Jurisprudence
La jurisprudence est l'ensemble des décisions rendues par les juridictions administratives, pendant une certaine période dans une matière, dans une branche ou dans l'ensemble du droit.
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Conseil d'État, 1ère sous-section jugeant seule, 08/04/2009, 305006, Inédit au recueil Lebon
Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 23 avril et 23 juillet 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Jean-Yves A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler l'arrêt de la cour régionale des pensions de Paris du 26 janvier 2007 en tant que, après avoir annulé le jugement du 24 mai 2005 du tribunal départemental des pensions de Paris et évoqué, d'une part, s'est déclarée incompétente pour connaître de la demande de M. A tendant au versement des intérêts moratoires sur les arrérages de sa pension militaire d'invalidité et, d'autre part, a déclaré irrecevable sa demande de majoration de cette pension pour survenance d'enfants ; 2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à ses conclusions d'appel ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code civil ; Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; Vu la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ; Vu le décret n° 59-327 du 20 février 1959 ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Alexandre Lallet, Auditeur, - les observations de Me Spinosi, avocat de M. A, - les conclusions de Mlle Anne Courrèges, rapporteur public ; La parole ayant été à nouveau donnée à Me Spinosi, avocat de M. A ;Considérant qu'au nombre des règles générales de procédure que les juridictions des pensions sont tenues de respecter figure celle selon laquelle leurs décisions doivent mentionner les textes dont elles font application ; Considérant qu'après avoir annulé le jugement du 24 mai 2005 du tribunal départemental des pensions de Paris et évoqué, la cour régionale des pensions de Paris a, par le dispositif de l'arrêt attaqué contre lequel M. A se pourvoit en cassation, d'une part, rejeté comme échappant à la compétence des juridictions des pensions ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du 15 mars 1993 du payeur général du Trésor lui refusant le versement d'intérêts moratoires sur les arrérages de la pension militaire d'invalidité qui lui a été accordée, à compter du 2 octobre 1988, par un arrêté du 30 mars 1998 du ministre de la défense et, d'autre part, rejeté comme irrecevables, faute de décision administrative préalable, les conclusions du requérant tendant à la majoration de sa pension militaire d'invalidité ; que, ce faisant, la cour régionale des pensions s'est nécessairement fondée, sur le premier point, sur les dispositions de l'article L. 79 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre définissant la compétence des juridictions des pensions et, sur le second, sur celles de l'article 5 du décret du 20 février 1959 relatif à ces juridictions, selon lequel le tribunal départemental des pensions est saisi de recours contre les décisions prises par l'administration en vertu de l'article L. 24 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; qu'aucun de ces textes n'est toutefois mentionné dans l'arrêt attaqué, en méconnaissance de l'exigence mentionnée plus haut ; que M. A est, dès lors, fondé à soutenir que cet arrêt est entaché d'irrégularité et à en demander, pour ce motif, l'annulation dans cette mesure ; Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler, dans cette même mesure, l'affaire au fond en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ; Sur les conclusions relatives aux intérêts moratoires : Considérant qu'en vertu de l'article L. 79 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, le tribunal départemental des pensions et, en appel, la cour régionale des pensions sont compétents pour se prononcer sur les contestations relatives aux droits à pension militaire d'invalidité ; que, par suite, ces juridictions sont également compétentes pour se prononcer sur les demandes tendant à l'octroi des intérêts moratoires auxquels ont droit, sur leur demande, les titulaires d'une telle pension en cas de retard apporté au versement des sommes qui leur sont dues à ce titre ; Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. A s'est vu reconnaître le bénéfice d'une pension militaire d'invalidité définitive au taux de 20 % à compter du 2 octobre 1988 par un jugement du tribunal départemental des pensions de Paris du 13 juin 1993, confirmé par un arrêt du 23 janvier 1996 de la cour régionale des pensions de Paris devenu définitif mais n'a perçu, depuis le 2 octobre 1988, qu'une pension au taux de 10 % ; Considérant, en premier lieu, qu'il résulte des dispositions de l'article 7 de la loi du 31 décembre 1968 que l'administration doit, pour pouvoir se prévaloir, à propos d'une créance litigieuse, de la prescription prévue par cette loi, l'invoquer avant que la juridiction saisie du litige au premier degré se soit prononcée sur le fond ; que la prescription des arrérages de pension militaire d'invalidité réclamés par M. A, qui n'avait pas été invoquée devant le tribunal départemental des pensions, a été opposée pour la première fois par le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique dans un courrier adressé à l'intéressé le 25 août 2008 et dans son mémoire présenté devant le Conseil d'Etat le 12 septembre 2008 ; qu'il résulte de ce qui a été dit plus haut que l'exception de prescription quadriennale tardivement opposée par le ministre ne peut en tout état de cause qu'être écartée, sans qu'il y ait lieu en outre de prononcer l'annulation de la décision contenue dans le courrier du 25 août 2008 ; Considérant, en second lieu, qu'eu égard à l'obligation qui incombait à l'administration, en exécution du jugement du tribunal départemental des pensions de Paris du 13 juin 1993, de verser à M. A la pension militaire d'invalidité définitive à laquelle il avait droit au taux de 20 %, sans que l'intéressé eût à accomplir des diligences particulières en ce sens, le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique ne saurait sérieusement soutenir que, faute d'avoir réclamé en temps utile le paiement des arrérages de pension, M. A ne peut bénéficier des intérêts de retard correspondants ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que, par sa décision du 15 mai 1993, le payeur général du Trésor lui a refusé le versement des intérêts moratoires dus à compter du 2 octobre 1988 sur les arrérages de sa pension militaire d'invalidité ; Considérant que M. A a demandé la capitalisation des intérêts devant le tribunal départemental des pensions de Paris le 24 mai 1993 ; qu'à cette date, il était dû au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande, tant à cette date qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date ; Sur les conclusions relatives à la majoration de la pension : Considérant qu'il résulte de l'article 5 du décret du 20 février 1959 qu'il n'appartient pas aux juridictions des pensions, en l'absence de décision préalable de l'administration, de statuer directement sur les demandes de majoration de pension militaire d'invalidité ; qu'il est constant que la demande de majoration de l'intéressé n'a donné lieu à aucune décision administrative avant la saisine du tribunal départemental des pensions ; que, par suite, les conclusions présentées à ce titre par M. A ne sauraient être accueillies ; Sur les conclusions à fins d'injonction : Considérant que les motifs de la présente décision impliquent nécessairement que soient versés à M. A, outre les arrérages de pension militaire d'invalidité depuis le 2 octobre 1988 s'ils ne l'ont pas déjà été, les intérêts légaux calculés et capitalisés comme il vient d'être dit ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'enjoindre au ministre de la défense de procéder au versement des sommes auxquelles M. A a ainsi droit dans un délai d'un mois ; que, toutefois, ses conclusions tendant à ce que cette injonction soit assortie d'une astreinte ne peuvent être accueillies, faute pour l'intéressé d'avoir chiffré sa demande ; Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. A de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;D E C I D E : -------------- Article 1er : L'arrêt de la cour régionale des pensions de Paris du 26 janvier 2007 est annulé en tant que, après avoir annulé le jugement du tribunal départemental des pensions de Paris du 24 mai 2005 et évoqué, il a rejeté les conclusions présentées en première instance par M. A. Article 2 : La décision du 15 mars 1993 du payeur général du Trésor est annulée en tant qu'elle refuse le versement des intérêts moratoires sur les arrérages de pension militaire d'invalidité de M. A et la capitalisation de ces intérêts. Article 3 : L'Etat versera à M. A les intérêts moratoires sur les arrérages de pension militaire d'invalidité dus. Les intérêts échus à la date du 24 mai 1993 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts. Article 4 : Il est enjoint au ministre de la défense de verser à M. A les sommes dues en exécution de la présente décision dans un délai d'un mois à compter de sa notification. Article 5 : L'Etat versera à M. A la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 6 : Le surplus des conclusions présentées par M. A est rejeté. Article 7 : La présente décision sera notifiée à M. Jean-Yves A, au ministre de la défense et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 9ème sous-section jugeant seule, 08/04/2009, 298601, Inédit au recueil Lebon
Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 7 novembre 2006 et 18 mai 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Badra A, demeurant ... ; Mme A demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler l'arrêt du 12 septembre 2006 par lequel la cour régionale des pensions de Montpellier a confirmé le jugement du tribunal départemental des pensions de l'Hérault du 12 décembre 2001 rejetant la demande de l'intéressée tendant au rétablissement, à son profit, de la pension d'orpheline de sa fille ; 2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit aux conclusions présentées par la requérante devant le tribunal départemental des pensions de l'Hérault ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros à verser à Maître Cossa, avocat de Mme A, au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; Vu le décret n° 59-327 du 20 février 1959 relatif aux juridictions des pensions ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Cécile Raquin, Auditeur, - les observations de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, avocat de Mme A, - les conclusions de M. Pierre Collin, rapporteur public ; La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, avocat de Mme A ; Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi ; Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme A a bénéficié, après le décès de son premier époux le 19 mai 1959, d'une pension de réversion assortie de majorations familiales pour sa fille mineure ; qu'en raison de son remariage le 9 mai 1963, le versement de sa pension de réversion a été interrompu ; que sa fille a bénéficié d'une pension d'orpheline jusqu'à l'âge de vingt et un ans ; que Mme A a demandé au payeur général de l'ambassade de France à Alger le rétablissement à son profit de la pension dont bénéficiait sa fille dont le versement avait été interrompu en 1980 ; que par une décision du 17 mai 2000, le payeur général de l'ambassade de France à Alger a rejeté cette demande ; qu'à compter du 6 février 2006, Mme A a bénéficié à nouveau de sa pension de réversion, son second époux étant décédé ; Considérant, qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, la demande de Mme A tendait à l'octroi d'une pension en application du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; que sa demande devant le tribunal départemental des pensions de l'Hérault tendait à l'annulation de la décision du 17 mai 2000 par laquelle le payeur général de l'ambassade de France à Alger lui avait opposé un refus ; qu'il suit de là qu'en estimant que le tribunal départemental des pensions de l'Hérault avait à bon droit jugé que la demande de l'intéressée n'était dirigée contre aucune décision et n'entrait pas dans les prévisions de l'article L. 24 du code des pensions militaires d'invalidité ni dans celles de l'article 5 du décret du 20 février 1959, la cour régionale des pensions de Montpellier s'est méprise sur la portée de cette demande et a commis une erreur de droit ; que son arrêt doit, par suite, être annulé ; Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ; Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, la décision dont Mme A a demandé l'annulation devant le tribunal départemental des pensions de l'Hérault constituait bien une décision de refus d'octroi d'une pension militaire d'invalidité ; qu'en conséquence, c'est à tort que le tribunal a rejeté comme irrecevable, en tant qu'elle n'était pas dirigée contre une décision de l'administration se prononçant sur l'octroi d'une pension, la demande de Mme A ; que son jugement doit, dès lors, être annulé ; Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme A devant le tribunal départemental des pensions de l'Hérault ; Considérant qu'aux termes de l'article L. 48 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre :Les conjoints survivants qui contractent un nouveau mariage, un nouveau pacte civil de solidarité ou vivent en état de concubinage notoire perdent leur droit à pension. Les droits qui leur appartiennent ou qui leur auraient appartenu passent aux enfants âgés de moins de vingt et un ans du défunt selon les règles établies par la loi en vigueur en matière de pensions. Le conjoint survivant remarié ou ayant conclu un pacte civil de solidarité redevenu veuf (...) peut, s'il le désire, recouvrer leur droit à pension et demander qu'il soit mis fin à l'application qui a pu être faite des dispositions du deuxième alinéa ci-dessus (...) ; qu'il résulte des termes mêmes de ces dispositions qu'entre la date à laquelle sa fille a atteint l'âge de 21 ans et la date du décès de son second époux, Mme A ne pouvait bénéficier d'une pension de réversion ; qu'elle a d'ailleurs bénéficié à nouveau de sa pension de réversion à compter du 6 février 2006, son second époux étant décédé ; que, par suite, le payeur général de l'ambassade de France à Alger était tenu de rejeter la demande présentée par Mme A ; Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le payeur général de l'ambassade de France à Alger a rejeté sa demande tendant au rétablissement, à son profit, de la pension dont bénéficiait sa fille ; Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Considérant que les dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées sur le fondement de ces dispositions par la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, avocat de Mme A ;D E C I D E : -------------- Article 1er : L'arrêt de la cour régionale des pensions de Montpellier du 12 septembre 2006 et le jugement du tribunal départemental des pensions de l'Hérault du 12 décembre 2001 sont annulés. Article 2 : La demande présentée par Mme A devant le tribunal départemental des pensions de l'Hérault est rejetée. Article 3 : Les conclusions de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano tendant l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées. Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme Badra A et au ministre de la défense.
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 1ère sous-section jugeant seule, 08/04/2009, 319784, Inédit au recueil Lebon
Vu le pourvoi, enregistré le 13 août 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE LA DEFENSE ; le ministre demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler l'arrêt du 18 juin 2008 par lequel la cour régionale des pensions de Dijon a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du tribunal départemental des pensions de Saône-et-Loire du 18 juin 2007 annulant la décision du ministre du 28 juin 2006, en tant qu'il juge que la revalorisation de la pension militaire d'invalidité de M. Jean-Baptiste A doit prendre effet à compter du 27 février 1981 ; 2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel et de n'accorder à M. A droit à une pension revalorisée qu'à compter du 1er janvier 2003 ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Alexandre Lallet, Auditeur, - les conclusions de Mlle Anne Courrèges, rapporteur public ; Considérant qu'aux termes de l'article L. 108 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre : « Lorsque, par suite du fait personnel du pensionné, la demande de liquidation ou de révision de la pension est déposée postérieurement à l'expiration de la troisième année qui suit celle de l'entrée en jouissance normale de la pension, le titulaire ne peut prétendre qu'aux arrérages afférents à l'année au cours de laquelle la demande a été déposée et aux trois années antérieures » ; Considérant qu'en estimant que le fait que M. A n'ait demandé que le 30 mars 2006 la révision de sa pension liquidée le 26 février 1981 ne résultait pas d'un fait personnel qui lui fût imputable, alors qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'aucune circonstance ne l'empêchait de se prévaloir dès la date de cette liquidation des stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du caractère discriminatoire des dispositions applicables, la cour régionale des pensions de Dijon a commis une erreur de droit ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen du pourvoi, l'arrêt attaqué doit être annulé sur ce point ; Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ; Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que le ministre est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal départemental des pensions de Saône-et-Loire a fixé au 26 février 1981 la date de revalorisation de la pension accordée à l'intéressé et à demander que cette date soit, conformément aux dispositions de l'article L. 108 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, fixée au 1er janvier 2003 ;D E C I D E : -------------- Article 1er : L'arrêt de la cour régionale des pensions de Dijon du 18 juin 2008 est annulé. Article 2 : La date de revalorisation de la pension militaire d'invalidité servie à M. A est fixée au 1er janvier 2003. Article 3 : Le jugement du tribunal départemental des pensions de Saône-et-Loire du 18 juin 2007 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision. Article 4 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DE LA DEFENSE et à M. Jean-Baptiste A.
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 1ère sous-section jugeant seule, 08/04/2009, 313715, Inédit au recueil Lebon
Vu le pourvoi, enregistré le 26 février 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE LA DEFENSE ; le ministre demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler l'arrêt du 18 décembre 2007 par lequel la cour régionale des pensions de Rouen a confirmé le jugement du tribunal départemental des pensions de l'Eure du 2 avril 2007 ayant fait droit à la demande de M. Pierre A tendant à bénéficier de l'allocation spéciale prévue à l'article L. 35 bis du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; 2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; Vu le décret n° 61-443 du 2 mai 1961 ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Alexandre Lallet, Auditeur, - les observations de la SCP Tiffreau, avocat de M. A, - les conclusions de Mlle Anne Courrèges, rapporteur public ; La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Tiffreau, avocat de M. A ;Considérant que l'article L. 35 bis du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre a institué une allocation spéciale qui est accordée aux pensionnés « qui se trouvent dans l'impossibilité médicalement constatée d'exercer une activité professionnelle, quand cette impossibilité a sa cause déterminante dans une ou plusieurs infirmités incurables indemnisées au titre de ce code » ; Considérant que, pour confirmer le jugement du tribunal départemental des pensions de l'Eure qui avait accordé cette allocation à M. A, amputé d'une jambe en 1996 et pensionné à 100 % à ce titre, la cour régionale des pensions de Rouen ne s'est pas bornée à relever que ce dernier était dans l'impossibilité absolue et définitive d'exercer son activité antérieure de chauffeur routier et avait été reconnu inapte à l'exercice d'une activité professionnelle quelconque, mais s'est également fondée sur les éléments du dossier qui, selon son appréciation souveraine, conduisaient à estimer que cette impossibilité avait sa cause déterminante dans l'infirmité pensionnée ; qu'elle n'a ainsi entaché son arrêt ni d'insuffisance, ni de contradiction de motifs et n'a pas non plus commis d'erreur de droit ; que, par suite, le MINISTRE DE LA DEFENSE n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ; Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de M. A tendant à ce que l'Etat lui verse une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;D E C I D E : -------------- Article 1er : Le pourvoi du MINISTRE DE LA DEFENSE est rejeté. Article 2 : L'Etat versera à M. A une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DE LA DEFENSE et à M. Pierre A.
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 1ère sous-section jugeant seule, 08/04/2009, 311832, Inédit au recueil Lebon
Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 26 décembre 2007 et 6 mai 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par M. Carlos A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler l'arrêt du 8 novembre 2007 par lequel la cour régionale des pensions de Lyon a confirmé le jugement du tribunal départemental des pensions du Rhône en tant qu'il a fixé à 10 % le taux d'invalidité induit par l'infirmité de la cheville droite et à 10 % le taux d'invalidité au titre de lombalgies, mais infirmé ce jugement dans la mesure où ces taux d'invalidité ne lui ouvrent pas droit à pension s'agissant d'infirmités résultant de maladie et non de blessure, d'autre part, a déclaré irrecevables ses nouvelles demandes de pensions au titre d'autres infirmités que celles en cause dans le jugement de première instance ; 2°) réglant l'affaire au fond, de confirmer le jugement du tribunal départemental des pensions du Rhône ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Alexandre Lallet, Auditeur - les conclusions de Mlle Anne Courrèges, rapporteur public ;Considérant qu'aux termes de l'article L. 822-1 du code de justice administrative : « Le pourvoi en cassation devant le Conseil d'Etat fait l'objet d'une procédure préalable d'admission. L'admission est refusée par décision juridictionnelle si le pourvoi est irrecevable ou n'est fondé sur aucun moyen sérieux » ; Considérant que, pour demander l'annulation de l'arrêt de la cour régionale des pensions de Lyon qu'il attaque, M. A soutient qu'il est victime d'une erreur judiciaire ; que la cour régionale des pensions a dénaturé ses conclusions et celles du ministre de la défense en estimant qu'ils contestaient, chacun en ce qui le concerne, le taux d'invalidité fixé pour l'infirmité de la cheville droite ; que, par suite, elle a statué au-delà des conclusions dont elle était saisie ; qu'au surplus, aucune des parties n'apportait d'élément nouveau de nature à justifier l'annulation du jugement du tribunal départemental des pensions ; que la cour a dénaturé ses conclusions en ne relevant pas qu'il avait abandonné ses conclusions tendant à se voir reconnaître une invalidité pour d'autres pathologies que celles en cause en première instance ; que l'origine par blessures des pathologies en cause ne fait pas de doute ; Considérant qu'eu égard aux moyens soulevés, il y a lieu d'admettre les conclusions du pourvoi qui sont dirigées contre l'arrêt attaqué, en tant qu'il s'est prononcé sur l'infirmité de la cheville droite ; qu'en revanche, s'agissant des conclusions dirigées contre cet arrêt, en tant qu'il s'est prononcé sur les autres infirmités, aucun des moyens soulevés n'est de nature à permettre l'admission de ces conclusions ;D E C I D E : -------------- Article 1er : Les conclusions du pourvoi de M. A qui sont dirigées contre l'arrêt attaqué, en tant qu'il s'est prononcé sur l'infirmité de la cheville droite sont admises. Article 2 : Le surplus des conclusions du pourvoi n'est pas admis. Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Carlos A. Copie en sera adressée pour information au ministre de la défense.
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 1ère sous-section jugeant seule, 08/04/2009, 315212, Inédit au recueil Lebon
Vu le pourvoi, enregistré le 16 avril 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE LA DEFENSE ; le ministre demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 14 février 2008 de la cour régionale des pensions de Paris en tant qu'il a déclaré recevable l'appel incident formé par M. A et ordonné une nouvelle expertise médicale sur l'infirmité « lombalgies » ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Alexandre Lallet, Auditeur, - les observations de la SCP Ghestin, avocat de M. A, - les conclusions de Mlle Anne Courrèges, rapporteur public ; La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Ghestin, avocat de M. A ;Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le tribunal départemental des pensions de Paris a, par un jugement du 21 novembre 2005, rejeté la demande de M. A relative à l'indemnisation de l'infirmité de lombalgies, mais a fait droit à sa demande tendant à la révision de sa pension pour aggravation de l'infirmité « séquelles de splénectomie pour rupture traumatique de la rate » ; que le MINISTRE DE LA DEFENSE a relevé appel du jugement en tant qu'il a fait droit à cette demande de révision ; que M. A, pour sa part, a contesté le jugement en ce qui concerne l'infirmité « lombalgies » ; que cet appel incident, formé après l'expiration du délai d'appel, portait sur un litige distinct de celui soulevé par la requête du ministre et était donc irrecevable ; qu'en y faisant droit et en ordonnant une mesure d'expertise étendue aux lombalgies, la cour régionale des pensions de Paris a commis une erreur de droit ; que, par suite, le MINISTRE DE LA DEFENSE est fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué en tant qu'il a admis la recevabilité de l'appel incident de M. A et ordonné une expertise médicale étendue aux lombalgies ; Considérant qu'il y lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler dans cette mesure l'affaire au fond en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ; Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que l'appel incident de M. A est irrecevable ; que, dès lors, il ne peut qu'être rejeté ; que les dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées sur le fondement de ces dispositions par la SCP Ghestin, avocat de M. A ;D E C I D E : -------------- Article 1er : L'arrêt de la cour régionale des pensions de Paris du 14 février 2008 est annulé en tant qu'il admet la recevabilité de l'appel incident de M. A et ordonne avant-dire-droit une expertise médicale étendue aux lombalgies. Article 2 : L'appel incident de M. A est rejeté. Article 3 : Les conclusions présentées par la SCP Ghestin, avocat de M. A, tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées. Article 4 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DE LA DEFENSE et à M. Frédéric A.
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 1ère sous-section jugeant seule, 08/04/2009, 318784, Inédit au recueil Lebon
Vu le pourvoi, enregistré le 25 juillet 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE LA DEFENSE ; le ministre demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler l'arrêt du 13 mai 2008 par lequel la cour régionale des pensions de Montpellier a confirmé le jugement du 7 juin 2006 du tribunal départemental des pensions de l'Hérault en tant qu'il accorde à M. A un droit à pension pour les infirmités « hypoacousie bilatérale, perte de sélectivité » et « acouphènes permanents », évaluées chacune au taux de 10 % ; 2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit sur ce point à son appel ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Alexandre Lallet, Auditeur, - les conclusions de Mlle Anne Courrèges, rapporteur public ;Considérant qu'il résulte des dispositions combinées des articles L. 2 et L. 3 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre que s'il ne peut, comme en l'espèce, prétendre au bénéfice de la présomption légale d'imputabilité au service, le demandeur de pension doit rapporter la preuve de l'existence d'un lien direct et certain entre les troubles qu'il invoque et un fait précis ou des circonstances particulières ; Considérant que, pour retenir l'imputabilité au service des infirmités « hypoacousie bilatérale-perte de sélectivité » et « acouphènes permanents » dont faisait état M. A, la cour régionale des pensions de Montpellier s'est fondée sur les comptes rendus de l'accident du 22 novembre 1996 qui, selon son appréciation souveraine, établissaient la preuve de cette imputabilité ; que si elle a également relevé que l'absence d'audiogramme de référence concernant cet accident ne pouvait être opposée à l'intéressé, elle ne s'est pas fondée sur cette circonstance pour rejeter l'appel du MINISTRE DE LA DEFENSE ; que celui-ci n'est, dès lors, pas fondé à soutenir que la cour a entaché son arrêt, qui est suffisamment motivé, d'erreur de droit ni, par suite, à en demander l'annulation ;D E C I D E : -------------- Article 1er : Le pourvoi du MINISTRE DE LA DEFENSE est rejeté. Article 2 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DE LA DEFENSE et à M. Patrick A.
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 9ème sous-section jugeant seule, 11/03/2009, 289025, Inédit au recueil Lebon
Vu l'ordonnance en date du 16 novembre 2005, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 16 janvier 2006, par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Marseille a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, le pourvoi présenté à cette cour administrative d'appel par M. Gérard A ; Vu le pourvoi, enregistré le 1er septembre 2005, au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, présenté pour M. Gérard A, demeurant ... ; M. A demande : 1°) l'annulation du jugement du 30 juin 2005 du tribunal administratif de Marseille rejetant sa demande tendant à l'annulation de la décision du 19 janvier 2004 du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie refusant de l'admettre à la retraite avec jouissance immédiate de sa pension ; 2°) d'enjoindre audit ministre de mettre l'intéressé à la retraite à compter du 1er janvier 2004 en tenant compte des bonifications pour enfants ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble le premier protocole additionnel à cette convention ; Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ; Vu la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 ; Vu la loi n° 2004-1485 du 30 décembre 2004 ; Vu le décret n° 2003-1305 du 26 décembre 2003 ; Vu le décret n° 2005-449 du 10 mai 2005 ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Eric Combes, chargé des fonctions de Maître des Requêtes, - les observations de la SCP Boullez, avocat de M. A, - les conclusions de M. Pierre Collin, Commissaire du gouvernement ; Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A, technicien supérieur de l'équipement, affecté à la direction départementale de l'équipement des Bouches-du-Rhône, est père de trois enfants et a demandé, le 30 juin 2003, son admission à la retraite avec jouissance immédiate de sa pension de retraite à compter du 1er janvier 2004, ainsi que la bonification pour enfants ; qu'il a contesté devant le tribunal administratif de Marseille l'arrêté de liquidation de sa pension en date du 19 janvier 2004, par lequel le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie lui a octroyé une pension à jouissance différée au jour de son soixantième anniversaire, soit le 6 septembre 2007, non assortie du bénéfice de la bonification pour enfants demandée ; qu'il se pourvoit en cassation contre le jugement du 30 juin 2005 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ; Sur les conclusions à fin de non-lieu à statuer du ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique : Considérant que, si le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie a, en exécution de l'ordonnance du 20 février 2004 du juge des référés du tribunal administratif de Marseille suspendant l'exécution de son arrêté du 19 janvier 2004 en tant qu'il a fixé au 6 septembre 2007 la date d'entrée en jouissance de la pension de retraite de M. A, pris le 1er mars 2004 un nouvel arrêté fixant au 1er janvier 2004 cette entrée en jouissance, ce second arrêté n'est pas devenu définitif ; que les conclusions de la demande de M. A tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 janvier 2004 en tant qu'il a fixé la date d'entrée en jouissance de sa pension au 6 septembre 2007 ont été rejetées par le jugement du 30 juin 2005 ; que, par suite, et contrairement à ce que soutient le ministre, les conclusions de M. A tendant à l'annulation de ce jugement en tant qu'il n'a pas fait droit aux conclusions de sa demande relatives à la date d'entrée en jouissance de sa pension, ne sont pas dépourvues d'objet ; qu'il y a lieu, dès lors, de statuer sur lesdites conclusions de son pourvoi ; Sur le pourvoi de M. A : Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi ; Considérant qu'aux termes du I de l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite, dans sa rédaction issue du I de l'article 136 de la loi de finances rectificative du 30 décembre 2004 : La liquidation de la pension intervient : (...) / 3º Lorsque le fonctionnaire civil est parent de trois enfants vivants, ou décédés par faits de guerre, ou d'un enfant vivant, âgé de plus d'un an et atteint d'une invalidité égale ou supérieure à 80 %, à condition qu'il ait, pour chaque enfant, interrompu son activité dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat ; qu'aux termes du II de l'article 136 de la loi de finances rectificative du 30 décembre 2004 : Les dispositions du I sont applicables aux demandes présentées avant leur entrée en vigueur qui n'ont pas donné lieu à une décision de justice passée en force de chose jugée ; qu'aux termes de l'article R. 37 du code des pensions civiles et militaires de retraite dans sa rédaction issue du décret du 10 mai 2005 : I. - L'interruption d'activité prévue au premier alinéa du 3° du I de l'article L. 24 doit avoir eu une durée continue au moins égale à deux mois et être intervenue alors que le fonctionnaire était affilié à un régime de retraite obligatoire. En cas de naissances ou d'adoptions simultanées, la durée d'interruption d'activité prise en compte au titre de l'ensemble des enfants en cause est également de deux mois. / Cette interruption d'activité doit avoir eu lieu pendant la période comprise entre le premier jour de la quatrième semaine précédant la naissance ou l'adoption et le dernier jour de la seizième semaine suivant la naissance ou l'adoption. /Par dérogation aux dispositions de l'alinéa précédent, pour les enfants énumérés aux troisième, quatrième, cinquième et sixième alinéas du II de l'article L. 18 que l'intéressé a élevés dans les conditions prévues au III dudit article, l'interruption d'activité doit intervenir soit avant leur seizième anniversaire, soit avant l'âge où ils ont cessé d'être à charge au sens des articles L. 512-3 et R. 512-2 à R. 512-3 du code de la sécurité sociale. / II. - Sont prises en compte pour le calcul de la durée d'interruption d'activité les périodes correspondant à une suspension de l'exécution du contrat de travail ou à une interruption du service effectif, intervenues dans le cadre : a) Du congé pour maternité, (...) b) Du congé de paternité, (...) c) Du congé d'adoption, (...) d) Du congé parental, (...) e) Du congé de présence parentale, (...) f) D'une disponibilité pour élever un enfant de moins de huit ans (...) / III. - Les périodes visées au deuxième alinéa du 3° du I de l'article L. 24 sont les périodes n'ayant pas donné lieu à cotisation de l'intéressé et pendant lesquelles celui-ci n'exerçait aucune activité professionnelle. ; Considérant qu'il découle de l'objet même des stipulations de l'article 6 § 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales que l'incompatibilité du II de l'article 136 de la loi de finances rectificative du 30 décembre 2004 ne peut être utilement invoquée que par les fonctionnaires qui, à la date de l'entrée en vigueur de ces dispositions, soit le 12 mai 2005, avaient, à la suite d'une décision leur refusant le bénéfice du régime antérieurement applicable, engagé une action contentieuse en vue de contester la légalité de cette décision ; que la demande de M. A tendant à l'annulation de la décision du 19 janvier 2004 ayant été enregistrée au greffe du tribunal administratif de Marseille le 2 février 2004, le tribunal administratif de Marseille a commis une erreur de droit en appliquant à M. A les dispositions de l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite dans leur rédaction issue de l'article 136 de la loi du 30 décembre 2004 ; que dès lors, le jugement attaqué doit être annulé ; Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ; Sur les conclusions relatives à la date d'entrée en jouissance de la pension de retraite : Considérant qu'aux termes de l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite, dans sa rédaction issue de la loi du 21 août 2003 : La liquidation de la pension intervient : / (...) / 3° Pour les femmes fonctionnaires : / a) Soit lorsqu'elles sont mères de trois enfants vivants ou décédés par faits de guerre ou d'un enfant vivant âgé de plus d'un an et atteint d'une invalidité égale ou supérieure à 80 p. 100. / Sont assimilés aux enfants visés à l'alinéa précédent les enfants énumérés au paragraphe II de l'article L. 18 que les intéressées ont élevés dans les conditions prévues au paragraphe III dudit article. ; Considérant que les droits du fonctionnaire relatifs au point de départ de la jouissance de sa pension de retraite doivent être légalement appréciés à la date à compter de laquelle l'intéressé demande à bénéficier de cette pension ; qu'il en résulte que les droits à pension de M. A doivent s'apprécier au regard des dispositions législatives et réglementaires applicables à la date du 30 décembre 2003 ; que M. A est fondé à demander à son profit, pour la jouissance d'une pension de retraite, le bénéfice du régime applicable immédiatement avant l'entrée en vigueur de la loi du 30 décembre 2004 ; que le a) du 3° du I de l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite, dans sa rédaction alors applicable, institue la jouissance immédiate de la pension et en réserve le bénéfice aux femmes fonctionnaires lorsqu'elles sont mères de trois enfants vivants ou décédés par faits de guerre ou les ont élevés pendant au moins neuf ans ; Considérant qu'aux termes de l'article 119 du traité de la Communauté économique européenne devenu l'article 141 du traité instituant la Communauté européenne : 1. Chaque Etat membre assure l'application du principe de l'égalité des rémunérations entre travailleurs masculins et travailleurs féminins pour un même travail ou un travail de même valeur. / 2. Aux fins du présent article, on entend par rémunération, le salaire ou traitement ordinaire de base ou minimum, et tous autres avantages payés directement ou indirectement, en espèces ou en nature, par l'employeur au travailleur en raison de l'emploi de ce dernier. / L'égalité de rémunération, sans discrimination fondée sur le sexe, implique : / a) que la rémunération accordée pour un même travail payé à la tâche soit établie sur la base d'une même unité de mesure ; / b) que la rémunération accordée pour un travail payé au temps soit la même pour un même poste de travail ; que les pensions servies par le régime français de retraite des fonctionnaires entrent dans le champ d'application de ces stipulations ; que, nonobstant les stipulations de l'article 6, paragraphe 3, de l'accord annexé au protocole n°14 sur la politique sociale joint au traité sur l'Union européenne, le principe de l'égalité des rémunérations s'oppose à ce que la jouissance immédiate d'une pension de retraite, accordée aux personnes qui ont assuré l'éducation de trois enfants au moins, soit réservée aux femmes, alors que les hommes ayant assuré l'éducation de trois enfants au moins seraient exclus du bénéfice de cette mesure ; Considérant qu'il résulte de l'instruction, et qu'il n'est pas contesté, que M. A, qui totalise plus de quinze années de service, a assuré la charge de ses trois enfants et en a assuré l'éducation ; que M. A a droit, ainsi qu'il a été dit plus haut, à la jouissance immédiate de sa pension de retraite au 1er janvier 2004 ; Sur les conclusions relatives au bénéfice de la bonification pour enfants : Considérant que dans la rédaction que lui a donnée le I de l'article 48 de la loi du 21 août 2003 et dont le II précise qu'elle s'applique aux pensions liquidées à compter du 28 mai 2003, le b) de l'article L. 12 du code des pensions civiles et militaires de retraite dispose désormais que la bonification demandée est ouverte, pour chacun de leurs enfants, aux fonctionnaires civils et militaires à condition qu'ils aient interrompu leur activité dans les conditions fixées par décret en Conseil d'Etat et qu'il résulte de l'article R. 13, introduit dans le code des pensions civiles et militaires de retraite par le décret du 26 décembre 2003, que l'interruption d'activité susceptible d'être prise en compte à ce titre doit avoir eu une durée continue de deux mois et avoir donné lieu à l'un des congés dont la liste est limitativement énumérée par ce texte ; que, toutefois, si le législateur, en faisant obstacle, de façon rétroactive, à ce que les fonctionnaires dont la pension a été liquidée après le 28 mai 2003, date à laquelle le projet de loi comportant les nouvelles dispositions du b) de l'article L. 12 a été rendu public à la suite de son adoption en conseil des ministres, puissent se prévaloir devant le juge de ces dispositions dans leur rédaction antérieure, a entendu, par une intervention qui était prévisible, prendre en compte des considérations d'utilité publique tenant au souci d'éviter que l'annonce du dépôt du projet de loi ne se traduise par une multiplication des contentieux, les stipulations du paragraphe 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales peuvent être invoquées à bon droit, en l'absence d'un impérieux motif d'intérêt général, pour contester cette rétroactivité, par un requérant qui, d'une part, avait présenté avant l'adoption du projet de loi en conseil des ministres une demande tendant à ce que l'arrêté de concession de sa pension intègre la bonification d'ancienneté pour enfant et qui, d'autre part, à la date de publication de la loi, avait, à la suite d'une décision lui refusant le bénéfice du régime antérieurement applicable, engagé une action contentieuse en vue de contester la légalité de cette décision ; Considérant toutefois qu'il résulte de l'instruction que M. A a présenté une demande tendant à ce que l'arrêté de concession de sa pension intègre la bonification pour enfant le 30 juin 2003, soit après l'adoption du projet de loi en conseil des ministres ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que l'administration ne pouvait, sans méconnaître les stipulations de l'article 6 § 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, refuser d'accorder à l'intéressé le bénéfice du b) de l'article L. 12 du code des pensions civiles et militaires de retraite dans sa rédaction antérieure à la loi du 21 août 2003 doit être écarté ; Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A est seulement fondé à demander l'annulation de la décision du 19 janvier 2004 du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en tant qu'elle fixe la date d'entrée en jouissance de sa pension de retraite au jour de son soixantième anniversaire ; Sur les conclusions à fin d'injonction : Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ; Considérant, d'une part, que M. A a obtenu, par arrêté du 1er mars 2004, l'octroi d'une pension de retraite à jouissance immédiate, à compter du 1er janvier 2004, après que le juge des référés du tribunal administratif de Marseille ait ordonné la suspension de l'exécution de l'arrêté du 19 janvier 2004 et enjoint au ministre de réexaminer la demande de l'intéressé ; que dans ces circonstances, il y a seulement lieu d'enjoindre au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique de maintenir l'octroi de la pension révisée avec effet au 1er janvier 2004 ; Considérant, d'autre part, que le rejet des conclusions de M. A tendant au bénéfice de la bonification prévue au b) de l'article L. 12 du code des pensions civiles et militaires de retraite n'implique aucune mesure d'exécution ; Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. A de la somme de 2 500 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;D E C I D E : -------------- Article 1er : Le jugement du 30 juin 2005 du tribunal administratif de Marseille est annulé. Article 2 : La décision du 19 janvier 2004 du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, en tant qu'elle fixe au 6 septembre 2007 la date d'entrée en jouissance de la pension de retraite de M. A, est annulée. Article 3 : La demande de M. A tendant au bénéfice de la bonification pour enfants est rejetée. Article 4 : Il est enjoint au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique de maintenir au 1er janvier 2004 la date d'entrée en jouissance de la pension de retraite de M. A. Article 5 : L'Etat versera à M. A une somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 6 : La présente décision sera notifiée à M. Gérard A, au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique et au ministre d'Etat, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire.
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 9ème sous-section jugeant seule, 11/03/2009, 291153, Inédit au recueil Lebon
Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 9 mars et 7 juillet 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Ronan A, demeurant... ; M. A demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler le jugement du 19 janvier 2006 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant d'une part à l'annulation de la décision implicite de rejet du préfet du Morbihan sur sa demande d'admission à la retraite avec jouissance immédiate de sa pension à compter du 1er janvier 2007, en qualité de père de trois enfants, et d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au préfet du Morbihan, au titre de l'article L. 911-2 du code de justice administrative, de le faire bénéficier de la jouissance immédiate de la pension civile de retraite demandée à compter du 1er janvier 2007, avec prise en compte des bonifications pour enfants ; 2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble le premier protocole additionnel à cette convention ; Vu le traité instituant la Communauté européenne ; Vu le traité sur l'Union européenne et les protocoles qui y sont annexés ; Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ; Vu la loi n° 2004-1485 du 30 décembre 2004, notamment son article 136 ; Vu le décret n° 2005-449 du 10 mai 2005 ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Eric Combes, chargé des fonctions de Maître des Requêtes, - les observations de la SCP Bouzidi, Bouhanna, avocat de M. A, - les conclusions de M. Pierre Collin, Commissaire du gouvernement ; Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A, fonctionnaire à la direction départementale de l'équipement du Morbihan et père de trois enfants, a demandé, le 18 janvier 2005, son admission à la retraite avec jouissance immédiate de sa pension à compter du 1er janvier 2007 ; que cette demande a été rejetée par une décision implicite du préfet du Morbihan ; que M. A se pourvoit en cassation contre le jugement du 19 janvier 2006 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ; Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi ; Considérant qu'aux termes du I de l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite, dans sa rédaction issue du I de l'article 136 de la loi de finances rectificative du 30 décembre 2004 : La liquidation de la pension intervient : (...) / 3º Lorsque le fonctionnaire civil est parent de trois enfants vivants, ou décédés par faits de guerre, ou d'un enfant vivant, âgé de plus d'un an et atteint d'une invalidité égale ou supérieure à 80 %, à condition qu'il ait, pour chaque enfant, interrompu son activité dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat ; qu'aux termes du II de l'article 136 de la loi de finances rectificative du 30 décembre 2004 : Les dispositions du I sont applicables aux demandes présentées avant leur entrée en vigueur qui n'ont pas donné lieu à une décision de justice passée en force de chose jugée ; qu'aux termes de l'article R. 37 du code des pensions civiles et militaires de retraite dans sa rédaction issue du décret du 10 mai 2005 : I. - L'interruption d'activité prévue au premier alinéa du 3° du I de l'article L. 24 doit avoir eu une durée continue au moins égale à deux mois et être intervenue alors que le fonctionnaire était affilié à un régime de retraite obligatoire. En cas de naissances ou d'adoptions simultanées, la durée d'interruption d'activité prise en compte au titre de l'ensemble des enfants en cause est également de deux mois. / Cette interruption d'activité doit avoir eu lieu pendant la période comprise entre le premier jour de la quatrième semaine précédant la naissance ou l'adoption et le dernier jour de la seizième semaine suivant la naissance ou l'adoption. / Par dérogation aux dispositions de l'alinéa précédent, pour les enfants énumérés aux troisième, quatrième, cinquième et sixième alinéas du II de l'article L. 18 que l'intéressé a élevés dans les conditions prévues au III dudit article, l'interruption d'activité doit intervenir soit avant leur seizième anniversaire, soit avant l'âge où ils ont cessé d'être à charge au sens des articles L. 512-3 et R. 512-2 à R. 512-3 du code de la sécurité sociale. / II. - Sont prises en compte pour le calcul de la durée d'interruption d'activité les périodes correspondant à une suspension de l'exécution du contrat de travail ou à une interruption du service effectif, intervenues dans le cadre : a) Du congé pour maternité, (...) b) Du congé de paternité, (...) c) Du congé d'adoption, (...) d) Du congé parental, (...) e) Du congé de présence parentale, (...) f) D'une disponibilité pour élever un enfant de moins de huit ans (...) / III. - Les périodes visées au deuxième alinéa du 3° du I de l'article L. 24 sont les périodes n'ayant pas donné lieu à cotisation de l'intéressé et pendant lesquelles celui-ci n'exerçait aucune activité professionnelle. ; Considérant qu'aux termes du § 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi et qui décidera (...) des contestations sur des droits et obligations de caractère civil (...) ; que le droit ouvert par les dispositions de l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite à tout fonctionnaire remplissant les conditions qu'elles définissent est relatif non à la cessation du service ou à la radiation des cadres mais à l'entrée en jouissance immédiate de la pension avant l'âge de la retraite ; qu'il porte ainsi sur le droit à pension et constitue dès lors, quelle que soit la nature de l'emploi que détenait le fonctionnaire, un droit à caractère civil au sens des stipulations précitées de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que pour être compatible avec ces stipulations, l'intervention rétroactive du législateur en vue de modifier au profit de l'Etat les règles applicables à des procès en cours doit reposer sur d'impérieux motifs d'intérêt général ; Considérant que les dispositions du II de l'article 136 de la loi du 30 décembre 2004 qui ont pour effet de rendre applicables les dispositions du I du même article aux actions en justice engagées avant leur entrée en vigueur en vue d'obtenir le bénéfice des dispositions auxquelles elles se substituent ne peuvent être regardées comme reposant sur d'impérieux motifs d'intérêt général ; que ces dispositions rétroactives, ayant pour objet d'influer sur l'issue des procédures juridictionnelles engagées par des fonctionnaires s'étant vu refuser le bénéfice des dispositions alors applicables de l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite, méconnaissent les stipulations du § 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il découle de l'objet même de ces stipulations que cette incompatibilité ne peut être utilement invoquée que par les fonctionnaires qui, à la date d'entrée en vigueur des dispositions litigieuses, soit le 12 mai 2005, avaient, à la suite d'une décision leur refusant le bénéfice du régime antérieurement applicable, engagé une action contentieuse en vue de contester la légalité de cette décision ; que si M. A a demandé, le 18 janvier 2005, à être admis à la retraite avec jouissance immédiate de sa pension à compter du 1er janvier 2007 qui a donné lieu à une décision implicite de rejet par le préfet du Morbihan, l'intéressé a saisi le tribunal administratif de Rennes le 8 avril 2005 ; qu'il suit de là que le tribunal administratif a commis une erreur de droit en écartant le moyen tiré de la violation du § 1 de l'article 6 de la convention susvisée ; que, contrairement à ce que soutient le ministre, M. A est recevable à invoquer pour la première fois en cassation, le moyen tiré de cette erreur de droit ; qu'il y a lieu, par suite, d'annuler le jugement attaqué ; Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ; Considérant que les droits du fonctionnaire relatifs au point de départ de la jouissance de sa pension de retraite doivent être légalement appréciés à la date à compter de laquelle l'intéressé demande à bénéficier de cette pension ; qu'il en résulte que les droits à pension de M. A doivent s'apprécier au regard des dispositions législatives et réglementaires applicables à la date du 1er janvier 2007 ; qu'à cette date les dispositions du I de l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite, dans leur rédaction issue du I de l'article 136 de la loi du 30 décembre 2004 et celles de l'article R. 37 du même code dans leur rédaction issue du décret du 10 mai 2005 étaient en vigueur depuis le 12 mai 2005 ; que dès lors, ces dispositions sont applicables à M. A, et ce, sans effet rétroactif ; que sont, par suite, inopérants les moyens tirés de ce que les dispositions du II de l'article 136 de la loi du 30 décembre 2004, de par leur effet rétroactif, méconnaîtraient les stipulations du § 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que celles de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention ; Considérant qu'aux termes de l'article 141 du traité instituant la Communauté européenne : Chaque Etat membre assure l'application du principe de l'égalité des rémunérations entre les travailleurs masculins et les travailleurs féminins pour un même travail ou un travail de même valeur./ Aux fins du présent article, on entend par rémunération, le salaire ou traitement ordinaire de base ou minimum, et tous autres avantages payés directement ou indirectement, en espèces ou en nature, par l'employeur au travailleur en raison de l'emploi de ce dernier./ L'égalité de rémunération, sans discrimination fondée sur le sexe, implique : a) que la rémunération accordée pour un même travail payé à la tâche soit établie sur la base d'une même unité de mesure ; b) que la rémunération accordée pour un travail payé au temps soit la même pour un même poste de travail ; que, cependant, le même article précise en son paragraphe 4 que : Pour assurer concrètement une pleine égalité entre hommes et femmes dans la vie professionnelle, le principe de l'égalité de traitement n'empêche pas un Etat membre de maintenir ou d'adopter des mesures prévoyant des avantages spécifiques destinés à faciliter l'exercice d'une activité professionnelle par le sexe sous-représenté ou à prévenir ou compenser des désavantages dans la carrière professionnelle ; qu'eu égard à l'objet du droit, ouvert par la loi, d'entrer en jouissance immédiate de sa pension avant d'avoir atteint l'âge de la retraite, le principe d'égalité des rémunérations entre hommes et femmes tel qu'il est garanti par l'article 141 du traité instituant la Communauté européenne n'interdisait pas que la réglementation nationale fixe une durée minimale de deux mois à l'interruption d'activité ouvrant droit à cette entrée en jouissance et prévoie, parmi les positions statutaires donnant droit à son bénéfice, le congé de maternité, alors même que de ce fait et en raison du caractère facultatif des autres congés, pour la plupart non rémunérés et dont certains n'étaient pas encore ouverts aux hommes à la date à laquelle leurs enfants sont nés, le dispositif nouveau bénéficie principalement aux fonctionnaires de sexe féminin ; qu'ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance de ces stipulations doit être écarté ; Considérant que M. A ne soutient pas avoir interrompu son activité dans les conditions prévues par les dispositions de l'article R. 37 du code des pensions civiles et militaires de retraite précitées ; que, dès lors, il n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision implicite du préfet du Morbihan lui ayant refusé le bénéfice d'une pension de retraite à jouissance immédiate à compter du 1er janvier 2007 ; que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet du Morbihan de l'admettre au bénéfice d'une telle pension à compter de cette date doivent être rejetées ; Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme de 3 000 euros que M. A demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;D E C I D E : -------------- Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Rennes du 19 janvier 2006 est annulé. Article 2 : La demande présentée par M. A devant le tribunal administratif de Rennes est rejetée. Article 3 : Les conclusions de M. A présentées en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Ronan A, au ministre d'Etat, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 9ème sous-section jugeant seule, 17/03/2009, 307596, Inédit au recueil Lebon
Vu l'ordonnance du 18 juillet 2007, enregistrée le même jour au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Paris a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, la requête présentée à cette cour par M. Mohammed A ; Vu la requête, enregistrée le 29 mai 2006 au greffe de la cour administrative d'appel de Paris, présentée pour M. Mohammed A, demeurant ... ; M. A demande au juge administratif ; 1°) d'annuler le jugement du 1er février 2006 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du ministre de la défense rejetant sa demande de révision de la retraite du combattant de son père, M. Mohamed B ; 2°) réglant l'affaire au fond, de fixer le montant de la retraite du combattant attribuée à feu son père au niveau de celle servie à un ressortissant français du 3 juillet 1962 à la date de son décès, le 20 mai 1973 et de condamner l'Etat à lui verser le montant actualisé des arrérages correspondant à la différence entre le montant ainsi fixé et celui qui a déjà été versé à feu son père, augmenté des intérêts légaux capitalisés à compter du 3 juillet 1962, date du début de la cristallisation ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, de la somme de 4 000 euros au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que celle-ci renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble le premier protocole additionnel à cette convention ; Vu les déclarations gouvernementales du 19 mars 1962 et la loi du 13 avril 1962 ; Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; Vu la loi n° 59-1454 du 26 décembre 1959 ; Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Karin Ciavaldini, chargée des fonctions de Maître des Requêtes, - les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. Mohammed A, - les conclusions de M. Pierre Collin, rapporteur public ; Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que M. A, fils de M. Mohamed B, décédé en 1973, titulaire d'une retraite du combattant comme ancien combattant de la première guerre mondiale, et de Mme Fatima C, décédée le 20 août 1986, tous deux de nationalité algérienne, a sollicité le 14 février 2002 la décristallisation de la retraite servie à son père ; que M. A se pourvoit en cassation contre le jugement du 1er février 2006 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du ministre de la défense rejetant sa demande de révision de la retraite du combattant dont son père était titulaire ; Considérant qu'aux termes de l'article L. 255 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, dans sa rédaction en vigueur au 31 mars 2000 : Il est institué pour tout titulaire de la carte du combattant remplissant les conditions de l'article L. 256 ou de l'article L. 256 bis une retraite cumulable, sans aucune restriction, avec la retraite qu'il aura pu s'assurer par ses versements personnels, en application notamment de la loi du 4 août 1923 sur les mutuelles retraites et avec la ou les pensions qu'il pourrait toucher à un titre quelconque. / Cette retraite annuelle, qui n'est pas réversible, est accordée en témoignage de la reconnaissance nationale ; qu'il résulte de ces dispositions que la retraite du combattant constitue une pension de retraite accessoire attribuée en témoignage de la reconnaissance nationale et qu'au moment du décès du bénéficiaire de la retraite du combattant, ses ayants droit, s'ils ne sauraient prétendre personnellement au bénéfice de tout ou partie de la prestation pour la période postérieure au décès, peuvent percevoir les arrérages dus à la date du décès ; Considérant qu'aux termes de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation ; qu'aux termes des stipulations de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention : Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international (...) ; Considérant que le tribunal administratif a fait une inexacte application des stipulations de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en jugeant que la retraite du combattant attribuée en application des dispositions de l'article L. 255 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, qui constitue pour ses bénéficiaires une créance, ne pouvait être regardée comme un bien au sens de ces stipulations ; que M. A est fondé à demander, pour ce motif, l'annulation du jugement qu'il attaque ; Considérant qu'en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, il y a lieu pour le Conseil d'Etat, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond ; Sur les fins de non-recevoir opposées par le ministre de la défense : Considérant, en premier lieu, que le ministre de la défense soutient que les conclusions de M. A tendant à la décristallisation de la retraite du combattant de feu son père sont irrecevables, dès lors que ce dernier n'a pas, de son vivant, introduit d'action contentieuse en ce sens ; que, toutefois, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, il résulte des dispositions de l'article L. 255 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre qu'au moment du décès du bénéficiaire de la retraite du combattant, ses ayants droit disposent d'un intérêt propre leur donnant qualité pour demander à percevoir les sommes correspondant aux arrérages de la retraite du combattant qui resteraient encore dus à la date du décès ; Considérant, en second lieu, que le ministre oppose à la demande de décristallisation formulée par M. A la prescription prévue à l'article L. 258 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, aux termes duquel : Lorsque, par suite du fait personnel de l'ancien combattant, la demande de retraite du combattant est déposée postérieurement à l'expiration de la troisième année qui suit celle où il remplit les conditions pour l'obtenir, le titulaire ne peut prétendre qu'aux arrérages de la retraite du combattant afférents à l'année au cours de laquelle la demande a été déposée et aux trois années antérieures ; qu'il résulte toutefois des termes mêmes de ces dispositions que la prescription qui peut être opposée à une demande de retraite du combattant ne s'applique qu'à la demande initiale de constitution du droit à pension et ne saurait recevoir application en cas de demande de revalorisation ; Sur les conclusions de M. A tendant à la décristallisation de la retraite du combattant servie à son père au titre de la période du 3 juillet 1962 au 20 mai 1973 : Considérant que l'article 15 de la déclaration gouvernementale du 19 mars 1962 relative à la coopération économique et financière doit être interprété comme ne rendant pas applicables aux pensions concédées à des Algériens avant le 3 juillet 1962 les dispositions de l'article 71-I de la loi de finances du 26 décembre 1959, qui ont substitué aux pensions imputées sur le budget de l'Etat dont sont titulaires les nationaux des pays ou territoires ayant appartenu à l'Union française ou à la Communauté ou ayant été placés sous le protectorat ou sous la tutelle de la France des indemnités annuelles en francs, lesquelles n'ont pas le caractère de pensions ; qu'il résulte de l'instruction que la pension militaire d'invalidité et la retraite du combattant ont été concédées à feu M. Mohamed B antérieurement au 3 juillet 1962 ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens soulevés par M. A, la décision implicite du ministre de la défense rejetant sa demande tendant à la décristallisation de la retraite du combattant de son père, pour la période du 3 juillet 1962 au 20 mai 1973, date du décès de M. Mohamed B, doit être annulée ; Sur les conclusions aux fins d'injonction : Considérant que le contentieux des pensions est un contentieux de pleine juridiction ; qu'il appartient, dès lors, au juge saisi de se prononcer lui-même sur les droits des intéressés, sauf à renvoyer à l'administration compétente, et sous son autorité, le règlement de tel aspect du litige dans des conditions précises qu'il lui appartient de lui fixer ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu d'enjoindre au ministre de la défense de revaloriser, dans le délai de deux mois suivant la notification de la présente décision, la retraite du combattant de feu M. B, pour la période du 3 juillet 1962 au 20 mai 1973, au taux prévu par les dispositions du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre applicables aux ressortissants français, et de verser à M. A les arrérages correspondant à cette revalorisation, ainsi que les intérêts moratoires capitalisés dus en application de l'article 1153 du code civil, qui courent à compter du 14 février 2002, date de présentation de sa demande ; Sur les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Considérant que M. A a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. A, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle, de mettre à la charge de l'Etat, qui est la partie perdante dans la présente affaire le versement de la somme de 1 500 euros ;D E C I D E : -------------- Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Paris du 1er février 2006 est annulé. Article 2 : La décision implicite de rejet née du silence gardé pendant plus de deux mois par le ministre de la défense sur la demande de M. A, en date du 14 février 2002, tendant à la décristallisation de la retraite du combattant de feu son père, pour la période du 3 juillet 1962 au 20 mai 1973, est annulée. Article 3 : Il est enjoint au ministre de la défense de procéder, dans le délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision, à la revalorisation de la retraite du combattant de feu M. Mohamed B, et de verser à M. A les arrérages correspondant à cette revalorisation, ainsi que les intérêts moratoires capitalisés, calculés à compter du 14 février 2002. Article 4 : L'Etat versera la somme de 1 500 euros à la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, sous réserve que celle-ci renonce à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle pour laquelle elle a été désignée. Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. Mohammed A et au ministre de la défense.
Conseil d'Etat