Jurisprudence
La jurisprudence est l'ensemble des décisions rendues par les juridictions administratives, pendant une certaine période dans une matière, dans une branche ou dans l'ensemble du droit.
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CAA de PARIS, 6ème chambre, 17/01/2023, 21PA03731, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme A... E... C... a saisi le Tribunal administratif de Paris d'une demande tendant à la condamnation de l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris (AP-HP) à lui verser la somme de 62 973,60 euros, en réparation de ses préjudices financiers, de troubles dans les conditions d'existence et de son préjudice moral, assortie des intérêts à compter de la date de réception de la demande préalable et des intérêts capitalisés annuellement. Par un jugement n°1909261/2-2 du 3 mai 2021, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête sommaire, enregistrée le 5 juillet 2021, et un mémoire ampliatif, enregistré le 27 septembre 2021, Mme C..., représentée par Me Arvis, demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement du 3 mai 2021 du Tribunal administratif de Paris ; 2°) de condamner l'AP-HP à lui verser la somme de 62 973, 60 euros, assortie des intérêts à compter de la date de réception de la demande préalable et des intérêts capitalisés annuellement ; 3°) de mettre à la charge de l'AP-HP la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - le jugement attaqué est irrégulier car il est entaché d'insuffisance de motivation ; - l'illégalité tant externe qu'interne des décisions du 25 mars 2015 lui refusant la reconnaissance d'une maladie professionnelle constitue une faute de nature à engager la responsabilité de l'administration ; - les manquements graves à la déontologie, à l'impartialité, à l'égalité de traitement et au secret médical dont les praticiens de l'AP-HP ont fait preuve à son égard constituent également des fautes de nature à engager la responsabilité de l'administration ; - le préjudice financier s'élève à 47 973,60 euros, soit 17 453,10 euros au titre de son placement en demi-solde du 11 septembre 2015 au 10 mars 2017, 15 520,50 euros au titre des frais médicaux qui n'ont, à tort, pas été pris en charge et 15 000 euros au titre de la perte de traitement résultant de son placement en disponibilité d'office ; - le préjudice de troubles dans les conditions d'existence s'élève à 5 000 euros ; - le préjudice moral s'élève à 10 000 euros. Par un mémoire en défense, enregistré le 25 mars 2022, l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris, représentée par Me Lacroix, conclut au rejet de la requête et demande, en outre, qu'une somme de 1 800 euros soit mise à la charge de Mme C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que les moyens soulevés par Mme C... sont infondés. Par une ordonnance du 18 juillet 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 31 août 2022 à 12 heures. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de la santé publique ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ; - la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ; - l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. B..., - les conclusions de Mme Naudin, rapporteure publique, - et les observations de Me Guardiola pour l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris. Considérant ce qui suit : 1. Mme C... a été recrutée le 9 juin 1978 par l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris (AP-HP) en tant qu'agent hospitalier, avant d'être affectée au sein du (PSEUDO)groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière (PSEUDO)en qualité d'aide-soignante où elle a exercé ses fonctions au sein des services de lingerie, de restauration et de salle puis, à compter de l'année 2000, principalement au service de restauration. Mme C... a été victime d'un accident de service le 12 janvier 1984 et a déclaré trois maladies professionnelles prises en charge à compter de 2004 ainsi qu'une autre affection reconnue maladie professionnelle en 2011. Par deux déclarations effectuées le 27 novembre 2013 et le 7 février 2014, Mme C... a sollicité en outre la reconnaissance, au titre de maladies professionnelles, d'un syndrome du canal carpien et d'une lombosciatique droite. Après deux avis négatifs émis le 17 mars 2015 par la commission de réforme, l'administration a refusé de reconnaître l'imputabilité des maladies déclarées au service par deux décisions du 25 mars 2015. Mme C... a été admise à la retraite à compter du 1er juillet 2018. Le 28 décembre 2018, elle a introduit une demande préalable indemnitaire, implicitement rejetée le 28 février 2019 par l'administration. Mme C... a demandé au Tribunal administratif de Paris de condamner l'AP-HP à lui verser la somme de 62 973,60 euros, en réparation de ses préjudices financiers, de troubles dans les conditions d'existence et d'un préjudice moral. Par un jugement du 3 mai 2021, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Mme C... relève appel de ce jugement. Sur la régularité du jugement attaqué : 2. Les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à tous les arguments de Mme C..., ont répondu de façon circonstanciée à tous ses moyens et ont ainsi satisfait à l'obligation de motivation des jugements posée par l'article L. 9 du code de justice administrative. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 3. L'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 disposait, dans sa version alors applicable, que : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie (...) si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à sa mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident. / Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de la maladie ou de l'accident est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales. " Aux termes de l'article 31 du décret n°2003-1306 du 26 décembre 2003 : " Une commission de réforme est constituée dans chaque département pour apprécier la réalité des infirmités invoquées, la preuve de leur imputabilité au service, les conséquences et le taux d'invalidité qu'elles entraînent, l'incapacité permanente à l'exercice des fonctions. " Aux termes de l'article 30 de l'arrêté du 4 août 2004 : " Ces commissions présidées, selon le cas, par le préfet de Paris, ou par le préfet de police ou leur représentant, qui dirige les délibérations mais ne prend pas part au vote, sont composées comme suit : /- deux praticiens de médecine générale, membres du comité médical dont relève l'agent, auxquels est adjoint, pour les cas relevant de sa compétence, un médecin spécialiste, qui participe aux délibérations mais ne participe pas aux votes ; ". 4. En premier lieu, il résulte de l'instruction et notamment des deux procès-verbaux émis le 17 mars 2015 que les commissions de réforme étaient régulièrement composées conformément aux dispositions précitées de l'article 3 de l'arrêté du 4 août 2004. La circonstance, à la supposer établie, que les deux médecins, qui ont siégé au sein de cette commission, sont également des médecins statutaires employés par l'AP-HP est insuffisante pour caractériser un manquement à l'obligation d'indépendance de la commission, alors que le seul médecin expert employé par la AP-HP, le docteur D..., à s'être prononcé sur les pathologies de lombosciatique et de syndrome du canal carpien de Mme C... ne siégeait pas à la commission. 5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale : " (...) Est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractées dans les conditions mentionnées à ce tableau. (...) ". A l'époque des faits litigieux, aucune disposition ne rend applicables aux fonctionnaires hospitaliers, qui demandent le bénéfice des dispositions combinées du 2° de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 et de l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, les dispositions de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale instituant une présomption d'origine professionnelle pour toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractées dans des conditions mentionnées à ce tableau. Il appartient donc au fonctionnaire qui entend voir reconnaître le caractère professionnel d'une pathologie dont il souffre d'apporter des éléments de nature à justifier l'existence d'un lien direct entre cette pathologie et son travail habituel. 6. D'une part, il est constant que Mme C... souffre d'une lombosciatalgie droite, déclarée par une demande de reconnaissance de maladie professionnelle le 27 novembre 2013. Mme C... soutient que sa pathologie est une rechute de son accident de service du 12 janvier 1984 et produit un certificat médical du 8 novembre 2013 qui conclut, sans plus de précisions, que la recrudescence de lombalgies justifie une demande de reconnaissance de maladie professionnelle, ainsi que l'exposé détaillé des tâches qu'elle effectuait. Toutefois, il résulte de l'instruction que l'accident de service du 9 janvier 1984 a généré une dorsalgie d'effort et que l'intéressée indique, selon les termes non contestés sur ce point du rapport d'expertise du 23 juillet 2014, souffrir du rachis lombaire depuis son arrivée en 1978 à l'AP-HP. En outre, Mme C... ne verse pas aux débats de documents mettant en relation directe les tâches qu'elle effectuait et sa pathologie. Dans ces conditions, Mme C... n'apporte pas d'éléments de nature à justifier d'un lien direct entre sa lombosciatalgie droite et son travail habituel. 7. D'autre part, il est constant que Mme C... souffre d'un syndrome du canal carpien droit, déclaré dans sa demande de reconnaissance de maladie professionnelle du 7 février 2014. Mme C... soutient que sa pathologie est en lien direct et certain avec l'exercice de ses fonctions et produit à l'appui de ses allégations un certificat médical du 8 novembre 2013 indiquant que le syndrome du canal carpien, dont elle souffre et qui a été mis en évidence par un électromyogramme du 8 novembre 2013, doit être reconnu comme maladie professionnelle ainsi que divers relevés de ses activités, dont un rapport du médecin du travail du 7 juin 2005, un rapport du 16 mai 2006 de la direction des ressources humaines et une fiche de tâche actualisée le 1er mars 2012, qui font état de tâches quotidiennes de préparation, de manipulation et de nettoyage. Toutefois, ces éléments ne permettent pas d'établir de lien direct et certain, au plan médical, entre les tâches effectuées et la pathologie de Mme C..., ainsi que l'a estimé le rapport d'expertise du 23 juillet 2014 du docteur D.... 8. Dans ces conditions, en refusant de reconnaître l'imputabilité des maladies déclarées au service par deux décisions du 25 mars 2015, l'administration n'a pas commis de faute de nature à engager sa responsabilité. 9. En troisième et dernier lieu, le moyen tiré de la faute commise par l'AP-HP du fait des manquements aux obligations d'indépendance, d'impartialité, de déontologie et de secret médical doit être écarté par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges au point 9 du jugement attaqué. 10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées. 11. Enfin, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées au titre du même article par l'Assistance Publique- Hôpitaux de Paris. DÉCIDE : Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée. Article 2 : Les conclusions de l'Assistance Publique- Hôpitaux de Paris au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... E... C... et à l'Assistance Publique- Hôpitaux de Paris. Délibéré après l'audience du 3 janvier 2023 à laquelle siégeaient : - M. Célérier, président de chambre, - M. Niollet, président assesseur, - M. Pagès, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 17 janvier 2023. Le rapporteur, D. PAGES Le président, T. CELERIER La greffière, Z. SAADAOUI La République mande et ordonne au ministre de la santé et de la prévention en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21PA03731
Cours administrative d'appel
Paris
CAA de TOULOUSE, 2ème chambre, 24/01/2023, 21TL00563, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner la commune de Montpellier à lui verser une somme de 13 700 euros au titre du complément de traitement dû depuis le 10 octobre 2017, et d'enjoindre à la commune de lui délivrer des bulletins de salaires rectifiés à compter du 10 octobre 2017. Par un jugement n° 19003813 du 11 décembre 2020, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 10 février 2021, sous le n° 21MA00563 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, puis le 11 avril 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n° 21TL00563, et un mémoire enregistré le 16 septembre 2022, M. A... B..., représenté par Me Brunel, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures : 1°) d'annuler ce jugement du 11 décembre 2020 ; 2°) de condamner la commune de Montpellier à lui verser une somme de 28 700 euros au titre du complément de traitement dû depuis le 10 octobre 2017, assortie des intérêts au taux légal et de la capitalisation des intérêts ; 3°) d'enjoindre à la commune de Montpellier de lui délivrer des bulletins de salaires rectifiés à compter du 10 octobre 2017 ; 4°) de mettre à la charge de la commune de Montpellier la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - le jugement est entaché de contradictions en ce que la commune avait bien pris un engagement concernant le maintien de sa rémunération, lequel ne concernait pas seulement la période de stage ; dès lors, en ne l'informant pas de la diminution de sa rémunération après la période de stage, la commune a manqué à son devoir de loyauté ; il a rapporté la preuve de son préjudice financier ; - la responsabilité contractuelle de la commune est engagée ; - subsidiairement, sa responsabilité précontractuelle doit être retenue, en raison du défaut d'information lors de son recrutement ; ce défaut d'information lui a occasionné un préjudice financier ; - il est fondé à demander la condamnation de la commune à revoir sa situation, à lui verser les arriérés de traitement et à rectifier ses bulletins de paie depuis le 10 octobre 2017. Par une ordonnance en date du 11 avril 2022, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué à la cour administrative d'appel de Toulouse le jugement de la requête de M. B.... Par un mémoire en défense, enregistré le 1er septembre 2022, la commune de Montpellier, représentée par Me Merland, conclut au rejet de la requête et demande de mettre à la charge de M. B... le versement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle fait valoir que : - la requête est irrecevable en ce qu'elle méconnaît les dispositions de l'article R. 414-5 du code de justice administrative ; - sa responsabilité ne saurait être engagée dès lors que les dispositions prévues à l'article R. 4138-39 du code de la défense ont été appliquées lors du détachement de M. B..., puis celles de l'article L. 4139-3 lors de sa titularisation ; il ne pouvait y avoir d'accord contractuel tendant à déroger à l'application des règles statutaires lors de sa titularisation ; aucune erreur n'a été commise dans les informations transmises à l'appelant, qui ne démontre l'existence d'aucun préjudice ; - dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel, les demandes d'injonction sont irrecevables, en l'absence de demande préalable auprès de la commune ; sur le fond, elle renvoie à ses précédents développements. Par ordonnance du 5 septembre 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 10 octobre 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de la défense ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Anne Blin, présidente-assesseure, - les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique, - et les observations de Me Belotti substituant Me Brunel, représentant M. B... et de Me Lenoir, substituant Me Merland, représentant la commune de Montpellier. Considérant ce qui suit : 1. M. B..., ... au sein de l'armée de terre ayant atteint l'indice majoré 410, a présenté sa candidature pour un poste au sein de la police municipale de la commune de Montpellier, dans le cadre du dispositif des emplois réservés. Par un arrêté du 11 octobre 2016, il a été nommé par voie de détachement dans le cadre d'emplois des agents de police municipale pour une durée d'un an en qualité de stagiaire, et classé au 12ème échelon de son grade, indice majoré 382. L'arrêté prévoyait dans son article 2 qu'il bénéficiait à titre personnel d'un maintien de rémunération sur l'indice majoré 410. Par arrêté du 19 octobre 2017, il a été titularisé sur le grade de gardien-brigadier et classé au 6ème échelon, indice majoré 350 avec une ancienneté d'un an. Après le rejet de sa demande préalable d'indemnisation du préjudice qu'il estimait avoir subi, il a demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner la commune de Montpellier à lui verser une somme de 13 700 euros au titre du complément de traitement dû depuis le 10 octobre 2017 et d'enjoindre à la commune de lui délivrer des bulletins de salaires rectifiés à compter de cette date. M. B... relève appel du jugement rendu le 11 décembre 2020 qui a rejeté ses demandes. Sur les conclusions à fin d'annulation : 2. D'une part, aux termes de l'article L. 4139-3 du code de la défense, dans ses dispositions applicables au litige : " Le militaire, à l'exception de l'officier de carrière et du militaire commissionné, peut se porter candidat pour l'accès aux emplois réservés, sur demande agréée, dans les conditions prévues par le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre. / En cas d'intégration ou de titularisation, la durée des services effectifs du militaire est reprise en totalité dans la limite de dix ans pour l'ancienneté dans le corps ou le cadre d'emploi d'accueil de catégorie C. Elle est reprise pour la moitié de la durée des services effectifs dans la limite de cinq ans pour l'ancienneté dans le corps ou le cadre d'emploi de catégorie B. ". 3. D'autre part, aux termes de l'article R. 4138-39 du code de la défense, dans ses dispositions applicables au litige : " I.- Lors du détachement prévu par les articles L. 4139-1 à L. 4139-3 ou en cas de détachement d'office, le militaire est classé, dans le grade dans lequel il est détaché, à un indice égal ou, à défaut, immédiatement supérieur à l'indice dont il bénéficiait dans son grade d'origine. / Le militaire est classé dans l'échelon sommital du grade dans lequel il est détaché si l'indice afférent à cet échelon est inférieur à l'indice qu'il détenait dans son grade d'origine. Il conserve néanmoins à titre personnel, durant la durée de son détachement, l'indice détenu dans son grade d'origine, dans la limite de l'indice afférent à l'échelon sommital du corps ou cadre d'emplois d'accueil. / II.- Durant le détachement prévu au I, le militaire perçoit de l'administration d'accueil une rémunération comprenant le traitement indiciaire brut calculé sur la base du classement opéré en application du I, les indemnités de résidence et à caractère familial et, le cas échéant, les primes et indemnités allouées au titre du nouvel emploi. / Dans le cas où la rémunération perçue par le militaire dans son nouvel emploi est inférieure à celle qu'il aurait perçue s'il était resté en position d'activité au sein des forces armées, le militaire perçoit de son administration d'origine une indemnité compensatrice égale à la différence entre, d'une part, la solde indiciaire brute, l'indemnité de résidence, le supplément familial de solde, l'indemnité pour charges militaires et les primes et indemnités liées à la qualification qu'il aurait perçus s'il était resté en position d'activité et, d'autre part, le traitement indiciaire brut, les indemnités de résidence et à caractère familial, et les primes et indemnités allouées au titre du nouvel emploi. " 4. Les dispositions de l'article L. 4139-3 du code de la défense fixent les modalités selon lesquelles la carrière antérieure du militaire qui devient fonctionnaire en étant recruté sur un emploi réservé est prise en considération pour déterminer l'ancienneté dont il bénéficie dans le corps qu'il rejoint lors de sa titularisation. Cette reprise d'ancienneté permet de déterminer, au regard des dispositions statutaires propres à chaque corps, l'échelon auquel il doit être reclassé et, par suite, l'indice qui en résulte. Ces dispositions ne prévoient pas que le reclassement dans la fonction publique d'un ancien militaire, recruté au titre de la législation sur les emplois réservés, tienne compte de l'indice détenu par l'intéressé lorsqu'il était militaire. 5. En premier lieu, M. B... a bénéficié, lors de son détachement dans le cadre d'emplois des gardiens de police municipale, du maintien à titre personnel de son traitement sur la base de l'indice majoré 410 au titre de la première année d'exercice de ses fonctions à compter du 10 octobre 2016, ainsi que le prévoient les dispositions de l'article R. 4138-39 du code de la défense, citées au point 3. Toutefois, ainsi qu'il a été exposé au point 4, M. B..., qui a été recruté sur un emploi réservé, ne pouvait bénéficier du maintien du traitement indiciaire qu'il détenait en qualité de militaire lors de sa titularisation dans le cadre d'emplois des gardiens-brigadiers. S'il se prévaut de la proposition de rémunération établie par la commune le 7 juillet 2016 sur la base de l'indice 410, laquelle est signée par un représentant de la direction des ressources humaines ainsi que par lui-même le 23 août 2016, ce document ne saurait être regardé comme un engagement contractuel de la commune au maintien de sa rémunération à l'issue de la période de détachement. Ainsi, la commune de Montpellier n'a commis aucune faute en faisant application, pour procéder au reclassement de M. B... lors de sa titularisation, des dispositions citées au point 2 qui sont seules applicables à sa situation. 6. En second lieu, il ne résulte pas de l'instruction que M. B... aurait été informé par la commune des conditions dans lesquelles il serait recruté dans le cadre d'emplois des gardiens-brigadiers à l'issue de la période de détachement. Toutefois, alors qu'aucune disposition législative ou règlementaire ni aucun principe n'imposent à l'administration une telle obligation, à supposer qu'un défaut d'information puisse en l'espèce constituer une faute de nature à engager la responsabilité de la commune de Montpellier au regard de la proposition de rémunération signée par M. B... qui a pu l'induire en erreur sur les modalités de son recrutement, l'appelant n'apporte aucun élément permettant de justifier qu'il aurait effectivement perdu une chance de bénéficier d'une meilleure rémunération en postulant sur un autre emploi, en particulier sur un poste de catégorie B. Par suite, M. B... ne justifie, en tout état de cause, d'aucun préjudice résultant du défaut d'information de la commune de Montpellier lors de son recrutement. 7. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par la commune, que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué qui n'est entaché d'aucune contradiction de motifs, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes. Il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter également ses conclusions à fin d'injonction. Sur les frais liés au litige : 8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Montpellier, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que M. B... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. 9. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... une somme à verser à la commune de Montpellier au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. D E C I D E : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Montpellier au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié M. A... B... et à la commune de Montpellier. Délibéré après l'audience du 10 janvier 2023, à laquelle siégeaient : Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre, Mme Blin, présidente assesseure, M. Teulière, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 janvier 2023. La rapporteure, A. Blin La présidente, A. Geslan-Demaret La greffière, M-M. Maillat La République mande et ordonne au préfet de l'Hérault en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. N°21TL00563 2
Cours administrative d'appel
Toulouse
CAA de NANTES, 3ème chambre, 13/01/2023, 21NT03308, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler la décision par laquelle la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion a refusé de lui attribuer l'avantage spécifique d'ancienneté à raison de son affectation dans un quartier urbain difficile du 14 février 2000 au 30 septembre 2017 et d'enjoindre à la direction régionale des entreprises de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) de lui attribuer cet avantage au titre de la période considérée en procédant à la reconstitution de sa carrière. Par un jugement n° 1900906 du 7 octobre 2021, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés les 26 novembre 2021 et 14 novembre 2022, M. B... A..., représenté par Me A..., demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Caen du 7 octobre 2021 ; 2°) d'annuler la décision par laquelle le directeur régional Normandie a implicitement rejeté sa demande relative à l'attribution de l'avantage spécifique d'ancienneté ; 3°) d'enjoindre à la DIRRECTE Normandie de procéder à l'attribution de cet avantage en procédant à la reconstitution de sa carrière à compter du 14 février 2000, dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - la circonstance selon laquelle le ministère a abusivement retardé la régularisation de sa situation au regard de l'avantage spécifique d'ancienneté n'a aucune incidence sur la recevabilité de la requête ; - il doit être regardé comme ayant sollicité dès le 10 janvier 2018, soit dans le délai d'un an fixé par l'article L. 55 du code des pensions civiles et militaires de retraite, la révision de sa pension de retraite en tenant compte de l'avantage spécifique d'ancienneté auquel il était éligible ; - il résulte des dispositions combinées des articles 11 de la loi du 26 juillet 1991, des articles 1er, 2 et 3 du décret du 21 mars 1995, ainsi que du décret du 26 décembre 1996 fixant la liste des zones urbaines sensibles qu'à raison de son affectation sur le site d'Hérouville-Saint-Clair à compter du 14 février 2000, il aurait dû bénéficier de 27 mois d'ancienneté qui lui aurait permis d'accéder au 10ème échelon de son grade dès le 14 janvier 2018, soit trois mois seulement après son départ à la retraite ; le bénéfice de l'avantage spécifique d'ancienneté doit lui être accordé et conduire à une revalorisation de sa pension de retraite ; la DIRECCTE a ainsi méconnu ces dispositions en refusant de lui attribuer le bénéfice de l'avantage spécifique d'ancienneté ; - son administration ne l'a pas informé de son droit au bénéfice de l'avantage spécifique d'ancienneté, qui l'aurait conduit à repousser son départ à la retraite de quelques mois au 14 janvier 2018, afin de bénéficier d'un changement d'échelon et d'une pension mieux rémunérée ; - les fonctionnaires de catégorie A et B affectés sur le même site ont bénéficié de l'avantage spécifique d'ancienneté à la fin de l'année 2018, faisant ainsi apparaître une rupture d'égalité entre les agents, dès lors que sa situation de retraité ne devrait pas constituer un obstacle à cet avantage en application des dispositions citées ci-dessus ; - le ministre ne peut valablement opposer la prescription quadriennale à sa réclamation indemnitaire dès lors qu'il a envoyé plusieurs courriers au cours de l'année 2018, notamment celui du 10 janvier 2018, relatif à l'attribution de l'avantage spécifique d'ancienneté, qui a donc trait au fait générateur de la créance et qui interrompt le délai de prescription en application des dispositions de l'article 2 de la loi du 31 décembre 1968. Par un mémoire en défense, enregistré le 10 novembre 2022, le ministre du travail, du plein-emploi et de l'insertion conclut au rejet de la requête. Il soutient que : - la créance est prescrite ; - les moyens invoqués par M. A... ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu: - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ; - la loi n° 91-715 du 26 juillet 1991 ; - le décret n° 91-313 du 21 mars 1995 ; - le décret n° 96-1156 du 26 décembre 1996 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme C..., - et les conclusions de M. Berthon, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. M. B... A..., contrôleur du travail, a été radié des cadres et admis à faire valoir ses droits à la retraite à compter du 1er octobre 2017. Par courrier du 9 décembre 2018 reçu le 2 janvier 2019, il a sollicité du directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) de Normandie qu'il lui accorde le bénéfice de l'avantage spécifique d'ancienneté à compter du 1er janvier 2003, et qu'il en tire toutes les conséquences en termes d'avancement et d'avantages financiers dont il aurait dû bénéficier avant son départ à la retraite. Il demandait en outre à son administration de tenir compte de cette reconstitution de sa carrière afin de réévaluer sa pension de retraite. M. A... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler la décision implicite de rejet de cette demande. Par jugement du 7 octobre 2021, dont M. A... relève appel, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande. Sur la révision de la pension de retraite concédée à M. A... : 2. Aux termes de l'article du I de l'article L. 15 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " Aux fins de liquidation de la pension, le montant de celle-ci est calculé en multipliant le pourcentage de liquidation (...) par le traitement ou la solde soumis à retenue afférents à l'indice correspondant à l'emploi, grade, classe et échelon effectivement détenus depuis six mois au moins par le fonctionnaire ou militaire au moment de la cessation des services valables pour la retraite (...) ". Aux termes de l'article L. 55 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " (...) la pension et la rente viagère d'invalidité sont définitivement acquises et ne peuvent être révisées ou supprimées à l'initiative de l'administration ou sur demande de l'intéressé que dans les conditions suivantes : / A tout moment en cas d'erreur matérielle ; / Dans un délai d'un an à compter de la notification de la décision de concession initiale de la pension ou de la rente viagère, en cas d'erreur de droit ". Cette dernière disposition permet notamment, dans le délai d'un an, de redresser toute erreur de droit concernant la détermination de la situation administrative du fonctionnaire retraité au jour de son admission à la retraite et ayant eu une influence sur la liquidation de sa pension. Il appartient ainsi à l'autorité chargée de cette liquidation de vérifier, sous le contrôle du juge, l'existence et la portée des erreurs alléguées. 3. Il n'est pas contesté que M. A..., radié des cadres et admis à la retraite à compter du 1er octobre 2017, s'est vu concéder une pension civile de retraite par une décision qui lui a été notifiée au plus tard le 1er octobre 2017. Il s'ensuit que lorsque, par lettre du 9 décembre 2018 notifiée le 2 janvier 2019 à la DIRECCTE de Normandie, M. A... a saisi les services de son ministère d'origine, alors d'ailleurs que seul le service des pensions de retraite de l'Etat était compétent, d'une demande tendant à la révision de sa pension de retraite, le délai d'un an fixé par les dispositions de l'article L. 55 du code des pensions civiles et militaires de retraite permettant de réviser la pension de retraite qui lui avait été concédée, était expiré. Si M. A... se prévaut des courriers qu'il a adressés antérieurement à son administration, dans le délai d'un an prévu par l'article L. 55, en particulier celui du 10 janvier 2018, le requérant se bornait dans ce courrier à demander s'il était éligible au bénéfice de l'avantage spécifique d'ancienneté et à ce qu'on lui précise à quelle date interviendrait la régularisation en précisant qu'il était concerné par l'article 2.5 de la note du 27 septembre 2012, selon lequel les fonctionnaires admis à la retraite peuvent présenter dans l'année suivant la notification de la décision de concession de leur pension une demande de révision pour erreur de droit. Un tel courrier ne saurait s'analyser en une demande de révision de sa pension de retraite pour l'application de l'article L. 55 du code des pensions civiles et militaires de retraite. Sur la reconstitution juridique de la carrière : 4. M. A... ayant été définitivement radié des cadres et admis à faire valoir ses droits à la retraite à sa demande à compter du 1er octobre 2017, l'administration ne pouvait plus, postérieurement à cette date, procéder à la reconstitution de sa carrière. Il s'ensuit que le requérant ne peut utilement soutenir qu'il a été illégalement privé du bénéfice de l'avantage spécifique d'ancienneté au cours de sa carrière au soutien de ses conclusions à fin d'annulation de la décision portant rejet de sa demande tendant à la reconstitution de sa carrière, dès lors qu'il n'a présenté cette demande que postérieurement à son admission à la retraite devenue définitive. 5. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que la demande présentée au titre des frais liés à l'instance doivent être rejetées. DECIDE : Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2: Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion. Délibéré après l'audience du 15 décembre 2022, à laquelle siégeaient : - M. Salvi, président de chambre, - Mme Brisson, présidente-assesseure, - Mme Lellouch, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 janvier 2023. La rapporteure, J. C... Le président, D. Salvi La greffière, A. Martin La République mande et ordonne au ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21NT03308
Cours administrative d'appel
Nantes
Conseil d'État, 7ème chambre, 17/01/2023, 461068, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler la décision du 4 février 2020 par laquelle le directeur de la caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL) a refusé de lui attribuer une rente viagère d'invalidité, ainsi que la décision du 3 juin 2020 par laquelle cette autorité a rejeté son recours gracieux formé contre cette décision. Par un jugement n° 2007413 du 25 novembre 2021, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté cette demande. Par une ordonnance n° 22VE00165 du 3 février 2022, enregistrée le 3 février 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le président de la cour administrative d'appel de Versailles a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, le pourvoi enregistré le 25 janvier 2022 au greffe de cette cour, présenté par Mme A.... Par ce pourvoi et par un nouveau mémoire, enregistré le 25 avril 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme A... demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) de mettre à la charge de la CNRACL et de la Caisse des dépôts et consignations la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Elise Adevah-Poeuf, maître des requêtes, - les conclusions de Mme Cécile Raquin, rapporteure publique ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de Mme A... et à la SCP L. Poulet, Odent, avocat de la Caisse des dépôts et consignations ;Considérant ce qui suit : 1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que par un arrêté municipal du 3 février 2020, Mme A..., adjointe technique territoriale, a été radiée des effectifs de la commune de Jouy-le-Moutier et admise à la retraite pour invalidité à compter du 20 septembre 2019. Par un courrier du 4 février 2020, le directeur général de la Caisse des dépôts et consignations, agissant en qualité de gestionnaire de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL) a informé l'intéressée qu'elle émettait un avis favorable à cette admission à la retraite, sans attribution d'une rente viagère. Mme A... a formé un recours gracieux contre cette décision. Le directeur général de la Caisse des dépôts et consignations, a rejeté ce recours par une décision du 3 juin 2020. Mme A... se pourvoit en cassation contre le jugement du 25 novembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande d'annulation de ces décisions. 2. Aux termes de l'article 36 du décret du 26 décembre 2003 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales : " Le fonctionnaire qui a été mis dans l'impossibilité permanente de continuer ses fonctions en raison d'infirmités résultant de blessures ou de maladies contractées ou aggravées, soit en service, soit en accomplissant un acte de dévouement dans un intérêt public, soit en exposant ses jours pour sauver la vie d'une ou plusieurs personnes, peut être mis à la retraite par anticipation soit sur sa demande, soit d'office, à l'expiration des délais prévus au troisième alinéa de l'article 30 et a droit à la pension rémunérant les services prévue au 2° de l'article 7 et au 2° du I de l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite(...) ". Aux termes de l'article 37 du même décret : " I.- Les fonctionnaires qui ont été mis à la retraite dans les conditions prévues à l'article 36 ci-dessus bénéficient d'une rente viagère d'invalidité cumulable, selon les modalités définies au troisième alinéa du I de l'article 34, avec la pension rémunérant les services prévus à l'article précédent./Le bénéfice de cette rente viagère d'invalidité est attribuable si la radiation des cadres ou le décès en activité interviennent avant que le fonctionnaire ait atteint la limite d'âge sous réserve de l'application des articles 1er-1 à 1er-3 de la loi du 13 septembre 1984 susvisée et sont imputables à des blessures ou des maladies survenues dans l'exercice des fonctions ou à l'occasion de l'exercice des fonctions, ou résultant de l'une des autres circonstances énumérées à l'article 36 ci-dessus (...) ". 3. Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service. 4. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme A..., titularisée dans le corps des adjoints techniques territoriaux en 2008, a été placée en congé de maladie à compter du 1er janvier 2009 alors qu'elle était affectée comme agent territorial spécialisé des écoles maternelles dans une école de la commune. Placée ensuite en congé de longue maladie, puis en congé de longue durée jusqu'au 17 décembre 2012, elle a repris son activité dans le cadre d'un mi-temps thérapeutique et a été affectée comme agent de restauration dans une autre école jusqu'au 13 juin 2013. Elle a été placée en congé de longue durée à compter du 20 juin 2013, jusqu'au 31 août 2014, puis en mi-temps thérapeutique et, enfin, à temps plein, dans une troisième école, avant d'être à nouveau placée en congé de longue durée à compter du 16 mars 2015. Ayant épuisé ses droits statutaires à congé de longue durée, elle a été placée d'office en disponibilité à compter du 16 avril 2015, jusqu'à son admission à la retraite le 20 septembre 2019. 5. En premier lieu, il ressort des énonciations du jugement attaqué que le tribunal administratif s'est borné à relever que l'appréciation de faits caractérisant un harcèlement moral dépassait le cadre strictement médical de la mission confiée aux médecins qui les ont évoqués. Par suite, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que le tribunal administratif aurait commis une erreur de droit en subordonnant la reconnaissance de l'imputabilité au service de la maladie dont elle est atteinte à l'existence d'une situation de harcèlement moral. 6. En second lieu, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'à l'appui de ses allégations, Mme A... se prévalait de certificats médicaux décrivant dans des termes généraux une situation de souffrance présentée par celle-ci comme liée au travail, ces certificats ne se prononçant pas de façon univoque sur l'existence d'un lien entre ses conditions de travail et la maladie qu'elle a développée. De même, si elle se prévalait d'un avis du 29 mars 2018 par lequel la commission de réforme a reconnu l'imputabilité de sa maladie au service, cette commission, par un avis ultérieur, a écarté l'existence d'un lien direct entre sa maladie et les conditions de travail auxquelles elle a été exposée. Enfin, l'enquête administrative diligentée par le maire de la commune en 2017 avait pour objet de faire la lumière sur les faits de harcèlement moral dont Mme A... soutenait avoir été victime et ne se prononce pas sur l'imputabilité au service de la maladie dont elle est atteinte. Par suite, le moyen tiré de ce que le tribunal administratif de Cergy-Pontoise aurait inexactement qualifié les faits qui lui étaient soumis en jugeant que Mme A... n'établissait pas l'existence d'un lien direct entre sa maladie et l'exercice de ses fonctions ou ses conditions de travail ne peut qu'être écarté. 7. En troisième lieu, d'une part, le tribunal n'était pas tenu de répondre à tous les arguments invoqués à l'appui du moyen tiré de ce que la maladie dont souffre Mme A... aurait un lien direct avec ses conditions de travail. D'autre part, le moyen tiré de ce que la cour aurait commis une erreur de droit en omettant de prendre en compte les conclusions de la commission d'enquête diligentée par le maire de la commune n'est en tout état de cause pas assorti de précision permettant d'en apprécier le bien-fondé. Il suit de là que les moyens tirés de ce que le jugement attaqué serait insuffisamment motivé et serait entaché d'une erreur de droit ne peuvent qu'être écartés. 8. Il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement qu'elle attaque. 9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de la Caisse des dépôts et consignations qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. D E C I D E : -------------- Article 1er : Le pourvoi de Mme A... est rejeté. Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme B... A... et à la Caisse des dépôts et consignations. ECLI:FR:CECHS:2023:461068.20230117
Conseil d'Etat
CAA de LYON, 7ème chambre, 19/01/2023, 22LY01432, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du ministre de la défense du 27 mars 2017 en tant qu'il décide qu'une partie des infirmités dont il souffre n'est pas imputable au service. Par un jugement n° 1907353 du 16 mars 2022, le tribunal a fixé les taux d'invalidité de la pension militaire d'invalidité de M. B... imputable au service à 40 % pour le syndrome dépressif et anxieux et 30 % pour les séquelles de traumatisme lombaire. Procédure devant la cour Par une requête et un mémoire enregistrés les 9 mai et 28 juillet 2022, le ministre des armées demande à la cour d'annuler ce jugement. Il soutient que la décision du 22 avril 2013 prise sur une demande concernant les séquelles du traumatisme lombaire qui n'a pas été contestée qui fixe à 10 % le taux d'invalidité non imputable au service de la pension militaire est revêtue de l'autorité de la chose décidée. Par un mémoire enregistré le 4 juillet 2022, M. B..., représenté par Me Villard, conclut au rejet de la requête, demande la réformation partielle du jugement et de mettre à la charge de l'État une somme de 1 400 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient qu'aucun moyen de la requête n'est fondé et que le jugement doit être réformé en tant qu'il prévoit que les séquelles du traumatisme et le stress anxieux dépressif sont imputables au service à compter du 23 septembre 2015 alors qu'elles doivent l'être à compter du 16 décembre 2008. M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 13 juillet 2022 Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ; - le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Djebiri, première conseillère ; - et les conclusions de M. Rivière, rapporteur public ; Considérant ce qui suit : 1. M. B..., né en 1977, s'est engagé dans l'armée le 1er avril 1997 et a subi deux accidents à l'entraînement en février 1998 et novembre 1999. A la suite d'une demande de pension militaire enregistrée le 16 décembre 2008, l'administration, par décision du 22 avril 2013, a considéré que M. B... présentait des séquelles de traumatisme lombaire sur canal lombaire étroit constitutionnel avec un taux global de 20 % dont 10 % non imputables au service, et un syndrome dépressif au taux global de 20 %, dont 10 % non imputables au service. Par une décision du 27 mars 2017, la ministre des armées a, à compter du 23 septembre 2015, pour sa pension militaire d'invalidité définitive, fixé son taux d'invalidité pour le syndrome anxio-dépressif avec somatisation, troubles de l'humeur et du sommeil à 40 %, dont 20 % imputables au service, et pour les séquelles de traumatisme lombaire sur canal étroit constitutionnel à 30 %, dont 15 % imputables au service, soit un taux global d'invalidité fixé à 40 %. La ministre des armées demande à la cour l'annulation du jugement du 16 mars 2022 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a fixé les taux d'invalidité de la pension militaire d'invalidité de M. B... imputable au service à 40 % pour le syndrome dépressif et anxieux, et 30 % pour les séquelles de traumatisme lombaire. Par la voie de l'appel incident, M. B... en demande l'annulation de ce jugement en tant qu'il a fixé le début de l'imputabilité au service des infirmités au 23 septembre 2015 et non au 16 décembre 2008. Sur l'appel principal : 2. Aux termes de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, applicable à la date de la demande de pension : " Ouvrent droit à pension : 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; / (...). " Aux termes de l'article L. 3 du même code : " Lorsqu'il n'est pas possible d'administrer ni la preuve que l'infirmité ou l'aggravation résulte d'une des causes prévues à l'article L. 2, ni la preuve contraire, la présomption d'imputabilité au service bénéficie à l'intéressé à condition : / (...) / 3° En tout état de cause, que soit établie, médicalement, la filiation entre la blessure ou la maladie ayant fait l'objet de la constatation et l'infirmité invoquée. / (...). " Selon l'article L. 4 : " La pension est concédée : / 1° Au titre des infirmités résultant de blessures, si le taux d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse 10 % (...). " Enfin, l'article L. 29 dispose : " Le titulaire d'une pension d'invalidité concédée à titre définitif peut en demander la révision en invoquant l'aggravation d'une ou plusieurs infirmités en raison desquelles cette pension a été accordée. / Cette demande est recevable sans condition de délai. / La pension ayant fait l'objet de la demande est révisée lorsque le degré d'invalidité résultant de l'infirmité ou de l'ensemble des infirmités est reconnu supérieur de 10 points par rapport au pourcentage antérieur. / Toutefois, l'aggravation ne peut être prise en considération que si le supplément d'invalidité est exclusivement imputable aux blessures et aux maladies constitutives des infirmités pour lesquelles la pension a été accordée. / La pension définitive révisée est concédée à titre définitif. " Il résulte de ces dispositions que le droit à pension est destiné à réparer toutes les conséquences des faits de service dommageables telles qu'elles se révèlent par suite de l'évolution physiologique, pour autant qu'aucune cause étrangère, telle qu'une affection distincte de l'affection pensionnée, ne vienne, pour sa part, aggraver l'état de l'intéressé. Ainsi l'aggravation de l'infirmité initiale, si elle est seulement due au vieillissement, peut justifier une révision du taux de la pension. En revanche, si le vieillissement cause une nouvelle infirmité, distincte de l'infirmité pensionnée, qui contribue à l'aggravation de celle-ci, les dispositions précitées de l'article L. 29 font obstacle à cette révision, dès lors que l'aggravation est due à une cause étrangère à l'infirmité pensionnée. 3. La circonstance que, par une décision du 23 avril 2013 qui n'a pas été contestée, le ministre de la défense a rejeté une précédente demande d'imputabilité totale au service de l'intégralité de son infirmité liée au séquelle de son traumatisme ne saurait faire obstacle à ce que M. B... conteste la décision, qui a un objet différent, statuant sur son droit à majoration de la pension après prise en compte d'éléments objectivés par une nouvelle expertise du 8 octobre 2021. Par suite, la ministre des armées ne peut utilement se prévaloir, sur ce point, d'une " autorité de la chose décidée ". 4. Il en résulte que la ministre des armées n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a fixé les taux d'invalidité de la pension militaire d'invalidité de M. B... imputable au service à 40 % pour le syndrome dépressif et anxieux et 30 % pour les séquelles de traumatisme lombaire. Sur l'appel incident : 5. Aux termes de l'article L. 151-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre : " La pension militaire d'invalidité prévue par le présent code est attribuée sur demande de l'intéressé. L'entrée en jouissance est fixée à la date du dépôt de la demande. Il en est de même de la date d'entrée en jouissance de la pension révisée pour aggravation ou pour prise en compte d'une infirmité nouvelle. " 6. M. B... a renouvelé le 23 septembre 2015 sa demande de pension militaire d'invalidité, qui a abouti à la décision du 27 mars 2017. Par suite, alors même qu'aux termes du rapport d'expertise du 8 octobre 2021 l'imputabilité au service de l'accident du 18 novembre 1999 est totale, la date d'entrée en jouissance de la pension correspond au 23 septembre 2015, date de dépôt de sa nouvelle demande, même s'il a déposé une demande le 16 décembre 2008 qui a donné lieu à une décision du 15 juillet 2014, emportant concession d'une pension définitive à compter du 16 décembre 2011, non contestée, et qui ne peut l'être utilement dès lors qu'elle ne constitue pas la base légale de la décision en litige, et qui au surplus est elle-même devenue définitive et est indépendante de la décision en litige. 7. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a fixé la date d'entrée en jouissance de la pension au 23 septembre 2015. 8. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État la somme demandée par M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DÉCIDE : Article 1er : La requête du ministre des armées est rejetée. Article 2 : L'appel incident de M. B... est rejeté. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre des armées. Délibéré après l'audience du 5 janvier 2023 à laquelle siégeaient : M. Picard, président de chambre ; M. Seillet, président assesseur ; Mme Djebiri, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 janvier 2023. La rapporteure, C. DjebiriLe président, V.-M. Picard La greffière, A. Le Colleter La République mande et ordonne au ministre des armées, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition, La greffière, N° 22LY01432 2 al
Cours administrative d'appel
Lyon
CAA de LYON, 7ème chambre, 19/01/2023, 22LY00733, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler la décision du 14 mai 2019 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande de révision de sa pension militaire d'invalidité. Par un jugement n° 2001066 du 9 novembre 2021, le tribunal a rejeté sa demande. Procédure devant la cour Par une requête enregistrée le 9 mars 2022, M. C..., représenté par Me Thuriot, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement et la décision susmentionnée ; 2°) d'enjoindre à la ministre des armées de procéder au réexamen de sa demande de révision de sa pension militaire d'invalidité, eu égard à l'aggravation de son infirmité ; 3°) de condamner l'État aux entiers dépens. Il soutient que la ministre a commis une erreur d'appréciation en considérant que l'aggravation de ses infirmités relève d'une cause étrangère non imputable aux blessures et aux maladies constitutives des infirmités pour lesquelles la pension a été accordée. M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 16 février 2022. Par une ordonnance du 29 juin 2022 la clôture de l'instruction a été fixée au 19 juillet 2022. Le ministre des armées a produit après clôture le 19 décembre 2022, ce mémoire n'a pas été communiqué. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Djebiri, première conseillère ; - et les conclusions de M. Rivière, rapporteur public ; Considérant ce qui suit : 1. M. C..., né en 1936, qui a effectué son service militaire en Algérie, est titulaire d'une pension militaire d'invalidité concédée à titre définitif au taux de 45 % par arrêté ministériel du 29 mars 2016 pour deux infirmités correspondant, pour l'une, aux " séquelles de sa fracture de l'avant-bras gauche " en lien avec une blessure reçue en service, au taux de 30 % et, pour l'autre, à des " troubles psychiques de guerre " consécutifs au service lors de la guerre d'Algérie, au taux de 10 % (+5). Par une décision du 14 mai 2019, la ministre des armées a rejeté la demande de M. C..., formée le 1er décembre 2017, tendant à la révision de cette pension pour aggravation de ces infirmités. M. C... demande à la cour l'annulation du jugement du 9 novembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande d'annulation de cette décision. 2. Aux termes de l'article L. 154-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre en vigueur à la date de la demande de révision de la pension : " Le titulaire d'une pension d'invalidité concédée à titre définitif peut en demander la révision en invoquant l'aggravation d'une ou plusieurs des infirmités en raison desquelles cette pension a été accordée. / Cette demande est recevable sans condition de délai. / La pension ayant fait l'objet de la demande est révisée lorsque le pourcentage d'invalidité résultant de l'infirmité ou de l'ensemble des infirmités est reconnu supérieur de 10 p 100 au moins du pourcentage antérieur. / Toutefois, l'aggravation ne peut être prise en considération que si le supplément d'invalidité est exclusivement imputable aux blessures et aux maladies constitutives des infirmités pour lesquelles la pension a été accordée. / La pension définitive révisée est concédée à titre définitif ". 3. Il résulte de ces dispositions que le degré d'infirmité est déterminé au jour du dépôt de la demande de l'intéressé, sans qu'il soit possible de tenir compte d'éléments d'aggravation postérieurs à cette date. L'administration doit dès lors se placer à la date de la demande de pension pour évaluer le degré d'invalidité entraîné par l'infirmité invoquée. Par ailleurs, une pension acquise à titre définitif ne peut être révisée que si le degré d'invalidité résultant de l'infirmité ou de l'ensemble des infirmités est reconnu supérieur de 10 % au moins au pourcentage antérieur. En ce qui concerne les séquelles de la fracture de l'avant-bras gauche : 4. S'agissant de ces séquelles, il résulte de l'instruction, en particulier de l'expertise médicale réalisée le 7 novembre 2018 par le docteur F..., désigné dans le cadre de la demande révision du taux de la pension militaire d'invalidité, que, hormis l'augmentation des douleurs dont se plaint M. C..., il n'y a pas d'aggravation fonctionnelle objective par rapport à l'expertise du 16 juin 2015 du docteur B..., et notamment que la flexion et l'extension des deux coudes demeurent identiques. Les éléments produits par l'intéressé ne permettent pas de remettre sérieusement en cause ces conclusions, notamment confirmées le 11 janvier 2019 par le médecin chargé des pensions militaires d'invalidité de la sous-direction des pensions du ministère des armées, le 13 février 2019 par la commission consultative médicale et le 9 mai 2019 par la commission de réforme des pensions militaires d'invalidité. Si dans un certificat du 16 janvier 2017 le docteur E..., médecin généraliste, indique que l'intéressé présente des douleurs importantes au niveau de l'avant-bras gauche en recrudescence depuis quelques mois, qui font suite à sa blessure de guerre et entraînent une consommation accrue d'antalgiques, il ne caractérise aucune aggravation de ses séquelles. Ne permettent pas davantage d'établir une telle aggravation la radiographie du coude, de l'avant-bras et du poignet gauches, qui conclut à un " aspect radiologique superposable ", le certificat du 26 juin 2020, postérieur à la demande de révision, du docteur D..., chirurgien orthopédiste, qui mentionne que l'intéressé présente des douleurs au niveau du coude et de l'avant-bras gauches et qu'il a été hospitalisé dans son service en urgence le 20 avril 2020 dans les suite d'une chute et qu'il présentait une fracture complexe de l'humérus gauche, fermée, sans troubles neuro-vasculaires, et un autre certificat du docteur E... du 8 octobre 2020, également postérieur à la demande de révision, qui précise que la douleur séquellaire est permanente et beaucoup plus intense. Sur ce point, la demande de M. C... ne peut donc qu'être rejetée. En ce qui concerne le syndrome post traumatique : 5. M. C... soutient que ses prescriptions médicamenteuses sont liées aux séquelles qu'il a subies depuis de très longues années et aux cauchemars qu'il continue de subir en se remémorant son chauffeur tué sur le coup alors qu'il était responsable d'un véhicule blindé. Il résulte toutefois de l'instruction, et notamment des conclusions des experts des 16 juin 2015 et 7 novembre 2018, que M. C... souffre d'une pathologie post-traumatique au long cours et que si, comme l'a relevé la commission consultative médicale dans son avis du 13 février 2019, les manifestations invalidantes de sa pathologie post-traumatique se sont aggravées, cette aggravation n'est pas liée exclusivement à la pathologie pour laquelle une pension lui a été initialement accordée mais également à la survenance d'un grave évènement familial de la sphère privée. Dans ces conditions, et en l'absence d'éléments déterminants permettant de remettre en cause cette absence d'exclusivité, la demande présentée sur ce point par M. C... ne saurait davantage recevoir satisfaction. 6 Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision ministérielle du 14 mai 2019. Sa requête doit, dans l'ensemble de ses conclusions, être rejetée. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. C... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre des armées. Délibéré après l'audience du 5 janvier 2023 à laquelle siégeaient : M. Picard, président de chambre ; M. Seillet, président assesseur ; Mme Djebiri, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 janvier 2023. La rapporteure, C. DjebiriLe président, V.-M. Picard La greffière, A. Le Colleter La République mande et ordonne au ministre des armées, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition, La greffière, N° 22LY00733 2 al
Cours administrative d'appel
Lyon
CAA de NANCY, 4ème chambre, 24/01/2023, 21NC00117, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme D... C... née A... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler la décision implicite rejetant sa demande de réexamen et d'octroi du bénéfice de l'aide financière présentée sur le fondement du décret n° 2004-751 du 27 juillet 2004 et d'enjoindre au premier ministre de lui verser cette aide financière sous forme d'une rente viagère à partir d'octobre 2004. Par un jugement n° 1802667 du 17 novembre 2020, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 14 janvier 2021, Mme C..., représenté par Me Choffrut, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler la décision implicite rejetant sa demande de réexamen et d'octroi du bénéfice de l'aide financière présentée sur le fondement du décret n° 2004-751 du 27 juillet 2004 ; 3°) d'enjoindre au premier ministre de lui verser l'aide financière prévue par le décret n° 2004-751 du 27 juillet 2004 sous forme d'une rente viagère avec effet rétroactif à partir du 1er octobre 2004 conformément à l'article 2 de ce décret et en prenant en compte la revalorisation prévue à l'article 5 de ce même décret ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - elle remplit les conditions pour bénéficier du dispositif d'indemnisation mis en place par le décret n° 2004-751 du 27 juillet 2004 ; - son père a été interrogé en tant que résistant et a été exécuté alors qu'il accompagnait les allemands à la chasse, son décès est brutal et manifeste une volonté de tuer, il était dans l'incapacité de se défendre. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, - le décret n° 2004-751 du 27 juillet 2004 instituant une aide financière en reconnaissance des souffrances endurées par les orphelins dont les parents ont été victimes d'actes de barbarie durant la Deuxième Guerre mondiale, - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme E..., - et les conclusions de M. Michel, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. Par un courrier du 21 mai 2018, Mme C... a demandé à l'office national des anciens combattants et victimes de guerre le réexamen de sa demande tendant au bénéfice de l'aide financière instituée par le décret n° 2004-751 du 27 juillet 2004 pour les orphelins dont les parents ont été victimes d'actes de barbarie durant la deuxième guerre mondiale en se prévalant des circonstances du décès de son père. Mme C... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision implicite. 2. Aux termes de l'article 1er du décret n° 2004-751 du 27 juillet 2004 : " Toute personne, dont la mère ou le père, de nationalité française ou étrangère, a été déporté, à partir du territoire national, durant l'Occupation pour les motifs et dans les conditions mentionnées aux articles L. 272 et L. 286 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, et a trouvé la mort en déportation, a droit à une mesure de réparation, conformément aux dispositions du présent décret, si elle était mineure de vingt et un ans au moment où la déportation est intervenue. / Ce régime bénéficie également aux personnes, mineures de moins de vingt et un ans au moment des faits, dont le père ou la mère, de nationalité française ou étrangère, a, durant l'Occupation, été exécuté dans les circonstances définies aux articles L. 274 et L. 290 du même code. (...) ". Aux termes de l'article L. 274 du code des pensions militaires d'invalidité, abrogé et remplacé par l'article L. 342-3 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre depuis le 1er janvier 2017 : " Les personnes arrêtées et exécutées pour actes qualifiés de résistance à l'ennemi sont considérées comme internés résistants, quelle que soit la durée de leur détention, a fortiori si elles ont été exécutées sur-le-champ ". Aux termes de l'article L. 290 du code des pensions militaires d'invalidité, abrogé et remplacé par l'article L. 343-5 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " Les Français ou ressortissants français qui, à la suite de leur arrestation, pour tout autre motif qu'une infraction de droit commun, ont été exécutés par l'ennemi, bénéficient du statut des internés politiques, quelle que soit la durée de leur détention, a fortiori s'ils ont été exécutés sur le champ ". 3. Il est constant que le père de Mme C..., M. B... A..., qui exerçait le métier de garde forestier et qui était résistant durant la deuxième guerre mondiale, est parti, le matin du 22 septembre 1944, à la chasse avec des militaires allemands et qu'il a été retrouvé mort, tué d'une balle de fusil de guerre. Mme C... soutient que son père a été arrêté et exécuté par les allemands au sens des dispositions précitées de l'article L. 274 du code des pensions militaires d'invalidité et produit des témoignages suggérant que M. A... a été assassiné en raison de ses activités de résistance et d'un refus de dénoncer ses camarades. Toutefois, aucune des personnes dont les déclarations sont produites n'a été le témoin direct du décès, ni en toute hypothèse ne fait état de récits qui lui auraient été rapportés par un témoin direct de cet évènement. Au regard de l'ensemble des éléments soumis au contradictoire, il n'est ainsi pas établi que M. A... aurait été victime d'une arrestation puis d'une exécution pour des actes de résistance à l'ennemi au sens des dispositions citées au point précédent. 4. Dans ces conditions, les circonstances du décès du père de Mme C..., aussi tragiques qu'elles soient, ne répondent pas aux conditions fixées par les dispositions du décret du 27 juillet 2004. C'est donc sans méconnaître ces dispositions que le premier ministre a pu refuser d'accorder une aide financière à la requérante. 5. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté sa demande. Sa requête ne peut, dès lors, qu'être rejetée, dans toutes ses conclusions. D E C I D E : Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... A... épouse C... et à la première ministre. Délibéré après l'audience du 3 janvier 2023, à laquelle siégeaient : - Mme Samson-Dye, présidente, - Mme Roussaux, première conseillère, - M. Denizot, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 janvier 2023. La présidente-rapporteure, Signé : A. E... L'assesseure la plus ancienne, Signé : S. Roussaux La greffière, Signé : N. Basso La République mande et ordonne à la première ministre en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, N. Basso 2 N° 21NC00117
Cours administrative d'appel
Nancy
CAA de MARSEILLE, 2ème chambre, 25/11/2022, 21MA00962, Inédit au recueil Lebon
Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - le décret n° 65-773 du 9 septembre 1965 ; - le décret n° 85-603 du 10 juin 1985 ; - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. C... G..., - les conclusions de M. Allan Gautron, rapporteur public, - et les observations de Me Varron-Charrier, représentant Mme D.... Le 14 novembre 2022 une note en délibéré présentée pour Mme D... a été enregistrée qui n'a pas été communiquée. Considérant ce qui suit : 1. Mme B... D..., née le 20 février 1960, adjoint administratif territorial au sein du centre communal d'action sociale (CCAS) de la commune de Six-Fours-les-Plages, a été victime de deux accidents survenus les 26 mars 2007 et 21 janvier 2010, l'un à la suite de l'explosion d'un local technique et l'autre résultant de la chute de gravats et d'une partie du plafond d'une pièce jouxtant celle où se elle trouvait, tous reconnus imputables au service. Elle a été placée en congé et n'a jamais repris son travail, du 5 février 2010 au 31 août 2015 inclus. La date de consolidation a été fixée par les différents médecins qui l'ont examinée, au 6 décembre 2013. Par arrêté n° 5389 du 12 août 2015 du président du CCAS, elle a été mise à la retraite pour invalidité au taux de 15 % à compter du 1er septembre 2015. Par décision du 17 septembre 2015 la CNRACL a fixé son taux d'invalidité à 15 %. Par jugement n° 1503596 du 14 décembre 2018, le tribunal administratif de Toulon a annulé cet arrêté, en tant qu'il a fixé à 15 % le taux d'invalidité de Mme D... et a enjoint au président du CCAS de Six-Fours-les-Plages de procéder au réexamen de la demande de celle-ci relative à ce taux, dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement. 2. Le CCAS de Six-Fours-les-Plages qui l'a reçue le 13 décembre 2017 a rejeté cette réclamation préalable. Le CCAS de Six-Fours-les-Plages relève appel du jugement n° 1801194 du 4 février 2021 par lequel le tribunal administratif de Toulon l'a condamné à payer à Mme D... la somme de 97 215 euros, avec intérêts à compter du 12 novembre 2017 capitalisés à compter du 13 novembre 2018, ainsi qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date en tant qu'il a accordé une indemnisation du préjudice de déficit fonctionnel permanent et du préjudice d'agrément qui devra être ramenée à de plus justes proportions. Mme D... relève appel incident de ce jugement en tant qu'il n'a pas fait totalement droit à ses conclusions indemnitaires. Sur la régularité du jugement attaqué : 3. Aux termes du huitième alinéa de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, relatif au recours subrogatoire des caisses de sécurité sociale contre le responsable d'un accident ayant entraîné un dommage corporel : " L'intéressé ou ses ayants droit doivent indiquer, en tout état de la procédure, la qualité d'assuré social de la victime de l'accident ainsi que les caisses de sécurité sociale auxquelles celle-ci est ou était affiliée pour les divers risques. Ils doivent appeler ces caisses en déclaration de jugement commun ou réciproquement. (...) ". Il appartient au juge administratif, qui dirige l'instruction, d'assurer, en tout état de la procédure, le respect de ces dispositions. Ainsi, le tribunal administratif, saisi par la victime ou par la caisse d'une demande tendant à la réparation du dommage corporel par l'auteur de l'accident, doit appeler en la cause, selon le cas, la caisse ou la victime. La méconnaissance des obligations de mise en cause entache le jugement d'une irrégularité que le juge d'appel ou le juge de cassation doit, au besoin, relever d'office. 4. Il ressort des pièces du dossier produites devant le tribunal administratif que Mme D... a la qualité d'assurée sociale. Il résulte de ce qui a été dit au point précédent qu'il appartenait au tribunal, saisi par Mme D... d'une demande tendant à la réparation de son préjudice, de communiquer celle-ci à la caisse de sécurité sociale à laquelle elle est affiliée. En s'abstenant de procéder à cette communication, le tribunal a entaché son jugement d'irrégularité. Par suite, il y a lieu d'annuler le jugement pour ce seul motif dans la limite des conclusions de l'appel principal du CCAS et de l'appel incident de Mme D..., sans qu'il y ait lieu de se prononcer sur les autres moyens tenant à sa régularité, d'évoquer et de statuer immédiatement sur les demandes présentées par Mme D.... Sur la recevabilité : 5. Aux termes de l'article R. 421-1 du même code : " La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. (...) ". 6. La décision par laquelle l'administration rejette une réclamation tendant à la réparation des conséquences dommageables d'un fait qui lui est imputé lie le contentieux indemnitaire à l'égard du demandeur pour l'ensemble des dommages causés par ce fait générateur, quels que soient les chefs de préjudice auxquels se rattachent les dommages invoqués par la victime et que sa réclamation ait ou non spécifié les chefs de préjudice en question. Par suite, la victime est recevable à demander au juge administratif, dans les deux mois suivant la notification de la décision ayant rejeté sa réclamation, la condamnation de l'administration à l'indemniser de tout dommage ayant résulté de ce fait générateur, y compris en invoquant des chefs de préjudice qui n'étaient pas mentionnés dans sa réclamation. En revanche, si une fois expiré ce délai de deux mois, la victime saisit le juge d'une demande indemnitaire portant sur la réparation de dommages causés par le même fait générateur, cette demande est tardive et, par suite, irrecevable. Il en va ainsi alors même que ce recours indemnitaire indiquerait pour la première fois les chefs de préjudice auxquels se rattachent les dommages, ou invoquerait d'autres chefs de préjudice, ou aurait été précédé d'une nouvelle décision administrative de rejet à la suite d'une nouvelle réclamation portant sur les conséquences de ce même fait générateur. 7. En outre, lorsque la victime demande réparation de dommages qui, tout en étant causés par le même fait générateur, sont nés, ou se sont aggravés, ou ont été révélés dans toute leur ampleur postérieurement à la décision administrative ayant rejeté sa réclamation, qu'il s'agisse de dommages relevant de chefs de préjudice figurant déjà dans cette réclamation ou de dommages relevant de chefs de préjudice nouveaux, elle peut saisir l'administration d'une nouvelle réclamation portant sur ces nouveaux éléments et, en cas de refus, introduire un recours indemnitaire dans les deux mois suivant la notification de ce refus. Dans ce même cas, la victime peut également, si le juge administratif est déjà saisi par elle du litige indemnitaire né du refus opposé à sa réclamation, ne pas saisir l'administration d'une nouvelle réclamation et invoquer directement l'existence de ces dommages devant le juge administratif saisi du litige en premier ressort afin que, sous réserve le cas échéant des règles qui gouvernent la recevabilité des demandes fondées sur une cause juridique nouvelle, il y statue par la même décision. La victime peut faire de même devant le juge d'appel, dans la limite toutefois du montant total de l'indemnité chiffrée en première instance, augmentée le cas échéant de l'indemnité demandée au titre des dommages qui sont nés, ou se sont aggravés, ou ont été révélés dans toute leur ampleur postérieurement au jugement de première instance. 8. Il résulte de l'instruction que Mme D..., dans le courrier du 12 décembre 2017 qu'elle a adressé au CCAS de Six-fours-les-Plages, a demandé la réparation des préjudices résultant des deux accidents de service en litige en détaillant seulement certains postes de préjudices (souffrance endurées, préjudice moral, déficit fonctionnel permanent, préjudice d'agrément, perte de revenus et incidence professionnelle) pour un montant total de 30 000 euros et a demandé l'indemnisation de son préjudice " sauf à parfaire ". Si Mme D... a demandé réparation devant le tribunal administratif de Toulon d'autres chefs de préjudice notamment sexuel, ces préjudices se rattachaient aux mêmes faits générateurs que ceux exposés dans sa demande préalable. De plus, elle était fondée, sans saisir à nouveau l'autorité administrative d'une demande préalable à demander réparation devant le juge administratif dès lors qu'ils sont nés, ou se sont aggravés, ou ont été révélés dans toute leur ampleur postérieurement à la décision administrative ayant rejeté sa réclamation. Enfin, un requérant peut se borner à demander à l'administration réparation d'un préjudice qu'il estime avoir subi pour ne chiffrer ses prétentions que devant le juge administratif. Dès lors, les fins de non-recevoir opposées par le CCAS de Six-fours-les-Plages ne peuvent qu'être écartées. En ce qui concerne la responsabilité du centre communal d'action sociale de Six-Fours-les-Plages : 9. Les dispositions des articles L. 27 et L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite et, pour les fonctionnaires affiliés à la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales, le II de l'article 119 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 et les articles 30 et 31 du décret n° 65-773 du 9 septembre 1965 qui instituent, en faveur des fonctionnaires victimes d'accidents de service ou de maladies professionnelles, une rente viagère d'invalidité en cas de mise à la retraite et une allocation temporaire d'invalidité en cas de maintien en activité doivent être regardées comme ayant pour objet de réparer les pertes de revenus et l'incidence professionnelle résultant de l'incapacité physique causée par un accident de service ou une maladie professionnelle. Les dispositions instituant ces prestations déterminent forfaitairement la réparation à laquelle les fonctionnaires concernés peuvent prétendre, au titre de ces chefs de préjudice, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions. Ces dispositions ne font en revanche obstacle ni à ce que le fonctionnaire qui subit, du fait de l'invalidité ou de la maladie, des préjudices patrimoniaux d'une autre nature ou des préjudices personnels, obtienne de la personne publique qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice, ni à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre la collectivité, dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette collectivité. 10. Mme D... a été reconnue victime de deux accidents sur son lieu de travail en 2007 et 2010. Il est constant qu'elle n'était pas présente sur les lieux d'accident, mais a subi un choc émotionnel post-traumatique lié à l'explosion en 2007 d'un local technique lors de sa mise en service et à la chute d'objets à la suite d'une intervention dans les gaines techniques du plafond d'une pièce voisine de celle où elle se trouvait en 2010. Concernant le premier accident survenu en 2007, les documents produits par Mme D... attestant que la direction était informée d'infiltrations d'eaux usées provenant de toilettes ne permettent pas d'établir que l'explosion a été causée par ces infiltrations et donc qu'en n'y remédiant pas plus vite, le CCAS de Six-fours-les-plages aurait méconnu son obligation de sécurité à l'égard des agents travaillant sur le site, ou une faute de négligence. Concernant le second accident survenu en 2010, ayant consisté en une chute de gravats et d'une partie du plafond d'une pièce jouxtant celle où se trouvait Mme D..., il est constant que cette chute a été causée par l'intervention de personnes dans les gaines des faux plafonds, ce qui a provoqué la chute de deux plaques, de gravats et de débris de béton. Il ne résulte pas davantage de l'instruction, que cette situation serait imputable à un manquement de l'administration à son obligation légale lui imposant de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs qui n'est pas une obligation de résultats. Dès lors, elle n'est pas fondée à soutenir que le CCAS de Six-Fours-les-Plages a commis une faute engageant sa responsabilité ouvrant droit à réparation intégrale des dommages qu'elle a subis. En revanche, Mme D... est fondée à demander à son employeur, même en l'absence de faute de celui-ci, la réparation des préjudices patrimoniaux qui ne peuvent être regardés comme réparés forfaitairement par la pension ou la rente tels que les dépenses de santé et frais divers liés à l'invalidité ou le déficit fonctionnel permanent ainsi que des préjudices personnels subis tels que les souffrances physiques ou morales, le préjudice d'agrément ou le préjudice sexuel en lien direct et certain avec les accidents des 26 mars 2007 et 21 janvier 2010. 11. En l'état du dossier, la cour n'étant pas en mesure d'évaluer la réparation des préjudices éprouvés par Mme D... du fait de la responsabilité sans faute du CCAS de Six-Fours-les-Plages, il y a lieu, en application de l'article R. 621-1 du code de justice administrative, d'ordonner une expertise médicale dans les conditions qui seront précisées dans le dispositif du présent arrêt. 12. Dans les circonstances de l'espèce, les conclusions à fin de provision présentées par Mme D... doivent être rejetées. En ce qui concerne les droits de la caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales : 13. Compte tenu de ce qui a été dit au point 10, les conclusions de la caisse des dépôts et consignation, formulées en sa qualité de gestionnaire de la caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales doivent être rejetées. D É C I D E : Article 1er : Le jugement n° 1801194 rendu le 4 février 2021 par le tribunal administratif de Toulon est annulé dans la limite des conclusions de l'appel principal du centre communal d'action sociale de Six-Fours-les-Plages et de l'appel incident de Mme D.... Article 2 : La responsabilité sans faute du centre communal d'action sociale de Six-Fours-les-Plages du fait des accidents de service dont a été victime Mme D... les 26 mars 2007 et 21 janvier 2010 est engagée. Article 3 : Les conclusions de Mme D... tendant à voir engagée la responsabilité pour faute du centre communal d'action sociale de Six-Fours-les-Plages sont rejetées. Article 4 : Les conclusions présentées par Mme D... tendant à l'indemnisation de la perte de revenus et de l'incidence professionnelle en lien avec les accidents des 26 mars 2007 et 21 janvier 2010 ainsi que ses conclusions à fin de provision sont rejetées. Article 5 : Les conclusions de la caisse des dépôts et consignation, en sa qualité de gestionnaire de la caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales sont rejetées. Article 6 : Il sera procédé à une expertise médicale au contradictoire de Mme B... D..., du centre communal d'action sociale de Six-Fours-les-Plages, de la caisse primaire d'assurance maladie du Var, leurs conseils convoqués et entendus, par un médecin expert neuro-psychiatre, avec mission pour l'expert de : 1°) se faire communiquer tous documents relatifs à l'état de santé de Mme B... D... et, notamment, les rapports d'expertise précédemment rédigés, notamment celui du 6 décembre 2013 établi par le Dr F..., celui du 27 août 2014 établi par le Dr H..., celui du 5 février 2015 établi par le Dr E... et celui des 4 mars et 2 septembre 2019 établi par le Dr A..., tous documents relatifs au suivi médical, aux actes de soins et aux diagnostics pratiqués sur elle ; convoquer et entendre les parties et tous sachants ; procéder à l'examen sur pièces du dossier médical de Mme B... D... ainsi qu'éventuellement à son examen clinique ; 2°) décrire l'ensemble des préjudices pouvant être regardés comme directement et exclusivement imputables aux accidents de service dont elle a été victime les 26 mars 2007 et 21 janvier 2010 en distinguant, le cas échéant entre d'une part, ce qui caractérise un état préexistant et indépendant desdits accidents et ce qui est en lien avec ceux-ci ; 3°) déterminer la nature et la durée du déficit fonctionnel temporaire ; 4°) fixer la date de consolidation de son état ; 5°) chiffrer le taux de son déficit fonctionnel permanent ; 6°) décrire ses souffrances physiques, psychiques, ou morales, endurées du fait de ces accidents et les évaluer sur une échelle de 1 à 7 ; 7°) donner un avis médical sur l'impossibilité pour la victime de se livrer à des activités spécifiques de loisirs, ou d'agrément et le caractère définitif de cette impossibilité ; 8°) dire s'il existe un préjudice sexuel et le décrire ; 9°) indiquer si l'assistance d'une tierce personne a été ou est encore nécessaire, la durée de cette assistance, en décrivant avec précision les besoins (niveau de compétence technique, durée d'intervention quotidienne), si des appareillages, des fournitures complémentaires, et si des soins postérieurs à la consolidation sont à prévoir ; 10°) fournir à la cour toute précision utile sur les dépenses de santé à charge et frais divers qui ont été exposés pour Mme B... D... ou devront l'être dans le futur, en complément des frais déjà exposés ; 11°) fournir à la cour toutes précisions complémentaires que l'expert jugera utile à la solution du litige et de nature à permettre d'apprécier l'étendue des préjudices en lien avec les accidents de service des 26 mars 2007 et 21 janvier 2010et répondre aux observations éventuelles des parties émises lors de l'expertise. Article 7 : L'expert accomplira sa mission dans les conditions prévues par les articles R. 621-2 à R. 621-14 du code de justice administrative. Il prêtera serment par écrit devant le greffier en chef de la cour. Il déposera son rapport au greffe de la cour en deux exemplaires et en notifiera copie aux parties dans le délai fixé par la présidente de la cour dans sa décision la désignant. Article 8 : Les frais d'expertise sont réservés pour y être statué en fin d'instance. Article 9 : Tous droits et moyens des parties, sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt, sont réservés jusqu'en fin d'instance. Article 10 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... D..., au centre communal d'action sociale de Six-Fours-les-Plages, à la caisse des dépôts et consignations et à la caisse primaire d'assurance maladie du Var. Délibéré après l'audience du 10 novembre 2022, où siégeaient : - Mme Cécile Fedi, présidente, - M. Gilles Taormina, président assesseur, - M. Nicolas Danveau, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 25 novembre 2022 : N° 21MA00962 2 cm
Cours administrative d'appel
Marseille
CAA de TOULOUSE, 2ème chambre, 29/11/2022, 21TL01829, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la décision du 10 septembre 2018 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande de révision de sa pension d'invalidité pour aggravation, de lui allouer le bénéfice d'une pension militaire d'invalidité à titre définitif au taux de 70 % pour l'infirmité n° 1 " Sclérose pleuro-pulmonaire " et subsidiairement d'ordonner une expertise médicale. Par un jugement n° 1903722 du 18 mars 2021, le tribunal administratif de Nîmes a annulé la décision du 10 septembre 2018, a fixé le pourcentage d'invalidité de la pension concédée à M. A... au titre de l'infirmité n° 1 " Sclérose pleuro-pulmonaire ", à hauteur de 70 % à compter du 6 décembre 2016, soit un taux global d'invalidité de 80 % compte tenu des deux infirmités pensionnées, et a rejeté le surplus de sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 17 mai 2021 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille sous le n°21MA01829, puis le 1er mars 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n°21TL01829, et un mémoire en réplique enregistré le 15 avril 2022 (non communiqué), la ministre des armées demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du 18 mars 2021 ; 2°) de confirmer la décision du 10 septembre 2018. Elle soutient que : - le jugement est entaché d'insuffisance de motivation ; - il est entaché d'erreur d'appréciation au regard de l'article L. 29 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, en l'absence de signe probant d'aggravation de la pathologie dont est atteint M. A... ; - le tribunal a commis une erreur de calcul concernant le taux global de la pension : il ne pouvait en tout état de cause conclure à l'attribution d'un taux global de 80% alors qu'en application de l'article L. 14 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, il résulterait un taux global de 75%. Par un mémoire en défense, enregistré le 13 juillet 2021, M. B... A..., représenté par Me Mattler, conclut au rejet de la requête, demande à titre subsidiaire d'ordonner une expertise médicale, et demande de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 400 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il fait valoir que : - les moyens soulevés par la ministre ne sont pas fondés ; - la décision du 10 septembre 2018 est entachée d'illégalités externes : elle a été prise par une autorité incompétente en ce que la délégation de signature du 4 juin 2018 est trop générale ; elle est insuffisamment motivée en fait, alors que ce moyen était recevable devant le tribunal ; l'avis de la commission consultative médicale est entaché d'irrégularité, alors que ce moyen était également recevable devant le tribunal. Par ordonnance du 31 mars 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 19 avril 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - le décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Anne Blin, présidente-assesseure, - les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique, - et les observations de Me Mattler, représentant M. A.... Considérant ce qui suit : 1. M. A..., né le 12 mars 1939, qui a servi dans l'armée de terre du 6 mai 1959 au 1er mars 1962, est titulaire d'une pension militaire d'invalidité concédée par un arrêté du 20 octobre 2008, au taux global de 70%, au titre de deux infirmités : " 1) Sclérose pleuro-pulmonaire, syndrome obstructif avec un V.E.M.S. à 63 %. Radio : aspect de bulles surtout au niveau du sommet droit avec évidement de la région para-trachéale droite. Origine par preuve : maladie constatée le 14 septembre 1961. Taux de 60%. 2) Acouphènes. Origine par preuve : maladie en relation médicale certaine, directe et déterminante avec le traitement par streptomycine. Taux de 10% + 5 ". Le 6 décembre 2016, il a sollicité la révision de sa pension pour aggravation de l'infirmité principale. Par décision du 10 septembre 2018, la ministre des armées a rejeté sa demande au motif qu'aucune aggravation n'a été constatée après expertise médicale. Par jugement du 18 mars 2021, le tribunal administratif de Nîmes a annulé la décision du 10 septembre 2018 et a fixé le pourcentage d'invalidité de la pension concédée à M. A... au titre de l'infirmité n° 1 " Sclérose pleuro-pulmonaire ", à hauteur de 70 % à compter du 6 décembre 2016, soit un taux global d'invalidité de 80 % compte tenu des deux infirmités pensionnées. La ministre des armées relève appel de ce jugement. Sur le moyen d'annulation retenu par le tribunal administratif de Nîmes : 2. Aux termes de l'article L. 6 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, la pension militaire d'invalidité est attribuée sur demande de l'intéressé et son entrée en jouissance est fixée à la date du dépôt de la demande. Aux termes de l'article L. 29 du même code, dans ses dispositions alors en vigueur : " Le titulaire d'une pension d'invalidité concédée à titre définitif peut en demander la révision en invoquant l'aggravation d'une ou plusieurs des infirmités en raison desquelles cette pension a été accordée. Cette demande est recevable sans condition de délai. La pension ayant fait l'objet de la demande est révisée lorsque le pourcentage d'invalidité résultant de l'infirmité ou de l'ensemble des infirmités est reconnu supérieur de 10 points par rapport au pourcentage antérieur. Toutefois, l'aggravation ne peut être prise en considération que si le supplément d'invalidité est exclusivement imputable aux blessures et aux maladies constitutives des infirmités pour lesquelles la pension a été accordée. La pension définitive révisée est concédée à titre définitif. ". 3. Aux termes du sixième alinéa de l'article L. 9 du code précité : " Pour l'application du présent article, un décret (...), détermine les règles et barèmes pour la classification des infirmités d'après leur gravité. ". L'article L. 10 de ce code précise que : " Les degrés de pourcentage d'invalidité figurant aux barèmes prévus par le quatrième alinéa de l'article L. 9 sont : / a) Impératifs, en ce qui concerne les amputations et les exérèses d'organe ; / b) Indicatifs dans les autres cas. / Ils correspondent à l'ensemble des troubles fonctionnels et tiennent compte, quand il y a lieu, de l'atteinte de l'état général. ". 4. Le " guide-barème des invalidités " applicable au titre du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre précise, en ce qui concerne l'appareil respiratoire, en préambule de son Chapitre 1er, que : " Les affections de l'appareil respiratoire ne se traduisent pas toujours par un déficit de la fonction respiratoire. Les signes cliniques, entachés de subjectivité, comme les examens radiologiques, qui donnent des images statiques, ne permettent pas à eux seuls d'apprécier le handicap respiratoire (...) ". Aux termes du Chapitre II de ce guide-barème : " Aspects cliniques et évaluation des taux d'invalidité, Section A, Les insuffisances respiratoires chroniques : L'exploration fonctionnelle des insuffisances respiratoires chroniques comportera obligatoirement une spirométrie avec une courbe des débits et des volumes et mesure de la capacité résiduelle fonctionnelle permettant le calcul du volume résiduel. Le bilan pourra éventuellement être complété par la mesure de la capacité de transfert du monoxyde de carbone (CO), une étude de la gazométrie sanguine de repos, voire d'effort, ou la mesure de la saturation en oxygène de l'hémoglobine (SaO2) transcutanée. Par ailleurs, la détermination de la consommation maximale d'oxygène à l'effort peut être utile pour évaluer le déficit respiratoire. La diminution de la capacité pulmonaire totale (CPT) définit le syndrome restrictif. La diminution du rapport VEMS/CV définit le syndrome obstructif (VEMS = volume expiratoire maximum seconde - CV = capacité vitale). Les débits pulmonaires supérieurs à 80 % de la norme sont considérés comme normaux, il en est de même des volumes pulmonaires compris entre 80 et 120 % de la norme. Dans ces cas, le taux d'invalidité ne peut être de plus de 10 %. On définira quatre stades d'insuffisance respiratoire : 1°) L'insuffisance respiratoire modérée : - syndrome restrictif avec CPT comprise entre 71 et 80 % de la valeur théorique ; - syndrome obstructif (diminution du rapport VEMS/CV) avec VEMS compris entre 61 et 80 % de la valeur attendue ; - diminution des volumes pulmonaires et débits expiratoires de moins de 20 %, mais s'accompagnant d'une hypoxémie d'effort et/ou d'une diminution de la capacité de transfert du CO normée par rapport au volume alvéolaire de plus de 30 %. Taux d'invalidité : 20 à 40 %. 2°) L'insuffisance respiratoire moyenne : - syndrome restrictif avec CPT comprise entre 61 et 70 % de la valeur théorique ; - syndrome obstructif avec VEMS entre 51 et 60 % de la valeur attendue ; Taux d'invalidité : 40 à 60 %. 3°) L'insuffisance respiratoire grave : - syndrome restrictif avec CPT comprise entre 40 et 60 % de la valeur théorique ; - syndrome obstructif avec VEMS compris entre 40 et 50 % de la valeur attendue ; - la constatation d'une hypoxémie de repos avec PaO2 entre 60 et 70 mmHg, contrôlée à l'état stable, à distance de tout épisode de surinfection, avec ou sans signe de retentissement cardiaque droit objectivé par l'électrocardiogramme et l'échographie cardiaque, fera entrer le malade dans la catégorie des insuffisances respiratoires graves. Il en sera de même lors de l'existence du syndrome d'apnée du sommeil nécessitant un appareillage (pression positive continue par voie nasale). Taux d'invalidité : 60 à 90 %. 4°) L'insuffisance respiratoire sévère : syndrome restrictif avec CPT inférieure à 40 % de la valeur théorique ; - syndrome obstructif avec VEMS inférieur à 40 % de la valeur attendue ; - toute insuffisance respiratoire mixte : obstructive et restrictive, avec diminution des volumes et des débits supérieure ou égale à 40 %, entre dans le cadre des insuffisances respiratoires sévères ; - la constatation d'une hypoxémie de repos avec PaO2 inférieure à 60 mmHg, contrôlée dans les mêmes conditions que ci-dessus, ou justifiant une oxygénothérapie de longue durée, fera entrer le malade dans la catégorie des insuffisances respiratoires sévères, il en sera de même lorsqu'une hypercapnie nécessitera la mise en œuvre d'une ventilation assistée à domicile. Taux d'invalidité : 100 %. (...) Section H, Tuberculose pulmonaire : Pour cette affection, bien que les progrès thérapeutiques permettent d'obtenir une guérison dans des délais largement inférieurs à trois ans, l'indemnisation de la phase aiguë ne pourra pas être reconsidérée avant cette date. En phase aiguë, le taux d'invalidité sera attribué impérativement pour trois ans (cf. art. L. 8 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre) : 100 %. Séquelles de tuberculose pulmonaire, ganglionnaire (ganglions médiastinaux uniquement) ou pleurale : le taux d'invalidité sera apprécié en fonction des critères d'insuffisance respiratoire définis au chapitre concerné. Cependant, l'évaluation des séquelles doit tenir compte des critères modernes d'appréciation de la guérison, que sont l'absence depuis plus de six mois de BK aux examens directs (crachats ou tubages) et l'absence de manifestations radiologiques et cliniques d'évolutivité après six mois de traitement régulièrement conduits ". 5. Selon le rapport de l'expert médical rendu le 6 avril 2018 après examen de M. A... concernant la sclérose pleuro-pulmonaire dont il est atteint, la dilatation des bronches de l'intéressé était plus instable qu'auparavant, avec des surinfections chroniques et un retentissement fonctionnel respiratoire. L'expert a estimé que l'aggravation de cette infirmité justifiait le passage du taux de celle-ci de 60 à 70%. Il résulte toutefois de l'instruction que l'étude de l'exploration fonctionnelle respiratoire (EFR) réalisée le 6 avril 2018 fait état d'un volume expiratoire maximum seconde (VEMS) ainsi que d'un syndrome obstructif (VEMS/CV) de 93,7%, alors que ceux-ci s'établissaient respectivement à 63% et 70% de la norme lors de l'expertise du 30 septembre 1997 qui relevait une " certaine distension puisque le volume résiduel est à 133% de la théorique ", justifiant un taux d'invalidité de 60%. L'expertise du 2 mai 2001 révèle par ailleurs un volume expiratoire maximum seconde de 97% et un syndrome obstructif de 114% compte-tenu des examens réalisés le 5 décembre 2000, correspondant à des débits pulmonaires considérés comme normaux selon le guide-barème des invalidités, comme lors de l'étude du 6 avril 2018. Si M. A... conteste la pertinence des volumes relevés à cette date alors qu'il a présenté sa demande de révision du taux de sa pension dès le 6 décembre 2016, il résulte cependant du certificat établi par son pneumologue le 12 octobre précédent que sa capacité pulmonaire a révélé un volume expiratoire maximum seconde de 76% et un syndrome obstructif de 108% lors de l'étude du 4 octobre 2016, soit des volumes ne révélant pas une aggravation de son déficit respiratoire par rapport à l'expertise médicale du 30 septembre 1997. S'il fait état de l'aggravation de la gêne fonctionnelle constatée, l'expert a toutefois relevé, outre un bon état général, l'absence d'encombrement bronchique à l'examen clinique, ainsi que des " sibilants fins en expiration forcée ". Si l'expert a évoqué des surinfections chroniques sans autres précisions utiles, les pièces médicales produites par M. A..., notamment le certificat médical du 5 décembre 2019, se bornent à faire état de surinfections per annuelles alors qu'elles étaient surtout relevées l'hiver auparavant. Ainsi, alors que le médecin chargé des pensions militaires d'invalidité a considéré dans son avis rendu le 18 juillet 2018 qu'aucune aggravation de l'infirmité de M. A... n'était constatée au regard en particulier du volume expiratoire maximum seconde normal relevé, et que la commission consultative médicale a également constaté l'absence de signe probant d'aggravation rapportée par l'expert dans son avis du 30 juillet 2018, la décision du 10 septembre 2018 rejetant la demande de révision de la pension de M. A... pour aggravation de l'infirmité principale n'est entachée d'aucune erreur de droit ou d'appréciation. 6. Il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif de Nîmes s'est fondé sur l'aggravation de l'état de santé de M. A... pour annuler la décision du 10 septembre 2018 de la ministre des armées. 7. Toutefois, il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A... devant le tribunal administratif de Nîmes. Sur les autres moyens soulevés en première instance : 8. Lorsqu'il est saisi d'un litige en matière de pensions militaires d'invalidité, il appartient au juge administratif, en sa qualité de juge de plein contentieux, de se prononcer sur les droits de l'intéressé en tenant compte de l'ensemble des circonstances de fait qui résultent de l'instruction, et aussi, le cas échéant, d'apprécier, s'il est saisi de moyens en ce sens ou au vu de moyens d'ordre public, la régularité de la décision en litige. 9. En premier lieu, la décision du 10 septembre 2018 a été signée par M. D... C..., administrateur civil hors classe, adjoint au sous-directeur des pensions, qui a reçu, par décision du 4 juin 2018 de la directrice des ressources humaines du ministère de la défense, publiée au Journal officiel de la République française du 7 juin 2018 et suffisamment précise quant à son champ d'application, délégation à l'effet de signer au nom de la ministre des armées, tous actes, arrêtés et décisions, à l'exclusion des décrets, dans la limite des attributions de la sous-direction des pensions du service de l'accompagnement professionnel et des pensions, parmi lesquelles figurent les décisions relatives aux pensions militaires d'invalidité. La directrice des ressources humaines du ministère de la défense avait elle-même compétence pour déléguer ainsi sa signature, en application de l'article 3 du décret du 27 juillet 2005 relatif aux délégations de signature des membres du Gouvernement. Le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision contestée, qui est d'ordre public, doit dès lors être écarté. 10. En second lieu, il ressort des pièces du dossier que la requête introductive d'instance enregistrée au greffe du tribunal administratif de Nîmes le 14 mars 2019, qui se borne à contester le bien-fondé de la décision du 10 septembre 2018, est dépourvue de tout moyen de forme ou de procédure. Dès lors, la ministre des armées est fondée à soutenir que les moyens tirés de l'insuffisance de motivation en fait et du vice de procédure dont serait entachée la décision du 10 septembre 2018 en raison de l'irrégularité de l'avis de la commission consultative médicale visé dans la fiche descriptive des infirmités, qui ont été soulevés dans le mémoire complémentaire enregistré le 9 décembre 2019, sont irrecevables. 11. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il y ait lieu d'ordonner une expertise médicale qui ne présente pas de caractère d'utilité, que la ministre des armées est fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement du 18 mars 2021 le tribunal administratif de Nîmes a annulé sa décision du 10 septembre 2018. M. A... n'étant pas fondé à demander l'annulation de ladite décision, ses conclusions tendant à enjoindre à l'Etat de lui allouer le bénéfice d'une pension militaire d'invalidité à titre définitif au taux de 70 % pour l'infirmité n° 1 " Sclérose pleuro-pulmonaire " doivent dès lors être rejetées. Sur les frais de l'instance : 12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande M. A... sur ce fondement. D E C I D E : Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 18 mars 2021 est annulé. Article 2 : La demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Nîmes et les conclusions présentées devant la cour sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre des armées. Délibéré après l'audience du 15 novembre 2022, à laquelle siégeaient : Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre, Mme Blin, présidente assesseure, Mme Arquié, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 novembre 2022. La rapporteure, A. Blin La présidente, A. Geslan-Demaret La greffière, M-M. Maillat La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. N°21TL01829 2
Cours administrative d'appel
Toulouse
CAA de MARSEILLE, 4ème chambre, 07/12/2022, 20MA01219, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme C... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille, d'une part, d'annuler l'arrêté du 22 août 2017 par lequel le maire d'Aix-en-Provence l'a placée en congé de maladie ordinaire, du 30 mai au 1er septembre 2017, d'autre part, de condamner cette commune à lui verser la somme totale de 8 000 euros, au titre des préjudices qu'elle estimait avoir subis, et, enfin, de mettre à la charge de ladite commune une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n° 1708176 du 14 janvier 2020, le tribunal administratif de Marseille a annulé cet arrêté du 22 août 2017 et mis à la charge de la commune d'Aix-en-Provence la somme de 1 200 euros à verser à Mme B... au titre des dispositions de 1'article L. 761-1 du code de justice administrative, avant de rejeter le surplus des conclusions de cette demande. Procédure devant la Cour : Par une requête, enregistrée le 16 mars 2020, la commune d'Aix-en-Provence, représentée par Me Lonqueue, demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 14 janvier 2020 en tant qu'il annulé l'arrêté de son maire du 22 août 2017 et qu'il met à sa charge la somme de 1 200 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; 2°) de rejeter l'ensemble des conclusions que Mme B... a présenté devant cette juridiction ; 3°) de mettre à la charge de Mme B... la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - l'expédition du jugement attaqué ne permet pas d'établir que cette décision juridictionnelle a été régulièrement signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience, conformément aux dispositions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative ; - sur l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il annule l'arrêté du 22 août 2017 : . c'est à tort que le tribunal administratif de Marseille a retenu que les conclusions à fin d'annulation dirigées contre cet arrêté du 22 août 2017 étaient recevables alors que, d'une part, cet arrêté est confirmatif de celui daté du 8 août 2017 et que, d'autre part, cet arrêté du 22 août 2017 présente un caractère superfétatoire ne faisant pas grief ; . c'est également à tort que ce tribunal a estimé qu'elle n'établissait pas l'existence d'un élément de nature à rendre l'accident du 29 mai 2017 détachable du service alors que le différend opposant Mme B... à son collègue de travail qui a abouti à cet accident est d'ordre purement personnel et privé ; . c'est enfin à tort que ledit tribunal l'a condamnée au versement de la somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; - ayant annulé le jugement attaqué, la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, devra rejeter l'intégralité des conclusions de première instance présentées par Mme B... : . Mme B... n'ayant formé aucune demande indemnitaire préalable, ses conclusions indemnitaires doivent être rejetées comme irrecevables ; . ses conclusions à fin d'annulation sont également irrecevables et, subsidiairement, les moyens invoqués par Mme B... sont infondés. Par un mémoire en défense, enregistré le 6 août 2020, Mme B..., représentée par Me Salord, conclut : - au rejet de la requête ; - à ce qu'il soit enjoint au maire d'Aix-en-Provence de la placer sous le régime de l'accident du travail à compter du 30 mai 2017, et à ce que cette commune soit condamnée à lui verser une somme qui ne saurait être inférieure à 8 000 euros, en réparation des préjudices professionnel matériel et moral qu'elle estime avoir subis ; - à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de la commune d'Aix-en-Provence au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle fait valoir que la Cour devra confirmer le jugement attaqué rendu par le tribunal administratif de Marseille et accueillir ses demandes. Par une ordonnance du 4 février 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 26 février 2021, à 12 heures. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - l'ordonnance n° 2017-53 du 19 janvier 2017 ; - le décret n° 2019-301 du 10 avril 2019 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. A..., - et les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. Adjointe technique principale de 2ème classe, affectée au service des élections de la commune d'Aix-en-Provence, Mme B... expose avoir été victime, le 29 mai 2017, sur son lieu de travail, d'une agression de la part d'un collègue de travail. Par un arrêté du 8 août 2017, le maire d'Aix-en-Provence a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de cet accident et a placé Mme B... en congé de maladie ordinaire, à compter du 29 mai 2017. Par un arrêté du 22 août 2017, le maire l'a placée en congé de maladie ordinaire, du 30 mai au 1er septembre 2017. La commune d'Aix-en-Provence relève appel du jugement du 14 janvier 2020 par lequel le tribunal administratif de Marseille, saisi par Mme B..., a annulé ce dernier arrêté du 22 août 2017 et mis à sa charge la somme de 1 200 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. En défense, Mme B... doit être regardée comme concluant, par la voie de l'appel incident, à ce qu'il soit enjoint au maire d'Aix-en-Provence de la placer sous le régime de l'accident du travail à compter du 30 mai 2017, et à ce que cette commune soit condamnée à lui verser une somme totale qui ne saurait être inférieure à 8 000 euros, en réparation des préjudices professionnel, matériel et moral qu'elle estime avoir subis. Sur la régularité du jugement attaqué du tribunal administratif de Marseille du 14 janvier 2020 2. Aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ". 3. Il ressort de l'examen du dossier de première instance que la minute du jugement attaqué du tribunal administratif de Marseille du 14 janvier 2020 a été signée, conformément aux prescriptions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative. La circonstance que l'ampliation de ce jugement qui a été notifiée à la commune d'Aix-en-Provence ne comporte pas ces signatures est sans incidence sur la régularité de cette décision juridictionnelle. Ce moyen doit dès lors être écarté. Sur l'appel principal de la commune d'Aix-en-Provence : En ce qui concerne le bien-fondé du jugement attaqué du tribunal administratif de Marseille du 14 janvier 2020 : S'agissant des règles de droit applicables au litige : 4. L'article 10 de l'ordonnance susvisée du 19 janvier 2017 portant diverses dispositions relatives au compte personnel d'activité, à la formation et à la santé et la sécurité au travail dans la fonction publique a institué un " congé pour invalidité temporaire imputable au service " en insérant, dans la loi du 13 juillet 1983, un article 21 bis aux termes duquel : " I. - Le fonctionnaire en activité a droit à un congé pour invalidité temporaire imputable au service lorsque son incapacité temporaire de travail est consécutive à un accident reconnu imputable au service, à un accident de trajet ou à une maladie contractée en service définis aux II, III et IV du présent article. Ces définitions ne sont pas applicables au régime de réparation de l'incapacité permanente du fonctionnaire. / Le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident. La durée du congé est assimilée à une période de service effectif. L'autorité administrative peut, à tout moment, vérifier si l'état de santé du fonctionnaire nécessite son maintien en congé pour invalidité temporaire imputable au service. / II.- Est présumé imputable au service tout accident survenu à un fonctionnaire, quelle qu'en soit la cause, dans le temps et le lieu du service, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le fonctionnaire de ses fonctions ou d'une activité qui en constitue le prolongement normal, en l'absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant l'accident du service (...) ". 5. L'article 10 de l'ordonnance du 19 janvier 2017 a aussi, en conséquence de l'institution du congé pour invalidité temporaire imputable au service à l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983, modifié des dispositions de la loi du 26 janvier 1984 régissant la fonction publique territoriale. Le III de l'article 10, pour la fonction publique territoriale, dispose ainsi que : " A l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée : / a) Au deuxième alinéa du 2°, les mots : " ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions " sont remplacés par les mots : ", à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service " ; / b) Au 4°, le deuxième alinéa est supprimé ; / c) Au cinquième alinéa du 4°, les mots : " de la deuxième phrase du quatrième " sont remplacés par les mots : " du quatrième ". ". 6. L'application de ces dispositions résultant de l'ordonnance du 19 janvier 2017 était manifestement impossible en l'absence d'un texte réglementaire fixant, notamment, les conditions de procédure applicables à l'octroi de ce nouveau congé pour invalidité temporaire imputable au service. Les dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ne sont donc entrées en vigueur, en tant qu'elles s'appliquent à la fonction publique territoriale, qu'à la date d'entrée en vigueur, le 13 avril 2019, du décret du 10 avril 2019 relatif au congé pour invalidité temporaire imputable au service dans la fonction publique territoriale, décret par lequel le pouvoir réglementaire a pris les dispositions réglementaires nécessaires pour cette fonction publique et dont l'intervention était, au demeurant, prévue, sous forme de décret en Conseil d'Etat, par le VI de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 résultant de l'article 10 de l'ordonnance du 19 janvier 2017. Il en résulte que les dispositions de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 dans leur rédaction antérieure à celle résultant de l'ordonnance du 19 janvier 2017 sont demeurées applicables jusqu'à l'entrée en vigueur du décret du 10 avril 2019. 7. Par ailleurs, les droits des agents publics en matière d'accident de service et de maladie professionnelle sont constitués à la date à laquelle l'accident est intervenu ou la maladie diagnostiquée. 8. Au cas particulier, Mme B... souhaite voir reconnaître l'imputabilité au service de l'agression survenue le 29 mai 2017. Ainsi, eu égard à ce qui a été dit aux points précédents, sa situation est uniquement régie par les dispositions de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984, dans leur rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 19 janvier 2017 et du décret du 10 avril 2019, intervenue dans les conditions ci-dessus rappelées. S'agissant du moyen d'annulation retenu par le tribunal administratif de Marseille : 9. Aux termes de l'article 57 de la loi susvisée du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans sa rédaction applicable au présent litige : " Le fonctionnaire en activité a droit : / (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. (...) / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. (...) ". 10. Un accident survenu sur le lieu et dans le temps du service, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par un fonctionnaire de ses fonctions ou d'une activité qui en constitue le prolongement normal présente, en l'absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant cet événement du service, le caractère d'un accident de service (Conseil d'Etat, Section, 16 juillet 2014, n° 361820). 11. Mme B... a fait valoir devant le tribunal administratif de Marseille que, le 29 mai 2017, sur son lieu de travail et durant son service, elle a été physiquement agressée par l'un de ses collègues de travail, qui l'aurait saisie par le cou. Le tribunal administratif de Marseille a admis la matérialité de ces faits, que la commune d'Aix-en-Provence ne conteste pas sérieusement devant la Cour. Il ressort, toutefois, des pièces du dossier que la cause certaine, directe et déterminante de l'agression dont l'intimée a été victime réside dans un différend d'ordre privé opposant cette dernière à ce collègue, au sujet de la vente d'un boudin d'hivernage pour piscine. Dans ces conditions, s'il est constant qu'elle est survenue sur le lieu et dans le temps de service, aucun lien direct entre cette agression et les conditions d'exécution du service n'est établi. Dès lors, en refusant de reconnaître l'imputabilité au service de cette agression qui est détachable du service, après qu'au demeurant, la commission de réforme des collectivités territoriales des Bouches-du-Rhône a émis, le 20 juillet 2017, un avis en ce sens, le maire d'Aix-en-Provence n'a pas entaché sa décision d'une erreur d'appréciation. Il suit de là que ce moyen devait être écarté. 12. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée en première instance, la commune d'Aix-en-Provence est fondée à soutenir, d'une part, que le moyen retenu par les premiers juges n'était pas de nature à entraîner l'annulation de l'arrêté contesté de son maire du 22 août 2017 et, d'autre part, et en l'absence de tout autre moyen invoqué par Mme B... en première instance comme en appel, que c'est à tort que, par l'article 1er du jugement attaqué du 14 janvier 2020, le tribunal administratif de Marseille a annulé cet arrêté. Sur l'appel incident présenté par Mme B... : 13. Eu égard à ce qu'il vient d'être dit, les conclusions à fin d'injonction présentées par Mme B... par la voie de l'appel incident doivent être rejetées. Il en est de même, en l'absence d'illégalité fautive de l'arrêté du 22 août 2017 du maire d'Aix-en-Provence, des conclusions indemnitaires présentées par l'intimée, qui, au demeurant soulèvent un litige distinct de l'appel principal du ministre de l'intérieur et ont été présentées après l'expiration du délai d'appel. Sur les frais liés au litige : 14. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Les parties peuvent produire les justificatifs des sommes qu'elles demandent et le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " En ce qui concerne les frais exposés en première instance : 15. Il résulte de ce qui a été dit plus haut que la commune d'Aix-en-Provence, qui ne devait pas être la partie perdante en première instance, est fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'article 2 du jugement attaqué du 14 janvier 2020, le tribunal administratif de Marseille a mis à sa charge une somme de 1 200 euros en application des dispositions précitées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. En ce qui concerne les frais exposés en appel : 16. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de laisser à la charge des parties les frais non compris dans les dépens qu'elles ont exposés dans le cadre de la présente instance. D E C I D E : Article 1er : Les articles 1er et 2 du jugement n° 1708176 du tribunal administratif de Marseille sont annulés. Article 2 : Les conclusions présentées par Mme B... devant le tribunal administratif de Marseille tendant à l'annulation de l'arrêté du maire d'Aix-en-Provence du 22 août 2017 et ses conclusions d'appel incident sont rejetées. Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune d'Aix-en-Provence et à Mme C... B.... Délibéré après l'audience du 23 novembre 2022, où siégeaient : - Mme Helmlinger, présidente, - M. Revert, président assesseur, - M. Lombart, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 décembre 2022. 2 No 20MA01219
Cours administrative d'appel
Marseille