Jurisprudence
La jurisprudence est l'ensemble des décisions rendues par les juridictions administratives, pendant une certaine période dans une matière, dans une branche ou dans l'ensemble du droit.
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CAA de NANCY, 3ème chambre, 28/09/2021, 19NC01819, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 18 avril 2017 en tant que le président de la communauté de communes Orne Lorraine Confluences a refusé de reconnaître son arrêt de travail délivré pour la période du 15 avril au 11 mai 2017 comme imputable au service. Par un jugement n° 1702047 du 28 mai 2019, le tribunal administratif de Nancy a annulé l'arrêté du 18 avril 2017 en tant qu'il a refusé de reconnaître l'arrêt de travail délivré à Mme A... pour la période du 15 avril au 11 mai 2017 comme imputable au service. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 7 juin 2019, la communauté de communes Orne Lorraine Confluences, représentée par Me Iochum, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement n° 1702047 du 28 mai 2019 du tribunal administratif de Nancy ; 2°) de rejeter la demande de Mme A... ; 3°) de mettre à la charge de Mme A... la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - l'arrêté du président de la communauté de communes Orne Lorraine Confluences du 31 mai 2017 plaçant Mme A... en arrêt maladie ordinaire pour la période du 10 mars au 9 juin 2017 doit être regardé comme ayant retiré l'arrêté litigieux ; - contrairement à ce qu'a retenu le tribunal, les documents médicaux produits par Mme A... ne permettaient pas de contredire la position retenue par la commission départementale de réforme dans son avis ; - Mme A... n'a pas contesté l'avis de la commission de réforme. Par un mémoire en défense enregistré le 18 juillet 2019, Mme C... A..., représentée par Me Massé, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 500 euros soit mise à la charge de la communauté de communes Orne Lorraine Confluences au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle fait valoir que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions civiles et militaires ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Marchal, - et les conclusions de M. Barteaux, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. Mme A... exerce les fonctions d'adjointe technique territoriale de 2ème classe au sein de la communauté de communes Orne Lorraine Confluences. Le 9 juin 2016, Mme A... a chuté sur son lieu de travail et s'est fracturée le poignet droit. Cet accident a été reconnu comme imputable au service par un arrêté du 9 juin 2016. A la suite de la reprise de ses fonctions, Mme A... a cependant ressenti des douleurs mécaniques à sa main droite et a, en raison de ces douleurs, bénéficié, à compter du 29 novembre 2016, d'arrêts de travail successifs. Dans le cadre d'une demande de renouvellement de l'arrêt de travail de Mme A..., le président de la communauté de communes Orne Lorraine Confluences a, par un arrêté du 18 avril 2017, placé Mme A... en congé de maladie ordinaire du 15 avril 2017 au 11 mai 2017. Par un jugement du 28 mai 2019, dont la communauté de communes relève appel, le tribunal administratif de Nancy a annulé cet arrêté en tant qu'il a refusé de reconnaître l'arrêt de travail délivré à Mme A... pour la période du 15 avril au 11 mai 2017 comme imputable au service. Mme A... a également demandé à la cour de prendre les mesures nécessaires à l'exécution de ce jugement. Il a été donné acte du désistement de cette demande par une ordonnance n° 19NC03444 du 31 juillet 2020. Sur la recevabilité de la demande de la première instance : 2. La communauté de communes Orne Lorraine Confluences fait valoir que l'arrêté du 31 mai 2017 par lequel le président de la communauté de communes a placé Mme A... en congé de maladie ordinaire du 10 mars 2017 au 9 juin 2017 aurait porté retrait de l'arrêté litigieux du 18 avril 2017. A considérer que la communauté de communes entend ainsi soutenir que les conclusions à fin d'annulation présentées par Mme A... devant le tribunal administratif de Nancy étaient irrecevables, dès lors que cet arrêté avait été retiré préalablement à l'introduction de la requête, l'arrêté du 31 mai 2017, qui n'est pas incompatible avec celui du 18 avril 2017, ne porte ni explicitement, ni même implicitement retrait de l'arrêté du 18 avril 2017. Par suite, la communauté de communes Orne Lorraine Confluences n'est pas fondée à soutenir que les conclusions à fin d'annulation présentées par Mme A... seraient irrecevables car portant sur un arrêté préalablement retiré. Sur le motif d'annulation retenu par le tribunal : 3. Aux termes de l'article 57 de la loi 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale dans sa version applicable à l'espèce : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) / 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. (...) / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident, même après la date de radiation des cadres pour mise à la retraite. (...) ". 4. Dans le cadre d'un accident de travail survenu le 9 juin 2016, Mme A... s'est fracturée le poignet droit. Lors de la reprise de ses fonctions à la suite de cet accident, Mme A... a ressenti de vives douleurs à la main droite et s'est vu diagnostiquer une tendinite de Quervain. En raison des douleurs causées par cette pathologie, Mme A... a bénéficié de plusieurs arrêts de travail consécutifs à compter du 29 novembre 2016. Il est constant et a d'ailleurs été reconnu par un arrêté du 31 mai 2017 du président de la communauté de communes Orne Lorraine Confluences que la tendinite de Quervain, contractée le 29 novembre 2016 par Mme A..., était en lien direct avec l'exercice de ses fonctions au sein de la communauté de communes et était donc imputable au service. Mme A... a, en raison de cette tendinite, été initialement placée en congé pour invalidité temporaire imputable au service, avant toutefois d'être placée, notamment par l'arrêté litigieux, en congé pour maladie ordinaire. Pour justifier ce changement de statut, la communauté de communes Orne Lorraine Confluences se prévaut de ce que la commission de réforme a, dans son avis du 11 mai 2017, considéré que la tendinite de la requérante était consolidée depuis le 9 mars 2017 et ne justifiait donc plus, à compter de cette date, de faire bénéficier l'intéressée d'un congé pour invalidité temporaire imputable au service. Il ressort toutefois des pièces du dossier et notamment des avis d'arrêt de travail du docteur B... que Mme A... souffrait, pour la période d'arrêt de travail visée par l'arrêté litigieux soit du 15 avril au 11 mai 2017, de douleurs présentant les mêmes symptômes que ceux ayant conduit aux arrêts de travail antérieurs reconnus comme imputables au service. Par suite et quand bien même lesdites douleurs seraient intervenues postérieurement à la date de consolidation de Mme A..., ces douleurs présentaient bien un lien direct et certain avec le service. Dès lors qu'il n'est pas contesté et qu'il ressort au demeurant des pièces du dossier que ces douleurs empêchaient Mme A... d'accomplir son service pendant la période litigieuse, le président de la communauté de communes Orne Lorraine Confluences a commis une erreur d'appréciation en refusant de reconnaître comme imputable au service l'arrêt de travail délivré à Mme A... pour la période du 15 avril au 11 mai 2017. 5. Il résulte de ce qui précède que la communauté de communes Orne Lorraine Confluence n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a annulé l'arrêté du 18 avril 2017 en tant qu'il refusait de reconnaître l'arrêt de travail délivré à Mme A... pour la période du 15 avril au 11 mai 2017 comme imputable au service. Sur les frais liés à l'instance : 6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme A..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la communauté de communes Orne Lorraine Confluence demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la communauté de communes Orne Lorraine Confluence la somme de 2 000 euros à verser à Mme A... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D E C I D E : Article 1er : La requête de la communauté de communes Orne Lorraine Confluence est rejetée. Article 2 : La communauté de communes Orne Lorraine Confluence versera la somme de 2 000 euros à Mme A... en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la communauté de communes Orne Lorraine Confluences et à Mme C... A.... N° 19NC01819 3
Cours administrative d'appel
Nancy
CAA de NANCY, 4ème chambre, 21/09/2021, 19NC03455, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme B... A... a demandé au tribunal des pensions militaires de Nancy d'annuler la décision du 30 janvier 2015 par laquelle le ministre de la défense a refusé de lui accorder une pension militaire d'invalidité pour son infirmité au genou droit. Par un jugement n° 16/00001 du 13 juillet 2018, le tribunal des pensions militaires de Nancy a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : La cour régionale des pensions de Nancy a transmis à la cour administrative d'appel de Nancy, en application du décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018 relatif au contentieux des pensions militaires d'invalidité, la requête présentée par Mme A..., enregistrée à son greffe le 11 septembre 2018. Mme A..., représentée par Me Jacquemin, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal des pensions militaires de Nancy du 13 juillet 2018 ; 2°) de faire droit à sa demande de pension militaire d'invalidité en lui reconnaissant un taux d'infirmité de 10% imputable au service avec toutes conséquences de droit. Elle soutient que le tribunal des pensions militaires a dénaturé les conclusions du rapport d'expertise dont il ressort que le taux de 10% ne concerne que le syndrome femoro-patellaire imputable à l'accident de service du 9 octobre 2013. Par un mémoire en défense, enregistré le 28 mars 2019, la ministre des armées conclut au rejet de la requête de Mme A.... Elle fait valoir que : - le moyen n'est pas fondé ; - la part imputable à l'accident de service du 9 octobre 2003 ne peut être évaluée qu'à un taux d'invalidité inférieur à 10%. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; - la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 et notamment son article 51 ; - le décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Roussaux, première conseillère, - et les conclusions de M. Michel, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. Mme A..., née le 29 mars 1978, a été victime d'une blessure en service le 9 octobre 2003. Par arrêté du 13 juin 2005, une pension militaire d'invalidité lui a été concédée au taux de 15% pour une infirmité au genou droit. Par arrêté du 17 mars 2008, le degré d'invalidité de son infirmité est devenu inférieur au taux minimum indemnisable et elle n'a plus bénéficié de cette pension. Mme A... a demandé la ré-indemnisation de son infirmité le 13 mai 2013. Elle a été victime le mois suivant, soit le 24 juin 2013, d'un nouvel accident. Par décision du 30 janvier 2015, le ministre de la défense a rejeté sa demande de pension d'invalidité. Mme A... a contesté cette décision et par un jugement du 17 août 2017, le tribunal des pensions militaires de Nancy a ordonné, avant-dire droit, une expertise médicale de la requérante, laquelle a été rendue le 3 janvier 2018. Mme A... relève appel du jugement du 13 juillet 2018 par lequel le tribunal des pensions militaires de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 30 janvier 2015 par laquelle le ministre de la défense a refusé de faire droit à sa demande de pension militaire d'invalidité. 2. Aux termes de l'article 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre dans sa rédaction applicable au litige : " Ouvrent droit à pension :1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ;(...) ". Aux termes de l'article L. 4 du même code, dans sa version applicable au litige : " Les pensions sont établies d'après le degré d'invalidité. Sont prises en considération les infirmités entraînant une invalidité égale ou supérieure à 10 %. Il est concédé une pension :1° Au titre des infirmités résultant de blessures, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse 10 % ; (...) ". 3. Il résulte notamment de ces dispositions qu'une infirmité ouvre droit au versement d'une pension d'invalidité, sous réserve que les conditions d'imputabilité au service prévues par le code soient par ailleurs remplies, dès lors qu'elle entraîne une invalidité égale ou supérieure à 10%. 4. En l'espèce, Mme A... a été titulaire dans un premier temps d'une pension militaire d'invalidité temporaire, au taux de 15% pour " séquelles d'entorse du genou droit. Gonalgies. Rupture méniscale interne. Laxité latérale interne et externe " du 17 novembre 2004 au 16 novembre 2007. Consécutivement à une demande de renouvellement de sa pension, le ministre de la défense a, par décision du 17 mars 2008, informé Mme A... de ce que l'infirmité initialement pensionnée était requalifiée de " gonalgies antérieures épisodiques sur syndrome fémoro-patellaire " et n'ouvrait plus droit à pension à compter du 17 novembre 2007, son degré d'invalidité étant devenu inférieur au taux minimum indemnisable. A la suite d'une nouvelle demande de pension du 13 mai 2013, la décision litigieuse du 30 janvier 2015 a précisé que l'infirmité " séquelles d'entorse du genou droit. Gonalgies. Rupture méniscale interne. Laxité latérale interne et externe " ne pouvait pas ouvrir droit à pension au motif que le taux d'invalidité relatif aux séquelles de l'événement imputable au service du 9 octobre 2003 était inférieur au minimum indemnisable de 10%. 5. Il résulte de l'instruction et notamment des pièces médicales produites que l'imagerie par résonance magnétique (IRM) réalisée le 13 octobre 2003 ne faisait apparaitre aucune atteinte rotulienne et précisait l'absence de " lésion osseuse traumatique ". L'IRM réalisée le 13 juillet 2017, soit après son accident de travail du 24 juin 2013 alors qu'elle était ambulancière à titre privé et donc sans lien avec le service des armées, a montré " un aspect de contusion de la rotule droite à sa partie interne et des remaniements dégénératifs du ménisque médial " et celle réalisé en 2016 a précisé que la lésion rotulienne avait évolué en " ulcération rotulienne ". Le rapport d'expertise médicale du 3 janvier 2018, réalisé consécutivement au jugement avant-dire droit du tribunal des pensions, a conclu à un taux d'invalidité de 10% résultant de " ce syndrome fémoro-patellaire " en faisant expressément référence à ces deux IRM, sans toutefois préciser que le taux d'invalidité résultait du seul accident du 9 octobre 2003. Ainsi, il ne résulte pas de l'instruction et plus particulièrement des conclusions du médecin-expert qu'un taux de 10% puisse être retenue qui serait exclusivement imputable à la blessure initiale. Dans ces conditions, le taux d'incapacité résultant de son accident de service du 9 octobre 2013 étant nécessairement inférieur au taux de 10%, il n'ouvre pas droit à la concession d'une pension militaire d'invalidité pour son infirmité au genou droit. 6. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal des pensions militaires de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision lui refusant une pension militaire d'invalidité. D E C I D E : Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et à la ministre des armées. 4 N° 19NC03455
Cours administrative d'appel
Nancy
CAA de MARSEILLE, 7ème chambre, 17/09/2021, 19MA03137, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Marseille de reconnaître l'imputabilité au service de son affection et de condamner l'Etat à lui verser sa solde à compter de la date de résiliation unilatérale de son contrat ainsi que des dommages et intérêts. Par un jugement n° 1705221 du 13 mai 2019, le tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande. Procédure devant la Cour : Par une requête, enregistrée le 12 juillet 2019 sous le n° 19MA03137, M. C..., représenté par Me Mas, demande à la Cour : 1°) d'ordonner, avant dire droit, une expertise ; 2°) de sursoir à statuer dans l'attente du dépôt du rapport d'expertise ; 3°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 13 mai 2019 ; 4°) d'annuler la décision du 11 juillet 2016 ; 5°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 200 000 euros à parfaire en fonction des résultats de l'expertise sollicitée ; 6°) d'enjoindre à l'administration de réexaminer sa demande ; 7°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il soutient que : - le tribunal était territorialement incompétent pour se prononcer sur son litige ; - l'exemplaire du jugement qui lui a été communiqué ne comporte pas la signature des membres de la formation de jugement ; - sa demande d'expertise est justifiée afin que la matérialité et les conséquences médicales des accidents qu'il a subis soient établies ; - les avis techniques des médecins inspecteurs du service de santé des armées ne sont pas motivés ; - la matérialité de son accident et le lien avec son affection sont établis. M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 21 juin 2019. Par un mémoire en défense, enregistré le 27 avril 2020, la ministre des armées conclut au rejet de la requête de M. C.... Elle soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés. Un courrier du 12 avril 2021 adressé aux parties en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les a informées de la période à laquelle il est envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et a indiqué la date à partir de laquelle l'instruction pourra être close dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2. Une ordonnance portant clôture immédiate de l'instruction a été émise le 31 mai 2021. Un mémoire présenté pour M. C... a été enregistré le 6 juillet 2021, postérieurement à la clôture d'instruction. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de la défense ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme D..., - et les conclusions de M. Chanon, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. M. C..., caporal engagé volontaire de l'armée de terre depuis le 6 octobre 2009, a été placé en congé de longue maladie du 19 janvier 2015 au 18 janvier 2017, par quatre décisions successives des 17 mars 2015, 24 juin 2015, 10 décembre 2015, et 11 juillet 2016. Le 29 septembre 2016, l'intéressé a formé contre cette dernière décision un recours devant la commission des recours des militaires en tant qu'elle précisait que " l'affection ouvrant droit à ce congé n'est pas survenue du fait ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions ". Par décision du 17 juillet 2017, le ministre a rejeté son recours préalable du 29 septembre 2016. M. C... relève appel du jugement du 13 mai 2019 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté ses demandes tendant à la reconnaissance de l'imputabilité au service de son affection et à la condamnation de l'Etat à lui verser sa solde à compter de la date de résiliation unilatérale de son contrat, ainsi que des dommages et intérêts. Sur la régularité du jugement attaqué : 2. Aux termes du second alinéa de l'article R. 312-2 du code de justice administrative : " Lorsqu'il n'a pas été fait application de la procédure de renvoi prévue à l'article R. 351-3 et que le moyen tiré de l'incompétence territoriale du tribunal administratif n'a pas été invoqué par les parties avant la clôture de l'instruction de première instance, ce moyen ne peut plus être ultérieurement soulevé par les parties ou relevé d'office par le juge d'appel ou de cassation ". 3. Le moyen tiré de l'incompétence du tribunal administratif de Marseille pour connaître des conclusions de M. C... tendant à la reconnaissance de l'imputabilité au service de son affection et à la condamnation de l'État à lui verser sa solde à compter de la date de résiliation unilatérale de son contrat ainsi que des dommages et intérêts n'a pas été soulevé en première instance. Il suit de là que, conformément aux dispositions précitées de l'article R. 312-2 du code de justice administrative, M. C... n'est pas recevable à l'invoquer pour la première fois devant le juge d'appel. 4. Aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience " ; 5. Il ressort des pièces du dossier que la minute du jugement attaqué a été signée conformément aux prescriptions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative. La circonstance que l'ampliation du jugement qui a été notifiée à M. C... ne comporterait pas ces signatures est sans incidence sur la régularité de ce jugement. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 6. En tout état de cause, M. C... ne peut utilement soutenir que les avis techniques des médecins inspecteurs du service de santé des armées sont entachés d'un défaut de motivation dès lors qu'un avis médical ne constitue pas un acte administratif qui doit être motivé en application des dispositions de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979, aujourd'hui reprises à l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration. 7. Aux termes de l'article L. 4138-13 du code de la défense dans sa version en vigueur à la date de la décision contestée : " Le congé de longue maladie est attribué, après épuisement des droits de congé de maladie ou des droits du congé du blessé fixés aux articles L. 4138-3 et L. 4138-3-1, dans les cas autres que ceux prévus à l'article L. 4138-12, lorsque l'affection constatée met l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions et qu'elle présente un caractère invalidant et de gravité confirmée. / Lorsque l'affection survient du fait ou à l'occasion de l'exercice des fonctions ou à la suite de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, ce congé est d'une durée maximale de trois ans. Le militaire conserve, dans les conditions définies par décret en Conseil d'Etat, sa rémunération. / Dans les autres cas, le militaire de carrière, ou le militaire servant en vertu d'un contrat réunissant au moins trois ans de services militaires, bénéficie de ce congé pendant une durée maximale de trois ans. (...) ". L'article R. 4138-58 du code précité dispose que : " (...) / Les dispositions relatives au congé de longue durée pour maladie prévues aux articles R. 4138-47 à R. 4138-57 s'appliquent également au congé de longue maladie, à l'exception du deuxième alinéa de l'article R. 4138-55. " Aux termes de l'article R. 4138-49 du même code : " La décision mentionnée à l'article R. 4138-48 précise si l'affection ouvrant droit à congé de longue durée pour maladie est survenue ou non du fait ou à l'occasion de l'exercice des fonctions ou à la suite de l'une des causes exceptionnelles prévues par les dispositions de l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite (...) ". 8. Une maladie contractée par un militaire, ou son aggravation, doit être regardée comme survenue ou non du fait ou à l'occasion de l'exercice des fonctions si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service. 9. Il ressort des pièces du dossier que M. C... a été placé en congé de longue maladie du 19 janvier 2015 au 18 janvier 2017, par quatre décisions successives des 17 mars 2015, 24 juin 2015, 10 décembre 2015, et 11 juillet 2016. Le 29 septembre 2016, M. C... a saisi la commission des recours des militaires (CRM) d'un recours administratif préalable obligatoire tendant à l'annulation de la décision du 11 juillet 2016 au motif que son affection résulte d'un accident survenu lors d'une opération extérieure au Qatar, le 23 février 2013, et s'est aggravée lors d'un exercice d'escalade avec sa section en juin 2014. Ce recours a été rejeté par une décision du 17 juillet 2017 de la ministre des armées. Ces décisions précisaient toutes que " l'affection ouvrant droit à ce congé n'est pas survenue du fait ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions ". De même, les quatre avis techniques du médecin général inspecteur de santé produits au dossier précisaient que " il n'y a pas de lien entre l'affection nécessitant un congé de non-activité et l'exercice des fonctions ou l'une des causes exceptionnelles prévues par les dispositions de l'article L. 27 du code des pensions civiles ou militaires de retraite ". Le requérant n'établit pas la réalité de l'accident survenu au Qatar pas plus que l'aggravation de son état suite à un exercice d'escalade le 4 juin 2014 ni que son affection serait en lien avec ces évènements en se bornant à produire divers courriers qu'il a adressés les 30 octobre 2014, 1er février 2015, 20 avril 2015 et 28 septembre 2015, soit plus d'un an et demi après les faits, à sa hiérarchie, ainsi qu'un compte-rendu de cet accident rédigé par lui et par lesquels il affirme que sa maladie est due à son accident survenu le 23 février 2013 et s'est aggravée au cours d'un exercice d'escalade le 4 juin 2014. Par ailleurs, la ministre des armées a produit une attestation de séjour de M. C... au Qatar du 4 juin 2013 ne rapportant aucun accident ou blessure, ainsi qu'un certificat d'aptitude établi le 5 août 2013, six mois après ce séjour, par le médecin référent de l'antenne médicale du 35ème RI, selon lequel l'intéressé est apte à servir et à faire campagne en tous lieux et sans restriction. Si M. C... soutient qu'à la demande de sa hiérarchie et alors qu'il comptait s'inscrire au concours de l'école militaire inter armée (EMIA), il n'a pas immédiatement déclaré cet accident, il a reconnu lui-même, dans une déclaration sur l'honneur, qu'il n'a pas voulu le signaler. Ce lien ne saurait être établi par le certificat du 1er juillet 2014 établi par le docteur B..., du service d'accueil des urgences de l'hôpital d'instruction des armées Lavéran, qui mentionne que l'intéressé lui a été adressé " pour une lombalgie importante, suite à une chute en escalade il y a un mois ", pas plus que par le compte rendu du 1er juin 2016 de ce même service qui se borne à préciser " patient de 27 ans, militaire dans l'infanterie, en invalidité depuis 1,5 ans, douleurs de lombo-sciatique qui évolue depuis le mois de juin 2014 après une chute en escalade en OPEX " et celui du 28 décembre 2016 d'un médecin du pôle de réadaptation des blessés de cet hôpital précisant que l'intéressé lui a expliqué être en attente d'une décision de recours en vue d'une régularisation de sa situation. Il en va de même de la circonstance à la supposer établie que M. C... n'aurait souffert d'aucun problème de santé avant son départ en opération au Qatar. Par suite, ce moyen doit être écarté. 10. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille, a rejeté ses demandes tendant à ce que soit reconnue l'imputabilité au service de son affection et à la condamnation de l'Etat à lui verser sa solde à compter de la date de résiliation unilatérale de son contrat, ainsi que la somme de 200 000 euros à titre de dommages et intérêts. Par voie de conséquence, les conclusions de M. C... tendant, d'une part, à ce que l'Etat soit condamné à lui verser la somme de 200 000 euros à parfaire en fonction des résultats de l'expertise sollicitée et, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint à l'administration de réexaminer sa demande doivent être rejetées. Sur les conclusions à fin d'expertise : 11. Aux termes de l'article R. 621-1 du code de justice administrative : " La juridiction peut, soit d'office, soit sur la demande des parties ou de l'une d'elles, ordonner, avant dire droit, qu'il soit procédé à une expertise sur les points déterminés par sa décision. (...) ". 12. Il ne résulte pas de l'instruction qu'il soit besoin d'ordonner l'expertise demandée par M. C..., qui ne présente pas d'utilité pour la solution du litige. Par suite, ses conclusions tendant à la désignation d'un expert doivent être rejetées. Sur les frais liés au litige : 13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, tout ou partie de la somme que le conseil de M. C... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. D É C I D E : Article 1er : La requête de M. C... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C..., à Me Mas et à la ministre des armées. Délibéré après l'audience du 3 septembre 2021, où siégeaient : - M. Pocheron, président de chambre, - M. Guidal, président assesseur, - Mme D..., première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 17 septembre 2021. 2 N° 19MA03137 bb
Cours administrative d'appel
Marseille
CAA de NANTES, 6ème chambre, 20/07/2021, 19NT03931, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. C... B..., titulaire d'une pension militaire d'invalidité définitive concédée par arrêté du 9 mai 2006, a demandé au tribunal des pensions militaires d'invalidité de Caen la révision pour aggravation des infirmités pensionnées. Par un jugement n° 17/00004 du 27 décembre 2018, le tribunal des pensions militaires d'invalidité de Caen a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés le 22 février 2019 et le 5 août 2019 au greffe de la cour régionale des pensions de Caen et des mémoires complémentaires enregistrés les 14 février et 29 mars 2021, sous le n° 19NT03931 devant la présente cour, M. B..., représenté par Me D..., demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal des pensions militaires d'invalidité de Caen du 27 décembre 2018 ; 2°) de lui accorder le bénéfice de la révision pour aggravation des infirmités pensionnées et de retenir un taux d'invalidité de 100 % pour l'infirmité n°1, séquelles de scoliose à double courbure, un taux de 40 % pour l'infirmité n°2, état bronchopatique chroniqué lié à la première infirmité, et la nécessite d'une majoration de pension pour tierce personne ; 3°) de condamner l'Etat à lui verser une pension d'invalidité calculée sur la base des nouveaux taux et la majoration pour tierce personne, ainsi que les arrérages revalorisés échus avec intérêts au taux légal à compter du jour de sa demande, soit le 13 avril 2015 ; 4°) à titre subsidiaire, ordonner avant-dire droit une mesure d'expertise médicale ; 5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son avocat, de la somme de 2 500 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique. Il soutient que : Sur la 1ère infirmité : séquelles de scoliose à double courbure : - l'infirmité de coxarthrose a été rejetée en tant qu'infirmité isolée mais le tribunal ne s'est pas prononcé sur la possibilité d'une infirmité - conséquence de l'infirmité n°1 ; - il ne s'agit pas d'une infirmité indépendante constitutive d'une 3ème infirmité, mais de l'un des effets de l'infirmité n°1 ; - sa demande tend à la révision pour aggravation de l'infirmité n°1 ; - cette aggravation est corroborée par le Dr Le Doze qui a constaté en 2019 un périmètre de marche d'environ 25 mètres et par le Dr Derrien le 2 janvier 2021. Sur la 2ème infirmité : état bronchopatique chroniqué lié à la première infirmité, la scoliose : - sa demande en révision pour aggravation de l'état bronchopathique chronique lié à la scoliose a été rejetée en se fondant sur le seul examen du Dr Prigent, dont les conclusions sont peu claires, et en occultant le rapport du Dr Tricaud, médecin expert qui retient l'état d'aggravation ; - les conclusions du Dr Prigent sont en contradiction avec celles du Dr Tricaud et des autres praticiens l'ayant examiné ; - son état de santé s'est à nouveau aggravé à la fin de l'année 2020 tel que décrit dans le certificat médical du Dr Derrien du 2 janvier 2021. Sur la majoration de la pension pour tierce personne : - même si les termes " majoration pour tierce personne " ne figurent pas dans sa demande de révision pour cause d'aggravation, il convient d'entendre son expression " baisse de forme de plus en plus " comme une demande de majoration de tierce personne, suite à l'aggravation des infirmités déjà pensionnées ; - son état de santé nécessite une aide humaine quotidienne comme le conclut le Dr Derrien le 2 janvier 2021. Par des mémoires en défense, enregistrés le 26 juillet 2019 au greffe de la cour régionale des pensions de Caen et les 10 mars et 1er avril 2021 devant la présente cour, la ministre des armées conclut au rejet de la requête. Elle soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés. M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 6 juin 2019. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. A... ; - et les conclusions de M. Lemoine, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1 Par un arrêté du 9 mai 2006, il a été concédé à M. B... une pension militaire d'invalidité au taux global de 90 %, majorée de l'allocation spéciale grands invalides, pour des séquelles de scoliose à double courbure (Infirmité 1 au taux de 80 %) et d'un état bronchopatique chronique lié à la scoliose (infirmité 2 au taux de 30 % + 5), au titre d'une maladie constatée le 5 septembre1956 alors qu'il effectuait son service militaire sein du 785ème groupe d'artillerie anti-aérienne d'Angers stationné au Maroc. Le 13 avril 2015, le requérant a sollicité la révision de sa pension militaire pour aggravation des infirmités pensionnées. Par décision du 27 avril 2017, le ministre de la défense a rejeté la demande de M. B.... Par sa requête visée ci-dessus, M. B... relève appel du jugement du tribunal des pensions militaires d'invalidité de Caen du 27 décembre 2018 ayant rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision et sollicite le bénéfice de la révision pour aggravation des infirmités pensionnées et de retenir un taux d'invalidité de 100 % pour l'infirmité n°1, un taux de 40 % pour l'infirmité n°2 et la nécessite d'une majoration de pension pour tierce personne. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 2. Aux termes de l'article L.29 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, alors en vigueur : " Le titulaire d'une pension d'invalidité concédée à titre définitif peut en demander la révision en invoquant l'aggravation d'une ou plusieurs infirmités en raison desquelles cette pension a été accordée. Cette demande est recevable sans condition de délai. La pension ayant fait l'objet de la demande est révisée lorsque le degré d'invalidité résultant de l'infirmité ou de l'ensemble des infirmités est reconnu supérieur de 10 % au moins du pourcentage antérieur. Toutefois, l'aggravation ne peut être prise en considération que si le supplément d'invalidité est exclusivement imputable aux blessures et aux maladies constitutives des infirmités pour lesquelles la pension a été accordée. La pension définitive révisée est concédée à titre définitif.". En ce qui concerne l'infirmité n°1 : séquelles de scoliose à double courbure : 3. En l'espèce, l'arrêté du 9 mai 2006, ayant acquis l'autorité de la chose décidée, a rejeté comme non imputable du fait ou à l'occasion du service, l'infirmité de coxarthrose droite entraînant des douleurs à la jambe droite. Cette infirmité ne saurait servir de fondement médical pour justifier une aggravation de l'infirmité pensionnée de scoliose du requérant, dès lors qu'il ressort des pièces médicales du dossier, en particulier de l'expertise du Dr Tricaud sur laquelle s'appuie M. B..., que l'aggravation de pension sollicitée repose en réalité sur les conséquences de ladite coxarthrose droite, participant à une marche difficile, douloureuse et incertaine. L'aggravation du début de coxarthrose avec bascule pelvienne en coxarthrose bilatérale ne saurait être regardée comme une aggravation de la scoliose à double courbure ayant justifié la pension attribuée. Les certificats médicaux produits, notamment celui du Dr Ledoze constatant en 2019 un périmètre de marche réduit à environ 25 mètres, ne sont pas de nature à remettre en cause cette appréciation. 4. M. B... n'est donc pas fondé à demander l'annulation du jugement du tribunal des pensions militaires d'invalidité de Caen du 27 décembre 2018 en tant qu'il a refusé sa demande tendant à lui accorder le bénéfice de la révision pour aggravation de l'infirmité pensionnée n°1, séquelles de scoliose à double courbure, et de retenir un taux d'invalidité de 100 % pour cette infirmité. En ce qui concerne l'infirmité n°2 : état bronchopatique chroniqué lié à la première infirmité, la scoliose : 5. Il ressort des pièces du dossier que, s'agissant de cette seconde infirmité, le Dr Tricaud conclut, dans son expertise du 29 juillet 2016, à un état bronchopathique chronique lié à la scoliose avec syndrome restrictif et obstructif sans atteinte hypoxémique. Il retient une aggravation du taux porté à 50 % en relation avec la première infirmité. Le Dr Ledoze, qui a examiné le requérant le 14 juin 2019, conclut son examen en ces termes : " il est extrêmement gêné par une insuffisance respiratoire mixte, obstructive et restrictive avec un essoufflement au moindre effort ". Ces expertises confirment le diagnostic réalisé le 3 avril 2015 par le Dr Simon selon lequel : " L'exploration fonctionnelles/respiratoire confirme l'aggravation puisqu'en 2011, le Volume Expiratoire Maximal par Seconde (VEMS) était à 1,02 L il est aujourd'hui à 0,89 L, soit 39 % de la norme sans aucune modification après Ventoline ". L'expertise du Dr Prigent, établie le 12 janvier 2017, ne saurait remettre en cause les conclusions concordantes des expertises précitées. Dans ces conditions, c'est à tort que le tribunal des pensions militaires d'invalidité de Caen a rejeté la demande de révision de pension pour aggravation sollicitée par M. B... relative à l'infirmité susvisée. 6. M. B... est donc fondé à demander l'annulation du jugement du tribunal des pensions militaires d'invalidité de Caen du 27 décembre 2018 en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à lui accorder le bénéfice de la révision pour aggravation de l'infirmité pensionnée n°2, état bronchopatique chroniqué lié à la première infirmité, la scoliose, et de retenir un taux d'invalidité de 40% pour cette infirmité. Le versement des arrérages de cette pension sera assorti des intérêts au taux légal, à compter de la date de réception de sa demande, soit le 13 avril 2015. En ce qui concerne la majoration de la pension pour tierce personne : 7. Il est constant que M. B... n'a pas sollicité dans sa demande initiale de révision de pension pour aggravation, en date du 13 avril 2015, la majoration de sa pension pour tierce personne. La référence à l'expression " baisse de forme de plus en plus " ne saurait être assimilée à une demande de majoration de tierce personne, à la suite de l'aggravation des infirmités déjà pensionnées au profit de M. B.... Par suite, la demande de l'intéressé sur ce point ne peut qu'être rejetée faute de liaison du contentieux. 8. Il résulte de ce qui précède que M. B... est seulement fondé, sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise complémentaire, à demander l'annulation du jugement du tribunal des pensions militaires d'invalidité de Caen du 27 décembre 2018 en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à lui accorder le bénéfice de la révision pour aggravation de l'infirmité pensionnée n°2, état bronchopatique chroniqué lié à la première infirmité, la scoliose, et de retenir un taux d'invalidité de 40% pour cette infirmité. Sur les frais liés au litige : 9. M. B... ayant obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me D..., avocate de M. B..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de ce dernier le versement à Me D... de la somme de 1 500 euros demandée à ce titre. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement du 27 décembre 2018 du tribunal des pensions militaires d'invalidité de Caen est annulé en tant qu'il a rejeté la demande de M. B... tendant à lui accorder le bénéfice de la révision pour aggravation de l'infirmité pensionnée n°2, état bronchopatique chroniqué lié à la première infirmité, la scoliose. Article 2 : La décision du 27 avril 2017 par laquelle le ministre de la défense a rejeté la demande de M. B... tendant à lui accorder le bénéfice de la révision pour aggravation de l'infirmité pensionnée n°2 est annulée. Article 3 : Il est attribué à M. B... une pension au taux global d'invalidité de 40% en ce qui concerne l'infirmité pensionnée n°2 à compter du 13 avril 2015, date de sa demande de révision. Article 4 : L'Etat versera à M. B... les intérêts au taux légal sur les arrérages de sa pension militaire d'invalidité relative à l'infirmité pensionnée n°2, à compter du 13 avril 2015, date de la réception de sa demande. Article 5 : L'Etat versera au conseil de M. B..., la somme de 1 500 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que ce conseil renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat. Article 6 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B... est rejeté. Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et à la ministre des armées. Délibéré après l'audience du 9 juillet 2021, à laquelle siégeaient : - M. Gaspon, président de chambre, - M. Coiffet, président-assesseur, - M. A..., premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 juillet 2021. Le rapporteur, F. A...Le président, O. GASPON La greffière, P. CHAVEROUX La République mande et ordonne à la ministre des armées en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 3 N° 19NT03931
Cours administrative d'appel
Nantes
CAA de NANTES, 6ème chambre, 20/07/2021, 19NT03931, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. C... B..., titulaire d'une pension militaire d'invalidité définitive concédée par arrêté du 9 mai 2006, a demandé au tribunal des pensions militaires d'invalidité de Caen la révision pour aggravation des infirmités pensionnées. Par un jugement n° 17/00004 du 27 décembre 2018, le tribunal des pensions militaires d'invalidité de Caen a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés le 22 février 2019 et le 5 août 2019 au greffe de la cour régionale des pensions de Caen et des mémoires complémentaires enregistrés les 14 février et 29 mars 2021, sous le n° 19NT03931 devant la présente cour, M. B..., représenté par Me D..., demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal des pensions militaires d'invalidité de Caen du 27 décembre 2018 ; 2°) de lui accorder le bénéfice de la révision pour aggravation des infirmités pensionnées et de retenir un taux d'invalidité de 100 % pour l'infirmité n°1, séquelles de scoliose à double courbure, un taux de 40 % pour l'infirmité n°2, état bronchopatique chroniqué lié à la première infirmité, et la nécessite d'une majoration de pension pour tierce personne ; 3°) de condamner l'Etat à lui verser une pension d'invalidité calculée sur la base des nouveaux taux et la majoration pour tierce personne, ainsi que les arrérages revalorisés échus avec intérêts au taux légal à compter du jour de sa demande, soit le 13 avril 2015 ; 4°) à titre subsidiaire, ordonner avant-dire droit une mesure d'expertise médicale ; 5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son avocat, de la somme de 2 500 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique. Il soutient que : Sur la 1ère infirmité : séquelles de scoliose à double courbure : - l'infirmité de coxarthrose a été rejetée en tant qu'infirmité isolée mais le tribunal ne s'est pas prononcé sur la possibilité d'une infirmité - conséquence de l'infirmité n°1 ; - il ne s'agit pas d'une infirmité indépendante constitutive d'une 3ème infirmité, mais de l'un des effets de l'infirmité n°1 ; - sa demande tend à la révision pour aggravation de l'infirmité n°1 ; - cette aggravation est corroborée par le Dr Le Doze qui a constaté en 2019 un périmètre de marche d'environ 25 mètres et par le Dr Derrien le 2 janvier 2021. Sur la 2ème infirmité : état bronchopatique chroniqué lié à la première infirmité, la scoliose : - sa demande en révision pour aggravation de l'état bronchopathique chronique lié à la scoliose a été rejetée en se fondant sur le seul examen du Dr Prigent, dont les conclusions sont peu claires, et en occultant le rapport du Dr Tricaud, médecin expert qui retient l'état d'aggravation ; - les conclusions du Dr Prigent sont en contradiction avec celles du Dr Tricaud et des autres praticiens l'ayant examiné ; - son état de santé s'est à nouveau aggravé à la fin de l'année 2020 tel que décrit dans le certificat médical du Dr Derrien du 2 janvier 2021. Sur la majoration de la pension pour tierce personne : - même si les termes " majoration pour tierce personne " ne figurent pas dans sa demande de révision pour cause d'aggravation, il convient d'entendre son expression " baisse de forme de plus en plus " comme une demande de majoration de tierce personne, suite à l'aggravation des infirmités déjà pensionnées ; - son état de santé nécessite une aide humaine quotidienne comme le conclut le Dr Derrien le 2 janvier 2021. Par des mémoires en défense, enregistrés le 26 juillet 2019 au greffe de la cour régionale des pensions de Caen et les 10 mars et 1er avril 2021 devant la présente cour, la ministre des armées conclut au rejet de la requête. Elle soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés. M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 6 juin 2019. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. A... ; - et les conclusions de M. Lemoine, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1 Par un arrêté du 9 mai 2006, il a été concédé à M. B... une pension militaire d'invalidité au taux global de 90 %, majorée de l'allocation spéciale grands invalides, pour des séquelles de scoliose à double courbure (Infirmité 1 au taux de 80 %) et d'un état bronchopatique chronique lié à la scoliose (infirmité 2 au taux de 30 % + 5), au titre d'une maladie constatée le 5 septembre1956 alors qu'il effectuait son service militaire sein du 785ème groupe d'artillerie anti-aérienne d'Angers stationné au Maroc. Le 13 avril 2015, le requérant a sollicité la révision de sa pension militaire pour aggravation des infirmités pensionnées. Par décision du 27 avril 2017, le ministre de la défense a rejeté la demande de M. B.... Par sa requête visée ci-dessus, M. B... relève appel du jugement du tribunal des pensions militaires d'invalidité de Caen du 27 décembre 2018 ayant rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision et sollicite le bénéfice de la révision pour aggravation des infirmités pensionnées et de retenir un taux d'invalidité de 100 % pour l'infirmité n°1, un taux de 40 % pour l'infirmité n°2 et la nécessite d'une majoration de pension pour tierce personne. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 2. Aux termes de l'article L.29 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, alors en vigueur : " Le titulaire d'une pension d'invalidité concédée à titre définitif peut en demander la révision en invoquant l'aggravation d'une ou plusieurs infirmités en raison desquelles cette pension a été accordée. Cette demande est recevable sans condition de délai. La pension ayant fait l'objet de la demande est révisée lorsque le degré d'invalidité résultant de l'infirmité ou de l'ensemble des infirmités est reconnu supérieur de 10 % au moins du pourcentage antérieur. Toutefois, l'aggravation ne peut être prise en considération que si le supplément d'invalidité est exclusivement imputable aux blessures et aux maladies constitutives des infirmités pour lesquelles la pension a été accordée. La pension définitive révisée est concédée à titre définitif.". En ce qui concerne l'infirmité n°1 : séquelles de scoliose à double courbure : 3. En l'espèce, l'arrêté du 9 mai 2006, ayant acquis l'autorité de la chose décidée, a rejeté comme non imputable du fait ou à l'occasion du service, l'infirmité de coxarthrose droite entraînant des douleurs à la jambe droite. Cette infirmité ne saurait servir de fondement médical pour justifier une aggravation de l'infirmité pensionnée de scoliose du requérant, dès lors qu'il ressort des pièces médicales du dossier, en particulier de l'expertise du Dr Tricaud sur laquelle s'appuie M. B..., que l'aggravation de pension sollicitée repose en réalité sur les conséquences de ladite coxarthrose droite, participant à une marche difficile, douloureuse et incertaine. L'aggravation du début de coxarthrose avec bascule pelvienne en coxarthrose bilatérale ne saurait être regardée comme une aggravation de la scoliose à double courbure ayant justifié la pension attribuée. Les certificats médicaux produits, notamment celui du Dr Ledoze constatant en 2019 un périmètre de marche réduit à environ 25 mètres, ne sont pas de nature à remettre en cause cette appréciation. 4. M. B... n'est donc pas fondé à demander l'annulation du jugement du tribunal des pensions militaires d'invalidité de Caen du 27 décembre 2018 en tant qu'il a refusé sa demande tendant à lui accorder le bénéfice de la révision pour aggravation de l'infirmité pensionnée n°1, séquelles de scoliose à double courbure, et de retenir un taux d'invalidité de 100 % pour cette infirmité. En ce qui concerne l'infirmité n°2 : état bronchopatique chroniqué lié à la première infirmité, la scoliose : 5. Il ressort des pièces du dossier que, s'agissant de cette seconde infirmité, le Dr Tricaud conclut, dans son expertise du 29 juillet 2016, à un état bronchopathique chronique lié à la scoliose avec syndrome restrictif et obstructif sans atteinte hypoxémique. Il retient une aggravation du taux porté à 50 % en relation avec la première infirmité. Le Dr Ledoze, qui a examiné le requérant le 14 juin 2019, conclut son examen en ces termes : " il est extrêmement gêné par une insuffisance respiratoire mixte, obstructive et restrictive avec un essoufflement au moindre effort ". Ces expertises confirment le diagnostic réalisé le 3 avril 2015 par le Dr Simon selon lequel : " L'exploration fonctionnelles/respiratoire confirme l'aggravation puisqu'en 2011, le Volume Expiratoire Maximal par Seconde (VEMS) était à 1,02 L il est aujourd'hui à 0,89 L, soit 39 % de la norme sans aucune modification après Ventoline ". L'expertise du Dr Prigent, établie le 12 janvier 2017, ne saurait remettre en cause les conclusions concordantes des expertises précitées. Dans ces conditions, c'est à tort que le tribunal des pensions militaires d'invalidité de Caen a rejeté la demande de révision de pension pour aggravation sollicitée par M. B... relative à l'infirmité susvisée. 6. M. B... est donc fondé à demander l'annulation du jugement du tribunal des pensions militaires d'invalidité de Caen du 27 décembre 2018 en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à lui accorder le bénéfice de la révision pour aggravation de l'infirmité pensionnée n°2, état bronchopatique chroniqué lié à la première infirmité, la scoliose, et de retenir un taux d'invalidité de 40% pour cette infirmité. Le versement des arrérages de cette pension sera assorti des intérêts au taux légal, à compter de la date de réception de sa demande, soit le 13 avril 2015. En ce qui concerne la majoration de la pension pour tierce personne : 7. Il est constant que M. B... n'a pas sollicité dans sa demande initiale de révision de pension pour aggravation, en date du 13 avril 2015, la majoration de sa pension pour tierce personne. La référence à l'expression " baisse de forme de plus en plus " ne saurait être assimilée à une demande de majoration de tierce personne, à la suite de l'aggravation des infirmités déjà pensionnées au profit de M. B.... Par suite, la demande de l'intéressé sur ce point ne peut qu'être rejetée faute de liaison du contentieux. 8. Il résulte de ce qui précède que M. B... est seulement fondé, sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise complémentaire, à demander l'annulation du jugement du tribunal des pensions militaires d'invalidité de Caen du 27 décembre 2018 en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à lui accorder le bénéfice de la révision pour aggravation de l'infirmité pensionnée n°2, état bronchopatique chroniqué lié à la première infirmité, la scoliose, et de retenir un taux d'invalidité de 40% pour cette infirmité. Sur les frais liés au litige : 9. M. B... ayant obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me D..., avocate de M. B..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de ce dernier le versement à Me D... de la somme de 1 500 euros demandée à ce titre. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement du 27 décembre 2018 du tribunal des pensions militaires d'invalidité de Caen est annulé en tant qu'il a rejeté la demande de M. B... tendant à lui accorder le bénéfice de la révision pour aggravation de l'infirmité pensionnée n°2, état bronchopatique chroniqué lié à la première infirmité, la scoliose. Article 2 : La décision du 27 avril 2017 par laquelle le ministre de la défense a rejeté la demande de M. B... tendant à lui accorder le bénéfice de la révision pour aggravation de l'infirmité pensionnée n°2 est annulée. Article 3 : Il est attribué à M. B... une pension au taux global d'invalidité de 40% en ce qui concerne l'infirmité pensionnée n°2 à compter du 13 avril 2015, date de sa demande de révision. Article 4 : L'Etat versera à M. B... les intérêts au taux légal sur les arrérages de sa pension militaire d'invalidité relative à l'infirmité pensionnée n°2, à compter du 13 avril 2015, date de la réception de sa demande. Article 5 : L'Etat versera au conseil de M. B..., la somme de 1 500 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que ce conseil renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat. Article 6 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B... est rejeté. Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et à la ministre des armées. Délibéré après l'audience du 9 juillet 2021, à laquelle siégeaient : - M. Gaspon, président de chambre, - M. Coiffet, président-assesseur, - M. A..., premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 juillet 2021. Le rapporteur, F. A...Le président, O. GASPON La greffière, P. CHAVEROUX La République mande et ordonne à la ministre des armées en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 19NT03931
Cours administrative d'appel
Nantes
CAA de MARSEILLE, 8ème chambre, 20/07/2021, 19MA05842, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... D... a demandé au tribunal des pensions de Montpellier d'annuler la décision du 4 juin 2018 par laquelle le ministre de la défense a, d'une part, maintenu et consolidé sa pension au taux global de 40% pour l'infirmité " Etat de stress post-traumatique : reviviscences, troubles du sommeil, bradypsychie, troubles de l'humeur et du caractère, modification de la personnalité (taux global : 50% - taux antérieur non imputable : 25% )", et l'infirmité " Syndrome subjectif des traumatisés : asthénie, céphalées, troubles mnésiques et de la concentration, comportement régressif " (taux 10%) ", à compter du 2 mars 2017, et d'autre part, rejeté sa demande de pension nouvelle pour les infirmités " Lombosciatalgies gauche. Aucune organicité à l'examen clinique " et " Cervicalgies. Aucune organicité à l'examen clinique ". Par un jugement n° 18/00042 du 17 septembre 2019, le tribunal des pensions de Montpellier a ordonné avant-dire-droit une expertise sur la demande de pension au titre des infirmités " lombosciatalgies gauches " et " cervicalgies " et rejeté le surplus des conclusions de la demande de M. D.... Procédure devant la Cour : La cour régionale des pensions de Montpellier a transmis à la cour administrative d'appel de Marseille, en application du décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018 relatif au contentieux des pensions militaires d'invalidité, la requête présentée par M. D..., enregistrée à son greffe le 29 octobre 2019. Par cette requête et un mémoire, enregistré au greffe de la Cour le 25 juin 2021 à 11 h 20, M. D..., représenté par Me E..., demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal des pensions de Montpellier du 17 septembre 2019 en tant qu'il rejeté les conclusions de sa demande portant sur le taux de l'infirmité " Etat de stress post-traumatique : reviviscences, troubles du sommeil, bradypsychie, troubles de l'humeur et du caractère, modification de la personnalité " ; 2°) de porter à 50% le taux d'invalidité résultant de cette infirmité ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - c'est à tort que le tribunal a déclaré irrecevables ses demandes d'aggravation des infirmités déjà pensionnées au motif que l'arrêté du 6 mars 2017 concédant une pension au taux global de 40% serait devenu définitif faute d'avoir été contesté dans le délai de recours, et que le certificat du 25 septembre 2017 du médecin chef Paul ne fait état d'aucun taux de 25% non imputable s'agissant de l'infirmité " Etat de stress post-traumatique : reviviscences, troubles du sommeil, bradypsychie, troubles de l'humeur et du caractère, modification de la personnalité au taux de 50%, sans application d'un taux antérieur non imputable. Par un mémoire en défense enregistré le 19 mars 2021, la ministre des armées conclut au rejet de la requête. La ministre fait valoir que les moyens soulevés par M. D... ne sont pas fondés. Par ordonnance du 9 juin 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 25 juin 2021 à 12 heures. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. A..., - et les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. M. D..., né le 27 juillet 1970, militaire engagé le 3 février 1991, a été rayé des contrôles de l'armée de terre le 12 décembre 2019. Il était titulaire d'une pension militaire d'invalidité concédée à titre temporaire par arrêté du 6 mars 2017 avec jouissance du 3 mars 2014 au 2 mars 2017, au taux global de 40%, pour deux infirmités " état de stress post-traumatique : reviviscences, troubles du sommeil, bradypsychie, troubles de l'humeur et du caractère, modification de la personnalité " et " syndrome subjectif des traumatisés : asthénie, céphalées, troubles mnésiques et de la concentration, comportement régressif " dont le taux d'invalidité avait été fixé, respectivement, à 25% et à 10%. Le 23 octobre 2017, il a demandé, d'une part, le renouvellement de ces deux infirmités, d'autre part, l'attribution d'une pension pour deux infirmités nouvelles, des lombosciatalgies gauche et des cervicalgies. Par arrêté du 4 juin 2018, M. D... s'est vu attribuer à compter du 3 mars 2017 une pension à titre définitif au taux global de 40% pour les deux infirmités auparavant pensionnées à titre temporaire mais refuser tout droit à pension pour les deux infirmités nouvelles précitées. Il a contesté devant le tribunal des pensions de Montpellier le taux des infirmités ouvrant droit à pension et le refus de pensionner les deux infirmités nouvelles. Par un jugement du 17 septembre 2019, le tribunal des pensions de Montpellier a ordonné avant-dire-droit une expertise sur la demande de pension au titre des infirmités " lombosciatalgies gauches " et " cervicalgies " et rejeté le surplus des conclusions de la demande de M. D.... Ce dernier doit être regardé comme en relevant appel en tant que ce jugement a rejeté les conclusions de sa demande portant sur le taux de l'infirmité " Etat de stress post-traumatique : reviviscences, troubles du sommeil, bradypsychie, troubles de l'humeur et du caractère, modification de la personnalité ". Sur la régularité du jugement : 2. Aux termes de l'article L. 7 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre : " Il y a droit à pension définitive quand l'infirmité causée par la blessure ou la maladie est reconnue incurable. Il y a droit à pension temporaire si elle n'est pas reconnue incurable. (...) ". Aux termes de l'article L. 8 du même code : " La pension temporaire est concédée pour trois années. Elle est renouvelable par périodes triennales après examens médicaux. / Au cas où la ou les infirmités résultent uniquement de blessures, la situation du pensionné doit, dans un délai de trois ans, à compter du point de départ légal défini à l'article L. 6, être définitivement fixée soit par la conversion à un taux supérieur, égal ou inférieur au taux primitif, de la pension temporaire en pension définitive, sous réserve toutefois de l'application de l'article L. 29, soit, si l'invalidité a disparu ou est devenue inférieure au degré indemnisable par la suppression de toute pension. (...) ". L'article L. 121-8 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, en vigueur à compter du 1er janvier 2017, dispose : " La pension a un caractère définitif lorsque l'infirmité causée par la blessure ou la maladie est reconnue incurable. A défaut, la pension est concédée pour trois ans et peut être convertie en pension définitive dans les conditions prévues par décret en Conseil d'Etat. (...) ". Aux termes de l'article R. 121-4 du même code : " A l'issue du délai de trois ans, pour la ou les infirmités résultant uniquement de blessures, la situation du pensionné doit être définitivement fixée : / Soit par la conversion de la pension temporaire en pension définitive à un taux supérieur, égal ou inférieur au taux primitif ; / Soit, si l'invalidité a disparu ou est devenue inférieure au minimum indemnisable de 10 %, par la suppression de la pension. ". 3. Pour rejeter les conclusions de la demande de M. D... portant sur le taux des infirmités ouvrant droit à pension en application de l'arrêté du 4 juin 2018, s'agissant notamment de l'infirmité, qui résultait d'une blessure, " Etat de stress post-traumatique : reviviscences, troubles du sommeil, bradypsychie, troubles de l'humeur et du caractère, modification de la personnalité ", le tribunal des pensions a estimé qu'elles étaient irrecevables dans la mesure où M. D... n'avait pas contesté l'arrêté du 6 mars 2017 lui concédant une pension au même taux global de 40% et retenant le même taux d'invalidité pour les deux infirmités concernées que l'arrêté du 4 juin 2018. Cependant, le litige portait sur les droits à pension ouverts au requérant à la date du 3 mars 2017 sur lesquels ce dernier arrêté avait statué en application des dispositions citées au point 2 et non pas sur ceux ouverts à la date du 3 mars 2014 et jusqu'au 2 mars 2017, qui faisaient l'objet de l'arrêté du 6 mars 2017. Dans ces conditions, M. D... était recevable à contester l'arrêté du 4 juin 2018 en tant qu'il fixait le taux retenu pour le renouvellement de sa pension, à compter du 3 mars 2017. Par suite, le jugement attaqué doit être annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de sa demande portant sur le taux de l'infirmité " Etat de stress post-traumatique : reviviscences, troubles du sommeil, bradypsychie, troubles de l'humeur et du caractère, modification de la personnalité ". 4. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur ces conclusions présentées par M. D... devant le tribunal des pensions de Montpellier. Sur le renouvellement de la pension : 5. En premier lieu, il résulte de l'instruction que l'arrêté du 6 mars 2017 par lequel M. D... s'est vu reconnaître, à compter du 3 mars 2014, un droit à pension pour l'infirmité " Etat de stress post-traumatique : reviviscences, troubles du sommeil, bradypsychie, troubles de l'humeur et du caractère, modification de la personnalité " repose sur l'application des dispositions alors applicables de l'article L. 4 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre selon lesquelles : " En cas d'aggravation par le fait ou à l'occasion du service d'une infirmité étrangère à celui-ci, cette aggravation seule est prise en considération, dans les conditions définies aux alinéas précédents ". Ainsi, compte tenu d'un taux global de cette infirmité évalué à 50 % et d'un taux antérieur de 25 %, seule la part d'aggravation par le service de 25 % a ouvert droit à pension. L'arrêté du 6 mars 2017, notifié le 4 avril 2017, qui n'a pas été attaqué dans le délai de recours contentieux de 6 mois à compter de sa notification prévu à l'article R. 731-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, est devenu définitif en ce qui concerne notamment le taux de l'invalidité non imputable. 6. En second lieu, tant l'expert administratif que le médecin chargé des pensions auprès de la sous-direction des pensions ont constaté la stabilité de l'intensité des troubles de fonctionnement résultant de l'état de stress post-traumatique dans lequel se trouve le requérant. Celui-ci se borne à l'appui de sa requête à faire état de l'existence d'importants troubles cognitifs sans pour autant joindre le moindre certificat médical en ce sens qui constaterait une aggravation de son état. Il ne peut utilement se prévaloir du certificat daté du 25 septembre 2017 produit par l'administration dès lors que ce document porte sur le renouvellement d'un congé de longue durée et qu'il ne remet aucunement en cause le taux d'invalidité résultant de l'infirmité en litige, comme d'ailleurs celui de l'infirmité " syndrome subjectif des traumatisés : asthénie, céphalées, troubles mnésiques et de la concentration, comportement régressif ". Il sollicite une mesure d'expertise dans son dernier mémoire. 7. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'ordonner une mesure d'expertise, M. D... n'est pas fondé à demander la majoration du taux d'invalidité de l'infirmité " Etat de stress post-traumatique : reviviscences, troubles du sommeil, bradypsychie, troubles de l'humeur et du caractère, modification de la personnalité ". Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D É C I D E : Article 1er : Le jugement du tribunal des pensions d'invalidité de Montpellier du 17 septembre 2019 est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de M. D... portant sur le taux de l'infirmité " Etat de stress post-traumatique : reviviscences, troubles du sommeil, bradypsychie, troubles de l'humeur et du caractère, modification de la personnalité ". Article 2 : Les conclusions de M. D... présentées devant le tribunal des pensions d'invalidité de Montpellier portant sur le taux de l'infirmité " Etat de stress post-traumatique : reviviscences, troubles du sommeil, bradypsychie, troubles de l'humeur et du caractère, modification de la personnalité " et le surplus de ses conclusions devant la Cour sont rejetés. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... D... et à la ministre des armées. Délibéré après l'audience du 6 juillet 2021, où siégeaient : ' M. d'Izarn de Villefort, président, ' M. A..., premier conseiller, ' Mme C..., première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 20 juillet 2021. N° 19MA05842 6
Cours administrative d'appel
Marseille
CAA de NANTES, 6ème chambre, 20/07/2021, 19NT04317, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. C... D..., titulaire d'une pension militaire d'invalidité concédée par arrêté du 4 décembre 2017, a demandé au tribunal des pensions militaires d'invalidité d'Orléans l'annulation de cette décision. Par un jugement n° 18/00001 du 9 novembre 2018, le tribunal des pensions militaires d'invalidité d'Orléans a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 15 janvier 2019 au greffe de la cour régionale des pensions militaires d'Orléans et des mémoires complémentaires enregistrés les 16 mars et 6 avril 2021, sous le n° 19NT04317 devant la présente cour, M. D..., représenté par Me B..., demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal des pensions militaires d'invalidité d'Orléans du 9 novembre 2018 ; 2°) de retenir un taux d'invalidité de 40 % pour l'infirmité pensionnée ; 3°) d'enjoindre au ministre des armées de prendre un nouvel arrêté concédant un droit à pension militaire d'invalidité à son bénéfice, à un taux d'invalidité de 40 %, dans le délai de huit jours suivant le prononcé de l'arrêt à intervenir et d'assortir cette injonction d'une astreinte de 100 euros par jour de retard ; 4°) de mettre les dépens à la charge de l'Etat. Il soutient que : - l'expertise ayant conduit à la fixation de son taux d'invalidité à 25 % par l'arrêté du 4 décembre 2017 a été menée de façon expéditive et entache cette décision d'une irrégularité manifeste ; - pour étayer sa demande, il s'appuie sur des pièces médicales parfaitement recevables ; - le Dr Litinetskaia a déposé son rapport d'expertise au terme duquel elle conclut à un taux d'invalidité de 40 %, établi au regard du guide-barème des invalidités applicables au titre du code des pensions militaires. Par des mémoires en défense, enregistrés les 22 mars et 26 avril 2021, la ministre des armées conclut au rejet de la requête. Elle soutient que les moyens soulevés par M. D... ne sont pas fondés. M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle par une décision du 10 décembre 2018. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. A... ; - et les conclusions de M. Lemoine, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. Par un arrêté du 4 décembre 2017, il a été concédé à M. D... une pension militaire d'invalidité au taux global de 25 % pour des séquelles d'état de stress post-traumatique avec troubles de l'humeur et de la libido, répétitions, sursauts, cauchemars, anhédonie, hypervigilance et troubles des conduites, consécutifs au décès de l'un de ses camarades militaires durant une patrouille de reconnaissance à pied au Kosovo en 2009 dans le cadre d'une opération extérieure. Le 13 janvier 2018, le requérant a contesté cette décision devant le tribunal des pensions militaires d'invalidité d'Orléans. Par jugement du 9 novembre 2018, le tribunal des pensions militaires a rejeté la demande de M. D.... Par un recours enregistré le 15 janvier 2019 au greffe de la cour régionale des pensions d'Orléans, M. D... a relevé appel de ce jugement. Par un arrêt du 11 octobre 2019, la cour régionale des pensions militaires d'Orléans a, avant-dire droit, ordonné une expertise médicale. Par sa requête visée ci-dessus, M. D... relève appel du jugement du tribunal des pensions militaires d'invalidité d'Orléans du 9 novembre 2018 ayant rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 4 décembre 2017. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 2. Aux termes de l'article L. 6 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, dans sa version applicable à la date de la demande de pension : " La pension prévue par le présent code est attribuée sur demande de l'intéressé après examen, à son initiative, par une commission de réforme selon des modalités fixées par décret en Conseil d'Etat. / L'entrée en jouissance est fixée à la date du dépôt de la demande ". Il résulte de ces dispositions que c'est à cette date qu'il faut se placer pour évaluer le taux des infirmités à raison desquelles la pension ou sa révision est demandée. 3. Il ressort des pièces du dossier qu'au terme d'un arrêt rendu le 11 octobre 2019, la cour régionale des pensions militaires a, avant dire droit, ordonné une mesure d'expertise judiciaire confiée au Dr Litinetskaia, laquelle a déposé son rapport le 10 février 2021. L'expert désigné conclut au terme de son rapport : " (...) L'étude de l'évolution des troubles psychiques de M. D... a permis d'établir qu'il a développé des troubles de l'adaptation décrits dans le chapitre F 43.23 dans la CIM 10 (Classification Internationale des Troubles Mentaux et des Troubles du comportement). En effet, lors de l'examen psychiatrique, nous avons constaté des perturbations émotionnelles, à savoir : une tension anxieuse, des tendances dépressives, une inquiétude et un sentiment d'incapacité à faire face qui entraînent une certaine altération de son fonctionnement quotidien. Cet état est non seulement lié à l'évolution à ses troubles post-traumatiques, mais également à l'échec de ses tentatives de reconversion. (...) Au point de vue médico-légal, cet état est en grande partie (80 %) imputable à l'événement traumatique que M. D... a vécu le 16 novembre 2009. Il puise ses sources à la hauteur de 20 % dans les nombreux échecs que M. D... a connus dans sa carrière. (...) En analysant les conditions d'imputabilité séquellaire (...), nous avons constaté que le lien entre l'événement traumatique du 16 novembre 2009 et l'état psychique actuel de M. D... est direct et certain. (...) Selon le barème Guide-barème des invalidités applicables au titre du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, nous estimons que le taux d'incapacité présenté par M. D... est de 40 % (...) ". 4. Contrairement à ce qui est allégué par la ministre, si l'expert judicaire a décrit l'état de santé de M. D... à la date de son examen du 18 décembre 2020, constatant une évolution des troubles d'ordre post-traumatique fluctuante après amélioration et stabilisation entre 2015 et 2017, elle s'est également fondée sur l'étude de l'histoire de sa maladie et les documents retenus pour les opérations d'expertise, notamment son livret médical, en relevant l'absence de tout antécédent psychiatrique et de tout événement traumatique avant le 16 novembre 2009. Elle écarte notamment les symptômes anxio-dépressifs de l'intéressé qui ont leur origine, selon elle, dans les difficultés auxquelles M. D... a été confronté tout au long de sa vie professionnelle. Après avoir relevé la dimension évolutive de la pathologie de l'intéressé, elle conclut que le taux d'incapacité présenté par M. D... est de 40 %. Eu égard à ces différents éléments, le taux d'incapacité estimé par l'expert à 40 % doit être regardé comme fixé à la date de la demande de pension de l'intéressé, soit le 16 décembre 2013, dès lors que l'experte ne fait état d'aucun élément récent d'aggravation qui l'aurait conduite à retenir le taux de 40 %. Dans ces conditions, M. D... est fondé à demander l'annulation du jugement du tribunal des pensions militaires d'invalidité d'Orléans du 9 novembre 2018 ayant rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 4 décembre 2017 concédant à M. D... une pension militaire d'invalidité au taux global de 25 % pour des séquelles d'état de stress post-traumatique avec troubles de l'humeur et de la libido, répétitions, sursauts, cauchemars, anhédonie, hypervigilance et troubles des conduites. Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte : 5. Le présent arrêt implique nécessairement qu'il soit enjoint à la ministre des armées d'attribuer à M. D... une pension au taux global d'invalidité de 40% à compter du 16 décembre 2013, date de sa demande de pension, sans qu'il soit besoin d'assortir cette injonction de l'astreinte sollicitée. Sur les frais d'expertise : 6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre les frais et honoraires de l'expertise à la charge de l'Etat, qui est, dans la présente instance, la partie perdante. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement du 9 novembre 2018 du tribunal des pensions militaires d'invalidité d'Orléans est annulé. Article 2 : L'arrêté du 4 décembre 2017 concédant à M. D... une pension militaire d'invalidité au taux global de 25 % pour des séquelles d'état de stress post-traumatique avec troubles de l'humeur et de la libido, répétitions, sursauts, cauchemars, anhédonie, hypervigilance et troubles des conduites est annulé. Article 3 : Il est attribué à M. D... une pension au taux global d'invalidité de 40% à compter du 16 décembre 2013, date de sa demande de pension. Article 4 : Les frais de l'expertise ordonnée par la cour régionale des pensions militaires d'Orléans sont mis à la charge de l'Etat. Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. D... est rejeté. Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D... et à la ministre des armées. Délibéré après l'audience du 9 juillet 2021, à laquelle siégeaient : - M. Gaspon, président de chambre, - M. Coiffet, président-assesseur, - M. A..., premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 juillet 2021. Le rapporteur, F. A...Le président, O. GASPON La greffière, P. CHAVEROUX La République mande et ordonne à la ministre des armées en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 19NT04317
Cours administrative d'appel
Nantes
CAA de NANTES, 6ème chambre, 20/07/2021, 19NT04317, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. C... D..., titulaire d'une pension militaire d'invalidité concédée par arrêté du 4 décembre 2017, a demandé au tribunal des pensions militaires d'invalidité d'Orléans l'annulation de cette décision. Par un jugement n° 18/00001 du 9 novembre 2018, le tribunal des pensions militaires d'invalidité d'Orléans a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 15 janvier 2019 au greffe de la cour régionale des pensions militaires d'Orléans et des mémoires complémentaires enregistrés les 16 mars et 6 avril 2021, sous le n° 19NT04317 devant la présente cour, M. D..., représenté par Me B..., demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal des pensions militaires d'invalidité d'Orléans du 9 novembre 2018 ; 2°) de retenir un taux d'invalidité de 40 % pour l'infirmité pensionnée ; 3°) d'enjoindre au ministre des armées de prendre un nouvel arrêté concédant un droit à pension militaire d'invalidité à son bénéfice, à un taux d'invalidité de 40 %, dans le délai de huit jours suivant le prononcé de l'arrêt à intervenir et d'assortir cette injonction d'une astreinte de 100 euros par jour de retard ; 4°) de mettre les dépens à la charge de l'Etat. Il soutient que : - l'expertise ayant conduit à la fixation de son taux d'invalidité à 25 % par l'arrêté du 4 décembre 2017 a été menée de façon expéditive et entache cette décision d'une irrégularité manifeste ; - pour étayer sa demande, il s'appuie sur des pièces médicales parfaitement recevables ; - le Dr Litinetskaia a déposé son rapport d'expertise au terme duquel elle conclut à un taux d'invalidité de 40 %, établi au regard du guide-barème des invalidités applicables au titre du code des pensions militaires. Par des mémoires en défense, enregistrés les 22 mars et 26 avril 2021, la ministre des armées conclut au rejet de la requête. Elle soutient que les moyens soulevés par M. D... ne sont pas fondés. M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle par une décision du 10 décembre 2018. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. A... ; - et les conclusions de M. Lemoine, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. Par un arrêté du 4 décembre 2017, il a été concédé à M. D... une pension militaire d'invalidité au taux global de 25 % pour des séquelles d'état de stress post-traumatique avec troubles de l'humeur et de la libido, répétitions, sursauts, cauchemars, anhédonie, hypervigilance et troubles des conduites, consécutifs au décès de l'un de ses camarades militaires durant une patrouille de reconnaissance à pied au Kosovo en 2009 dans le cadre d'une opération extérieure. Le 13 janvier 2018, le requérant a contesté cette décision devant le tribunal des pensions militaires d'invalidité d'Orléans. Par jugement du 9 novembre 2018, le tribunal des pensions militaires a rejeté la demande de M. D.... Par un recours enregistré le 15 janvier 2019 au greffe de la cour régionale des pensions d'Orléans, M. D... a relevé appel de ce jugement. Par un arrêt du 11 octobre 2019, la cour régionale des pensions militaires d'Orléans a, avant-dire droit, ordonné une expertise médicale. Par sa requête visée ci-dessus, M. D... relève appel du jugement du tribunal des pensions militaires d'invalidité d'Orléans du 9 novembre 2018 ayant rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 4 décembre 2017. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 2. Aux termes de l'article L. 6 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, dans sa version applicable à la date de la demande de pension : " La pension prévue par le présent code est attribuée sur demande de l'intéressé après examen, à son initiative, par une commission de réforme selon des modalités fixées par décret en Conseil d'Etat. / L'entrée en jouissance est fixée à la date du dépôt de la demande ". Il résulte de ces dispositions que c'est à cette date qu'il faut se placer pour évaluer le taux des infirmités à raison desquelles la pension ou sa révision est demandée. 3. Il ressort des pièces du dossier qu'au terme d'un arrêt rendu le 11 octobre 2019, la cour régionale des pensions militaires a, avant dire droit, ordonné une mesure d'expertise judiciaire confiée au Dr Litinetskaia, laquelle a déposé son rapport le 10 février 2021. L'expert désigné conclut au terme de son rapport : " (...) L'étude de l'évolution des troubles psychiques de M. D... a permis d'établir qu'il a développé des troubles de l'adaptation décrits dans le chapitre F 43.23 dans la CIM 10 (Classification Internationale des Troubles Mentaux et des Troubles du comportement). En effet, lors de l'examen psychiatrique, nous avons constaté des perturbations émotionnelles, à savoir : une tension anxieuse, des tendances dépressives, une inquiétude et un sentiment d'incapacité à faire face qui entraînent une certaine altération de son fonctionnement quotidien. Cet état est non seulement lié à l'évolution à ses troubles post-traumatiques, mais également à l'échec de ses tentatives de reconversion. (...) Au point de vue médico-légal, cet état est en grande partie (80 %) imputable à l'événement traumatique que M. D... a vécu le 16 novembre 2009. Il puise ses sources à la hauteur de 20 % dans les nombreux échecs que M. D... a connus dans sa carrière. (...) En analysant les conditions d'imputabilité séquellaire (...), nous avons constaté que le lien entre l'événement traumatique du 16 novembre 2009 et l'état psychique actuel de M. D... est direct et certain. (...) Selon le barème Guide-barème des invalidités applicables au titre du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, nous estimons que le taux d'incapacité présenté par M. D... est de 40 % (...) ". 4. Contrairement à ce qui est allégué par la ministre, si l'expert judicaire a décrit l'état de santé de M. D... à la date de son examen du 18 décembre 2020, constatant une évolution des troubles d'ordre post-traumatique fluctuante après amélioration et stabilisation entre 2015 et 2017, elle s'est également fondée sur l'étude de l'histoire de sa maladie et les documents retenus pour les opérations d'expertise, notamment son livret médical, en relevant l'absence de tout antécédent psychiatrique et de tout événement traumatique avant le 16 novembre 2009. Elle écarte notamment les symptômes anxio-dépressifs de l'intéressé qui ont leur origine, selon elle, dans les difficultés auxquelles M. D... a été confronté tout au long de sa vie professionnelle. Après avoir relevé la dimension évolutive de la pathologie de l'intéressé, elle conclut que le taux d'incapacité présenté par M. D... est de 40 %. Eu égard à ces différents éléments, le taux d'incapacité estimé par l'expert à 40 % doit être regardé comme fixé à la date de la demande de pension de l'intéressé, soit le 16 décembre 2013, dès lors que l'experte ne fait état d'aucun élément récent d'aggravation qui l'aurait conduite à retenir le taux de 40 %. Dans ces conditions, M. D... est fondé à demander l'annulation du jugement du tribunal des pensions militaires d'invalidité d'Orléans du 9 novembre 2018 ayant rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 4 décembre 2017 concédant à M. D... une pension militaire d'invalidité au taux global de 25 % pour des séquelles d'état de stress post-traumatique avec troubles de l'humeur et de la libido, répétitions, sursauts, cauchemars, anhédonie, hypervigilance et troubles des conduites. Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte : 5. Le présent arrêt implique nécessairement qu'il soit enjoint à la ministre des armées d'attribuer à M. D... une pension au taux global d'invalidité de 40% à compter du 16 décembre 2013, date de sa demande de pension, sans qu'il soit besoin d'assortir cette injonction de l'astreinte sollicitée. Sur les frais d'expertise : 6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre les frais et honoraires de l'expertise à la charge de l'Etat, qui est, dans la présente instance, la partie perdante. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement du 9 novembre 2018 du tribunal des pensions militaires d'invalidité d'Orléans est annulé. Article 2 : L'arrêté du 4 décembre 2017 concédant à M. D... une pension militaire d'invalidité au taux global de 25 % pour des séquelles d'état de stress post-traumatique avec troubles de l'humeur et de la libido, répétitions, sursauts, cauchemars, anhédonie, hypervigilance et troubles des conduites est annulé. Article 3 : Il est attribué à M. D... une pension au taux global d'invalidité de 40% à compter du 16 décembre 2013, date de sa demande de pension. Article 4 : Les frais de l'expertise ordonnée par la cour régionale des pensions militaires d'Orléans sont mis à la charge de l'Etat. Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. D... est rejeté. Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D... et à la ministre des armées. Délibéré après l'audience du 9 juillet 2021, à laquelle siégeaient : - M. Gaspon, président de chambre, - M. Coiffet, président-assesseur, - M. A..., premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 juillet 2021. Le rapporteur, F. A...Le président, O. GASPON La greffière, P. CHAVEROUX La République mande et ordonne à la ministre des armées en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 19NT04317
Cours administrative d'appel
Nantes
CAA de LYON, 7ème chambre, 26/08/2021, 20LY01979, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 16 avril 2019, par laquelle la ministre des armées a refusé de faire droit à sa demande de pension militaire d'invalidité et de lui reconnaître un droit à pension pour deux infirmités nouvelles. Par un jugement n° 1908957 du 6 juillet 2020, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Procédure devant la cour Par une requête, enregistrée le 23 juillet 2020, et un mémoire, enregistré le 5 septembre 2020, M. B..., représenté par Me Cautenet, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 6 juillet 2020 ; 2°) d'annuler la décision du 16 avril 2019 et de faire droit à sa demande de pension au titre d'une hypoacousie bilatérale et d'acouphènes permanents à l'oreille gauche ; 3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 3 000 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de la renonciation par son conseil à la part participative de l'État à l'aide juridictionnelle. Par un mémoire récapitulatif, enregistré le 25 mars 2021, M. B... conclut aux mêmes fins que sa requête. Il soutient que : - les mentions portées dans son livret médical à la date du 9 juin 1979 établissent qu'à cette date il a été exposé à l'événement qui a provoqué ses troubles auditifs, pour lesquels il a sollicité une pension militaire d'invalidité le 7 février 2014, par fait de service ; - ce fait, consistant en son exposition sans protection à une séance de tirs d'artillerie, est à l'origine de ses infirmités ; - cette exposition personnelle excède les conditions habituelles de service ; - il justifie d'une atteinte auditive, qui s'est aggravée avec le temps, depuis cette date, constituant une infirmité ; - la perte par l'administration des autres éléments de son dossier qui auraient permis d'établir plus amplement les faits ne peut lui être opposée. Par un mémoire en défense, enregistré le 9 février 2021, et un mémoire complémentaire, enregistré le 26 avril 2021 (ce dernier non communiqué), la ministre des armées conclut au rejet de la requête. Elle soutient que : - le lien entre l'infirmité alléguée et le service, qu'il appartient à M. B... d'établir, n'est pas admis par l'administration ; - M. B... n'établit pas le lien entre ses infirmités et le service, non plus que la réalité du fait générateur. M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 19 août 2020. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018 ; - le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Josserand-Jaillet, président ; - les conclusions de M. Chassagne, rapporteur public ; - et les observations de Me Cautenet, pour M. B... ; Considérant ce qui suit : 1 M. A... B..., engagé volontaire dans l'armée de terre le 3 octobre 1972, a été rayé des cadres le 14 mai 2007 au grade de major. Titulaire d'une pension militaire d'invalidité au taux de 30 % pour " séquelles d'entorse du genou droit évolutive " à la suite d'une blessure reçue en service le 16 janvier 1997, il a sollicité le 7 février 2014 une pension pour une nouvelle infirmité constituée par des acouphènes et une hypoacousie qu'il attribue à une exposition au bruit sans protection lors d'une séance de tirs d'artillerie le 9 juin 1979. Par une décision du 16 avril 2019, la ministre des armées a rejeté cette demande. M. B... fait appel du jugement du 6 juillet 2020 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté son recours contre ce refus. 2 Aux termes de l'article L. 151-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, qui reprend les dispositions de l'ancien article L. 6 de ce même code : " La pension militaire d'invalidité prévue par le présent code est attribuée sur demande de l'intéressé. L'entrée en jouissance est fixée à la date du dépôt de la demande (...). " 3 Aux termes de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, en vigueur à la date de la demande de M. B... : " Ouvrent droit à pension : 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service (...). " Aux termes de l'article L. 3 du même code, alors applicable : " Lorsqu'il n'est pas possible d'administrer ni la preuve que l'infirmité ou l'aggravation résulte d'une des causes prévues à l'article L. 2, ni la preuve contraire, la présomption d'imputabilité au service bénéficie à l'intéressé à condition : 1° S'il s'agit de blessure, qu'elle ait été constatée avant le renvoi du militaire dans ses foyers ; 2° S'il s'agit d'une maladie, qu'elle n'ait été constatée qu'après le quatre-vingt-dixième jour de service effectif et avant le soixantième jour suivant le retour du militaire dans ses foyers ; 3° En tout état de cause, que soit établie, médicalement, la filiation entre la blessure ou la maladie ayant fait l'objet de la constatation et l'infirmité invoquée (..). " 4 Il résulte de ces dispositions que le demandeur d'une pension, s'il ne peut prétendre au bénéfice de la présomption légale d'imputabilité au service, doit rapporter la preuve de l'existence d'un fait précis ou de circonstances particulières de service à l'origine de l'affection qu'il invoque. Cette preuve ne saurait résulter de la seule circonstance que l'infirmité soit apparue durant le service, ni d'une hypothèse médicale, ni d'une vraisemblance, ni d'une probabilité, aussi forte soit-elle. 5 Si M. B... fait valoir, sans être contredit par l'administration, qu'à l'occasion d'une mutation en 2001 son dossier administratif, à l'exception de son livret médical transmis par une autre voie, a été égaré, et aussi regrettable que soit cette circonstance, il ne saurait être tiré de cette dernière un renversement de la charge de la preuve des faits à l'origine de l'infirmité invoquée qui, ainsi qu'il a été dit au point 4, pèse sur l'intéressé. 6 Il ressort du livret médical de M. B... produit à l'instance qu'ont été portées par le médecin qui l'a consulté à l'hôpital du Val-de-Grâce le 9 juin 1979 les mentions " Sifflement et douleurs dans les oreilles suite à un tir. Etant exposé pendant toute la durée du tir sans casque à une ambiance hypersonore pouvant être responsable d'une fragilisation de la cochlée. Il est à craindre une aggravation avec le temps. A inscrire au registre des constatations de l'unité ". Or, à supposer même que, à elles seules, et alors même que, en l'absence de tout autre élément au dossier, elles rapportent des circonstances alléguées par l'intéressé, ces mentions puissent révéler un incident de service au cours duquel M. B... aurait été spécialement exposé, il résulte de l'instruction et notamment d'un examen ORL pratiqué le 23 novembre 1993 que ce n'est qu'à cette date que seraient apparus les acouphènes et plus tard encore, en 2001, la sensation de perte auditive au titre desquels M. B... a sollicité, le 7 février 2014, une pension. Dans ces conditions, et en tout état de cause, et tandis qu'aucune des pièces du dossier n'élimine notamment une évolution des capacités auditives de M. B... en raison du seul vieillissement physiologique à compter de 1993, celui-ci n'établit pas, ainsi qu'il lui incombe, de lien de filiation médicale entre les séances de tir auxquelles il aurait participé en 1979 et les infirmités constatées à compter de 1993, très postérieurement à la date de l'événement dont il fait état sans ainsi en établir le caractère traumatique. 7 Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Il suit de là que sa requête doit être rejetée, dont les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à la ministre des armées. Délibéré après l'audience du 8 juillet 2021 à laquelle siégeaient : M. Josserand-Jaillet, président de chambre ; M. Seillet, président assesseur ; Mme Djebiri, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 août 2021. N° 20LY01979 4
Cours administrative d'appel
Lyon
CAA de MARSEILLE, 8ème chambre, 20/07/2021, 19MA05841, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. C... E... a demandé au tribunal des pensions militaires de Montpellier d'annuler la décision du 24 avril 2018 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande de révision de sa pension militaire d'invalidité au titre de l'aggravation des deux infirmités pensionnées " Acouphènes gauches permanents à type de sifflements : taux 20% " et " Hypoacousie gauche post traumatique : taux 10% ". Par un jugement n° 18/00036 du 17 septembre 2019, le tribunal des pensions de Montpellier a rejeté la requête de M. E.... Procédure devant la Cour : La cour régionale des pensions de Montpellier a transmis à la cour administrative d'appel de Marseille, en application du décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018 relatif au contentieux des pensions militaires d'invalidité, la requête présentée par M. E..., enregistrée à son greffe le 30 octobre 2019. Par cette requête, et des mémoires enregistrés le 12 avril 2021 et le 25 juin 2021, M. E..., représenté par Me D..., demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal des pensions de Montpellier du 17 septembre 2019 ; 2°) de lui accorder la révision de sa pension au titre de l'aggravation de l'infirmité " Acouphènes gauches permanents à type de sifflements " au taux de 30% ; 3°) à titre subsidiaire, d'ordonner une expertise médicale. Il soutient que : - l'expert n'a pas distingué entre les causes liées à sa blessure et des causes indépendantes pour apprécier l'aggravation de son infirmité " Acouphènes gauches permanents à type de sifflements " ; - l'aggravation de cette infirmité n'est pas due à sa maladie de Ménière et à son hypertension artérielle ; - le taux d'invalidité de cette infirmité, fixé initialement à 20%, doit être porté à 30%. Par deux mémoires en défense enregistrés le 16 mars 2021 et le 27 avril 2021, la ministre des armées conclut au rejet de la requête. La ministre fait valoir que les moyens soulevés par M. E... ne sont pas fondés. Par ordonnance du 9 juin 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 25 juin 2021 à 12 heures. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; - la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. A..., - et les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. M. E..., né le 12 octobre 1958, appelé du contingent, a été rayé des contrôles de l'armée de terre le 1er décembre 1981 au grade de maréchal des logis. Victime de l'explosion d'une grenade à plâtre le 10 mars 1981, il est titulaire d'une pension militaire d'invalidité avec jouissance au 1er janvier 2006, au taux global de 35%, pour deux infirmités " Acouphènes gauches permanents à type de sifflements : taux 20% " et " Hypoacousie gauche post traumatique : taux 10% ". Il relève appel du jugement du 17 septembre 2019 par lequel le tribunal des pensions de Montpellier a rejeté sa requête contre la décision du 24 avril 2018 par laquelle la ministre de la défense a rejeté sa demande de révision de cette pension présentée le 3 novembre 2016 au titre de l'aggravation de ses infirmités en tant que le tribunal a rejeté ses conclusions portant sur l'infirmité " Acouphènes gauches permanents à type de sifflements ". 2. Aux termes de l'article L. 29 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, applicable au litige : " Le titulaire d'une pension d'invalidité concédée à titre définitif peut en demander la révision en invoquant l'aggravation d'une ou plusieurs infirmités en raison desquelles cette pension a été accordée. / Cette demande est recevable sans condition de délai. / La pension ayant fait l'objet de la demande est révisée lorsque le degré d'invalidité résultant de l'infirmité ou de l'ensemble des infirmités est reconnu supérieur de 10 % au moins du pourcentage antérieur. Toutefois, l'aggravation ne peut être prise en considération que si le supplément d'invalidité est exclusivement imputable aux blessures et aux maladies constitutives des infirmités pour lesquelles la pension a été accordée. La pension définitive révisée est concédée à titre définitif ". Il résulte des dispositions de l'article L. 29 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre que le droit à pension est destiné à réparer toutes les conséquences des faits de service dommageables telles qu'elles se révèlent par suite de l'évolution physiologique, pour autant qu'aucune cause étrangère, telle qu'une affection distincte de l'affection pensionnée, ne vienne, pour sa part, aggraver l'état de l'intéressé. 3. Il résulte de l'instruction que, par une décision du 9 juin 2008 devenue définitive, le ministre de la défense a rejeté la demande de révision que M. E..., alors titulaire d'une pension militaire d'invalidité pour la seule infirmité " acouphènes gauches permanents à titre de sifflements ", avait présentée au motif que l'hypoacousie de l'oreille gauche dont il demandait réparation devait en réalité être scindée en une infirmité " hypoacousie gauche post-traumatique, imputable au blast du 10 mars 1981 mais restant évaluée à 0 % et en une infirmité " baisse de l'audition par évolution d'une maladie de Ménière ", laquelle résultait de maladie étrangère au service et n'avait pas été aggravée par celui-ci. 4. Le médecin mandaté par l'administration pour examiner M. E... a constaté dans son rapport établi le 5 décembre 2017 que si l'hypoacousie de l'oreille gauche dont le requérant est atteint ne s'était pas aggravée, le taux d'invalidité correspondant aux acouphènes aigus et permanents devait au contraire être porté de 20 % à 30 % en raison d'une aggravation, révélée notamment par les troubles du sommeil et de la surdité générés ainsi que par une intolérance au bruit. Sans remettre en cause la réalité de cette aggravation, le médecin conseil chargé des pensions militaires d'invalidité à la sous-direction des pensions a relevé dans son avis du 25 janvier 2018, d'une part, que la maladie de Ménière et l'hypertension artérielle dont M. E... souffre également étaient susceptibles d'intervenir dans l'aggravation des acouphènes, d'autre part, que les acouphènes consécutifs à un blast ne s'aggravent pas en l'absence de nouveaux traumatismes sonores ou autres pathologies. Pour rejeter la demande de révision pour aggravation formulée par le requérant, le tribunal des pensions s'est fondé sur les dispositions précitées de l'article L. 29 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre après avoir estimé que la part de l'aggravation de l'infirmité en litige exclusivement imputable à l'accident du 10 mars 1981, était nécessairement inférieure à 10% compte tenu de l'existence des deux causes étrangères relevées dans l'avis précité du 25 janvier 2018. 5. D'une part cependant, il ne résulte pas du rapport du 5 décembre 2017 rendu par l'expert administratif, qui a eu en mains le dossier de l'intéressé, que la maladie de Ménière et l'hypertension artérielle aient eu une incidence sur l'aggravation des acouphènes dont M. E... est atteint, l'avis du 25 janvier 2018 se bornant d'ailleurs à indiquer que ces pathologies étrangères au service étaient susceptibles de contribuer à cette aggravation. Il n'est pas allégué en défense que ces deux pathologies se seraient elles-mêmes aggravées. D'autre part, l'administration ne démontre par aucun document médical notamment que des acouphènes d'origine traumatique ne s'aggravent jamais dans le temps en l'absence d'un autre traumatisme sonore alors qu'il résulte au contraire des mentions de la décision du 9 juin 2008 citée au point 3 qu'en ce qui concerne l'hypoacousie gauche consécutive au blast subi par M. E... le 10 mars 1981, le taux d'invalidité de cette dernière infirmité était évalué à la date de cette décision à 0 % alors que ce taux est aujourd'hui fixé à 10 %. Dans ces conditions, conformément aux dispositions de l'article L. 29 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, l'aggravation des acouphènes gauches doit être prise en considération dès lors qu'il n'est pas établi que le supplément d'invalidité de 10 % n'est pas exclusivement imputable à la blessure constitutive de cette infirmité. 6. Il résulte de tout ce qui ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'ordonner une mesure d'expertise, M. E... est fondé à soutenir, d'une part, que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal des pensions de Montpellier a rejeté sa demande, d'autre part, qu'il a droit à la révision de la pension militaire d'invalidité dont il est titulaire dans les conditions précisées au point 5. D É C I D E : Article 1er : Le jugement du tribunal des pensions de Montpellier du 17 septembre 2019 est annulé. Article 2 : M. E... a droit à la révision de la pension militaire d'invalidité dont il est titulaire par suite de l'aggravation de l'infirmité " Acouphènes gauches permanents à type de sifflements " dont le taux doit être porté à 30 %. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... E... et à la ministre des armées. Délibéré après l'audience du 6 juillet 2021, où siégeaient : ' M. d'Izarn de Villefort, président, ' M. A..., premier conseiller, ' Mme B..., première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 20 juillet 2021. N° 19MA05841 5
Cours administrative d'appel
Marseille