Jurisprudence
La jurisprudence est l'ensemble des décisions rendues par les juridictions administratives, pendant une certaine période dans une matière, dans une branche ou dans l'ensemble du droit.
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Conseil d'État, 2ème chambre, 29/06/2023, 465924, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : M. B... A... a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler la décision du 13 avril 2017 par laquelle le ministre de la défense a rejeté sa demande de pension militaire d'invalidité et, à titre subsidiaire, d'ordonner une expertise médicale. Par un jugement n° 1903896 du 21 janvier 2020, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande. Par un arrêt n° 20NT00968 du 17 mai 2022, la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté l'appel formé par M. A... contre ce jugement. Par un pourvoi sommaire et deux mémoires complémentaires, enregistrés les 19 juillet 2022, 19 octobre 2022 et 10 mars 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler cet arrêt ; 2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Alexandre Trémolière, maître des requêtes en service extraordinaire, - les conclusions de M. Clément Malverti, rapporteur public, La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Krivine, Viaud, avocat de M. A... ; Considérant ce qui suit : Sur la régularité de l'arrêt attaqué : 1. Aux termes du dernier alinéa de l'article R. 741-2 du code de justice administrative : " La décision fait apparaître la date de l'audience et la date à laquelle elle a été prononcée ". La circonstance selon laquelle l'arrêt attaqué fait état de deux dates d'audience différentes est sans influence sur la régularité dudit arrêt dès lors que les pièces du dossier d'appel, en particulier l'avis d'audience, permettent d'établir la date exacte de celle-ci et que, par suite, l'erreur qui affecte l'une de ces dates est purement matérielle. Sur le bien fondé de l'arrêt attaqué : 2. Aux termes de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre dans sa rédaction applicable au litige : " Ouvrent droit à pension : 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; / 2° Les infirmités résultant de maladies contractées par le fait ou à l'occasion du service ; / 3° L'aggravation par le fait ou à l'occasion du service d'infirmités étrangères au service ; / 4° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'accidents éprouvés entre le début et la fin d'une mission opérationnelle, y compris les opérations d'expertise ou d'essai, ou d'entraînement ou en escale, sauf faute de la victime détachable du service ". L'article L. 3 du même code dispose : " Lorsqu'il n'est pas possible d'administrer ni la preuve que l'infirmité ou l'aggravation résulte d'une des causes prévues à l'article L. 2, ni la preuve contraire, la présomption d'imputabilité au service bénéficie à l'intéressé à condition : / 1° S'il s'agit de blessure, qu'elle ait été constatée avant le renvoi du militaire dans ses foyers ; / 2° S'il s'agit d'une maladie, qu'elle n'ait été constatée qu'après le quatre-vingt-dixième jour de service effectif et avant le soixantième jour suivant le retour du militaire dans ses foyers ; / 3° En tout état de cause, que soit établie, médicalement, la filiation entre la blessure ou la maladie ayant fait l'objet de la constatation et l'infirmité invoquée (...) ". 3. Il résulte des dispositions précitées au point 2 que le demandeur d'une pension, s'il ne peut prétendre au bénéfice de la présomption légale d'imputabilité au service, doit rapporter la preuve de l'existence d'un fait précis ou de circonstances particulières de service à l'origine de l'affection qu'il invoque. Cette preuve ne saurait résulter de la seule circonstance que l'infirmité soit apparue durant le service, ni d'une hypothèse médicale, ni d'une vraisemblance, ni d'une probabilité, aussi forte soit-elle. 4. En premier lieu, M. A... n'est pas fondé à soutenir que la cour administrative d'appel de Nantes a méconnu son office et entaché son arrêt de contradiction de motifs en jugeant que lorsque la présomption légale d'imputabilité au service ne trouve pas à s'appliquer, la preuve de cette imputabilité peut être apportée par tout moyen à l'exception de ceux énumérés au point 3. 5. En deuxième lieu, les principes exposés au point 3 n'interdisent pas aux juges du fond, faisant usage de leur pouvoir souverain d'appréciation, de puiser dans l'ensemble des renseignements contenus au dossier une force probante suffisante pour former leur conviction et décider en conséquence que la preuve de l'imputabilité au service doit, par dérogation à ces principes, être regardée comme établie. La cour administrative d'appel de Nantes, en ne recourant pas à cette possibilité, s'est livrée à une appréciation souveraine des faits qui ne saurait être discutée devant le juge de cassation. 6. En troisième lieu, il ressort des pièces de la procédure que M. A..., s'il a invité la cour administrative d'appel de Nantes à faire usage de ses pouvoirs d'instruction pour solliciter de l'administration, d'une part, le dossier médical présenté au moment de son intégration dans l'armée, d'autre part, ses états de service et, plus largement, tous éléments utiles de nature strictement médicale en sa possession susceptibles d'établir le lien qu'il allègue entre un fait précis de service et les infirmités invoquées, n'établit pas qu'il se trouverait dans l'impossibilité de fournir ces éléments. Par suite, il n'est pas fondé à soutenir que la cour aurait méconnu les règles relatives à la charge de la preuve en s'abstenant de solliciter ces éléments auprès de l'administration. 7. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 4 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre : " (...) Il est concédé une pension : / 1° Au titre des infirmités résultant de blessures, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse 10 % ; / 2° Au titre d'infirmités résultant de maladies associées à des infirmités résultant de blessures, si le degré total d'invalidité atteint ou dépasse 30 % ; / 3° Au titre d'infirmité résultant exclusivement de maladie, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse : / 30 % en cas d'infirmité unique ; / 40 % en cas d'infirmités multiples./ En cas d'aggravation par le fait ou à l'occasion du service d'une infirmité étrangère à celui-ci, cette aggravation seule est prise en considération, dans les conditions définies aux alinéas précédents./ Toutefois, si le pourcentage total de l'infirmité aggravée est égal ou supérieur à 60 %, la pension est établie sur ce pourcentage. ". Pour l'application de ces dispositions, une infirmité doit être regardée comme résultant d'une blessure lorsqu'elle trouve son origine dans une lésion soudaine, consécutive à un fait précis de service. En l'absence de tout fait précis de service ayant causé un traumatisme qui serait à l'origine de l'infirmité litigieuse, celle-ci doit être qualifiée de maladie. 8. Pour dénier à M. A... un droit à pension pour l'affection invoquée, la cour administrative d'appel de Nantes a relevé que M. A..., qui ne rentre dans aucun des cas de présomption d'imputabilité prévus à l'article L. 3 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, premièrement n'était pas, contrairement à ce qu'il soutient, sur un théâtre d'opération extérieure lors de l'accident survenu le 15 octobre 2001 et que les mentions de son livret militaire concernant cet accident, qui font état d'une dorsalgie aiguë, ne suffisent pas à établir un lien de causalité avec l'affection invoquée consistant en une lombalgie, deuxièmement que M. A..., s'il évoque à titre subsidiaire un accident survenu le 27 août 2001 lors d'une opération extérieure, n'établit ni la réalité de cette opération, ni la cause de l'arrêt de travail qui lui a été prescrit à l'époque, troisièmement que si l'évolution lente de la pathologie de M. A... rend difficile d'en fixer l'élément déclencheur, cette circonstance confirme seulement que son infirmité est susceptible d'être reconnue comme une maladie imputable au service et non comme un accident de service, quatrièmement que les expertises médicales confirment que M. A... souffrait dès 2002 d'une " discopathie débutante des deux derniers étages " et a souffert d'une lombalgie avec sciatalgies en juin 2009 et, enfin, que si certains médecins reconnaissent que M. A... présente un degré d'invalidité de 30 %, ils n'admettent, dans le meilleur des cas, le lien avec le service qu'à hauteur de 15 %, ce taux restant inférieur au seuil permettant l'octroi d'une pension militaire d'invalidité pour une maladie hors temps de guerre. La cour a ce faisant, sans commettre d'erreur de droit, porté sur les pièces du dossier une appréciation souveraine qui n'est pas entachée de dénaturation. 9. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué. 10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise, à ce titre, à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.D E C I D E : -------------- Article 1er : Le pourvoi de M. A... est rejeté. Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. B... A... et au ministre des armées.ECLI:FR:CECHS:2023:465924.20230629
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 8ème chambre, 30/06/2023, 467854, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : M. A... B... a demandé au tribunal des pensions militaires d'invalidité de la Somme d'annuler la décision du 29 novembre 2016 par laquelle le ministre de la défense a rejeté sa demande tendant à l'octroi d'une pension militaire d'invalidité et d'ordonner une expertise visant à déterminer le taux d'invalidité concernant, d'une part, sa blessure à la cheville, d'autre part, la maladie lombaire contractée dans l'exercice de ses fonctions. Par un jugement n° 1903510 du 8 juillet 2021, le tribunal administratif d'Amiens, auquel sa demande a été transmise, a rejeté celle-ci. Par un arrêt n° 21DA02149 du 26 juillet 2022, la cour administrative d'appel de Douai a annulé ce jugement en tant qu'il a rejeté la demande de M. B... tendant à l'annulation de la décision du 29 novembre 2016 du ministre de la défense rejetant sa demande de pension militaire d'invalidité au titre de l'instabilité de sa cheville droite, annulé cette décision dans cette mesure, enjoint au ministre des armées, dans un délai de trois mois à compter de la notification de son arrêt, de concéder à M. B... une pension militaire d'invalidité au taux de 15 % au titre de cette infirmité et rejeté le surplus des conclusions de l'appel formé par M. B... contre ce jugement. 1° Sous le n° 467854, par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un nouveau mémoire, enregistrés les 28 septembre 2022, 12 décembre 2022 et 26 mai 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre des armées demande au Conseil d'État : 1°) d'annuler les articles 1er à 3 de cet arrêt ; 2°) réglant l'affaire au fond dans cette mesure, de rejeter l'appel de M. B.... 2° Sous le n° 468899, par un pourvoi et un mémoire complémentaire, enregistrés les 14 novembre 2022 et 13 février 2023, M. B... demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler l'article 4 de cet arrêt ; 2°) réglant l'affaire au fond dans cette mesure, de faire droit à son appel ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros à verser à la SCP Bouzidi, Bouhanna, son avocat, au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. .................................................................................... Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des pensions militaire d'invalidité et des victimes de la guerre ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Jean-Marc Vié, maître des requêtes, - les conclusions de M. Romain Victor, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Bouzidi, Bouhanna, avocat de M. B... ; Considérant ce qui suit : 1. M. B..., militaire sous contrat dans l'armée de l'air depuis le 2 mars 1998, a demandé, le 2 avril 2013, la concession d'une pension militaire d'invalidité au titre d'une lombosciatalgie récidivante et de séquelles d'instabilité de la cheville droite. Par une décision du 29 novembre 2016, le ministre de la défense a rejeté cette demande aux motifs que le taux d'invalidité résultant de la lombosciatalgie, maladie contractée en temps de paix, n'atteignait pas le minimum requis de 30 % pour ouvrir des droits à pension et que celui résultant de l'instabilité de la cheville droite, acquise à la suite d'une blessure, n'atteignait pas le minimum requis de 10 %. Par un arrêt du 26 juillet 2022, la cour administrative d'appel de Douai, jugeant que l'infirmité relative à la cheville droite justifiait le bénéfice d'une pension calculée sur la base d'un taux d'invalidité de 15 %, a, dans ses articles 1er à 3, annulé le jugement du 8 juillet 2021 du tribunal administratif d'Amiens rejetant la demande de M. B... tendant à l'annulation de cette décision en tant qu'elle porte sur cette infirmité et a enjoint au ministre des armées de concéder à l'intéressé la pension correspondante, puis, dans son article 4, a rejeté le surplus des conclusions de l'appel de M. B.... Le ministre des armées se pourvoit en cassation contre les articles 1er à 3 de cet arrêt, tandis que M. B... se pourvoit en cassation contre son article 4. Il y a lieu de joindre ces pourvois pour statuer par une même décision. Sur le pourvoi du ministre des armées : 2. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'ainsi que l'a relevé la cour, l'expert médical diligenté pour l'instruction de la demande de pension de M. B..., après avoir fait état de la persistance, en dépit d'une ligamentoplastie réalisée en septembre 2012 et reprise en 2014, de douleurs de type mécanique au niveau de la malléole externe et d'une instabilité chronique de la cheville droite de M. B..., a, dans son rapport en date du 9 janvier 2016, estimé qu'un taux d'incapacité de 15 % devait être retenu à ce titre. Ainsi, c'est sans dénaturer les pièces du dossier que la cour a pu estimer, alors même que l'examen clinique ne mettait pas en évidence de déficit fonctionnel significatif en dehors des éléments précédents et que les avis du médecin chargé des pensions militaires d'invalidité de la sous-direction des pensions de la direction des ressources humaines du ministère de la Défense du 1er mars 2016 et de la commission consultative médicale du 8 novembre 2016 estimaient le taux d'invalidité correspondant inférieur au seuil de 10 %, que le taux d'invalidité résultant des blessures à la cheville survenues alors que l'intéressé était en service devait être fixé à hauteur de celui préconisé par le rapport d'expertise. 3. Il résulte de ce qui précède que le pourvoi du ministre des armées doit être rejeté. Sur le pourvoi de M. B... : 4. Aux termes de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, applicable à la date de la demande de pension : " Ouvrent droit à pension : / 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; 2° Les infirmités résultant de maladies contractées par le fait ou à l'occasion du service ; 3° L'aggravation par le fait ou à l'occasion du service d'infirmités étrangères au service (...)". Aux termes de l'article L. 4 du même code : " Les pensions sont établies d'après le degré d'invalidité. / Sont prises en considération les infirmités entraînant une invalidité égale ou supérieure à 10 %. / Il est concédé une pension : 1° Au titre des infirmités résultant de blessures, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse 10 % ; 2° Au titre d'infirmités résultant de maladies associées à des infirmités résultant de blessures, si le degré total d'invalidité atteint ou dépasse 30 % ; 3° Au titre d'infirmités résultant exclusivement de maladie, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse : 30 % en cas d'infirmité unique ; 40 % en cas d'infirmités multiples (...) ". Selon l'article L. 14 du même code : " Dans le cas d'infirmités multiples dont aucune n'entraîne l'invalidité absolue, le taux d'invalidité est considéré intégralement pour l'infirmité la plus grave et pour chacune des infirmités supplémentaires, proportionnellement à la validité restante. / A cet effet, les infirmités sont classées par ordre décroissant de taux d'invalidité. / Toutefois, quand l'infirmité principale est considérée comme entraînant une invalidité d'au moins 20 %, les degrés d'invalidité de chacune des infirmités supplémentaires sont élevés d'une, de deux ou de trois catégories, soit de 5, 10, 15 %, et ainsi de suite, suivant qu'elles occupent les deuxième, troisième, quatrième rangs dans la série décroissante de leur gravité (...) ". 5. Après avoir estimé qu'aucune des pièces médicales versées au dossier par M. B... ne permettait de remettre en cause l'appréciation du taux d'invalidité de 25 % préconisé par l'expert médical au titre de la lombosciatalgie récidivante dont il souffre, la cour en a déduit que ce taux n'atteignait pas le seuil de 30 % requis par l'article L. 4 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre et que M. B... n'était ainsi pas fondé à soutenir que l'administration lui avait refusé à tort la concession d'une pension militaire d'invalidité au titre de cette infirmité. En statuant ainsi, sans tirer les conséquences de ce qu'elle avait également jugé que l'intéressé souffrait, par ailleurs, du fait de blessures, d'une invalidité dont le taux devait être fixé à 15 %, si bien que, par application aux faits de l'espèce des règles précisées par l'article L. 14 du même code, le degré total d'invalidité de M. B... atteignait 40 % et dépassait ainsi le seuil fixé au 2° de l'article L. 4 du même code, la cour a commis une erreur de droit. 6. Il en résulte que M. B... est fondé à demander l'annulation de l'article 4 de l'arrêt qu'il attaque. Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37-2 de la loi du 10 juillet 1991 : 7. M. B... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle dans la présente instance. Ainsi, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relatives à l'aide juridique. Dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP Bouzidi, Bouhanna, avocat de M. B..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, il y a lieu de mettre à la charge de celui-ci la somme de 3 000 euros ;D E C I D E : -------------- Article 1er : Le pourvoi du ministre des armées est rejeté. Article 2 : L'article 4 de l'arrêt du 26 juillet 2022 de la cour administrative d'appel de Douai est annulé. Article 3 : L'affaire est, dans cette mesure, renvoyée à la cour administrative d'appel de Douai. Article 4 : L'Etat versera à la SCP Bouzidi, Bouhanna, avocat de M. B..., une somme de 3 000 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette société renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat. Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. A... B... et au ministre des armées. Délibéré à l'issue de la séance du 1er juin 2023 où siégeaient : M. Pierre Collin, président de chambre, présidant ; M. Hervé Cassagnabère, conseiller d'Etat et M. Jean-Marc Vié, maître des requêtes-rapporteur. Rendu le 30 juin 2023. Le président : Signé : M. Pierre Collin Le rapporteur : Signé : M. Jean-Marc Vié La secrétaire : Signé : Mme Michelle BailleulECLI:FR:CECHS:2023:467854.20230630
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 3ème chambre, 30/06/2023, 453834, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : M. C... D... a demandé au tribunal administratif de Limoges de condamner la communauté de communes du Pays d'Argenton-sur-Creuse à lui verser la somme de 40 000 euros, avec intérêts à compter du 4 mai 2016 et la somme de 20 000 euros, avec intérêts à compter du 2 août 2016. Par un jugement n°s1601132, 1601561 du 23 octobre 2018, le tribunal administratif de Limoges a condamné la communauté de communes du Pays d'Argenton-sur-Creuse à verser à M. D... la somme de 3 000 euros, avec intérêts à compter du 9 mai 2016 et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande. Par un arrêt n° 18BX04545 du 14 décembre 2020, la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté l'appel de M. D... et l'appel incident de la communauté de communes du Pays d'Argenton-sur-Creuse dirigés contre ce jugement. Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 22 juin et 23 septembre 2021, M. D... demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler cet arrêt ; 2°) de mettre à la charge de la communauté de communes du Pays d'Argenton-sur-Creuse la somme de 3 000 euros à verser à Me Thomas Haas, son avocat, au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Julien Autret, maître des requêtes, - les conclusions de Mme Marie-Gabrielle Merloz, rapporteure publique ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, à Maître Haas, avocat de M. C... D... et à Me Occhipinti, avocat de la communauté de communes du Pays d'Argenton-sur-Creuse ; Considérant ce qui suit : 1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. C... D..., adjoint technique principal, affecté au sein du service chargé de l'environnement de la communauté de communes du Pays d'Argenton-sur-Creuse en qualité de gardien de la déchetterie de Saint-Marcel, a été victime d'une chute, le 17 décembre 2015, alors qu'il manipulait une caissette dans le couloir de passage permettant le déplacement à l'intérieur du conteneur des déchets ménagers spéciaux, qui a provoqué une fracture de son pilon tibial droit et a été reconnue, le 28 décembre 2015, comme constitutive d'un accident imputable au service. Par un jugement du 23 octobre 2018, le tribunal administratif de Limoges a condamné la communauté de communes du Pays d'Argenton-sur-Creuse à verser à M. D... la somme de 3 000 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 9 mai 2016 et a rejeté le surplus de ses conclusions tendant à la condamnation de cette collectivité à lui verser la somme de 60 000 euros en réparation des préjudices qu'il alléguait. M. D... se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 14 décembre 2020 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté l'appel qu'il a formé contre ce jugement. 2. En premier lieu, la personne qui a demandé en première instance la réparation des conséquences dommageables d'un fait qu'elle impute à une administration est recevable à détailler ces conséquences devant le juge d'appel, en invoquant le cas échéant des chefs de préjudice dont elle n'avait pas fait état devant les premiers juges, dès lors que ces chefs de préjudice se rattachent au même fait générateur et que ses prétentions demeurent dans la limite du montant total de l'indemnité chiffrée en première instance, augmentée le cas échéant des éléments nouveaux apparus postérieurement au jugement, sous réserve des règles qui gouvernent la recevabilité des demandes fondées sur une cause juridique nouvelle. Cette personne n'est toutefois recevable à majorer ses prétentions en appel que si le dommage s'est aggravé ou s'est révélé dans toute son ampleur postérieurement au jugement qu'elle attaque. Il suit de là qu'il appartient au juge d'appel d'évaluer, à la date à laquelle il se prononce, les préjudices invoqués, qu'ils l'aient été dès la première instance ou pour la première fois en appel, et de les réparer dans la limite du montant total demandé devant les premiers juges. Il ne peut mettre à la charge du responsable une indemnité excédant ce montant que si le dommage s'est aggravé ou révélé dans toute son ampleur postérieurement au jugement attaqué. 3. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. D... demandait, en première instance comme dans ses premières écritures en appel, la condamnation de la communauté de communes du Pays d'Argenton-sur-Creuse à hauteur de 60 000 euros pour différents chefs de préjudice ayant tous pour fait générateur l'accident de service du 17 décembre 2015 et incluant le chef du préjudice patrimonial causé par les conséquences de cet accident sur le déroulement de sa carrière professionnelle. Dans le dernier état de ses écritures en appel, il a demandé la même condamnation de la collectivité, en y ajoutant une demande d'indemnisation pour une somme correspondant à l'allocation temporaire d'activité dont il soutient qu'il aurait dû bénéficier, compte tenu de la fixation de son taux d'invalidité à 15 % par le rapport médical du docteur A... B..., établi le 16 octobre 2019. 4. Il résulte de ce qui a été dit au point 2 ci-dessus, d'une part, que dès lors que ces dernières conclusions étaient présentées par M. D..., comme ses conclusions de première instance, sur le fondement de la responsabilité pour faute de la communauté de communes, et que le préjudice patrimonial qu'elles invoquaient se rattachait, comme ceux dont il s'était prévalu en première instance, au même fait générateur constitué par l'accident de service du 17 octobre 2015, il appartenait à la cour administrative d'appel, en tout état de cause, de se prononcer sur celles-ci, dans la limite du montant total de l'indemnité chiffrée en première instance. Il en résulte aussi, d'autre part, qu'il lui appartenait également d'apprécier, dans la mesure où l'intéressé soutenait que ces conclusions correspondaient à la révélation du préjudice dans toute son ampleur, conformément à la fixation de son taux d'invalidité à 15 % par le rapport médical du docteur A... B... établi le 16 octobre 2019, soit postérieurement à l'enregistrement de son appel, si ces conclusions justifiaient de mettre à la charge de la communauté de communes une indemnité excédant le montant total demandé en première instance. M. D... est donc fondé à soutenir qu'en rejetant ses conclusions comme irrecevables, au seul motif qu'elles étaient nouvelles en appel, la cour administrative d'appel a entaché son arrêt d'une erreur de droit. 5. En second lieu, il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que la cour administrative d'appel a relevé que le passage étroit du conteneur, dans lequel M. D... circulait au moment de l'accident de service, était dans un état dégradé, encombré par des sangles exposant notamment ses utilisateurs à de forts risques de chutes, pourvu d'un sol irrégulier et doté d'un éclairage insuffisant. Dans ces conditions, la circonstance que M. D... ait lui-même signalé à la communauté de communes l'état dégradé du conteneur et la présence de sangles ne saurait établir qu'il a fait preuve, en s'y déplaçant, d'un manque de prudence fautif. Par suite, la cour administrative d'appel a donné aux faits de l'espèce une qualification juridique erronée en retenant une telle faute de la part de M. D..., pour en déduire qu'elle justifiait une atténuation de la part de responsabilité de la communauté de communes du Pays d'Argenton-sur-Creuse dans l'accident de service survenu le 17 décembre 2015. 6. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'autre moyen du pourvoi, que M. D... est fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque. 7. M. D... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce et sous réserve que Me Thomas Haas, son avocat, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de la communauté de communes du Pays d'Argenton-sur-Creuse la somme de 3 000 euros à verser à M. D.... D E C I D E : -------------- Article 1er : L'arrêt du 14 décembre 2020 de la cour administrative d'appel de Bordeaux est annulé. Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Bordeaux. Article 3 : La communauté de communes du Pays d'Argenton-sur-Creuse versera à Me Thomas Haas, avocat de M. D..., la somme de 3 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. C... D... et à la communauté de communes du Pays d'Argenton-sur-Creuse. Délibéré à l'issue de la séance du 8 juin 2023 où siégeaient : M. Stéphane Verclytte, président de chambre, présidant ; M. Christian Fournier, conseiller d'Etat et M. Julien Autret, maître des requêtes-rapporteur. Rendu le 30 juin 2023. Le président : Signé : M. Stéphane Verclytte Le rapporteur : Signé : M. Julien Autret La secrétaire : Signé : Mme Elisabeth RavanneECLI:FR:CECHS:2023:453834.20230630
Conseil d'Etat
CAA de BORDEAUX, 6ème chambre, 28/06/2023, 21BX02335, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler la décision du 23 octobre 2019 par laquelle le directeur général de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités territoriales lui a attribué le bénéfice d'une pension d'invalidité non imputable au service. Par un jugement n° 1902872 du 23 mars 2021, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés le 31 mai 2021 et le 6 juillet 2021, Mme A..., représentée par Me Hirtzlin-Pinçon, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Pau du 23 mars 2021 ; 2°) d'ordonner, avant dire droit, qu'il soit procédé à un expertise médicale afin de déterminer l'origine de sa maladie, et si cette dernière est en lien avec le service ; 3°) d'annuler la décision du 23 octobre 2019 du directeur général de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités territoriales précitée ; 4°) d'enjoindre au directeur général de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités territoriales de prendre une nouvelle décision tenant compte de l'imputabilité au service de la retraite pour invalidité et de ses accessoires dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à venir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ; 5°) de mettre à la charge de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités territoriales les frais d'expertise ; 6°) de mettre à la charge de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités territoriales la somme de 2 500 euros HT en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les dépens. Elle soutient que : - la décision attaquée est entachée d'incompétence, la signature illisible ne permettant pas d'identifier l'identité de son auteur ; - la décision de mise en retraite est mal fondée en ce qu'elle n'a pas examiné l'imputabilité au service de l'invalidité dont elle est atteinte. Par un mémoire en défense, enregistré le 2 juillet 2021, le directeur des retraites et de la solidarité de la caisse des dépôts et consignations conclut à titre principal à l'irrecevabilité de la requête et subsidiairement à son rejet au fond. Il soutient que le jugement attaqué a été rendu en premier et dernier ressort par le tribunal administratif de Pau et qu'il ne peut faire l'objet que d'un pourvoi devant le Conseil d'Etat ; subsidiairement, il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraites ; - le code de justice administrative. - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Caroline Gaillard, - et les conclusions de Mme Florence Madelaigue, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. Mme A..., adjointe technique principale de deuxième classe, employée par la commune de Vic-en-Bigorre, a été victime d'un accident reconnu imputable au service le 9 septembre 2003, puis a connu une période d'arrêt maladie et de reprise à temps partiel entre le 14 mars 2005 et le 11 février 2012, après que le comité médical départemental l'eut déclarée apte à la reprise du travail. A compter du 8 avril 2013, Mme A... a été placée en arrêts de maladie ordinaire successifs, avec alternance de reprise de poste, jusqu'au 12 janvier 2016. Le comité médical départemental s'est prononcé le 22 mars 2019 en faveur de l'inaptitude totale et définitive de Mme A... à toutes fonctions avec saisine de la commission de réforme pour mise à la retraite pour invalidité non imputable au service. Par un avis du 30 avril 2019, cette dernière a adopté les mêmes conclusions. Par un arrêté du 8 octobre 2019, le maire de Vic-en-Bigorre a admis Mme A... à la retraite pour invalidité à compter du 1er novembre 2019 et l'a radiée des cadres. Par décision du 23 octobre 2019, le directeur général de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités territoriales (CNRACL) a attribué à l'intéressée le bénéfice d'une pension d'invalidité sans la cumuler avec une rente viagère d'invalidité prévue à l'article L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite. Mme A... a demandé au tribunal administratif de Pau l'annulation de cette décision en tant qu'elle ne lui reconnaît pas un droit à pension pour invalidité imputable au service et ne prévoit pas le versement d'une rente viagère d'invalidité. Elle relève appel du jugement par lequel le tribunal a rejeté sa demande. 2. Aux termes de l'article R. 351-2 du code de justice administrative : " Lorsqu'une cour administrative d'appel ou un tribunal administratif est saisi de conclusions qu'il estime relever de la compétence du Conseil d'Etat, son président transmet sans délai le dossier au Conseil d'Etat qui poursuit l'instruction de l'affaire. ". 3. Aux termes de l'article R. 811-1 du code de justice administrative : " le tribunal administratif statue en premier et dernier ressort : (...) 7° Sur les litiges en matière de pensions ". 4. Les conclusions dont est saisie la cour par Mme A... tendent à l'annulation de la décision du 23 octobre 2019 en tant qu'elle ne prévoit pas le versement d'une rente viagère d'invalidité et relèvent d'un litige en matière de pensions de retraite au sens des dispositions précitées de l'article R. 811-1 du code de justice administrative. Il en va de même des conclusions accessoires tendant à ordonner, avant dire droit, qu'il soit procédé à un expertise médicale afin de déterminer l'origine de sa maladie et, si cette dernière est en lien avec le service, que le directeur général de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL) prenne une nouvelle décision tenant compte de l'imputabilité au service de la retraite pour invalidité et de ses accessoires. Le Conseil d'État est, par suite, seul compétent pour en connaître. 5. Il résulte de ce qui précède, que le litige dont Mme A... a saisi le tribunal administratif de Pau relève du seul pourvoi en cassation. Il y a lieu, par suite, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, de transmettre l'ensemble des conclusions présentées par Mme A... au Conseil d'Etat. DECIDE : Article 1er : : La requête n° 21BX02335 présentée par Mme A... est transmise au Conseil d'Etat. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au directeur des retraites et de la solidarité de la caisse des dépôts et consignations. Délibéré après l'audience du 15 juin 2023 à laquelle siégeaient : Mme Florence Demurger, présidente, M. Frédéric Faïck, président-assesseur, Mme Caroline Gaillard, première conseillère, Rendu public par mise à disposition au greffe, le 28 juin 2023. La rapporteure, Caroline Gaillard La présidente, Florence Demurger La greffière, Catherine Jussy La République mande et ordonne au préfet des Hautes-Pyrénées en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21BX02335
Cours administrative d'appel
Bordeaux
CAA de TOULOUSE, 2ème chambre, 20/06/2023, 21TL02327, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier : - de condamner l'Etat à lui verser les sommes de 146 800 euros, ou au minimum 51 800 euros, au titre de son déficit fonctionnel permanent, 6 231,66 euros au titre de son déficit fonctionnel temporaire, 3 240,32 euros au titre de l'aide par tierce personne, 20 000 euros pour le pretium doloris, 4 000 euros pour le préjudice esthétique de 2 %, 2 000 euros au titre du déficit esthétique temporaire, 5 368 euros au titre des pertes de 20% de salaire sur 22 mois, 7 286,60 euros au titre des salaires dus à compter de sa démission jusqu'à la fin du contrat, 1 304,46 euros et 2 184,13 euros au titre de prélèvements indus sur ses comptes, 7 200 euros de perte de salaire du fait de la mention communiquée au jury du concours de gardien de la paix, le privant de réussite ou de chance sérieuse de réussite, 17 611 euros au titre de son contrat non honoré d'enseignant de piano, 17 737 euros pour son entreprise de facteur de piano qu'il a dû fermer, 10 000 euros au titre du préjudice psychologique et moral et du harcèlement subis du fait de l'accident et des fautes de l'Etat, 5 000 euros au titre du préjudice subi du fait du refus de l'administration de considérer l'expertise judiciaire, 50 000 euros du fait des incidences professionnelles, 24 000 euros de perte de deux années universitaires, 72 000 euros pour l'obligation de suivre un master, 2 184,13 euros de prélèvements sur salaire indus, 10 000 euros de préjudice d'agrément ainsi que 60 000 euros de préjudice sexuel et d'établissement, avec intérêts à compter de la demande préalable ; - d'ordonner la communication du bulletin de salaire de février 2015, de lui accorder une provision de 30 000 euros, d'ordonner une deuxième expertise, et de réserver les postes de véhicule et de réfection de salle d'eau adaptée, de lui verser les sommes de 21 464,36 euros et 10 244 euros, son état pouvant s'aggraver, d'enjoindre à l'Etat de régler une pension d'invalidité sur le fondement de l'évaluation fonction publique ou sécurité sociale ; - de mettre à la charge de l'Etat les dépens, la somme de 2 460 euros pour les deux expertises, et une somme de 3 000 euros au titre de l'article L761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n° 2004520 du 16 avril 2021, le tribunal administratif de Montpellier a condamné l'Etat à payer à M. B... une somme de 34 850 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 23 mars 2017, mis à la charge définitive de l'Etat les frais d'expertise, liquidés et taxés à la somme de 960 euros, mis également à sa charge une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et rejeté le surplus des conclusions de la requête. Procédure devant la cour : Par une requête et un dépôt de pièces, enregistrés les 16 juin et 12 décembre 2021, au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille sous le n°21MA02327 puis le 1er mars 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n°21TL02327, M. B..., représenté par Me Delort, demande à la cour : 1°) de condamner l'Etat à lui verser les sommes de 6 231,60 euros au titre de son déficit fonctionnel temporaire, de 3 240,32 euros au titre de l'aide par tierce personne, de 20 000 ou 8 000 euros au titre des souffrances endurées, de 2 000 euros au titre du préjudice esthétique temporaire, de 5 368 euros au titre des pertes de 20% de salaires sur 22 mois, de 7 286,60 euros au titre des salaires dus de la date de sa démission jusqu'à la fin du contrat, de 1 304,46 euros au titre de prélèvements indus sur ses comptes, de 7 200 euros au titre de pertes de salaires du fait de la mention communiquée au jury du concours de gardien de la paix, le privant de réussite à l'oral ou de chance sérieuse de réussite à ce concours, de 17 611 euros au titre de son contrat non honoré d'enseignant de piano, de 17 737 euros au titre de son entreprise de facteur de piano, de 146 800 euros au titre du déficit fonctionnel permanent ou, au moins de 51 800 euros, de 50 000 euros au titre de l'incidence professionnelle, de 72 000 euros au titre de l'obligation de formation universitaire, de 4 000 euros au titre du préjudice esthétique permanent, de 10 000 euros au titre du préjudice d'agrément, de 60 000 euros au titre du préjudice sexuel et d'établissement, de 10 000 euros au titre du préjudice moral, de 5 000 euros au titre du préjudice subi du fait du refus de l'administration de considérer l'expertise judiciaire et de 2 184,13 euros, somme indûment prélevée, avec intérêts de droit à compter de la demande préalable ; 2°) d'ordonner la communication du bulletin de salaire de février 2015 et d'enjoindre à l'Etat de régler une pension d'invalidité sur le fondement de l'évaluation fonction publique ; 3°) très subsidiairement, d'ordonner une seconde expertise et une provision de 5 000 euros à valoir sur l'aggravation des préjudices subis ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat les frais d'expertise et d'assistance à victime par expert privé, de réserver les postes de véhicule et de réfection de salle d'eau adaptée, à hauteur de 21 464,36 euros et 10 244 euros, de porter à 10 000 euros la somme mise à la charge de l'Etat en première instance au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat, au titre de l'instance d'appel, les dépens et une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - les juridictions administratives sont compétentes pour juger des incidences de son accident de service ; - la faute de l'administration est présumée du fait de la vétusté de la poutre et de l'absence de précision quant aux matelas ; - l'administration a commis une faute dans l'organisation de l'entraînement ; il a subi un retard et un défaut de prise en charge adéquate ; les actes de l'administration, qui a retardé le paiement de frais médicaux, a refusé des soins prescrits sans justification, lui a opposé des refus de formation infondés, ne lui a pas communiqué, malgré ses demandes, le bulletin de salaire de février 2015, a laissé un courrier dans sa boîte aux lettres, a effectué des prélèvements indus sur salaires alors qu'elle reconnaît qu'une somme de 2 184,13 euros doit lui être reversée et émis des titres de perception indus, doivent être qualifiés de harcèlement moral ; - l'expert désigné a grandement minimisé son préjudice psychologique ; la date de consolidation qu'il a fixée ne saurait être retenue et se situe au 24 octobre 2016 ; il a estimé des déficits fonctionnels temporaires trop réduits et a minimisé l'aide par tierce personne ; le taux de déficit permanent retenu est insuffisant, l'expert précisant lui-même que celui de 10 % retenu correspond à un taux de 20% dans la fonction publique ; il convient de relever les taux des préjudices subis, notamment celui du déficit fonctionnel permanent et de retenir un préjudice sexuel et d'établissement ainsi que l'incidence professionnelle ; - au titre des préjudices temporaires, il doit se voir allouer une somme de 6 231,60 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire, une somme de 3 240,32 euros au titre de l'aide par tierce personne, une somme de 20 000 euros au titre des souffrances endurées et de 2 000 euros au titre du préjudice esthétique temporaire ; ses pertes de salaires d'adjoint de sécurité de la date de l'accident jusqu'à sa démission s'élèvent à 5 368 euros et sa perte de salaires jusqu'au terme de son contrat à 7 287,60 euros ; ses pertes de salaires en qualité de professeur de piano s'établissent à 17 400 euros et les pertes financières de son entreprise de facteur et d'accordeur de piano à 17 637 euros ; - son déficit fonctionnel permanent s'établit à la somme de 146 800 euros ou, au moins, à celle de 51 800 euros ; il a subi une incidence sur sa carrière professionnelle qui peut être évaluée à la somme de 50 000 euros ; son obligation de formation peut être fixée à la somme de 72 000 euros ; son préjudice esthétique permanent peut être fixé à 4 000 euros ; il a subi un préjudice d'agrément qui sera fixé à la somme de 10 000 euros, un préjudice sexuel et d'établissement qui peut être évalué à celle de 30 000 euros et un préjudice moral fixé à la somme de 10 000 euros. Par un mémoire en défense, enregistré le 13 septembre 2022, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête de M. B.... Il fait valoir que la juridiction administrative n'est pas compétente pour statuer sur les conclusions tendant à indemniser les conséquences de l'accident au titre de la responsabilité sans faute de l'Etat, ni pour statuer sur la demande d'injonction de verser à l'intéressé une pension d'invalidité, que les conditions d'engagement de la responsabilité pour faute de l'Etat ne sont pas satisfaites en se référant aux écritures de première instance et à celles produites devant la cour administrative d'appel de Marseille et que M. B... ne produit pas d'éléments susceptibles de remettre en cause le bien-fondé des conclusions de l'expert. Par une ordonnance du 17 octobre 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 18 novembre 2022. Par une lettre du 30 mai 2023, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt à intervenir est susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrégularité du jugement attaqué en raison de l'incompétence de la juridiction administrative pour statuer sur la responsabilité sans faute de l'Etat, dans la mesure où un agent non titulaire de droit public, dès lors qu'il ne se prévaut pas d'une faute intentionnelle de son employeur ou de l'un des préposés de celui-ci, ne peut exercer contre cet employeur une action en réparation devant les juridictions administratives, conformément aux règles du droit commun, à la suite d'un accident de travail dont il a été victime (CE, 22 juin 2011, Mme C..., n°320744). M. B... a présenté des observations en réponse le 5 juin 2023. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de la sécurité sociale ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - le décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Thierry Teulière, premier conseiller, - et les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. M. B..., alors adjoint de sécurité de la police nationale, a chuté d'une poutre, le 26 mars 2013, lors d'une séance d'entraînement à l'école nationale de police de Nîmes. Cette chute a entraîné une rupture du ligament croisé antérieur de son genou gauche. L'accident a été reconnu imputable au service. Il relève appel du jugement du 16 avril 2021 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a notamment condamné l'Etat, sur le fondement de la responsabilité sans faute, à lui verser une somme de 34 850 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 23 mars 2017, en réparation des préjudices personnels résultant de cet accident. Sur le bien-fondé du jugement : En ce qui concerne les conclusions indemnitaires : S'agissant de la responsabilité sans faute de l'Etat : 2. Il résulte des dispositions des articles L. 451-1, L. 452-1, L. 452-3 tel qu'interprété par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2010-8 QPC du 18 juin 2010, L. 452-5 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale qu'un agent contractuel de droit public peut demander au juge administratif la réparation par son employeur du préjudice que lui a causé l'accident du travail dont il a été victime, dans la mesure où ce préjudice n'est pas réparé par application du code de la sécurité sociale, lorsque cet accident est dû à la faute intentionnelle de cet employeur ou de l'un de ses préposés. Il peut également exercer une action en réparation de l'ensemble des préjudices résultant de cet accident non couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale, contre son employeur, devant la juridiction de sécurité sociale, en cas de faute inexcusable de ce dernier, ou contre une personne autre que l'employeur ou ses préposés, conformément aux règles du droit commun, lorsque la lésion dont il a été la victime est imputable à ce tiers. 3. Il résulte, en revanche, des mêmes dispositions qu'en dehors des hypothèses dans lesquelles le législateur a entendu instituer un régime de responsabilité particulier, un agent contractuel de droit public, dès lors qu'il ne se prévaut pas d'une faute intentionnelle de son employeur ou de l'un des préposés de celui-ci, ne peut exercer contre cet employeur une action en réparation devant les juridictions administratives, conformément aux règles du droit commun, à la suite d'un accident du travail dont il a été la victime. 4. Les dispositions du 2° de l'article 2 du décret susvisé n°86-83 du 17 janvier 1986 qui prévoient que les prestations dues au titre de la législation sur les accidents du travail et maladies professionnelles aux agents non titulaires, qui n'ont pas été recrutés ou employés à temps incomplet ou sur des contrats à durée déterminée d'une durée inférieure à un an, sont servies par l'administration employeur, ne peuvent être utilement invoquées par M. B..., lequel ne conteste pas que la réglementation du régime général de sécurité sociale ainsi que celle relative aux accidents du travail et maladies professionnelles sont applicables à ces mêmes agents, en vertu du premier alinéa du même article. 5. Il résulte de ce qui a été dit aux points 2 à 4 que c'est à tort que le tribunal administratif a, sur le fondement des principes applicables aux fonctionnaires issus des articles L. 27 et L. 28 du code des pensions civiles et militaires, jugé que la responsabilité sans faute de l'Etat était engagée. 6. Il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par M. B.... S'agissant de la responsabilité de l'Etat du fait du défaut d'entretien de l'ouvrage public : 7. En invoquant la responsabilité présumée de l'administration, en particulier, en raison de l'état vétuste de la poutre depuis laquelle il a chuté le jour de son accident, M. B... invoque le défaut d'entretien normal d'un ouvrage public. Toutefois, le document d'une agence de détectives privés versé au dossier, qui serait fondé sur l'audition de personnels participants à la préparation sportive souhaitant conserver l'anonymat, est insuffisamment probant et ne permet pas, à lui seul, de tenir pour établi un tel état de vétusté de la poutre. En tout état de cause, ce bien meuble, dont il ne résulte pas de l'instruction qu'il ait été fixé au sol, ne peut être regardé, en l'absence de tout aménagement particulier, comme un élément de l'ouvrage public. Par suite, l'accident dont M. B... a été victime n'est pas imputable à un ouvrage public. S'agissant de la responsabilité pour faute de l'Etat : 8. En premier lieu, M. B... n'établit pas, par les éléments produits, notamment le rapport susmentionné d'enquête établi par un détective privé le 26 mars 2021, qui n'éclairent pas suffisamment les circonstances de l'accident ou bien qui se limitent à reproduire ses dires, l'absence alléguée d'équipement de sécurité ou de protection autour de la poutre à hauteur d'homme lors de l'entraînement du 26 mars 2013 alors que l'administration soutient au contraire en défense que des tapis et tatamis étaient installés au sol dans le gymnase afin de prémunir un risque de blessure. M. B... n'établit pas davantage le caractère défectueux ou non conforme du matériel utilisé ou la vétusté de la poutre. Ainsi, il ne résulte pas de l'instruction que l'accident de M. B... serait imputable à une défaillance ou une négligence de l'administration dans l'organisation de l'entraînement ou que cette dernière aurait manqué à ce titre à son obligation de sécurité et de protection. 9. En deuxième lieu, si M. B... se plaint d'un retard de prise en charge et d'une prise en charge inadéquate après l'accident en l'absence d'appel au service d'aide médicale urgente, il résulte de l'instruction qu'après sa chute, il a été vu par un moniteur puis conduit à l'infirmerie de l'école où l'infirmière qui l'a reçu lui a conseillé la consultation d'un médecin généraliste. Ce dernier, après examen le même jour, a établi un certificat médical indiquant un traumatisme du genou gauche en cours d'exploration. Il n'est pas contesté que ce médecin ne l'a pas orienté vers une prise en charge médicale urgente et il ressort en revanche des écritures de M. B... que le soir de l'accident, le commandant du service de police aux frontières a demandé qu'il soit escorté à la clinique la plus proche. Dans ces circonstances et alors que le référentiel national de compétences de sécurité civile invoqué par le requérant se borne à définir de simples recommandations sur des conduites à tenir, il ne résulte pas de l'instruction que l'administration aurait commis un manquement dans la prise en charge du requérant après sa blessure. 10. En troisième et dernier lieu, aux termes de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires applicable au litige, dont les dispositions sont désormais reprises à l'article L. 133-2 du code général de la fonction publique : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel (...) ". Il appartient à l'agent public qui soutient avoir été victime de faits constitutifs de harcèlement moral de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles d'en faire présumer l'existence. Il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile. Pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'administration auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral. Pour être qualifiés de harcèlement moral, ces agissements doivent être répétés et excéder les limites de l'exercice normal du pouvoir hiérarchique. 11. L'administration ne peut être tenue pour responsable des difficultés de prise en charge liées à la présentation de documents du ministère de l'intérieur, dénommés triptyques permettant la prise en charge des frais médicaux sans que l'agent ait besoin d'en faire l'avance dans la mesure où les professionnels de santé sont libres de refuser ce système plus favorable aux agents que ce que prévoit la législation. Par ailleurs, M. B... n'établit pas le caractère injustifié du refus de prise en charge d'un électro-stimulateur. L'administration n'a, en outre, commis aucune faute en ne donnant pas suite aux deux demandes de formation présentées par le requérant dès lors qu'il n'est pas contesté que la formation sollicitée n'était pas programmée sur la période considérée. Enfin, la cour administrative d'appel de Marseille, par un arrêt n°17MA03596 du 17 septembre 2019, a relevé l'absence de faute de l'Etat dans la mise en œuvre des titres de perception opposés à l'intéressé estimant que ce dernier n'établissait pas le caractère indu des sommes ainsi mises à sa charge. 12. Les éléments invoqués par M. B... tels que les retards de paiement de frais médicaux, refus de soins prescrits sans justification, refus de formation infondés, la proposition de reclassement inadaptée, le courrier laissé dans sa boite à lettres, l'absence de communication du bulletin de salaire de février 2015 malgré ses demandes, les prélèvements indus sur salaires et l'émission de titres de perception indus, pris dans leur ensemble, ne sont pas susceptibles, eu égard à ce qui a été dit au point précédent, de faire présumer l'existence d'agissements de harcèlement moral de la part de l'administration. 13. En revanche, l'administration a admis, dès la première instance qu'une somme de 2 184,13 euros doit être reversée à M. B..., au titre des prélèvements sur salaires qu'elle a effectués. Ce point n'est pas contesté en appel. 14. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit nécessaire d'ordonner une expertise, que l'Etat est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif l'a condamné à indemniser M. B... au titre de sa responsabilité sans faute. Ainsi, l'article 1er du jugement attaqué doit être annulé. L'Etat doit cependant être condamné à verser à M. B... une somme de 2 184,13 euros, assortie des intérêts à compter du 23 mars 2017, date de réception de sa demande préalable. En ce qui concerne les demandes d'injonction : 15. L'Etat étant seulement condamné à reverser un excédent de prélèvement sur les salaires de M. B..., l'exécution du présent arrêt n'implique, par voie de conséquence, ni d'ordonner la communication du bulletin de salaire du requérant pour le mois de février 2015, ni d'enjoindre à l'administration de lui régler une pension d'invalidité, ni d'accorder une provision à M. B... ou encore de réserver l'examen des postes de véhicule et de réfection de salle d'eau adaptée. Au demeurant, par l'arrêt précité du 17 septembre 2019, la cour administrative d'appel de Marseille a déjà rejeté les conclusions de M. B... tendant à la communication de son bulletin de salaire de février 2015 et par un arrêt n°20MA02792 du 20 juillet 2021, elle a également rejeté ses conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint à l'administration de lui verser une rente d'accident de travail. Sur les frais liés aux litiges : 16. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de laisser les frais d'expertise, liquidés et taxés à la somme de 960 euros, à la charge définitive de l'Etat. 17. Les frais engagés par M. B... pour se faire assister par un médecin expert ne font pas partie des dépens de la présente instance. La demande de M. B... sur ce point, présentée sur le fondement des dispositions de l'article R. 761-1 du code de justice administrative ne peut donc qu'être rejetée. 18. Le tribunal administratif n'a pas fait une insuffisante appréciation des frais exposés par M. B... en première instance en limitant à 1 500 euros la somme qu'il lui a allouée à ce titre. 19. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, la somme que demande M. B... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. D E C I D E : Article 1er : L'article 1er du jugement n° 2004520 du 16 avril 2021 du tribunal administratif de Montpellier est annulé. Article 2 : L'Etat est condamné à verser à M. B... une somme de 2 184,13 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 23 mars 2017. Article 3 : Les frais d'expertise, liquidés et taxés à la somme de 960 euros, sont laissés à la charge définitive de l'Etat. Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B... est rejeté. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à la caisse primaire d'assurance maladie des Pyrénées-Orientales. Délibéré après l'audience du 6 juin 2023 à laquelle siégeaient : Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre, Mme Blin, présidente assesseure, M. Teulière, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 juin 2023. Le rapporteur, T. Teulière La présidente, A. Geslan-Demaret La greffière, M-M. Maillat La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. 2 N°21TL02327
Cours administrative d'appel
Toulouse
CAA de MARSEILLE, 7ème chambre, 23/06/2023, 22MA00142, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler la décision du 15 mai 2019 par laquelle la ministre des armées a rejeté son recours administratif préalable obligatoire formé le 8 janvier 2019 auprès de la commission des recours des militaires afin d'obtenir réparation de l'entier préjudice subi à la suite d'un incident survenu dans le cadre de ses fonctions à l'hôpital d'instruction des armées Sainte-Anne de Toulon. Par un jugement n° 1902778 du 9 novembre 2021, le tribunal administratif de Toulon a rejeté cette demande. Procédure devant la Cour : Par une requête, enregistrée le 13 janvier 2022, sous le n° 22MA00142, M. D..., représenté par Me Michel, demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 9 novembre 2021 ; 2°) d'annuler la décision du 15 mai 2019 ; 3°) d'enjoindre au ministre des armées, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours, à compter de l'arrêt à intervenir ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - le sens des conclusions du rapporteur public était incomplet ; - le tribunal n'a pas répondu à ses conclusions à fin d'annulation de la décision du 15 mai 2019 en ce qu'elle concerne le refus d'imputabilité au service des pathologies dont il est victime ; - le jugement attaqué est insuffisamment motivé faute de répondre à son moyen tiré de l'imputabilité au service de ses pathologies ; - la décision contestée est entachée d'une incompétence de son auteur dont la délégation de signature était imprécise ; - ses pathologies sont directement imputables au service ; - il a droit à la réparation de ses préjudices en application de la décision du Conseil d'Etat du 1er juillet 2005, n° 258208, Mme C..., au titre de la responsabilité sans faute ou pour faute de l'Etat ; - il a subi un préjudice moral découlant, à la fois, du comportement fautif de l'administration en lien avec la sanction déguisée prise à son encontre mais également des conséquences des maladies contractées lors de l'exercice de ses fonctions, un préjudice professionnel et matériel du fait que son salaire actuel étant bien inférieur à son traitement perçu dans l'armée et que l'exemption de gardes l'a privé de revenus ainsi qu'un préjudice sexuel ; - ce préjudice ouvre droit à réparation au titre de la responsabilité sans faute de l'Etat ; - l'interdiction de toute garde pour une durée de 4 à 6 mois constitue une sanction déguisée et engage la responsabilité de l'Etat pour faute. La requête a été communiquée au ministre des armées qui n'a pas produit de mémoire. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de la défense ; - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; - le décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Marchessaux, - les conclusions de M. Guillaumont, rapporteur public, - et les observations de Me Michel, représentant M. D.... Considérant ce qui suit : 1. M. D..., médecin-chef du service de santé des armées, exerçait une activité de chirurgie viscérale au sein de l'hôpital d'instruction des armées (HIA) Sainte-Anne à Toulon et bénéficiait depuis le 25 novembre 2012 d'une pension militaire d'invalidité au taux de 10 % au titre d'une infirmité antérieure imputable au service. Le 24 juin 2015, à l'issue d'une intervention chirurgicale menée à son terme en dépit d'un contexte difficile et d'une ambiance tendue au bloc opératoire, M. D... a ressenti une douleur brutale et très intense à la fesse gauche s'accompagnant d'une impotence fonctionnelle. A la suite d'examens réalisés à la fin de l'année 2015, le symptôme rattaché initialement à une sciatalgie, s'est révélé consécutif à une occlusion vasculaire aigüe de l'artère hypogastrique gauche nécessitant une première coronarographie-angioplastie réalisée le 25 février 2016 puis une seconde le 25 mars 2016 à la suite d'un diagnostic d'ischémie myocardique asymptomatique. Par ailleurs, le 31 juillet 2015, trois semaines après le retour du patricien hospitalier dans le service à l'issue d'un arrêt de travail, son chef de service lui a imposé une exemption de ses gardes de nuit et de week-end. A la suite de sa demande du 4 février 2016, M. D... a été rayé des cadres à compter du 1er septembre 2016 dans la perspective d'une reconversion professionnelle. Le 22 avril 2016, le requérant a demandé que le syndrome dépressif réactionnel et les séquelles de l'atteinte poly-vasculaire dont il souffre soient pris en compte au titre de la révision de sa pension militaire d'invalidité. Le 2 février 2018, la commission consultative médicale du ministère des armées n'a pas reconnu l'imputabilité au service de ces deux pathologies et par une décision du 1er juin 2018, la ministre des armées a rejeté la demande de révision de la pension militaire d'invalidité. Par une demande préalable non chiffrée du 5 juin 2018, M. D... a alors sollicité auprès de cette même autorité la réparation de l'entier préjudice subi à la suite de l'accident survenu le 24 juin 2015 dans le cadre de ses fonctions à l'hôpital d'instruction des armées Sainte-Anne. Par une décision du 19 décembre 2018, cette demande a été rejetée. Le recours administratif préalable obligatoire de M. D... enregistré le 8 janvier 2019 auprès de la commission des recours des militaires a également été rejeté par une décision de la ministre des armées du 15 mai 2019. M. D... relève appel du jugement du 9 novembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision du 15 mai 2019. Sur la régularité du jugement attaqué : 2. L'article R. 711-3 du code de justice administrative dispose que " Si le jugement de l'affaire doit intervenir après le prononcé de conclusions du rapporteur public, les parties ou leurs mandataires sont mis en mesure de connaître, avant la tenue de l'audience, le sens de ces conclusions sur l'affaire qui les concerne ". 3. La communication aux parties du sens des conclusions, prévue par les dispositions de la partie réglementaire du code de justice administrative, a pour objet de mettre les parties en mesure d'apprécier l'opportunité d'assister à l'audience publique, de préparer, le cas échéant, les observations orales qu'elles peuvent y présenter, après les conclusions du rapporteur public, à l'appui de leur argumentation écrite et d'envisager, si elles l'estiment utile, la production, après la séance publique, d'une note en délibéré. En conséquence les parties ou leurs mandataires doivent être mises en mesure de connaître, dans un délai raisonnable avant l'audience, l'ensemble des éléments du dispositif de la décision que le rapporteur public compte proposer à la formation de jugement d'adopter, à l'exception de la réponse aux conclusions qui revêtent un caractère accessoire, notamment celles qui sont relatives à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Cette exigence s'impose à peine d'irrégularité de la décision rendue sur les conclusions du rapporteur public. Par ailleurs, pour l'application de ces dispositions et eu égard à leurs objectifs, il appartient au rapporteur public de préciser, en fonction de l'appréciation qu'il porte sur les caractéristiques de chaque dossier, les raisons qui déterminent la solution qu'appelle, selon lui, le litige, et notamment d'indiquer, lorsqu'il propose le rejet de la requête, s'il se fonde sur un motif de recevabilité ou sur une raison de fond, et de mentionner, lorsqu'il conclut à l'annulation d'une décision, les moyens qu'il propose d'accueillir. La communication de ces informations n'est toutefois pas prescrite à peine d'irrégularité de la décision. 4. Il ressort des pièces de la procédure devant le tribunal administratif que le sens des conclusions du rapporteur public sur l'affaire en litige a été mis en ligne le 16 octobre 2021 à 9 h 15 en vue d'une audience du 19 octobre 2021 à 9 h 15. Il comportait les mentions " Sens synthétique des conclusions : rejet au fond " et " Sens des conclusions et moyens retenus : Rejet au fond de la requête ". Le rapporteur public a ainsi indiqué aux parties le sens de ses conclusions. Il n'était pas tenu, à peine d'irrégularité du jugement rendu par le tribunal administratif, d'indiquer les motifs qui le conduisaient à proposer le rejet de requête. Il s'ensuit que M. D... n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué aurait été rendu au terme d'une procédure irrégulière. 5. Il ressort du point 14 du jugement attaqué que les premiers juges ont estimé que M. D... n'était pas fondé à demander l'annulation de la décision du 15 mai 2019 par laquelle la ministre des armées a rejeté son recours administratif préalable obligatoire. Ainsi, ils n'ont pas omis de se prononcer sur les conclusions aux fins d'annulation de cette décision. 6. Le tribunal a répondu au moyen tiré de l'imputabilité au service des pathologies de M. D... en estimant, au point 10 du jugement contesté qu'il résultait de l'instruction que la demande de révision de la pension militaire d'invalidité de M. D... présentée le 22 avril 2016 au titre du syndrome dépressif réactionnel et des séquelles de l'atteinte poly-vasculaire a été rejetée par une décision de la ministre des armées du 1er juin 2018 au motif que ces deux infirmités n'étaient pas imputables au service. Bien que cette décision ait été contestée devant le tribunal des pensions militaires d'invalidité de Marseille, à la date du présent jugement, elle n'en revêt pas moins un caractère exécutoire. Par suite, le jugement attaqué n'est pas entaché d'un défaut de réponse à ce moyen ni n'est insuffisamment motivé. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 7. M. D... reprend en appel le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision contestée et de l'imprécision de la délégation de signature. Toutefois, il y a lieu d'écarter ce moyen, qui ne comporte aucun développement nouveau, par adoption des motifs retenus à juste titre par les premiers juges aux points 2 à 4 du jugement attaqué. 8. Par la décision contestée, la ministre des armées a rejeté la demande de M. D... tendant à ce que soit reconnu l'imputabilité au service de l'occlusion vasculaire aigüe de l'artère hypogastrique gauche survenue le 24 juin 2015 et des troubles psychologiques qui en ont résulté pour le requérant. En ce qui concerne l'occlusion vasculaire aigüe : 9. Il ressort des pièces du dossier que le 24 juin 2015, M. D... a pratiqué une intervention chirurgicale lourde au bloc opératoire de l'HIA Saint-Anne de Toulon, dans une atmosphère tendue en raison d'une altercation qui a éclaté entre lui et une infirmière. Au cours de cette intervention, le requérant a présenté une vive douleur à la fesse gauche qui s'est révélée être secondaire à une occlusion vasculaire aigüe de l'artère hypogastrique gauche pour laquelle, il a été placé en arrêt maladie du 25 juin 2015 au 11 juillet 2015. Puis le 25 février 2016, il a subi une intervention chirurgicale afin de traiter l'occlusion vasculaire dont il souffrait. Toutefois, le compte rendu de l'angioplastie hypogastrique gauche du 25 février 2016 a constaté une " lésion sub-occlusive " de l'artère iliaque interne et une deuxième lésion tronculaire de l'ordre de 70 %, qui ont nécessité la mise en place de 4 stents iliaques et de 5 stents coronariens. Ce traitement endovasculaire a permis de traiter une pathologie polyvasculaire évolutive antérieure à l'accident du 24 juin 2015. Si l'expertise médicale du 20 septembre 2017 réalisée par le docteur E..., cardiologue, à la demande du ministère des armées conclut à un surmenage et un stress professionnel très important s'accompagnant d'élévation tensionnelle que l'on peut rendre responsable en grande partie du développement de cette atteinte vasculaire coronarienne et artérielle, elle ne se prononce pas sur l'existence d'une pathologie antérieure. En outre, la commission consultative médicale a rendu, le 2 février 2018, un avis en désaccord avec cette expertise qui retient le stress comme facteur essentiel à l'origine de la pathologie en estimant que l'on retrouve au dossier un antécédent de tabagisme et d'une hypertension artérielle (HTA). A la suite de cet avis, le procès-verbal de la commission de réforme des pensions militaires d'invalidité du 30 mai 2018 conclut que la poly-arthériopathie avec atteinte des coronaires, des artères iliaques et carotidiennes n'est pas imputable au service par défaut de preuve de présomption. Dans ces conditions, et alors qu'aucune des pièces versées au dossier ne permet d'établir un lien de causalité direct, la ministre des armées n'a pas commis une erreur d'appréciation en refusant de reconnaître l'imputabilité au service de l'occlusion vasculaire aigüe dont a été victime M. D... le 24 juin 2015. En ce qui concerne les troubles psychologiques : 10. Il ressort du rapport du 1er septembre 2017 du docteur B..., expert psychiatre, sollicité par le SGA du ministre des armées dans le cadre d'une demande de révision de pension de M. D... que ce dernier a été très affecté par le fait d'avoir été écarté de toutes gardes. Il a sollicité à plusieurs reprises la hiérarchie de l'hôpital pour sortir de cette situation et s'est finalement tourné vers la cellule Themis du ministère de la défense, démarche qui a provoqué une enquête de commandement, laquelle a conclu qu'il devait retrouver dans la forme l'ensemble de ses attributions techniques au sein de son service. La reprise de travail s'est faite dans un contexte difficile marqué par des tensions avec son chef de service ce qui l'a amené à envisager une reconversion professionnelle et quitter le service de santé des armées définitivement en septembre 2016. L'expertise mentionne " une souffrance morale importante " nécessitant un traitement antidépresseur et un suivi psychiatrique hebdomadaire sans discontinuité. La reprise entière de ses activités n'a pas suffi à apaiser son sentiment d'injustice exprimé à l'égard de son ancien chef de service et la souffrance encore aujourd'hui présente autour de ces évènements. Cette expertise relève également que M. D... a fait une grave tentative de suicide survenue en 2002 alors qu'il effectuait sa formation chirurgicale, dans un contexte de fatigue physique importante. L'expert retient un " syndrome anxio-dépressif persistant en relation avec le vécu d'une situation personnelle conflictuelle. Son expression est aussi aujourd'hui étroitement mêlée aux problèmes somatiques sévères auxquels il est confronté, dont l'origine ne peut être rattachée exclusivement aux conséquences du conflit rapporté. La coïncidence entre la révélation symptomatique de l'occlusion de l'artère gastrique au travers de douleurs fessières et le conflit professionnel est purement conjoncturelle. Il ne peut y avoir de lien de causalité médicales entre ces deux aspects " et que " la persistance de troubles (...) doit être mis en perspective avec le passage à l'acte de 2002 qui témoigne d'une fragilité particulière du fonctionnement de sa personnalité. ". Par ailleurs, il ressort d'une note du SGA du 26 février 2019, que M. D... a déclaré être " dans une situation d'épuisement physique depuis plusieurs semaines ". Si le procès-verbal de la commission de réforme des pensions militaires d'invalidité du 30 mai 2018 comporte une remarque manuscrite précisant que : " s'il est difficile de reconnaître comme certain, direct et déterminant les séquelles liées au trouble vasculaire, il me paraît acceptable de reconnaître une part imputable au service sur les troubles psychologiques existant actuellement ", elle a néanmoins conclu à l'absence d'imputabilité au service des troubles psychologiques subis par M. D... par défaut de preuve et de présomption. Le requérant n'est ainsi pas fondé à soutenir que ses troubles psychologiques seraient en lien avec le service. En ce qui concerne la décision d'exemption de gardes médicales : 11. M. D... s'est vu notifié le 12 juillet 2015 par son chef de service, le jour de son retour de congés maladie, son retrait temporaire de la liste des gardes de chirurgie, la nuit et le week-end, pour une durée de 4 à 6 mois. Cette interdiction ne portait pas sur les autres activités d'urgence réalisée dans la journée. Par une lettre adressée au médecin chef de l'HIA Sainte-Anne, le chef de service a précisé que cette exemption n'avait rien à voir avec une sanction et qu'elle visait véritablement à protéger l'intéressé autant que les patients qu'il serait amené à opérer et qu'en attendant, il pouvait consulter et opérer en situation réglée et prendre en charge des urgences chirurgicales pendant les heures ouvrables. Le rapport d'enquête diligentée par le ministère des armées estime que cette décision semble avoir été raisonnable d'autant qu'elle était qualifiée de temporaire, au vu des antécédents personnels de M. D.... Ainsi, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette exemption de garde constituerait une sanction déguisée mais a été prise dans l'intérêt du service et motivée par le souci de protéger la santé de M. D... qui était dans un état d'épuisement professionnel, comme l'a indiqué le certificat médical du 9 novembre 2016. La circonstance que le rapport d'enquête recommande que la décision contestée soit prise collégialement est sans incidence sur sa légalité. En ce qui concerne la responsabilité de l'Etat : 12. Compte tenu de ce qui a été dit aux points 9 à 11, en l'absence d'imputabilité au service des pathologies dont M. D... a été victime et de caractère fautif de la décision d'exemption de gardes médicales, l'appelant n'est pas fondé à rechercher la responsabilité de l'Etat ni à se prévaloir de préjudices moral, financier et sexuel. 13. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 15 mai 2019 de la ministre des armées. Sur les conclusions à fin d'injonction : 14. Le présent arrêt qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. D... n'implique aucune mesure d'exécution. Il y a lieu, par suite, de rejeter les conclusions à fin d'injonction de M. D.... Sur les frais liés au litige : 15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par M. D... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. D É C I D E : Article 1er : La requête de M. D... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D... et au ministre des armées. Délibéré après l'audience du 7 juin 2023, où siégeaient : - Mme Chenal-Peter, présidente de chambre, - M. Prieto, premier conseiller, - Mme Marchessaux, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 23 juin 2023. 2 N° 22MA00142 fa
Cours administrative d'appel
Marseille
CAA de MARSEILLE, 4ème chambre, 27/06/2023, 22MA00448, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. D... C... a demandé au tribunal des pensions militaires de Haute-Corse d'annuler la décision du 11 décembre 2017 par laquelle le ministre des armées a rejeté sa demande de révision de pension pour aggravation des infirmités de dorsalgies chroniques et de périarthrite scapulo-humérale dont il souffre. Par un jugement du 18 mars 2019, le tribunal des pensions militaires de Haute-Corse a, d'une part, rejeté la demande de M. C... tenant à l'annulation de cette décision du ministre des armées du 11 décembre 2017 en tant qu'elle a trait à l'infirmité de périarthrite scapulo-humérale et, d'autre part, ordonné avant dire droit une expertise s'agissant de l'infirmité dorsalgies chroniques. L'expert de justice a déposé son rapport au greffe du tribunal des pensions militaires de Haute-Corse le 18 avril 2019. Par application de l'article 51 de la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018, la procédure a été transférée, à compter du 1er novembre 2019, au tribunal administratif de Bastia. Par un jugement n° 1901463 du 7 décembre 2021, le tribunal administratif de Bastia a rejeté la demande présentée par M. C... qui tendait, dans le dernier état de ses écritures, à l'annulation de la décision susvisée du 11 décembre 2017 en tant que le ministre des années a rejeté sa demande de révision de pension pour aggravation de l'infirmité de dorsalgies chroniques dont il souffre et à ce que, s'agissant de cette infirmité, son taux d'invalidité soit fixé à 70 %, voire à 80 %. Procédure devant la Cour : Par une requête, enregistrée le 2 février 2022, M. C... relève appel de ce jugement du tribunal administratif de Bastia du 7 décembre 2021. Il soutient que : - il trouve " anormal " d'avoir été jugé par le tribunal administratif de Bastia alors que la procédure avait été engagée devant le tribunal des pensions de Bastia ; - il n'a pas reçu d'avis sur la date d'audience du tribunal administratif de Bastia ; - il n'a reçu le jugement du tribunal administratif de Bastia du 7 décembre 2021 que le 6 décembre 2022 ; - l'infirmité de dorsalgies chroniques dont il souffre s'est aggravée ; - le certificat établi par le docteur B... n'a pas été présenté aux médecins pour effectuer leur expertise, comme l'exige la législation ; - une expertise médicale faite par un médecin spécialiste en rhumatologie ou un chirurgien du rachis serait bienvenue. Par un mémoire en défense, enregistré le 29 décembre 2022, le ministre des armées conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que : - les moyens de la requête ne sont pas fondés et M. C... n'apporte aucun élément de nature à remettre en cause le jugement attaqué, ni l'évaluation à 60 % de son taux de l'infirmité afférente aux dorsalgies chroniques ; - s'il appartient à la Cour d'apprécier souverainement la demande présentée par M. C... tendant à l'organisation d'une nouvelle expertise, compte tenu de l'état d'invalidité de ce dernier, cette demande ne saurait se justifier. Par une ordonnance du 29 décembre 2022, la clôture de l'instruction, initialement fixée au 30 décembre 2022, a été reportée au 27 janvier 2023, à 12 heures. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 ; - le décret n° 2018-1292 du 28 décembre 2018 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Lombart, - et les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. Né le 30 janvier 1944, M. C... était médecin en chef au service de santé des armées (SSA), avant d'être placé en position de retraite et rayé des cadres de l'armée active à compter du 24 avril 1997. M. C... est titulaire d'une pension militaire d'invalidité au taux de 85 % qui lui a été concédée par un arrêté du 26 mars 2012, avec entrée en jouissance à compter du 29 septembre 2010, pour cinq infirmités au nombre desquelles figurent l'infirmité de dorsalgies chroniques, dont le taux non imputable est pour moitié du taux global de cette affection, et celle de périarthrite scapulo-humérale. Le 16 mars 2016, M. C... a demandé la révision de sa pension en raison de l'aggravation de ces deux infirmités. Par une décision du 11 décembre 2017, le ministre des armées a refusé de faire droit à cette demande. Après que, par un jugement du 18 mars 2019, le tribunal des pensions militaires de Haute-Corse a, d'une part, rejeté la demande de M. C... tendant à l'annulation de cette décision du 11 décembre 2017 en tant qu'elle a trait à l'infirmité de périarthrite scapulo-humérale et, d'autre part, ordonné une expertise avant dire droit afin qu'un expert puisse donner un avis sur le taux d'invalidité de l'infirmité de dorsalgies chroniques, le tribunal administratif de Bastia a, par un jugement du 7 décembre 2021, également rejeté la demande de M. C... tendant à l'annulation de cette même décision en tant que le ministre des armées a rejeté sa demande de révision de pension pour l'aggravation de cette infirmité de dorsalgies chroniques. Par la présente requête, M. C... doit être regardé comme demandant à la Cour d'annuler ce dernier jugement. Sur la régularité du jugement attaqué : 2. En premier lieu, par l'effet combiné de la loi susvisée du 13 juillet 2018 relative à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025 et portant diverses dispositions intéressant la défense et du décret du 28 décembre 2018 pris pour l'application de l'article 51 de cette loi, le contentieux des pensions militaires d'invalidité pendant devant les tribunaux des pensions a été transféré aux tribunaux administratifs, à compter du 1er novembre 2019. Le tribunal des pensions militaires de Haute-Corse a ainsi transmis à bon droit le surplus des conclusions de M. C... sur lesquelles il n'avait pas statué par son jugement du 18 mars 2019 au tribunal administratif de Bastia, lequel s'est compétemment prononcé sur ce surplus ainsi que sur les conclusions directement présentées devant lui par M. C.... 3. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 711-2 du code de justice administrative : " Toute partie est avertie, par une notification faite par lettre recommandée avec demande d'avis de réception (...), du jour où l'affaire sera appelée à l'audience. / (...) / L'avertissement est donné sept jours au moins avant l'audience (...). ". Selon l'article R. 711-2-1 du même code : " (...) Les parties qui ont accepté l'usage du téléservice mentionné à l'article R. 414-2 pour une affaire peuvent être convoquées au moyen de ce téléservice à l'audience à laquelle elle sera appelée. / Les dispositions de l'article R. 611-8-6 sont applicables. ". Cet article R. 611-8-6 dispose que : " Les parties sont réputées avoir reçu la communication ou la notification à la date de première consultation du document qui leur a été adressé par voie électronique, certifiée par l'accusé de réception délivré par l'application informatique, ou, à défaut de consultation dans un délai de deux jours ouvrés à compter de la date de mise à disposition du document dans l'application, à l'issue de ce délai. Sauf demande contraire de leur part, les parties sont alertées de toute nouvelle communication ou notification par un message électronique envoyé à l'adresse choisie par elles. (...) ". Il résulte de la combinaison de ces dispositions que, lorsqu'un avis d'audience est envoyé via l'application informatique Télérecours citoyens à une partie qui en a accepté l'usage et que cette partie ne consulte pas ce document dans le délai de deux jours ouvrés prévu à l'article R. 611-8-6 précité, elle est réputée en avoir reçu notification à l'expiration de ce délai. 4. Il ressort des pièces de la procédure devant le tribunal administratif de Bastia que l'avis d'audience a été mis à disposition de M. C... le 20 octobre 2021 au moyen de l'application Télérecours citoyens, mentionnée à l'article R. 414-6 du code de justice administrative. A supposer même que l'appelant n'ait pas consulté ce document dans le délai de deux jours à compter de cette date, il était, en application des dispositions précitées de l'article R. 611-8-6 du code de justice administrative, réputé en avoir reçu notification à l'expiration de ce délai, soit le 22 octobre 2020. Par suite, et alors qu'au demeurant, il ressort des mêmes pièces de la procédure devant le tribunal administratif de Bastia qu'il a pu présenter lui-même des observations au cours de l'audience publique qui s'est tenue le 16 novembre 2021, l'appelant n'est pas fondé à soutenir qu'il n'a pas été destinataire d'un avis d'audience. 5. En troisième et dernier lieu, si M. C... soutient que le jugement attaqué ne lui a été notifié que le 6 janvier 2022 alors qu'il a été mis à disposition le 7 décembre 2021, cette circonstance est sans influence sur la régularité de cette décision juridictionnelle. 6. Dès lors, le jugement attaqué du tribunal administratif de Bastia du 7 décembre 2021 n'est pas entaché d'irrégularité sur ces différents points. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 7. En premier lieu, en se bornant à soutenir que le certificat établi par le docteur B... n'a pas été présenté aux médecins qui se sont vus confier une mission d'expertise " comme l'exige la législation ", M. C... n'assortit pas ce moyen des précisions permettant à la Cour d'en apprécier le bien-fondé. 8. En second lieu, selon l'article L. 29 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, en vigueur à la date de la demande de révision de la pension de M. C..., devenu l'article L. 154-1 du même code : " Le titulaire d'une pension d'invalidité concédée à titre définitif peut en demander la révision en invoquant l'aggravation d'une ou plusieurs infirmités en raison desquelles cette pension a été accordée. / Cette demande est recevable sans condition de délai. / La pension ayant fait l'objet de la demande est révisée lorsque le degré d'invalidité résultant de l'infirmité ou de l'ensemble des infirmités est reconnu supérieur de 10 % au moins du pourcentage antérieur. / Toutefois, l'aggravation ne peut être prise en considération que si le supplément d'invalidité est exclusivement imputable aux blessures et aux maladies constitutives des infirmités pour lesquelles la pension a été accordée. / La pension définitive révisée est concédée à titre définitif. ". Ces dispositions ne sont applicables, d'une part, qu'en cas d'aggravation de l'une des infirmités au titre desquelles la pension a été concédée, d'autre part, que si l'aggravation constatée est elle-même imputable au service. 9. En vertu des dispositions de l'article L. 6 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, alors applicable, désormais codifié à l'article L. 151-2 du même code, le degré d'infirmité est déterminé au jour du dépôt de la demande de l'intéressé, sans qu'il soit possible de tenir compte d'éléments d'aggravation postérieurs à cette date. L'administration doit dès lors se placer à la date de la demande de pension pour évaluer le degré d'invalidité entraîné par l'infirmité invoquée et cette évaluation doit, en application des termes mêmes de l'article L. 26 du même code, alors applicable et désormais repris à l'article L. 151-6 du même code, tenir compte de la gêne fonctionnelle engendrée dans le temps par ces infirmités. 10. Par ailleurs, en vertu de l'article L. 10 du même code, désormais repris à l'article L. 125-5 du même code, les degrés de pourcentage d'invalidité figurant aux barèmes prévus par l'article L. 9, aujourd'hui repris à l'article L. 125-3 du même code, présentent un caractère indicatif, à l'exception des amputations et des exérèses d'organes. 11. En l'espèce, il résulte de l'instruction que si l'ensemble des experts amenés à se prononcer sur les dorsalgies chroniques dont souffre M. C... concluent de manière concordante, à l'instar notamment du docteur A... B..., à une aggravation de celles-ci, tant l'expert consulté par l'administration en août 2017, que le médecin chargé des pensions militaires d'invalidité sur le droit à pension d'invalidité, dans son avis de novembre 2017, et le médecin conseiller technique auprès de l'administration centrale, dans son avis du 15 mai 2019, retiennent un taux d'invalidité de 60 %. Dans ces conditions, et alors que M. C... ne conteste au demeurant pas, à l'appui de ses écritures d'appel, que, comme l'ont relevé à juste titre les premiers juges dans leur jugement attaqué, pour conclure à l'existence d'une aggravation de l'infirmité de dorsalgies chroniques et proposer de porter le taux d'invalidité de cette infirmité de 45 à 70 %, l'expert de justice désigné par le tribunal des pensions militaires de Haute-Corse dans son jugement du 18 mars 2019 a notamment pris en considération certaines constatations effectuées le jour même de la visite qu'il a effectuée, soit le 9 avril 2019, il y a lieu de retenir ce taux de 60 % qui apparaît d'ailleurs cohérent avec le guide-barème des invalidités, M. C... n'établissant, ni même n'alléguant souffrir d'une immobilisation totale du rachis et des hanches. Dans la mesure où, ainsi qu'il a été déjà dit au point 1 du présent arrêt, seuls 50 % du taux global de l'infirmité dont souffre M. C... est imputable au service, l'aggravation à 60 % de cette infirmité, soit une augmentation de 15 % dont seule la moitié est imputable au service, est inférieure au taux de 10 % requis par les dispositions applicables de l'article L. 29 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre pour obtenir la révision de la pension. Par conséquent, le ministre des armées a pu légalement la lui refuser. 12. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit utile d'ordonner une nouvelle expertise, que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 7 décembre 2021, le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 11 décembre 2017 en tant que le ministre des armées a rejeté sa demande de révision de pension pour aggravation de l'infirmité de dorsalgies chroniques dont il souffre. D É C I D E : Article 1er : La requête de M. C... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C... et au ministre des armées. Délibéré après l'audience du 13 juin 2023, où siégeaient : - M. Marcovici, président, - M. Revert, président assesseur, - M. Lombart, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 juin 2023. 2 No 22MA00448 ot
Cours administrative d'appel
Marseille
CAA de MARSEILLE, 4ème chambre, 27/06/2023, 22MA01771, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... a demandé au tribunal des pensions militaires d'invalidité de Marseille, qui a transmis cette demande au tribunal administratif de Marseille, d'annuler la décision du 27 juillet 2018 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande de révision de pension militaire d'invalidité pour aggravation des infirmités " dorso-lombalgies chroniques (...) ", " acouphènes bilatéraux (...) ", " séquelles d'entorse cervicale (...) " et " dureté des deux oreilles ". Par un jugement n° 2004178 du 7 juin 2022, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de M. A.... Procédure devant la Cour : Par une requête et des mémoires, enregistrés les 23 juin 2022, 23 février 2023, 16 mars et 28 mars 2023, M. A..., représenté par Me Paolantonacci, demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement n° 2004178 du 7 juin 2022 du tribunal administratif de Marseille ; 2°) d'annuler la décision du 27 juillet 2018 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande de révision de sa pension militaire d'invalidité ; 3°) à titre principal, de dire et juger qu'il a droit, à compter du 9 décembre 2015, à une pension à raison d'un taux d'invalidité de 30 % au titre de l'invalidité " dorso-lombalgie chronique " et de 15 % + 10 au titre de l'invalidité " acouphènes bilatéraux permanents ", ladite pension devant être calculée sur la base de l'indice correspondant au grade d'adjudant-chef ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - en ce qui concerne l'infirmité " dorso-lombalgie chronique ", le tribunal a violé les dispositions des articles L. 6, L. 10 et L. 29 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; la réalité de l'aggravation de sa pathologie, avec une invalidité portée à un taux de 30 % qui n'est plus contesté par l'administration, ressort de la comparaison des pièces médicales produites au dossier ; cette aggravation doit par ailleurs être appréciée entre la date de la demande initiale de pension, soit le 16 décembre 1996, et la date de la demande de révision, soit le 9 décembre 1995 ; le constat d'un surpoids ne suffit pas à imputer l'aggravation d'une infirmité pensionnée à titre définitif à cette surcharge pondérale sans lien de causalité direct et déterminant ; de plus, la prise de poids retenue par le tribunal n'apparait pas si évidente et repose sur le poids constaté lors de l'expertise réalisée quatre ans après la demande de révision ; en conséquence, le jugement sera annulé pour insuffisance de motifs ; le jugement, qui prend en compte des éléments postérieurs à la demande de révision, méconnaît l'article L. 6 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - s'agissant des infirmités " acouphènes " et " dureté des deux oreilles ", l'expert auprès de la sous-direction des pensions a retenu une aggravation de 5 points pour les acouphènes et un maintien du taux pour la dureté des oreilles ; si l'aggravation de 5 % est inopérante prise isolément, l'aggravation de 10 points des dorso-lombalgies chroniques permet de la prendre en compte, en application de l'article L. 29 du code des pensions militaires d'invalidité ; en conséquence, le taux d'invalidité de l'infirmité " acouphènes " doit être porté à 15 % au lieu des 10 % précédemment concédés ; - sa pension devra être calculée sur la base de l'indice correspondant au grade d'adjudant-chef, en application du décret du 10 mai 2010. Par des mémoires en défense, enregistrés les 15 février, 14 mars et 24 mars 2023, le ministre des armées conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés. Un courrier du 24 février 2023 adressé aux parties en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les a informées de la période à laquelle il était envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et leur a indiqué la date à partir de laquelle l'instruction pourrait être close, dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2 du même code. Un mémoire, présenté par le ministère des armées, enregistré le 3 avril 2023, n'a pas été communiqué en application du dernier alinéa de l'article R. 611-1 du code de justice administrative. Par une ordonnance du 5 avril 2023, la clôture de l'instruction a été prononcée avec effet immédiat, en application du dernier alinéa de l'article R. 613-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - le code de justice administrative ; Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Martin, - et les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. M. A..., né le 12 septembre 1953, a souscrit un contrat d'engagé volontaire dans l'armée de l'air à compter du 15 novembre 1972. Nommé adjudant-chef le 1er avril 1990, il a été rayé des contrôles de l'armée d'active le 10 septembre 2000. Titulaire d'une pension militaire d'invalidité, concédée par arrêté du 19 janvier 2009, au taux global de 75 %, pour les infirmités " dorso-lombalgies chroniques (...) ", " séquelles d'entorse cervicale (...) ", " acouphènes bilatéraux (...) ", " séquelles de traumatisme de la cheville droite (...) " et " dureté des deux oreilles ", M. A... a sollicité, par une demande enregistrée le 9 décembre 2015, la révision de sa pension pour aggravation des infirmités pensionnées précitées, à l'exception de l'infirmité " séquelles de traumatisme de la cheville droite (...) ". Par une décision du 27 juillet 2018, la ministre des armées a rejeté sa demande. Par la présente requête, M. A... relève appel du jugement du 7 juin 2022 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande d'annulation de cette décision ainsi que sa demande tendant à ce qu'il soit fait droit à sa demande de révision de pension, en retenant un taux de 30 % au titre de l'infirmité " dorso-lombalgies chroniques (...) " et un taux de 15 % au titre de l'infirmité " acouphènes (...) ". Sur la régularité du jugement attaqué : 2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". 3. Il ressort des énonciations du jugement attaqué que les premiers juges ont considéré, en ce qui concerne l'infirmité " dorso-lombalgies chroniques (...) ", que si l'expert judiciaire a retenu, à la date du 9 décembre 2015, une aggravation de 10 points du déficit fonctionnel au titre de l'infirmité " dorso-lombalgies chroniques (...) ", il résulte toutefois de l'avis médical rendu le 15 octobre 2020 par le médecin conseiller technique auprès de l'administration centrale que le surpoids du requérant a joué un rôle prépondérant dans cette aggravation, de sorte qu'il ne saurait être déduit que le supplément d'invalidité fixé à 10 % doit être intégralement imputable à la blessure constitutive de l'infirmité pensionnée. Ce faisant, ils ont suffisamment motivé leur jugement, conformément à l'exigence fixée par l'article L. 9 du code de justice administrative. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 4. Aux termes de l'article L. 29 du code des pensions militaires d'invalidité, dans sa rédaction en vigueur au jour de la demande de révision de pension présentée par M. A... : " Le titulaire d'une pension d'invalidité concédée à titre définitif peut en demander la révision en invoquant l'aggravation d'une ou plusieurs infirmités en raison desquelles cette pension a été accordée. (...) La pension ayant fait l'objet de la demande est révisée lorsque le degré d'invalidité résultant de l'infirmité ou de l'ensemble des infirmités est reconnu supérieur de 10 % au moins du pourcentage antérieur. ". Par ailleurs, en vertu des dispositions de l'article L. 6 du même code, l'évolution des infirmités pensionnées s'apprécie sur une période comprise entre la date initiale d'octroi de la pension et celle de dépôt de la demande de révision. 5. Selon le rapport d'expertise médicale remis le 2 décembre 2019 à la suite du jugement avant dire droit du 2 mai 2019 du tribunal des pensions militaires d'invalidité de Marseille, doit être prise en compte, à la date de la demande de révision de la pension de M. A..., soit le 9 décembre 2015, une aggravation de 10 points du déficit fonctionnel au titre de l'infirmité " dorso-lombalgies chroniques (...) ". Le tribunal administratif de Marseille a toutefois estimé, par le jugement attaqué, que le taux d'invalidité de 10 % fixé par l'expert judiciaire devait être regardé, dans une proportion fixée à hauteur de 5 %, comme étant imputable au seul surpoids de M. A..., lequel était sans lien avec le service, de sorte que c'était sans entacher sa décision d'une erreur d'appréciation ou d'une erreur de droit que la ministre a pu estimer que l'aggravation constatée n'atteignait pas au moins 10 % au sens et pour l'application des dispositions de l'article L. 29 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, et ainsi rejeter la demande de révision de l'intéressé. Toutefois, alors que les premiers juges se sont essentiellement appuyés sur les conclusions de l'avis médical rendu le 15 octobre 2020 par le médecin conseiller technique auprès de l'administration centrale, aux termes duquel l'expert ne s'est pas prononcé sur l'origine de l'aggravation constatée chez un individu en surpoids important alors que, lors de l'expertise précédente du 18 mai 2001, il ne pesait que 90 kg, il ne résulte nullement de ce certificat que le médecin, qui s'est prononcé sur la situation de surpoids " actuelle " de M. A..., aurait procédé à une analyse de cette situation contemporaine de la demande de révision de pension formulée par l'intéressé. Il ne résulte par ailleurs pas de l'instruction et ne ressort d'aucune des pièces médicales produites au dossier que la situation de surpoids de M. A..., à la date de sa demande de révision, aurait été de nature à justifier une minoration du taux d'aggravation imputable au seul service, cette situation de surpoids n'ayant au demeurant été évoquée ni dans les conclusions de l'expertise médicale initiale du 17 avril 2018, ni dans l'avis émis par le médecin chargé des pensions militaires d'invalidité le 10 juillet 2018. Ce faisant, l'appelant est fondé à soutenir que c'est à tort que, pour rejeter sa demande, le tribunal administratif s'est fondé sur l'avis médical du 15 octobre 2020 et a pris en compte son état de santé à une date postérieure à celle de sa demande de révision. 6. Toutefois il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner la demande de M. A.... 7. En premier lieu, il résulte de l'instruction, et plus particulièrement tant des conclusions de l'expertise médicale initiale du 17 avril 2018 que des conclusions du médecin chargé des pensions militaires d'invalidité, que l'aggravation de l'infirmité " dorso-lombalgies chroniques (...) " devait être évaluée à cinq points seulement. Selon ces documents, M. A... souffre, à la date de sa demande de révision, d'une augmentation en intensité et en fréquence de douleurs dorso-lombaires avec irradiation vers les membres inférieurs, mais qui ne traduit toutefois qu'une légère aggravation du déficit fonctionnel avec majoration de la raideur caractérisée par une distance main-sol de 70 centimètres contre 50 centimètres lors d'une expertise réalisée en 1997, avec troubles au niveau des membres inférieurs (dysesthésie notamment), et une manœuvre de Lasègue positive à 40 degrés à gauche et à droite, de sorte que le taux d'invalidité de 20 % doit être majoré de cinq points seulement. Si le rapport d'expertise établi à la suite du jugement avant dire droit du 2 mai 2019 du tribunal des pensions militaires d'invalidité de Marseille indique que l'aggravation doit être évaluée à 10 %, il ressort de ce rapport que le médecin s'est fondé sur les mêmes examens d'imagerie médicale que ceux consultés par les précédents experts, examens réalisés les 25 septembre 2014 et 8 octobre 2014, ainsi que sur un certificat médical d'un rhumatologue établi le 9 octobre 2014, sans expliquer en quoi le taux de 5 % retenu au titre de l'aggravation de l'invalidité aurait été sous-évalué, et ce alors même que les constatations médicales qu'il opère sur le fondement de ces documents médicaux ne diffèrent aucunement de celles des deux autres médecins. De surcroît, il ne décrit pas davantage l'existence de gênes fonctionnelles supplémentaires, à la date de la demande de révision, qui n'auraient pas été prises en compte par ces médecins. Par conséquent, il ne résulte pas de l'instruction que l'aggravation de l'infirmité " dorso-lombalgies chroniques (...) " de M. A... justifierait l'allocation d'un taux supérieur à celui de 5% retenu par l'administration pour rejeter sa demande de révision de pension, un tel taux étant inférieur au taux de 10 % susceptible d'ouvrir droit à révision de pension. 8. En second lieu, il résulte de ce qui vient d'être exposé que l'appelant ne peut utilement soutenir que l'aggravation de l'invalidité " acouphènes bilatéraux (...) ", évaluée à un taux non contesté de cinq points seulement, doit être prise en compte au seul motif que l'aggravation de l'infirmité " dorso-lombalgies chroniques (...) " permet la révision de sa pension. 9. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 27 juillet 2018 et à la révision de la pension qui lui a été concédée par arrêté du 19 janvier 2009. Par suite, ses conclusions aux fins d'annulation, d'injonction, et tendant à la mise à la charge de l'Etat des frais d'instance doivent être rejetées. D É C I D E : Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre des armées. Délibéré après l'audience du 13 juin 2023, où siégeaient : - M. Marcovici, président, - M. Revert, président assesseur, - M. Martin, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 27 juin 2023. 2 N° 22MA01771
Cours administrative d'appel
Marseille
CAA de DOUAI, 2ème chambre, 27/06/2023, 22DA00753, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler le certificat de suspension du 27 janvier 2020 par lequel le ministre de l'action et des comptes publics a suspendu en totalité, à compter du 1er janvier 2019, le paiement de l'allocation n° 9 dont est assortie sa pension militaire d'invalidité n° 17-001.601 F et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par une ordonnance n° 2000609 du 24 février 2022, le président de la 1ère chambre du tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande en application des dispositions du 4° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés les 22 juin 2022 et 4 janvier 2023, M. B..., représenté par Me Hélène Detrez Cambrai, demande à la cour : 1°) d'annuler cette ordonnance ; 2°) d'annuler le certificat de suspension du ministre de l'action et des comptes publics du 27 janvier 2020 ; 3°) d'enjoindre à l'autorité compétente de procéder à l'édiction d'une décision administrative tendant à l'attribution de l'allocation spéciale n°9 sans que le montant à percevoir puisse être inférieur à celui afférent à l'indice de pension, avec effet rétroactif, dans un délai de sept jours à compter de l'arrêt à intervenir ; 4°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 48 480 euros en réparation de son préjudice financier ; 5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement, à son avocat, d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de la renonciation de celui-ci à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle. Il soutient que : - l'ordonnance est irrégulière dès lors que, d'une part, la décision litigieuse du 27 janvier 2020, qui ne constitue pas une simple lettre d'information, ne comportait aucune mention s'agissant du recours administratif préalable obligatoire prévu à l'article L. 711-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, d'autre part, le tribunal s'est trompé en prenant la décision de la commission de recours d'invalidité du 16 octobre 2018 comme une réponse à sa demande de régularisation alors que cette pièce a été produite dans une autre instance et que la demande de régularisation concernait uniquement la production d'une demande indemnitaire préalable ; - l'ordonnance ayant été prise plus de deux ans après l'introduction de sa requête, il pouvait légitiment croire que sa requête serait examinée sur le fond ; - le tribunal aurait dû réinterpréter ses conclusions comme tendant, non seulement à la reprise du versement de l'allocation spéciale n°9, mais également à l'indemnisation de sa perte de revenus ; - la décision litigieuse du 27 janvier 2020 est entachée d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'il remplissait les conditions d'attribution de l'allocation n°9, ses ressources à compter du 1er janvier 2019 étant inférieures au montant correspondant à 900 points d'indice. - il est en droit de solliciter la somme de 48 480 euros sur le fondement de la responsabilité sans faute de l'Etat en réparation du préjudice résultant de la perte de revenus générée par son invalidité imputable au service. Par des mémoires en défense, enregistrés les 11 octobre 2022 et 9 février 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête de M. B.... Il soutient que : - la demande indemnitaire de M. B... est irrecevable en ce qu'elle constitue une demande nouvelle en appel ; - les moyens soulevés dans la requête ne sont pas fondés. M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 28 avril 2022. Par une ordonnance du 10 février 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 27 février 2023 à 12h00. Vu les autres pièces du dossier. Vu : -le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Sylvie Stefanczyk, première conseillère, - et les conclusions de M. Guillaume Toutias, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. M. A... B... est titulaire d'une pension militaire d'invalidité au taux de 55% qui lui a été concédée par arrêté du ministre des armées du 17 juillet 2017 à la suite d'une fracture du scaphoïde carpien droit résultant d'un accident survenu le 28 juillet 1970 lors de son service militaire et reconnu imputable au service. Il perçoit également l'allocation spéciale n°9 prévue par l'article L. 131-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre. Par courrier du 27 janvier 2020, le ministre de l'action et des comptes publics l'a informé que le paiement de cette allocation faisait l'objet d'une suspension totale à compter du 1er janvier 2019 dès lors que ses services avaient constaté que le montant total des sommes perçues au titre de ses retraites servies par la caisse d'assurance retraite et santé au travail (CARSAT) Nord-Picardie, l'association générale des institutions de retraite des cadres (AGIRC) et l'association des régimes de retraite complémentaire (ARRCO), était supérieur à celui correspondant à 900 points d'indice pour l'année 2019. Par une décision du même jour, il a certifié qu'il y avait lieu de suspendre en totalité, à compter du 1er janvier 2019, le paiement de l'allocation n° 9 dont était assortie la pension militaire d'invalidité de l'intéressé, sans que le montant à percevoir puisse être inférieur à celui afférent à l'indice de pension 269,20. M. B... relève appel de l'ordonnance du 24 février 2022 par laquelle le président de la 1ère chambre du tribunal administratif d'Amiens a, en application des dispositions du 4° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, rejeté sa demande tendant à l'annulation du certificat de suspension du 27 janvier 2020 et demande à la cour de condamner l'Etat à lui verser une somme de 48 480 euros au titre de son préjudice financier. Sur la fin de non-recevoir soulevée à l'encontre des conclusions indemnitaires : 2. M. B... demande à la cour de condamner l'Etat, sur le fondement de la responsabilité sans faute, à lui verser la somme de 48 480 euros en réparation du préjudice financier résultant de la perte de revenus générée par son invalidité imputable au service. Toutefois, de telles conclusions, qui n'ont pas été soumises aux premiers juges, ont le caractère de conclusions nouvelles en cause d'appel et sont, par suite, irrecevables. La circonstance que M. B... ait, d'une part, indiqué dans un courrier du 30 janvier 2019 adressé au ministre des armées qu'il souhaitait que l'allocation spéciale n°9 prévue par l'article L. 131-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre lui soit à nouveau versée à hauteur de 300 euros mensuels " ou qu'une autre solution soit trouvée " et, d'autre part, précisé à la cour dans sa requête du 31 mars 2022 que la saisine du tribunal avait pour objet de faire revenir l'administration sur sa décision de suspension de versement de l'allocation spéciale n°9 et " de lui demander de bien vouloir étudier la possibilité " de l'indemniser, n'a pas pour effet de pallier l'absence de conclusions indemnitaires figurant dans sa demande présentée devant le tribunal. Par suite, il y a lieu d'accueillir la fin de non-recevoir opposée par le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et de rejeter les conclusions indemnitaires présentées par M. B.... Sur la régularité de l'ordonnance attaquée : 3. D'une part, aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " Les (...) présidents de formation de jugement des tribunaux (...) peuvent, par ordonnance : / (...) / 4° Rejeter les requêtes manifestement irrecevables, lorsque la juridiction n'est pas tenue d'inviter leur auteur à les régulariser ou qu'elles n'ont pas été régularisées à l'expiration du délai imparti par une demande en ce sens (...). " 4. D'autre part, aux termes de l'article L. 711-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " Les recours contentieux contre les décisions individuelles prises en application du livre Ier et des titres Ier à III du livre II sont précédés d'un recours administratif préalable exercé dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat ". Aux termes de l'article R. 711-1 de ce code : " Tout recours contentieux formé à l'encontre des décisions individuelles prises en application des dispositions du livre Ier et des titres Ier à III du livre II du présent code est précédé, à peine d'irrecevabilité, d'un recours administratif préalable obligatoire examiné par la commission de recours de l'invalidité, placée conjointement auprès du ministre de la défense et du ministre chargé du budget. (...). / Le recours administratif formé auprès de la commission conserve le délai de recours contentieux jusqu'à la notification de la décision prévue à l'article R.711-15. (...) ". 5. L'institution, par les dispositions ci-dessus rappelées, d'un recours administratif préalable obligatoire à la saisine du juge, a pour effet de laisser à l'autorité compétente pour en connaître le soin d'arrêter définitivement la position de l'administration. Il s'ensuit que la décision prise à la suite de ce recours se substitue en principe à la décision initiale et qu'elle est seule susceptible de faire l'objet d'un recours contentieux. 6. Il ressort des pièces du dossier que M. B... n'a pas justifié de l'exercice d'un recours administratif préalable obligatoire devant la commission de recours de l'invalidité avant de saisir le tribunal administratif d'Amiens de sa demande tendant à l'annulation du certificat du ministre de l'action et des comptes publics du 27 janvier 2020 suspendant en totalité, à compter du 1er janvier 2019, le paiement de l'allocation n° 9 dont était assortie sa pension militaire d'invalidité alors que, d'une part, une telle allocation avait été prise en application du livre 1er du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre et, d'autre part, ce certificat, dont il n'est pas contesté que l'intéressé en a eu notification, comportait la mention d'un tel recours. L'intéressé ne peut utilement se prévaloir de ce que le courrier du 27 janvier 2020 par lequel le ministre de l'action et des comptes publics l'a informé que le paiement de cette allocation faisait l'objet d'une suspension totale à compter du 1er janvier 2019, ne comportait pas l'indication du recours administratif préalable obligatoire exigé par les dispositions précitées de l'article R. 711-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre dès lors que ce courrier d'information ne présente aucun caractère décisoire. Il suit de là que le président de la première chambre du tribunal administratif d'Amiens, qui n'était pas tenu d'inviter M. B... à régulariser ses écritures, a pu, sans irrégularité, rejeter la demande de l'intéressé au motif qu'elle était manifestement irrecevable sans qu'y fasse obstacle la circonstance que le tribunal lui avait adressé le 12 mars 2020 une demande de régularisation portant sur la production de la preuve de l'envoi et de la réception par l'administration d'une demande indemnitaire préalable et qu'il avait considéré à tort que la décision de la commission de recours d'invalidité du 16 octobre 2018 portant sur sa demande de révision de sa pension militaire d'invalidité, qui avait été produite dans le cadre d'une autre instance, était une réponse à cette demande de régularisation. 7. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le président de la première chambre du tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande. Sur les frais liés à l'instance : 8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. B... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et à Me Hélène Detrez-Cambrai. Délibéré après l'audience publique du 13 juin 2023 à laquelle siégeaient : - Mme Anne Seulin, présidente de chambre, - M. Marc Baronnet, président-assesseur, - Mme Sylvie Stefanczyk, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 juin 2023. La rapporteure, Signé : S. StefanczykLa présidente de chambre, Signé : A. Seulin La greffière, Signé : A.S. Villette La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme, La greffière Anne-Sophie Villette 2 N°22DA00753
Cours administrative d'appel
Douai
CAA de NANTES, 6ème chambre, 20/06/2023, 21NT01613, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du 8 novembre 2019 par lequel le maire de C... a refusé de reconnaître le caractère professionnel de sa maladie. Par un jugement n° 2000031 du 15 avril 2021, le tribunal administratif de Caen a annulé cet arrêté, a enjoint à la commune de C... de reconnaître la maladie de Mme A... comme étant imputable au service et de régulariser sa situation dans un délai de deux mois. Procédure devant la cour : Par une requête et des mémoires, enregistrés les 15 juin 2021, 4 avril 2022 et 26 janvier 2023, la commune de C... représentée par Me Cavelier, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Caen du 15 avril 2021 ; 2°) de rejeter la demande présentée devant le tribunal administratif de Caen par Mme A... ; 3°) de mettre à la charge de Mme A... la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient qu'en refusant de reconnaître l'imputabilité au service de la pathologie de Mme A..., le maire n'a commis aucune faute et n'a pas entaché sa décision d'erreur manifeste d'appréciation ; il appartient à l'intéressée d'établir le lien de causalité entre sa pathologie et le service, or elle ne démontre à aucun moment l'existence d'un évènement précis à l'origine de sa maladie ; au contraire, elle a été affectée sur un poste conforme à ses compétences et a bénéficié du soutien de sa hiérarchie et des équipes qu'elle encadrait. Par un mémoire en défense, enregistré le 1er octobre 2021, Mme A..., représentée par Me Boucher, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de la commune de C... en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient qu'aucun moyen de la requête n'est fondé. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Gélard, - les conclusions de Mme Malingue, - et les observations de Me Boucher, représentant Mme A.... Considérant ce qui suit : 1. Mme A..., recrutée par la commune de C... à compter du 1er mars 1996, exerçait depuis le 1er février 2015, les fonctions de responsable du bureau " études-travaux ". Elle a en outre été chargée d'assurer l'intérim du directeur des services techniques lors de l'admission de celui-ci à la retraite au 1er mars 2016. Mme A... a été placée en congé de maladie à compter du 24 octobre 2016. Ses arrêts de travail ont été prolongés sans discontinuité jusqu'au 23 janvier 2019. Le 17 janvier 2019, l'intéressée a demandé à ce que sa maladie soit reconnue imputable au service. Par un arrêté du 8 novembre 2019, le maire de C... a rejeté sa demande. La commune relève appel du jugement du 15 avril 2021 par lequel le tribunal administratif de Caen a annulé cet arrêté. Sur les conclusions à fin d'annulation : 2. Aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans sa version applicable à la date de la décision en litige : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. (...) / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident (...) Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales (...) ". 3. Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service. 4. La commune fait valoir que Mme A... a été affectée sur un poste conforme à ses compétences et qu'elle a bénéficié du soutien de sa hiérarchie et des équipes qu'elle encadrait. S'il est constant que Mme A... est titulaire d'un diplôme d'architecture obtenu en 1982, elle n'a exercé en cette qualité que durant deux années avant de reprendre ses études. Il n'est pas contesté que par la suite, et notamment depuis son recrutement par la commune de C... en 1996, elle n'a occupé que des fonctions administratives. Par ailleurs, si l'intéressée, alors directrice du service éducation, avait exprimé la volonté de changer de fonctions, elle a émis des réserves sur sa capacité à occuper le poste de chef de bureau " études-travaux " (BET) pour lesquels sa candidature n'avait initialement pas été retenue et auquel elle a été finalement nommée le 1er février 2015. Lors de son entretien professionnel d'évaluation qui s'est tenu le 22 décembre 2015, Mme A... a clairement exprimé les difficultés qu'elle rencontrait à encadrer des agents exerçant des fonctions techniques qu'ils maîtrisaient et qui remettaient en cause ses propres compétences. La collectivité a reconnu, dans le compte-rendu d'entretien professionnel, qu'en dépit des stages qu'elle avait suivis, l'intéressée n'avait ni la formation, ni l'expérience pour de telles fonctions, en ajoutant sans ménagement qu'il était " illusoire de penser que Mme A... puisse les acquérir dans un délai raisonnable et compatible avec la prise en charge du BET ". Au cours de cet entretien, Mme A... a exprimé ses craintes quant à l'exercice, alors envisagé, des fonctions de directeur des services techniques (DST) par intérim. Toutefois, en dépit du constat posé au cours de cet entretien professionnel annuel, quelques mois plus tard seulement, elle était désignée pour assurer cet interim, le processus de sélection du nouveau DST n'ayant pas abouti. Mme A... s'est ainsi trouvée dans l'incapacité d'effectuer correctement avec la confiance de son équipe les missions dont elle avait la charge. Si la commune indique que l'intéressée était épaulée par le directeur général des services dans le cadre de la mission d'intérim, notamment lors de réunions, elle ne l'établit pas, pas plus qu'elle n'établit que Mme A..., dont l'investissement ou les capacités managériales n'ont à aucun moment été remis en cause, n'aurait pas eu, durant cette période, une charge de travail accrue. 5. Si la commune de C... souligne par ailleurs que le certificat médical établi le 24 octobre 2016 par le psychiatre qui suivait Mme A... s'est borné à mentionner qu'elle souffrait d'un " burn out ++ ", sans relever le caractère professionnel de sa pathologie, il n'incombait pas à ce médecin de préciser l'origine de sa maladie et encore moins sa qualification juridique, pas plus d'ailleurs qu'à la commission de réforme lors de sa séance du 20 décembre 2019 au cours de laquelle elle devait rendre un avis sur la mise à la retraite de l'intéressée pour invalidité. En revanche, dans son rapport du 24 juin 2019 l'expert désigné à cet effet a reconnu que la pathologie de l'intéressée était la conséquence d'une surcharge de travail et présentait un lien avec le service. En outre, il ne ressort d'aucune pièce du dossier que la pathologie dont souffre Mme A... serait liée à un évènement d'ordre privé et personnel dépourvu de tout lien avec le service. Enfin, si la commission de réforme lors de sa séance du 13 septembre 2019, en l'absence de l'intéressée, du médecin de prévention et de tout spécialiste, s'est écartée des conclusions de l'expert, en soulignant l'" impossibilité d'établir le lien de causalité entre le service et la maladie ", les éléments rappelés au point 4 suffisent à établir, indépendamment de toute faute de son employeur, que la maladie de Mme A... présentait un lien direct avec l'exercice de ses fonctions. 6. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a annulé l'arrêté du 8 novembre 2019 par lequel le maire a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de la pathologie de Mme A... à compter du 24 octobre 2016. Sur les frais liés au litige : 7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de Mme A..., qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement à la commune de C... d'une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Les conclusions présentées à ce titre par la commune de C... ne peuvent dès lors être accueillies. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de cette dernière le versement à Mme A... de la somme de 1 500 euros au titre des frais de même nature qu'elle a supportés. DECIDE : Article 1er : La requête de la commune de C... est rejetée. Article 2 : La commune de C... versera à Mme A... la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de C... et à Mme B... A.... Délibéré après l'audience du 2 juin 2023, à laquelle siégeaient : - M. Gaspon, président de chambre, - M. Coiffet, président-assesseur, - Mme Gélard, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 juin 2023. Le rapporteur, V. GELARD Le président, O. GASPON La greffière, I.PETTON La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21NT01613
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Nantes