résulte de maladies, la pension temporaire est, à l'expiration de chaque période, soit renouvelée à un taux supérieur, égal ou inférieur au taux primitif, soit supprimée si l'invalidité a disparu ou est devenue inférieure au degré indemnisable. Dans les mêmes conditions, la situation du pensionné temporaire doit, à l'expiration du délai de neuf ans qui suit le point de départ légal défini à l'article L. 6, être définitivement fixée soit par la conversion de la pension temporaire en pension définitive, sous réserve toutefois de l'application de l'article L. 29, soit par la suppression de toute pension (...) ". L'article L.29 prévoyait alors que " Le titulaire d'une pension d'invalidité concédée à titre définitif peut en demander la révision en invoquant l'aggravation d'une ou plusieurs infirmités en raison desquelles cette pension a été accordée. Cette demande est recevable sans condition de délai. La pension ayant fait l'objet de la demande est révisée lorsque le degré d'invalidité résultant de l'infirmité ou de l'ensemble des infirmités est reconnu supérieur de 10 % au moins du pourcentage antérieur. Toutefois, l'aggravation ne peut être prise en considération que si le supplément d'invalidité est exclusivement imputable aux blessures et aux maladies constitutives des infirmités pour lesquelles la pension a été accordée. La pension définitive révisée est concédée à titre définitif ". Aux termes de l'article L. 26 du même code : " Toute décision administrative ou judiciaire relative à l'évaluation de l'invalidité doit être motivée par des raisons médicales et comporter, avec le diagnostic de l'infirmité, une description complète faisant ressortir la gêne fonctionnelle et, s'il y a lieu, l'atteinte de l'état général qui justifient le pourcentage attribué ". En vertu des articles R. 11 à R. 18 du même code, relatifs à l'instruction des demandes de pension, l'instruction médicale d'une demande de pension est confiée à un médecin, qualifié de médecin-expert. A l'issue de cette instruction médicale, un constat provisoire des droits à pension est notifié au demandeur, qui dispose d'un délai de quinze jours après cette notification pour demander l'examen de son dossier par la commission de réforme. Cette commission, composée d'un médecin-chef des services ou un médecin en chef nommé par le ministre de la défense et de deux officiers, émet un avis communiqué au demandeur, portant notamment sur l'imputabilité au service, le degré d'invalidité et le caractère permanent des affections. 4. Mme D..., atteinte d'un syndrome anxiodépressif regardé comme imputable au service, soutient que sa maladie entraîne un degré d'invalidité d'au moins 30 %. Toutefois, le Dr Barotto, psychiatre et médecin-expert qui avait déjà examiné l'intéressée le 10 octobre 2012 lors de l'instruction médicale de sa demande de renouvellement de sa pension temporaire, relève dans son rapport établi le 13 janvier 2016 que Mme D... a repris des activités, notamment sportives, décrit un " léger mieux ", ne prend aucun traitement médicamenteux et ne suit plus de psychothérapie depuis 2012. Elle en déduit que son état s'est amélioré, et évalue le taux d'invalidité résultant de ses troubles psychologiques à 20 %. Lors de sa séance du 15 juin 2016, la commission de réforme des pensions, qui comprend notamment un médecin, après avoir relevé que la requérante présentait " un syndrome anxiodépressif sans suivi spécialisé en légère amélioration ", a également estimé que son taux d'invalidité, initialement fixé à 30 %, devait désormais être évalué à 20 %. Si la requérante fait valoir que ses troubles psychologiques se sont chronicisés et présentent un caractère incurable, et produit à l'appui de cette affirmation des certificats médicaux établis les 7 et 13 février 2017 par deux psychiatres, cette circonstance, à la supposer établie, est sans incidence sur l'évaluation du taux d'invalidité résultant de sa maladie. Par ailleurs, si le Dr Raynal, psychiatre, mentionne dans un certificat établi le 25 mai 2016 qu'il prodigue des soins à Mme D..., cette seule indication, dénuée de toute précision sur la teneur ou la fréquence des soins, ne permet pas d'établir que la requérante aurait effectivement bénéficié d'un suivi spécialisé régulier entre 2012 et 2016. De plus, ni ce certificat, qui précise que les troubles psychologiques de la requérante se sont aggravés depuis qu'elle a pris connaissance, en mai 2016, du constat provisoire de ses droits à pension modifiant à la baisse son taux d'invalidité, ni aucun autre élément médical versé au dossier ne remettent en cause l'amélioration constatée entre 2012 et 2016, amélioration que Mme D... a elle-même décrite au cours de l'instruction médicale de sa demande de conversion de sa pension temporaire en pension définitive. Enfin, l'expertise ordonnée avant-dire droit par la cour des pensions militaires de Toulouse se borne à confirmer l'imputabilité de la maladie en cause au service, imputabilité qui n'est pas discutée dans le cadre du présent litige, et indique que Mme D... " décrit un statu quo " et que, pour cette dernière, " la reconnaissance de son invalidité, à la hauteur de ce qu'elle estime être son préjudice (...) est la condition sine qua non de son homéostasie psychique ". Ainsi que le fait valoir le ministre des armées, l'expert évalue à 30 % le taux d'invalidité de la requérante en se fondant, non pas sur sa propre analyse de son état de santé, mais sur les attentes de cette dernière, sans nullement remettre en cause l'existence d'une amélioration entre 2012 et 2016. Dans ces conditions, et ainsi que l'a estimé le tribunal, c'est par une exacte application des dispositions citées ci-dessus que le ministre de la défense a, par sa décision du 16 juin 2016, supprimé la pension de l'intéressée au motif que son taux d'invalidité était désormais de 20 %, soit un taux inférieur au degré indemnisable. Sur l'application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 : 5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, le versement de quelque somme que ce soit au titre des articles L.761-1 du code de justice administrative ou 37 de la loi du 10 juillet 1991. DÉCIDE : Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... D..., à la ministre des armées et à l'expert. Délibéré après l'audience du 25 février 2020 à laquelle siégeaient : Mme Catherine Girault, président, Mme Anne Meyer, président-assesseur, Mme E... A..., premier conseiller. Lu en audience publique, le 12 mai 2020. Le président de la 2ème chambre, Catherine Girault La République mande et ordonne à la ministre des armées en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. N°19BX03858 3
Cours administrative d'appel
Bordeaux
CAA de BORDEAUX, 2ème chambre, 12/05/2020, 19BX04072, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. D... B... a demandé au tribunal des pensions militaires d'invalidité de Bordeaux d'annuler la décision du 6 juillet 2010 par laquelle le ministre de la défense a rejeté sa demande tendant à l'obtention d'une pension militaire d'invalidité au titre d'infirmités contractées en Indochine. Par un jugement n° RG 11/00071 du 24 juillet 2013, le tribunal des pensions de Bordeaux a rejeté sa demande. Par un arrêt n° 13/02941 du 17 mars 2015, la cour régionale des pensions de Bordeaux a rejeté l'appel formé par M. B.... Par une décision n° 392162 du 17 mars 2017, le Conseil d'Etat a annulé cet arrêt et renvoyé l'affaire devant la cour régionale des pensions de Bordeaux. Procédure devant la cour : Par sa requête et ses mémoires récapitulatifs, enregistrés les 10 octobre 2013, 16 septembre 2014 et 27 janvier 2015 devant la cour régionale des pensions de Bordeaux, M. B..., représenté par Me A..., demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal des pensions militaires d'invalidité de la Gironde du 24 juillet 2013 ; 2°) à titre principal, de faire droit à sa demande de pension formulée le 14 juin 2008 ; 3°) à titre subsidiaire d'ordonner une enquête administrative afin de déterminer son identité et sa filiation exacte. M. B... soutient que : - son recours est recevable dès lors que son recours gracieux du 18 février 2011 a conservé les délais de recours ; - il a servi comme soldat combattant au sein de l'armée française et a été fait prisonnier de guerre par le Viet-Minh entre le 8 mai 1954 et le 25 août 1954 ; - cette incarcération a concouru à son état de santé précaire, notamment une cécité moyenne ; - son enregistrement à l'état civil en 1961 a été réalisé de manière incorrecte ; - il est effectivement né en 1933 et sa mère se prénomme Aicha fille de Mohamed ; - son état civil a été rectifié devant le tribunal de première instance de Oued Zem par un jugement du 13 décembre 2010 ; il produit, en outre, un document établissant sa filiation sur l'acte de naissance ; - l'expertise médicale a reconnu ses incapacités en lien avec ses périodes militaires. Par des mémoires en défense, enregistrés le 16 septembre 2014 et le 31 août 2017, le ministre des armées demande à la cour de dire si les deux identités en cause correspondent à une seule personne et de renvoyer dans l'affirmative le calcul de la pension à l'administration. Il fait valoir que : - le Conseil d'Etat a considéré que la forclusion ne pouvait être opposée à la requête de M. B... devant le tribunal des pensions ; - sur le fond, l'identité de personnes entre le requérant et l'ancien prisonnier militaire nommé Brahim B. Amor B. Abdelkader né en 1933 est douteuse. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; - la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 et notamment son article 51 ; - le décret n° 59-327 du 20 février 1959 ; - l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. C... ; - et les conclusions de Mme Chauvin, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. Par une lettre enregistrée le 19 juin 2008, M. D... B... a sollicité du ministre de la défense l'attribution d'une pension militaire d'invalidité au titre d'infirmités contractées lors de la guerre d'Indochine en 1954. Sa demande a été rejetée le 6 juillet 2010 par le ministre de la défense. Par un jugement en date du 24 juillet 2013, le tribunal des pensions militaires d'invalidité de la Gironde a rejeté comme étant irrecevable la requête de M. B... tendant à l'annulation de cette décision. Par un arrêt du 17 mars 2015, la cour régionale de pensions de Bordeaux a rejeté l'appel formé par M. B.... Par une décision du 17 mars 2017, le Conseil d'Etat a annulé l'arrêt de la cour du 17 mars 2015 et renvoyé l'affaire devant cette cour. En vertu des dispositions de la loi ° 2018-607 du 13 juillet 2018, désormais codifiées dans le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, l'affaire étant en état d'être jugée, il appartient désormais à la cour administrative d'appel de statuer sur la demande de M. B.... Sur la régularité du jugement du tribunal des pensions militaires d'invalidité de Bordeaux du 24 juillet 2013 : 2. Il résulte du dernier alinéa de l'article L. 25 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, alors en vigueur, que la notification des décisions prises en matière de pensions militaires doit mentionner que le délai de recours contentieux court à partir de cette notification et que les décisions confirmatives à intervenir n'ouvrent pas de nouveau délai de recours. L'article 5 du décret du 20 février 1959 relatif aux juridictions des pensions, alors en vigueur, prévoit que ces décisions sont susceptibles, dans le délai de six mois à compter de leur notification, de recours devant le tribunal des pensions, ce délai étant prorogé de deux mois lorsque l'intéressé réside à l'étranger en application de l'article 643 du code de procédure civile. Ni ces dispositions ni aucune autre disposition législative ou réglementaire ne font obstacle à ce que le destinataire de la décision forme un recours gracieux, prorogeant le délai de recours contentieux, contre celle-ci. Sont, à cet égard, sans incidence les circonstances qu'en vertu de l'article L. 25 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, la notification des décisions doit mentionner que les décisions confirmatives à intervenir n'ouvrent pas de nouveau délai de recours et que l'article 6 du décret du 20 février 1959 organise une procédure préalable de conciliation entre l'administration et l'intéressé lorsque le tribunal des pensions, statuant comme juge du plein contentieux, est saisi d'un recours contre cette décision. 3. Il ressort des énonciations du jugement attaqué en date du 24 juillet 2013 que, pour juger tardive la demande de M. B..., le tribunal des pensions militaires d'invalidité de Bordeaux s'est fondé sur la circonstance que le recours gracieux formé par l'intéressé dans le délai de recours contentieux n'avait pas prorogé ce dernier. Il résulte toutefois de ce qui a été dit au point précédent qu'en statuant ainsi, le tribunal a entaché son jugement d'une erreur de droit. M. B..., qui réside au Maroc, ayant formé un recours gracieux le 18 février 2011 contre la décision du 6 juillet 2010, soit dans le délai règlementaire de six mois prolongé pour distance de deux mois qui lui était imparti, ce recours a eu pour effet de conserver le délai de recours contentieux dès lors que la décision de rejet de ce recours gracieux, en date du 14 mars 2011, ne comportait pas l'indication des voies et délais de recours. Il suit de là que la requête de l'intéressé, introduite le 21 juillet 2011, n'était pas tardive. Par suite, M. B... est fondé à demander l'annulation du jugement qu'il attaque. Il y a lieu pour la cour, en vertu notamment des dispositions du V de l'article 51 de la loi du 13 juillet 2018, d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions de la demande de M. B... telles que présentées en première instance et en appel. Sur les conclusions aux fins d'annulation de la décision du 6 juillet 2010 du ministre de la défense : 4. Aux termes de l'article L. 111-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " Ont vocation à bénéficier des dispositions du présent livre les militaires remplissant les conditions d'ouverture du droit prévues au titre II et relevant des forces armées françaises, en tant qu'appelés, volontaires, militaires servant sous contrat, militaires de carrière ou réservistes, ainsi que les fonctionnaires en détachement en qualité de militaires (...) ". Aux termes de l'article L. 121-3 du même code, s'agissant des règles d'imputabilité et des conditions d'ouverture du droit à pension aux militaires : " La présomption bénéficie aux prisonniers de guerre et internés à l'étranger dans des conditions prévues par décret en Conseil d'Etat ". L'article L. 122-2 de ce même code dispose que : " Les personnes en possession du titre de prisonnier du Viet-Minh mentionné à l'article L. 345-1 bénéficient de la présomption d'origine sans condition de délai pour les infirmités résultant de maladie ". Enfin, l'article L. 345-1 de ce même code précise : " Le titre de prisonnier du Viet-Minh est attribué aux militaires de l'armée française et aux Français ou ressortissants français qui, capturés par l'organisation dite " Viet-Minh " entre le 16 août 1945 et le 20 juillet 1954, sont décédés en détention ou sont restés détenus pendant au moins trois mois (...) ". 5. Pour rejeter la demande de pension militaire d'invalidité formée le 14 juin 2008 par M. B..., qui se prévalait de sa situation d'ancien prisonnier de guerre du Viet-Minh du 8 mai 1954 au 25 août 1954, le ministre chargé de la défense a considéré qu'il n'y avait pas " identité de personne entre M. D... B..., né en 1940 d'Amer, fils E... et d'Aïcha, fille de Larbi et l'ex-militaire Brahim b. Amor b. Abdelkader né en 1933 de Amor Ben Abdelkader et de Aïcha Ben Mohamed. En effet, l'intéressé ne peut s'être engagé dans l'armée française à l'âge de 13 ans et avoir été capturé en Indochine à l'âge de 14 ans ". 6. Il résulte toutefois de l'instruction, notamment des pièces produites par M. B... devant le tribunal des pensions militaires de Bordeaux, que par un jugement du 13 décembre 2010 dont l'authenticité n'est pas contestée, le tribunal de première instance de Oued Zem (Maroc) a procédé à la rectification de la date de naissance de M. D... B... ainsi que du prénom de son grand-père maternel et a jugé que l'intéressé était né le 1er janvier 1933 de sa mère Aicha, fille de Mohamed, au lieu du 1er janvier 1940 de sa mère Aicha, fille de Larbi et a, en conséquence, ordonné à l'officier d'état civil de la commune de Oued Zem de modifier l'acte de naissance de l'intéressé n° 1824/1961. Par ailleurs, M. B... a produit la copie intégrale de l'acte d'état civil ainsi rectifié le 25 janvier 2011 faisant état de sa naissance le 1er janvier 1933 de Amor, fils E... et d'Aicha, fille de Mohamed. Enfin, il est constant que le requérant avait produit tant devant le ministre de la défense que devant les premiers juges sa carte de combattant délivrée par le ministre de la défense le 21 décembre 2007, sa carte de prisonnier du Viet-Minh entre le 8 mai 1954 et le 25 août 1954, établie le 7 mai 2008 par le secrétaire d'Etat aux anciens combattants et victimes de guerre, et un feuillet nominatif de contrôle du 4 janvier 2008 attestant notamment des services militaires effectués et de sa situation de prisonnier de guerre pour la période précitée. Il suit de là que c'est à tort que le ministre de la défense a rejeté la demande de M. B... au motif d'une absence d'identité de personne entre le demandeur et l'ancien militaire prisonnier de guerre du Viet-Minh dénommé Brahim B.... Il résulte de tout ce qui précède que M. B... est fondé à demander l'annulation de la décision du ministre de la défense du 6 juillet 2010, ensemble la décision du 14 mars 2011 de rejet de son recours gracieux. 7. En vertu du deuxième alinéa de l'article L. 911-1 du code de justice administrative et des dispositions précitées au point 4, l'annulation des décisions contestées, eu égard au motif retenu et compte tenu de l'avis émis par la commission consultative médicale le 23 novembre 2009 et du procès-verbal de la commission de réforme des pensions militaires d'invalidité du 4 mars 2010, implique nécessairement que la ministre des armées accorde à M. D... B... le bénéfice d'une pension militaire d'invalidité. L'état de l'instruction du dossier ne permettant pas à la cour de déterminer le montant exact des droits de M. B..., il y a lieu, comme le demande d'ailleurs le ministre, de renvoyer l'intéressé vers la sous-direction des pensions du ministère des armées aux fins de liquidation de ses droits à pension, sur la base des avis médicaux figurant au dossier, et ce dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement n° RG 11/00071 du 24 juillet 2013 du tribunal des pensions militaires d'invalidité de Bordeaux est annulé. Article 2 : La décision du ministre de la défense du 6 juillet 2010 et la décision du 14 mars 2011 de rejet du recours gracieux de M. B... sont annulées. Article 3 : Il est enjoint à la ministre des armées de procéder à la liquidation des droits à pension militaire d'invalidité de M. D... B... dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B... et à la ministre des armées. Délibéré après l'audience du 11 février 2020 à laquelle siégeaient : Mme Catherine Girault, président, Mme Anne Meyer, président-assesseur, M. Thierry C..., premier conseiller, Lu en audience publique, le 12 mai 2020. Le président de la 2ème chambre, Catherine Girault La République mande et ordonne à la ministre des armées en ce qui la concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. 2 No 19BX04072
Cours administrative d'appel
Bordeaux
Conseil d'État, 9ème - 10ème chambres réunies, 05/06/2020, 430437, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 6 mai 2019 et 15 janvier 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le syndicat national solidaire unitaire et démocratique de sapeurs-pompiers professionnels, agents techniques et administratifs des services départementaux d'incendie et de secours, branche retraités (SUD SDIS Retraités) demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite de rejet née du silence gardé par le Premier ministre sur sa demande du 4 janvier 2019 tendant à l'abrogation du second alinéa de l'article 18 du décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales ; 2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ; - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que son protocole additionnel ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 et la loi organique n° 2020-365 du 30 mars 2020 ; - la loi n° 90-1067 du 28 novembre 1990 ; - le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 ; - le code de justice administrative et l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Cécile Nissen, maître des requêtes en service extraordinaire, - les conclusions de Mme Emilie Bokdam-Tognetti, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Thouvenin, Coudray, Grevy, avocat du Syndicat National Sud Sapeurs-pompiers Professionnels, Agents Retraites ;Considérant ce qui suit : Sur la question prioritaire de constitutionnalité : 1. Aux termes du premier alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : " Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé, y compris pour la première fois en cassation, à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat (...) ". Il résulte des dispositions de ce même article que le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux. 2. Aux termes de l'article 17 de la loi du 28 novembre 1990 relative à la fonction publique territoriale et portant modification de certains articles du code des communes dans sa rédaction issue de la loi du 27 décembre 2016 relative aux sapeurs-pompiers professionnels et aux sapeurs-pompiers volontaires : " A partir du 1er janvier 1991, les sapeurs-pompiers professionnels, y compris ceux occupant ou ayant occupé les emplois de directeurs départementaux et directeurs départementaux adjoints des services d'incendie et de secours, bénéficient de la prise en compte de l'indemnité de feu pour le calcul de la pension de retraite ainsi que pour les retenues pour pension dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. / La jouissance de la majoration de pension résultant de l'intégration de cette indemnité est subordonnée à l'accomplissement d'une durée de services effectifs de dix-sept ans en qualité de sapeur-pompier professionnel, y compris la durée accomplie sur les emplois de directeur départemental et de directeur départemental adjoint des services d'incendie et de secours, et est différée jusqu'à l'âge de cinquante-sept ans, ces deux dernières conditions n'étant pas applicables aux sapeurs-pompiers professionnels qui sont radiés des cadres ou mis à la retraite pour invalidité et aux ayants cause de ces fonctionnaires décédés avant leur admission à la retraite. Toutefois, seules les années de services accomplies en qualité de sapeur-pompier professionnel, y compris les services accomplis sur les emplois de directeur départemental et de directeur départemental adjoint des services d'incendie et de secours, entrent en ligne de compte pour le calcul de cette majoration de pension. / Pour permettre la prise en compte progressive de l'indemnité de feu dans leur pension, la retenue pour pension actuellement supportée par les intéressés est majorée dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. Les collectivités employeurs supportent pour les mêmes personnels une contribution supplémentaire fixée dans les mêmes conditions. Ces taux peuvent en tant que de besoin être majorés par décret en Conseil d'Etat pour couvrir les dépenses supplémentaires résultant des dispositions de la présente loi pour la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales. / La prise en compte de cette indemnité sera réalisée progressivement du 1er janvier 1991 au 1er janvier 2003 ". 3. Le syndicat SUD SDIS Retraités soutient que les dispositions de l'article 17 de la loi du 28 novembre 1990 relative à la fonction publique territoriale et portant modification de certains articles du code des communes méconnaissent le principe d'égalité garanti par l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, en ce qu'elles prévoient que seules les années de service accomplies en qualité de sapeur-pompier professionnel doivent être comptabilisées pour le calcul de la majoration de pension au titre de l'indemnité de feu. Selon le syndicat requérant, ces dispositions créeraient une différence de traitement non justifiée, d'une part entre les sapeurs-pompiers professionnels ayant accompli toute leur carrière en cette qualité et ceux qui ont effectué une partie de leur carrière comme sapeur-pompier de Paris ou marin-pompier de Marseille, d'autre part entre les sapeurs-pompiers professionnels et d'autres agents comme les policiers, les gendarmes ou les personnels de l'administration pénitentiaire. 4. Aux termes de l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, la loi " doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse ". Le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit. 5. D'une part, il résulte de l'article 17 de la loi du 28 novembre 1990 que le législateur a institué une majoration de pension liée à la prise en compte de l'indemnité de feu versée aux sapeurs-pompiers professionnels en contrepartie de retenues pour pension prélevées pendant la durée de perception de cette indemnité. Dès lors, les fonctionnaires territoriaux relevant du cadre d'emplois des sapeurs-pompiers professionnels qui ont effectué une partie de leur carrière en tant que militaires au sein de la brigade des sapeurs-pompiers de Paris ou du bataillon des marins-pompiers de Marseille, période au cours de laquelle ils n'ont pas bénéficié de l'indemnité de feu et n'ont pas été soumis à la retenue pour pension correspondante, ne sont pas, au regard de l'objet de la loi, dans la même situation que les sapeurs-pompiers professionnels qui ont effectué l'intégralité de leur carrière en qualité de fonctionnaires territoriaux. 6. D'autre part, le principe d'égalité de traitement dans le déroulement de la carrière des fonctionnaires, qui découle de l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, n'est susceptible de s'appliquer qu'entre les agents appartenant à un même corps ou à un même cadre d'emplois, y compris au regard des règles de liquidation de leur pension. Par suite, ne peut qu'être écartée l'invocation du principe d'égalité au regard de la situation des policiers, gendarmes ou agents de l'administration pénitentiaire, qui ne relèvent pas du cadre d'emplois des sapeurs-pompiers professionnels et ne perçoivent pas l'indemnité de feu. 7. Il résulte de ce qui précède que la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par le syndicat, qui n'est pas nouvelle, ne présente pas un caractère sérieux. Par suite, il n'y a pas lieu de la renvoyer au Conseil constitutionnel. Sur la requête du syndicat SUD SDIS Retraités visant à l'annulation de la décision implicite de rejet du Premier ministre : 8. Le syndicat SUD SDIS Retraités demande l'annulation du refus implicite du Premier ministre d'abroger le second alinéa de l'article 18 du décret du 26 décembre 2003 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales. L'effet utile de l'annulation pour excès de pouvoir du refus d'abroger un acte réglementaire illégal réside dans l'obligation, que le juge peut prescrire d'office en vertu des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, pour l'autorité compétente, de procéder à l'abrogation de cet acte afin que cessent les atteintes illégales que son maintien en vigueur porte à l'ordre juridique. Lorsqu'il est saisi de conclusions aux fins d'annulation du refus d'abroger un acte réglementaire, le juge de l'excès de pouvoir est conduit à apprécier la légalité de l'acte réglementaire dont l'abrogation a été demandée au regard des règles applicables à la date de sa décision. 9. Aux termes de l'article 18 du décret du 26 décembre 2003 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales : " Les indices servant pour la liquidation des pensions de retraite des sapeurs-pompiers et de leurs ayants cause qui ont exercé pendant au moins dix-sept ans en qualité de sapeurs-pompiers professionnels sont majorés dans les conditions prévues à l'article 17 de la loi du 28 novembre 1990 susvisée. / La majoration de la pension de retraite des sapeurs-pompiers qui n'ont pas effectué la totalité de leur carrière en qualité de sapeurs-pompiers professionnels, liquidée sur la base du dernier indice brut détenu au cours des six derniers mois en qualité de sapeur-pompier professionnel, est calculée proportionnellement à la durée des services accomplis en qualité de sapeur-pompier professionnel ". Il résulte de la combinaison de ces dispositions et de celles qui sont citées au point 2 ci-dessus que la majoration de pension liée à la prise en compte de l'indemnité de feu est calculée en établissant le rapport entre le temps de service effectif de l'agent en cause au cours de l'ensemble de sa carrière et le temps de service qu'il a accompli en qualité de sapeur-pompier professionnel. 10. En premier lieu, en fixant les conditions de la prise en compte de l'indemnité de feu pour le calcul de la pension de retraite des sapeurs-pompiers professionnels, y compris les modalités selon lesquelles seules les années de services accomplies en qualité de sapeur-pompier professionnel sont prises en compte pour le calcul de cette majoration de pension, le pouvoir réglementaire s'est borné à préciser les modalités d'application des dispositions de l'article 17 de la loi du 28 novembre 1990. Par suite, le moyen de la requête tiré de ce que les dispositions du second alinéa de l'article 18 du décret du 26 décembre 2003 auraient été édictées par une autorité incompétente ne peut qu'être écarté. 11. En deuxième lieu, ainsi qu'il a été dit aux points 5 et 6 ci-dessus, les moyens tirés de ce que les dispositions attaquées du décret du 26 décembre 2003, d'une part, créeraient une inégalité de traitement entre les sapeurs-pompiers professionnels ayant exercé toute leur carrière dans ce cadre d'emplois et les sapeurs-pompiers professionnels ayant exercé une partie de leur carrière en tant que sapeurs-pompiers de Paris ou marins-pompiers de Marseille et, d'autre part, institueraient une disparité de traitement entre les sapeurs-pompiers professionnels et les fonctionnaires de la police nationale, les militaires de la gendarmerie nationale et les personnels de l'administration pénitentiaire ne peuvent qu'être écartés. 12. En troisième lieu, aux termes de l'article 1er du protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international ". Si le droit à l'allocation d'une pension de retraite pour les sapeurs-pompiers professionnels ainsi que le droit à la majoration de cette pension par l'intégration, dans son calcul, de l'indemnité de feu constituent, pour les sapeurs-pompiers professionnels qui remplissent les conditions légales pour les obtenir, des biens au sens de ces stipulations, cette majoration liée à la prise en compte de l'indemnité de feu a pour contrepartie les retenues pour pension prélevées pendant la durée de perception de cette indemnité. Par suite, les dispositions contestées, en ne prenant pas en compte, dans le calcul de la majoration de pension, des années au cours desquelles les retenues pour pension n'ont pas été prélevées, ne peuvent être regardées, en l'absence de cette contrepartie, comme privant d'un bien les personnes intéressées. Dès lors, ne peut qu'être écarté le moyen tiré de ce que les stipulations de l'article 1er du protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales auraient été méconnues. 13. Il résulte de tout ce qui précède que le syndicat SUD SDIS Retraités n'est pas fondé à demander l'annulation pour excès de pouvoir de la décision qu'il attaque. 14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise, à ce titre, à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.D E C I D E : -------------- Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par le syndicat SUD SDIS Retraités. Article 2 : La requête du syndicat SUD SDIS Retraités est rejetée. Article 3 : La présente décision sera notifiée au syndicat SUD SDIS Retraités, au Premier ministre, au ministre de l'intérieur et au ministre de l'action et des comptes publics. Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel.ECLI:FR:CECHR:2020:430437.20200605
Conseil d'Etat
CAA de VERSAILLES, 6ème chambre, 05/06/2020, 17VE02057, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... C... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 7 juillet 2016 de la rectrice de l'académie de Créteil le radiant des cadres de la fonction publique, et d'enjoindre à cette autorité de procéder à sa réintégration avec reconstitution de carrière et de mettre en oeuvre la procédure d'aménagement de poste ou de reclassement prévue par la loi. Par un jugement n° 1610196 du 26 avril 2017, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté cette demande. Procédure devant la Cour : Par une requête, enregistrée le 26 juin 2017, M. C..., représenté par Me Quillardet, avocat, demande à la Cour : 1° d'annuler ce jugement et l'arrêté du 7 juillet 2016 de la rectrice de l'académie de Créteil ; 2° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - il remplissait les conditions pour l'octroi d'un congé de longue maladie ; - en transformant la demande de congé de longue maladie en déclaration d'inaptitude à toutes fonctions, le comité médical et la rectrice ont privé de base légale la décision attaquée ; - la procédure de déclaration d'inaptitude est entachée d'un vice de procédure ; - il est apte à occuper un poste administratif. ............................................................................................ Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - le décret n° 84-1051 du 30 novembre 1984 ; - le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ; - le code de justice administrative et l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif, modifiée. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. A..., - et les conclusions de M. Errera, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. M. C..., professeur certifié de classe normale, a sollicité son placement en congé de longue maladie, ce qui lui a été refusé par arrêté du 25 mars 2015 de la rectrice de l'académie de Créteil, pris après avis défavorable, en date du 10 mars 2015, du comité médical départemental de la Seine-Saint-Denis, lequel a également émis un avis favorable à l'inaptitude totale et définitive à toutes fonctions du requérant à compter du même jour. Par arrêté de la rectrice du 7 juillet 2016, il a été, sur sa demande, radié des cadres et admis à faire valoir ses droits à une pension de retraite pour invalidité à compter du 22 mars 2015. Suite à cet arrêté, il a sollicité le réexamen de son dossier médical par le comité médical départemental qui a émis le 20 septembre 2016 un avis d'inaptitude définitive à toutes fonctions. M. C... relève appel du jugement du 26 avril 2017 du Tribunal administratif de Montreuil rejetant sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 juillet 2016 de la rectrice de l'académie de Créteil. 2. Aux termes de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat : " Le fonctionnaire en activité a droit : / (...) 3° A des congés de longue maladie d'une durée maximale de trois ans dans les cas où il est constaté que la maladie A... l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, rend nécessaire un traitement et des soins prolongés et qu'elle présente un caractère invalidant et de gravité confirmée. Le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement pendant un an ; le traitement est réduit de moitié pendant les deux années qui suivent. L'intéressé conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. (...) ". Aux termes de l'article 63 de cette loi : " Lorsque les fonctionnaires sont reconnus, par suite d'altération de leur état physique, inaptes à l'exercice de leurs fonctions, le poste de travail auquel ils sont affectés est adapté à leur état physique. Lorsque l'adaptation du poste de travail n'est pas possible, ces fonctionnaires peuvent être reclassés dans des emplois d'un autre corps s'ils ont été déclarés en mesure de remplir les fonctions correspondantes (...) ". L'article 1er du décret du 30 novembre 1984 pris en application de l'article précité énonce que : " Lorsqu'un fonctionnaire n'est plus en mesure d'exercer ses fonctions, de façon temporaire ou permanente, et si les nécessités du service ne permettent pas un aménagement des conditions de travail, l'administration, après avis du médecin de prévention, dans l'hypothèse où l'état de ce fonctionnaire n'a pas rendu nécessaire l'octroi d'un congé de maladie, ou du comité médical si un tel congé a été accordé, peut affecter ce fonctionnaire dans un emploi de son grade, dans lequel les conditions de service sont de nature à permettre à l'intéressé d'assurer les fonctions correspondantes ". Enfin, aux termes de l'article 7 du décret du 14 mars 1986 susvisé : " Les comités médicaux sont chargés de donner à l'autorité compétente, dans les conditions fixées par le présent décret, un avis sur les contestations d'ordre médical qui peuvent s'élever à propos de l'admission des candidats aux emplois publics, de l'octroi et du renouvellement des congés de maladie et de la réintégration à l'issue de ces congés. Ils sont consultés obligatoirement en ce qui concerne : / (...) 2. L'octroi des congés de longue maladie et de longue durée (...) ". 3. Aux termes de l'article 24 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " La cessation définitive de fonctions qui entraîne radiation des cadres et perte de la qualité de fonctionnaire résulte : 1° De l'admission à la retraite (...) ". Aux termes de l'article L. 29 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " Le fonctionnaire civil qui se trouve dans l'incapacité permanente de continuer ses fonctions en raison d'une invalidité ne résultant pas du service et qui n'a pu être reclassé dans un autre corps en application de l'article 63 de la loi nº 84-16 du 11 janvier 1984 précitée peut être radié des cadres par anticipation soit sur sa demande, soit d'office (...) ". Aux termes de l'article L. 31 du même code : " La réalité des infirmités invoquées, la preuve de leur imputabilité au service, le taux d'invalidité qu'elles entraînent, l'incapacité permanente à l'exercice des fonctions sont appréciées par une commission de réforme selon des modalités qui sont fixées par un décret en Conseil d'Etat. / Le pouvoir de décision appartient, dans tous les cas, au ministre dont relève l'agent et au ministre des finances. / Nonobstant toutes dispositions contraires, et notamment celles relatives au secret professionnel, tous renseignements médicaux ou pièces médicales dont la production est indispensable pour l'examen des droits définis par le présent chapitre pourront être communiqués sur leur demande aux services administratifs placés sous l'autorité des ministres auxquels appartient le pouvoir de décision et dont les agents sont eux-mêmes tenus au secret professionnel ". L'article 13 du décret du 14 mars 1986 susvisé dispose que : " La commission de réforme est consultée notamment sur : / (...) 6. L'application des dispositions du code des pensions civiles et militaires de retraite (...) ". 4. En premier lieu, M. C... soutient que la procédure d'édiction de l'arrêté contesté est viciée, dès lors que la seconde expertise médicale diligentée à la demande de la commission de réforme a été menée par le même praticien qui avait réalisé la première expertise versée au dossier soumis à la commission. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que cette première expertise a été réalisée par le seul Dr Grunberg le 3 juillet 2015, tandis que la seconde l'a été par le Dr Aoustin, le 27 novembre suivant. Par suite, le moyen, qui manque en fait, ne peut qu'être écarté. 5. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier, notamment des expertises diligentées par la commission de réforme, que M. C... souffre, outre notamment d'une insuffisance rénale sévère et d'une rétinopathie hypertensive, d'une leucopathie et d'un dysfonctionnement fronto-cortical dont les manifestations physiques sont des acouphènes et des vertiges, ainsi que des troubles de l'écriture, du langage et de la mémoire. Il ressort également des pièces du dossier, en particulier du questionnaire médical du 18 juin 2015, que les troubles neurologiques centraux, cognitifs et de mémoire dont souffre le requérant sont apparus postérieurement à la date de sa titularisation. Ainsi qu'il en ressort de l'avis de la commission de réforme mais également du certificat médical du 10 mars 2015 qu'avait produit M. C... devant le comité médical départemental, eu égard à leur caractère invalidant, ces pathologies sont incompatibles avec l'exercice de toutes fonctions, y compris, en dépit de ce qu'allègue le requérant, celles d'informaticien ou d'employé de bureau dans les services du ministère de l'éducation nationale. Par suite, en ne procédant pas à son reclassement dans un autre emploi, la rectrice n'a pas commis d'erreur de droit. Pour le même motif, en constatant, conformément à l'avis de la commission de réforme, que le requérant était définitivement inapte à toutes fonctions, la rectrice n'a pas entaché sa décision prononçant sa radiation des cadres d'erreur manifeste d'appréciation. 6. En troisième lieu, M. C... soutient que, suivant en cela l'avis du comité médical départemental, la rectrice a requalifié sa demande de placement en congé de longue maladie en déclaration d'inaptitude définitive à toutes fonctions, sans qu'aucun texte ne l'y autorise. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que cette autorité, qui a statué sur la demande d'octroi d'un congé de longue maladie du requérant, s'est limitée à informer ce dernier de l'avis rendu par le comité médical départemental sur son inaptitude totale et définitive à toutes fonctions, et des suites qu'il lui appartenait d'y donner, tout en indiquant qu'il lui était loisible de demander un réexamen de sa situation par le même comité. C'est pourquoi, le moyen tiré du détournement de procédure ne peut qu'être écarté. 7. En dernier lieu, si M. C... soutient qu'il remplissait les conditions de placement en congé de longue maladie, une telle circonstance est sans incidence sur la légalité de l'arrêté de radiation des cadres et d'admission à la retraite attaqué. 8. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir opposées par le ministre, que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Par conséquent, sa requête, y compris ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ne peut qu'être rejetée. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. C... est rejetée. 2 N° 17VE02057
Cours administrative d'appel
Versailles