Jurisprudence
La jurisprudence est l'ensemble des décisions rendues par les juridictions administratives, pendant une certaine période dans une matière, dans une branche ou dans l'ensemble du droit.
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CAA de LYON, 3ème chambre, 12/10/2022, 20LY02677, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 21 novembre 2018 par laquelle le maire de ... a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de sa maladie, ensemble la décision du 22 mars 2019 rejetant son recours gracieux. Par un jugement n° 1903596 du 16 juillet 2020, le tribunal administratif de ... a rejeté cette demande. Procédure devant la cour Par une requête enregistrée le 15 septembre 2020 et un mémoire enregistré le 13 janvier 2021, M. B..., représenté par Me Di Nicola (SELARL DNL Avocats), avocate, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de ... du 16 juillet 2020 ; 2°) d'annuler la décision du 21 novembre 2018 par laquelle le maire de ... a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de sa maladie, ensemble la décision de rejet implicitement née sur son recours gracieux en date du 17 janvier 2019 et la décision du 22 mars 2019 rejetant son recours gracieux ; 3°) d'enjoindre à la commune de ... de reconnaître sa pathologie comme étant imputable au service ou, subsidiairement, de procéder à un nouvel examen de sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ; 4°) de mettre à la charge de la commune de ... la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - la décision refusant de reconnaître sa pathologie comme étant imputable au service a été adoptée au terme d'une procédure irrégulière, la commission de réforme, préalablement consultée, s'étant prononcée au vu de rapports médicaux irrégulièrement établis et d'un faux témoignage ; - elle procède d'une erreur d'appréciation, sa pathologie étant directement en lien avec ses conditions de travail. Par un mémoire en défense enregistré le 11 décembre 2020, la commune de ..., représentée par Me Verne (SELARL Itinéraires avocats Cadoz-Lacroix-Rey-Verne), avocat, conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge de M. B... la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle expose que les moyens soulevés ne sont pas fondés. Par ordonnance du 18 novembre 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 16 décembre 2021. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière ; - le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Sophie Corvellec, première conseillère ; - les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public ; - les observations de Me Di Nicola, avocate, représentant M. B..., et de Me Cwiklinski, avocate, représentant la commune de ... ; Une note en délibéré a été produite le 27 septembre 2022 pour la commune de ... et n'a pas été communiquée. Considérant ce qui suit : 1. M. A... B..., ingénieur en chef responsable ... de la commune de ..., a été placé en congé de longue durée, en raison d'un état dépressif, à compter du 13 janvier 2014. Il a alors sollicité la reconnaissance de l'imputabilité au service de sa pathologie. Sa demande a été rejetée par une décision du maire de ... du 5 juin 2015, laquelle a été annulée par un jugement du tribunal administratif de ... du 30 mai 2018, relevant l'irrégularité de la composition de la commission de réforme préalablement consultée. Sur injonction du tribunal, le maire de ... a procédé à un nouvel examen de cette demande, qu'il a, à nouveau, rejetée par décision du 21 novembre 2018, confirmée par une décision du 22 mars 2019 rejetant le recours gracieux de l'intéressé. Le tribunal administratif de ... a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de ces dernières décisions par un jugement du 16 juillet 2020, dont M. B... relève appel. S'il sollicite en outre l'annulation d'une décision implicite de rejet qui serait initialement née sur son recours gracieux, il doit être regardé comme se bornant ainsi à demander l'annulation de celle du 22 mars 2019, qui s'y est, en tout état de cause, substituée. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 2. En premier lieu, aux termes de l'article 1er de l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière : " La commission de réforme prévue par l'article 31 du décret du 26 décembre 2003 susvisé : 1. Donne son avis, dans les conditions fixées par le titre II du présent arrêté, sur la mise à la retraite pour invalidité des agents affiliés à la Caisse nationale des retraites des agents des collectivités locales (...) ". L'article 16 de ce même arrêté prévoit que : " La commission de réforme doit être saisie de tous témoignages, rapports et constatations propres à éclairer son avis. Elle peut faire procéder à toutes mesures d'instructions, enquêtes et expertises qu'elle estime nécessaires. Dix jours au moins avant la réunion de la commission, le fonctionnaire est invité à prendre connaissance, personnellement ou par l'intermédiaire de son représentant, de son dossier, dont la partie médicale peut lui être communiquée, sur sa demande, ou par l'intermédiaire d'un médecin ; il peut présenter des observations écrites et fournir des certificats médicaux. La commission entend le fonctionnaire, qui peut se faire assister d'un médecin de son choix. Il peut aussi se faire assister par un conseiller ". En vertu des dispositions de l'article 3 du même arrêté, la commission de réforme comprend : " 1. Deux praticiens de médecine générale, auxquels est adjoint, s'il y a lieu, pour l'examen des cas relevant de sa compétence, un médecin spécialiste qui participe aux débats mais ne prend pas part aux votes (...) ". 3. D'une part, si, par un jugement du 30 mai 2018, le tribunal administratif de ... a annulé la décision du 5 juin 2015 par laquelle le maire de ... avait initialement rejeté la demande de M. B..., en retenant une composition irrégulière de la commission de réforme préalablement consultée, ce vice de procédure n'est pas de nature à entacher d'irrégularité les expertises médicales préalablement réalisées, alors même qu'elles l'auraient été à la demande de cette commission. 4. D'autre part, s'il est constant que l'autorité administrative a communiqué aux médecins agréés, chargés de réaliser des expertises médicales relatives à l'origine de la pathologie de M. B..., un rapport daté du 7 juillet 2014 présentant le contexte professionnel et sa position quant à la demande de celui-ci, cette circonstance est sans incidence sur la régularité de la procédure suivie, dès lors que l'intéressé, qui a également été entendu par ces médecins, n'établit pas ne pas avoir pu obtenir communication de ce rapport avant la réunion de la commission de réforme, comme prévu par le courrier du 21 octobre 2014, qui, contrairement à ce qu'il prétend, ne lui oppose pas un refus à sa demande de communication, ni ne prétend n'avoir pu présenter ses observations sur ce rapport auprès de cette commission. 5. Enfin, si des attestations contradictoires ont été rédigées quant aux propos qui auraient été tenus par M. B... lors d'une réunion organisée le 1er octobre 2014, celui-ci n'établit pas pour autant le caractère mensonger de celle en date du 2 janvier 2015 produite par l'autorité administrative auprès de la commission de réforme. 6. Par suite, les moyens tirés de l'irrégularité de la procédure suivie devant la commission de réforme doivent être écartés. 7. En second lieu, aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans sa rédaction alors applicable : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. (...) / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident (...). / Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales (...) ". 8. Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service. 9. Il résulte des certificats médicaux versés au dossier que M. B..., qui n'avait pas connu d'antécédents psychiatriques jusqu'alors, a commencé à souffrir de difficultés psychiques à compter d'une réorganisation des services engagée par la commune de ... au cours du deuxième semestre 2012, dans un contexte marqué par le remplacement de ses deux supérieurs hiérarchiques, avec lesquels ses relations se sont alors rapidement dégradées. Il a ainsi subi une crise d'anxiété le 24 décembre 2013, suivie depuis d'une pathologie dépressive. 10. Si l'exercice de ses fonctions a ainsi pu être à l'origine de sa pathologie, il ressort toutefois des pièces du dossier, en particulier du rapport présenté au comité technique paritaire du 5 juillet 2013, que cette réorganisation, qui avait essentiellement pour but de déconcentrer la gestion des ressources humaines afin de recentrer l'échelon central sur des fonctions de pilotage et d'animation, ne visait pas exclusivement le service de prévention et d'ergonomie, dont M. B... était à l'origine et responsable depuis de nombreuses années. Si elle a eu d'importantes répercussions à son égard, en impliquant plus particulièrement le transfert de certains de ses agents et de ses missions relatives à la prévention des risques professionnels, ce service en a également reçu de nouvelles, s'inscrivant dans la logique de pilotage désormais dévolue aux services centraux, à travers une mission d'animation du futur réseau des conseillers et assistants de prévention, la mise en place d'un observatoire " santé-travail-absentéisme ", présentée comme une des priorités de la politique " Ressources Humaines " de la commune, et une mission d'accompagnement de cette réorganisation par l'adaptation de l'aménagement des espaces de travail. Ainsi, si le service qu'il dirigeait, de même que le poste qu'il occupait, ont évolué, M. B... ne peut en revanche soutenir que ceux-ci auraient, par-là même, perdu toute consistance, le privant de toute responsabilité managériale inhérente à son grade. Il résulte à l'inverse des certificats médicaux, en particulier de celui daté 18 juin 2014, dont il se prévaut, essentiellement établis à partir de propos qu'il a lui-même tenus, qu'il a rapidement exprimé une ferme opposition à cette réorganisation, perçue comme " une attaque ". Cette opposition s'est traduite par un comportement d'inaction, voire d'obstruction de sa part, ainsi qu'il résulte des reproches nombreux, précis et objectifs, formulés lors de son évaluation pour 2013, et repris dans le rapport du 7 juillet 2014, et sur lesquels M. B... n'apporte, dans la présente instance, aucune justification précise propre à les démentir. A cette occasion, ont également été critiquées ses pratiques managériales, dénoncées par plusieurs membres de son service et pour lesquelles une amélioration était déjà attendue, d'après ses trois précédentes évaluations. Dès lors, les pièces qu'il produit, en particulier celles relatives à une mésentente quant à la proposition d'inscrire un agent de son service à une formation de cadre, les témoignages d'une élue présidant le CHSCT portant notamment sur la rédaction d'un procès-verbal d'une séance de ce comité ou le témoignage d'un membre de son service, ne permettent d'établir, compte tenu de leur caractère isolé et ponctuel, la réalité ni d'une stratégie de contournement, ni de propos vexatoires et humiliants, dont il prétend avoir été victime de la part de ses nouveaux supérieurs, outrepassant l'exercice normal du pouvoir hiérarchique. En outre, et eu égard aux critiques alors formulées à l'encontre de son comportement et de ses pratiques professionnelles, il n'établit pas davantage le caractère injustifié de la décision de ne pas le proposer à un avancement en 2014. Dans ces conditions, et nonobstant les conclusions divergentes auxquelles les différentes expertises médicales ont abouti en l'espèce, l'attitude de M. B... a été la cause déterminante de la dégradation de son contexte professionnel et, par suite, de son état de santé, et a été de nature à détacher sa pathologie du service. 11. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de ... a rejeté sa demande. Sur les conclusions à fin d'injonction sous astreinte : 12. La présente décision rejetant les conclusions à fin d'annulation de M. B... et n'appelant, dès lors, aucune mesure d'exécution, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte doivent être rejetées. Sur les frais liés au litige : 13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de ..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par M. B.... Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de ce dernier le versement d'une somme de 800 euros à la commune de ..., en application de ces mêmes dispositions. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : M. B... versera à la commune de ... une somme de 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à la commune de .... Délibéré après l'audience du 27 septembre 2022, où siégeaient : M. Jean-Yves Tallec, président de chambre, M. Gilles Fédi, président-assesseur, Mme Sophie Corvellec, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 octobre 2022. La rapporteure, Sophie CorvellecLe président, Jean-Yves Tallec La greffière, Sandra Bertrand La République mande et ordonne au préfet du Rhône en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition, La greffière, 2 N° 20LY02677
Cours administrative d'appel
Lyon
CAA de MARSEILLE, 5ème chambre, 17/10/2022, 20MA04475, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Bastia, par une requête enregistrée sous le n° 1900192, d'annuler l'arrêté du 18 décembre 2018 par lequel elle a été placée en congé de longue maladie à demi-traitement à compter du 23 décembre 2018 pour une durée de six mois, par une requête enregistrée sous le n° 1900591, d'annuler la décision de refus d'imputabilité au service de sa maladie révélée par ses bulletins de paye des mois de mars et avril 2019 et, par une requête enregistrée sous le n° 1901266, d'annuler l'arrêté du 23 juillet 2019 par lequel le président de la communauté de communes de Calvi Balagne a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de sa pathologie. Par un jugement n°s 1900192, 1900591 et 1901266 du 1er octobre 2020, le tribunal administratif de Bastia a annulé l'arrêté précité du 18 décembre 2018, rejeté le surplus des conclusions aux fins d'annulation présentées par Mme A... et mis à la charge de la communauté de communes Calvi-Balagne la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Procédure devant la Cour : Par une requête, des pièces et mémoires complémentaires enregistrés les 2 décembre 2020, 5 décembre 2020, 20 décembre 2021, 24 août 2022 et 8 septembre 2022, Mme A..., représentée par Me Peres, demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bastia du 1er octobre 2020 en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation, d'une part, de la décision de refus d'imputabilité au service révélée par ses bulletins de salaires des mois de mars et avril 2019 et, d'autre part, de la décision du 23 juillet 2019 refusant expressément l'imputabilité au service de sa maladie et d'annuler lesdites décisions ; 2°) d'enjoindre à la communauté de communes Calvi Balagne de la placer en congé de maladie imputable au service à compter du 23 décembre 2017 jusqu'à sa mise à la retraite pour invalidité ; 3°) de mettre à la charge de la communauté de communes Calvi Balagne la somme de 2 000 euros au titre des frais d'instance exposés en appel ainsi que celle de 3 000 euros au titre des frais exposés en première instance. Elle soutient, dans le dernier état de ses écritures, que : - il est improbable que la communauté de communes Calvi Balagne ait été en mesure, avant l'établissement de la paye de mars 2019, de prendre connaissance de l'avis de la commission de réforme du 12 mars 2019 ; - sa maladie présente un lien de causalité direct et certain avec le service. Par deux mémoires en défense enregistrés le 17 janvier 2022 et le 23 septembre 2022, ce dernier n'ayant pas été communiqué, la communauté de communes Calvi Balagne, représentée par Me Léron, demande à la Cour : 1°) de rejeter la requête de Mme A... ; 2°) de mettre à la charge de Mme A... le paiement de la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que les moyens de la requête sont infondés. Par lettre du 8 septembre 2022, les parties ont été informées qu'en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, la Cour était susceptible de soulever d'office le caractère inapplicable des dispositions issues de l'ordonnance n° 2017-53 du 19 janvier 2017 et de procéder à une substitution de base légale. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ; - le décret n° 2019-301 du 10 avril 2019 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Vincent, présidente assesseure, - les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public, - et les observations de Me Léron pour la communauté de communes Calvi Balagne. Considérant ce qui suit : 1. Mme A..., adjoint administratif territorial principal de 2ème classe, exerçait ses fonctions au sein de la communauté de communes Calvi Balagne. A la suite d'une chute dans les escaliers le 2 octobre 2017, elle a été placée en arrêt de travail pour accident de service jusqu'au 22 décembre 2017. A compter du 23 décembre 2017, Mme A... a été de nouveau placée en congé de maladie en raison d'un état dépressif. Par décision en date du 22 mars 2018, elle a été placée en congé de longue maladie à compter du 23 décembre 2017. Par un arrêté du 18 décembre 2018, Mme A... a été placée en congé de longue maladie à demi-traitement à compter du 23 décembre 2018 pour une durée de six mois. Par lettre datée du 27 décembre 2018, réceptionnée le 3 janvier 2019, Mme A... a présenté une demande tendant à ce que sa pathologie dépressive soit reconnue comme imputable au service. Mme A... interjette appel du jugement susvisé du tribunal administratif de Bastia en tant seulement qu'il a rejeté ses conclusions aux fins d'annulation, d'une part, d'une décision de refus d'imputabilité au service qui aurait été révélée par ses bulletins de paye des mois de mars et avril 2019 lui octroyant un demi-traitement, et, d'autre part, de l'arrêté du 23 juillet 2019 refusant explicitement l'imputabilité au service de sa maladie. Sur l'étendue du litige : 2. Les conclusions présentées par Mme A... doivent être regardées comme dirigées uniquement contre l'arrêté du président de la communauté de communes Calvi Balagne du 23 juillet 2019 par lequel sa demande d'imputabilité au service de sa maladie a été explicitement rejetée, cette décision s'étant, en tout état de cause, substituée à la décision qui aurait été révélée par les bulletins de paye de mars et avril 2019. Sur le bien-fondé du jugement : En ce qui concerne les conclusions aux fins d'annulation : S'agissant du fondement légal : 3. Lorsqu'il constate que la décision contestée devant lui aurait pu être prise, en vertu du même pouvoir d'appréciation, sur le fondement d'un autre texte que celui dont la méconnaissance est invoquée, le juge de l'excès de pouvoir peut substituer ce fondement à celui qui a servi de base légale à la décision attaquée, sous réserve que l'intéressée ait disposé des garanties dont est assortie l'application du texte sur le fondement duquel la décision aurait dû être prononcée. Une telle substitution relevant de l'office du juge, celui-ci peut y procéder de sa propre initiative, au vu des pièces du dossier, mais sous réserve, dans ce cas, d'avoir au préalable mis les parties à même de présenter des observations sur ce point. 4. Aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans sa rédaction applicable avant sa modification par le II de l'article 10 de l'ordonnance n° 2017-53 du 19 janvier 2017 : " Le fonctionnaire en activité a droit : [...] / 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. [...] / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite [...] ". 5. Aux termes de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983, créé par le I de l'article 10 de l'ordonnance précitée du 19 janvier 2017, en vigueur depuis le 21 janvier 2017, et désormais codifié à l'article L. 822-20 du code général de la fonction publique : " I. Le fonctionnaire en activité a droit à un congé pour invalidité temporaire imputable au service lorsque son incapacité temporaire de travail est consécutive à un accident reconnu imputable au service, à un accident de trajet ou à une maladie contractée en service définis aux II, III et IV du présent article (...) / IV. -Est présumée imputable au service toute maladie désignée par les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale et contractée dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le fonctionnaire de ses fonctions dans les conditions mentionnées à ce tableau. (...) / Peut également être reconnue imputable au service une maladie non désignée dans les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu'elle est essentiellement et directement causée par l'exercice des fonctions et qu'elle entraîne une incapacité permanente à un taux déterminé et évalué dans les conditions prévues par décret en Conseil d'Etat./ (...) VI. -Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités du congé pour invalidité temporaire imputable au service mentionné au premier alinéa et détermine ses effets sur la situation administrative des fonctionnaires (...) ". 6. L'application des dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 résultant de l'ordonnance du 19 janvier 2017 étant manifestement impossible en l'absence d'un texte réglementaire fixant notamment les conditions de procédure applicables à l'octroi du nouveau congé pour invalidité temporaire imputable au service, ces dispositions ne sont donc applicables, s'agissant de la fonction publique territoriale, que depuis l'entrée en vigueur, le 12 avril 2019, du décret du 10 avril 2019, décret dont l'intervention était, au demeurant, prévue, par le VI de cet article 21 bis. Il en résulte que les dispositions de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984, dans leur rédaction antérieure à celle résultant de l'ordonnance du 19 janvier 2017, sont demeurées applicables jusqu'à l'entrée en vigueur du décret du 10 avril 2019, soit le 12 avril 2019. 7. Dès lors que les droits des agents en matière d'accident de service et de maladie professionnelle sont réputés constitués à la date à laquelle l'accident est intervenu ou la maladie a été diagnostiquée, la situation de Mme A..., dont l'état dépressif a été diagnostiqué avant le 12 avril 2019 et dont la demande de reconnaissance d'imputabilité au service a été présentée le 27 décembre 2018, était exclusivement régie par les conditions de forme et de fond prévues avant l'entrée en vigueur des dispositions législatives et réglementaires relatives au nouveau congé pour invalidité temporaire imputable au service. 8. Il ressort notamment des motifs de l'arrêté du 23 juillet 2019 que la communauté de communes Calvi Balagne s'est fondée sur l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 résultant de l'article 10 de l'ordonnance du 19 janvier 2017 pour refuser de reconnaître l'imputabilité au service de la maladie invoquée par Mme A.... Il résulte de ce qui vient d'être dit que la décision attaquée ne pouvait trouver son fondement dans ces dispositions auxquelles elle se réfère. Toutefois, le pouvoir d'appréciation dont dispose l'autorité administrative en vertu des dispositions de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 est le même que celui dont l'investissent les dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983. Les garanties dont sont assortis ces textes sont similaires, Mme A... ayant au demeurant bénéficié de la consultation de la commission de réforme qui a émis un avis le 12 mars 2019. Dans ces conditions, et ainsi qu'en ont été informées les parties, il y a lieu de substituer ces dispositions à la base légale retenue par la communauté de communes intimée. S'agissant de l'appréciation du caractère imputable au service : 9. Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service. 10. Il ressort du dossier établi par le médecin du travail que Mme A... a consulté les 5 novembre 2013, 7 novembre 2014, 23 septembre 2015 et 17 octobre 2017, lequel, par sa mission même, acquiert une connaissance précise des conditions de travail d'un agent, que l'intéressée a été victime de troubles dépressifs, d'un stress important, d'une angoisse et d'une grande fatigue consécutifs à un contexte professionnel pathogène résultant de difficultés relationnelles avec sa hiérarchie. Ces troubles et le contexte professionnel dans lequel ils s'inscrivent ont été également constatés par le médecin généraliste et le psychiatre de l'intéressée à compter de 2015 ainsi que cela ressort de certificats en date du 22 décembre 2017. Il résulte également des différentes expertises réalisées en 2018 par les psychiatres consultés dans le cadre des demandes de congés de longue maladie, longue durée et congé imputable au service déposées par Mme A..., que celle-ci a présenté une décompensation psychiatrique dans un contexte d'épuisement professionnel sous la forme d'un syndrome dépressif sévère. Par ailleurs, s'il ressort également des pièces du dossier que la requérante présentait auparavant une personnalité fragile, il résulte cependant desdites expertises et notamment de celle du chef de pôle psychiatrique de l'APHM que l'intéressée ne présentait aucun état antérieur dépressif. En outre, si la communauté de communes Calvi Balagne fait état de problèmes d'ordre personnel qui pourraient être à l'origine de la dépression de l'intéressée, elle n'assortit ces dires d'aucun commencement de preuve. Enfin, la commission de réforme a également, le 12 mars 2019, émis un avis favorable à la reconnaissance de l'imputabilité au service de la maladie. Au regard de l'ensemble de ces éléments et en l'absence de tout fait personnel de l'agent ou de toute autre circonstance conduisant à détacher la maladie du service, Mme A... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du 23 juillet 2019 portant refus d'imputabilité au service de sa pathologie dépressive. 11. Il résulte de tout ce qui précède que le jugement du tribunal administratif de Bastia doit être annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions aux fins d'annulation de l'arrêté du président de la communauté de communes Calvi Balagne du 23 juillet 2019. Il y a lieu, par suite, d'annuler ledit arrêté. En ce qui concerne les conclusions aux fins d'injonction : 12. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. / La juridiction peut également prescrire d'office cette mesure. " 13. L'annulation de l'arrêté du 23 juillet 2019 ainsi prononcé implique nécessairement qu'il soit enjoint à la communauté de communes Calvi Balagne de placer la requérante en position de congé de maladie imputable au service à compter du 23 décembre 2017 jusqu'à la date à laquelle elle sera mise à la retraite pour invalidité, dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt. Sur les frais d'instance : 14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que Mme A..., qui n'a pas la qualité de partie perdante, verse à la communauté de communes Calvi Balagne la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la communauté de communes Calvi Balagne la somme de 2 000 euros au titre des frais d'instance exposés en appel. En revanche, les conclusions présentées au titre des frais exposés en première instance doivent être rejetées, les premiers juges ayant fait une juste appréciation de ceux-ci en les évaluant à la somme de 1 000 euros. DECIDE : Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Bastia du 1er octobre 2020 est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions aux fins d'annulation de l'arrêté du président de la communauté de communes Calvi Balagne du 23 juillet 2019. Article 2 : L'arrêté du président de la communauté de communes Calvi Balagne du 23 juillet 2019 est annulé. Article 3 : Il est enjoint au président de la communauté de communes Calvi Balagne de placer Mme A... en position de congé de maladie imputable au service à compter du 23 décembre 2017, dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt. Article 4 : La communauté de communes Calvi Balagne versera à Mme A... la somme de 2 000 euros (deux mille euros) en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 5 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté. Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et à la communauté de communes Calvi Balagne. Délibéré après l'audience du 3 octobre 2022, à laquelle siégeaient : - Mme Helmlinger, présidente, - Mme Vincent, présidente-assesseure, - M. Mérenne, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 octobre 2022. N° 20MA04475 2
Cours administrative d'appel
Marseille
CAA de NANTES, 6ème chambre, 11/10/2022, 21NT00299, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Caen, devenu compétent par l'effet de la loi, d'annuler la décision du 3 avril 2018 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande tendant au bénéfice d'une pension militaire d'invalidité au titre de problèmes dentaires et auditifs. Par une requête distincte, il a également demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler la décision du 17 avril 2019 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande tendant au bénéfice d'une pension militaire d'invalidité au titre de lombalgies. Par un jugement n° 1902591, 1902695 du 4 décembre 2020, le tribunal administratif de Caen a accordé à M. C... une pension militaire d'invalidité au taux de 30 % à compter du 29 mars 2017 au titre d'une lombosciatique L4-L5 ainsi qu'une pension militaire d'invalidité au taux de 20 % à compter du 24 juin 2016 au titre de l'édenture totale avec intolérance à la prothèse. Il a rejeté le surplus des conclusions des requêtes présentées par l'intéressé. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés les 3 février et 13 octobre 2021, la ministre des armées demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Caen du 4 décembre 2020 en tant qu'il a fait droit aux demandes de M. C... ; 2°) de rejeter les demandes présentées en première instance par M. C.... Elle soutient que : - le jugement attaqué est insuffisamment motivé en ce qu'il a fixé à 20 % le taux de l'infirmité " édenture totale avec intolérance à la prothèse " sans préciser la part non imputable au service ; - les lombalgies dont M. C... souffre ne sont pas imputables au service ; l'intéressé ne peut en effet bénéficier de la présomption prévue à l'article L. 121-2 du code des pensions dès lors que ses lombalgies sont apparues la première fois le 14 avril 2003, soit moins de 90 jours après son arrivée en Côte d'Ivoire ; en outre, le tribunal ne pouvait sans aucun fondement médical considéré que l'infirmité présentait un " caractère incurable " ouvrant droit à l'intéressé à une pension militaire d'invalidité à titre définitif ; - les problèmes dentaires de M. C... sont anciens et non imputables au service. Par un mémoire en défense, enregistré le 27 août 2021, M. C..., représenté par Me Moumni, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit versée par l'Etat à son conseil sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il soutient que les moyens soulevés par le ministre des armées ne sont pas fondés. M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 15 décembre 2021. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme B..., - les conclusions de Mme Malingue, rapporteure publique, - et les observations de Me Mougin, substituant Me Moumni, représentant M. C.... Considérant ce qui suit : 1. M C..., né en 1971, a contracté un engagement dans l'armée de terre le 1er avril 1993. Il a intégré la Légion étrangère à compter du 17 avril 2002. Il est titulaire d'une pension militaire d'invalidité qui lui a été concédée par un arrêté du 7 mars 2016 au taux de 30 %, au titre de l'infirmité " état de stress post-traumatique. Troubles du sommeil et des conduites, reviviscences fréquentes, nécessité d'une thérapie et d'un traitement ". Le 24 juin 2016, il a présenté une demande de révision de cette pension pour aggravation et a évoqué deux infirmités nouvelles, à savoir une édenture complète et des troubles de la vision. Les 28 mars 2017 et 28 mai 2017 il a sollicité une nouvelle pension militaire d'invalidité au titre de lombalgies et d'une blessure aux tympans. Par un arrêté du 3 avril 2018, sa pension accordée au titre du stress post-traumatique qu'il présente a été maintenue au taux de 30 %, et ses demandes concernant ses problèmes dentaires, oculaires et auditifs ont toutes été rejetées. M. C... a contesté cette décision. Par une décision du 17 avril 2019, sa demande concernant ses lombalgies a également été rejetée. L'intéressé a sollicité l'annulation de cette décision (instance enregistrée sous le n° 1902591). Par un jugement du 7 juin 2019, le tribunal des pensions militaires d'invalidité de Caen a porté le taux de sa pension au titre du stress post-traumatique à 60 % et a ordonné la disjonction de cette affaire de celles concernant ses problèmes dentaires et auditifs (qui ont été enregistrées sous le n°1902695). Par un jugement n° 1902591, 1902695 du 4 décembre 2020, le tribunal administratif de Caen, devenu compétent, a accordé à M. C... une pension militaire d'invalidité au taux de 30 % à compter du 29 mars 2017 au titre d'une lombosciatiques L4-L5 ainsi qu'une pension militaire d'invalidité au taux imputable de 20 % à compter du 24 juin 2016 au titre de l'édenture totale avec intolérance à la prothèse. Il a rejeté le surplus des conclusions des requêtes présentées par l'intéressé. La ministre des armées conteste ce jugement en tant qu'il a fait droit aux demandes de M. C.... Sur les infirmités restant en litige : 2. Aux termes de l'article L. 121-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, dans sa rédaction en vigueur à la date de la demande présentée par M. C... : " Ouvrent droit à pension : 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite (...) d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; 2° Les infirmités résultant de maladies contractées par le fait ou à l'occasion du service ; 3° L'aggravation par le fait ou à l'occasion du service d'infirmités étrangères au service ; 4° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'accidents éprouvés entre le début et la fin d'une mission opérationnelle (...) sauf faute de la victime détachable du service. ". Aux termes de l'article L. 121-2 du même code : " Lorsque la preuve que l'infirmité ou l'aggravation résulte d'une des causes mentionnées à l'article L. 121-1 ne peut être apportée, ni la preuve contraire, la présomption d'imputabilité au service bénéficie à l'intéressé à condition : 1° S'il s'agit de blessure, qu'elle ait été constatée : a) Soit avant la date du renvoi du militaire dans ses foyers ; b) Soit, s'il a participé à une des opérations extérieures mentionnées à l'article L. 4123-4 du code de la défense, avant la date de son retour sur son lieu d'affectation habituelle ; 2° S'il s'agit d'une maladie, qu'elle ait été constatée après le quatre-vingt-dixième jour de service effectif et avant le soixantième jour suivant l'une des dates mentionnées au 1°./ Dans tous les cas, la filiation médicale doit être établie entre la blessure ou la maladie ayant fait l'objet de la constatation et l'infirmité invoquée. " En ce qui concerne les lombalgies : 3. Il est constant que M. C... était en opération extérieure en Côte d'ivoire du 17 février au 14 juin 2003 et qu'il est ensuite rentré en France sur son lieu d'affectation habituelle. L'intéressé soutient que ses lombalgies seraient apparues le 7 avril 2003 en manipulant des charges lourdes. Toutefois, son livret militaire ne fait état d'aucun accident à cette date. La ministre se prévaut des mentions portées sur ce même document à la date du 14 avril 2003 attestant d'une " lombalgie commune sans irradiation ", ainsi que le 18 juin 2013, indiquant qu'il souffre " depuis deux mois, [d'une]lombalgie en barre dans un contexte opérationnel sans réel repos ". Ces pathologies, rapportées au livret militaire, n'ont fait l'objet d'aucun rapport circonstancié et n'ont pas a été mentionnées dans le registre des constatations des blessures, infirmités et maladies survenues pendant le service. En revanche, le livret militaire de M. C... indique, dans le bref compte rendu d'un examen médical pratiqué par un médecin militaire, que l'intéressé a présenté un blocage lombaire le 21 juillet 2003 au cours d'une prise d'armes. Cet évènement a fait l'objet d'un rapport d'une constatation de la part de sa hiérarchie. A cette date, M. C... avait passé plus de 90 jours en Côte d'Ivoire et était revenu de cette mission pour rejoindre son lieu d'affectation depuis moins de 60 jours. Ainsi que l'a jugé le tribunal administratif, il entrait donc dans les prévisions de l'article L. 121-12 précité du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre. La ministre n'est dès lors pas fondée à soutenir que M. C... ne pouvait se voir accorder une pension militaire d'invalidité au titre de cette infirmé au taux non contesté de 30 %. 4. En revanche, aux termes de l'articles L. 121-8 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " La pension a un caractère définitif lorsque l'infirmité causée par la blessure ou la maladie est reconnue incurable. A défaut, la pension est concédée pour trois ans et peut être convertie en pension définitive dans les conditions prévues par décret en Conseil d'Etat. En cas de pluralité d'infirmités dont l'une ouvre droit à pension temporaire, la pension indemnisant l'ensemble des infirmités est attribuée à titre temporaire, sans préjudice du caractère définitif qui peut être reconnu à une ou plusieurs infirmités (...). ". Si le tribunal administratif a constaté que lors des examens médicaux des 21 avril 2015 et 14 mars 2018, M. C... souffrait toujours de lombalgies, dans son avis du 14 mars 2019, la médecin chargée des pensions militaires d'invalidité a indiqué que sa maladie ne pouvait à cette date être regardée comme " non incurable ". Par suite, la ministre est fondée à soutenir que le tribunal administratif ne pouvait accorder à l'intéressé une pension militaire d'invalidité à titre définitif à raison de cette pathologie. M. C... était seulement en droit de percevoir à compter du 29 mars 2017 une pension militaire d'invalidité temporaire pour une durée de trois ans susceptible d'être convertie en pension à titre définitif après examen médical. En ce qui concerne l'édenture totale : 5. Pour contester tout lien entre le stress post-traumatique présenté par M. C... à la suite des différentes missions auxquelles il a participé notamment en ex-Yougoslavie, et qui selon deux professionnels de santé est à l'origine d'une forte alcoolisation, laquelle a elle-même entraîné ses problèmes dentaires, la ministre insiste sur le manque d'hygiène dentaire de l'intéressé. Toutefois, dans son rapport du 12 décembre 2017 la chirurgienne-dentiste, diplômée en réparation juridique du dommage corporel, qui a examiné M. C..., a constaté que, si en 1992 il présentait de nombreuses caries et pertes de dents, le 20 août 1992 ses caries avaient été soignées, ce qui est confirmé par une visite de contrôle. Elle relève qu'en 1999, un dentiste avait attesté avoir réalisé les soins dentaires requis par l'état de l'intéressé, qui, à l'issue, ne présentait plus aucun problème dentaire ainsi qu'en atteste la visite systématique d'aptitude qui s'en est suivie. Cette experte confirme en outre que l'état de stress post-traumatique de ce militaire a été diagnostiqué tardivement en 2014, en raison d'un sentiment de honte et de repli qui l'a empêché de suivre les soins médicaux et paramédicaux dont il aurait eu besoin, ce que confirme le psychiatre de l'hôpital interarmées de Percy. La chirurgienne-dentiste retient que la perte des dents de M. C... est la conséquence directe du syndrome de stress post traumatique et des problèmes d'alcoolisation qui en ont découlé. Si la ministre des armées se prévaut de rapports de deux autres chirurgiens-dentistes militaires en date des 10 février 2017 et 10 janvier 2018, ces praticiens se bornent à souligner la mauvaise hygiène dentaire de M. C... qui, à cette date présentait un stress post-traumatique depuis au moins trois ans, qui l'empêchait ainsi qu'il a été dit de procéder aux soins dentaires nécessaires. Dans ces conditions, c'est à juste titre que le tribunal administratif a considéré que l'intéressé apportait la preuve d'un lien de causalité direct et certain entre son édenture et l'intolérance aux prothèses amovibles réalisées en 2017 et le stress post-traumatique pensionné. La ministre soutient en outre que le jugement attaqué est insuffisamment motivé en ce qu'il a fixé le taux de cette infirmité à 20 % sans préciser la part non imputable au service alors qu'aux termes de l'article L. 121-7 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre " qu'en cas d'aggravation par le fait ou à l'occasion du service d'une infirmité étrangère à celui-ci, seule cette aggravation est prise en considération ". Ainsi que l'a jugé le tribunal administratif, qui a suffisamment motivé sa position en indiquant au point 12 que le médecin expert doit être regardé comme ayant évalué, en fixant ce taux, la seule aggravation imputable au service, les différents experts qui ont examinés M. C... ont fixé à 20 % la part imputable au service de cette infirmité sans indiquer la part qui relève de la propre négligence de l'intéressé antérieure à 2014. Par suite, c'est à juste titre que les premiers juges ont fixé " au taux imputable de 20 % " la pension militaire d'invalidité à laquelle pouvait prétendre l'intéressé à raison de cette infirmité. 6. Il résulte de tout ce qui précède, que la ministre des armées est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a accordé une pension militaire d'invalidité à titre définitif à M. C... pour l'infirmité " lombalgies ", laquelle doit être accordée aux taux de 30 % à titre provisoire seulement pour une durée de trois ans à compter du 29 mars 2017 puis faire l'objet d'un nouvel examen après cette date. Les conclusions d'appel incident présentées par M. C... doivent en revanche être rejetées. Sur les frais liés au litige : 7. M. C... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Moumni de la somme de 1 500 euros dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et à l'article 108 du décret du 19 décembre 1991. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement n° 1902591, 1902695 du 4 décembre 2020 du tribunal administratif de Caen est annulé en tant qu'il a accordé à M. C... une pension militaire d'invalidité à titre définitif au taux de 30 % à compter du 29 mars 2017 pour ses lombalgies. Article 2 : Il est allouée à M. C... une pension militaire d'invalidité à titre provisoire au taux de 30 % à compter du 29 mars 2017 pour une durée de trois ans au titre des lombalgies. Cette pension fera l'objet d'un nouvel examen à l'expiration de ce délai de trois ans. Article 3 : Le surplus des conclusions du ministre des armées et de M. C... est rejeté. Article 4 : L'Etat versera à Me Moumni la somme de 1 500 euros dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au ministre des armées et à M. A... C.... Délibéré après l'audience du 23 septembre 2022, à laquelle siégeaient : - M. Gaspon, président de chambre, - M. Coiffet, président-assesseur, - Mme Gélard, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 11 octobre 2022. La rapporteure, V. GELARDLe président, O. GASPON La greffière, I. PETTON La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21NT00299
Cours administrative d'appel
Nantes
CAA de LYON, 7ème chambre, 20/10/2022, 21LY04182, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon de condamner l'Etat à lui verser la somme de 38 000 euros en réparation de son déficit fonctionnel temporaire pendant la période du 13 mai 2013 au 16 juillet 2016, de son déficit permanent et du préjudice moral que lui a causé son absence de reclassement. Par un jugement n° 2100213 du 20 octobre 2021, le tribunal a condamné l'Etat à lui verser la somme de 20 000 euros et a rejeté le surplus de sa demande. Procédure devant la cour Par une requête et un mémoire enregistrés les 21 décembre 2021 et 29 septembre 2022, et un dernier mémoire présenté le 4 octobre 2022, et non communiqué, Mme B..., représentée par Me Chesney, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il a limité son indemnisation à la somme de 20 000 euros ; 2°) à titre principal de condamner l'Etat à lui verser la somme de 8 000 euros en réparation de son déficit fonctionnel temporaire pour la période comprise entre le 3 mai 2013 et le 16 juillet 2016, et la somme de 7 000 euros en réparation de son préjudice moral résultant de l'absence de reclassement ; 3°) à titre subsidiaire de sursoir à statuer sur la demande d'indemnisation de son préjudice moral résultant de l'absence de reclassement jusqu'à la décision de retrait de l'arrêté de la direction des services départementaux de l'éducation nationale du Rhône du 31 mai 2022 en attendant l'issue de son recours gracieux ou la décision définitive de la juridiction qui sera saisie ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros, au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - l'administration n'a jamais invoqué le motif selon lequel elle l'avait fait bénéficier d'une période de préparation au reclassement ; - l'administration a fait preuve de carence en ne proposant pas à son agent un poste de reclassement pendant cette période et cette inaction fautive lui a causé un préjudice ; - aucune proposition de reclassement n'est intervenue dès lors que l'affectation en surnombre par arrêté du 4 janvier 2018, qui a été pris aux seules fins de la rémunérer dans l'attente d'un reclassement, a été annulée ; cette affectation ne correspondait pas à sa demande et à ses compétences ; l'administration n'a pas pris de décision justifiant de l'impossibilité de lui proposer plusieurs emplois ; - l'administration a méconnu l'article 3 du décret n° 84-1051 du 30 novembre 1984 ; - le préjudice résultant de son déficit fonctionnel permanent à la suite à l'accident peut être évalué à 23 000 euros ; - le préjudice résultant de son déficit fonctionnel temporaire à la suite à l'accident peut être évalué à 8 000 euros ; - la méconnaissance par l'administration de son obligation de reclassement lui a causé un préjudice moral qui peut être évalué à 7 000 euros. Par un mémoire enregistré le 22 septembre 2022 le recteur de l'académie de Lyon conclut au rejet de la requête Il soutient qu'aucun moyen de la requête n'est fondé et à titre subsidiaire que l'indemnisation du déficit fonctionnel temporaire doit être limitée à la somme de 1 500 euros. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, portant droits et obligations des fonctionnaires ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984, portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ; - le décret n° 84-1051 du 30 novembre 1984 ; - le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Djebiri, première conseillère, - les conclusions de M. Rivière, rapporteur public, - et les observations de Mme B... ; Vu les notes en délibéré présentées par Mme B..., enregistrées les 6 et 7 octobre 2022. Considérant ce qui suit : 1. Mme B..., professeure des écoles de classe normale, a été victime d'un accident le 3 mai 2013, reconnu imputable au service. Le 21 juillet 2016, la commission de réforme a déclaré l'intéressée inapte de manière définitive à l'exercice de ses fonctions et a évalué son taux d'incapacité permanente partielle à 12 %. L'intéressée a sollicité son reclassement le 25 septembre 2016. Elle a refusé de prendre les fonctions administratives qui lui ont été proposées à compter de janvier 2018 au lycée La Martinière Duchère de Lyon. Elle a par ailleurs saisi le recteur de l'académie de Lyon le 28 septembre 2020 d'une demande d'indemnisation des préjudices personnels résultant de son accident de service, ainsi que du préjudice né selon elle de l'absence de reclassement, restée sans réponse. Mme B... relève appel du jugement du tribunal administratif de Lyon qui a limité son indemnisation des préjudices personnels résultant de son accident de service à 20 000 euros et rejeté le surplus de sa demande. Sur les conclusions tendant à la réparation du préjudice résultant de l'absence de reclassement : 2. Aux termes de l'article 63 de la loi du 11 janvier 1984 : " Lorsque les fonctionnaires sont reconnus, par suite d'altération de leur état physique, inaptes à l'exercice de leurs fonctions, le poste de travail auquel ils sont affectés est adapté à leur état physique. Lorsque l'adaptation du poste de travail n'est pas possible, ces fonctionnaires peuvent être reclassés dans des emplois d'un autre corps s'ils ont été déclarés en mesure de remplir les fonctions correspondantes. En vue de permettre ce reclassement, l'accès à des corps d'un niveau supérieur, équivalent ou inférieur est ouvert aux intéressés, quelle que soit la position dans laquelle ils se trouvent, selon les modalités retenues par les statuts particuliers de ces corps, en exécution de l'article 26 ci-dessus et nonobstant les limites d'âge supérieures, s'ils remplissent les conditions d'ancienneté fixées par ces statuts. Un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions dans lesquelles le reclassement, qui est subordonné à la présentation d'une demande par l'intéressé, peut intervenir. Il peut être procédé au reclassement des fonctionnaires mentionnés à l'alinéa premier du présent article par la voie du détachement dans un corps de niveau équivalent ou inférieur. Dès qu'il s'est écoulé une période d'un an, les fonctionnaires détachés dans ces conditions peuvent demander leur intégration dans le corps de détachement. ". Aux termes de l'article 3 du décret du 30 novembre 1984 : " Le fonctionnaire qui a présenté une demande de reclassement dans un autre corps doit se voir proposer par l'administration plusieurs emplois pouvant être pourvus par la voie du détachement. L'impossibilité, pour l'administration, de proposer de tels emplois doit faire l'objet d'une décision motivée. " 3. A la suite à la demande de reclassement que Mme B... a présentée le 25 septembre 2016 alors qu'elle suivait une formation d'ingénieur à l'école des mines de Douai, dont elle est sortie diplômée en septembre 2017, la rectrice de l'académie de Lyon, après l'avoir reçue le 6 décembre 2017, lui a proposé, par un courrier du 22 décembre 2017, un poste à l'agence comptable du lycée La Martinière Duchère, en vue d'un reclassement dans un corps administratif relevant du ministère de l'éducation nationale. L'intéressée, qui n'établit pas que ces fonctions ne correspondaient pas à ses aptitudes et à ses qualifications, a refusé cette affectation. Si la rectrice de l'académie de Lyon, par un arrêté du 10 juillet 2017, a affecté l'intéressée à titre provisoire, à compter du 1er septembre 2017 et jusqu'au 31 août 2018, en zone de secteur d'ajustement auprès de l'inspecteur de l'éducation nationale adjoint de Lyon, ayant ensuite précisé, par un arrêté du 4 janvier 2018, qu'elle était provisoirement affectée entre les 15 janvier et 31 août 2018 en zone de secteur d'ajustement auprès de cet inspecteur, avec un rattachement administratif au lycée La Martinière Duchère de Lyon, il n'en reste pas moins que cette affectation, que le tribunal administratif de Lyon, par un jugement n° 1800992 et 1803204 du 19 juin 2019, a annulée par le motif qu'elle n'avait pas été prononcée en vue de permettre à sa bénéficiaire d'exercer des fonctions d'enseignante, qu'elle avait au demeurant été déclarée inapte définitivement à exercer, mais revêtait le caractère d'une nomination pour ordre, ne correspond pas à celle proposée le 22 décembre 2017. Dans ces conditions, et quand bien même la proposition de reclassement ne correspondrait pas à ses souhaits, aucune faute ne saurait être reprochée à l'administration, susceptible d'engager sa responsabilité. 4. Par ailleurs, Mme B... fait valoir que le retard de l'administration à répondre à sa demande de reclassement, présentée le 25 septembre 2016, est fautif. Il apparaît toutefois que l'intéressée a pu effectuer, entre le 1er septembre 2016 et le 31 septembre 2017, une formation d'ingénieur. Il n'apparaît pas, à cet égard, que la faute ainsi reprochée à l'administration l'aurait précisément et directement exposée à un préjudice moral. Sur les conclusions tendant à la réparation des déficits fonctionnels engendrés par l'accident de service : 5. Les dispositions de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident ; (...) ". 6. Ces dispositions qui instituent, en faveur des fonctionnaires de l'État victimes d'accidents de service ou de maladies professionnelles, une rente d'invalidité en cas de mise à la retraite et une allocation temporaire d'invalidité en cas de maintien en activité, déterminent forfaitairement la réparation à laquelle les intéressés peuvent prétendre, au titre des conséquences patrimoniales de l'atteinte à l'intégrité physique, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions. Elles ne font, en revanche, obstacle ni à ce que le fonctionnaire qui a enduré, du fait de l'accident ou de la maladie, des dommages ne revêtant pas un caractère patrimonial, tels que des souffrances physiques ou morales, un préjudice esthétique ou d'agrément ou des troubles dans les conditions d'existence, obtienne de la collectivité qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice, ni à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre la collectivité, dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette collectivité ou à l'état d'un ouvrage public dont l'entretien lui incomberait. Ces dispositions instituent une garantie de prise en charge des frais médicaux et des frais liés à l'accident ainsi qu'une allocation temporaire d'invalidité. 7. Il ressort des pièces produites en appel que Mme B... a été hospitalisée dans une clinique psychiatrique du 13 février au 25 mars 2014 et que son état de santé a nécessité des consultations psychiatriques régulières, et un traitement médicamenteux. Il n'apparaît pas, en l'espèce, que la somme de 1 000 euros allouée par les premiers juges pour indemniser le déficit fonctionnel temporaire serait insuffisante. Par suite, et en dépit de l'accord de l'administration pour porter le montant de cette indemnité à 1 500 euros, la demande présentée par l'intéressée à ce titre ne peut qu'être rejetée. 8. Par ailleurs, et compte tenu spécialement de l'expertise, il apparaît que Mme B..., âgée de 34 ans à la date de consolidation de son état de santé, subit un déficit fonctionnel permanent, évalué par l'expert à 12 % depuis le 12 juillet 2016. En fixant à la somme de 19 000 euros le montant du préjudice encouru à ce titre, les premiers juges ne l'ont pas inexactement apprécié. 9. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal a limité la condamnation de l'Etat à la somme de 20 000 euros. Dès lors, sa requête doit, dans l'ensemble de ses conclusions, être rejetée. DÉCIDE : Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse. Copie en sera adressée au recteur de l'académie de Lyon. Délibéré après l'audience du 6 octobre 2022 à laquelle siégeaient : M. Picard, président de chambre, M. Seillet, président assesseur, Mme Djebiri, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 20 octobre 2022. La rapporteure, C. DjebiriLe président, V.-M. Picard La greffière, S. Lassalle La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition, La greffière, N°21LY04182 2 ap
Cours administrative d'appel
Lyon
CAA de NANTES, 6ème chambre, 11/10/2022, 21NT00280, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Par l'effet de la loi du 13 juillet 2018, le contentieux des pensions militaires d'invalidité a été transféré aux tribunaux administratifs. La requête de M. A... C... a été transférée et enregistrée au tribunal administratif de Rennes le 1er novembre 2019 sous le numéro 1905773. Par une saisine et un mémoire, enregistrés le 21 février 2018 et le 18 février 2020, M. C... a demandé à ce tribunal l'annulation de la décision du 20 octobre 2017 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande tendant à la révision de sa pension militaire d'invalidité. Par un jugement n°1905773 du 30 novembre 2020, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 1er février 2021, M. C..., représenté par Me Lemasson de Nercy, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rennes du 30 novembre 2020 ; 2°) d'annuler la décision du 20 octobre 2017 de la ministre des armées ; 3°) d'ordonner une nouvelle expertise médicale ; 4°) de revaloriser sa pension militaire au taux de 65 % ; 5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros, sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991. Il soutient que l'aggravation de son état de santé est imputable à son accident de service survenu le 20 juin 1957 et non à l'accident vasculaire cérébral dont il a été victime au cours du mois de mai 1995 et que les conclusions erronées de l'expertise médicale réalisée le 31 mars 2017 entachent d'illégalité la décision contestée. Par un mémoire en défense, enregistré le 17 mai 2021, la ministre des armées conclut au rejet de la requête. Elle soutient que la requête d'appel est irrecevable, et à titre subsidiaire, s'en rapporte à ses écritures de première instance. Par un courrier du 2 février 2021, M. C... a été invité à produire à la cour sous 15 jours le justificatif du dépôt de son dossier d'aide juridictionnelle. Ce courrier est resté sans réponse. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; - la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme B..., - les conclusions de Mme Malingue, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. Le 20 juin 1957, M. C... a été victime d'un accident de parachute lors de son service militaire en Algérie. Il s'est vu concéder, par un arrêté du 12 avril 1994, le bénéfice d'une pension militaire d'invalidité au taux de 55 % en raison d'un " syndrome douloureux vertébral dorsolombaire et cervical. Scoliose convexité gauche. Raideur du segment cervical. Limitation douloureuse de l'extension, mouvements de latéroflexion et rotation presque impossible. Arthrose vertébrale étagée. Rétrécissement des trous de conjugaison au niveau cervical. " Le 4 décembre 2015, M. C... a sollicité la révision de cette pension au motif que son état de santé s'était aggravé. Par une décision du 20 octobre 2017, la ministre des armées a rejeté sa demande en estimant que cette aggravation était en relation avec l'accident vasculaire cérébral dont il avait été victime au mois de mai 2015 et non avec l'accident de service survenu en 1957. M. C... a saisi le tribunal des pensions militaires d'Ille-et-Vilaine, lequel a transféré sa requête au tribunal administratif de Rennes devenu compétent. L'intéressé relève appel du jugement du 30 novembre 2020 par lequel le tribunal administratif a rejeté sa demande. Sur les conclusions à fin d'annulation : 2. Aux termes de l'article L. 154-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " Le titulaire d'une pension d'invalidité concédée à titre définitif peut en demander la révision en invoquant l'aggravation d'une ou plusieurs des infirmités en raison desquelles cette pension a été accordée. / Cette demande est recevable sans condition de délai. / La pension ayant fait l'objet de la demande est révisée lorsque le pourcentage d'invalidité résultant de l'infirmité ou de l'ensemble des infirmités est reconnu supérieur de 10 points par rapport au pourcentage antérieur./ Toutefois, l'aggravation ne peut être prise en considération que si le supplément d'invalidité est exclusivement imputable aux blessures et aux maladies constitutives des infirmités pour lesquelles la pension a été accordée./ La pension définitive révisée est concédée à titre définitif. ". 3. D'une part, s'il ne peut prétendre au bénéfice de la présomption légale d'imputabilité, le demandeur de la pension doit apporter la preuve de l'existence d'une relation certaine et directe de cause à effet entre l'aggravation qu'il invoque et les circonstances particulières du service à l'origine de l'affection. Cette preuve ne saurait résulter de la seule circonstance que l'infirmité soit apparue durant le service, ni d'une hypothèse médicale, ni d'une vraisemblance, ni d'une probabilité, aussi forte soit-elle, ni des conditions générales de service partagées par l'ensemble des militaires servant dans la même unité. 4. D'autre part, le droit à pension est destiné à réparer toutes les conséquences des faits de service dommageables telles qu'elles se révèlent par suite de l'évolution physiologique, pour autant qu'aucune cause étrangère, telle qu'une affection distincte de l'affection pensionnée, ne vienne, pour sa part, aggraver l'état de l'intéressé. Ainsi l'aggravation de l'infirmité initiale, si elle est seulement due au vieillissement, peut justifier une révision du taux de la pension. En revanche, si le vieillissement cause une nouvelle infirmité, distincte de l'infirmité pensionnée, qui contribue à l'aggravation de celle-ci, les dispositions précitées de l'article L. 154-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre font obstacle à cette révision, dès lors que l'aggravation est due à une cause étrangère à l'infirmité pensionnée. 5. En premier lieu, pour examiner la demande de révision de la pension militaire d'invalidité de M. C..., une nouvelle expertise médicale a été menée à bien. Le 31 mars 2017, l'expert a constaté que le syndrome vertébral dorso-lombaire et cervical de l'intéressé était " sans aggravation significative ", dès lors que l'examen clinique était superposable avec celui de la précédente expertise effectuée le 18 avril 1996. Cet expert a souligné l'existence d'une pathologie " intercurrente " survenue en mai 2015, responsable d'une altération motrice et d'une dépendance majorée de l'intéressé. Au vu de ce constat, l'expert a conclu à l'absence de lien entre la dégradation de l'état de santé de M. C... et son accident initial et a proposé de maintenir le taux de d'invalidité de cette infirmité à 55%. 6. Pour contester cette expertise, le requérant se prévaut d'un certificat médical du généraliste qui le suivait, daté du 1er décembre 2015, qui indique que le patient présente une aggravation des douleurs et des mouvements, sans aucune autre précision. M. C... se prévaut également de trois certificats médicaux datés des 24 novembre 2015, 7 mars 2017 et 25 juillet 2017 qui attestent de ses troubles actuels de la marche, notamment, sans pour autant établir un lien direct et certain avec son accident de service initial. Il produit enfin un certificat daté du 3 mai 2018 de son médecin traitant, indiquant que l'état de santé de l'intéressé semble s'aggraver, en dépit de la poursuite de son traitement antalgique et des séances de kinésithérapie qui lui sont dispensées. Ces seuls justificatifs ne suffisent pas à établir que, contrairement à ce qu'a estimé l'expert médical, l'aggravation de l'état de santé de M. C... serait liée à son accident survenu au cours de son service militaire en Algérie. Ils ne permettent pas d'émettre un doute sur les conclusions émises par cet expert, lequel rendrait nécessaire une nouvelle expertise médicale. Par suite, le requérant n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, d'une aggravation de ses douleurs et infirmités en lien avec cet accident de service. 7. En second lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 6 du présent arrêt, l'aggravation de l'état de santé de M. C... n'étant pas seulement due à l'infirmité initiale, il ne pourra se voir attribuer une révision du taux de sa pension militaire d'invalidité au motif du vieillissement. 8. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre des armées, que la demande de M. C... doit être rejetée. Sur les frais liés au litige : 9. Les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. C... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. C... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre des Armées. Délibéré après l'audience du 23 septembre 2022, à laquelle siégeaient : - M. Gaspon, président, - M. Coiffet, président-assesseur, - Mme Gélard, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 octobre 2022. La rapporteure, V. GELARDLe président, O. GASPON La greffière, I. PETTON La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21NT00280
Cours administrative d'appel
Nantes
CAA de NANTES, 6ème chambre, 25/10/2022, 21NT00935, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du 30 octobre 2017 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande tendant à l'octroi d'une pension militaire d'invalidité en tant qu'elle ne prend pas en compte l'infirmité " acouphène ". Par un jugement n° 1905779 du 15 février 2021 le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et des mémoires, enregistrés le 6 avril 2021, le 3 décembre 2021 et le 4 janvier 2022, M. C..., représenté par Me Huon, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du 15 février 2021 2°) d'annuler cette décision ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - s'il ne conteste pas le taux de 10 pour cent concernant l'infirmité " traumatisme cervical, discopathies ; migraines post-traumatiques ", il doit en obtenir la jouissance à compter du 6 juillet 2013 ; - il rapporte la preuve des traumatismes sonores à l'origine des acouphènes. Par des mémoires en défense enregistrés le 5 novembre 2021, 17 décembre 2021 et 19 janvier 2022 le ministre de la défense conclut au rejet de la requête. Il soutient qu'aucun moyen n'est fondé et que le rapport d'expertise du Dr A... du 1er septembre 2021 est irrecevable. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience et ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. B..., - et les conclusions de Mme E.... rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. M. C..., sergent dans l'armée de terre rayé des contrôles le 1er octobre 2016, a présenté une demande de pension militaire d'invalidité le 22 janvier 2014. Par une décision du 30 octobre 2017, le ministre des armées lui a accordé le bénéfice d'une pension au taux de 10 pour cent au titre de l'infirmité " traumatisme cervical, discopathies ; migraines post-traumatiques " et a rejeté sa demande en ce qui concerne les infirmités " acouphènes " et " hypoacousie bilatérale ". M. C... relève appel du jugement du tribunal administratif de Rennes du 15 février 2021 en tant que celui-ci n'a pas retenu la date du 6 juillet 2013 pour ce qui concerne le point de départ de sa pension pour l'infirmité " traumatisme cervical, discopathies ; migraines post-traumatiques " et en tant qu'il a rejeté sa demande concernant l'infirmité " acouphènes ". Sur l'infirmité " traumatisme cervical, discopathies ; migraines post-traumatiques " : 2. Aux termes de l'article L. 6 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre dans sa rédaction alors applicable : " La pension prévue par le présent code est attribuée sur demande de l'intéressé après examen, à son initiative, par une commission de réforme selon des modalités fixées par décret en Conseil d'Etat. L'entrée en jouissance est fixée à la date du dépôt de la demande. ". Aux termes de l'article L. 108 du même code : " Lorsque, par suite du fait personnel du pensionné, la demande de liquidation ou de révision de la pension est déposée postérieurement à l'expiration de la troisième année qui suit celle de l'entrée en jouissance normale de la pension, le titulaire ne peut prétendre qu'aux arrérages, afférents à l'année au cours de laquelle la demande a été déposée et aux trois années antérieures. ". 3. Il résulte de l'instruction qu'à l'occasion de l'expertise médicale à l'issue de laquelle le taux d'invalidité de 10% lui a été attribué n'ont pas été évoqués les autres accidents intervenus en service, de 2008 et 2013, pour lesquels M. C... n'a pas sollicité de pension, et qui auraient ouvert à l'intéressé, avant l'accident de 2013, un droit à pension au titre du rachis cervical. Ainsi, M. C... a présenté sa demande de pension le 22 janvier 2014, soit moins d'un an après la survenue de l'accident de trajet dont il a été victime, le 5 juillet 2013, et pour lequel il est entré en jouissance de pension. Il ne peut donc se prévaloir utilement des dispositions de l'article L. 108 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, applicables au cas où la demande est présentée plus de trois ans après l'évènement justifiant le paiement de la pension. C'est, par suite, à bon droit que le ministre, en application de l'article L. 6 de ce code a fixé l'entrée en jouissance de la pension au 22 janvier 2014, date à laquelle M. C... a présenté sa demande de pension. Sur l'infirmité " acouphènes " : 4. L'expert qui a examiné M. C... à la suite de sa demande de pension a retenu un taux de 10 pour cent pour cette infirmité. L'administration a cependant retenu un partage de ce taux en estimant que les trois rapports circonstanciés des 14 février 2005, 19 juillet 2007 et 30 mai 2011 permettaient de retenir un taux de 5 pour cent imputable au service, tandis que l'existence d'acouphènes antérieurement à ces épisodes justifiait un taux de 5 pour cent qui ne pouvait être imputable au service en l'absence de fait de service répertorié. 5. Si M. C... conteste cette appréciation, il résulte des mentions de son livret médical que la mention, en date du 25 novembre 2004 soit quatre jours après le début de l'opération extérieure Héracles, d'un épisode de bourdonnement d'oreille à droite avec des échos et d'un nouvel épisode le 24 décembre de la même année, doivent, en l'absence de facteur violent et soudain décrit par un constat circonstancié qui aurait permis d'en déterminer la cause, être qualifiés de maladie, contrairement à ce que soutient M. C..., et ne peuvent être présumés imputables au service, aux termes de l'article L. 3 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, puisque survenus durant les quatre-vingt-dix premiers jours de cette opération extérieure. C'est donc à bon droit que le ministre les a regardés comme non imputables au service et a opéré le partage du taux de 10 pour cent en 5 pour cent au titre de la maladie non imputable au service et 5 pour cent au titre de la blessure imputable au service et résultant des accidents survenus en service les 14 février 2005, 19 juillet 2007 et 30 mai 2011. En se bornant à produire une expertise non-contradictoire qui se borne à reprendre les affirmations de M. C... quant à l'origine des acouphènes permanents, affirmations factuelles contestées par le ministre et qui ne sont corroborées par aucun autre élément du dossier, et à soutenir que la seule référence à une origine multiple de cette infirmité ne peut être regardée comme la preuve contraire de l'imputabilité au service et ne peut justifier le partage précédemment décrit du taux d'invalidité, M. C..., compte tenu de ce qui vient d'être dit, n'apporte aucun élément sérieux pour établir que le ministre aurait entaché sa décision d'une erreur d'appréciation en retenant le taux de 5 pour cent pour l'infirmité " acouphènes ". 6. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 30 octobre 2017. 7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, le versement d'une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Les conclusions présentées à ce titre par M. C... ne peuvent dès lors être accueillies. DECIDE : Article 1er : La requête de M. C... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C... et au ministre des armées. Délibéré après l'audience du 7 octobre 2022, à laquelle siégeaient : - M. Gaspon, président de chambre, - M. Coiffet, président-assesseur, - M. Giraud, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 octobre 2022. Le rapporteur, T. B... Le président, O. GASPON Le greffier, S. PIERODE La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21NT00935
Cours administrative d'appel
Nantes
Conseil d'État, 2ème chambre, 19/10/2022, 451266, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et trois nouveaux mémoires, enregistrés les 31 mars 2021, 30 juin 2021, 4 novembre 2021, 17 décembre 2021 et 3 juin 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association " Les Oubliés de la Nation " demande au Conseil d'Etat : 1) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite du 10 février 2021 par laquelle le Premier Ministre a rejeté sa demande tendant à l'abrogation du décret n° 2016-331 du 18 mars 2016 relatif à la mention " Mort pour le service de la Nation ". 2°) d'abroger l'article R. 513-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre en tant qu'il se borne à permettre au ministre compétent d'attribuer cette mention aux militaires décédés des suites de l'acte volontaire d'un tiers et dans l'accomplissement de leurs fonctions dans des circonstances exceptionnelles ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761 1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - la loi n° 2021-1520 du 25 novembre 2021 ; - le décret n° 2022-618 du 22 avril 2022 ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Yves Doutriaux, conseiller d'Etat, - les conclusions de M. Clément Malverti, rapporteur public. La parole ayant été donnée, après les conclusions, au cabinet Munier-Apaire, avocat de l'association " Les Oubliés de la Nation " ; Considérant ce qui suit : 1. L'association " Les Oubliés de la Nation " a saisi le Premier ministre d'une demande d'abrogation du décret du 18 mars 2016 relatif à la mention " Mort pour le service de la Nation " en tant qu'il réserve aux seuls militaires et agents publics décédés des suites de l'acte volontaire d'un tiers ou du fait de l'accomplissement de leurs fonctions dans des circonstances exceptionnelles la possibilité de se voir attribuer cette mention. L'association demande l'annulation de la décision implicite par laquelle le Premier ministre a rejeté cette demande ainsi que l'abrogation de l'article R. 513-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre dans sa rédaction issue du décret du 18 mars 2016 mentionné ci-dessus. 2. Lorsque, postérieurement à l'introduction d'une requête dirigée contre un refus d'abroger des dispositions à caractère réglementaire, l'autorité qui a pris le règlement litigieux procède à son abrogation expresse ou implicite, le litige né de ce refus d'abroger perd son objet. Il en va toutefois différemment lorsque cette même autorité reprend, dans un nouveau règlement, les dispositions qu'elle abroge, sans les modifier ou en ne leur apportant que des modifications de pure forme. 3. Aux termes de l'article L. 513-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, dans sa rédaction issue de la loi du 25 novembre 2021 visant à consolider notre modèle de sécurité civile et valoriser le volontariat des sapeurs-pompiers et les sapeurs-pompiers professionnels : " Le ministre compétent peut décider que la mention " Mort pour le service de la Nation " est portée sur l'acte de décès : 1° D'un militaire tué en service ou en raison de sa qualité de militaire du fait de l'acte volontaire d'un tiers ;/2° D'un autre agent public tué en raison de ses fonctions ou de sa qualité du fait de l'acte volontaire d'un tiers. (...) " Aux termes de l'article R. 513-1 du même code, dans sa rédaction issue de l'article 1er du décret du 18 mars 2016 : " Les personnes mentionnées aux 1° et 2° de l'article L. 513-1 du présent code peuvent bénéficier de la mention " Mort pour le service de la Nation " si elles sont décédées des suites de l'acte volontaire d'un tiers. / Peut également bénéficier des dispositions du premier alinéa un militaire ou un agent public décédé du fait de l'accomplissement de ses fonctions dans des circonstances exceptionnelles. / La preuve de la cause du décès du militaire ou de l'agent public peut être rapportée par tout moyen. " 4. Il ressort des pièces du dossier que les deux premiers alinéas de l'article R. 513-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ont été supprimés par le 1° de l'article 11 du décret du 22 avril 2022 relatif à la mention " Mort pour le service de la République " et à la qualité de " pupille de la République ". L'unique alinéa de cet article dispose désormais que la preuve de la cause du décès du militaire ou de l'agent public mentionnés aux 1° et 2° de l'article L. 513-1 du même code, dispositions législatives elles-mêmes modifiées par la loi du 25 novembre 2021, peut être rapportée par tout moyen. 5. Dès lors, la requête présentée par l'association " Les Oubliés de la Nation " est devenue sans objet. 6. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par l'association " Les Oubliés de la Nation " au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.D E C I D E : -------------- Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête de l'association " Les Oubliés de la Nation ". Article 2 : Les conclusions de l'association " Les Oubliés de la Nation " présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : La présente décision sera notifiée à l'association " Les Oubliés de la Nation " et au ministre des armées. Délibéré à l'issue de la séance du 15 septembre 2022 où siégeaient : M. Nicolas Boulouis, président de chambre, présidant ; M. Jean-Yves Ollier, conseiller d'Etat et M. Yves Doutriaux, conseiller d'Etat-rapporteur. Rendu le 19 octobre 2022. Le président : Signé : M. Nicolas Boulouis Le rapporteur : Signé : M. Yves Doutriaux La secrétaire : Signé : Mme Eliane EvrardECLI:FR:CECHS:2022:451266.20221019
Conseil d'Etat
cour administrative d'appel de Toulouse, 2ème chambre, 04/06/2024, 22TL21214, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Nîmes : - sous le n° 2002381, de condamner l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Les Arcades à Sainte-Cécile-les-Vignes à lui rembourser la somme de 9 383,49 euros, assortie des intérêts au taux légal et de leur capitalisation à compter du 26 novembre 2016, de donner acte qu'elle accepte que la somme de 6 380 euros soit déduite de celle lui étant due à condition que l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Les Arcades justifie du paiement de cette somme à la caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales et de mettre à la charge de l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Les Arcades la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; - sous le n°2002383 de condamner l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Les Arcades à lui verser la somme de 98 196 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 21 février 2020 et de leur capitalisation, en réparation des préjudices qu'elle a subis et de mettre à la charge de l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Les Arcades la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n°2002381, 2002383 du 24 mars 2022, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté ses demandes ainsi que les conclusions aux fins de non-lieu de l'établissement et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 24 mai 2022, complétée par des dépôts de pièces enregistrés les 15 mars et 2 avril 2024, Mme B... A..., représentée par Me Breuillot, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement n° 2002381, 2002383 du 24 mai 2022 du tribunal administratif de Nîmes ; 2°) de condamner de condamner l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Les Arcades à lui verser la somme de 98 196 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 21 février 2020 et de leur capitalisation, en réparation des préjudices qu'elle a subis ; 3°) de condamner l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Les Arcades à lui rembourser la somme de 9 383,49 euros, assortie des intérêts au taux légal et de leur capitalisation à compter du 26 novembre 2016 ; 4°) de mettre à la charge de l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Les Arcades la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - son action n'est pas prescrite et est recevable ; En ce qui concerne la responsabilité pour faute : - l'établissement a méconnu ses obligations de sécurité et de prévention, ce qui a conduit à sa retraite pour inaptitude ; des conditions de travail trop intenses et des missions d'aide-soignante ne relevant pas de sa compétence lui ont été imposées d'octobre 2003 à janvier 2009 conduisant à son accident de service du 19 janvier 2009 ; - elle n'a pas vu de médecin du travail avant un précédent accident de travail le 5 décembre 2006, ni au moment de sa reprise ; elle avait de surcroît déjà été victime d'un accident du travail dans l'établissement privé dans lequel elle exerçait précédemment à l'issue duquel le médecin du travail l'a déclarée inapte à son poste d'agent de service ; elle n'a pas passé de visite médicale lors de son engagement ou au moment de son affectation sur un poste de nuit alors qu'elle travaillait dans l'établissement depuis plus de 8 ans ; une surveillance médicale renforcée en raison du travail de nuit aurait dû être mise en place mais ce n'est qu'à compter de 2010, postérieurement à l'accident qu'elle a pu en bénéficier ; les préconisations du médecin du travail lors de sa visite du 9 décembre 2012, qui l'a déclarée apte avec restrictions en demandant d'éviter la manipulation de personnes dans l'attente d'un avis spécialisé, n'ont pas été suivies d'effets, ni les avis des 7 février et 23 mai 2013 demandant que ses horaires de travail soient limités à 4 heures par jour dans le cadre d'un temps partiel thérapeutique ; les postes sur lesquels elle a été affectée impliquaient des ports de charge et de la manutention dont elle n'a pas été dispensée, ce qui explique la rechute de son accident du travail et la dégradation de son état de santé ; - son employeur ne lui a pas proposé de solliciter un reclassement sur un autre emploi adapté à ses capacités physiques, ni n'a essayé d'aménager son poste, alors qu'elle était reconnue travailleur handicapé, ce qui laisse présumer une discrimination prohibée par l'article 6 de la loi du 11 janvier 1984 ; - si elle n'avait pas été radiée des cadres à l'âge de 61 ans du fait de son invalidité, elle aurait pu travailler jusqu'à l'âge de 67 ans sans réduction de ses droits à pension ; le préjudice qui résulte de sa mise à la retraite forcée du fait de son inaptitude imputable au service résulte directement des manquements de l'administration à son obligation de prévention et de sécurité des agents peut être fixé à 98 186 euros pour perte de revenus ainsi qu'une indemnité au titre de ses souffrances physiques ou morales et ses préjudices esthétiques et d'agrément ; - elle n'a pas été indemnisée de l'intégralité de son préjudice résultant de l'accident de service de 2009 sur le fondement de la responsabilité pour faute ou à défaut de la responsabilité sans faute et doit être remboursée de certains soins correspondants ; En ce qui concerne la responsabilité fondée sur l'illégalité de la décision de radiation des cadres pour inaptitude : - la décision de radiation des cadres du 23 mai 2016 ne pouvait prendre un effet rétroactif au 26 novembre 2015, l'administration devait la maintenir en congé de maladie à plein traitement en raison de son arrêt de travail pour accident de service jusqu'à sa mise à la retraite ; - à supposer même qu'elle appartiendrait à la catégorie active au moment de son arrêt de travail pour accident de service et avait atteint 60 ans le 29 janvier 2015, elle n'a pas été mise à la retraite en raison de l'atteinte d'une limite d'âge mais parce que la commission de réforme la considérait définitivement inapte à reprendre ses fonctions et estimait qu'aucune mesure de reclassement n'était envisageable ; la limite d'âge prévue par l'article 1er de la loi du 18 août 1936 pour les personnels actifs de l'Etat, fixée à 60 ans pour le 4ème échelon, n'est pas applicable aux agents de la fonction publique hospitalière ; la seule limite d'âge qui puisse être appliquée aux agents de catégorie B de la fonction publique hospitalière est celle prévue pour le premier échelon de la catégorie B des agents de l'Etat ; les dispositions transitoires des articles 28 et 31 de la loi du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites, ainsi que de l'article 8 du décret du 30 décembre 2011 portant relèvement des bornes d'âge de la retraite des fonctionnaires, des militaires et des ouvriers de l'Etat, ne lui sont pas applicables ; - elle aurait pu d'ailleurs bénéficier d'un reclassement à la suite en particulier d'une formation professionnelle ; - rien ne permet d'établir qu'elle était inapte à toutes fonctions. Par un mémoire en défense enregistré le 20 novembre 2023, l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Les Arcades, représenté par le cabinet d'avocats Le Prado et Gilbert, conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 3 500 euros soit mise à la charge de Mme A... au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative. Il fait valoir que : - la demande indemnitaire de Mme A... fondée sur l'illégalité du titre exécutoire du 23 mai 2016 est irrecevable ; l'intéressée a eu connaissance du titre exécutoire émis à son encontre au plus tard le 19 janvier 2016, date à laquelle elle a à la fois formé un recours gracieux et adressé à l'établissement un chèque de 3 000 euros à titre de règlement partiel ; ce titre était devenu définitif lorsqu'elle a introduit le 13 août 2020 un recours indemnitaire fondé sur son illégalité ; - rien ne s'oppose en toute hypothèse à ce qu'une décision d'admission à la retraite ait un effet rétroactif si cela est nécessaire pour tirer les conséquences de la limite d'âge ; or Mme A... avait atteint la limite d'âge le 26 novembre 2015 ; le décret du 3 août 2007 portant statut particulier des aides-soignants ne prévoit aucune limite d'âge ; il résulte de l'arrêté du 12 novembre 1969 que les aides-soignants relèvent de la catégorie B ; les dispositions de l'article 31 de la loi du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites ne modifient pas la limite d'âge fixée à 60 ans pour les agents nés avant le 1er janvier 1956 ; - Mme A... n'avait aucun droit à être maintenue en activité au-delà de 60 ans de sorte que la non perception des revenus jusqu'à l'âge de 67 ans est sans lien avec la faute qu'elle invoque ; - l'établissement n'a pas manqué à ses obligations d'assurer la sécurité et protéger la santé physique et morale de ses agents ; le statut de Mme A... au moment où elle a commencé à exercer ses fonctions d'aide-soignante n'a joué aucun rôle dans la survenue de l'accident de service ; au moment de l'accident au mois de janvier 2009 elle était aide-soignante en voie de titularisation ; elle n'a jamais été soumise à un rythme de travail supérieur aux maxima prévus par la réglementation ; aucun lien ne peut être établi entre les congés repoussés et son accident de service ; elle a bénéficié d'un suivi étroit à compter de septembre 2007 et d'une visite médicale en 2008 ; il ne ressort pas des pièces du dossier que ses horaires n'auraient pas été respectés lors de son retour à mi-temps ; - aucune indemnisation supérieure à 34 881,56 euros, correspondant à une différence de revenus de 4 983,08 euros par an durant sept ans ne pourrait en tout état de cause être accordée. Par une ordonnance du 11 mars 2024 la clôture de l'instruction a été fixée au 3 avril 2024 à 12h. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - le code du travail ; - la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-831 du 13 septembre 1984 ; - la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ; - la loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 ; - le décret n° 85-603 du 10 juin 1985 ; - le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Céline Arquié, première conseillère, - et les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. Mme A..., agent des services hospitaliers de l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Les Arcades à Sainte-Cécile-les-Vignes (Vaucluse), a été victime, le 19 janvier 2009, d'un accident reconnu imputable au service par une décision du 30 janvier 2013 puis, le 6 novembre 2013, d'une rechute, reconnue en lien avec cet accident. Mme A..., entretemps titularisée d'abord sous le même statut, puis le 17 juillet 2010, en qualité d'aide-soignante, a alors subi une intervention chirurgicale et bénéficié d'arrêts de travail jusqu'au 23 mai 2016. Après qu'une inaptitude totale à toutes fonctions ait été constatée, la commission de réforme a rendu, le 25 mars 2015, un avis favorable à sa mise à la retraite pour invalidité. Par une décision du 23 mai 2016 prise après avis favorable de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités territoriales, l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Les Arcades a placé Mme A... à la retraite pour invalidité et l'a radiée des cadres à compter du 26 novembre 2015. Un titre exécutoire d'un montant de 9 383,49 euros a été émis le 23 mai 2016 à l'encontre de l'intéressée au motif de salaires indûment perçus du 26 novembre 2015 au 31 mai 2016. Mme A... a sollicité, le 22 juillet 2016, la remise gracieuse de cette somme, demande rejetée par décision du 22 juillet 2016. L'intéressée a demandé, le 26 novembre 2019, le remboursement de cette somme puis, par réclamation du 21 février 2020, a sollicité l'indemnisation de divers préjudices à raison des manquements aux obligations de sécurité et de prévention des risques professionnels qu'elle impute à son employeur, demande implicitement rejetée. Mme A... a demandé au tribunal administratif de Nîmes de condamner l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Les Arcades à réparer ses préjudices chiffrés à hauteur de 98 196 euros et à lui rembourser la somme de 9 383,49 euros. Par un jugement n° 2002381, 2002383 du 24 mars 2022, dont Mme A... relève appel, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté ses demandes. Sur le bien-fondé du jugement : En ce qui concerne la responsabilité pour faute : 2. Aux termes de l'article 23 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires applicable à l'espèce : " Des conditions d'hygiène et de sécurité de nature à préserver leur santé et leur intégrité physique sont assurées aux fonctionnaires durant leur travail ". Aux termes de l'article L. 4111-1 du code du travail : " (...) les dispositions de la (...) partie [relatives à la santé et à la sécurité au travail] sont applicables (...) 3° Aux établissements de santé, sociaux et médico-sociaux mentionnés à l'article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ". Aux termes de l'article L. 4121-1 de ce code : " L'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Ces mesures comprennent : 1° Des actions de prévention des risques professionnels et de la pénibilité au travail 2° Des actions d'information et de formation 3° La mise en place d'une organisation et de moyens adaptés. L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes ". Aux termes de l'article L. 4121-2 du même code : " L'employeur met en œuvre les mesures prévues à l'article L. 4121-1 sur le fondement des principes généraux de prévention suivants : 1° Eviter les risques 2° Evaluer les risques qui ne peuvent pas être évités 3° Combattre les risques à la source/ 4° Adapter le travail à l'homme, en particulier en ce qui concerne la conception des postes de travail ainsi que le choix des équipements de travail et des méthodes de travail et de production, en vue notamment de limiter le travail monotone et le travail cadencé et de réduire les effets de ceux-ci sur la santé 5° Tenir compte de l'état d'évolution de la technique 6° Remplacer ce qui est dangereux par ce qui n'est pas dangereux ou par ce qui est moins dangereux 7° Planifier la prévention en y intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique, l'organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales et l'influence des facteurs ambiants, notamment les risques liés au harcèlement moral et au harcèlement sexuel, tels qu'ils sont définis aux articles L. 1152-1 et L. 1153-1 8° Prendre des mesures de protection collective en leur donnant la priorité sur les mesures de protection individuelle 9° Donner les instructions appropriées aux travailleurs. ". 3. Il appartient aux autorités administratives, qui ont l'obligation de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et morale de leurs agents, d'assurer, sauf à commettre une faute de service, la bonne exécution des dispositions législatives et réglementaires qui ont cet objet. A ce titre, il leur incombe notamment de prendre en compte, dans les conditions prévues par les dispositions ci-dessus rappelées, les propositions d'aménagements de poste de travail ou de conditions d'exercice des fonctions justifiés par l'âge, la résistance physique ou l'état de santé des agents, que les médecins du travail sont seuls habilités à émettre. 4. Mme A... soutient qu'elle a travaillé durant de nombreuses années sur des périodes de sept nuits consécutives de 20 heures à 6 heures du matin, qu'elle a également été amenée à travailler trois nuits consécutives entre le 30 décembre 2008 et le 1er janvier 2009, puis entre le 9 janvier 2009 et le 11 janvier 2009, puis de nouveau les 14 et 15 janvier 2009 juste avant l'accident du 19 janvier 2009, que son rythme biologique aurait été bouleversé par des horaires de nuit une ou deux fois par mois et qu'elle ne pouvait se reposer durant les 4 heures de pauses méridiennes dont elle bénéficiait au regard de l'éloignement de son domicile de son lieu de travail. Toutefois, il ne résulte pas de l'instruction que le médecin du travail ait alors porté de contre-indications au travail de nuit ou de restrictions spécifiques en raison des difficultés rencontrées par l'intéressée pour prendre du repos durant ses 4 heures de pause méridienne, ni que l'établissement ait méconnu la réglementation sur le temps de travail applicable à sa situation ou qu'il ait été alerté, avant son accident, d'une situation de surmenage de nature à altérer sa sécurité ou son état de santé. A supposer par ailleurs que l'établissement ait commis des fautes en n'ayant pas organisé le suivi médical de Mme A... depuis son recrutement en qualité d'agent contractuel en 1999 alors qu'elle avait été licenciée d'un précédent emploi dans une autre maison de retraite à la suite de son inaptitude physique consécutive à un accident de travail, en n'organisant pas de visite médicale lors de sa reprise du travail en 2006 après un précédent accident du travail, il est constant qu'un suivi médical a été mis en place le 18 septembre 2007 lors du recrutement de l'intéressée en qualité d'agent des services hospitaliers stagiaire au cours duquel Mme A... a pu faire connaître ses antécédents médicaux et son état de santé. Elle a ensuite bénéficié le 28 octobre 2008 d'une visite de suivi du médecin du travail, quelques mois avant son accident du 19 janvier 2009. Le suivi médical renforcé préconisé par le médecin du travail à compter du mois de novembre 2010 a été mis en place et Mme A... a bénéficié d'une visite médicale le 4 novembre 2011, les 29 février et 9 novembre 2012, et les 7 février et 23 mai 2013. Il ne résulte pas par ailleurs de l'instruction que Mme A... n'ait pas bénéficié de l'ensemble des congés annuels auxquels elle pouvait prétendre. Dans ces conditions, il n'est pas établi que de tels manquements seraient en lien direct et certain avec l'accident de service du 19 janvier 2009. Il n'est pas non plus établi que Mme A... ait été obligée de réaliser des journées de travail supérieures aux horaires imposés lors de sa reprise à temps partiel thérapeutique au mois de janvier 2013 jusqu'au mois de mars 2013 où elle a été déclarée apte à la reprise à plein temps par le médecin du travail, ni que les restrictions médicales du mois de novembre 2012 tenant à une aide à la manipulation pour les personnes à mobilité réduite et celle du 26 mai 2013 tenant à éviter dans la mesure du possible les manipulations pénibles, n'auraient pas été respectées. L'intéressée ne donne par ailleurs aucune indication sur les conséquences qu'aurait eues sur sa santé ou sa sécurité, l'exercice des fonctions d'aide-soignante, statut qu'elle n'a obtenu que le 17 juillet 2010, plutôt que celles d'agent des services hospitaliers qualifié dont elle détenait le statut au moment de son accident de travail au mois de janvier 2009. 5. Mme A... soutient également que son employeur a méconnu son obligation de reclassement alors qu'elle a été reconnue travailleur handicapé au mois d'avril 2013 et qu'elle ne disposait pas du nombre de trimestres requis pour bénéficier d'une retraite à taux plein. Toutefois, l'intéressée, en arrêt de travail jusqu'au 4 février 2013, avait été déclarée apte à ses fonctions avec une reprise à mi-temps thérapeutique et aide pour la manipulation des personnes à mobilité réduite par avis du 7 février 2013 du médecin du travail, puis le 23 mai 2013, apte à la reprise à temps plein en évitant dans la mesure du possible les manutentions pénibles. Ainsi qu'il a été dit au point précédent, il n'est pas établi que ces aménagements n'auraient pas été respectés. Elle a de nouveau été en arrêt de travail en raison de la rechute de son accident de service à compter du 6 novembre 2013 et reconnue inapte définitivement à ses fonctions et à toutes fonctions par l'avis de la commission de réforme du 25 mars 2015 et l'expertise du 18 février 2015, de sorte qu'elle ne pouvait effectivement bénéficier d'un reclassement ou d'un aménagement de poste. Dans ces conditions, l'intéressée n'est pas fondée à soutenir que l'établissement aurait méconnu son obligation de reclassement, ni au demeurant qu'elle aurait fait l'objet d'une discrimination prohibée par l'article 6 de la loi du 11 janvier 1984. 6. Il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Les Arcades a méconnu ses obligations de sécurité et de prévention, conduisant à sa mise à la retraite pour inaptitude. Par suite, la demande de Mme A... sollicitant l'indemnisation des préjudices résultant d'un manquement à ces obligations ne peut qu'être rejetée. En ce qui concerne la mise à la retraite : 7. Aux termes du I de l'article 31 de la loi du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites : " I. ' Pour les fonctionnaires relevant de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 précitée dont la limite d'âge est inférieure à soixante-cinq ans en application des dispositions législatives et réglementaires antérieures à l'entrée en vigueur de la présente loi, la limite d'âge est fixée : / 1° A cinquante-sept ans lorsque cette limite d'âge était fixée antérieurement à cinquante-cinq ans, pour les agents nés à compter du 1er janvier 1965 ; / 2° A cinquante-neuf ans lorsque cette limite d'âge était fixée antérieurement à cinquante-sept ans, pour les agents nés à compter du 1er janvier 1963 ; / 3° A soixante ans lorsque cette limite d'âge était fixée antérieurement à cinquante-huit ans, pour les agents nés à compter du 1er janvier 1962 ; / 4° A soixante et un ans lorsque cette limite d'âge était fixée antérieurement à cinquante-neuf ans, pour les agents nés à compter du 1er janvier 1961 ; / 5° A soixante-deux ans lorsque cette limite d'âge était fixée antérieurement à soixante ans, pour les agents nés à compter du 1er janvier 1960 ; / 6° A soixante-quatre ans lorsque cette limite d'âge était fixée antérieurement à soixante-deux ans, pour les agents nés à compter du 1er janvier 1958 ". Il résulte de ces dispositions, éclairées par les travaux préparatoires dont elles sont issues, que le législateur a entendu régir l'ensemble des fonctionnaires de la catégorie B, dite " active ", par les dispositions de l'article 31. Il résulte également des mêmes travaux préparatoires que, s'agissant des agents de la fonction publique hospitalière, le législateur a entendu fixer la nouvelle limite d'âge maximale applicable aux agents occupant un emploi de catégorie B, dite " active ", à soixante-deux ans. 8. Aux termes du premier alinéa de l'article 1-3 de la loi susvisée du 13 septembre 1984 relative à la limite d'âge dans la fonction publique et le secteur public alors en vigueur : " Sous réserve des droits au recul des limites d'âge prévus par l'article 4 de la loi du 18 août 1936 concernant les mises à la retraite par ancienneté, les fonctionnaires régis par la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires appartenant à des corps ou des cadres d'emplois dont la limite d'âge est inférieure à la limite d'âge prévue au premier alinéa de l'article 1er de la présente loi sont, sur leur demande, lorsqu'ils atteignent cette limite d'âge, maintenus en activité jusqu'à un âge égal à la limite d'âge prévue au même premier alinéa, dans les conditions prévues par décret en Conseil d'Etat, sous réserve de leur aptitude physique. (...) ". 9. Le II de l'article 31 précité de la loi du 9 novembre 2010, dans sa version résultant des modifications apportées par la loi n°2011-1906 du 21 décembre 2011, et l'article 8 du décret susvisé du 30 décembre 2011 portant relèvement des bornes d'âge de la retraite des fonctionnaires, des militaires et des ouvriers de l'Etat, prévoient une application progressive du relèvement de la limite d'âge de 60 à 62 ans, pour les agents nés avant le 1er janvier 1960. Dès lors qu'en vertu de l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite, applicable aux agents titulaires de la fonction publique hospitalière, l'âge d'ouverture du droit à une pension de retraite était fixé, pour les agents de la catégorie active, à 55 ans avant l'intervention de la loi du 9 novembre 2010, cette limite d'âge reste fixée à 60 ans pour les agents nés avant le 1er juillet 1956, est fixée à 60 ans et 4 mois pour les agents nés entre le 1er juillet et le 31 décembre 1956 qui ont atteint l'âge de 55 ans entre le 1er juillet et le 31 décembre 2011, à 60 ans et 9 mois pour les agents nés en 1957 qui ont atteint l'âge de 55 ans en 2012 et à 61 ans et deux mois pour les agents nés en 1958 qui ont atteint l'âge de 55 ans en 2013. 10. Mme A... occupait un emploi relevant de la catégorie B dite " active ", de sorte que seules les dispositions de l'article 31 de la loi du 9 novembre 2010 citées ci-dessus, lesquelles doivent être regardées comme ayant fixé à soixante-deux ans la plus haute limite d'âge applicable aux agents de la fonction publique hospitalière occupant un emploi de cette catégorie, lui étaient applicables. Compte tenu des dispositions transitoires précitées, la limite d'âge applicable à Mme A..., née le 29 janvier 1955, était ainsi de soixante ans. 11. Les décisions administratives ne peuvent légalement disposer que pour l'avenir. Par suite, en l'absence de disposition législative l'y autorisant, l'administration ne peut, même lorsqu'elle est saisie d'une demande de l'intéressé en ce sens, déroger à cette règle générale et conférer un effet rétroactif à une décision d'admission à la retraite, à moins qu'il ne soit nécessaire de prendre une mesure rétroactive pour tirer les conséquences de la survenance de la limite d'âge, pour placer l'agent dans une situation régulière ou pour remédier à une illégalité. 12. Mme A... soutient qu'étant couverte par un congé de maladie ordinaire jusqu'au 23 mai 2016 en raison de son accident de service, l'établissement avait l'obligation de la maintenir dans cette position jusqu'à l'épuisement de ce congé et ne pouvait prononcer sa mise à la retraite rétroactive. Toutefois, ainsi qu'il a été dit au point 10, l'intéressée était atteinte par la limite d'âge dès le 29 janvier 2015 et reconnue inapte définitivement à toutes fonctions à la suite de l'avis de la commission de réforme du 25 mars 2015 et l'expertise du 18 février 2015. Elle ne pouvait dès lors se prévaloir des dispositions de l'article 1-3 de la loi du 13 septembre 1984 lesquelles conditionnent une prolongation de l'activité à l'intérêt du service et à l'aptitude physique. Mme A... n'apporte par ailleurs aucun élément au soutien de ses allégations selon lesquelles elle n'était pas en réalité inapte à toutes fonctions. Pour les mêmes motifs que ceux indiqués au point 5, le moyen tiré de ce qu'elle aurait pu bénéficier d'un reclassement doit être écarté. La circonstance que la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales ne se serait pas fondée sur le motif de la limite d'âge atteinte mais sur son inaptitude est sans incidence sur l'absence de caractère fautif de la décision du 23 mai 2016. Par suite, le moyen tiré de la rétroactivité illégale de la décision du 23 mai 2016 portant mise à la retraite à compter du 26 novembre 2015 doit être écarté. L'intéressée n'est donc pas fondée, en tout état de cause, à solliciter le remboursement, pour ce motif, de la somme de 9 383,49 euros correspondant aux salaires indûment perçus du 26 novembre 2015 au 31 mai 2016. En ce qui concerne l'indemnisation intégrale de l'accident de service de 2009 : 13. Mme A... persiste en appel, sans critique du jugement sur ce point, à solliciter l'indemnisation de l'intégralité de son préjudice résultant de l'accident de service de 2009. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinemment retenus par le tribunal administratif de Nîmes aux points 20 et 21 de son jugement. 14. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir, que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté ses demandes indemnitaires. Sur les frais liés au litige : 15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Les Arcades à Sainte-Cécile-les-Vignes, qui n'est pas la partie perdante à la présente instance, la somme que demande Mme A... sur ce fondement. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des mêmes dispositions au bénéfice de l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Les Arcades à Sainte-Cécile-les-Vignes. D E C I D E : Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée. Article 2 : Les conclusions de l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Les Arcades à Sainte-Cécile-les-Vignes présentées sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et à l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Les Arcades à Sainte-Cécile-les-Vignes. Délibéré après l'audience du 21 mai 2024 à laquelle siégeaient : Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre, Mme Blin, présidente assesseure, Mme Arquié, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 juin 2024. La rapporteure, C. Arquié La présidente, A. Geslan-Demaret La greffière, M-M. Maillat La République mande et ordonne à la ministre du travail, de la santé et des solidarités en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. 2 N° 22TL21214
Cours administrative d'appel
Toulouse
CAA de PARIS, 9ème chambre, 05/07/2024, 23PA02723, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 27 janvier 2021 par lequel la présidente du conseil régional d'Ile-de-France a prononcé son licenciement pour inaptitude physique à compter du 1er février 2021. Par un jugement n° 2106804 du 20 avril 2023, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête enregistrée le 19 juin 2023, Mme A..., représentée par la SELAFA Cabinet Cassel, demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris du 20 avril 2023 ; 2°) d'annuler l'arrêté du 27 janvier 2021 par lequel la présidente du conseil régional d'Ile-de-France a prononcé son licenciement pour inaptitude physique à compter du 1er février 2021 ; 3°) d'enjoindre à la présidente du conseil régional d'Ile-de-France de la réintégrer avec effet rétroactif, de saisir la caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales et de prononcer sa mise à la retraite dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ; 4°) de mettre à la charge de la région Ile-de-France la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - les juges de première instance ont entaché leur jugement d'une erreur d'appréciation et d'une dénaturation des pièces du dossier ; - l'arrêté attaqué est entaché d'erreur de fait et d'erreur de droit ; d'une part, elle disposait d'un droit à pension en application des dispositions combinées des articles 19 et 26 du décret n° 86-68 du 13 janvier 1986 et de l'article 7 du décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 ; d'autre part et conformément aux dispositions du 4° du I de l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite, elle justifie de quinze ans de service lui ouvrant droit à la liquidation immédiate de sa pension compte tenu des treize ans et huit mois de service accomplis auxquels doivent s'ajouter deux ans de bonification comme parent de deux enfants en application de l'article 11 du décret du 26 décembre 2003 ; - la liquidation de la pension pouvait être immédiate, sauf à interpréter les dispositions en vigueur du code des pensions civiles et militaires de retraite comme contraires au principe d'égalité et à l'article 6 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen en instaurant une discrimination infondée entre agents placés dans une situation identique en fonction de la date de naissance de leurs enfants. Par un mémoire en défense, enregistré le 9 avril 2024, la région Ile-de-France, représentée, par Me Pichon, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de Mme A... la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle fait valoir que les moyens soulevés par Mme A..., qui ne critiquent pas le jugement attaqué, ne sont pas fondés. Par un mémoire distinct, enregistré le 12 mars 2024, Mme A... demande à la Cour, en application de l'article 23-2 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, de transmettre au Conseil d'Etat la question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit, de l'article L. 9 du code des pensions civiles et militaires de retraite et de l'article 11 du décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003. Elle soutient que : - les critères de transmission au Conseil d'Etat de la question prioritaire de constitutionalité sont réunis ; - ces dispositions méconnaissent le principe d'égalité entre les agents placés dans une situation identique et méconnaissent l'article 6 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen en instaurant une discrimination infondée en fonction de la date de naissance de leurs enfants. Par un mémoire enregistré le 9 avril 2024, la région Ile-de-France soutient que les conditions posées par l'article 23-2 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 ne sont pas remplies, et, en particulier que si le Conseil Constitutionnel ne s'est pas déjà prononcé sur la constitutionnalité de l'article L. 9 du code des pensions civiles et militaires de retraite, il a admis, par une décision n° 2003-483 DC du 14 août 2003, celle de l'article L. 12 de ce code dans sa rédaction issue de l'article 48 de la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 portant réforme des retraites en renvoyant dans son analyse à l'article 44 de cette loi insérant à l'article L. 9 du même code les dispositions objets de la question prioritaire de constitutionnalité posée par Mme A.... Les motifs et le dispositif de cette décision font échec à la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité posée par Mme A.... Vu : - les autres pièces du dossier. Vu : - la Constitution ; - la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ; - la décision du Conseil Constitutionnel n° 2003-483 DC du 14 août 2003 ; - le code de la fonction publique ; - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 portant réforme des retraites ; - le décret n°86-68 du 13 janvier 1986 ; - le décret n°2003-1306 du 26 décembre 2003 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Lorin, - et les conclusions de M. Sibilli, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. Mme A..., rédactrice territoriale au sein de la région Ile-de-France, a été placée successivement en congé parental à compter du 3 juillet 2001, puis en disponibilité pour élever un enfant à compter du 16 janvier 2004 et en disponibilité pour convenance personnelle à compter du 16 janvier 2009. Le 18 décembre 2015, dans le cadre d'un entretien professionnel organisé à la suite de sa demande de réintégration, elle a été victime d'une hémorragie cérébrale. Par un arrêté du 24 février 2016, elle a été maintenue à sa demande en disponibilité pour convenance personnelle à compter du 15 mars 2016. Après avoir sollicité le réexamen de sa situation administrative, Mme A... a été convoquée à une expertise médicale réalisée le 22 février 2017. Aux termes de son rapport, l'expert a conclu à l'inaptitude de Mme A... à ses fonctions et à toutes fonctions de façon totale et définitive et a retenu un taux d'incapacité permanente partielle de 35%. Par un courrier du 20 juin 2017, elle a sollicité sa mise à la retraire pour invalidité et a été placée, dans l'attente des séances du comité médical et de la commission de réforme, en disponibilité d'office pour raison de santé au cours de la période du 15 septembre 2017 au 14 juin 2018 par un arrêté du 21 septembre 2017, prolongée jusqu'au 31 juillet 2018 par arrêté du 27 juin 2018. Le comité médical s'est prononcé, le 17 octobre 2017, en faveur de l'inaptitude absolue et définitive à toutes fonctions de Mme A... et à sa mise en disponibilité d'office jusqu'à son admission à la retraite pour invalidité. La commission de réforme a émis, le 21 novembre 2017, un avis défavorable à sa mise à la retraite pour invalidité et à la liquidation immédiate de sa pension de retraite. Par un arrêté du 12 juillet 2018, la présidente du conseil régional d'Ile-de-France a procédé au licenciement pour inaptitude physique de Mme A.... Par un jugement du 9 juillet 2020, le tribunal administratif de Paris a annulé cette décision. Dans le cadre de l'exécution de ce jugement, Mme A... a été réintégrée juridiquement dans les effectifs de la région Ile-de-France et maintenue en disponibilité d'office pour raison de santé par deux arrêtés du 3 septembre 2020. A la suite d'un entretien préalable qui s'est tenu le 5 octobre 2020, la présidente du conseil régional d'Ile-de-France a procédé à son licenciement pour inaptitude physique par un arrêté du 27 janvier 2021. Par la présente requête, Mme A... relève régulièrement appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté. Sur les conclusions à fin d'annulation : En ce qui concerne la question prioritaire de constitutionnalité : 2. Aux termes de l'article 61-1 de la Constitution : " Lorsque, à l'occasion d'une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d'État ou de la Cour de cassation qui se prononce dans un délai déterminé. Une loi organique détermine les conditions d'application du présent article ". 3. Aux termes de l'article 23-1 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, modifiée par la loi organique du 10 décembre 2009 relative à l'application de l'article 61-1 de la Constitution : " Devant les juridictions relevant du Conseil d'État (...), le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution est, à peine d'irrecevabilité, présenté dans un écrit distinct et motivé. Un tel moyen peut être soulevé pour la première fois en cause d'appel. Il ne peut être relevé d'office ". Aux termes de l'article 23-2 de la même ordonnance : " La juridiction statue sans délai par une décision motivée sur la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil d'État ou à la Cour de cassation. Il est procédé à cette transmission si les conditions suivantes sont remplies : / 1° La disposition contestée est applicable au litige ou à la procédure, ou constitue le fondement des poursuites ; / 2° Elle n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances ; / 3° La question n'est pas dépourvue de caractère sérieux ". 4. Aux termes de l'article L. 9 du code des pensions civiles et militaires de retraite dans sa rédaction issue de l'article 44 de la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 portant réforme des retraites : " Le temps passé dans une position statutaire ne comportant pas l'accomplissement de services effectifs au sens de l'article L. 5 ne peut entrer en compte dans la constitution du droit à pension, sauf : / 1° Dans la limite de trois ans par enfant légitime, naturel ou adoptif, né ou adopté à partir du 1er janvier 2004, sous réserve que le titulaire de la pension ait bénéficié : / a) D'un temps partiel de droit pour élever un enfant ; / b) D'un congé parental ; / c) D'un congé de présence parentale ; / d) Ou d'une disponibilité pour élever un enfant de moins de huit ans (...) ". Aux termes de l'article 11 du décret du 26 décembre 2003 dans sa version applicable au litige : " Le temps passé dans une position statutaire ne comportant pas l'accomplissement de services effectifs au sens de l'article 8 ne peut entrer en compte dans la constitution du droit à pension, sauf dans les cas suivants : / 1° Dans la limite de trois ans par enfant légitime, naturel ou adoptif, né ou adopté à partir du 1er janvier 2004, sous réserve que le titulaire de la pension ait bénéficié en application des dispositions des articles 60 bis, 75 et 75 bis de la loi du 26 janvier 1984 susvisée, du b de l'article 24 du décret du 13 janvier 1986 susvisé, du 11° de l'article 41 et des articles 46-1 et 64 de la loi du 9 janvier 1986 susvisée et du b de l'article 34 du décret du 13 octobre 1988 susvisé : / a) D'un temps partiel de droit pour élever un enfant ; / b) D'un congé parental ; / c) D'un congé de présence parentale ; / d) Ou d'une disponibilité pour élever un enfant de moins de huit ans. / Les modalités de prise en compte de ces périodes d'interruption ou de réduction d'activité sont réglées conformément aux dispositions applicables aux fonctionnaires de l'Etat relevant du code des pensions civiles et militaires de retraite. / 2° Dans les cas exceptionnels prévus par la loi ou un décret en Conseil d'Etat. Hormis pour les positions prévues à l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 susvisée, aux articles 57 et 64 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée et aux articles 41 et 51 de la loi du 9 janvier 1986 susvisée, le temps passé dans une position ne comportant pas l'accomplissement de services effectifs n'est compté comme service effectif que dans la limite de cinq années et sous réserve que les bénéficiaires fassent l'objet pendant ce temps, sur la base de leur dernier traitement d'activité, des retenues prescrites par le présent décret. " 5. Mme A... soutient que ces dispositions méconnaissent le principe d'égalité entre agents placés dans une situation identique et méconnaissent l'article 6 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen en instaurant une discrimination infondée en fonction de la date de naissance de leurs enfants. 6. D'une part, l'article 11 du décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003, s'il a été pris pour l'application de l'article L. 9 du code des pensions civiles et militaires de retraite, est par lui-même réglementaire. Il n'est donc pas au nombre des dispositions dont le Conseil constitutionnel peut contrôler la conformité à la Constitution en application de l'article 23-1 de l'ordonnance du 7 novembre 1958. D'autre part, si l'arrêté attaqué du 27 janvier 2021 par lequel la présidente du conseil régional d'Ile-de-France a prononcé le licenciement de Mme A... pour inaptitude physique à compter du 1er février 2021, n'a pas été pris sur le fondement des dispositions de l'article L. 9 du code des pensions civiles et militaires de retraite dont la conformité à la Constitution est contestée, elles ne sont toutefois pas dépourvues de lien avec les termes du litige dans la mesure où l'intéressée en revendique le bénéfice dans la constitution de son droit à pension en faisant valoir les années au titre desquelles elle a été placée en congé parental et en disponibilité pour élever un enfant et la rupture d'égalité entre agents qui serait constituée par la prise en compte à ce titre de l'année de naissance de leurs enfants. Toutefois, par la décision n° 2003-483 DC du 14 août 2003, visée ci-dessus, le Conseil Constitutionnel a déclaré conformes à la Constitution les dispositions de l'article L. 12 du code des pensions civiles et militaires de retraite dans sa rédaction issue de l'article 48 de la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 portant réforme des retraites. Ces dispositions reprennent, au titre de la liquidation de la pension, des dispositions relatives aux bonifications s'ajoutant aux années de services effectifs, au titre desquelles figure celle de l'interruption de l'activité professionnelle d'un agent pour élever ses enfants nés antérieurement au 1er janvier 2004. Le Conseil renvoie dans son analyse à l'article 44 de la loi du 21 août 2003 insérant à l'article L. 9 du même code les dispositions objets de la question prioritaire de constitutionnalité posée par Mme A.... Il ressort du considérant 33 de cette décision que le Conseil Constitutionnel a retenu, s'agissant de la différence de traitement entre les fonctionnaires selon que leurs enfants sont nés ou adoptés avant ou après le 1er janvier 2004, que les dates prévues par le législateur reposent sur des critères objectifs et rationnels et qu'au demeurant, les différences de traitement dénoncées, de caractère provisoire et inhérentes à la succession de régimes juridiques dans le temps, ne sont pas contraires au principe d'égalité. Il résulte ainsi de ce qui vient d'être exposé, qu'en l'absence de circonstance de droit nouvelle, la question prioritaire de constitutionnalité invoquée par Mme A... est dépourvue de caractère sérieux. Il n'y a pas lieu, par suite, de la transmettre au Conseil d'Etat. En ce qui concerne les autres moyens de la requête : 7. En premier lieu, hormis le cas où le juge de première instance a méconnu les règles de compétence, de forme ou de procédure qui s'imposaient à lui et a ainsi entaché son jugement d'une irrégularité, il appartient au juge d'appel, non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels le juge de première instance s'est prononcé sur les moyens qui lui étaient soumis, mais de se prononcer directement sur les moyens dirigés contre la décision administrative contestée dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. Par suite, Mme A... ne peut utilement soutenir que les juges de première instance auraient entaché leur jugement d'une erreur d'appréciation et d'une dénaturation des pièces du dossier. 8. En deuxième lieu, d'une part, aux termes de l'article 19 du décret du 13 janvier 1986 : " La mise en disponibilité peut être prononcée d'office à l'expiration des droits statutaires à congés de maladie prévus au premier alinéa du 2°, au premier alinéa du 3° et au 4° de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 et s'il ne peut, dans l'immédiat, être procédé au reclassement du fonctionnaire dans les conditions prévues aux articles 81 à 86 de la loi du 26 janvier 1984. / La durée de la disponibilité prononcée en vertu du premier alinéa du présent article ne peut excéder une année. Elle peut être renouvelée deux fois pour une durée égale. Si le fonctionnaire n'a pu, durant cette période, bénéficier d'un reclassement, il est, à l'expiration de cette durée, soit réintégré dans son administration s'il est physiquement apte à reprendre ses fonctions dans les conditions prévues à l'article 26, soit, en cas d'inaptitude définitive à l'exercice des fonctions, admis à la retraite ou, s'il n'a pas droit à pension, licencié. (...) ". Aux termes de l'article 26 de ce décret dans sa version applicable au litige : " (...) Le fonctionnaire qui, à l'issue de sa disponibilité ou avant cette date, s'il sollicite sa réintégration anticipée, ne peut être réintégré pour cause d'inaptitude physique est soit reclassé dans les conditions prévues par la réglementation en vigueur, soit mis en disponibilité d'office dans les conditions prévues à l'article 19, soit, en cas d'inaptitude physique à l'exercice des fonctions, admis à la retraite ou, s'il n'a pas droit à pension, licencié ". 9. D'autre part, aux termes de l'article 7 du décret n°2003-1306 du 26 décembre 2003 : " Le droit à pension est acquis : / (...) / 2° Sans condition de durée de services aux fonctionnaires rayés des cadres pour invalidité résultant ou non de l'exercice des fonctions. ". Aux termes de l'article 30 de ce décret : " Le fonctionnaire qui se trouve dans l'impossibilité définitive et absolue de continuer ses fonctions par suite de maladie, blessure ou infirmité grave dûment établie peut être admis à la retraite soit d'office, soit sur demande ". Aux termes de l'article 39 du même décret : " Le fonctionnaire qui se trouve dans l'incapacité permanente de continuer ses fonctions en raison d'une invalidité ne résultant pas du service peut être mis à la retraite par anticipation soit sur demande, soit d'office dans les délais prévus au troisième alinéa de l'article 30. L'intéressé a droit à la pension rémunérant les services prévus au 2° de l'article 7 et au 2° du I de l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite sous réserve que ses blessures ou maladies aient été contractées ou aggravées au cours d'une période durant laquelle il acquérait des droits à pension ". 10. Il résulte des dispositions citées au point précédent que le droit à pension acquis par des fonctionnaires relevant du régime de retraite anticipé prévu à l'article 39 précité du décret du 26 décembre 2003 est réservé aux situations dans lesquelles les blessures ou maladies ont été contractées ou aggravées au cours d'une période durant laquelle l'agent a acquis des droits à pension. En l'espèce, il est constant que l'accident à l'origine de l'inaptitude totale et définitive de Mme A... à l'exercice de toutes fonctions est intervenu le 18 décembre 2015 au cours d'une période de disponibilité pour convenance personnelle qui lui avait été accordée à sa demande. Or, aux termes de l'article 72 de la loi n°84-53 du 26 janvier 1984, " la disponibilité est la position du fonctionnaire qui, placé hors de son administration ou service d'origine, cesse de bénéficier, dans cette position, de ses droits à l'avancement et à la retraite ". Par suite et alors qu'il n'est pas établi, ni même allégué par l'intéressée que son état de santé à l'origine de son inaptitude résulte d'une blessure ou maladie contractée au cours d'une période durant laquelle elle acquérait des droits à pension susceptibles de lui ouvrir droit au bénéfice d'une retraite anticipée pour invalidité, les moyens tirés de l'erreur de fait ou de droit au regard des dispositions des articles 19 et 26 du décret n°86-68 du 13 janvier 1986 et de l'article 7 du décret n°2003-1306 du 26 décembre 2003, doivent être écartés. 11. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 5 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " Les services pris en compte dans la constitution du droit à pension sont : / 1° Les services accomplis par les fonctionnaires titulaires et stagiaires mentionnés à l'article 2 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 précitée (...) ". Aux termes de l'article L. 9 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : " Le temps passé dans une position statutaire ne comportant pas l'accomplissement de services effectifs au sens de l'article L. 5 ne peut entrer en compte dans la constitution du droit à pension, sauf : / 1° Dans la limite de trois ans par enfant né ou adopté à partir du 1er janvier 2004, sous réserve que le titulaire de la pension ait bénéficié : / (...) / b) D'un congé parental ; / (...) / d) D'une disponibilité pour élever un enfant de moins de huit ans ou d'un congé pour convenances personnelles pour élever un enfant de moins de huit ans ". Aux termes de l'article L. 11 du même code : " Les services pris en compte dans la liquidation de la pension sont : / 1° Pour les fonctionnaires civils, les services énumérés à l'article L. 5 (...) ". Aux termes de l'article L. 12 du même code : " Aux services effectifs s'ajoutent, dans les conditions déterminées par un décret en Conseil d'Etat, les bonifications ci-après : (...) / b) Pour chacun de leurs enfants légitimes et de leurs enfants naturels nés antérieurement au 1er janvier 2004, pour chacun de leurs enfants dont l'adoption est antérieure au 1er janvier 2004 et, sous réserve qu'ils aient été élevés pendant neuf ans au moins avant leur vingt et unième anniversaire, pour chacun des autres enfants énumérés au II de l'article L. 18 dont la prise en charge a débuté antérieurement au 1er janvier 2004, les fonctionnaires et militaires bénéficient d'une bonification fixée à un an, qui s'ajoute aux services effectifs, à condition qu'ils aient interrompu ou réduit leur activité dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. " Aux termes de l'article L. 24 du même code : " I. - La liquidation de la pension intervient : (...) 4° Lorsque le fonctionnaire ou son conjoint est atteint d'une infirmité ou d'une maladie incurable le plaçant dans l'impossibilité d'exercer une quelconque profession, dans les conditions prévues à l'article L. 31 et sous réserve que le fonctionnaire ait accompli au moins quinze ans de services ; ". 12. Contrairement à ce que soutient Mme A..., les bonifications auxquelles les fonctionnaires peuvent, le cas échéant, prétendre au titre de la liquidation de leur pension lorsqu'elle intervient dans les conditions prévues aux dispositions du 4° du I de l'article 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite, s'ajoutent aux années de services effectifs qu'ils ont accomplis ainsi qu'il résulte des termes mêmes de l'article L. 12 de ce code mais ne substituent pas à elles. A ce titre, la bonification d'un an par enfant, accordée aux femmes ayant interrompu leur activité, a uniquement pour effet d'apporter une compensation partielle et forfaitaire des retards et préjudices de carrière manifestes qui les ont pénalisés en majorant la liquidation de leur pension. Si cette bonification peut ainsi être assimilée à une rémunération différée, elle n'entre pas, en revanche, en considération dans la constitution du droit à pension, laquelle suppose la réalisation de services effectifs dans les conditions prévues à l'article L. 9 précité de ce code. Par suite, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que les années au cours desquelles elle a été placée en congé parental ou en disponibilité pour élever un enfant devait en l'espèce entrer dans la constitution de ses droits à pension et qu'en conséquence, la décision en litige serait entachée d'une erreur de fait ou de droit. 13. En dernier lieu, si Mme A... soutient que les dispositions législatives précitées du code des pensions civiles et militaires de retraite introduisent une discrimination contraire au principe d'égalité, il résulte du point 6 du présent arrêt, d'une part, que la question prioritaire de constitutionnalité présentée par un mémoire distinct a fait l'objet d'un refus de transmission et, d'autre part, que le Conseil Constitutionnel s'est prononcé, par la décision n° 2003-483 DC du 14 août 2003, sur la conformité à la Constitution des dispositions de l'article L. 12 du code des pensions civiles et militaires de retraite dans sa rédaction issue de la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 en retenant que le principe d'égalité n'était en l'espèce pas méconnu. Il n'appartient pas au juge administratif de se prononcer, dans un cadre autre que celui d'une question prioritaire de constitutionnalité, sur la conformité d'une disposition législative à une norme à valeur constitutionnelle. Par suite, le moyen ne peut qu'être écarté. 14. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement contesté, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision par laquelle la présidente du conseil régional d'Ile-de-France a prononcé son licenciement pour inaptitude physique à compter du 1er février 2021. Par voie de conséquence, sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions, y compris celles tenant aux frais liés à l'instance. Par ailleurs, dans les circonstances de l'espèce, il n'y pas lieu de faire droit à la demande présentée par la région Ile-de-France sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DECIDE : Article 1er : Il n'y a pas lieu de transmettre au Conseil d'Etat la question prioritaire de constitutionalité soulevée par Mme A.... Article 2 : La requête de Mme A... est rejetée. Article 3 : Les conclusions présentées par la région Ile-de-France sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et à la présidente du conseil régional d'Ile-de-France. Délibéré après l'audience du 21 juin 2024, à laquelle siégeaient : - M. Carrère, président, - M. Soyez, président assesseur, - Mme Lorin, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour, le 5 juillet 2024. La rapporteure, C. LORIN Le président, S. CARRERE La greffière, E. LUCE La République mande et ordonne au préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 23PA02723
Cours administrative d'appel
Paris
CAA de PARIS, 6ème chambre, 11/06/2024, 23PA02293, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Paris de condamner la société La Poste à lui verser la somme de 26 000 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 10 février 2020 et de la capitalisation de ces intérêts, en réparation des préjudices financier et moral qu'il estime avoir subis à raison de la faute commise par cette société en le plaçant en congé de longue maladie et de longue durée sans reconnaissance de l'imputabilité au service de sa maladie. Par une ordonnance n° 2020415 du 4 février 2021, le président du tribunal administratif de Paris a transmis au tribunal administratif de Montreuil, en application des dispositions de l'article R. 351-3 du code de justice administrative, la demande de M. B.... Par un jugement n° 2101881 du 28 mars 2023, le tribunal administratif de Montreuil a condamné La Poste à verser à M. B..., d'une part, une indemnité, dans la limite de la somme qu'il demande, correspondant à la différence entre le plein traitement dû et le demi-traitement qu'il a effectivement perçu entre les mois de novembre 2018 et novembre 2019, d'autre part, une somme de 1 000 euros en réparation du préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence subis, sommes assorties des intérêts au taux légal à compter du 27 juillet 2020 et de la capitalisation de ces intérêts, et a mis à la charge de cette société le versement de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Procédure devant la Cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés le 23 mai 2023 et le 22 septembre 2023, la société La Poste, représentée par Me Pouillaude, demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) de rejeter la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Montreuil ; 3°) de mettre à la charge de M. B... une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - en se limitant à affirmer que, " dans les circonstances de l'espèce ", en ne plaçant pas M. B... en congé d'invalidité temporaire imputable au service, La Poste a commis une faute de nature à engager sa responsabilité, sans davantage expliciter ce point, les premiers juges ont insuffisamment motivé leur jugement, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 9 du code de justice administrative ; - M. B... n'ayant pas déposé de demande tendant à ce que sa maladie soit reconnue comme ayant été contractée dans l'exercice de ses fonctions dans les quatre ans suivant sa première reconnaissance médicale, il n'entrait pas dans le champ d'application des 3° et 4° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 permettant au fonctionnaire en cas de placement en congé de longue durée pour une maladie imputable au service de percevoir un plein traitement pendant cinq ans à compter de son placement en congé de longue maladie ; - elle n'a ainsi commis aucune illégalité fautive de nature à engager sa responsabilité en ne versant pas à M. B... un plein traitement entre les mois de novembre 2018 et 2019 ; - en tout état de cause, M. B... n'établit pas la réalité des préjudices dont il demande à être indemnisé ; - il ne précise pas les modalités de calcul de la somme réclamée au titre de sa perte de rémunération ; - il n'établit la réalité ni du préjudice moral subi, ni des troubles dans les conditions d'existence rencontrés. Par un mémoire en défense, enregistré le 6 août 2023, M. B..., représenté par Me Diani, conclut : 1°) au rejet de la requête de la société La Poste ; 2°) à ce que soit mise à la charge de cette société une somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - l'accident dont il a été victime est imputable au service ; - aucun élément du dossier ne permet de démontrer que le stress post-traumatique dont il souffre serait dû à une cause autre que cet accident de service ; - il était par suite en droit de bénéficier d'un congé de longue durée pour une maladie imputable au service et ainsi du versement d'un plein traitement pendant cinq années à compter de son placement en congé de longue maladie ; - la société La Poste a donc commis une illégalité fautive en ne lui versant pas un plein traitement entre le mois de novembre 2018 et la reprise de ses fonctions en novembre 2019 ; - cette faute lui a causé un préjudice matériel, résultant d'une perte de rémunération, s'élevant à la somme de 16 000 euros ; - cette faute lui a causé un préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence s'élevant à la somme totale de 10 000 euros. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 ; - le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme d'Argenlieu, - les conclusions de Mme Naudin, rapporteure publique, - les observations de Me Roux, pour la société La Poste. Vu la note en délibéré, enregistrée le 23 mai 2024, présentée pour la société La Poste. Considérant ce qui suit : 1. M. B..., agent de La Poste depuis le mois de mars 1983, a été, le 7 mai 2014, victime d'une agression dans le bureau de poste de la commune du Pré-Saint-Gervais, dont il était alors le responsable. Après avoir été placé en congé de maladie ordinaire, l'intéressé a été placé en congé de longue maladie à plein traitement du 11 novembre 2015 au 10 novembre 2016, puis en congé de longue durée à compter du 11 novembre 2016, à plein traitement jusqu'au 10 novembre 2018, puis à demi-traitement. M. B... a repris son service en novembre 2019 jusqu'en février 2020, date à laquelle il a été placé, à l'initiative de La Poste, en congé d'invalidité temporaire imputable au service (CITIS). Le 10 février 2020, l'intéressé a sollicité de son employeur la requalification, à titre rétroactif, de son congé de longue durée en CITIS. La Poste, par un courrier électronique du 19 février 2020, a refusé de faire droit à cette demande. Par une lettre du 27 juillet 2020, M. B... a adressé à La Poste une demande préalable tendant à ce qu'elle l'indemnise des préjudices matériel et moral résultant de l'illégalité fautive qu'elle a commise en ne le plaçant pas en congé de longue durée pour maladie imputable au service, le privant ainsi du versement d'un plein traitement entre les mois de novembre 2018 et novembre 2019. La Poste n'a pas répondu à cette demande. M. B... a donc saisi le tribunal administratif de Montreuil dans les mêmes termes que sa demande indemnitaire préalable. Par un jugement, dont La Poste relève appel, le tribunal a partiellement fait droit à la demande de l'intéressé en condamnant cette société à lui verser, d'une part, une indemnité, dans la limite de la somme qu'il demande, correspondant à la différence entre le plein traitement dû et le demi-traitement qu'il a effectivement perçu entre les mois de novembre 2018 et novembre 2019, d'autre part, une somme de 1 000 euros en réparation du préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence subis, sommes assorties des intérêts au taux légal à compter du 27 juillet 2020 et de la capitalisation de ces intérêts. Sur la responsabilité de La Poste : 2. Aux termes du premier alinéa de l'article 29 de la loi du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et à France Télécom : " Les personnels de La Poste et de France Télécom sont régis par des statuts particuliers, pris en application de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires et de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, qui comportent des dispositions spécifiques dans les conditions prévues aux alinéas ci-après, ainsi qu'à l'article 29-1. " Aux termes de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, dans sa version applicable au litige : " Le fonctionnaire en activité a droit : / (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants (...). Le bénéfice de ces dispositions est subordonné à la transmission par le fonctionnaire, à son administration, de l'avis d'arrêt de travail justifiant du bien-fondé du congé de maladie, dans un délai et selon les sanctions prévues en application de l'article 35. / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident ; / 3° A des congés de longue maladie d'une durée maximale de trois ans dans les cas où il est constaté que la maladie met l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, rend nécessaire un traitement et des soins prolongés et qu'elle présente un caractère invalidant et de gravité confirmée. Le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement pendant un an ; le traitement est réduit de moitié pendant les deux années qui suivent. L'intéressé conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. Les dispositions du deuxième alinéa du 2° du présent article sont applicables au congé de longue maladie (...). / 4° A un congé de longue durée, en cas de tuberculose, maladie mentale, affection cancéreuse, poliomyélite ou déficit immunitaire grave et acquis, de trois ans à plein traitement et de deux ans à demi-traitement. Le fonctionnaire conserve ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. / Si la maladie ouvrant droit à congé de longue durée a été contractée dans l'exercice des fonctions, les périodes fixées ci-dessus sont respectivement portées à cinq ans et trois ans. / Sauf dans le cas où le fonctionnaire ne peut être placé en congé de longue maladie à plein traitement, le congé de longue durée n'est attribué qu'à l'issue de la période rémunérée à plein traitement d'un congé de longue maladie. Cette période est réputée être une période du congé de longue durée accordé pour la même affection. ". Aux termes de l'article 32 du décret du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission à des emplois publics et au régime de congés maladie des fonctionnaires, dans sa version applicable au litige : " Lorsque le congé de longue durée est demandé pour une maladie contractée dans l'exercice des fonctions, le dossier est soumis à la commission de réforme. Ce dossier doit comprendre un rapport écrit du médecin chargé de la prévention attaché au service auquel appartient le fonctionnaire concerné. La demande tendant à ce que la maladie soit reconnue comme ayant été contractée dans l'exercice des fonctions doit être présentée dans les quatre ans qui suivent la date de la première constatation médicale de la maladie (...). " 3. Il résulte de ces dispositions que lorsqu'un congé de longue durée est accordé pour la même affection que celle ayant donné lieu à l'attribution d'un congé de longue maladie, la période de trois ans durant laquelle le fonctionnaire placé en congé de longue durée a droit au maintien de son plein traitement est réputée courir à compter de la date à laquelle il a été placé en congé de longue maladie avec le bénéfice de son plein traitement. Cette période de trois ans est portée à cinq ans, uniquement dans le cas où le congé de longue durée est accordé pour une maladie contractée dans le cadre de l'exercice des fonctions. Or, pour bénéficier d'un congé de longue durée pour une maladie contractée dans le cadre de l'exercice des fonctions, l'agent doit avoir adressé à son employeur, dans les quatre ans qui suivent la date de la première constatation médicale de cette maladie, une demande de reconnaissance de son imputabilité au service. 4. Pour engager la responsabilité de La Poste, le tribunal administratif a relevé qu'à la suite de l'agression dont il a été victime le 7 mai 2014, constatée par un certificat médical établi le 9 mai 2014 sur réquisition d'un officier de police judiciaire, M. B... avait présenté une feuille d'accident de service complétée par son employeur ainsi que des certificats médicaux d'accident de travail pour " stress post-traumatique " dont les séquelles ont été considérées comme consolidées à compter du 22 septembre 2015 par les médecins de prévention consultés par la société La Poste. Il a également relevé que l'intéressé avait été placé par son employeur en congé de longue maladie à compter du 11 novembre 2015 et en congé de longue durée à partir de novembre 2016, " sans qu'il ne ressorte d'aucun document administratif ou médical que l'imputabilité au service de sa pathologie, précédemment déclarée, ait été de nouveau examinée ou qu'une évolution de l'état de santé de l'intéressé ait été de nature à la remettre en cause ". Les premiers juges ont ensuite relevé que M. B... avait obtenu l'octroi d'un congé d'invalidité temporaire imputable au service (CITIS) à compter du 1er février 2020 et que, saisie d'une demande de placement en retraite pour invalidité imputable au service, la commission de réforme s'était fondée sur une expertise médicale du 18 mars 2020 constatant une aggravation des séquelles de l'accident du 7 mai 2014 et évaluant le taux d'invalidité à 30 % imputable au service pour syndrome dépressif post-traumatique. Ils ont, enfin, considéré que, " dans ces conditions particulières ", en ne versant qu'un demi-traitement à M. B... entre novembre 2018 et novembre 2019, La Poste, qui, eu égard à ces circonstances de fait, ne pouvait sérieusement opposer l'absence de demande de l'intéressé tendant à reconnaître l'imputabilité au service de son syndrome dépressif à la suite de l'agression qu'il avait subie pendant son service, avait commis une faute à son égard. 5. Cependant, si M. B... a bien déclaré en 2014, auprès de La Poste, l'accident de service dont il a été victime au mois de mai 2014, il ne résulte d'aucun élément de l'instruction que l'intéressé aurait adressé à son employeur une demande tendant à ce que sa pathologie soit reconnue imputable au service, notamment lors de son placement en congé de maladie ordinaire au cours de l'année 2014 ou de son placement en congé de longue maladie en 2015 ou en congé de longue durée en 2016 ou encore au cours de ces différents congés. Par suite, en l'absence de demande, il ne saurait être reproché à La Poste de n'avoir pas pris de décision reconnaissant une telle imputabilité. Par ailleurs, la seule circonstance que l'intéressé ait été placé, après une période de reprise d'activité à la fin de l'année 2019, en CITIS, à l'initiative de La Poste, à compter du 10 février 2020, puis admis à faire valoir ses droits à la retraite, en bénéficiant d'une rente viagère d'invalidité imputable au service, à raison d'une rechute de son syndrome dépressif, ne saurait être de nature à régulariser a posteriori l'absence de toute démarche de la part de M. B..., entre 2014 et 2019, tendant à ce que sa maladie soit reconnue imputable au service. 6. Il en résulte, d'une part, qu'en l'absence de toute démarche en ce sens et a fortiori de toute décision reconnaissant son syndrome dépressif comme ayant été contracté dans l'exercice de ses fonctions, M. B... n'entrait pas dans le champ d'application des dispositions précitées du 2° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 et ne pouvait donc prétendre au bénéfice du droit à conserver l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à mise à la retraite. D'autre part, il ne pouvait, pour le même motif, qu'être placé en congé de longue durée non imputable au service, ce dont l'intéressé avait du reste été informé par sa hiérarchie au mois de février 2017, sans qu'il ne s'y oppose. Enfin, l'intéressé ayant été placé en congé de longue maladie à compter du 11 novembre 2015, puis en congé de longue durée pour la même pathologie, il résulte de ce qui a été exposé au point 3 qu'il ne pouvait bénéficier d'un plein traitement que pendant une durée de trois ans à compter de son placement en congé de longue maladie, soit jusqu'au 11 novembre 2018. Il suit de là que La Poste, contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, n'a commis aucune illégalité fautive en cessant de verser à M. B... un plein traitement à compter de cette date, pour ne lui verser qu'un demi-traitement jusqu'à la reprise de ses fonctions, au mois de novembre 2019. Dès lors, La Poste n'ayant commis aucune illégalité fautive, sa responsabilité ne peut être engagée. 7. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner le moyen de régularité soulevé à l'encontre du jugement attaqué, ni la recevabilité de la demande de première instance, La Poste est fondée à soutenir que, c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif l'a condamnée à verser à M. B... une indemnité en réparation des préjudices qu'il aurait subis du fait de son placement en congé de longue durée à demi-traitement entre les mois de novembre 2018 et novembre 2019. Sur les frais liés à l'instance : 8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de La Poste, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que M. B... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... le versement de la somme que La Poste demande sur le même fondement. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement n° 2101881 du 28 mars 2023 du tribunal administratif de Montreuil est annulé. Article 2 : La demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Montreuil et ses conclusions d'appel sont rejetées. Article 3 : Les conclusions présentées par La Poste sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à la société anonyme La Poste. Délibéré après l'audience du 21 mai 2024, à laquelle siégeaient : - M. d'Haëm, président, - M. Pagès, premier conseiller, - Mme d'Argenlieu, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 11 juin 2024. La rapporteure, L. d'ARGENLIEULe président, R. d'HAËMLa greffière, Z. SAADAOUI La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 23PA02293
Cours administrative d'appel
Paris