Jurisprudence
La jurisprudence est l'ensemble des décisions rendues par les juridictions administratives, pendant une certaine période dans une matière, dans une branche ou dans l'ensemble du droit.
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CAA de DOUAI, 3ème chambre, 05/03/2025, 23DA00109, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Par une requête enregistrée sous le n° 2002528, M. A... B... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler les arrêtés des 17 juillet et 7 octobre 2020 par lesquels le maire de la commune de Pont-de-Metz, d'une part, a refusé de reconnaître l'imputabilité au service des évènements survenus le 23 mai 2018 et le 18 juillet 2018 et, d'autre part, l'a placé en disponibilité d'office à l'expiration de ses droits à congés de maladie. Il a également demandé au tribunal d'enjoindre à la commune de Pont-de-Metz de le rétablir dans ses droits statutaires dans un délai d'un mois à compter du jugement, sous astreinte. Par une requête enregistrée sous le n° 2003511, M. B... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler l'arrêté n° 2020-183 du 20 octobre 2020 par lequel le maire de la commune de Pont-de-Metz l'a placé en congé de longue durée à plein traitement du 19 juillet 2018 au 18 juillet 2021, d'annuler l'arrêté n° 2020-184 du 20 octobre 2020 par lequel le maire de la commune de Pont-de-Metz a suspendu le versement de sa nouvelle bonification indiciaire à compter du 1er octobre 2020 et, enfin, d'annuler l'arrêté n° 2020-185 du 20 octobre 2020 par lequel le maire de la commune de Pont-de-Metz a suspendu le versement de son indemnité de fonctions, sujétions et expertise à compter du 1er octobre 2020. Il a également demandé au tribunal d'enjoindre à la commune de Pont-de-Metz de le rétablir dans ses droits statutaires dans un délai d'un mois à compter du jugement. Par un jugement n° 2002528 et 2003511 du 28 novembre 2022, le tribunal administratif d'Amiens a annulé les arrêtés des 17 juillet 2020 et 7 octobre 2020 en tant qu'ils ne reconnaissent pas l'imputabilité au service de l'accident survenu le 23 mai 2018, a enjoint au maire de Pont-de-Metz de reconnaître l'imputabilité au service de cet accident et de placer M. B... en congé pour invalidité temporaire imputable au service pour la période allant du 23 mai 2018 au 7 juin 2018, dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement et a rejeté le surplus des conclusions de la requête de M. B.... Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés les 18 janvier 2023 et 27 août 2023, M. B..., représenté par Me Enard-Bazire, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif d'Amiens du 28 novembre 2022 en tant qu'il n'a pas fait droit à l'ensemble de ses conclusions ; 2°) d'annuler les arrêtés des 17 juillet et 7 octobre 2020 par lesquels le maire de la commune de Pont-de-Metz a refusé de reconnaître l'accident du 18 juillet 2018 déclaré par M. B... comme imputable au service et l'a placé en disponibilité d'office à l'expiration de ses droits à congés de maladie ; 3°) d'annuler les trois arrêtés du 20 octobre 2020 par lesquels le maire de la commune a respectivement placé l'intéressé en congé de longue durée à plein traitement du 19 juillet 2018 au 18 juillet 2021, suspendu le versement de sa nouvelle bonification indiciaire à compter du 1er octobre 2020 et suspendu le versement de son indemnité de fonctions, sujétions et expertise, également à compter du 1er octobre 2020 ; 4°) d'enjoindre, sous astreinte, à la commune de le rétablir dans ses droits statutaires dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ; 5°) de mettre à la charge de la commune la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - il n'était pas justifié de l'habilitation à agir du maire de la commune en première instance ; - cette délibération n'a été produite que dans l'instance n° 200351 ; or la jonction des affaires par le tribunal n'a pas eu pour effet de régulariser l'absence d'habilitation du maire dans la seconde instance enregistrée sous le n° 2002528 ; - le jugement, en refusant de reconnaître l'imputabilité au service du syndrome anxiodépressif constaté le 19 juillet 2018, est entaché d'une erreur de fait, d'une erreur d'appréciation et d'une erreur de droit ; le tribunal a dénaturé les pièces du dossier ; - les arrêtés des 17 juillet et 7 octobre 2020 sont illégaux dès lors que l'accident dont il a été victime le 18 juillet est bien imputable au service ; il a développé une dépression réactionnelle en raison de l'attitude de sa hiérarchie ; le lien entre son affection et les faits de harcèlement moral qu'il a subis est établi par plusieurs avis médicaux et témoignages ; - dès lors qu'il aurait dû bénéficier d'un congé pour invalidité temporaire imputable au service à compter du 19 juillet 2018, l'arrêté n° 2020-183 le plaçant en congé de longue durée est illégal ; - pour les mêmes motifs, l'arrêté n° 2020-184 supprimant le versement de la nouvelle bonification indiciaire à compter du 1er octobre 2020 est illégal ; - cet arrêté méconnaît le principe de non rétroactivité des actes administratifs ; - dès lors qu'il aurait dû bénéficier d'un congé pour invalidité temporaire imputable au service à compter du 19 juillet 2018, l'arrêté n° 2020-185 suspendant le versement de son indemnité de fonctions, sujétions et expertise à compter du 1er octobre 2020 est illégal ; - cet arrêté est illégal par voie de conséquence de l'illégalité des arrêtés des 17 juillet 2020 et 20 octobre 2020 ; - cet arrêté méconnaît également le principe de non rétroactivité des actes administratifs. Par des mémoires en défense, enregistrés les 1er juillet 2023, 13 septembre 2023 et 22 novembre 2023, la commune de Pont-de-Metz, représentée par Me Mathieu, demande à la cour : 1°) de rejeter la requête de M. B... ; 2°) de confirmer le jugement en toutes ses dispositions ; 3°) de mettre à la charge de M. B... le versement de la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des collectivités territoriales ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - le décret n° 93-863 du 18 juin 1993 ; - le décret n° 91-875 du 6 septembre 1991 ; - l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Marie-Pierre Viard, présidente de chambre, - les conclusions de M. Frédéric Malfoy, rapporteur public, - et les observations de Me Brault pour M. B... et de Me Mathieu pour la commune de Pont-de-Metz. Une note en délibéré, présentée pour la commune de Pont-de-Metz par Me Mathieu, a été enregistrée le 11 février 2025. Considérant ce qui suit : 1. M. B..., adjoint technique territorial, exerce les fonctions d'agent technique de maintenance polyvalent au sein de la commune de Pont-de-Metz depuis 2014. Il a été placé, le 23 mai 2018, en congé de maladie jusqu'au 6 juin 2018 inclus, à la suite de l'apparition d'une douleur lombaire importante lors de la réalisation de travaux de taille d'une haie. Le 19 juillet suivant, il a de nouveau été placé en congé de maladie au motif invoqué d'un autre incident survenu la veille durant son service. Il a demandé la prise en charge de ces deux incidents au titre de la législation des accidents de service. Lors de sa séance du 23 septembre 2019, la commission de réforme a, d'une part, émis un avis défavorable à la reconnaissance de l'imputabilité au service de l'accident déclaré le 23 mai 2018 et, d'autre part, sursis à statuer sur l'imputabilité au service de l'accident du 18 juillet 2018 dans l'attente de la réalisation d'une expertise complémentaire. La commission de réforme, qui a de nouveau examiné sa demande le 10 février 2020, a émis un avis favorable à la reconnaissance de l'imputabilité au service de l'accident du 23 mai 2018. Puis, par un nouvel avis du 8 juin 2020, la commission de réforme a rapporté son avis du 10 février 2020 et a émis un avis favorable à la reconnaissance de l'imputabilité au service de l'accident du " 19 juillet 2018 " à l'origine d'un syndrome anxiodépressif. Le maire de la commune de Pont-de-Metz, par des arrêtés des 17 juillet et 7 octobre 2020, a refusé de reconnaître les accidents déclarés par M. B... comme imputables au service. Par ailleurs, par trois arrêtés datés du 20 octobre 2020, le maire de la commune a respectivement placé l'intéressé en congé de longue durée à plein traitement du 19 juillet 2018 au 18 juillet 2021, suspendu le versement de sa nouvelle bonification indiciaire et de son indemnité de fonctions, sujétions et expertise, à compter du 1er octobre 2020. 2. Par une requête enregistrée sous le n° 2002528, M. B... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler les arrêtés des 17 juillet et 7 octobre 2020. En parallèle, par une requête enregistrée sous le n° 2003511, il a demandé l'annulation des trois arrêtés du 20 octobre 2020. Par un jugement du 28 novembre 2022, le tribunal administratif d'Amiens, après avoir joint les deux requêtes, a annulé les arrêtés des 17 juillet et 7 octobre 2020 en tant qu'ils ne reconnaissaient pas l'imputabilité au service de l'accident survenu le 23 mai 2018, a enjoint au maire de Pont-de-Metz de reconnaître l'imputabilité au service de cet accident et de placer M. B... en congé pour invalidité temporaire imputable au service pour la période allant du 23 mai 2018 au 7 juin 2018, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent jugement et, enfin, a rejeté le surplus des conclusions de M. B.... Il relève appel de ce jugement en tant qu'il n'a pas fait droit à l'ensemble de ses conclusions. Sur la recevabilité des écritures de première instance de la commune de Pont-de-Metz : 3. Aux termes de l'article L. 2131-1 du code général des collectivités territoriales : " Les actes pris par les autorités communales sont exécutoires de plein droit dès qu'il a été procédé à leur publication ou affichage ou à leur notification aux intéressés ainsi qu'à leur transmission au représentant de l'Etat dans le département ou à son délégué dans l'arrondissement. Pour les décisions individuelles, cette transmission intervient dans un délai de quinze jours à compter de leur signature. / (...) Le maire peut certifier, sous sa responsabilité, le caractère exécutoire de ces actes. / La preuve de la réception des actes par le représentant de l'Etat dans le département ou son délégué dans l'arrondissement peut être apportée par tout moyen ". Aux termes de l'article L. 2131-2 du même code : " Sont soumis aux dispositions de l'article L. 2131-1 les actes suivants : / 1° Les délibérations du conseil municipal ou les décisions prises par délégation du conseil municipal en application de l'article L. 2122-22 (...) ". 4. M. B... soutient qu'il n'était pas justifié de l'habilitation à agir du maire de la commune de Pont-de-Metz en première instance en l'absence de preuve de la transmission de la délibération du conseil municipal autorisant le maire de cette commune à la représenter dans les instances faisant l'objet des présents litiges au représentant de l'Etat dans le département. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que, par une délibération du 10 juin 2020, publiée le 15 juin 2020, le conseil municipal de Pont-de-Metz a, sur le fondement de l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales, délégué au maire le pouvoir d'intenter au nom de la commune les actions en justice ou de défendre la commune dans les actions intentées contre elle, tant en demande qu'en défense et devant toutes les juridictions. Selon le cachet figurant sur le bordereau de transmission du 15 juin 2020, cet arrêté de délégation a été reçu le 8 juillet suivant par la préfecture de la Somme. Si M. B... fait également valoir que le maire ne démontre pas avoir informé le conseil municipal de l'existence d'une procédure contentieuse comme le prévoit cette même délibération, il ressort des pièces du dossier que, par une délibération du 14 mars 2022, régulièrement transmise en préfecture le 16 mars suivant, le conseil municipal, après avoir été informé par le maire des actions contentieuses engagées par M. B..., a autorisé le maire à ester en justice au nom de la commune dans les instances enregistrées par le tribunal administratif d'Amiens sous les n° 2003511 et 2002528. La fin de non-recevoir opposée par M. B... ne saurait dès lors être retenue. 5. Par ailleurs, alors que ces deux requêtes jointes par le tribunal présentent un lien suffisant au regard de l'objet du litige et des questions soulevées, la circonstance que la délibération précitée du 10 juin 2020 n'a été produite devant le tribunal que dans l'instance n° 200351 alors que la fin de non-recevoir tirée de l'absence de justification d'une habilitation à agir en justice au nom de la commune était également opposée dans l'instance n° 2002528 est sans incidence dès lors que cette pièce a bien été communiquée à M. B.... 6. Il résulte de ce qui précède que c'est à bon droit que les premiers juges ont écarté la fin de non-recevoir tirée du défaut d'habilitation à agir du maire de la commune. Sur la régularité du jugement : 7. Hormis le cas où le juge de première instance a méconnu les règles de compétence, de forme ou de procédure qui s'imposaient à lui et a ainsi entaché son jugement d'une irrégularité, il appartient au juge d'appel, non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels le juge de première instance s'est prononcé sur les moyens qui lui étaient soumis, mais de se prononcer directement sur les moyens dirigés contre la décision administrative contestée dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. Le requérant ne peut donc utilement se prévaloir des erreurs de fait, d'appréciation et de droit ou de la dénaturation des faits du dossier qui entacheraient le jugement attaqué du tribunal administratif pour en demander l'annulation pour irrégularité. Sur le bien-fondé du jugement : En ce qui concerne l'illégalité des arrêtés des 17 juillet et 7 octobre 2020 en tant qu'ils refusent l'imputabilité au service de l'accident du 18 juillet 2018 : 8. Aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, alors en vigueur : " Le fonctionnaire en activité a droit : / (...) / 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. (...) / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident, même après la date de radiation des cadres pour mise à la retraite. / (...) ". Aux termes de l'article 21 bis I et II de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, dans sa rédaction applicable à l'espèce : " I. Le fonctionnaire en activité a droit à un congé pour invalidité temporaire imputable au service lorsque son incapacité temporaire de travail est consécutive à un accident reconnu imputable au service, à un accident de trajet ou à une maladie contractée en service définis aux II, III et IV du présent article. (...) II. Est présumé imputable au service tout accident survenu à un fonctionnaire, quelle qu'en soit la cause, dans le temps et le lieu du service, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le fonctionnaire de ses fonctions ou d'une activité qui en constitue le prolongement normal, en l'absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant l'accident du service ". 9. Un accident survenu sur le lieu et dans le temps du service, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par un fonctionnaire de ses fonctions ou d'une activité qui en constitue le prolongement normal présente, en l'absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant cet évènement du service, le caractère d'un accident de service. Il appartient dans tous les cas au juge administratif, saisi d'une décision de l'autorité administrative compétente refusant de reconnaître l'imputabilité au service d'un tel événement, de se prononcer au vu des circonstances de l'espèce. Doit être regardé comme un accident un évènement précisément déterminé et daté, caractérisé par sa violence et sa soudaineté, à l'origine de lésions ou d'affections physiques ou psychologiques qui ne trouvent pas leur origine dans des phénomènes à action lente ou répétée auxquels on ne saurait assigner une origine et une date certaines. 10. M. B... soutient qu'il a été victime, le 18 juillet 2018, d'une surveillance excessive de la part de l'adjoint aux travaux qui l'aurait ensuite agressé alors qu'il exerçait des missions d'entretien sur le domaine public. L'intéressé, à qui son médecin traitant a délivré le lendemain un arrêt de travail pour " rechute des douleurs lombaires sur efforts imposés par sa hiérarchie malgré recommandations médecin du travail + burn out sur harcèlement " causés par cet événement, a été invité, par des courriers du maire des 22 aout et 22 octobre 2018, à détailler les faits à l'origine de l'accident. En réponse, M. B... a indiqué, dans un écrit non daté, que cet adjoint lui avait demandé d'arroser les fleurs dans le village et, qu'après l'avoir surveillé depuis son véhicule, ce dernier était venu l'agresser sans raison en lui indiquant qu'il ne se trouvait pas au bon endroit. M. B... aurait ensuite, selon ses propres déclarations, perdu ses moyens et se serait égaré dans le village. 11. Afin de démontrer l'imputabilité au service de cet accident, M. B... se prévaut, outre les avis de la commission de réforme, de nombreux éléments médicaux démontrant l'absence de prédisposition ou d'antécédent psychiatrique et l'existence d'une situation de travail dégradée au sein du service technique de la commune de Pont-de-Metz. Il produit à ce titre, en plus des divers certificats médicaux établis par son médecin traitant dans le cadre de ses arrêts travail successifs faisant état d'un " burn out " et d'une dépression majeure réactionnelle, plusieurs expertises médicales réalisées par des médecins spécialistes attestant de l'existence d'un état dépressif pour lequel il a d'ailleurs été hospitalisé en octobre et novembre 2019. Il ressort ainsi de l'expertise réalisée le 7 janvier 2020 par un professeur du pôle pathologie professionnelle et médecine du travail du centre hospitalier universitaire de Reims à la demande de la commission de réforme que M. B... " n'a pas d'antécédent psychiatrique avant son embauche (...). Il existe des témoignages concordants au nombre de trois confirmant un relationnel difficile entre l'agent et sa hiérarchie, permettant d'expliquer le syndrome anxiodépressif pour lequel il est suivi (...). De ce fait, il peut être considéré que les arrêts de travail à compter du 19/07/18 sont justifiés et à prendre en compte au titre du syndrome anxiodépressif en relation avec l'accident de travail déclaré le 19/07/2018 ". M. B... ajoute que ces conclusions ont été préalablement confirmées par l'expertise diligentée par l'assurance de la commune et réalisée par un médecin psychiatre le 20 juin 2019 selon laquelle les frais liés à sa pathologie psychiatrique sont à prendre en charge au titre de l'accident de service. M. B... se prévaut enfin de plusieurs attestations, signalements ou témoignages faisant état des tensions importantes au sein des services de la commune à l'origine de risques psychosociaux et d'accusations d'agissements constitutifs de harcèlement moral visant des élus et l'encadrement. 12. Toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que les conditions dans lesquelles s'est déroulé cet événement, tel qu'il est relaté par M. B... dans ses écritures non datées et par l'adjoint aux travaux dans un rapport du 18 juillet 2018, permettraient de considérer que ce dernier aurait eu un comportement ou tenu des propos excédant l'exercice normal du pouvoir hiérarchique à l'origine de l'affection anxiodépressive dont il est atteint. En effet, hormis les déclarations de l'intéressé, ni les témoignages produits par l'appelant, ni les différentes expertises médicales dont il se prévaut, ne permettent de corroborer l'existence de l'agression dont le requérant dit avoir été victime ou la portée des propos échangés à cette occasion. A cet égard, il ressort de l'expertise initiale réalisée par un médecin rhumatologue le 21 janvier 2019 afin de se prononcer sur l'imputabilité au service de son accident du 23 mai 2018 ainsi que la date de consolidation et le taux d'incapacité permanente de cet accident que M. B... a déclaré, après avoir relevé que son employeur ne respectait pas les préconisations de la médecine du travail en dépit de sa reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé, avoir refusé d'utiliser une décolleuse de revêtement de sol et que " son employeur l'a " puni " en lui donnant une autre tâche et que " cela lui a provoqué un traumatisme psychique et qu'il errait dans le village ". En outre, ni l'expertise du 20 juin 2019 citée au point précédent, faisant état du développement progressif d'un syndrome anxiodépressif en raison de l'absence de prise en considération par sa hiérarchie des recommandations médicales et de relations conflictuelles avec un élu, contexte dans lequel l'intéressé a d'ailleurs déposé plainte auprès des services de la gendarmerie nationale le 17 juillet 2018, ni l'expertise du 7 janvier 2020 attestant de l'existence de difficultés relationnelles entre M. B... et sa hiérarchie au regard de trois témoignages concordants, ne permettent de préciser les circonstances et la consistance des faits dont le requérant dit avoir été victime le 18 juillet 2018. De même, le courrier établi le 7 novembre 2018 par son médecin psychiatre, s'il fait mention d'un état dépressif réactionnel causé par une situation conflictuelle avec sa hiérarchie depuis son recrutement, ne fait pas mention de cet accident. 13. Enfin, si M. B... fait également état d'agissements répétés qu'il estime être constitutifs d'une situation de harcèlement moral corroborée par des plaintes, des signalements et des témoignages d'autres collègues, d'un syndicat ou de certains membres de l'équipe municipale, une telle argumentation, qui pourrait être présentée à l'appui d'une demande de reconnaissance de maladie professionnelle, est inopérante au soutien de son moyen tiré de l'erreur d'appréciation dès lors qu'il ressort des pièces du dossier que sa demande tendait exclusivement à la reconnaissance de l'imputabilité au service d'un accident survenu le 18 juillet 2018, et non de celle d'une maladie professionnelle. 14. Dans ces conditions, les faits qui se sont produits le 18 juillet 2018 ne peuvent être regardés comme caractérisant un événement soudain et violent susceptible d'être qualifié d'accident de service, quel qu'en ait été le ressenti par l'agent. Par suite, nonobstant les conclusions des expertises médicales et l'avis favorable à l'imputabilité rendu par la commission de réforme, M. B... n'est pas fondé à soutenir que le maire de Pont-de-Metz a méconnu les dispositions citées au point 8 en refusant de reconnaître l'existence d'un accident de service survenu le 18 juillet 2018 et, par suite, de regarder comme imputable au service le syndrome anxiodépressif pour lequel il a ensuite été placé en congé de maladie. En ce qui concerne les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté n° 2020-183 du 20 octobre 2020 plaçant M. B... en congé de longue durée à plein traitement du 19 juillet 2018 au 18 juillet 2021 : 15. Aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 précitée : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) / 4° A un congé de longue durée, en cas de tuberculose, maladie mentale, affection cancéreuse, poliomyélite ou déficit immunitaire grave et acquis, de trois ans à plein traitement et de deux ans à demi-traitement. Le fonctionnaire conserve ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. / Sauf dans le cas où le fonctionnaire ne peut être placé en congé de longue maladie à plein traitement, le congé de longue durée ne peut être attribué qu'à l'issue de la période rémunérée à plein traitement d'un congé de longue maladie. Cette période est réputée être une période du congé de longue durée accordé pour la même affection. Tout congé attribué par la suite pour cette affection est un congé de longue durée (...) ". 16. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'a pas été victime d'un accident de service le 18 juillet 2018. Par ailleurs, ainsi que l'a relevé le tribunal, il n'établit pas que les troubles lombalgiques subis à compter de cette date seraient en lien avec l'accident de service du 23 mai 2018, alors qu'il présente par ailleurs une lombalgie chronique depuis 2015. Dans ces conditions, M. B... n'est pas fondé à soutenir que le maire l'a placé à tort en congé de longue durée à compter du 19 juillet 2018. En ce qui concerne les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté n° 2020-184 du 20 octobre 2020 suspendant le versement de la nouvelle bonification indiciaire de M. B... à compter du 1er octobre 2020 : 17. En premier lieu, aux termes de l'article 1er du décret n° 93-863 du 18 juin 1993 relatif aux conditions de mise en œuvre de la nouvelle bonification indiciaire dans la fonction publique territoriale : " La nouvelle bonification indiciaire est attachée à certains emplois comportant l'exercice d'une responsabilité ou d'une technicité particulière. Elle cesse d'être versée lorsque l'agent n'exerce plus les fonctions y ouvrant droit " et aux termes de l'article 2 de ce même décret : " Le bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire est maintenu aux fonctionnaires dans les mêmes proportions que le traitement pendant la durée des congés mentionnés aux 1°, 2° et 5° de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 modifiée susvisée ainsi qu'au 3° de ce même article tant que l'agent n'est pas remplacé dans ses fonctions ". 18. Le bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire instituée par ces dispositions ne constitue pas un avantage statutaire et n'est lié ni au cadre d'emplois, ni au grade, mais dépend seulement de l'exercice effectif des fonctions qui y ouvrent droit. Le congé de longue durée, prévu par les dispositions du 4° de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984, bien que correspondant à l'une des positions d'activité du fonctionnaire, n'implique l'exercice effectif d'aucune fonction. 19. Il résulte de ce qui a été dit précédemment que M. B..., qui a bénéficié d'un congé de maladie du 19 juillet 2019 au 30 septembre 2020, a été placé, par un arrêté n° 2020-183 du 20 octobre 2020, en congé de longue durée non imputable au service à compter du 19 juillet 2018 et jusqu'au 18 juillet 2021. Dès lors, le maire de la commune de Pont-de-Metz pouvait légalement suspendre le bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire. 20. En second lieu, sous réserve de dispositions législatives ou réglementaires contraires et hors le cas où il est satisfait à une demande du bénéficiaire, l'administration ne peut retirer une décision individuelle explicite créatrice de droits, si elle est illégale, que dans le délai de quatre mois suivant la prise de cette décision. Une décision administrative accordant un avantage financier crée des droits au profit de son bénéficiaire alors même que l'administration avait l'obligation de refuser cet avantage. En revanche, n'ont pas cet effet les mesures qui se bornent à procéder à la liquidation de la créance née d'une décision prise antérieurement. 21. M. B... soutient que l'arrêté n° 2020-184 du 20 octobre 2020 méconnaît le principe de non rétroactivité des actes administratifs dès lors qu'il prend effet à une date antérieure à son édiction, soit à compter du 1er octobre 2020. Il ressort des pièces du dossier qu'à raison de ses fonctions, lui a été attribuée, à compter du 1er juillet 2015, une nouvelle bonification indiciaire de 10 points par un arrêté du 29 juin 2015. Or, s'agissant d'une décision créatrice de droit, la commune ne pouvait y mettre fin que pour l'avenir. A cet égard, la circonstance que M. B... a été placé dans une situation conservatoire dans l'attente de l'avis de la commission de réforme est sans incidence. Par suite, en conférant une portée rétroactive à sa décision, le maire de la commune de Pont-de-Metz a entaché sa décision d'illégalité. En ce qui concerne les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté n° 2020-185 du 20 octobre 2020 suspendant le versement de l'indemnité de fonctions, sujétions et expertise (IFSE) de M. B... à compter du 1er octobre 2020 : 22. En premier lieu, compte tenu de ce qui précède, le moyen tiré de ce que l'arrêté n° 2020-185 du 20 octobre 2020 doit être annulé en raison de l'illégalité des arrêtés des 17 juillet et 7 octobre 2020 en tant qu'ils refusent l'imputabilité au service de l'accident du 18 juillet 2018 ne peut qu'être écarté. 23. En deuxième lieu, aux termes de l'article 88 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " Les organes délibérants des collectivités territoriales et de leurs établissements publics fixent les régimes indemnitaires, dans la limite de ceux dont bénéficient les différents services de l'Etat. Ces régimes indemnitaires peuvent tenir compte des conditions d'exercice des fonctions et de l'engagement professionnel des agents. Lorsque les services de l'Etat servant de référence bénéficient d'une indemnité servie en deux parts, l'organe délibérant détermine les plafonds applicables à chacune de ces parts et en fixe les critères, sans que la somme des deux parts dépasse le plafond global des primes octroyées aux agents de l'Etat. (...) ". Aux termes de l'article 1er du décret du 6 septembre 1991 pris pour l'application du premier alinéa de l'article 88 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée : " Le régime indemnitaire fixé par les assemblées délibérantes des collectivités territoriales et les conseils d'administration des établissements publics locaux pour les différentes catégories de fonctionnaires territoriaux ne doit pas être plus favorable que celui dont bénéficient les fonctionnaires de l'Etat exerçant des fonctions équivalentes. (...) ". Aux termes de l'article 2 du même décret : " L'assemblée délibérante de la collectivité ou le conseil d'administration de l'établissement fixe, dans les limites prévues à l'article 1er, la nature, les conditions d'attribution et le taux moyen des indemnités applicables aux fonctionnaires de ces collectivités ou établissements. (...) ". 24. Il ressort des pièces du dossier que l'IFSE a été instituée par la commune de Pont-de-Metz à compter du 1er janvier 2018 par une délibération du conseil municipal du 16 novembre 2017. Il ressort des termes de l'article 2 de cette délibération relative à la mise en œuvre de l'IFSE et plus particulièrement de son paragraphe relatif à la modulation de l'IFSE du fait des absences que " En cas de congé de longue maladie et de longue durée le versement du régime indemnitaire est suspendu ". Or, il résulte de ce qui a été dit précédemment que M. B..., qui a bénéficié d'un congé de maladie du 19 juillet 2019 au 30 septembre 2020, a été placé, par un arrêté n° 2020-183 du 20 octobre 2020, en congé de longue durée à compter du 19 juillet 2018. Dès lors, c'est à bon droit que le maire de la commune de Pont-de-Metz a suspendu le versement de l'IFSE. 25. En troisième et dernier lieu, et pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 20 et 21, M. B... est fondé à soutenir qu'en conférant une portée rétroactive à l'arrêté n° 2020-185 du 20 octobre 2020 suspendant le versement de son IFSE à compter du 1er octobre 2020, le maire de la commune de Pont-de-Metz a entaché sa décision d'une rétroactivité illégale. 26. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation des arrêtés n° 2020-184 et n° 2020-185 du 20 octobre 2020, en tant qu'ils ont suspendu rétroactivement le versement de sa nouvelle bonification indiciaire et de son IFSE à compter du 1er octobre 2020. Le jugement attaqué doit, dès lors, être annulé dans cette mesure. Sur les conclusions à fin d'injonction : 27. L'annulation, par le présent arrêt, des arrêtés n° 2020-184 et n° 2020-185 du 20 octobre 2020 en tant qu'ils suspendent rétroactivement le versement de la nouvelle bonification indiciaire et de l'IFSE alloués à M. B... implique qu'il soit fait injonction à la commune de Pont-de-Metz de lui verser les sommes dues à ce titre pour la période du 1er octobre 2020 au 20 octobre 2020 dans un délai de deux mois à compter de la date de notification du présent arrêt, sans qu'il soit nécessaire d'assortir cette injonction d'une astreinte. Sur les conclusions relatives aux frais d'instance : 28. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions des parties présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement nos 2002528, 2003511 du 28 novembre 2022 du tribunal administratif d'Amiens est annulé seulement en tant qu'il n'a pas fait droit à la demande de M. B... tendant à l'annulation des arrêtés du 20 octobre 2020 en ce qu'ils ont suspendu rétroactivement le versement de sa nouvelle bonification indiciaire et son indemnité de fonctions, sujétions et expertise, à compter du 1er octobre 2020. Article 2 : Les arrêtés du 20 octobre 2020 du maire de la commune de Pont-de-Metz portant suspension du versement de la nouvelle bonification indiciaire et de l'indemnité de fonctions, sujétions et expertise de M. B... sont annulés en tant seulement qu'ils fixent leur entrée en vigueur au 1er octobre 2020. Article 3 : Il est enjoint à la commune de Pont-de-Metz de verser à M. B... un rappel des sommes dues au titre de la nouvelle bonification indiciaire et de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise, pour la période du 1er octobre 2020 au 20 octobre 2020 dans un délai de deux mois à compter de la date de notification du présent arrêt. Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à la commune de Pont-de-Metz. Délibéré après l'audience publique du 11 février 2025 à laquelle siégeaient : - Mme Marie-Pierre Viard, présidente de chambre, - M. Jean-Marc Guérin-Lebacq, président-assesseur, - Mme Dominique Bureau, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 mars 2025. Le président-assesseur, Signé : J.-M. Guérin-Lebacq La présidente de chambre, Présidente-rapporteure, Signé : M.-P. ViardLa greffière, Signé : C. Marécalle La République mande et ordonne au préfet de la Somme en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, Pour la greffière en chef, Par délégation, La greffière, C. Marécalle 1 2 N° 23DA00109 1 3 N°"Numéro"
Cours administrative d'appel
Douai
CAA de BORDEAUX, 5ème chambre, 04/03/2025, 23BX00552, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme C... B... a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler la décision du 12 novembre 2020 par laquelle le maire de la commune d'Ussac a rejeté le recours gracieux qu'elle a formé contre la décision du 15 juillet 2020 portant rejet de sa demande tendant à ce que son trouble anxio-dépressif réactionnel soit reconnu comme une maladie professionnelle et de la renvoyer devant la commission de réforme pour le réexamen de sa demande de reconnaissance " au titre d'une mesure d'expertise médicale ". Par un jugement n° 2001767 du 28 décembre 2022, le tribunal administratif de Limoges a annulé cet arrêté ainsi que la décision du 12 novembre 2020 portant rejet du recours gracieux formé contre cet arrêté et a enjoint au maire de la commune d'Ussac de prendre une décision reconnaissant l'imputabilité au service de la maladie de Mme B... et de reconstituer sa carrière, ainsi que ses droits à rémunération, dans la mesure rendue nécessaire par l'attribution rétroactive de ses congés pour maladie imputable au service, dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement. Procédure devant la cour : Par une requête et des mémoires enregistrés les 27 février 2023, 3 octobre 2023, 19 janvier 2024 et 10 juin 2024 la commune d'Ussac, représentée par Me Caetano, demande à la cour d'annuler le jugement du tribunal administratif de Limoges du 28 décembre 2022 et de mettre à la charge de Mme B... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient dans le dernier état de ses écritures que : - le jugement est irrégulier en ce qu'il s'est basé sur des documents non communiqués dont le tribunal n'avait connaissance que par le biais de mentions figurant dans l'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 4 novembre 2019 ; le principe du contradictoire rappelé à l'article L. 5 du code de justice administrative a donc été méconnu ; - le jugement est irrégulier par insuffisance de motivation en ce que pour écarter le moyen lié à l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux, il s'est contenté d'indiquer que cette autorité de la chose jugée " ne faisait pas obstacle " à la demande de Mme B..., sans en expliciter les raisons ; - contrairement à ce qu'a estimé le tribunal, c'est à juste titre qu'elle a refusé de reconnaître que le trouble anxiodépressif réactionnel présenté par Mme B..., constituait une maladie professionnelle dès lors que d'une part, la demande de l'intéressée a été présentée à l'expiration du délai de prescription prévu par l'article 37-3 du décret du 30 juillet 1987, d'autre part, l'autorité de la chose jugée attachée à la précédente décision de la juridiction administrative admettant l'existence d'une maladie ordinaire de la requérante fait obstacle à la reconnaissance d'une maladie professionnelle, et enfin Mme B... n'établit pas que sa maladie est imputable au service ; - si elle admet que l'article 57 de la loi n°84-53 du 26 janvier 1984 ne prévoit explicitement aucune prescription applicable au dépôt de la demande de maladie professionnelle, compte tenu de la législation en vigueur au jour où les droits de Mme B... ont été réputés acquis, toutefois, elle est fondée à invoquer la prescription de deux ans, prévue par l'article 37.3 du décret du 30 juillet 1987, puisque la demande ayant justifié la présente procédure est intervenue postérieurement au décret n° 2019-301 du 10 avril 2019 ; - elle est fondée à opposer la prescription quadriennale prévue par la loi du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics ou le délai de prescription de droit commun prévu par l'article 2224 du code civil ; si effectivement l'article 57 de la loi n°84-53 du 26 janvier 1984, ne prévoit aucune prescription applicable au dépôt de la demande de maladie professionnelle, il n'en demeure pas moins que l'action ne pouvait être imprescriptible ; alors que la première procédure mise en œuvre tendait à voir reconnaître un accident de service, la nouvelle demande vise à faire reconnaitre une maladie professionnelle et n'a donc pas le même objet ; le délai de deux ans relatif à la déclaration de maladie professionnelle n'a ainsi été interrompu ni par la procédure devant le tribunal administratif de Limoges ni par celle devant la cour administrative d'appel de Bordeaux ; au demeurant, si la juridiction considérait que les deux procédures avaient le même objet, l'autorité de la chose jugée attachée à la décision de la cour administrative d'appel de Bordeaux en date du 4 novembre 2019 empêcherait une nouvelle demande tendant à la reconnaissance d'une maladie professionnelle ; - la preuve de la caractérisation de la maladie professionnelle n'est pas rapportée ; le comportement de Mme B... caractérise un fait personnel de nature à détacher la survenance de la maladie du service. Par des mémoires en défense enregistrés les 1er septembre 2023 et 15 décembre 2023, Mme B..., représentée par la SCP d'avocat Lyon-Caen et Thiriez, conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge de la commune d'Ussac une somme de 4 000 euros, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle fait valoir que : - le moyen tiré de la méconnaissance du principe du contradictoire manque en fait ; - le moyen tiré du défaut de motivation du jugement manque en fait ; - le motif d'annulation retenu par le tribunal est fondé ; - la situation de Madame B... était gérée par les dispositions de l'article 57 de la loi n° 54-53 du 26 janvier 1984 lesquelles n'enferment pas les déclarations de maladie professionnelle dans un délai et non par les dispositions de l'article 37-3 du décret n°87-602 du 30 juillet 1987 créées par le décret n°2019-301 du 10 avril 2019 enfermant la déclaration de maladie professionnelle dans un délai de deux ans ; - la collectivité ne peut opposer en l'absence de créance, la loi du 31 décembre 1968 ; - aucune règle de droit public n'a pour effet d'enfermer les déclarations de maladie professionnelle dans un délai et les dispositions de l'article 2224 du code civil ne sont pas applicables ; en tout état de cause, contrairement à ce que tente de faire croire la commune d'Ussac, elle n'est pas restée passive après l'altercation litigieuse puisqu'elle l'a saisie d'une demande tendant à la reconnaissance de l'imputabilité au service de l'altercation du 3 décembre 2014 et du syndrome anxio-dépressif réactionnel consécutif, qui a donné lieu à une décision de refus du maire du 20 février 2015 ; - le jugement n'est pas intervenu en méconnaissance des dispositions des articles 6 et 132 du code de procédure civile ; le contentieux administratif est régi par les dispositions du code de justice administrative et non par les dispositions du code de procédure civile ; en tout état de cause, s'il fallait considérer que la commune requérante a entendu se placer sur le terrain de la méconnaissance du principe du contradictoire, le moyen n'en est pas moins voué à l'échec dès lors qu'il n'est pas soutenu que la commune n'aurait pas eu connaissance de ces rapports dans le cadre des autres procédures contentieuses qui l'ont opposé à Madame B... ; - les dispositions de l'article 455 du code de procédure civile ne sauraient davantage régir la procédure administrative ; à supposer que la commune soit regardée comme ayant entendu se prévaloir de l'article L. 9 du code de justice administrative, aucune insuffisance de motivation ne peut être retenue ; - des éléments médicaux concordants établissent l'imputabilité au service de la maladie de Madame B... ; les attestations produites pour les besoins de la cause ne suffisent pas à établir l'existence d'un fait personnel de nature à détacher la survenance de la maladie du service. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ; - le décret n° 2019-301 du 10 avril 2019 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. A..., - les conclusions de M. Ellie, rapporteur public, - les observations de Me Orliaguet représentant la commune d'Ussac et de Mme B.... Considérant ce qui suit : 1. Adjointe administrative principale de 1ère classe à la commune d'Ussac, Mme B... s'est vu prescrire, le 3 décembre 2014, à la suite d'une altercation avec le maire de cette commune, un arrêt de travail pour " déprime, surmenage et problèmes relationnels au travail ". Cet arrêt de travail a été prolongé à plusieurs reprises par la suite, sans discontinuité. Décidant de ne pas suivre l'avis favorable émis par la commission de réforme, le maire de la commune d'Ussac, par un arrêté du 20 février 2015, a refusé de reconnaître l'altercation du 3 décembre 2014 comme un accident de service et l'imputabilité au service des congés pour raisons de santé qui ont suivi. Par un jugement n° 1500163 du 23 juin 2017, le tribunal administratif de Limoges a annulé cet arrêté du 20 février 2015 et a enjoint à la commune d'Ussac de reconnaître que Mme B... a été victime d'un accident de service. Par un arrêt n° 17BX02837 du 4 novembre 2019, la cour administrative d'appel de Bordeaux a annulé ce jugement au motif que " si la pathologie de Mme B... apparaît en lien avec le service, elle ne peut être regardée comme la conséquence brutale d'un choc soudain survenu le 3 décembre 2014 [de sorte] (...) que cet évènement ne peut être qualifié d'accident de service ". A la suite de cet arrêt, par un courrier du 15 janvier 2020, Mme B... a demandé à ce que sa maladie soit reconnue comme maladie professionnelle. A la demande de la commune d'Ussac, qui par un courrier du 19 février 2020 l'a invitée à compléter sa demande, elle a déposé, le 5 mars 2020, une " déclaration de maladie professionnelle " qu'elle a datée du 3 décembre 2014. Par une décision du 15 juillet 2020, le maire de la commune d'Ussac lui a indiqué qu'il ne pouvait faire droit à sa demande au motif que la déclaration de maladie professionnelle avait été adressée au-delà du délai de deux ans prévu au II de l'article 37-3 du décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 tel que modifié par le décret n° 2019-301 du 10 avril 2019. Par un courrier du 31 juillet 2020, Mme B... a formé un recours gracieux contre cette décision. Ce recours gracieux a été rejeté par une décision du 12 novembre 2020. La commune d'Ussac relève appel du jugement du 28 décembre 2022, par lequel le tribunal administratif de Limoges a annulé la décision du 15 juillet 2020 et la décision du 12 novembre 2020. Sur la régularité du jugement attaqué : 2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 5 du code de justice administrative " L'instruction des affaires est contradictoire. Les exigences de la contradiction sont adaptées à celles de l'urgence, du secret de la défense nationale et de la protection de la sécurité des personnes ". 3. Pour estimer que Mme B... était fondée à soutenir que la décision du 15 juillet 2020 par laquelle le maire de la commune d'Ussac a refusé de reconnaître l'origine professionnelle de sa maladie et la décision du 12 novembre 2020 portant rejet de son recours gracieux sont entachées d'erreur d'appréciation, le tribunal a relevé au point 12 du jugement qu'il " ressort des pièces du dossier, notamment des pièces médicales produites et de celles citées dans les motifs de l'arrêt du 4 novembre 2019 de la cour administrative d'appel de Bordeaux, que le trouble anxio-dépressif réactionnel présenté par Mme B..., qui a justifié des arrêts de travail sans discontinuité à compter du 3 décembre 2014 à la suite d'une altercation du même jour avec le maire de la commune d'Ussac, est directement lié à l'environnement délétère dans lequel elle a exercé ses fonctions, en particulier au conflit relationnel qui l'a opposée au maire de cette commune ". Ce faisant, le tribunal a fondé, pour partie, son appréciation sur les mentions figurant dans l'arrêt précité de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 4 novembre 2019. Cet arrêt avait été porté à la connaissance de la commune d'Ussac le 3 décembre 2020 à l'appui de la communication de la requête de Mme B..., par le greffe du tribunal. Il suit de là qu'alors même que les rapports d'expertise de deux médecins mentionnés au point 5 de l'arrêt du 4 novembre 2019 ne faisaient pas partie des pièces du dossier soumises à l'appréciation du tribunal, celui-ci n'a pas méconnu le principe du contradictoire. 4. En second lieu, aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". 5. En relevant au point 8 du jugement que l'autorité de chose jugée s'attachant à l'arrêt du 4 novembre 2019 de la cour administrative d'appel de Bordeaux ne faisait pas obstacle à ce que Mme B... demande que son trouble anxio-dépressif réactionnel constaté pour la première fois le 3 décembre 2014 soit reconnu comme une maladie professionnelle et à ce qu'elle sollicite l'annulation des décisions litigieuses, le tribunal a suffisamment motivé la réponse qu'il a apportée au moyen en défense soulevé par la commune d'Ussac. Sur les conclusions aux fins d'annulation : En ce qui concerne l'exception de prescription quadriennale : 6. Aux termes de l'article 1er de la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 : " Sont prescrites, au profit de l'Etat, des départements et des communes, sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi, et sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis ". Selon l'article 2 de cette loi : " La prescription est interrompue par : / Toute demande de paiement ou toute réclamation écrite adressée par un créancier à l'autorité administrative, dès lors que la demande ou la réclamation a trait au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance, alors même que l'administration saisie n'est pas celle qui aura finalement la charge du règlement. / Tout recours formé devant une juridiction, relatif au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance, quel que soit l'auteur du recours et même si la juridiction saisie est incompétente pour en connaître, et si l'administration qui aura finalement la charge du règlement n'est pas partie à l'instance ". Aux termes de l'article 3 de la même loi : " La prescription ne court ni contre le créancier qui ne peut agir, soit par lui-même ou par l'intermédiaire de son représentant légal, soit pour une cause de force majeure, ni contre celui qui peut être légitimement regardé comme ignorant l'existence de sa créance ou de la créance de celui qu'il représente légalement ". 7. En demandant que sa pathologie soit reconnue comme une maladie professionnelle, Mme B... ne peut être regardée comme ayant sollicité le paiement d'une créance régie par les dispositions de la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968, de sorte que la commune d'Ussac ne peut utilement se prévaloir de ces dispositions pour lui refuser le bénéfice de l'article 57 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, dans sa version applicable au litige. Par suite, la commune d'Ussac n'est pas fondée à opposer l'exception de prescription quadriennale. En ce qui concerne le bien fondé du motif d'annulation : 8. Aux termes de l'article 57 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, dans sa version applicable au litige : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. Le bénéfice de ces dispositions est subordonné à la transmission par le fonctionnaire, à son administration, de l'avis d'arrêt de travail justifiant du bien-fondé du congé de maladie, dans un délai et selon les sanctions prévus en application de l'article 58. / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident, même après la date de radiation des cadres pour mise à la retraite. / Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales ". 9. Aux termes des dispositions de l'article 21 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, issues de l'ordonnance n° 2017-53 du 19 janvier 2017 : " I.-Le fonctionnaire en activité a droit à un congé pour invalidité temporaire imputable au service lorsque son incapacité temporaire de travail est consécutive à un accident reconnu imputable au service, à un accident de trajet ou à une maladie contractée en service définis aux II, III et IV du présent article. (...) / Le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident. La durée du congé est assimilée à une période de service effectif. (...) / IV.-Est présumée imputable au service toute maladie désignée par les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale et contractée dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le fonctionnaire de ses fonctions dans les conditions mentionnées à ce tableau. / Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée par un tableau peut être reconnue imputable au service lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu'elle est directement causée par l'exercice des fonctions. / Peut également être reconnue imputable au service une maladie non désignée dans les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu'elle est essentiellement et directement causée par l'exercice des fonctions et qu'elle entraîne une incapacité permanente à un taux déterminé et évalué dans les conditions prévues par décret en Conseil d'Etat ". 10. En premier lieu, d'une part, aux termes de l'article 2224 du code civil " Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ". 11. D'autre part, créés par le décret n° 2019-301 du 10 avril 2019, et entrés en vigueur le 13 avril 2019, les articles 37-2 et 37-3 du décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 prévoient que : " Pour obtenir un congé pour invalidité temporaire imputable au service, le fonctionnaire, ou son ayant-droit, adresse par tout moyen à l'autorité territoriale une déclaration (...) de maladie professionnelle accompagnée des pièces nécessaires pour établir ses droits ", que " [cette déclaration] est adressée à l'autorité territoriale dans le délai de deux ans suivant la date de la première constatation médicale de la maladie ou, le cas échéant, de la date à laquelle le fonctionnaire est informé par un certificat médical du lien possible entre sa maladie et une activité professionnelle. (...) " et que lorsque ce délai de deux ans n'est pas respecté, " la demande de l'agent est rejetée ". 12. L'application des dispositions de l'article 21 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 résultant de l'ordonnance du 19 janvier 2017 étant manifestement impossible en l'absence d'un texte réglementaire fixant notamment les conditions de procédure applicables à l'octroi du nouveau congé pour invalidité temporaire imputable au service, ces dispositions ne sont donc entrées en vigueur, en tant qu'elles s'appliquent à la fonction publique territoriale, qu'à la date d'entrée en vigueur, le 13 avril 2019, du décret n° 2019-301 du 10 avril 2019, décret par lequel le pouvoir réglementaire a pris les dispositions réglementaires nécessaires pour cette fonction publique. Il résulte également des dispositions transitoires figurant à l'article 15 de ce décret que les conditions de forme et de délai prévues aux articles 37-2 à 37-7 du décret du 30 juillet 1987 précité, sont uniquement applicables, d'une part, aux demandes de prolongation d'un congé pour accident de service, ou pour maladie imputable au service, pour une période débutant après le 16 avril 2019 et, d'autre part, aux demandes initiales de congé pour invalidité temporaire imputable au service motivées par un accident ou une maladie dont la déclaration a été déposée après cette date. Les délais mentionnés à l'article 37-3 du décret du 30 juillet 1987 courent à compter du premier jour du deuxième mois suivant la publication de ce décret lorsqu'un accident ou une maladie n'a pas fait l'objet d'une déclaration avant cette date. 13. De première part, dans la mesure où les droits des agents en matière d'accident de service et de maladie professionnelle sont réputés constitués à la date à laquelle l'accident est intervenu ou la maladie a été diagnostiquée, la situation de Mme B..., dont le trouble anxio-dépressif réactionnel a été médicalement constaté pour la première fois le 3 décembre 2014, soit avant le 13 avril 2019, était initialement exclusivement régie par les conditions de forme et de fond prévues par les dispositions précitées de l'article 57 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 et non celles énoncées par l'article 21 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 et les articles 37-1 et suivants du décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 créés par le décret n° 2019-301 du 10 avril 2019. La demande présentée devant le tribunal administratif de Limoges le 23 janvier 2015 tendant, pour les faits en cause, à l'annulation de l'arrêté du 20 février 2015 par lequel le maire de la commune d'Ussac a refusé de reconnaître l'imputabilité au service des troubles qu'elle rencontre depuis le 3 décembre 2014, a interrompu le délai de prescription jusqu'à la date à laquelle l'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 4 novembre 2019 a été notifié à Mme B.... 14. De second part, le délai de deux ans prévu au II de l'article 37-3 du décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 est, contrairement à ce que soutient la commune d'Ussac, devenu applicable à la situation de Mme B... à partir du 1er juin 2019, premier jour du deuxième mois suivant la publication du décret du 10 avril 2019 dès lors qu'à cette date, la situation de Mme B... n'était pas déjà cristallisée par l'effet de la prescription. Par suite, si c'est à tort que le tribunal a jugé que le délai de deux ans prévu au II de l'article 37-3 du décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 n'était pas applicable à la situation de Mme B..., le maire de la commune d'Ussac n'en a pas moins commis une erreur de droit et d'appréciation en estimant que sa demande, présentée le 5 mars 2020, était tardive au motif que la déclaration de maladie professionnelle aurait été déposée au-delà de ce délai de deux ans. 15. En deuxième lieu, l'arrêt du 4 novembre 2019 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux, a rejeté la demande de Mme B... tendant à l'annulation de l'arrêté du 20 février 2015 du maire de la commune d'Ussac ayant refusé de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident survenu le 3 décembre 2014 n'a pas le même objet que la demande en litige tendant à l'annulation de la décision du 15 juillet 2020 portant rejet de la demande tendant à ce que le trouble anxio-dépressif réactionnel de Mme B... soit reconnu comme une maladie professionnelle. Il suit de là que la commune d'Ussac n'est pas fondée à soutenir que les prétentions de Mme B... méconnaissent la chose jugée le 4 novembre 2019. 16. En troisième lieu, une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service. 17. Il ressort des énonciations de l'arrêt rendu par la cour administrative d'appel de Bordeaux le 4 novembre 2019, qui n'a certes pas l'autorité da chose jugée mais dont la teneur peut être prise en compte alors d'ailleurs que les constatations de fait y figurant ne sont pas sérieusement contestées, qu'une expertise médicale du 15 décembre 2014 a conduit à la rédaction d'un rapport établi le 17 décembre 2014 selon lequel Mme B... éprouvait des difficultés relationnelles avec sa hiérarchie depuis quelques années, qu'un rapport d'expertise rédigé le 18 novembre 2015 par un psychiatre des hôpitaux, à la demande du comité médical chargé d'émettre un avis sur la prolongation du congé de maladie ordinaire, relève la description faite par Mme B... d'une " dégradation de sa situation professionnelle depuis une dizaine d'années avec des frictions (...) apparues suite à des déconvenances personnelles " et de "tensions professionnelles avec son responsable hiérarchique direct (...) le maire de la commune d'Ussac " et qu'un certificat médical établi le 15 décembre 2014 par un médecin du travail relève que Mme B... avait à plusieurs reprises exprimé une situation de " mal être au travail ". Dans ces conditions, le trouble anxio-dépressif réactionnel présenté par Mme B..., qui a justifié des arrêts de travail sans discontinuité à compter du 3 décembre 2014 à la suite d'une altercation du même jour avec le maire de la commune d'Ussac, est directement lié à l'environnement délétère, corroboré par deux attestations d'anciens collègues de Mme B... rédigées en 2014, dans lequel elle a exercé ses fonctions. En se bornant à se prévaloir d'un certificat médical délivré le 3 février 2015 par le médecin traitant de Mme B... selon lequel elle n'a jamais bénéficié de traitement psychiatrique ni présenté de signes de dépression malgré ses difficultés familiales et personnelles, d'attestations de tiers selon lesquelles Mme B... critiquait sa hiérarchie dans un registre parfois insolent, discourtois ou irrespectueux et d'un prétendu ressentiment de l'intéressée à son absence de promotion au grade de rédacteur, la collectivité n'établit ni l'existence d'une circonstance particulière antérieure et étrangère aux conditions de travail ni un fait personnel pouvant justifier l'existence de la maladie. Le trouble anxio-dépressif réactionnel en cause constitue donc une maladie professionnelle. Il s'ensuit que c'est à juste titre que le tribunal a estimé que Mme B... était fondée à soutenir que la décision du 15 juillet 2020 par laquelle le maire de la commune d'Ussac a refusé de reconnaître l'origine professionnelle de sa maladie et la décision du 12 novembre 2020 portant rejet de son recours gracieux sont entachées d'erreur d'appréciation. 18. Il résulte de ce qui précède que la commune d'Ussac n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a annulé la décision du 15 juillet 2020 et la décision du 12 novembre 2020. Sur les frais liés au litige : 19. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme B..., qui n'a pas dans la présente instance, la qualité de partie perdante, la somme que demande la commune d'Ussac au titre des frais qu'elle a exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de la commune d'Ussac une somme de 1 500 euros au titre des frais d'instance que Mme B... a exposés. D E C I D E : Article 1er : La requête de la commune d'Ussac est rejetée. Article 2 : La commune d'Ussac versera à Mme B... la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune d'Ussac et à Mme B.... Délibéré après l'audience du 11 février 2025 à laquelle siégeaient : Mme Fabienne Zuccarello, présidente de chambre, M. Nicolas Normand, président-assesseur, Mme Carine Farault, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 mars 2025. Le rapporteur, Nicolas A... Le présidente, Fabienne ZuccarelloLa greffière, Virginie Santana La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. 2 N° 23BX00552
Cours administrative d'appel
Bordeaux
CAA de LYON, 3ème chambre, 12/03/2025, 23LY02673, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du 2 mars 2021 par laquelle le directeur du centre hospitalier de Rives a refusé de reconnaître sa pathologie de l'épaule droite comme maladie professionnelle, et d'enjoindre au centre hospitalier de Rives de procéder à cette reconnaissance. Par un jugement n° 2102668 du 23 mai 2023, le tribunal administratif de Grenoble a annulé la décision du 2 mars 2021 et enjoint au centre hospitalier de Rives de reconnaître la pathologie de l'épaule droite de Mme A... comme maladie professionnelle, de reconstituer sa carrière et de lui verser le rappel de plein traitement auquel elle a droit à compter du 14 janvier 2020. Procédure devant la cour Par une requête, enregistrée le 17 août 2023, et un mémoire non communiqué, enregistré le 13 janvier 2025, le centre hospitalier de Rives, représenté par Me Cayla-Destrem, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 23 mai 2023 ; 2°) de rejeter la demande de Mme A... ; 3°) de mettre à la charge de Mme A... une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que la pathologie de Mme A... n'est pas imputable au service, dès lors que celle-ci s'est manifestée alors qu'elle était en arrêt de travail depuis un an, qu'elle est débutante et que les caractéristiques médicales pouvant aboutir à la reconnaissance d'une maladie professionnelle ne sont pas remplies. Par un mémoire en défense, enregistré le 5 mars 2024, Mme A..., représentée par Me Py, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge du centre hospitalier de Rives au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé. Par une ordonnance du 23 décembre 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 13 janvier 2025. Une note en délibéré, enregistrée le 18 février 2025, a été présentée pour Mme A.... Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général de la fonction publique ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ; - l'ordonnance du 19 janvier 2017 ; - le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ; - le code de justice administrative. Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience. Après avoir entendu au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Felmy, présidente-assesseure, - les conclusions de Mme Lordonné, rapporteure publique, - et les observations de Me Duca, représentant Mme A.... Considérant ce qui suit : 1. Mme B... A..., agent de service hospitalier durant trente-cinq ans, employée par le centre hospitalier de Rives, a été placée en congé de maladie du 10 janvier 2019 au 9 janvier 2020 en raison d'une arthrodèse " L4-S1 ". Elle a ensuite été placée en disponibilité d'office pour raisons de santé à compter du 10 janvier 2020. Le 6 février 2020, elle a demandé l'octroi d'un congé de longue maladie, au titre duquel la commission de réforme réunie le 2 février 2021 a émis un avis défavorable. Par une décision du 2 mars 2021, le centre hospitalier de Rives a rejeté la demande de reconnaissance de maladie professionnelle de Mme A... au titre de la pathologie de l'épaule dont elle souffre. Le centre hospitalier relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Grenoble a annulé cette décision et lui a enjoint de reconnaître la pathologie de l'épaule droite de Mme A... comme maladie professionnelle, de reconstituer sa carrière et de lui verser le rappel de plein traitement auquel elle avait droit à compter du 14 janvier 2020. Sur le bien-fondé du jugement : 2. En premier lieu, aux termes de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision du 4 février 2020, issue de l'ordonnance du 19 janvier 2017 : " (...) IV. - Est présumée imputable au service toute maladie désignée par les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale et contractée dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le fonctionnaire de ses fonctions dans les conditions mentionnées à ce tableau. / Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée par un tableau peut être reconnue imputable au service lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu'elle est directement causée par l'exercice des fonctions. (...) ". 3. L'article 10 de l'ordonnance du 19 janvier 2017 portant diverses dispositions relatives au compte personnel d'activité, à la formation et à la santé et la sécurité au travail dans la fonction publique a, en conséquence de l'institution du congé pour invalidité temporaire imputable au service à l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983, modifié des dispositions des lois du 11 janvier 1984, du 26 janvier 1984 et du 9 janvier 1986 régissant respectivement la fonction publique de l'Etat, la fonction publique territoriale et la fonction publique hospitalière. Le IV de l'article 10, pour la fonction publique hospitalière, dispose ainsi que " A l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 susvisée : a) Au deuxième alinéa du 2°, les mots : " ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions " sont remplacés par les mots : " à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service " ; b) Au 4°, le deuxième alinéa est supprimé ; c) Après le quatrième alinéa du 4°, est inséré un alinéa ainsi rédigé : " Les dispositions du quatrième alinéa du 2° du présent article sont applicables au congé de longue durée. ". L'application de ces dispositions résultant de l'ordonnance du 19 janvier 2017 était manifestement impossible en l'absence d'un texte réglementaire fixant, notamment, les conditions de procédure applicables à l'octroi de ce nouveau congé pour invalidité temporaire imputable au service. Les dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 ne sont donc entrées en vigueur, en tant qu'elles s'appliquent à la fonction publique hospitalière, qu'à la date d'entrée en vigueur, le 16 mai 2020, du décret du 13 mai 2020 relatif au congé pour invalidité temporaire imputable au service dans la fonction publique hospitalière, décret par lequel le pouvoir réglementaire a pris les dispositions réglementaires nécessaires pour cette fonction publique et dont l'intervention était, au demeurant, prévue, sous forme de décret en Conseil d'Etat, par le VI de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 résultant de l'article 10 de l'ordonnance du 19 janvier 2017. Il en résulte que les dispositions de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 dans leur rédaction antérieure à celle résultant de l'ordonnance du 19 janvier 2017 sont demeurées applicables jusqu'à l'entrée en vigueur du décret du 13 mai 2020 et, qu'en l'espèce, la reconnaissance de l'imputabilité au service de la maladie de la requérante, déclarée en 2019, qui a été demandée en février 2020, relèvent ainsi du droit antérieur à l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 19 janvier 2017. 4. Aux termes de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière : " Le fonctionnaire en activité a droit (...) / 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. Le bénéfice de ces dispositions est subordonné à la transmission par le fonctionnaire, à son administration, de l'avis d'arrêt de travail justifiant du bien-fondé du congé de maladie, dans un délai, et selon les sanctions, prévus en application de l'article 42. / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à sa mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident. / Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de la maladie ou de l'accident est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales. / (...) ". Les droits des agents publics en matière d'accident de service et de maladie professionnelle sont constitués à la date à laquelle l'accident est intervenu ou la maladie diagnostiquée. 5. Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service. 6. Pour annuler la décision en litige, le tribunal a considéré que Mme A... souffrait d'une perforation de la coiffe des rotateurs de l'épaule droite de 3 cm de diamètre intéressant le supraépineux, établie par l'arthroscanner réalisé le 14 janvier 2020. Il a ensuite retenu que l'expertise réalisée le 5 mars 2020 par le médecin généraliste, qui conclut à l'existence d'une tendinopathie débutante d'origine dégénérative ainsi qu'en attesterait un début de calcification, et à l'absence de lien direct avec l'activité professionnelle de Mme A..., était contredite par le certificat médical du 13 mai 2020 du médecin spécialiste en rhumatologie se prononçant en faveur de la reconnaissance de la maladie professionnelle et que le médecin de prévention, par un certificat médical du 24 juin 2020, a attesté que Mme A... réalisait des travaux comportant des mouvements ou un maintien de l'épaule sans soutien en abduction avec un angle supérieur ou égal à 60° pendant au moins deux heures par jour (aide au nursing, nettoyage, essuyage...) ou avec un angle supérieur ou égal à 90° pendant plus d'une heure par jour (nettoyage des vitres, miroirs, potence et éclairage des lits, étagères des placards en salle de pause...), travaux qui correspondent à ceux identifiés par le tableau n° 57 A des maladies professionnelles annexé au code de la sécurité sociale dans le cadre d'une rupture partielle ou transfixiante de la coiffe des rotateurs objectivée par IRM ou arthroscanner. Les premiers juges en ont ensuite conclu que, quand bien même Mme A... ne pouvait pas se prévaloir du tableau précité, le centre hospitalier ne contestait pas la nature des travaux effectués par elle, lesquels devaient être regardés, en l'espèce, comme étant directement à l'origine de la pathologie de l'intéressée. 7. Toutefois, d'une part, ainsi que le centre hospitalier de Rives le soutient, la pathologie de Mme A... s'est développée au cours des mois d'octobre ou novembre 2019, son médecin traitant ayant rédigé un certificat médical relatif à cette maladie le 5 décembre 2019. Sur ce point, le seul certificat du médecin rhumatologue du 25 octobre 2021 expliquant que les douleurs de Mme A... se sont aggravées en novembre 2018 n'est corroboré par aucune autre pièce versée au dossier permettant d'établir la survenance des douleurs dont l'intéressée se serait plainte avant novembre 2019 ni même le suivi opéré par ce spécialiste avant cette même année, la première attestation de celui-ci étant datée du 23 janvier 2020. Le compte-rendu d'échographie de l'épaule droite effectué le 24 février 2010, produit en appel, qui se borne à conclure à l'absence de rupture de coiffe et à une " probable périarthrite à un stade de tendinite débutante ", et ne retient pas le diagnostic de la maladie de Mme A... déclarée au cours du dernier trimestre 2019, ne suffit pas davantage à établir que ces douleurs se seraient déclarées avant la cessation des fonctions de Mme A... en janvier 2019. Ainsi, au moment de la manifestation de cette tendinopathie, dont le caractère débutant est d'ailleurs relevé, Mme A... était en congé de maladie depuis près de onze mois au titre d'une autre pathologie et n'exerçait pas ses fonctions. 8. D'autre part, le centre hospitalier de Rives fait encore valoir que Mme A... a occupé à partir du mois d'octobre 2013 un poste de nuit qui n'implique pas d'exercer les tâches que le médecin du travail a décrites, de " nettoyage des vitres, miroirs, potence et éclairage des lits, étagères des placards en salle de pause " ni d'aide au nursing, de nettoyage et d'essuyage pendant au moins deux heures par nuit avec un angle supérieur ou égal à 60°. Sur ce point, les attestations d'une collègue aide-soignante de la requérante des 20 et 21 octobre 2023, qui n'ont au demeurant pas été rédigées dans les formes requises, décrivant les tâches qui incombaient à Mme A... jusqu'en 2016 seulement, consistant en l'entretien des locaux et l'assistance dans les tâches d'aide-soignante, ne permettent pas d'établir que les travaux effectués par Mme A... relèveraient de ceux décrits par le médecin du travail. 9. Il résulte des deux points précédent, alors que le médecin expert a relevé que la pathologie de la rupture de coiffe n'est pas imputable au service dans la mesure où l'arthroscanner " montre un conflit sous acromial net, c'est à dire des lésions dégénératives arthrosiques expliquant la fissuration du susépineux ", et que la commission de réforme a émis un avis défavorable en estimant qu'il ne peut être reconnu de lien direct entre la symptomatologie de l'agent et son activité professionnelle, que la condition de lien direct entre la pathologie dont souffre Mme A... et l'exercice de ses fonctions, au sens des dispositions rappelées au point 4, n'est pas remplie. Il s'ensuit que c'est à tort que le tribunal administratif de Grenoble a retenu qu'en refusant, par la décision attaquée du 2 mars 2021, de reconnaître la pathologie de Mme A... comme maladie professionnelle, le centre hospitalier de Rives a commis une erreur d'appréciation. 10. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par Mme A... à l'encontre de la décision contestée. 11. En premier lieu, aux termes de l'article 3 de l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière, la commission de réforme comprend " (...) 1. Deux praticiens de médecine générale, auxquels est adjoint, s'il y a lieu, pour l'examen des cas relevant de sa compétence, un médecin spécialiste qui participe aux débats mais ne prend pas part aux votes (...) ". D'autre part, aux termes de l'article 16 du même arrêté : " La commission de réforme doit être saisie de tous témoignages, rapports et constatations propres à éclairer son avis. Elle peut faire procéder à toutes mesures d'instructions, enquêtes et expertises qu'elle estime nécessaires. / Dix jours au moins avant la réunion de la commission, le fonctionnaire est invité à prendre connaissance, personnellement ou par l'intermédiaire de son représentant, de son dossier, dont la partie médicale peut lui être communiquée, sur sa demande, ou par l'intermédiaire d'un médecin ; il peut présenter des observations écrites et fournir des certificats médicaux. / La commission entend le fonctionnaire, qui peut se faire assister d'un médecin de son choix. Il peut aussi se faire assister par un conseiller ". Il résulte de ces dispositions que, dans les cas où il est manifeste, au vu des éléments dont dispose la commission de réforme, que la présence d'un médecin spécialiste de la pathologie invoquée par un agent est nécessaire pour éclairer l'examen de son cas lorsque les membres de la commission n'avaient pas déjà été éclairés par un médecin spécialiste, l'absence d'un tel spécialiste doit être regardée comme privant l'intéressé d'une garantie et comme entachant la procédure devant la commission d'une irrégularité justifiant l'annulation de la décision attaquée. 12. Si Mme A... soutient que la décision de refus de reconnaissance de l'imputabilité au service de sa pathologie serait entachée d'un vice de procédure en ce qu'aucun médecin spécialiste de sa pathologie n'était présent à la séance de la commission de réforme, il ressort des pièces du dossier que les membres de cette commission disposaient d'un rapport d'expertise excluant l'imputabilité au service de la pathologie de Mme A..., et de deux rapports du spécialiste en rhumatologie susmentionné des 23 janvier 2020 et 13 mai 2020, ce dernier étant rédigé en réponse au rapport d'expertise. Par suite, il n'était pas manifeste que la présence d'un médecin spécialiste aurait été nécessaire pour éclairer l'examen de la situation de l'intéressée. Le moyen tiré du vice de procédure doit donc être écarté. 13. En deuxième lieu, il ne résulte ni des termes de la décision en litige ni des pièces du dossier que le directeur du centre hospitalier de Rives se serait cru lié par l'avis de la commission de réforme dès lors que celui-ci, en indiquant suivre cet avis, doit être regardé comme s'en étant approprié les termes. Le moyen tiré de l'erreur de droit doit donc être également écarté. 14. Il résulte de tout ce qui précède que le centre hospitalier de Rives est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé la décision du 2 mars 2021 par laquelle son directeur a refusé de reconnaître la pathologie de l'épaule droite de Mme A... comme une maladie professionnelle. Sur les frais liés au litige : 15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de Mme A... présentées sur leur fondement et dirigées contre le centre hospitalier de Rives, qui n'est pas la partie perdante à la présente instance. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions formulées par le centre hospitalier de Rives sur le fondement des mêmes dispositions. D É C I D E : Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 23 mai 2023 est annulé. Article 2 : La demande présentée par Mme A... devant le tribunal administratif de Grenoble et ses conclusions d'appel sont rejetées. Article 3 : Les conclusions du centre hospitalier de Rives présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au centre hospitalier de Rives. Délibéré après l'audience du 18 février 2025 à laquelle siégeaient : M. Jean-Yves Tallec, président de chambre, Mme Emilie Felmy, présidente-assesseure, Mme Vanessa Rémy-Néris, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 mars 2025. La rapporteure, Emilie FelmyLe président, Jean-Yves Tallec La greffière, Péroline Lanoy La République mande et ordonne au préfet de l'Isère en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, 2 N° 23LY02673
Cours administrative d'appel
Lyon
CAA de LYON, 3ème chambre, 12/03/2025, 23LY02456, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure Par deux requêtes distinctes, Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'une part, d'annuler la décision du 4 février 2020 par laquelle le directeur du centre hospitalier Cœur du Bourbonnais a décidé de la placer en congé de maladie ordinaire à compter du 1er novembre 2019 et d'enjoindre au directeur de ce centre de reconnaître l'imputabilité au service de sa pathologie lombaire, d'autre part, d'annuler la décision du 14 décembre 2020, par laquelle le directeur du même centre hospitalier a décidé de la placer en disponibilité d'office pour une durée de six mois à compter du 1er novembre 2020. Par un jugement n° 2001358-2100288 du 25 mai 2023, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté ses demandes. Procédure devant la cour Par une requête, enregistrée le 25 juillet 2023, et un mémoire en réplique qui n'a pas été communiqué, enregistré le 17 décembre 2024, Mme A..., représentée par Me Tachon, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 25 mai 2023 ; 2°) d'annuler les décisions des 4 février 2020 et 1er novembre 2020 du directeur du centre hospitalier Cœur du Bourbonnais ; 3°) d'ordonner une expertise médicale ; 4°) d'enjoindre au directeur du centre hospitalier Cœur du Bourbonnais de la placer en congé de longue durée pour maladie imputable au service à compter du 1er novembre 2019 ; 5°) de mettre à la charge du centre hospitalier Cœur du Bourbonnais une somme de 4 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - sa maladie doit être prise en charge au titre de la maladie imputable au service et l'administration a ainsi commis une erreur manifeste d'appréciation ; - son état s'est gravement détérioré en 2020, il n'était donc pas consolidé à la date retenue ; - son état anxio-dépressif constitue une " maladie mentale " au sens des dispositions de l'article 34 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - elle n'a pas été informée de la saisine du comité médical ni de ses droits préalablement à la décision de mise en disponibilité d'office ; - dès lors qu'elle ne pouvait être placée en congé de maladie non imputable au service, la décision la plaçant en disponibilité d'office est également entachée d'erreur manifeste d'appréciation. Par un mémoire en défense, enregistré le 2 janvier 2024, le centre hospitalier Cœur du Bourbonnais, représenté par la SELAS Seban Auvergne, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de Mme A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé. Par une ordonnance du 3 décembre 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 17 décembre 2024. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général de la fonction publique ; - le code de la santé publique ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ; - l'ordonnance du 19 janvier 2017 ; - le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ; - le décret n° 2020-566 du 13 mai 2020 ; - le code de justice administrative. Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience. Après avoir entendu au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Felmy, présidente-assesseure, - les conclusions de Mme Lordonné, rapporteure publique, - les observations de Me Tachon, représentant Mme A..., et celles de Me Bardy, représentant le centre hospitalier Cœur du Bourbonnais. Considérant ce qui suit : 1. Mme B... A..., aide-soignante au centre hospitalier Cœur du Bourbonnais depuis 2010, a été titularisée dans ces fonctions en 2012. A la suite d'une dénonciation de faits de violence prétendus par l'un de ses collègues, qui a donné lieu à des poursuites judiciaires au terme desquelles Mme A... a été relaxée par un jugement du tribunal de grande instance de Cusset le 26 septembre 2017, celle-ci a été placée en congé de maladie imputable au service à compter du 27 mars 2017 et jusqu'au 31 octobre 2019 par deux décisions successives des 18 juin et 20 septembre 2019. A la suite de l'avis de la commission de réforme hospitalière de l'Allier du 22 janvier 2020, son état a été considéré comme consolidé à compter du 30 octobre 2019, et elle a été placée en congé de maladie ordinaire à partir du 1er novembre 2019 par une décision du 4 février 2020 du directeur du centre hospitalier Cœur du Bourbonnais. Par une seconde décision du 14 décembre 2020, elle a été placée en disponibilité d'office pour une durée de six mois à compter du 1er novembre 2020. Mme A... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 4 février 2020 en tant que le directeur du centre hospitalier a décidé de ne plus prendre en charge les soins au titre de sa maladie à compter du 1er novembre 2019 et de ne pas la placer en congé de maladie imputable au service à compter de cette dernière date, et de la décision du 14 décembre 2020. Sur le bien-fondé du jugement : 2. En premier lieu, aux termes de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision du 4 février 2020, issue de l'ordonnance du 19 janvier 2017 : " (...) IV. -Est présumée imputable au service toute maladie désignée par les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale et contractée dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le fonctionnaire de ses fonctions dans les conditions mentionnées à ce tableau. / Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée par un tableau peut être reconnue imputable au service lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu'elle est directement causée par l'exercice des fonctions. (...) ". 3. L'article 10 de l'ordonnance du 19 janvier 2017 portant diverses dispositions relatives au compte personnel d'activité, à la formation et à la santé et la sécurité au travail dans la fonction publique a, en conséquence de l'institution du congé pour invalidité temporaire imputable au service à l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983, modifié des dispositions des lois du 11 janvier 1984, du 26 janvier 1984 et du 9 janvier 1986 régissant respectivement la fonction publique de l'Etat, la fonction publique territoriale et la fonction publique hospitalière. Le IV de l'article 10, pour la fonction publique hospitalière, dispose ainsi que " A l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 susvisée : a) Au deuxième alinéa du 2°, les mots : " ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions " sont remplacés par les mots : "à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service " ; b) Au 4°, le deuxième alinéa est supprimé ; c) Après le quatrième alinéa du 4, est inséré un alinéa ainsi rédigé : " Les dispositions du quatrième alinéa du 2° du présent article sont applicables au congé de longue durée. ". L'application de ces dispositions résultant de l'ordonnance du 19 janvier 2017 était manifestement impossible en l'absence d'un texte réglementaire fixant, notamment, les conditions de procédure applicables à l'octroi de ce nouveau congé pour invalidité temporaire imputable au service. Les dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 ne sont donc entrées en vigueur, en tant qu'elles s'appliquent à la fonction publique hospitalière, qu'à la date d'entrée en vigueur, le 16 mai 2020, du décret du 13 mai 2020 relatif au congé pour invalidité temporaire imputable au service dans la fonction publique hospitalière, décret par lequel le pouvoir réglementaire a pris les dispositions réglementaires nécessaires pour cette fonction publique et dont l'intervention était, au demeurant, prévue, sous forme de décret en Conseil d'Etat, par le VI de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 résultant de l'article 10 de l'ordonnance du 19 janvier 2017. Il en résulte que les dispositions de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 dans leur rédaction antérieure à celle résultant de l'ordonnance du 19 janvier 2017 sont demeurées applicables jusqu'à l'entrée en vigueur du décret du 13 mai 2020 et, qu'en l'espèce, la reconnaissance de l'imputabilité au service de la maladie de la requérante, déclarée le 27 mars 2017, relèvent ainsi du droit antérieur à l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 19 janvier 2017. 4. Aux termes de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière : " Le fonctionnaire en activité a droit (...) / 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. Le bénéfice de ces dispositions est subordonné à la transmission par le fonctionnaire, à son administration, de l'avis d'arrêt de travail justifiant du bien-fondé du congé de maladie, dans un délai, et selon les sanctions, prévus en application de l'article 42. / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à sa mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident. / Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de la maladie ou de l'accident est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales. / (...) / 4° A un congé de longue durée, en cas de tuberculose, maladie mentale, affection cancéreuse, poliomyélite ou déficit immunitaire grave et acquis, de trois ans à plein traitement et de deux ans à demi-traitement. Le fonctionnaire conserve ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. / Si la maladie ouvrant droit à congé de longue durée a été contractée dans l'exercice des fonctions, les périodes fixées ci-dessus sont respectivement portées à cinq ans et trois ans. / (...) ". Les droits des agents publics en matière d'accident de service et de maladie professionnelle sont constitués à la date à laquelle l'accident est intervenu ou la maladie diagnostiquée. 5. Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service. En outre, en cas de maladie imputable au service, le fonctionnaire a droit au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie, y compris, le cas échéant, s'ils sont exposés postérieurement à la date de consolidation constatée par l'autorité compétente. La date de consolidation correspond au moment où les lésions se fixent et acquièrent un caractère permanent, permettant d'apprécier un taux d'incapacité permanente partielle qui a résulté d'une pathologie ou d'un accident. La consolidation de l'état de santé ne peut, en revanche, être assimilée à la guérison et ne constitue pas davantage une circonstance impliquant nécessairement la fin des soins nécessités par cette pathologie ou cet accident. 6. D'une part, l'avis de la commission de réforme hospitalière de l'Allier du 22 janvier 2020 précise que " la date de la consolidation de la maladie imputable au service du 27/03/2017 est fixée au 30/10/2019 sans IPP. Il n'y a pas nécessité de soins post-consolidation. L'agent est inapte à son poste dans l'établissement ". Il ressort en outre des conclusions du rapport d'examen médical effectué par l'expert en psychiatrie à la demande du comité médical départemental de l'Allier, du 25 novembre 2019, que ce praticien a considéré que Mme A... souffrait d'une névropathie secondaire à un stress post-traumatique professionnel, et que son état était consolidé à la date du 8 juillet 2019. Contrairement à ce que le tribunal a retenu, la consolidation de l'état de santé de Mme A..., qui résulte seulement du constat de l'absence d'aggravation de cet état de santé à compter de la date déterminée, impliquant que les préjudices résultant de la maladie sont susceptibles d'être, à cette date, évalués et réparés y compris pour l'avenir, n'implique ni la disparition du lien entre la maladie et le service, ni le refus de reconnaissance de son imputabilité au service. Il ressort en revanche de ces mêmes conclusions expertales que la névropathie exprimée par Mme A... est liée au stress que celle-ci a subi dans le contexte professionnel. Ainsi, le lien direct entre la maladie et le service doit être retenu, l'administration ne faisant valoir par ailleurs aucune autre circonstance de nature à détacher la maladie du service. Par suite, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens invoqués à l'encontre de la décision du 4 février 2020 ni d'ordonner une expertise, Mme A... est fondée à soutenir que le directeur du centre hospitalier a commis une erreur d'appréciation en refusant de reconnaître l'imputabilité de sa pathologie au service à compter du 1er novembre 2019. 7. D'autre part, si Mme A... soutient que l'administration a commis une erreur d'appréciation de la date de consolidation de son état de santé, elle n'apporte au soutien de cette contestation aucun document ni élément, notamment de nature médicale, permettant d'apprécier l'erreur que le centre hospitalier aurait commise, alors qu'il résulte de l'avis de la commission de réforme et des conclusions de l'expert médical que cette date a été fixée au plus tard le 30 octobre 2019. La circonstance que, postérieurement à la décision attaquée, Mme A... a été admise à l'hôpital au cours des mois de mars et avril 2020 en raison d'une dégradation de son état, ne saurait révéler une erreur d'appréciation de la situation de celle-ci à la date de la décision attaquée. 8. En deuxième lieu, aux termes de l'article 62 de la loi du 9 janvier 1986 relative à la fonction publique hospitalière : " La disponibilité est prononcée soit à la demande de l'intéressé, soit d'office à l'expiration des congés prévus au 2°) ...de l'article 41 (...) ". Aux termes de l'article 17 du décret du 19 avril 1988 relatif aux conditions d'aptitude physique et aux congés de maladie des agents de la fonction publique hospitalière, dans sa rédaction issue du décret du 27 novembre 2006, en vigueur jusqu'à l'intervention du décret du 5 octobre 2011 : " (...) Lorsqu'un fonctionnaire a obtenu pendant une période de douze mois consécutifs des congés de maladie d'une durée totale de douze mois, il ne peut, à l'expiration de sa dernière période de congé, reprendre son service qu'après l'avis favorable du comité médical. / Si l'avis du comité médical est défavorable, le fonctionnaire est soit mis en disponibilité, soit, s'il le demande, reclassé dans un autre emploi, soit, s'il est reconnu définitivement inapte à l'exercice de tout emploi, admis à la retraite après avis de la commission de réforme des agents des collectivités locales. 9. Il résulte des motifs retenus au point 6 que la décision refusant de reconnaître l'imputabilité de la maladie de Mme A... au service après la date de consolidation fixée au 30 octobre 2019 devant être annulée du fait de l'erreur d'appréciation commise par l'administration, la décision prononçant sa disponibilité d'office à compter du 1er novembre 2020 est, par voie de conséquence et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les moyens invoqués à l'encontre de cette décision, également entachée d'erreur d'appréciation. 10. En troisième lieu, si la requérante soutient que l'administration a commis une erreur en ne retenant aucun taux d'incapacité permanente partielle l'affectant, elle se borne à évoquer la carence de l'expert sur ce point et n'articule aucun moyen au soutien de cette décision. 11. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... est seulement fondée à soutenir que la décision du 4 février 2020, en tant qu'elle décide de la placer en congé de maladie ordinaire et oppose un refus de prise en charge des soins au titre de sa maladie à compter du 1er novembre 2019 ainsi que celle prononçant sa disponibilité d'office à compter du 1er novembre 2020, sont entachées d'illégalité et doivent être annulées, et que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande dans cette mesure. Sur les conclusions à fin d'injonction : 12. L'annulation, par le présent arrêt, de la décision du 4 février 2020 par laquelle le directeur du centre hospitalier Cœur du Bourbonnais a décidé de placer Mme A... en congé de maladie ordinaire à compter du 1er novembre 2019 et de la décision du 14 décembre 2020 par laquelle cette même autorité a décidé de la placer en disponibilité d'office pour une durée de six mois à compter du 1er novembre 2020, implique nécessairement qu'il soit enjoint au directeur du centre hospitalier de placer la requérante en congé de maladie imputable au service à compter du 1er novembre 2019 et jusqu'à la date qui sera déterminée, le cas échéant, après avis de la commission départementale de réforme de l'Allier. Sur les frais liés au litige : 13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions du centre hospitalier Cœur du Bourbonnais présentées sur leur fondement et dirigées contre la requérante, qui n'est pas la partie perdante à la présente instance. Il a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions formulées par cette dernière sur le fondement des mêmes dispositions et de mettre à la charge du centre hospitalier Cœur du Bourbonnais une somme de 2 000 euros. D É C I D E : Article 1er : La décision du directeur du centre hospitalier Cœur du Bourbonnais du 4 février 2020, en tant qu'elle oppose un refus de prise en charge des soins de Mme A... au titre de sa maladie à compter du 1er novembre 2019 et son placement en congé de maladie imputable au service à compter de cette dernière date, ainsi que la décision de cette même autorité du 14 décembre 2020 sont annulées. Article 2 : Il est enjoint au directeur du centre hospitalier Cœur du Bourbonnais de reconnaître l'imputabilité au service de la maladie de Mme A... postérieurement à la date de consolidation de son état de santé le 30 octobre 2019, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 25 mai 2023 est réformé en ce qu'il a de contraire aux articles 1er et 2. Article 4 : Le centre hospitalier Cœur du Bourbonnais versera à Mme A... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête et les conclusions du centre hospitalier Cœur du Bourbonnais présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés. Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au centre hospitalier Cœur du Bourbonnais. Délibéré après l'audience du 18 février 2025 à laquelle siégeaient : M. Jean-Yves Tallec, président de chambre, Mme Emilie Felmy, présidente-assesseure, Mme Vanessa Rémy-Néris, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 mars 2025. La rapporteure, Emilie FelmyLe président, Jean-Yves TallecLa greffière, Péroline Lanoy La République mande et ordonne au préfet de l'Allier en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, 2 N° 23LY02456
Cours administrative d'appel
Lyon
CAA de NANTES, 6ème chambre, 18/03/2025, 24NT01440, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler la décision du 13 juin 2022 par laquelle la rectrice de la région académique Normandie a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de sa maladie pour les périodes du 7 au 22 novembre 2019, du 3 au 30 novembre 2020, du 1er au 25 juin 2021 et du 7 mars au 31 août 2022. Par un jugement n°2201553 du 15 mars 2024, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 16 mai 2024 et un mémoire enregistré le 19 février 2025 qui n'a pas été communiqué, Mme B..., représentée par Me Cavelier, demande à la cour : 1°) l'annulation du jugement du 15 mars 2024 du tribunal administratif de Caen ; 2°) l'annulation de la décision du 13 juin 2022 par laquelle la rectrice de la région académique Normandie a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de sa maladie pour les périodes du 7 au 22 novembre 2019, du 3 au 30 novembre 2020, du 1er au 25 juin 2021 et du 7 mars au 31 août 2022 ; 3°) d'enjoindre à la rectrice de la région académique Normandie de réexaminer sa situation, dans un délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la décision en litige est insuffisamment motivée ; - c'est à tort que le tribunal a estimé, en se fondant sur deux enquêtes administratives, qu'elle aurait eu un rôle majeur dans le contexte conflictuel à l'origine de son syndrome anxiodépressif : * l'enquête administrative initiale était partiale et mensongère ; * l'enquête administrative complémentaire a confirmé les conclusions de la première et aucun fait dénoncé dans l'enquête initiale n'a finalement été vérifié ; * elles sont critiquables sur la méthodologie, sur les accusations non vérifiées relevées à son encontre et au regard du choix délibéré des parents d'élèves ayant témoigné ; * les accusations de maltraitances venaient de ses collègues et il ne saurait lui être reproché de se défendre face à de telles accusations ; - elle est entachée d'un détournement de pouvoir. Par un mémoire en défense, enregistré le 10 février 2025, la rectrice de la région académique Normandie conclut au rejet de la requête. Elle fait valoir que les moyens soulevés par Mme B... ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des relations entre le public et l'administration ; - le code général de la fonction publique ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Pons, - les conclusions de Mme Bailleul, rapporteure publique, - et les observations de Me Cavelier pour Mme B.... Une note en délibéré, enregistrée le 03 mars 2025, a été produite pour Mme B.... Considérant ce qui suit : 1. Mme B..., professeure des écoles depuis 2002, a été affectée au mois de septembre 2015 à l'école maternelle de C..., qui comporte trois classes et où elle était chargée de la classe moyenne section/grande section. Elle a été placée en congé maladie du 7 au 22 novembre 2019, du 3 au 30 novembre 2020, du 8 mars au 22 avril 2021, du 1er au 25 juin 2021 et du 7 mars au 31 août 2022. Par une déclaration du 23 avril 2021, l'intéressée a demandé la reconnaissance comme maladie professionnelle du syndrome anxiodépressif dont elle est victime et qui a justifié ses arrêts de travail. Par une décision du 13 juin 2022, la rectrice de la région académique Normandie a rejeté la demande d'imputabilité au service de la maladie de la requérante. Mme B... a alors demandé au tribunal administratif de Caen l'annulation de cette décision. Par un jugement du 15 mars 2024, dont Mme B... relève appel, le tribunal a rejeté sa demande. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 2. En premier lieu, il y a lieu d'écarter le moyen selon lequel la décision du 13 juin 2022 est insuffisamment motivée, par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal dans les points 3 à 6 du jugement attaqué. 3. En deuxième lieu et d'une part, aux termes de l'article L. 822-21 du code général de la fonction publique : " Le fonctionnaire en activité a droit à un congé pour invalidité temporaire imputable au service lorsque son incapacité temporaire de travail est consécutive à : / 3° Une maladie contractée en service telle qu'elle est définie à l'article L. 822-20 ". Aux termes de l'article L. 822-20 du même code : " (...) Peut (...) être reconnue imputable au service une maladie non désignée dans les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu'elle est essentiellement et directement causée par l'exercice des fonctions et qu'elle entraîne une incapacité permanente à un taux déterminé et évalué dans les conditions prévues par décret en Conseil d'Etat ". ". 4. D'autre part, aux termes de l'article 47-8 du décret du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires, alors en vigueur : " Le taux d'incapacité permanente servant de seuil pour l'application du troisième alinéa du même IV est celui prévu à l'article R. 461-8 du code de la sécurité sociale. / Ce taux correspond à l'incapacité que la maladie est susceptible d'entraîner... Il est déterminé par le conseil médical compte tenu du barème indicatif d'invalidité annexé au décret pris en application du quatrième alinéa de l'article L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite ". Aux termes de l'article R. 461-8 du code de la sécurité sociale : " Le taux d'incapacité mentionné au quatrième alinéa de l'article L. 461-1 est fixé à 25 % ". 5. Le syndrome anxiodépressif réactionnel à l'origine des arrêts de travail prescrits à Mme B... n'est pas mentionné par les tableaux de maladies professionnelles mentionnées aux articles L.461-1 et suivants du code de la sécurité sociale. Par suite, pour être reconnu imputable au service, il doit être susceptible d'entraîner un taux d'incapacité permanente partielle (IPP) d'au moins 25% et présenter un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service. 6. Il ressort des pièces du dossier que le climat relationnel au sein de l'équipe pédagogique de l'école maternelle où était affectée Mme B... s'est progressivement dégradé au cours de l'année scolaire 2019-2020 et a conduit à l'organisation de réunions entre les enseignants et leur hiérarchie. Une première enquête administrative a été menée le 7 septembre 2020 par l'inspecteur départemental de la circonscription et par la déléguée aux ressources humaines de la direction académique des services de l'éducation nationale (DASEN) du Calvados puis, compte tenu d'éléments nouveaux portés à la connaissance de l'adjoint au DASEN, un complément d'enquête confié à deux inspecteurs ne relevant pas de la circonscription de C... a été organisé les 7 et 8 décembre 2020. Ainsi, à compter de l'année 2019, Mme B... a été confrontée à un contexte professionnel très tendu, marqué par des relations conflictuelles avec les autres enseignantes de l'établissement, qui se sont notamment traduites par une remise en cause de ses méthodes et pratiques professionnelles et ont conduit à l'engagement d'une procédure administrative au sein de l'établissement. Mme B... a produit un rapport d'expertise établi par un médecin psychiatre le 5 novembre 2021 qui indique qu'elle " a présenté un état anxiodépressif réactionnel sévère en lien avec le service ", que "la maladie est essentiellement et directement causée par l'exercice des fonctions ". Le médecin psychiatre a également évalué le taux d'incapacité partielle susceptible d'être causé par la maladie à 25%. Ce rapport d'expertise est corroboré par un avis du médecin de prévention du 24 février 2022 qui relève que Mme B... ne présente aucun antécédent médical particulier notamment psychiatrique, qu'elle bénéficie d'un bon soutien familial, qu'au cours des consultations, son état de santé a été jugé " fortement dégradé" et que celui-ci " paraît essentiellement et directement en lien avec l'exercice de ses fonctions ", " en l'absence d'état antérieur et d'évènement de vie personnelle signalés ". Enfin, le 30 mars 2022, la commission de réforme a rendu un avis favorable à la reconnaissance de la maladie contractée dans l'exercice des fonctions. Dans ces conditions, eu égard à l'absence d'état anxiodépressif antérieur de l'intéressée, à la situation conflictuelle qu'elle a connue au sein de l'établissement, et en l'état des avis médicaux étayant l'existence d'un lien direct entre l'activité professionnelle et le syndrome anxiodépressif dont elle est atteinte, la pathologie dont souffre Mme B... peut être regardée comme présentant un lien direct avec l'exercice de ses fonctions. 7. Toutefois, il ressort des pièces du dossier, et notamment d'un compte rendu de la réunion du 20 novembre 2020 qui s'est tenue à la suite d'une alerte du maire de C... sur le contexte professionnel dégradé au sein de l'école maternelle de C..., à l'initiative de l'adjoint au directeur académique des services de l'éducation nationale chargé du premier degré, que : " Mme B... fait cavalier seul et fait en sorte que toute situation se termine en blocage (...) ", selon l'adjoint au maire de la commune. Une parente d'élève confirme : " (...) il y a moins de tension lorsque Mme B... est absente. L'ambiance est plus détendue, son absence soulage les autres ". Les relations difficiles de l'intéressée avec trois enseignantes de l'établissement ont contribué au climat général de tension au sein de l'école maternelle et plusieurs signalements portés sur le registre santé et sécurité au travail évoquent des mises en cause répétées concernant le travail de la directrice de l'école maternelle : " de la part d'une enseignante de l'école ". Si l'intéressée produit des attestations favorables établies par l'ancienne directrice de l'établissement, deux anciennes collègues et des parents d'élèves, il ressort du rapport de l'enquête administrative conduite le 7 septembre 2020 par l'inspecteur départemental de la circonscription et par la déléguée aux ressources humaines de la direction académique des services de l'éducation nationale du Calvados ainsi que du complément d'enquête confié à deux inspecteurs ne relevant pas de la circonscription de C... les 7 et 8 décembre 2020, lesquels ont été établis sur la base des témoignages des représentants de parents d'élèves, que Mme B... a, par son comportement, eu un rôle déterminant dans le contexte conflictuel qu'a connu l'établissement, notamment dans les tensions constatées avec certains parents d'élèves, le rapport complémentaire relevant que " la majorité des témoignages indique que Mme B... est le dénominateur commun " des difficultés constatées. Enfin, contrairement à ce qui est allégué par la requérante, aucun élément au dossier ne permet d'affirmer que les enquêtes administratives diligentées par l'administration auraient été partiales et mensongères. Dans ces conditions, si le syndrome anxiodépressif de Mme B... présente un lien direct avec son activité professionnelle, son comportement a participé à la création puis au maintien de tensions prolongées au sein de l'établissement dans lequel elle travaillait et a joué un rôle déterminant dans les conditions de travail dégradées dont elle a été victime à l'origine du syndrome anxiodépressif dont elle souffre, constitutif d'un fait personnel de nature à détacher la maladie du service. 8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par voie de conséquence, qu'être rejetées. DÉCIDE : Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et à la ministre d'État, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Une copie en sera adressée à la rectrice de la région académique Normandie. Délibéré après l'audience du 28 février 2025, à laquelle siégeaient : - M. Gaspon, président de chambre, - M. Coiffet, président-assesseur, - M. Pons, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 mars 2025. Le rapporteur, F. PONS Le président, O. GASPON La greffière, I. PETTON La République mande et ordonne à la ministre d'État, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 24NT01440
Cours administrative d'appel
Nantes
CAA de VERSAILLES, 2ème chambre, 18/03/2025, 23VE01750, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : I. Sous le numéro 2101225, Mme B... A... a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler le titre exécutoire émis à son encontre par la trésorerie d'Orléans municipale Sud Loire le 16 novembre 2016 d'un montant de 6 444,31 euros, ainsi que la saisie administrative à tiers détenteur notifiée par la trésorerie d'Orléans municipale et métropole le 4 février 2021 d'un montant de 375,55 euros, de prononcer la décharge de son obligation de payer la somme de 6 444,31 euros et de condamner la commune d'Olivet à lui rembourser la somme de 6 444,31 euros. II. Sous le numéro 2102910, Mme A... a demandé au même tribunal de condamner la commune d'Olivet à lui verser une somme de 10 935,66 euros en réparation des préjudices subis en raison de l'illégalité prétendue de la procédure de répétition d'indu entreprise par la commune et d'enjoindre à la commune d'Olivet de lui verser la somme précitée, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à l'expiration d'un délai d'un mois suivant la date du jugement à intervenir. Par un jugement n° 2101225 et 2102910 du 11 mai 2023, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté les conclusions de la requête n° 2101225 tendant à l'annulation de la saisie administrative à tiers détenteur notifiée le 4 février 2021, ainsi que les conclusions de la requête n° 2102910 tendant à l'indemnisation des préjudices résultant de la méconnaissance par la commune d'Olivet de l'interdiction des procédures d'exécution consécutivement à la recevabilité de sa demande en traitement de sa situation d'endettement par la voie du surendettement comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître, a condamné la commune d'Olivet à verser à Mme A... la somme de 2 500 euros et a rejeté le surplus de ces conclusions. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire enregistrés le 25 juillet 2023 et le 1er février 2025, Mme A..., représentée par Me Nuret, avocat, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il rejette ses conclusions tendant au remboursement du trop-perçu de rémunération à titre de réparation d'un préjudice financier comme irrecevables ; 2°) de condamner la commune d'Olivet à lui verser la somme correspondant aux traitements nets récupérés et à verser à la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales les cotisations y afférentes ; 3°) d'enjoindre au maire de la commune d'Olivet de lui rembourser cette somme, sous astreinte de 100 euros par jour suivant la mise à disposition de l'arrêt ; 4°) et de mettre à la charge de la commune d'Olivet la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Mme A... soutient que : - le jugement est entaché d'une erreur de droit en tant qu'il déclare irrecevables ses conclusions tendant au remboursement du trop-perçu de rémunération à titre de réparation d'un préjudice financier ; - son recours indemnitaire rejeté implicitement n'a pas la même portée que sa demande d'annulation du titre de recette du 16 novembre 2016, faisant ainsi échec à l'application de la jurisprudence du Conseil d'Etat du 9 mars 2018, communauté de communes du pays roussillonnais, n° 405355 ; - le titre de recette du 16 novembre 2016 ne présente pas un caractère purement pécuniaire dès lors qu'il emporte également des effets juridiques sur sa situation statutaire. Par un courrier du 15 décembre 2023, le président de la 6ème chambre de la cour a, sur la demande exprimée par Mme A... par un courrier enregistré le 22 novembre 2023, proposé au maire de la commune d'Olivet l'organisation d'une mission de médiation pour tenter de parvenir à un accord entre les parties. Par une lettre enregistrée le 14 mars 2024, le maire de la commune d'Olivet a refusé cette proposition. La requête a été communiquée à la commune d'Olivet qui n'a pas produit de défense. Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 18 juin 2024. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - le code général des collectivités territoriales ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Aventino, - les conclusions de M. Frémont, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. Mme B... A... a été recrutée par la commune d'Olivet le 27 janvier 1999 en tant qu'adjointe administrative de deuxième classe titulaire. Elle a été placée en congé de maladie à compter de l'année 2011, puis en congé de longue durée. La commission de réforme a émis un avis favorable à sa mise à la retraite pour invalidité le 3 septembre 2015. Le maire de la commune d'Olivet a, par un arrêté du 5 janvier 2016, placé Mme A... en retraite pour invalidité à compter du 4 septembre 2015. Elle s'est vu notifier un brevet de pension par la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL) le 6 juillet 2016, laquelle a été liquidée à compter du 4 septembre 2015. La trésorerie d'Orléans municipale Sud Loire a émis à l'encontre de Mme A... un titre exécutoire le 16 novembre 2016, d'un montant de 6 444,31 euros, correspondant à un indu de demi-traitements perçu entre le 4 septembre 2015 et le 6 juillet 2016. Mme A... a adressé à la commune d'Olivet, le 9 avril 2021, une réclamation indemnitaire tendant au versement d'une somme de 10 517,70 euros à titre d'indemnité fondée sur l'engagement de la responsabilité de la commune du fait de l'illégalité de la procédure de répétition d'indu entreprise. Le silence gardé par la commune d'Olivet pendant une durée de deux mois a fait naître une décision implicite de rejet de cette demande. Mme A... fait appel du jugement n° 2101225 et 2102910 du 11 mai 2023 en tant qu'il rejette ses conclusions indemnitaires tendant à la réparation de son préjudice financier lié au remboursement illégal du trop-perçu de rémunération. Sur la régularité du jugement attaqué : 2. D'une part, le principe de sécurité juridique, qui implique que ne puissent être remises en cause sans condition de délai des situations consolidées par l'effet du temps, fait obstacle à ce que puisse être contestée indéfiniment une décision administrative individuelle qui a été notifiée à son destinataire, ou dont il est établi, à défaut d'une telle notification, que celui-ci a eu connaissance. En une telle hypothèse, si le non-respect de l'obligation d'informer l'intéressé sur les voies et les délais de recours, ou l'absence de preuve qu'une telle information a bien été fournie, ne permet pas que lui soient opposés les délais de recours fixés par le code de justice administrative, le destinataire de la décision ne peut exercer de recours juridictionnel au-delà d'un délai raisonnable. En règle générale et sauf circonstances particulières dont se prévaudrait le requérant, ce délai ne saurait, sous réserve de l'exercice de recours administratifs pour lesquels les textes prévoient des délais particuliers, excéder un an à compter de la date à laquelle une décision expresse lui a été notifiée ou de la date à laquelle il est établi qu'il en a eu connaissance. 3. D'autre part, l'expiration du délai permettant d'introduire un recours en annulation contre une décision expresse dont l'objet est purement pécuniaire fait obstacle à ce que soient présentées des conclusions indemnitaires ayant la même portée. 4. Pour rejeter les conclusions indemnitaires présentées par Mme A... comme irrecevables, le tribunal administratif d'Orléans a retenu que l'intéressée n'était plus recevable à contester le titre exécutoire du 16 novembre 2016 dont elle s'était acquittée, d'abord au moyen d'un versement spontané remontant à janvier 2017, puis de retenues pratiquées en vertu d'une opposition à tiers détenteur du 26 janvier 2018, lequel avait un objet exclusivement pécuniaire. Contrairement à ce que soutient Mme A..., le titre exécutoire précité, par lequel un employeur décide de récupérer les traitements qu'il estime avoir indûment versés à un agent à la suite du versement rétroactif, pour la même période, d'une pension, n'emporte pas d'effet juridique sur sa situation individuelle statutaire et notamment sur la date à laquelle cet agent a été placé en situation de retraite. En outre, à supposer même que ce titre exécutoire puisse avoir des conséquences sur le montant de sa pension, en raison de l'absence de versement de charges patronales ou salariales, ces effets seraient, là-encore, exclusivement financiers, de sorte que ce titre doit être regardé comme ayant un objet purement pécuniaire. 5. Il en résulte qu'en rejetant comme irrecevables les conclusions de Mme A... tendant à l'indemnisation des préjudices subis du fait de l'illégalité de cette répétition d'indu de rémunération, au motif que le délai permettant d'introduire un recours en annulation contre le titre exécutoire prononçant cette répétition était expiré, le tribunal administratif d'Orléans n'a pas entaché son jugement d'irrégularité. Sur les conclusions indemnitaires : 6. Aux termes de l'article R. 421-5 du code de justice administrative : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision ". Aux termes du 2° de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales : " L'action dont dispose le débiteur d'une créance assise et liquidée par une collectivité territoriale ou un établissement public local pour contester directement devant la juridiction compétente le bien-fondé de ladite créance se prescrit dans le délai de deux mois à compter de la réception du titre exécutoire ou, à défaut, du premier acte procédant de ce titre ou de la notification d'un acte de poursuite ". Il résulte de ces dernières dispositions, d'une part, que cette notification doit, s'agissant des voies de recours, mentionner, le cas échéant, l'existence d'un recours administratif préalable obligatoire ainsi que l'autorité devant laquelle il doit être porté ou, dans l'hypothèse d'un recours contentieux direct, indiquer si celui-ci doit être formé auprès de la juridiction administrative de droit commun ou devant une juridiction spécialisée et, dans ce dernier cas, préciser laquelle et, d'autre part, qu'une mention portée sur un titre exécutoire indiquant au débiteur d'une créance qu'il peut la contester devant le tribunal judiciaire ou le tribunal administratif compétent selon la nature de cette créance ne peut faire courir les délais de recours. 7. Il résulte de l'instruction que le titre exécutoire émis le 16 novembre 2016 mentionne les délais de recours contentieux, toutefois, la seule mention " vous pouvez contester la somme mentionnée en saisissant directement le tribunal judiciaire ou le tribunal administratif compétent selon la nature de la créance ", qui ne précise pas quelle est la juridiction compétente, n'a pas pu faire courir le délai de recours contentieux. Toutefois, Mme A... a eu connaissance de ce titre, au plus tard le 18 janvier 2017, date d'émission de son courrier sollicitant le bénéfice de délais de grâce y faisant expressément référence et n'a exercé un recours juridictionnel à son encontre que par une requête enregistrée devant le tribunal administratif le 7 avril 2021, au-delà du délai de recours raisonnable mentionné au point 2 du présent arrêt. Ainsi, il résulte de ce qui a été dit aux points 3 à 5 ci-dessus que les conclusions de Mme A... présentées devant le tribunal administratif d'Orléans le 9 août 2021, qui sont fondées sur l'illégalité de cette décision purement pécuniaire, ne sont pas recevables. 8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande indemnitaire tendant à la réparation de son préjudice financier lié au remboursement illégal du trop-perçu de rémunération. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées. DÉCIDE : Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... et à la commune d'Olivet. Délibéré après l'audience du 27 février 2025, à laquelle siégeaient : M. Even, président de chambre, Mme Aventino, première conseillère, M. Cozic, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 mars 2025. La rapporteure, B. AventinoLe président, B. Even La greffière, I. Szymanski La République mande et ordonne à la préfète du Loiret en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme La greffière, 2 N° 23VE01750
Cours administrative d'appel
Versailles
CAA de NANCY, 5ème chambre, 18/03/2025, 22NC00896, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Nancy, d'une part, d'annuler la décision du 20 novembre 2019 par laquelle le président de la métropole du Grand Nancy a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de sa maladie et, d'autre part, d'annuler la décision du 20 octobre 2020 par laquelle le président de la métropole du Grand Nancy a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de sa maladie ou, subsidiairement, de désigner tel expert qu'il plaira au tribunal avec notamment pour mission de dire si sa pathologie est imputable au service, de fixer la date de consolidation, de dire si elle doit reprendre sur un poste adapté et de fixer le taux d'incapacité permanente partielle. Par un jugement n° 2000126, 2002822 du 23 février 2022, le tribunal administratif de Nancy a rejeté les demandes de Mme A.... Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 11 avril 2022, et un mémoire enregistré le 14 février 2025 et non communiqué, Mme A..., représentée par Me Richard, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nancy ; 2°) de désigner tel expert qu'il plaira à la cour avec notamment pour mission de dire si sa pathologie est essentiellement et directement causée par l'exercice de ses fonctions et de dire si sa pathologie entraine une incapacité permanente partielle de 25 % ; 3°) de mettre à la charge de la métropole du Grand Nancy une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que sa pathologie est essentiellement et directement causée par l'exercice de ses fonctions et entraine une incapacité permanente de 25 %. Par un mémoire en défense enregistré le 18 octobre 2022, la métropole du Grand Nancy, représentée par Me Luisin, conclut au rejet de la requête. Elle soutient que la requête n'est pas recevable et que les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de la sécurité sociale ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Peton, - les conclusions de Mme Bourguet, rapporteure publique, - et les observations de Me Luisin pour la métropole du Grand Nancy. Considérant ce qui suit : 1. Mme A..., professeure d'enseignement artistique territoriale hors classe titulaire, a été recrutée en qualité de directrice adjointe du conservatoire régional de la métropole du Grand Nancy en 2006. Elle a été placée en congé de maladie ordinaire à compter du 13 mars 2019 en raison d'un syndrome anxio-dépressif réactionnel. Mme A... a sollicité la reconnaissance de l'imputabilité au service de sa pathologie le 5 juin 2019. Par un arrêté du 20 novembre 2019, le président de la métropole du Grand Nancy a refusé de faire droit à cette demande. Cette décision a été confirmée par un arrêté du 20 octobre 2020. Mme A... relève appel du jugement du 23 février 2022 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de ces deux décisions. Sur la fin de non-recevoir opposée à la requête d'appel : 2. La requête présentée par Mme A... contient l'exposé des faits et moyens ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge d'appel. Il suit de là que la fin de non-recevoir tirée de ce que, faute de satisfaire aux exigences de l'article R. 411-1 du code de justice administrative, cette requête est irrecevable, ne peut qu'être écartée. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 3. Aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° À des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions (...) Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident, même après la date de radiation des cadres pour mise à la retraite. Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales (...) ". Aux termes de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, créé par le I de l'article 10 de l'ordonnance n° 2017-53 du 19 janvier 2017 et désormais codifié à l'article L. 822-20 du code général de la fonction publique : " I.- Le fonctionnaire en activité a droit à un congé pour invalidité temporaire imputable au service lorsque son incapacité temporaire de travail est consécutive à un accident reconnu imputable au service, à un accident de trajet ou à une maladie contractée en service définis aux II, III et IV du présent article. Ces définitions ne sont pas applicables au régime de réparation de l'incapacité permanente du fonctionnaire. Le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident. La durée du congé est assimilée à une période de service effectif. L'autorité administrative peut, à tout moment, vérifier si l'état de santé du fonctionnaire nécessite son maintien en congé pour invalidité temporaire imputable au service. / (...) IV.- Est présumée imputable au service toute maladie désignée par les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale et contractée dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le fonctionnaire de ses fonctions dans les conditions mentionnées à ce tableau. / Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée par un tableau peut être reconnue imputable au service lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu'elle est directement causée par l'exercice des fonctions. / Peut également être reconnue imputable au service une maladie non désignée dans les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu'elle est essentiellement et directement causée par l'exercice des fonctions et qu'elle entraîne une incapacité permanente à un taux déterminé et évalué dans les conditions prévues par décret en Conseil d'Etat (...) ". Les dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ne sont entrées en vigueur, en tant qu'elles s'appliquent à la fonction publique territoriale, qu'à la date d'entrée en vigueur, le 13 avril 2019, du décret du 10 avril 2019 relatif au congé pour invalidité temporaire imputable au service dans la fonction publique territoriale, décret par lequel le pouvoir réglementaire a pris les dispositions réglementaires nécessaires pour cette fonction publique et dont l'intervention était, au demeurant, prévue, sous forme de décret en Conseil d'Etat, par le VI de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 résultant de l'article 10 de l'ordonnance du 19 janvier 2017. 4. Les droits des agents publics en matière d'accident de service et de maladie professionnelle sont constitués à la date à laquelle l'accident est intervenu ou la maladie diagnostiquée. 5. En l'espèce, Mme A... a sollicité le 5 juin 2019 une demande de reconnaissance de maladie professionnelle. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que Mme A... a bénéficié d'un arrêt de travail de prolongation à compter du 20 mars 2019 en raison d'une dépression réactionnelle à des problèmes professionnels. En conséquence, la pathologie a été diagnostiquée à une date antérieure à l'entrée en vigueur des dispositions du IV de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 issu de l'article 10 de l'ordonnance n° 2017-53 du 19 janvier 2017 portant diverses dispositions relatives au compte personnel d'activité, à la formation et à la santé et la sécurité au travail dans la fonction publique. Par suite, seules les dispositions de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 citées au point 3 étaient applicables. 6. Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service. Il appartient au juge d'apprécier si les conditions de travail du fonctionnaire peuvent, même en l'absence de volonté délibérée de nuire à l'agent, être regardées comme étant directement à l'origine de la maladie dont la reconnaissance comme maladie professionnelle est demandée. 7. En l'espèce, un premier psychiatre agréé a rendu un rapport le 21 mai 2019 indiquant que Mme A... présente une décompensation anxiodépressive avec idéations suicidaires évoluant dans le cadre du travail et concluant que " le trouble devrait être reconnu en tant que maladie professionnelle ". Un second rapport d'expertise, réalisé le 28 janvier 2020 à la demande de la commission administrative paritaire dans le cadre de la demande de réexamen présentée par Mme A..., estime que " la pathologie présentée par Mme A... doit être reconnue comme maladie professionnelle hors tableau ". La commission de réforme a alors émis un avis favorable le 14 mai 2020. Enfin, un dernier rapport rendu à la demande de la métropole du Grand Nancy le 5 septembre 2020 précise que " La pathologie présentée par Mme A... doit être considérée comme entrant dans le cadre d'une maladie professionnelle hors tableau ". En conséquence, il est établi que la pathologie dont souffre Mme A... présente un lien direct avec l'exercice de ses fonctions. Par suite, en considérant que la maladie n'était pas imputable au service, le président de la métropole du Grand Nancy a entaché ses décisions des 20 novembre 2019 et 20 octobre 2020 d'une erreur d'appréciation. 8. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise, que Mme A... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande. Sur les frais liés à l'instance : 9. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " 10. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la métropole du Grand Nancy, la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme A... et non compris dans les dépens. D E C I D E : Article 1er : Le jugement n° 2000126, 2002822 du tribunal administratif de Nancy du 23 février 2022 est annulé. Article 2 : Les décisions des 20 novembre 2019 et 20 octobre 2020 par lesquelles le président de la métropole du Grand Nancy a refusé de reconnaitre l'imputabilité au service de la pathologie de Mme A... sont annulées. Article 3 : La métropole du Grand Nancy versera à Mme A... la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et à la métropole du Grand Nancy. Délibéré après l'audience du 25 février 2025, à laquelle siégeaient : - M. Durup de Baleine, président, - M. Barlerin, premier conseiller, - Mme Peton, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 18 mars 2025. La rapporteure, Signé : N. PetonLe président, Signé : A. Durup de Baleine Le greffier, Signé : A. Betti La République mande et ordonne à la préfète de Meurthe-et-Moselle en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, Le greffier, A. Betti N° 22NC00896 2
Cours administrative d'appel
Nancy
CAA de MARSEILLE, 4ème chambre, 11/03/2025, 23MA02835, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. C... B... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'enjoindre au ministre des armées de fixer le taux d'invalidité de son infirmité " séquelles de rupture du ligament croisé antérieur du genou droit " à 15 % et d'ouvrir ses droits à pension à compter du 22 août 2019. Par un jugement n° 2103561 du 27 septembre 2023, le tribunal administratif de Marseille a fait droit à la demande de M. B... A... en fixant le taux d'invalidité de l'infirmité " séquelles de rupture du ligament croisé antérieur du genou droit traité par ligamentoplastie. Hydarthrose modérée. Amyotrophie quadricipitale. Limitation de la flexion à 100 degrés " à 15% à compter du 22 août 2019. Procédure devant la Cour : Par une requête enregistrée le 27 novembre 2023, la ministre des armées demande à la Cour d'annuler le jugement n° 2103561 du 27 septembre 2023 du tribunal administratif de Marseille. Elle soutient que : - le jugement attaqué est entaché d'erreurs de droit, d'erreur d'appréciation, d'un défaut de base légale et d'un défaut de motivation ; - ainsi et en premier lieu, il comporte une erreur en ce qu'il fait référence à un rapport du 11 août 2022 au lieu du 7 juillet 2020 ; - en deuxième lieu, le tribunal s'est fondé à tort sur les dispositions de l'article L. 121-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre alors qu'il aurait dû se fonder sur les dispositions combinées des articles L. 121-8, L. 125-1, L. 151-6 et R. 121-4 de ce code, s'agissant d'une demande de renouvellement d'une pension concédée à titre temporaire ; - en troisième lieu, le tribunal a méconnu les articles L. 125-1 et L. 151-6 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre en reprenant le libellé de l'infirmité à la date de la première concession et donc en intégrant des pathologies ayant disparu ; - enfin, le tribunal ne pouvait retenir un taux d'invalidité stable à 15 % en dépit d'une amélioration de la flexion du genou ; il en résulte que l'évaluation du taux de l'infirmité n'a pas été réalisée sur la base de la gêne fonctionnelle ainsi que le prévoit l'article L. 151-6 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre. La requête a été communiquée à M. B... A..., qui n'a pas produit d'observations. Un courrier du 6 décembre 2024 adressé aux parties en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les a informées de la période à laquelle il était envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et leur a indiqué la date à partir de laquelle l'instruction pourrait être close, dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2 du même code. Par une ordonnance du 15 janvier 2025, la clôture de l'instruction a été prononcée avec effet immédiat, en application du dernier alinéa de l'article R. 613-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - le code de justice administrative ; Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Martin, - et les conclusions de Mme Balaresque, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. M. B... A..., engagé dans la légion étrangère le 18 septembre 2001 et radié des contrôles le 16 février 2026, s'est vu concéder, par décision du 10 septembre 2018, une pension militaire d'invalidité à titre temporaire au taux de 15 % pour une durée de trois années à compter du 22 août 2016, au titre de l'infirmité " séquelles de rupture du ligament croisé antérieur du genou droit traité par ligamentoplastie. Hydarthrose modérée. Amyotrophie quadricipitale. Limitation de la flexion à 100 degrés ". Le 2 janvier 2020, il a sollicité le renouvellement de sa pension au titre de cette infirmité et présenté une demande pour une infirmité nouvelle affectant son genou gauche. Par décision du 14 septembre 2020, le ministre de la défense a rejeté sa demande en tant qu'elle portait sur le renouvellement de pension au titre de la première infirmité, relative au genou droit, en raison d'un taux d'infirmité inférieur au minimum indemnisable de 10 %, conformément à l'avis émis le 5 août 2020 par le médecin en charge des pensions militaires d'invalidité. Saisie d'un recours par M. B... A..., la commission de recours de l'invalidité, par décision du 17 mars 2021, a partiellement fait droit à ses demandes, notamment en fixant, en son article 2, à 10 % le taux d'invalidité de l'infirmité pensionnée, désormais intitulée " séquelles de rupture du ligament croisé antérieur du genou droit traité par ligamentoplastie. Pas d'hydarthrose. Pas d'amyotrophie quadricipitale droite. Limitation de la flexion à 130 degrés. Tiroir antérieur " à compter du 22 août 2019. Par un jugement du 27 septembre 2023, le tribunal administratif de Marseille, saisi par M. B... A..., a décidé que le taux d'invalidité de cette infirmité, qu'il a intitulée " séquelles de rupture du ligament croisé antérieur du genou droit traité par ligamentoplastie. Hydarthrose modérée. Amyotrophie quadricipitale. Limitation de la flexion à 100 degrés ", devait être fixée à 15 % à compter du 22 août 2019. Il s'agit du jugement dont la ministre des armées relève appel dans la présente instance. 2. D'une part, aux termes de l'article L. 121-8 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " La pension a un caractère définitif lorsque l'infirmité causée par la blessure ou la maladie est reconnue incurable. A défaut, la pension est concédée pour trois ans et peut être convertie en pension définitive dans les conditions prévues par décret en Conseil d'Etat. (...) ". Aux termes de l'article R. 121-3 dudit code : " La pension temporaire est concédée pour trois années à compter du point de départ défini à l'article L. 151-2. / Elle est convertible en pension définitive à l'issue d'une ou de plusieurs périodes de trois ans, après examens médicaux. ". Et aux termes de l'article R. 121-4 de ce code : " A l'issue du délai de trois ans, pour la ou les infirmités résultant uniquement de blessures, la situation du pensionné doit être définitivement fixée : / 1° Soit par la conversion de la pension temporaire en pension définitive à un taux supérieur, égal ou inférieur au taux primitif ; / 2° Soit, si l'invalidité a disparu ou est devenue inférieure au minimum indemnisable de 10 %, par la suppression de la pension. ". 3. D'autre part, selon l'article L. 151-6 dudit code : " La décision comportant attribution de pension est motivée. Elle fait ressortir les faits et documents ou les raisons d'ordre médical établissant que l'infirmité provient de l'une des causes mentionnées à l'article L. 121-1 (...). / Elle est accompagnée en outre, d'une évaluation de l'invalidité qui doit être motivée par des raisons médicales et comporter le diagnostic de l'infirmité et sa description complète, faisant ressortir la gêne fonctionnelle et, s'il y a lieu, l'atteinte à l'état général qui justifie le pourcentage attribué. ". 4. En application de l'article L. 151-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, le degré d'infirmité est déterminé au jour du dépôt de la demande de l'intéressé, sans qu'il soit possible de tenir compte d'éléments d'aggravation postérieurs à cette date. L'administration doit dès lors se placer à la date de la demande de pension pour évaluer le degré d'invalidité entraîné par l'infirmité invoquée et cette évaluation doit, en application des termes mêmes de l'article L. 151-6 du même code, tenir compte de la gêne fonctionnelle engendrée dans le temps par ces infirmités. 5. En l'espèce, il résulte de l'instruction que, pour fixer à 15 % le taux d'invalidité de l'infirmité " séquelles de rupture du ligament croisé antérieur du genou droit traité par ligamentoplastie. Hydarthrose modérée. Amyotrophie quadricipitale. Limitation de la flexion à 100 degrés " pour une durée de trois ans à compter du 22 août 2016, la ministre des armées s'est appuyée sur le rapport d'expertise médicale du 3 avril 2018 faisant état, dans les suites de la ligamentoplastie du genou droit dont a bénéficié M. B... A..., de l'existence d'une hydarthrose modérée, d'un tiroir de 5 mm, d'une palpation douloureuse du ménisque interne, d'une amyotrophie quadricipitale de moins 2 cm par rapport au côté gauche, et d'une limitation de la flexion à 100 degrés. Si, dans le cadre de l'instruction de la demande de renouvellement de la pension militaire d'invalidité déposée par M. B... A... à l'expiration du délai de trois ans, le médecin expert mandaté par l'administration a proposé que le taux de l'infirmité pensionnée soit maintenu à 15 %, il a toutefois relevé que la marche de l'intéressé est réalisée normalement, sans boiterie, y compris sur la pointe des pieds et les talons. L'expert, qui relève certes la persistance d'un petit tiroir antérieur et d'une douleur à la palpation de l'interligne interne, constate néanmoins que la limitation de la flexion est passée de 100 degrés en 2016 à 130 degrés, l'extension étant par ailleurs normale à zéro degré et le patient stable en position debout. Par ailleurs, si l'expert évoque une amyotrophie persistante, il n'a toutefois pas comparé son évolution par rapport à la première expertise, mais a seulement procédé à un relevé de mensuration à 43 centimètres, soit un centimètre de plus qu'à gauche, et procédé à un test musculaire dont les résultats, cotés à 5 sur une échelle de 0 à 5, ont révélé une force musculaire normale. Enfin, le médecin, qui conclut sans équivoque à l'augmentation de la mobilité à droite par rapport à la précédente expertise, n'a pas objectivé la persistance de l'hydarthrose diagnostiquée le 3 avril 2018, pathologie qui se manifeste par un gonflement à l'effort du genou provoquant des douleurs, ni associé, au petit genu varum retrouvé sur le membre inférieur droit, une quelconque gêne fonctionnelle. Il en résulte qu'en dépit d'un appui unipodal précaire et d'un accroupissement qualifié de très difficile, au demeurant également imputable à l'infirmité affectant le genou gauche de l'intéressé, ainsi que de l'existence de douleurs persistantes sur l'articulation droite, l'état de santé de M. B... A... s'est amélioré par une diminution des gênes fonctionnelles observées en 2018. L'intimé, qui n'a pas produit en cause d'appel, n'établit pas, par les éléments médicaux produits en première instance, dont seuls ceux décrivant son état de santé à la date de sa demande de renouvellement de pension peuvent utilement être pris en compte, que sa pathologie aurait justifié que lui soit appliqué un taux supérieur à 10 %, compte tenu de la gêne fonctionnelle résultant de l'état de son genou droit à la date de cette demande. 6. De plus, alors que, par sa décision du 17 mars 2021, la commission de recours de l'invalidité a fixé à 10 % le taux de l'invalidité, désormais intitulée " séquelles de rupture du ligament croisé antérieur du genou droit traité par ligamentoplastie. Pas d'hydarthrose. Pas d'amyotrophie quadricipitale droite. Limitation de la flexion à 130 degrés. Tiroir antérieur ", il résulte de ce qui a été exposé au point précédent qu'en raison de l'évolution de l'infirmité de M. B... A... entre la date à laquelle sa pension lui a été concédée à titre temporaire et celle à laquelle il en a sollicité le renouvellement, marquée notamment par la disparition de l'hydarthrose et l'amélioration de la flexion, qui est passée de 100 degrés à 130 degrés, le tribunal ne pouvait, ainsi que le soutient la ministre des armées, décider du renouvellement de la pension de l'intimé à compter du 22 août 2019 pour une infirmité au libellé inchangé, à savoir " séquelles de rupture du ligament croisé antérieur du genou droit traité par ligamentoplastie. Hydarthrose modérée. Amyotrophie quadricipitale. Limitation de la flexion à 100 degrés ". 7. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que la ministre des armées est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a décidé que M. B... A... avait droit au renouvellement de sa pension militaire d'invalidité au titre d'une infirmité intitulée " séquelles de rupture du ligament croisé antérieur du genou droit traité par ligamentoplastie. Hydarthrose modérée. Amyotrophie quadricipitale. Limitation de la flexion à 100 degrés " au taux de 15 %. Il y a lieu, par suite, d'annuler ce jugement et de rejeter la demande de M. B... A... présentée devant le tribunal administratif de Marseille. D É C I D E : Article 1er : Le jugement n° 2103561 du 27 septembre 2023 du tribunal administratif de Marseille est annulé. Article 2 : La demande présentée par M. B... A... devant le tribunal administratif de Marseille est rejetée. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre des armées et des anciens combattants et à M. C... B... A.... Délibéré après l'audience du 25 février 2025, où siégeaient : - M. Marcovici, président, - M. Revert, président assesseur, - M. Martin, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition du greffe, le 11 mars 205. N° 23MA02835 2
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Marseille
CAA de NANCY, Juge des référés, 11/03/2025, 25NC00171, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Par une requête, enregistrée le 2 mai 2023, M. B... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg de condamner l'Etat à lui verser une provision de 30 000 euros au titre de la réparation des préjudices personnels et patrimoniaux qui ont résulté de l'accident du travail dont il a été victime, sur le fondement des dispositions de l'article R.541-1 du code de justice administrative. Par une ordonnance n° 2303023 du 16 janvier 2025, le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 23 janvier 2025, M. B..., représenté par Me Renoult, demande à la cour : 1°) d'annuler l'ordonnance du 16 janvier 2025 du juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg ; 2°) de condamner l'Etat à lui verser, à titre de provision, la somme de 30 000 euros; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : -la créance n'est pas sérieusement contestable dès lors qu'il peut prétendre à la réparation de l'ensemble des préjudices personnels et patrimoniaux qui ont résulté de l'accident du travail dont il a été victime, exception faite des préjudices réparés forfaitairement par l'allocation temporaire d'invalidité sur le fondement de la responsabilité sans faute de l'État ; - son accident a été reconnu imputable au service ; - son déficit fonctionnel temporaire est estimé à 13 630 euros ; - ses souffrances endurées avant consolidation sont estimées à 50 000 euros ; - son préjudice lié au recours à une tierce personne avant consolidation est estimé à 17 396 euros ; - son déficit fonctionnel permanent est estimé à 290 250 euros ; - son préjudice esthétique est estimé à 4 000 euros ; - son préjudice d'agrément est estimé à 30 000 euros ; - son préjudice sexuel est estimé à 50 000 euros ; - son préjudice lié au recours à une tierce personne après consolidation est estimé à 364 755,96 euros ; - ses frais divers sont estimés à 2 000 euros. Par un mémoire en défense, enregistré le 25 février 2025, le ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles, demande à la cour : 1°) de rejeter la requête d'appel de M. B.... Il soutient que : - la créance dont se prévaut M. B... est sérieusement contestable. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de justice administrative. Considérant ce qui suit : 1. Le 19 février 2020, M. A... B..., alors secrétaire administratif de classe supérieure à la direction départementale de la cohésion sociale de la Moselle, a été victime d'un arrêt cardio-respiratoire sur son lieu de travail. Par décision de la directrice départementale de la cohésion sociale du 6 mai 2020 cet accident a été reconnu comme imputable au service. Par arrêté du 6 septembre 2022, M. B... a été radié des cadres et admis en retraite anticipée pour invalidité non imputable au service à compter du 22 octobre 2021. Par lettre du 31 mars 2023 M. B... a adressé auprès de la direction départementale du travail, de l'emploi et des solidarités de la Moselle une demande préalable tendant à la réparation des préjudices résultant de son accident de service. Cette demande a été rejetée. M. B... a alors demandé au juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg de condamner l'Etat à lui verser une provision de 30 000 euros. M. B... forme appel de l'ordonnance du 16 janvier 2025 par laquelle le juge des référés a rejeté sa demande de provision. Sur la demande de provision : 2. Aux termes de l'article R541-1 du code de justice administrative :" Le juge des référés peut, même en l'absence d'une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l'a saisi lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. Il peut, même d'office, subordonner le versement de la provision à la constitution d'une garantie. ". Il appartient au juge des référés, pour statuer sur le caractère non sérieusement contestable d'une obligation, de s'assurer que les éléments qui lui sont soumis par les parties sont de nature à en établir l'existence avec un degré suffisant de certitude. 3. En vertu des articles L. 27 et L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite, les fonctionnaires civils de l'Etat qui se trouvent dans l'incapacité permanente de continuer leurs fonctions en raison d'infirmités résultant de blessures ou de maladies contractées ou aggravées en service peuvent être radiés des cadres par anticipation et ont droit au versement d'une rente viagère d'invalidité cumulable avec la pension rémunérant les services. 4. Les dispositions mentionnées au point précédent déterminent forfaitairement la réparation à laquelle un fonctionnaire victime d'un accident de service ou atteint d'une maladie professionnelle peut prétendre, au titre des pertes de revenus et de l'incidence professionnelle résultant de l'incapacité physique causée par cet accident de service ou cette maladie professionnelle, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions. Elles ne font cependant obstacle ni à ce que le fonctionnaire qui a enduré, du fait de l'accident ou de la maladie, des préjudices patrimoniaux d'une autre nature ou des préjudices personnels, obtienne de la personne publique qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice, ni à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre la personne publique, dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette personne publique. 5. Il ressort du rapport d'expertise du 5 avril 2024, réalisé à la demande du tribunal administratif de Strasbourg, que M. B... présentait des troubles dégénératifs dont l'origine n'est pas professionnelle avant qu'il ne soit victime d'un arrêt cardiaque sur son lieu de travail le 19 février 2020. 6. De plus, par un arrêté ministériel du 6 septembre 2022 qu'il n'a pas contesté, M. B... a été radié des cadres et admis en retraite anticipée pour invalidité non imputable au service à compter du 22 octobre 2021. 7. Il résulte de ces éléments que l'existence de la créance dont se prévaut M. B... ne présente pas le caractère non sérieusement contestable mentionné à l'article R. 541-1 du code de justice administrative. Il suit de là qu'il n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande de provision. Sur les frais liés au litige : 8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, les sommes sollicitées par M. B... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Les conclusions formulées en ce sens doivent, en conséquence, être rejetées. ORDONNE : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. A... B... et au ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles. Copie en sera adressée pour information au préfet de la Moselle et au directeur régional de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités Grand Est. La présidente, Signé : P. Rousselle La République mande et ordonne au ministre en charge de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance. Pour expédition conforme, La greffière, 2 N° 25NC00171
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Nancy
CAA de MARSEILLE, 4ème chambre, 11/03/2025, 23MA00139, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédures contentieuses antérieures : M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt du 16 novembre 2015 prononçant son licenciement pour insuffisance professionnelle. Par un jugement n° 1600661 du 18 mai 2017, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande Par un arrêt n° 17MA03131 du 18 septembre 2018, la Cour a annulé ce jugement et cet arrêté, a enjoint au ministre de l'agriculture et de l'alimentation de procéder au réexamen de la situation administrative de M. A... ainsi qu'à sa réintégration avec reconstitution de ses droits sociaux et à pension à compter de la date d'effet de l'arrêté portant licenciement, a mis à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus de l'appel. Par un arrêt n° 23MA00139 du 27 juin 2023, la Cour a d'une part, prononcé une astreinte à l'encontre de l'Etat, s'il ne justifie pas avoir, dans les trois mois suivant sa notification, exécuté l'arrêt de la Cour du 18 septembre 2018 lui enjoignant de reconstituer les droits sociaux et à pension de M. A... à compter de la date d'effet de l'arrêté portant licenciement, le 1er octobre 2016, et mettant à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et d'autre part, fixé le taux de cette astreinte à 250 euros par jour. Procédure devant la Cour : Par des mémoires, enregistrés le 12 septembre 2024, le 9 octobre 2024 et le 19 février 2025, le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire indique que la somme de 4 213,17 euros a été versée à l'intéressé au titre des frais d'instance et que la reconstitution de ses droits sociaux et à pension, qui ne requiert pas une décision formalisée, a été opérée, au terme de démarches difficiles, en versant à l'organisme compétent la somme de 10 069,89 euros, que reste à payer à cet organisme la somme de 1 202,95 euros et que la question des modalités de la reconstitution présente à juger un litige distinct. Par des mémoires, enregistrés le 13 septembre 2024, le 21 novembre 2024 et le 19 février 2025, M. A..., représenté par Me Journault, conclut, dans le dernier état de ses écritures, à la liquidation provisoire de l'astreinte prononcée contre l'Etat, à hauteur de 126 750 euros au 19 février 2025, à la condamnation de l'Etat à lui verser l'intégralité de cette somme à ce titre, au prononcé d'une astreinte définitive de 500 euros par jour de retard et à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - l'arrêt de la Cour est frappé de pourvoi en ce qu'il limite l'obligation de l'Etat à une réintégration juridique par une reconstitution des droits sociaux de l'intéressé ; - aucune décision formalisant la reconstitution de ses droits sociaux ne lui a été notifiée ; - les mesures dont il est justifié ne portent que sur la période 2016-2019, alors que la reconstitution doit courir jusqu'à l'âge limite de la retraite ; - le retard dans l'exécution ne lui est pas imputable ; - le décompte produit par l'Etat est erroné dès lors qu'il ne tient pas compte de l'évolution de l'indice, de l'évolution des échelons par ancienneté et de l'évolution de la valeur du point d'indice, ni de la part fixe de l'ISOE, du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence, pourtant inclus dans le traitement du salaire mensuel servant d'assiette au calcul des cotisations et donc des droits sociaux y afférents ; - la régularisation opérée ne tient pas compte des droits sociaux ; - ces questions ne présentent pas à juger un litige distinct de la question de la liquidation de l'astreinte. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code rural et de la pêche maritime ; - le décret n° 85-1148 du 24 octobre 1985 ; - le décret n° 89-406 du 20 juin 1989 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Revert, - les conclusions de Mme Balaresque, rapporteure public, - et les observations de Me Journault, représentant M. A..., et de M. A.... Considérant ce qui suit : 1. M. A..., enseignant en mathématiques au lycée agricole (LEAP) Fontlongue de Miramas, recruté par contrat à durée indéterminée depuis le 1er septembre 2008, a été licencié pour insuffisance professionnelle par arrêté du ministre chargé de l'agriculture du 16 novembre 2015, avec effet au 1er octobre 2016. Par un arrêt rendu le 18 septembre 2018, la Cour, saisie par M. A... d'un appel contre le jugement du tribunal administratif de Marseille rejetant sa demande dirigée contre cet arrêté, a annulé cette décision et ce jugement et a enjoint au ministre de l'agriculture et de l'alimentation de procéder au réexamen de sa situation administrative ainsi qu'à sa réintégration avec reconstitution de ses droits sociaux et à pension à compter de la date d'effet de l'arrêté portant licenciement, a mis à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus de l'appel. Par un arrêt n° 23MA00139 du 27 juin 2023, la Cour a prononcé une astreinte à l'encontre de l'Etat à défaut pour le ministre chargé de l'agriculture de justifier, dans le délai de trois mois suivant la notification de cet arrêt, de mesures propres à reconstituer les droits sociaux et à pension de M. A... à compter de la date d'effet de l'arrêté portant licenciement, le 1er octobre 2016, ainsi que du versement de la somme de 2 000 euros due au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Sur la liquidation de l'astreinte : 2. Aux termes de l'article L. 911-7 du code de justice administrative : " En cas d'inexécution totale ou partielle ou d'exécution tardive, la juridiction procède à la liquidation de l'astreinte qu'elle avait prononcée. /Sauf s'il est établi que l'inexécution de la décision provient d'un cas fortuit ou de force majeure, la juridiction ne peut modifier le taux de l'astreinte définitive lors de sa liquidation. /Elle peut modérer ou supprimer l'astreinte provisoire, même en cas d'inexécution constatée. ". L'article L. 911-8 de ce code précise que : " La juridiction peut décider qu'une part de l'astreinte ne sera pas versée au requérant. / Cette part est affectée au budget de l'Etat. ". En ce qui concerne l'exécution des arrêts du 18 septembre 2018 et du 27 juin 2023 en ce qu'ils portent sur les frais liés au litige : 3. Pour assurer l'exécution de l'arrêt de la Cour du 27 juin 2023, le ministre chargé de l'agriculture a procédé au versement le 18 juin 2024, sur le compte bancaire de M. A..., de la somme de 4 213,17 euros correspondant aux sommes mises à la charge de l'Etat par cet arrêt ainsi que celui du 18 septembre 2018, augmentées des intérêts au taux légal. L'arrêt de la Cour est, à cet égard, entièrement exécuté. En ce qui concerne l'exécution des arrêts du 18 septembre 2018 et du 27 juin 2023 en ce qu'ils portent sur la reconstitution des droits sociaux et à pension : 4. L'annulation d'une décision évinçant illégalement un agent public implique nécessairement, au titre de la reconstitution de sa carrière, la reconstitution des droits sociaux, et notamment des droits à pension de retraite, qu'il aurait acquis en l'absence de l'éviction illégale et, par suite, le versement par l'administration des cotisations nécessaires à cette reconstitution. Ainsi, sauf à ce que l'agent ait bénéficié d'une indemnité destinée à réparer le préjudice matériel subi incluant les sommes correspondantes, il incombe à l'administration de prendre à sa charge le versement de la part salariale de ces cotisations, comme de la part patronale. Cette obligation procède directement de l'annulation prononcée et n'a pas un caractère distinct de l'ensemble de la reconstitution de carrière à laquelle l'employeur est tenu. S'agissant des droits à pension : 5. Pour procéder à la reconstitution des droits à pension de M. A... à compter du 1er octobre 2016, date de prise d'effet de son éviction illégale, le ministre chargé de l'agriculture a versé à l'organisme Malakoff Humanis chargé du recouvrement des cotisations sociales, patronales et salariales, la somme de 10 069,83 euros. Il résulte de l'instruction, et il n'est d'ailleurs pas contesté, que le calcul de cette somme, qui vise à rétablir M. A... dans ses droits à pension, en procédant à la régularisation des cotisations afférentes à sa période d'éviction, a été opéré au titre de la période du 1er octobre 2016 au 3 juillet 2019, date à laquelle M. A... a refusé de donner suite aux propositions de postes formulées par le bureau de l'enseignement agricole le 25 juin 2019, en prenant pour assiette les seuls traitements de base de l'agent, à l'exclusion d'indemnités et primes de toute nature. 6. D'une part, contrairement à ce que soutient M. A..., l'intervention d'une décision formelle de reconstitution des droits sociaux et à pension n'est pas nécessaire à l'exécution de l'annulation contentieuse de la décision prononçant illégalement l'éviction du service d'un agent public. 7. D'autre part, ainsi qu'il a été dit au point 5 de l'arrêt de la Cour du 27 juin 2023, la réintégration juridique de M. A... à compter du 1er octobre 2016, ordonnée par son arrêt du 18 septembre 2018, qui n'a donné lieu à aucune décision formalisée, a été révélée par la proposition de poste qui lui a été faite le 23 juin 2019. Les effets de l'éviction illégale ayant ainsi cessé au plus tôt à cette date, c'est à bon droit que le ministre chargé de l'agriculture a fixé la période de régularisation des cotisations afférentes à la période d'éviction du 1er octobre 2016 au 3 juillet 2019. 8. Enfin, aux termes de l'article 34 du décret du 20 juin 1989 relatif aux contrats liant l'Etat et les personnels enseignants et de documentation des établissements mentionnés à l'article L. 813-8 du code rural, dans sa rédaction applicable au litige: "Les enseignants contractuels ont droit, après service fait, à une rémunération comprenant : a) Le traitement brut déterminé par référence à l'échelle indiciaire de leur catégorie, compte tenu éventuellement d'une ancienneté calculée dans les conditions prévues à l'article 38 ci-après ;b) Le supplément familial de traitement et l'indemnité de résidence s'il y a lieu ;c) Les autres avantages ou indemnités attribués par l'Etat aux personnels de l'enseignement public rémunérés selon l'échelle indiciaire de référence et exerçant des fonctions d'enseignement. (...)". L'article 39 de ce décret dispose en outre que : " I.- L'Etat supporte les charges sociales incombant à l'employeur qui comportent : a) Les cotisations instituées par le chapitre Ier du titre IV du livre VII du code rural au titre des prestations familiales et de l'assurance vieillesse et, par dérogation aux dispositions de l'article D. 741-35 du code rural et de la pêche maritime, la cotisation prévue à l'article D. 712-38 du code de la sécurité sociale au titre des risques mentionnés à l'article L. 712-9 du code de la sécurité sociale ;b) Les cotisations versées à une institution de retraite complémentaire choisie par l'association ou l'organisme responsable de l'établissement au taux de 4,80 % sur la tranche de rémunération inférieure ou égale au plafond de la sécurité sociale et au taux de 10 % sur la tranche de rémunération supérieure au plafond de la sécurité sociale ". 9. Il résulte de l'instruction, et plus spécialement du décompte des sommes prises en compte par les services du ministère chargé de l'agriculture, et des sommes versées à l'organisme payeur, que sur la période de reconstitution en cause, il a été tenu compte par ces services de l'évolution, à deux reprises, de la valeur du point d'indice, contrairement à ce que soutient M. A.... Celui-ci ne peut pas utilement se plaindre de ce que la régularisation à laquelle a procédé le ministre n'a pas tenu compte sur cette période de l'évolution de l'indice et des échelons d'ancienneté, eu égard aux dispositions applicables à sa situation d'agent contractuel de l'Etat et à celles de son contrat d'engagement qui ne prévoient pas à son bénéfice des droits à l'avancement et au déroulement de carrière. En revanche, il résulte des dispositions combinées des articles 34 et 39 du décret du 20 juin 1989 relatif aux contrats liant l'Etat et les personnels enseignants et de documentation des établissements mentionnés à l'article L. 813-8 du code rural que les cotisations dues par l'Etat au titre de l'assurance vieillesse de ces personnels sont assises, non pas seulement sur les sommes payées aux agents à titre de traitement de base, les dispositions de l'article L. 61 du code des pensions civiles et militaires de retraite ne leur étant pas applicables, mais sur l'ensemble de la rémunération perçue. Sur la période de régularisation en cause, M. A... aurait dû percevoir l'indemnité de suivi et d'orientation des élèves en faveur des personnels enseignants du second degré, le supplément familial de traitement et l'indemnité de résidence, qu'il percevait avant son éviction. La circonstance que la première de ces indemnités n'est pas soumise à retenue pour pension en vertu de l'article 1er du décret du 15 janvier 1993 instituant cet avantage n'est pas de nature à faire obstacle aux modalités de calcul des contributions de l'employeur dues par l'Etat au régime de retraite de ses personnels enseignants fixées par les dispositions particulières du décret du 20 juin 1989. La circonstance, quant à elle, que ces indemnités sont liées à l'exercice effectif des fonctions est sans incidence sur leur prise en compte au titre de la reconstitution des droits sociaux et à pension de M. A..., dès lors que l'exécution de l'annulation de son éviction illégale implique nécessairement qu'il soit réputé s'être trouvé rétroactivement, et pour la période en cause, dans une position comportant accomplissement de services effectifs du point de vue de la législation sur les pensions. 10. Il suit de là que M. A..., dont la contestation sur ce point ne présente pas à juger un litige distinct de l'exécution des arrêts de la Cour du 18 septembre 2018 et du 27 juin 2023, est fondé à soutenir que la reconstitution de ses droits sociaux et à pension à laquelle a procédé le ministre chargé de l'agriculture sur la période du 1er octobre 2016 au 3 juillet 2019, en versant à l'organisme compétent la somme de 10 069,83 euros, n'assure pas une exécution complète de ces arrêts. 11. Il résulte certes des pièces produites par le ministre chargé de l'agriculture le 13 février 2025, en réponse à une mesure d'instruction décidée par la Cour, que ses services ont tenu compte des observations de M. A... énoncées au point précédent et ont saisi l'organisme payeur des prestations sociales de M. A... de nouveaux éléments de calcul, correspondant à une somme supplémentaire à verser à cet organisme de 1 202,95 euros, et dont M. A..., par la seule production d'un tableau récapitulatif établi par ses soins, ne démontre pas le caractère erroné. 12. Mais, à la date du présent arrêt, le ministre n'a pas justifié du paiement effectif de cette somme à l'organisme payeur des prestations sociales de M. A.... S'agissant des autres droits sociaux : 13. Ainsi que l'affirme M. A... dans ses dernières écritures, il ne résulte pas des éléments produits par le ministre chargé de l'agriculture que, conformément à l'injonction qui lui était adressée par l'arrêt du 18 septembre 2018, il ait procédé à la reconstitution des droits sociaux de M. A..., autres que ses droits à pension. Si ni cet arrêt ni M. A... ne précisent la nature de ces droits dont celui-ci a été privé par l'effet de son éviction illégale, pour la période du 1er octobre 2016 au 3 juillet 2019, il résulte des dispositions de l'article 39 du décret du 20 juin 1989 relatif aux contrats liant l'Etat et les personnels enseignants et de documentation des établissements mentionnés à l'article L. 813-8 du code rural, citées au point 8, ainsi que du bulletin de paie de M. A... pour le mois de mars 2015, notamment que la couverture des risques maladie, maternité et invalidité dont bénéficie cette catégorie d'agents est assurée par une cotisation à la charge de l'Etat, à verser à un organisme collecteur. Il suit de là que, faute de justifier du paiement à un tel organisme des parts patronale et salariale de ces cotisations, le ministre chargé de l'agriculture n'a pas exécuté dans cette mesure les arrêts de la Cour du 18 septembre 2018 et du 27 juin 2023, alors qu'il ne résulte pas de l'instruction que M. A... aurait reçu une indemnité destinée à réparer le préjudice matériel subi incluant les sommes correspondantes. 14. Compte tenu des motifs énoncés aux points 12 et 13, il y a donc lieu de procéder à une liquidation provisoire de l'astreinte ordonnée par l'arrêt du 27 juin 2023, notifié le même jour au ministre chargé de l'agriculture. Pour la période du 27 septembre 2023, date d'expiration du délai imparti par cet arrêt pour prendre les mesures d'exécution, au 25 février 2025, date de l'audience, le montant de cette astreinte, au taux de 250 euros par jour s'élève à 129 250 euros. Au cas d'espèce, compte tenu des mesures d'exécution déjà prises par le ministre, il y a lieu de verser à M. A... 5 % de cette somme, soit 6 462,50 euros. 15. Il reviendra au ministre chargé de l'agriculture de justifier de la régularisation des cotisations sociales conforme aux motifs du présent arrêt, énoncés aux points 12 et 13, et il appartiendra à la Cour de se prononcer sur une nouvelle liquidation de l'astreinte, le cas échéant définitive, sans qu'il y ait lieu, au cas présent, de rehausser le taux de celle-ci. Sur les frais liés au litige : 16. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. A... et non compris dans les dépens. DECIDE : Article 1er : L'Etat est condamné à verser à M. A... la somme de soit 6 462,50 euros. Article 2 : L'Etat versera à M. A... la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire justifiera auprès de la Cour des mesures prises pour assurer la reconstitution complète des droits sociaux de M. A... conformément aux points 12 et 13 du présent arrêt. Article 4 : Le surplus des conclusions de M. A... est rejeté. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire. Copie en sera adressée au ministère public près la Cour des comptes en application de l'article R. 921-7 du code de justice administrative. Délibéré après l'audience du 25 février 2025, où siégeaient : - M. Marcovici, président, - M. Revert, président assesseur, - M. Martin, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 mars 2025. N° 23MA01392
Cours administrative d'appel
Marseille