Jurisprudence
La jurisprudence est l'ensemble des décisions rendues par les juridictions administratives, pendant une certaine période dans une matière, dans une branche ou dans l'ensemble du droit.
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CAA de NANTES, 6ème chambre, 05/12/2023, 22NT01405, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... ... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du 12 juin 2019 par laquelle le directeur de l'Établissement public des fonds de prévoyance militaire et de l'aéronautique (EPFP) lui a refusé le bénéfice de l'allocation du fonds de prévoyance militaire prévue par les articles D. 4123-3 et suivants du code de la défense. Par un jugement n° 1904373 du 10 mars 2022, le tribunal administratif de Rennes a annulé la décision du 12 juin 2019 du directeur de l'Établissement public des fonds de prévoyance militaire et de l'aéronautique. Procédure devant la cour : Par une requête et des mémoires complémentaires enregistrés le 9 mai, 28 juillet et 22 septembre 2022, l'Établissement public des fonds de prévoyance militaire et de l'aéronautique, représenté par Me Abecassis, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 10 mars 2022 ; 2°) de rejeter la demande présentée par M. ... ; 3°) de laisser à la charge de chacune des parties les frais d'instance. Il soutient que : - par application de l'article D. 4123-8 du code de la défense, le requérant n'a pas droit à l'allocation qu'il demande, son invalidité n'étant pas à l'origine de sa radiation des cadres puisqu'elle répond à sa demande tendant à sa mise à la retraite avec l'avantage pécuniaire relatif à la liquidation immédiate d'une pension afférente au grade supérieur (PAGS) ; le bénéfice du dispositif de la PAGS constituait un obstacle au droit à l'allocation ; les conditions d'octroi de cette allocation sont incompatibles avec un départ à la retraite qui n'a pas été dicté de manière contraignante par l'infirmité imputable au service ; - le tribunal a commis une erreur d'appréciation dans la mise en œuvre des dispositions applicables ; - M. ... n'apporte pas la preuve qu'il ne pouvait plus occuper d'emploi au sein de l'armée, affirmant même le contraire. Par un mémoire en défense et un mémoire complémentaire, enregistrés les 27 juin et 8 septembre 2022, M. ... représenté par Me Huon conclut au rejet de la requête et demande que la somme de 1000 euros soit mise à la charge de l'Établissement public des fonds de prévoyance militaire et de l'aéronautique sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative. Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de la défense ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Coiffet, - les conclusions de Mme Bougrine, rapporteure publique - et les observations de Me Abecassis, représentant l'Établissement public des fonds de prévoyance militaire et de l'aéronautique. Considérant ce qui suit : 1. A la suite de sa participation à l'opération militaire extérieure C... en B..., entre les mois de janvier et juin 2006, en qualité de premier maître fusilier marin, M. ..., né le 20 avril 1974, marié et père de deux enfants, souffre d'un syndrome de stress post-traumatique diagnostiqué au mois de mai 2014. Cette maladie est à l'origine de longs arrêts maladie, puis d'une reprise de service dans un poste adapté. M. ... a, sa demande présentée le 1er juillet 2016 ayant été accueillie favorablement, été radié des cadres avec attribution de la pension afférente au grade supérieur (dispositif PAGS). Il a ensuite repris une activité professionnelle dans le secteur civil, mais pour une courte durée car, au bout de six mois, l'intéressé a été placé en congé de maladie puis hospitalisé à plusieurs reprises. M. ... a finalement été déclaré par la médecine du travail inapte à l'emploi, son état de santé faisant obstacle à tout reclassement, et licencié par son employeur privé. Il a sollicité le bénéfice de l'allocation du fonds de prévoyance militaire prévue par les articles D. 4123-3 et suivants du code de la défense, fonds auquel il était alors affilié. Par une décision du 12 juin 2019, le directeur de l'Établissement public des fonds de prévoyance militaire et de l'aéronautique (EPFP) lui a refusé le bénéfice de cette allocation au motif qu'il ne remplissait pas les conditions prévues par l'article D. 4123-6 du code de la défense dès lors qu'il n'avait pas été radié des cadres par suite d'une infirmité survenue du fait ou à l'occasion du service ayant entrainé sa réforme définitive. 2. M. ... a, le 16 juillet 2019, saisi le tribunal administratif de Rennes d'une demande tendant à l'annulation de la décision du 12 juin 2019 du directeur de l'EPFP. Par un jugement du 10 mars 2022, cette juridiction a fait droit à sa demande. L'Établissement public des fonds de prévoyance militaire et de l'aéronautique relève appel de ce jugement. 3. L'EPFP soutient que le fait que M. ... a, sur sa demande, été admis à la retraite avec le bénéfice du dispositif de la PAGS, et, pour ce motif, radié des cadres, faisait obstacle à ce qu'il puisse bénéficier de l'allocation du fonds de prévoyance militaire dont les conditions d'octroi sont incompatibles avec un départ à la retraite qui, selon l'EPFP, " n'a pas été dicté de manière contraignante par l'infirmité imputable au service ". 4. Aux termes de l'article D. 4123-2 du code de la défense : " Les militaires, à l'exception de ceux qui sont affiliés au fonds de prévoyance de l'aéronautique, sont affiliés au fonds de prévoyance militaire destiné à verser, hors le cas de mobilisation générale ou de participation à des opérations qualifiées d'opérations de guerre par décret en conseil des ministres, des allocations en cas de blessure, d'infirmité ou de décès imputable au service dans le cas où la blessure, l'infirmité ou le décès n'ouvre pas droit aux allocations du fonds de prévoyance de l'aéronautique. ". L'article D. 4123-6 du même code dispose que " Lorsque l'infirmité imputable au service entraîne la mise à la retraite ou la réforme définitive du militaire, il est versé à l'intéressé : / 1° Une allocation principale (...) / 2° Un complément d'allocation. (...) ". Aux termes de l'article D. 4123-8 de ce code : " Lorsque l'infirmité imputable à l'un des risques exceptionnels spécifiques au métier militaire énumérés à l'article D. 4123-9 entraîne la mise à la retraite ou la réforme définitive, il est versé à l'intéressé : 1° Une allocation principale ... (...) 2° Un complément d'allocation (...). ". 5. La décision contestée du 12 juin 2019 du directeur de l'EPFP refusant à M. ... le bénéfice de l'allocation de prévoyance militaire est fondée sur le fait qu'il ne remplissait pas les conditions prévues par l'article D. 4123-6 du code de la défense dès lors qu'il n'avait pas été radié des cadres pour infirmité entrainant réforme définitive. 6. A la suite de sa participation à l'opération militaire extérieure C... en B..., M. ... souffre d'un syndrome de stress post-traumatique diagnostiqué au mois de mai 2014. Une invalidité au taux de 40% lui a été reconnue en 2015 par l'Etat à raison de cette infirmité. Il ressort des pièces du dossier, d'une part, que le conseil régional de santé - agissant comme comité médical des militaires - qui avait été saisi par le médecin de prévention a rendu, le 7 septembre 2016, un " avis d'aptitude dans l'emploi de fusilier marin et au port d'armes, par dérogations aux normes médicales ", un maintien dans sa spécialité par dérogation étant prononcé le 12 octobre 2016. Il a bénéficié d'une décision d'homologation de blessure de guerre le 13 décembre 2018 prise au motif que, " étant occupé en service commandé, il a été reconnu atteint d'état de stress post-traumatique, irritabilité, répétitions nocturnes, hyper-vigilance, conduites d'évitement ". D'autre part, il est constant que M. ... a été mis à la retraite sur sa demande et radié des cadres par un arrêté du 15 décembre 2016, avec effet au 31 août 2017. Dans ces conditions, si l'infirmité dont M. ... reste atteint est bien imputable au service, condition nécessaire, selon les articles D. 4123-2, D. 4123-6 et D.4123-8 du code de la défense, rappelés au point 4, pour obtenir une allocation du fonds de prévoyance militaire, cette infirmité ne peut être regardée comme ayant entraîné la mise à la retraite de cet agent au sens de ces dispositions. Par suite, le directeur de l'Établissement public des fonds de prévoyance militaire et de l'aéronautique (EPFP) a pu légalement, par la décision contestée du 12 juin 2019, refuser à M. ... le bénéfice de l'allocation du fonds de prévoyance militaire au motif qu'il ne remplissait pas les conditions prévues par l'article D. 4123-6 du code de la défense. 7. Il résulte de tout ce qui précède que, la cour n'étant saisie d'aucun autre moyen devant faire l'objet d'examen au titre de l'effet dévolutif, l'Établissement public des fonds de prévoyance militaire et de l'aéronautique est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a annulé la décision du 12 juin 2019. Sur les frais liés au litige : 8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Établissement public des fonds de prévoyance militaire et de l'aéronautique, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à M. ... de la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement n° 1904973 du 10 mars 2022 du tribunal administratif de Rennes est annulé. Article 2 : La demande présentée par M. ... devant le tribunal et ses conclusions présentées en appel tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... ... et à l'Établissement public des fonds de prévoyance militaire et de l'aéronautique. Une copie en sera adressée pour information, au ministre des armées. Délibéré après l'audience du 17 novembre 2023, à laquelle siégeaient : - M. Gaspon, président de chambre, - M. Coiffet, président-assesseur, - M. Pons, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 5 décembre 2023. Le rapporteur, O. COIFFETLe président, O. GASPON La greffière, I. PETTON La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. N°22NT01405 2
Cours administrative d'appel
Nantes
CAA de MARSEILLE, , 14/12/2023, 23MA02788, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Toulon de prescrire une expertise aux fins d'évaluer les préjudices consécutifs à la lombosciatique qu'il a contractée en 1985, alors qu'il était en service, en qualité de capitaine de vaisseau, en Nouvelle-Calédonie. Par une ordonnance n° 2302871 du 9 novembre 2023, il n'a pas été fait droit à sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête, enregistrée le 23 novembre 2023, M. B..., représenté par Me Hasenfratz, demande à la Cour : 1°) d'annuler l'ordonnance du 9 novembre 2023 ; 2°) statuant en référé, de faire droit à sa demande de première instance ; 3°) de mettre à la charge du ministre de la défense la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; 4°) de condamner le ministre de la défense aux entiers dépens. Il soutient que l'élément déclencheur de son état était le choc lors d'une sortie en véhicule pendant sa mission en Nouvelle-Calédonie ; que, dès lors, la blessure, au sens du 1er alinéa de l'article L. 121-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, est directement rattachable au service ; que ce choc a entraîné une maladie professionnelle, au sens des 2ème et 3ème alinéas de cet article ; que le taux d'invalidité de 25 % retenu par l'expert désigné par l'administration puis par la commission de recours de l'invalidité à hauteur de 20 % est contestable ; qu'il a l'espoir que ce taux soit revu à la hausse à la hauteur de ses souffrances. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - le code de justice administrative. Considérant ce qui suit : 1. Aux termes du premier alinéa de l'article R. 532-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, sur simple requête (...) prescrire toute mesure utile d'expertise ou d'instruction ". En vertu de l'article L. 555-1 du même code, le président de la cour administrative d'appel est compétent pour statuer sur les appels formés contre les décisions rendues par le juge des référés. 2. A la suite de la décision du 11 mai 2023 de la commission de recours de l'invalidité rejetant sa demande tendant à la concession d'une pension militaire d'invalidité, M. B..., capitaine de vaisseau du 1er avril 1982 au 3 juin 1997, a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Toulon de prescrire une expertise aux fins d'évaluer les préjudices consécutifs à la lombosciatique qu'il soutient avoir contractée en 1985, alors qu'il était en service en Nouvelle-Calédonie, et notamment de voir établi qu'il présente un taux d'invalidité au moins égal à 30 %, seuil fixé par le 2° de l'article L. 121-5 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre. Par l'ordonnance attaquée du 9 novembre 2023, le juge des référés a refusé de faire droit à sa demande, au motif que le prononcé d'une mesure d'expertise n'apparaît pas utile dès lors que le requérant " n'établit pas la vraisemblance d'une lésion soudaine (blessure) rattachable au service par présomption " et que son taux d'invalidité est " inférieur au minimum indemnisable de 30 % requis pour l'ouverture du droit à pension pour une maladie du temps de paix ". 3. L'utilité d'une mesure d'instruction ou d'expertise qu'il est demandé au juge des référés d'ordonner sur le fondement de l'article R. 532-1 du code de justice administrative doit être appréciée, d'une part, au regard des éléments dont le demandeur dispose ou peut disposer par d'autres moyens et, d'autre part, bien que ce juge ne soit pas saisi du principal, au regard de l'intérêt que la mesure présente dans la perspective d'un litige principal, actuel ou éventuel, auquel elle est susceptible de se rattacher. A ce dernier titre, il ne peut faire droit à une demande d'expertise lorsque, en particulier, elle est formulée à l'appui de prétentions qui sont irrecevables (cf. CE, 14.02.2017, n° 401514). 4. M. B... disposait, s'il entendait contester la légalité de la décision du 11 mai 2023 de la commission de recours de l'invalidité, d'un délai de deux mois à compter de sa date de notification, pour introduire un recours devant le tribunal administratif. Le requérant ne justifie pas avoir introduit un tel recours dans ce délai et il ne résulte pas de la consultation de l'application informatique du greffe du tribunal administratif de Toulon qu'un tel recours ait été enregistré. La demande qu'il a adressée le 7 septembre 2023 au juge des référés du tribunal administratif de Toulon aux fins que soit ordonnée une expertise n'a pas été de nature à interrompre ce délai du recours contentieux (cf. CE, 28.09.2020, n° 425630). Par suite, le prononcé d'une mesure d'expertise aux fins que soit déterminé le taux d'invalidité dont M. B... est atteint est dépourvu du caractère d'utilité requis par l'article R. 532-1 du code de justice administrative, dès lors qu'il ne peut plus, à ce jour, introduire, de façon recevable, un recours contre la décision du 11 mai 2023. 5. Si la mesure d'expertise que le requérant sollicite a également pour objet d'évaluer l'ensemble des préjudices consécutifs à la lombosciatique qu'il soutient avoir contractée en 1985, alors qu'il était en service, il est constant que l'imputabilité au service de cette pathologie n'a pas été reconnue par le ministre des armées. En conséquence, une éventuelle action en responsabilité à l'encontre de l'Etat en réparation des préjudices personnels voire patrimoniaux qui ne seraient pas réparés par l'attribution d'une pension militaire d'invalidité, est, en tout état de cause, à ce jour, dépourvue d'objet. Par suite, le prononcé de la mesure d'expertise ne présente pas davantage le caractère d'utilité requis par l'article R. 532-1 du code de justice administrative, sur les autres chefs de mission. 6. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande. 7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. O R D O N N E : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. B.... Copie en sera adressée, pour information, au ministre des armées. Fait à Marseille, le 14 décembre 2023 N° 23MA027882 LH
Cours administrative d'appel
Marseille
CAA de DOUAI, 2ème chambre, 01/12/2023, 21DA01397, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lille de condamner le centre hospitalier régional universitaire (CHRU) de Lille à lui verser la somme globale de 497 662,62 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait de sa prise en charge au sein de ce centre, et à titre subsidiaire, en l'absence de condamnation du CHRU de Lille, de condamner l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à lui verser la somme précitée en réparation de ses préjudices. Par un jugement n° 1709227 du 28 avril 2021, le tribunal administratif de Lille a mis l'ONIAM hors de cause, a décidé que M. B... reverserait au CHRU de Lille la somme de 3 745,67 euros déduction faite de la provision accordée par ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Lille en date du 18 décembre 2017, a condamné le CHRU de Lille à verser à la CPAM de Roubaix-Tourcoing la somme de 116 998,55 euros au titre de ses débours assortie des intérêts au taux légal avec capitalisation ainsi que la somme de 1 098 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion, a condamné le CHRU de Lille à rembourser à la CPAM de Roubaix-Tourcoing, sur présentation des justificatifs à la fin de chaque année échue, les frais futurs exposés par elle au titre des dépenses de santé de M. B... dans la limite annuelle du montant de 278,06 euros, a condamné le CHRU de Lille à rembourser à la CPAM de Roubaix-Tourcoing une rente annuelle de 16 050,91 euros au titre de la rente accident du travail qu'elle verse à M. B..., sans que le total des sommes versées par le CHRU de Lille à la caisse, tous préjudices confondus, puisse excéder la somme de 164 139,97 euros ni excéder le terme du 27 décembre 2027, a condamné le CHRU de Lille à verser à la mutuelle Pro-BTP la somme de 3 029,07 euros au titre des sommes qu'elle a exposé pour le compte de son assuré. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 25 juin 2021, et des mémoires enregistrés les 3 avril 2023 et 12 mai 2023, le mémoire du 12 mai 2023 n'ayant pas fait l'objet d'une communication, M. A... B..., représenté par Me Bruno Wecxsteen puis par Me Anne-Sophie Garcia Mora, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures : 1°) de réformer ce jugement ; 2°) de condamner le centre hospitalier régional universitaire (CHRU) de Lille à lui verser la somme globale de 435 045,42 euros, avec intérêts au taux légal et capitalisation, en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait de sa prise en charge au sein de ce centre ; 3°) et de mettre à la charge du CHRU de Lille une somme de 12 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - la responsabilité du CHRU est engagée en raison d'un manquement constitué par un retard de diagnostic de la fracture subie à la vertèbre thoracique T6 et d'une infection nosocomiale au décours de la cimentoplastie rendue nécessaire du fait de ce manquement ; - son état antérieur n'ayant pas participé à la réalisation du dommage, seul le manquement du CHRU est à l'origine de son préjudice ; - le manquement du CHRU lui a causé des préjudices d'un montant global de 435 045,42 euros se décomposant comme suit : * 1 320 euros au titre des frais divers ; * 18 127,40 euros au titre des frais d'assistance par tierce personne avant consolidation ; * 2 327,23 euros au titre de la perte de gains professionnels actuels ; * 27 412,03 euros au titre des frais de logement adapté ; * 38 700 euros au titre des frais de véhicule adapté ; * 151 422,36 euros au titre des frais d'assistance par tierce personne après consolidation, ou subsidiairement 97 119,03 euros ; * 62 737,40 euros au titre de la perte de gains professionnels futurs, sauf à déduire les prestations perçues ou à percevoir ; * 50 000 euros au titre de l'incidence professionnelle ; * 9 999 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire ; * 10 000 euros au titre des souffrances endurées ; * 1 500 euros au titre du préjudice esthétique temporaire ; * 40 000 euros au titre du déficit fonctionnel permanent ; * 10 000 euros au titre de son préjudice d'agrément ; * 1 500 euros au titre de son préjudice esthétique permanent ; * 10 000 euros au titre de son préjudice sexuel. Par des mémoires en défense enregistrés les 25 février 2002 et 9 mai 2023, le CHRU de Lille, représenté par le cabinet Le Prado - Gilbert, conclut au rejet de la requête. Il soutient que : - c'est à bon droit que les premiers juges ont jugé que sa responsabilité ne peut être engagée qu'au titre d'une perte de chance pour M. B... de ne pas subir une aggravation de son état de santé dont le taux est évalué par les experts à hauteur de 80 % ; - la victime n'est pas recevable à solliciter des juges d'appel un montant supérieur à celui qu'elle avait demandé aux premiers juges ; - les demandes de M. B... au titre des frais divers, de la perte de gains professionnels actuels, des frais de logement adapté, des frais de véhicule adapté, des frais d'assistance par tierce personne et du préjudice d'agrément doivent être rejetées ; - il n'y a pas lieu d'accorder une indemnité complémentaire au titre des frais d'assistance par tierce personne, au-delà de la somme de 26 330,46 euros accordée en première instance, compte tenu du taux de perte de chance de 80 % ; - la demande au titre de la perte de gains professionnels futurs doit être rejetée, M. B... ayant perçu au titre des prestations de sécurité sociale une somme supérieure à l'évaluation de son préjudice, et l'existence d'une telle perte après le départ en retraite n'étant pas établie ; - les premiers juges ont accordé une indemnisation suffisante de 15 000 euros au titre de l'incidence professionnelle ; - la demande au titre des dépenses de santé futures doit être rejetée dès lors que ces dépenses seront prises en charge par l'assurance maladie ; - les premiers juges ont accordé une indemnisation suffisante de 3 636 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire, compte tenu du taux de perte de chance de 80 % ; - les premiers juges ont accordé une indemnisation suffisante de 5 760 euros au titre des souffrances endurées, compte tenu du taux de perte de chance de 80 % ; - les premiers juges ont accordé une indemnisation suffisante de 400 euros au titre du préjudice esthétique temporaire, compte tenu du taux de perte de chance de 80 % ; - les premiers juges ont accordé une indemnisation suffisante de 30 400 euros au titre du déficit fonctionnel permanent, compte tenu du taux de perte de chance de 80 % ; - les premiers juges ont accordé une indemnisation suffisante de 800 euros au titre du préjudice esthétique permanent, compte tenu du taux de perte de chance de 80 % ; - l'existence d'un préjudice sexuel n'est pas établie. Par un mémoire en défense, enregistré le 2 septembre 2021, l'ONIAM, représenté par Me Sylvie Welsch, conclut à la confirmation du jugement qui l'a mis hors de cause dans la présente instance. Il soutient que : - le CHRU de Lille a commis un manquement fautif qui est à l'origine du tassement de la vertèbre de M. B... et de l'infection nosocomiale dès lors que l'intervention qui en est l'origine n'aurait pas été réalisée sans ce manquement de telle sorte qu'il ne lui appartient pas d'en réparer les conséquences au titre de la solidarité nationale ; - les conditions d'ouverture d'un droit à indemnisation au titre de la solidarité nationale des articles L. 1142-1 et L. 1142-1-1 du code de la santé publique ne sont en tout état de cause pas remplies ; si l'infection a un caractère nosocomial certain, M. B... souffre d'un déficit fonctionnel de 25 % de telle sorte que le seuil, institué par la loi pour que les conséquences de l'infection nosocomiale soient indemnisées au titre de la solidarité nationale, n'est pas dépassé. M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 30 septembre 2021. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de la santé publique ; - le code de la sécurité sociale ; - le code de l'action sociale et des familles ; - le code des pensions civiles et militaires ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Marc Baronnet, président-assesseur, - et les conclusions de Mme Caroline Regnier, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. Le 16 janvier 2013, à la suite d'une chute sur une plaque de verglas présente sur le chantier où il avait été affecté, M. B..., couvreur-zingueur, a été admis aux urgences du CHRU de Lille. Sur la base d'une radiographie réalisée le jour-même, les équipes médicales ont diagnostiqué une fracture de la vertèbre cervicale C7 et ont permis au patient, en lui prescrivant des antalgiques, de regagner son domicile le jour même, équipé d'une minerve sans restriction de mouvements particulière. Un nouvel examen radiologique effectué le 13 mars 2013 a cependant mis en évidence le tassement du corps de la vertèbre thoracique T6 en raison d'une fracture du plateau vertébral supérieur. Du 6 au 8 août 2013, M. B... a été admis au CHRU de Lille aux fins de réalisation d'une cimentoplastie couplée à une kyphoplastie, soit l'insertion dans la vertèbre tassée d'un bâtonnet gonflable afin de restaurer sa hauteur et de créer une cavité au sein de laquelle est injecté du ciment acrylique. Si les résultats immédiats de cette intervention se sont révélés satisfaisants, M. B... a cependant de nouveau été admis au CHRU le 19 août 2013 en raison d'une augmentation brutale de ses douleurs dorsales. Une ponction-biopsie a été réalisée le 21 août suivant sous anesthésie locale au cours de laquelle un nerf intercostal a subi un traumatisme direct à l'origine d'une douleur intercostale droite à survenue aiguë. Cette ponction-biopsie a permis d'isoler un proprionibacterium acnes à l'encontre duquel une double antibiothérapie a été mise en place jusqu'au 7 septembre 2013, date de fin de son hospitalisation. M. B... a cependant subi une récidive de cette infection ayant mené à une nouvelle hospitalisation du 19 au 20 février 2014 puis à une nouvelle antibiothérapie. À la suite de deux avis conformes du médecin du travail des 15 et 29 juillet 2015, M. B... a été licencié pour inaptitude professionnelle le 10 septembre 2015. Enfin, une nouvelle ponction-biopsie a été réalisée le 28 octobre 2015 lors d'une hospitalisation du 26 au 29 octobre en raison d'une suspicion de récidive infectieuse. Malgré la stérilité du résultat de cet examen, des antibiothérapies ont été mises en place pour une durée de trois semaines à compter du 12 février 2016, reconduite pour la même durée à compter du 21 mars 2016. M. B..., dont les douleurs et les signes inflammatoires persistaient, a consulté plusieurs spécialistes au cours de l'année 2016. La résorption de l'important œdème osseux au niveau des vertèbres T5-T6 n'a été constaté, lors d'une consultation, que le 28 septembre 2016. 2. Le 27 janvier 2015, M. B... a saisi la commission de conciliation et d'indemnisation (CCI) qui a confié aux professeurs Le Gars et Deramond une mission d'expertise afin d'apprécier l'existence ou non d'une faute lors de la prise en charge au sein du CHRU de Lille. Sur la base du rapport d'expertise établi le 22 septembre 2015, la CCI s'est prononcée en faveur d'une indemnisation totale des préjudices de M. B... par le CHRU. La société hospitalière d'assurance mutuelle (SHAM) a, en conséquence, présenté le 22 avril 2016 une offre d'indemnisation qui a fait l'objet d'un refus après négociations. Par l'ordonnance n° 1709208 du 18 décembre 2017, le juge des référés du tribunal administratif de Lille a mis à la charge du CHRU de Lille le versement à M. B... d'une provision d'un montant de 80 124 euros au titre de l'indemnisation de ses préjudices. Par une ordonnance du 13 juin 2019, le juge des référés du tribunal a désigné le Dr C... en qualité d'expert qui a transmis au tribunal son rapport le 22 novembre 2019. 3. M. B... relève appel du jugement n° 1709227 du 28 avril 2021 par lequel le tribunal administratif de Lille a mis l'ONIAM hors de cause, a décidé que M. B... reverserait au CHRU de Lille la somme de 3 745,67 euros déduction faite de la provision accordée par ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Lille en date du 18 décembre 2017, a condamné le CHRU de Lille à verser à la CPAM de Roubaix-Tourcoing la somme de 116 998,55 euros au titre de ses débours assortie des intérêts au taux légal avec capitalisation ainsi que la somme de 1 098 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion, a condamné le CHRU de Lille à rembourser à la CPAM de Roubaix-Tourcoing, sur présentation des justificatifs à la fin de chaque année échue, les frais futurs exposés par elle au titre des dépenses de santé de M. B... dans la limite annuelle du montant de 278,06 euros, a condamné le CHRU de Lille à rembourser à la CPAM de Roubaix-Tourcoing une rente annuelle de 16 050,91 euros au titre de la rente accident du travail qu'elle verse à M. B..., sans que le total des sommes versées par le CHRU de Lille à la caisse, tous préjudices confondus, puisse excéder la somme de 164 139,97 euros ni excéder le terme du 27 décembre 2027, a condamné le CHRU de Lille à verser à la mutuelle Pro-BTP la somme de 3 029,07 euros au titre des sommes qu'elle a exposé pour le compte de son assuré. Sur la recevabilité des conclusions d'appel de M. B... : 4. Le CHRU de Lille soutient que les conclusions d'appel de M. B... sont irrecevables, en tant qu'elles excèdent le quantum de ses demandes de première instance. En tout état de cause, le total des demandes de M. B... s'élevant à 497 662,62 euros en première instance, et à 435 045,42 euros en appel, dans le dernier état de ses écritures, la fin de non-recevoir opposée par le CHRU de Lille ne peut qu'être écartée. Sur la mise hors de cause de l'ONIAM : 5. Le jugement du 28 avril 2021 du tribunal administratif a mis l'ONIAM hors de cause, les conditions d'engagement de la solidarité nationale n'étant pas réunies. Aucune conclusion n'est présentée à l'encontre de l'ONIAM en appel. Il y a lieu, par suite, de faire droit à sa demande de confirmation de sa mise hors de cause. Sur la responsabilité du centre hospitalier de Lille : 6. En premier lieu, aux termes de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " I.- Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute (...) ". 7. Il résulte de l'instruction, et notamment des rapports des deux expertises diligentées par la CCI et de celle prescrite par le juge des référés du tribunal, qu'à la suite immédiate de sa chute, M. B... présentait deux fractures, l'une à la vertèbre C7 et l'autre à la vertèbre T6, toutes deux visibles sur la radiographie réalisée aux urgences du CHRU de Lille. Les experts relèvent par ailleurs que la vive dorsalgie à la palpation au niveau de la vertèbre T6 aurait dû orienter les investigations médicales au niveau de cette vertèbre, ce qui aurait permis d'en diagnostiquer la fracture. Il résulte cependant de l'instruction que les équipes médicales du CHRU ont seulement diagnostiqué la fracture de la vertèbre C7 et ont donc prescrit à M. B... le port d'une minerve alors que la fracture d'une vertèbre thoracique nécessite normalement une prise en charge purement orthopédique marquée par un repos le plus complet possible le premier mois, allégé progressivement les deux mois suivants, avec une rééducation. En ne diagnostiquant pas la fracture de la vertèbre T6, le CHRU de Lille a donc commis une faute de nature à engager sa responsabilité. 8. Il résulte de l'instruction que la radiographie réalisée le 13 mars 2013 a mis en évidence le tassement de la vertèbre T6, tassement qui n'existait pas le jour de l'accident ainsi que cela ressort de la radiographie réalisée aux urgences. Il résulte cependant des trois rapports d'expertise que la réalisation pendant un mois d'un décubitus strict, à l'exception de quelques instants destinés à la toilette, aux fonctions exonératoires et à l'alimentation, puis une reprise progressive d'une activité avec rééducation pendant le mois qui suit et, enfin, une reprise plus soutenue de ces activités et de la rééducation le mois suivant aurait normalement dû permettre la consolidation de la fracture de la vertèbre sans que celle-ci ne se tasse. Ce tassement doit donc être regardé comme étant imputable à la faute du CHRU de Lille mentionnée au point précédent. 9. Il résulte par ailleurs de l'instruction que le tassement vertébral a nécessité la réalisation le 7 août 2013 d'une cimentoplastie couplée d'une kyphoplastie, justifiées par la persistance à cette date de douleurs dorsales. Si cette intervention s'est avérée initialement efficace, il résulte cependant de l'instruction que M. B... a de nouveau été hospitalisé le 19 août 2013, soit au décours de celle-ci, en raison de la présence dans les parties molles prévertébrales au niveau de la T6 d'un proprionibacterium acnes, bactérie commensale de la peau, isolée par une ponction-biopsie réalisée le 21 août 2013. En l'absence de tout élément de nature à prouver que cette bactérie cutanée retrouvée à proximité du foyer opératoire était présente ou en incubation au début de la prise en charge de la victime, ou alors que cette infection a une origine autre que cette prise en charge, il y a lieu de considérer que cette infection, au regard de ce qui a été exposé au point 5, présente un caractère nosocomial. Dans la mesure toutefois où aucun tassement n'aurait normalement dû survenir si la fracture de la vertèbre T6 avait été correctement diagnostiquée et traitée, la cimentoplastie n'aurait pu être, dans cette hypothèse, regardée comme étant nécessaire. L'infection subie par M. B... étant donc issue d'une intervention dont la nécessité résulte directement de la faute du CHRU, ses conséquences dommageables sont imputables à cette faute. Il en va ainsi également des conséquences dommageables de la biopsie du 21 août 2013 au cours de laquelle, sans que les experts n'aient relevé l'existence d'une faute, un nerf intercostal a subi un traumatisme direct à l'origine d'une douleur intercostale droite à survenue aiguë, et ce dès lors que la biopsie était nécessaire pour soigner l'infection subie par M. B.... 10. Il résulte de ce qui précède que le CHRU de Lille est responsable des conséquences dommageables de la faute qu'il a commise, qui englobent celle de l'infection survenue à compter du mois d'août 2013, ce que ni M. B... ni le CHRU de Lille ne contestent en appel. Sur le lien de causalité entre la faute commise et les préjudices subis : 11. Dans le cas où la faute commise lors de la prise en charge ou le traitement d'un patient dans un établissement public hospitalier a compromis ses chances d'obtenir une amélioration de son état de santé ou d'échapper à son aggravation, le préjudice résultant directement de la faute commise par l'établissement et qui doit être intégralement réparé n'est pas le dommage corporel constaté, mais la perte de chance d'éviter que ce dommage soit advenu. La réparation qui incombe à l'hôpital doit alors être évaluée à une fraction du dommage corporel déterminée en fonction de l'ampleur de la chance perdue. 12. Il résulte des deux rapports d'expertise de septembre 2015 et de novembre 2019 que les dommages subis par M. B... sont imputables pour 1/5 à l'évolution possible d'une fracture du rachis malgré un diagnostic correct et une prise en charge adéquate, et ce dès lors qu'une fracture du rachis, même minime, peut laisser des séquelles douloureuses. Ils précisent ensuite que si la faute et l'infection nosocomiale ont contribué, à parts égales, à la réalisation du dommage corporel, l'infection, ainsi qu'il a été dit au point 9, résulte directement de la faute commise. Si M. B... soutient que le dommage est en totalité imputable à la faute, il résulte de l'instruction, et en particulier de ce qui précède, que la faute du CHRU de Lille a fait perdre au requérant une chance d'échapper à l'aggravation de son état de santé et qu'il y a lieu, au regard de la part, évaluée par les experts à 20 %, des dommages imputables à l'évolution naturelle de la fracture initiale du rachis, de fixer le taux de perte de chance à hauteur de 80 %. Sur l'évaluation des préjudices : 13. Par leur rapport, les experts missionnés par la CCI ont fixé la date de consolidation de l'état de santé de M. B... au 22 septembre 2015, date de réalisation de leur expertise. Il résulte cependant de l'instruction que postérieurement à celle-ci, l'état de santé de la victime qui laissait suspecter une récidive infectieuse, a nécessité une nouvelle hospitalisation du 26 au 29 octobre 2015. Dans son rapport, le Dr C... a, quant à lui, et pour prendre en compte cette évolution, fixé la date de consolidation au 28 septembre 2016, date à laquelle les soins actifs prodigués à l'encontre de l'infection ont été définitivement stoppés. Cette dernière date, qui correspond au moment où les lésions se sont fixées et ont pris un caractère permanent, et qui n'est pas contestée, doit dès lors être retenue. En ce qui concerne les préjudices patrimoniaux temporaires : S'agissant des frais divers : 14. M. B... demande la condamnation du CHRU de Lille à l'indemniser des honoraires de son médecin-conseil, le Dr D..., correspondant à la réalisation d'une expertise le 22 juillet 2015 afin de déterminer le caractère nosocomial ou non de l'infection subie par le requérant ainsi que l'imputabilité de celle-ci sur ses préjudices, ainsi qu'à la réalisation d'une prestation d'assistance en date du 11 octobre 2015. Cependant, si le CHRU de Lille fait valoir que le requérant est couvert par une assurance au titre d'un contrat de protection juridique, ce dernier justifie par une attestation du 3 avril 2023 de son assureur que celui-ci n'est pas intervenu au titre du contrat de protection juridique BPCE Assurances IARD dont M. B... était titulaire. Il n'y a pas lieu d'appliquer à ce chef de préjudice le taux de perte de chance de 80 %, dès lors que ces frais résultent entièrement du dommage subi par M. B.... Par suite, le requérant est fondé à solliciter le remboursement des honoraires du médecin-conseil, qui n'ont pas été pris en charge par son assureur. Le CHRU de Lille est condamné à verser la somme de 1320 euros à M. B... à ce titre. S'agissant de la perte de gains professionnels actuels : 15. Premièrement, eu égard à la finalité de réparation d'une incapacité permanente de travail qui lui est assignée par ces dispositions législatives et à son mode de calcul, en fonction du salaire, fixé par l'article R. 341-4 du code de la sécurité sociale, la pension d'invalidité doit être regardée comme ayant pour objet exclusif de réparer, sur une base forfaitaire, les préjudices subis par la victime dans sa vie professionnelle en conséquence de l'accident, c'est-à-dire ses pertes de revenus professionnels et l'incidence professionnelle de l'incapacité. Deuxièmement, eu égard à la finalité de réparation d'une incapacité permanente de travail qui lui est assignée par les dispositions des articles L. 821-1 et L. 821-1-1 du code de la sécurité sociale, l'allocation aux adultes handicapés et le complément de ressources doivent également être regardés comme ayant pour objet exclusif de réparer, sur une base forfaitaire, les préjudices subis par la victime dans sa vie professionnelle en conséquence de l'accident, c'est-à-dire ses pertes de revenus professionnels et l'incidence professionnelle de l'incapacité, et par ailleurs, aucune disposition ne permet à l'organisme qui a versé ces prestations d'en réclamer au bénéficiaire le remboursement si celui-ci revient à meilleure fortune. Troisièmement, eu égard à sa finalité de réparation d'une incapacité permanente de travail, qui lui est assignée par l'article L. 431-1 du code de la sécurité sociale, et à son mode de calcul, appliquant au salaire de référence de la victime le taux d'incapacité permanente défini par l'article L. 434-2, la rente d'accident du travail doit être regardée comme ayant pour objet exclusif de réparer, sur une base forfaitaire, les préjudices subis par la victime dans sa vie professionnelle en conséquence de l'accident, c'est-à-dire ses pertes de gains professionnels et l'incidence professionnelle de l'incapacité. 16. Il convient, en conséquence, de déterminer si l'incapacité permanente conservée par M. B... en raison de la faute commise par le CHRU de Lille a entraîné pour l'intéressé des pertes de revenus professionnels et une incidence professionnelle et, dans l'affirmative, d'évaluer ces postes de préjudice sans tenir compte, à ce stade, du fait qu'ils ont donné lieu au versement de prestations de sécurité sociale. Pour déterminer ensuite dans quelle mesure ces préjudices ont été réparés par ces prestations, il y a lieu de regarder ces prestations comme réparant prioritairement les pertes de revenus professionnels et, par suite, comme ne réparant tout ou partie de l'incidence professionnelle que si la victime ne subissait pas de pertes de revenus ou si le montant de ces pertes était inférieur à celui perçu au titre des prestations. 17. Il résulte de l'instruction que M. B..., qui exerçait jusqu'à son accident une activité professionnelle salariée de couvreur-zingueur et qui a produit ses avis d'imposition sur le revenu au titre des années 2009 à 2014, et ses bulletins de salaire de 2012 à 2015, percevait en dernier lieu en 2012 un revenu annuel d'un montant de 23 021 euros. Si M. B... soutient que l'application de la convention collective pour le niveau IV coefficient 270, aurait abouti pour l'année 2015 à un montant brut annuel de 26 733,84 euros soit 21 202,61 euros nets annuels compte tenu de charges de 20,69 % à soustraire selon ses allégations, sa demande tendant à ce que soit calculé un montant revalorisé pour les années postérieures à l'accident, qui présente un caractère hypothétique, doit en tout état de cause être écartée. 18. Après une convalescence de près d'un an et demi et malgré une tentative de reclassement, M. B... a été licencié pour inaptitude le 10 septembre 2015. Il résulte des rapports d'expertise mentionnés au point 8 que la fracture d'une vertèbre thoracique, lorsqu'elle est correctement prise en charge, se consolide à l'issue d'une convalescence de trois mois. Ainsi, et dès lors que la victime a chuté le 16 janvier 2013, celle-ci aurait donc dû reprendre ses fonctions le mardi 16 avril 2013. Il s'ensuit que la perte de gains professionnels actuels était imputable à la faute commise par le CHRU de Lille à compter de cette date, soit donc, jusqu'à la date de consolidation du 28 septembre 2016, sur une période de 1 262 jours. Ainsi, sur la période en cause, M. B... aurait dû percevoir une somme totale de 79 595,90 euros. Doivent cependant être soustraites les sommes de 22,33 euros, de 78,13 euros et de 13 164,46 euros correspondant respectivement aux salaires nets perçus par M. B... au cours des mois de juillet, août et septembre 2015 ainsi que cela ressort de ses bulletins de paie, dont il convient toutefois de déduire 9 153,60 euros perçus au titre de la prime de licenciement, soit une somme à soustraire de 4 111,32 euros (22,33 + 79,13 + 13 164,46 - 9 153,60). Doit également être soustraite la somme perçue au titre de l'allocation de retour à l'emploi, qui a la même nature qu'un salaire, soit la somme de 13 440,36 euros. Il résulte enfin de l'avis d'imposition de 2015 au titre des revenus de 2014 de M. B... que le ménage de celui-ci a bénéficié d'une prime pour l'emploi d'un montant de 595 euros, prime dont il n'a pas bénéficié concernant ses revenus pour 2012. Il résulte de ce qui précède que le préjudice de perte de gains professionnels actuels imputable au centre hospitalier, avant prise en compte de sa réparation par des prestations de sécurité sociale, et compte tenu du taux de 80 % de perte de chance, doit en conséquence être évalué à hauteur de 49 159,38 euros ((79595,90 - 4 111,32 - 13 440,36 - 595) x 80 %). 19. Il résulte toutefois de l'instruction, et il n'est pas contesté en appel, que M. B... a bénéficié entre le 16 avril 2013 et le 12 juillet 2015 d'indemnités journalières versées par l'assurance maladie à hauteur, après déduction de la contribution sociale généralisée et de la contribution au remboursement de la dette sociale, d'une somme globale de 42 592,09 euros. Il est par ailleurs constant que M. B... a perçu de la part de la mutuelle Pro-BTP entre le 16 avril 2013 et le 12 juillet 2015 une somme globale de 4 655,96 euros au titre d'indemnités journalières complémentaires. Également, le requérant a bénéficié d'une rente d'accident du travail d'un montant de 590,89 euros du 13 juillet 2015 au 15 septembre suivant, puis d'un montant trimestriel de 844,13 euros jusqu'au 15 juin 2016, d'un montant après revalorisation de 913,33 euros pour le trimestre du 16 juin au 15 septembre 2016 et, enfin, d'un montant de 183,48 euros pour la période de treize jours entre le 16 et le 28 septembre 2016 sur la base d'un montant trimestriel revalorisé de 1 284,36 euros. M. B... a donc perçu, jusqu'à la date de consolidation, une somme globale de 4 220,09 euros au titre de sa rente d'accident du travail. Aussi, il résulte de l'instruction que le requérant a perçu à compter du 1er juillet 2016 une somme mensuelle de 380,34 euros au titre de l'allocation aux adultes handicapés, soit jusqu'à la date de consolidation, pour une période de deux mois et vingt-huit jours, une somme globale de 1 115,66 euros. Ainsi, entre le 16 avril 2013 et le 28 septembre 2016, le requérant a perçu une somme globale de 52 583,80 euros de nature à indemniser totalement sa perte de gains professionnels actuels. Il y a lieu en conséquence de rejeter la demande d'indemnisation par le requérant de ce poste de préjudice. S'agissant de l'assistance par tierce personne avant la consolidation : 20. M. B... sollicite le versement d'une somme totale de 18 127,40 euros au titre des frais d'assistance par tierce personne avant consolidation de son état de santé. Il résulte de l'instruction que l'état de santé de M. B... a nécessité l'assistance d'une tierce personne à hauteur de deux heures par jour, du 7 septembre 2013 au 28 février 2014, soit 175 jours, ainsi qu'une assistance d'une heure par jour, cinq jours sur sept, du 1er mars 2014 au 22 septembre 2015, soit 571 jours, et enfin d'une demi-heure par jour du 23 septembre 2015 au 28 septembre 2016, date de la consolidation de son état de santé, soit 370 jours. 21. Par une décision du 24 janvier 2017, la commission départementale de l'autonomie des personnes handicapées du Nord a accordé à M. B... la prestation de compensation du handicap à hauteur de 170,20 euros par mois, à compter du 1er juin 2016, jusqu'au 31 mai 2021. Une telle prestation, dont il résulte de cette décision qu'elle a été accordée afin de rémunérer l'aide humaine dont le requérant a besoin et qui n'est pas, ainsi que cela a été exposé plus haut, susceptible d'être recouvrée lorsque son bénéficiaire est revenu à meilleure fortune, doit être imputée sur le préjudice subi du fait de l'assistance d'une tierce personne. Pour la période entre le 1er juin 2016 et le 28 septembre 2016, une somme de 680,80 euros (170,20 x 4) a été versée à ce titre au requérant. 22. L'état de santé de M. B... a ainsi nécessité 350 heures d'assistance par tierce personne, du 7 septembre 2013 au 28 février 2014, 407,86 heures du 1er mars 2014 au 22 septembre 2015 et, enfin, 185 heures du 23 septembre 2015 au 28 septembre 2016, date de la consolidation de son état de santé. 23. Il en résulte que le volume horaire d'assistance par tierce personne temporaire requis par l'état de santé de M. B... doit être évalué à 942,86 heures, sur la période considérée. Ainsi, sur une base de calcul retenant une année de 412 jours aux fins de prise en compte des dimanches et jours fériés, portant le nombre d'heures indemnisables à 1 064,27 et après application d'un taux d'indemnisation horaire de 14 euros au regard des années concernées, M. B... est fondé à demander l'allocation de la somme de 14 218,98 euros (14 899,78 - 680,80) au titre des frais d'assistance par tierce personne jusqu'à la consolidation, déduction faite de la prestation de compensation du handicap. 24. Il résulte de ce qui a été exposé aux points 14 à 23 du présent arrêt que les préjudices patrimoniaux temporaires dont M. B... est fondé à solliciter l'indemnisation doivent être évalués à la somme totale de 15 538,98 euros. En ce qui concerne les préjudices patrimoniaux permanents : S'agissant de l'assistance par tierce personne après la consolidation : 25. Le requérant sollicite le versement d'une somme totale de 97 119,03 euros au titre des frais futurs d'assistance par tierce personne, correspondant à un besoin d'une demi-heure par jour à titre viager, en se fondant sur un taux horaire de 20 euros. Il résulte en outre du rapport de l'expert missionné par le juge des référés du tribunal que les besoins après consolidation de M. B... en assistance non personnalisée par une tierce personne doivent être évalués à hauteur d'une demi-heure chaque jour, soit un volume de 1 310 heures pour la période allant du 28 septembre 2016, date de consolidation de l'état de santé de M. B..., au 1er décembre 2023, date de mise à disposition au greffe du présent arrêt. Par suite, après application d'un taux d'indemnisation horaire de 15 euros au regard des années concernées, sur une base de calcul retenant une année de 412 jours aux fins de prise en compte des dimanches et jours fériés, le requérant est fondé à demander l'allocation d'une somme de 22 180,27 euros au titre des frais d'assistance par tierce personne postérieurs à la consolidation. 26. En outre, sur la base d'un volume horaire annuel de besoin en assistance par tierce personne s'élevant à 182,5 heures, sur une base de calcul retenant une année de 412 jours aux fins de prise en compte des dimanches et jours fériés, correspondant à un taux d'indemnisation horaire de 16 euros à la date du 1er décembre 2023, soit un coût annuel de 3 296 euros et après application du taux de l'euro viager fixé à 24,377 par la Gazette du Palais pour un homme âgé de près de 58 ans au 28 novembre 2023, M. B... est fondé à solliciter le versement d'une somme de 80 346,59 euros au titre des besoins en assistance par tierce personne futurs. 27. Il résulte de ce qui précède que l'indemnisation des frais d'assistance par tierce personne postérieurs à la consolidation de l'état de santé de M. B... doit être fixée à une somme totale de 102 526,86 euros. Il résulte cependant de l'instruction que par une décision du 24 janvier 2017, la commission départementale de l'autonomie des personnes handicapées du Nord a accordé à M. B... la prestation de compensation du handicap à hauteur de 170,20 € par mois à compter du 1er juin 2016 jusqu'au 31 mai 2021. Une telle prestation, dont il résulte de cette décision qu'elle a été accordée afin de rémunérer l'aide humaine dont le requérant a besoin et qui n'est pas susceptible d'être recouvrée lorsque son bénéficiaire est revenu à meilleure fortune, doit être imputée sur le préjudice subi du fait de l'assistance d'une tierce personne. 28. Pour la période de 86 mois entre le 28 septembre 2016 et la date de mise à disposition de l'arrêt, une somme de 14 637,20 euros a été versée à ce titre au requérant. Par ailleurs, si les droits de M. B... à la prestation de compensation du handicap n'ont été initialement ouverts que jusqu'au 31 mai 2021, il ne résulte pas de l'instruction que cette prestation lui ait été refusée depuis lors, ni que son état de santé aujourd'hui consolidé évoluerait de telle sorte que le renouvellement de cette prestation lui soit refusé pour l'avenir. En outre, et dès lors que le requérant a bénéficié de cette prestation avant l'âge limite d'attribution de soixante ans prévu par les dispositions précitées de l'article D. 245-3 du code de l'action sociale et des familles, il résulte de ces mêmes dispositions qu'il pourra bénéficier du renouvellement de cette prestation postérieurement à cet âge. Il y a ainsi lieu de considérer que la prestation de compensation du handicap sera versée à M. B... à titre viager. Ainsi, à compter de la date de l'arrêt, dès lors que le requérant bénéficie d'un montant annuel de 2 042,40 euros et en retenant le taux de l'euro de rente viagère mentionné au point précédent, le montant total de la prestation accordée à titre viager doit être évalué à hauteur de 49 787,58 euros. 29. Il résulte de ce qui précède que le préjudice restant à la charge de M. B... s'élève à une somme de 38 102,08 euros. Après application du taux de perte de chance retenu plus haut, le requérant est fondé à obtenir le versement d'une somme de 30 481,67 euros. S'agissant des frais de logement adapté : 30. Il est constant que le domicile de M. B... comprend un étage où se trouve sa chambre et que celui-ci dort, depuis le jour de l'accident, dans un fauteuil de son salon. Le requérant, qui soutient être dans l'incapacité de monter l'escalier de son domicile, demande donc la condamnation du CHRU de Lille à lui rembourser les travaux de transformation de son salon en chambre et l'aménagement de sa salle de bain située au rez-de-chaussée dès lors que sa douche dispose d'un rebord de 20 cm à franchir afin d'y pénétrer. L'expert missionné par le juge des référés a reconnu la nécessité d'un aménagement du domicile de M. B... et a donc, implicitement mais nécessairement, reconnu l'existence pour celui-ci d'une difficulté à gravir des marches. Par suite, il y a lieu de procéder à l'indemnisation des travaux nécessaires à l'aménagement du domicile de M. B..., et ce dès lors qu'il est notamment constant que la cage d'escalier de son domicile est trop étroite pour qu'y soit installé un monte-escalier. 31. Concernant dans un premier temps les travaux relatifs à l'aménagement du salon, ceux-ci ont pour objet la dépose de la cheminée s'y trouvant, la création d'une cloison, la peinture du plafond, la pose d'une toile de verre sur l'ensemble des murs de la pièce et l'installation d'une porte coulissante. Il résulte du rapport des experts missionnés par la CCI que l'agencement actuel du salon de M. B... n'est pas compatible avec l'installation d'un lit médicalisé dont la nécessité est reconnue et qui relève des dépenses de santé futures. Le requérant est donc fondé à demander le remboursement de la dépose de la cheminée destinée à agrandir l'espace disponible. Si le requérant soutient qu'il ne peut recevoir ses amis dans une pièce où son lit serait installé, il ne résulte cependant pas de l'instruction, en l'absence de tout élément relatif à l'agencement des lieux, que la transformation du salon en chambre nécessiterait la création d'une cloison afin de l'isoler du reste du séjour, dès lors qu'il est constant que le requérant, dont les enfants sont désormais majeurs, vit seul avec son épouse et qu'il n'est pas prouvé que ce cloisonnement ne serait pas de nature à faire perdre la place nécessaire à l'installation du lit médicalisé. Il ne résulte en outre pas de l'instruction que la dépose de la cheminée rendrait nécessaire la réalisation de la peinture de l'ensemble du plafond et la pose d'une toile de verre sur l'ensemble des murs, le requérant n'apportant pas de nouveaux éléments à cet égard en appel. Il y a ainsi lieu d'indemniser, sur la base du devis produit par le requérant, uniquement la dépose de la cheminée pour une somme de 367,07 euros hors taxe (HT) et le nettoyage et l'évacuation des gravats pour une somme de 215 euros HT. Après application d'une taxe sur la valeur ajoutée (TVA) de 10 %, le montant des travaux indemnisables du salon s'élève à une somme de 640,28 euros. 32. Concernant dans un second temps les travaux relatifs à l'aménagement de la salle de bain, si les experts missionnés par la CCI ont mentionné l'existence d'une douche à l'italienne dans le domicile de M. B..., il est cependant constant que sa douche possède un rebord de 20 cm. Eu égard à ce qui a été exposé plus haut, le requérant est fondé à demander l'indemnisation des travaux relatifs à l'installation d'une douche accessible. Il résulte cependant du rapport de l'expert missionné par le juge des référés que les besoins de M. B... en aménagement de sa salle de bain se bornent au seul besoin de sa toilette et non aux fonctions exonératoires. Ainsi, faute pour le requérant de prouver la nécessité pour la pose de la nouvelle douche de la destruction des toilettes, du lavabo, du sol et du revêtement mural de la salle de bain dans son ensemble ainsi que du renforcement d'une cloison, les travaux y afférents ainsi que la pose de nouvelles toilettes, d'un nouveau lavabo et d'un revêtement pour la totalité du sol et des cloisons ne doivent pas être indemnisés. Il y a donc lieu d'indemniser, sur la base du devis produit par le requérant, la destruction de la douche dont le montant s'élève seulement, sur une somme globale de 640 euros HT, à 160 euros HT, les travaux de plomberie dont le montant s'élève pour la seule douche à 234,29 euros HT et 198,69 euros HT concernant respectivement la main d'œuvre et le matériel, et la nouvelle douche pour un montant global, en prenant en compte la douche elle-même, le mitigeur et la pompe, de 3 486,42 euros HT. M. B... soutient que son état de santé nécessite la présence dans cette douche d'un siège, mais ne le justifie pas davantage en appel qu'en première instance. Ainsi, après application d'un taux de TVA de 10 % concernant la destruction de la douche et l'aménagement de la plomberie et un taux de TVA de 5,5 % concernant l'acquisition des divers éléments de la douche, les travaux d'aménagement de la salle de bain en lien avec la faute commise par le CHRU de Lille doivent être évalués à hauteur de 4 330,45 euros. 33. Il résulte de ce qui précède que M. B... est seulement fondé à demander l'indemnisation d'une somme de 4 970,73 euros. Après application du taux de perte de chance retenu plus haut, il y a lieu d'accorder à M. B... une somme de 3 976,58 euros. S'agissant des frais de véhicule adapté : 34. Si M. B... soutient qu'il lui serait nécessaire non d'adapter mais de remplacer son véhicule, il n'établit pas davantage en appel qu'en première instance que son état de santé rendrait indispensable une boîte de vitesse automatique. La circonstance que sa " marche soit ralentie, précautionneuse et à petits pas en raison alléguée du ressenti douloureux " ou que " l'usage d'une voiture avec boîte automatique serait judicieux " ne suffit pas en soi à établir le caractère nécessaire de l'acquisition d'un nouveau véhicule doté d'une boîte de vitesse automatique. M. B... n'apporte pas non plus d'éléments relatifs à l'impossibilité de doter son véhicule actuel d'une caméra de recul en raison de sa douleur dorsale. Par suite, il y a lieu de confirmer le jugement et de n'indemniser que les équipements nécessaires à la conduite de M. B..., soit, eu égard aux deux devis produits par M. B..., une somme respective de 257,58 euros, 182,69 euros et de 505 euros. Le montant du préjudice du requérant s'élève par suite à 945,27 euros. Après application du taux de perte de chance, il y a lieu d'accorder à M. B... le versement de la somme de 756,22 euros. S'agissant de la perte des gains professionnels futurs : Quant à la période entre la consolidation et le départ en retraite : 35. Il est constant que M. B... n'a pas subi de perte de gains professionnels, pour la période de la consolidation jusqu'à la date du jugement, le 28 avril 2021. M. B... ne présente pas de demande en appel au titre de cette période. 36. Il résulte de l'instruction, et en particulier de la simulation de droits à retraite produite par le requérant que celui-ci avait cotisé au 31 décembre 2015 durant 133 trimestres de travail. Dès lors qu'une retraite à taux plein lui aurait été accordée après cotisation durant 172 trimestres, aux termes de cette simulation il y a lieu de considérer que M. B... aurait suffisamment cotisé à compter du 1er octobre 2025 à l'âge de 59 ans. Si l'estimation faisait valoir que M. B... ne pourra bénéficier d'une retraite au taux plein qu'à compter du 1er janvier 2033, ce n'était que dans l'hypothèse où M. B... cesserait totalement d'acquérir des droits à la retraite. Il résulte cependant des dispositions de l'article L. 351-3 du code de la sécurité sociale que les périodes durant lesquelles un salarié bénéficie de prestations du fait d'un accident du travail sont prises en considération dans l'ouverture du droit à pension de telle sorte que M. B..., qui a bénéficié depuis son accident d'abord d'indemnités journalières puis d'une rente d'accident du travail, doit être regardé comme n'ayant jamais interrompu sa cotisation. Il y a donc lieu de retenir comme date de départ à la retraite de référence la date du 27 juin 2029 à laquelle M. B..., né en 1965, aura atteint l'âge légal de départ à la retraite de 63 ans et demi. 37. Pour la période comprise entre le lendemain du jugement et le 27 juin 2029, soit une période arrondie à 8,16 ans, M. B..., sur la base de ses salaires nets perçus en 2012, aurait dû percevoir sans la faute du CHRU de Lille la somme de 187 851,36 euros. À défaut d'autres revenus, la perte de gains professionnels futurs, avant réparation par des prestations de sécurité sociale, s'élève donc à ce montant de 187 851,36 euros. 38. La rente d'accident du travail, sur la base d'un montant annuel de 10 408,84 euros, conduira, sur la période en cause, à la perception d'une somme de 84 936,13 euros. En ce qui concerne la pension d'invalidité, à partir d'un montant mensuel de 936,56 euros, la somme perçue sera de 91 707,96 euros. Si la décision de notification de cette allocation mentionne l'attribution de l'allocation aux adultes handicapés uniquement jusqu'au 30 juin 2021, il résulte cependant de l'instruction, ainsi qu'il a été dit, que le versement de cette prestation s'est arrêté avec le service de la pension d'invalidité. Au total, M. B... bénéficiera de prestations de sécurité sociale réparant sa perte de gains professionnels à hauteur de 176 644,09 euros (84 936,13 + 91 707,96). Par suite, la perte de gains professionnels subie par M. B... du 28 avril 2021 au 27 juin 2029 doit être fixée à 11 207,27 euros. Quant à la période postérieure au départ en retraite : 39. M. B... n'apporte, pas plus en appel qu'en première instance, d'éléments de nature à établir que les années postérieures à 2013, sans l'accident médical, auraient été comprises parmi les vingt-cinq années les plus avantageuses au titre desquelles le montant de sa pension de retraite sera établi ni, d'autre part, d'éléments précis, qui ne ressortent pas de la simulation de retraite produite, sur l'existence d'une diminution de ses droits à la retraite, y compris complémentaire. Ainsi, l'existence d'une perte de gains professionnels à la suite du départ en retraite n'est pas établie. Il y a lieu, par suite, de confirmer le rejet par les premiers juges de la demande de M. B... au titre de cette période. 40. Il résulte de ce qui précède que pour l'ensemble de la période postérieure à la consolidation, M. B... est fondé à demander l'indemnisation de la perte de gains professionnels qu'il subit pour une somme de 11 207,27 euros, soit 8 963,39 euros après application du taux de perte de chance de 80 %. S'agissant de l'incidence professionnelle : 41. Il résulte de l'instruction et de ce qui a été exposé concernant la perte de gains professionnels futurs que le requérant n'établit pas que le montant de sa pension de retraite sera diminué du fait de son arrêt de travail et de son licenciement, ni qu'il aurait eu des chances sérieuses d'obtenir la promotion qu'il escomptait. En revanche, il est constant que M. B..., couvreur-zingueur depuis l'âge de 16 ans et qui n'est plus en mesure de marcher sur une longue distance, ne peut, en raison de son état de santé, plus occuper un poste en hauteur, un poste lui imposant le port de charges, un poste avec une position assise prolongée et un poste avec une position debout prolongée. Eu égard à ces contre-indications en opposition avec la profession du requérant et avec une reconversion possible dans des fonctions notamment administratives, il y a lieu de confirmer l'évaluation des premiers juges qui ont fait une juste appréciation du préjudice d'incidence professionnelle en l'évaluant à 15 000 euros, soit 12 000 euros après application du taux de perte de chance de 80 %. 42. Il résulte des points 25 à 41 que les préjudices patrimoniaux permanents dont M. B... est fondé à solliciter l'indemnisation doivent être évalués à la somme de 56 177,86 euros. 43. Il résulte des points 14 à 42 que l'ensemble des préjudices patrimoniaux dont M. B... est fondé à solliciter l'indemnisation s'élève à la somme globale de 71 716,84 euros. En ce qui concerne les préjudices extrapatrimoniaux temporaires : S'agissant du déficit fonctionnel temporaire : 44. Les experts, par leurs rapports, ont estimé qu'eu égard à la faute du CHRU de Lille, M. B... a subi en premier lieu un déficit fonctionnel temporaire total pour les périodes écoulées entre le 19 août et le 7 septembre 2013, entre le 19 et le 20 février 2014 et entre le 27 et le 29 octobre 2015 correspondant respectivement à l'hospitalisation initiale pour la prise en charge de l'infection issue de la cimentoplastie, à l'hospitalisation pour la prise en charge de la récidive de cette infection et à l'hospitalisation en raison d'une suspicion de nouvelle récidive. En se basant sur un taux journalier d'indemnisation de 15 euros, nonobstant le montant de 33 euros demandé par M. B..., il sera fait une juste appréciation de ce déficit subi par la victime durant ces périodes de vingt, deux et trois jours en l'évaluant à une somme de 375 euros ((20 + 2 + 3) x 15). 45. Ensuite, les experts ont délimité trois périodes constantes de déficit fonctionnel temporaire de 25 % (classe 2) s'étendant du 8 septembre 2013 au 18 février 2014, du 21 février 2014 au 26 octobre 2015 et du 30 octobre 2015 au 28 septembre 2016. Eu égard au taux d'indemnisation retenu au point précédent, il sera fait une juste appréciation de ce déficit fonctionnel temporaire d'une durée de 1 112 jours en l'évaluant à 4 170 euros (1112 x 15 x 25%). 46. Il résulte de ce qui précède que le déficit fonctionnel temporaire dont a été victime M. B... doit être évalué à hauteur d'une somme globale de 4 545 euros. Une fois appliqué le taux de perte de chance de 80 % retenu plus haut, il y a lieu de l'indemniser en confirmant la somme de 3 636 euros déterminée par les premiers juges. S'agissant des souffrances endurées : 47. Il résulte de l'instruction que les souffrances endurées par M. B... ont été évaluées en dernier lieu par l'expert à 4 sur une échelle de 1 à 7. Au regard de ces souffrances, il y a lieu de confirmer l'évaluation de ce préjudice par les premiers juges à la somme de 7 200 euros, soit 5 760 euros après application du taux de perte de chance de 80 %. S'agissant du préjudice esthétique temporaire : 48. Il résulte de l'instruction que M. B... a subi un préjudice esthétique temporaire tenant à un flexum de la tête et à une marche raide et à petits pas. Il y a lieu de confirmer l'évaluation de ce préjudice par les premiers juges à la somme de 500 euros, soit 400 euros après application du taux de perte de chance de 80 %. 49. Par suite, les préjudices extrapatrimoniaux temporaires subis par M. B... s'élèvent à une somme de 9 796 euros. En ce qui concerne les préjudices extrapatrimoniaux permanents : S'agissant du déficit fonctionnel permanent : 50. Il résulte de l'instruction que M. B... souffre d'un déficit fonctionnel permanent, caractérisé par une persistance des douleurs dorsales avec impossibilité de maintenir sur une longue période la station assise et la station debout, une réduction en conséquence de son périmètre de marche et une dépendance pour la toilette et l'habillage, déficit dont le taux a été évalué par les deux rapports d'expertise à 25 %. Par suite, en tenant compte de l'âge du requérant à la date de consolidation de son état de santé, soit 50 ans, il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en l'évaluant à la somme de 38 000 euros, soit 30 400 euros après application du taux de perte de chance de 80 %. S'agissant du préjudice d'agrément : 51. M. B... persiste à demander l'indemnisation d'un préjudice d'agrément sans apporter aucun élément nouveau en appel pour justifier de la réalité de ce préjudice S'il soutient qu'il n'a pas pu reprendre des activités de loisirs tels que la marche, la pêche, le jardinage ou les sorties avec ses petits-enfants, ces troubles sont déjà indemnisés au titre du déficit fonctionnel permanent et ne révèlent pas l'existence d'un préjudice d'agrément distinct. Il y a lieu de confirmer le rejet par les premiers juges de sa demande en réparation de ce chef de préjudice. S'agissant du préjudice esthétique permanent : 52. Les experts ont évalué à 1 sur une échelle de 1 à 7 le préjudice esthétique subi de façon permanente par M. B.... Il sera fait une juste appréciation du préjudice esthétique ainsi subi en l'évaluant à la somme de 1 000 euros, soit 800 euros après application du taux de perte de chance de 80 %. S'agissant du préjudice sexuel : 53. Le requérant soutient subir, en raison de ses douleurs dorsales et de leur retentissement psychologique, un préjudice sexuel constitué par une absence totale de relations sexuelles. Toutefois, l'existence même d'un préjudice sexuel, qui ressort uniquement des déclarations faites par la victime aux experts désignés par la CCI et qui n'a, par ailleurs, pas été repris par l'expert désigné par le juge des référés, n'est pas davantage établie en appel qu'en première instance, de telle sorte que M. B... n'est pas fondé à en solliciter l'indemnisation. 54. Il résulte des points 50 à 53 que les préjudices extrapatrimoniaux permanents dont M. B... est fondé à solliciter l'indemnisation doivent être évalués à la somme globale de 31 200 euros. 55. Il résulte des points 44 à 54 que l'ensemble des préjudices extrapatrimoniaux dont M. B... est fondé à solliciter l'indemnisation s'élèvent à la somme totale de 40 996 euros. 56. Il résulte de tout ce qui précède que l'ensemble des préjudices dont M. B... est fondé à solliciter l'indemnisation s'élève à la somme totale de 112 712,84 euros. Il résulte cependant de l'instruction que par une ordonnance du 18 décembre 2017, le juge des référés du tribunal a condamné le CHRU de Lille à verser à M. B... une provision d'un montant de 80 124 euros en réparation de ses préjudices. Dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction que cette ordonnance n'aurait pas été exécutée, il y a lieu de condamner le CHRU de Lille à payer à M. B... une somme ramenée à 32 588,84 euros compte tenu de cette provision. Sur les intérêts et leur capitalisation : 57. Aux termes de l'article 1231-6 du code civil : " Les dommages et intérêts dus à raison du retard dans le paiement d'une obligation de somme d'argent consistent dans l'intérêt au taux légal, à compter de la mise en demeure. Ces dommages et intérêts sont dus sans que le créancier soit tenu de justifier d'aucune perte (...) ". Aux termes de l'article 1343-2 du même code : " Les intérêts échus, dus au moins pour une année entière, produisent intérêt si le contrat l'a prévu ou si une décision de justice le précise ". 58. Il résulte de ces dispositions que lorsqu'ils sont demandés, et quelle que soit la date de la demande, les intérêts des indemnités allouées sont dus à compter du jour où la demande de réclamation de la somme principale est parvenue à la partie débitrice ou, à défaut, à compter de la date d'enregistrement au greffe du tribunal administratif des conclusions tendant au versement de cette indemnité. 59. M. B... a droit, comme il le demande, à ce que la somme de 32 379,02 euros mise à la charge du CHRU de Lille soit assortie des intérêts au taux légal à compter du 24 octobre 2017, date d'enregistrement au greffe du tribunal administratif de sa demande introductive d'instance. Ces intérêts seront capitalisés au 24 octobre 2018 et à chaque échéance annuelle suivante. Sur les frais liés au litige : En ce qui concerne les dépens : 60. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de confirmer la mise à la charge définitive du CHRU de Lille des frais d'expertise, liquidés et taxés à la somme de 1 010 euros par l'ordonnance du 28 novembre 2019 du juge des référés du tribunal administratif de Lille, en application de l'article R. 761-1 du code de justice administrative. En ce qui concerne les frais exposés et non compris dans les dépens : 61. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce et en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge du CHRU de Lille la somme de 2 000 euros à verser à M. B... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. DÉCIDE: Article 1er : L'ONIAM est mis hors de cause dans la présente instance. Article 2 : Le centre hospitalier régional universitaire de Lille est condamné à verser à M. B... une somme de 32 588,84 euros. Cette somme sera assortie des intérêts au taux légal à compter du 24 octobre 2017 et de la capitalisation de ces intérêts au 24 octobre 2018 et à chaque échéance annuelle à compter de cette date. Article 3 : Le jugement n° 1709227 du 28 avril 2021 du tribunal administratif de Lille est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt. Article 4 : Les frais et honoraires de l'expertise, taxés et liquidés à la somme de 1 010 euros par l'ordonnance du 28 novembre 2019 du juge des référés du tribunal administratif de Lille, sont mis à la charge définitive du centre hospitalier régional universitaire de Lille. Article 5 : Le centre hospitalier régional universitaire de Lille versera une somme de 2 000 euros à M. B... en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 6 : Le surplus des conclusions de M. B... est rejeté. Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., au centre hospitalier régional universitaire de Lille, à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales, à la caisse primaire d'assurance maladie de Roubaix-Tourcoing, à la mutuelle Korelio (Pro-BTP) et Me Anne-Sophie Garcia Mora. Délibéré après l'audience publique du 14 novembre 2023, à laquelle siégeaient : M. Thierry Sorin, président, M. Marc Baronnet, président-assesseur, M. Guillaume Vandenberghe, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er décembre 2023. Le président-rapporteur, Signé : M. BaronnetLe président de chambre, Signé : T. SorinLa greffière, Signé : A-S Villette La République mande et ordonne au ministre de la santé et de la prévention en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme La greffière, Anne-Sophie Villette 2 N°21DA01397
Cours administrative d'appel
Douai
CAA de VERSAILLES, 4ème chambre, 05/12/2023, 21VE01388, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise, dans le dernier état de ses écritures, d'une part, de désigner, par un jugement avant dire droit, un expert ayant pour mission d'actualiser l'expertise réalisée par le docteur D... le 21 août 2017 afin de tenir compte de l'évolution de ses préjudices, d'autre part, de condamner l'État à lui payer la somme de 31 950, 40 euros, majorée des intérêts moratoires au taux légal à compter du 12 février 2018, en réparation des préjudices subis du fait de l'accident de service intervenu le 7 novembre 2015, et enfin, de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n° 1805604 du 18 mars 2021, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a condamné l'Etat à payer à M. C..., d'une part, la somme de 11 500 euros avec intérêts au taux légal à compter du 12 février 2018 en réparation de ses préjudices, d'autre part, la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, a mis les frais et honoraires de l'expertise, liquidés et taxés à la somme de 1 754,40 euros TTC par ordonnance du 13 décembre 2017, à la charge définitive de l'État, et a rejeté le surplus des conclusions de la demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 18 mai 2021, M. A... C..., représenté par la S.E.L.A.F.A. Cabinet Cassel, avocat, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il a limité à la somme de 11 500 euros l'indemnité qui lui a été allouée en réparation de ses préjudices, qu'il a refusé de faire droit aux conclusions tendant à la revalorisation de ses préjudices, et en tant que de besoin, à la réalisation d'une expertise judiciaire ; 2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 31 951,40 euros en réparation de ses préjudices, assortie des intérêts au taux légal à compter du 12 février 2018 ; 3°) en tant que de besoin, par un arrêt avant dire droit, de désigner un expert ayant pour mission d'actualiser l'expertise réalisée par le docteur D... le 21 août 2017 afin de tenir compte de l'évolution de ses préjudices ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - la responsabilité sans faute de l'Etat est engagée ; - son état de santé a fait l'objet d'une rechute, reconnue imputable à l'accident initial, ce qui a repoussé la date de consolidation au 2 juin 2019 et lui a causé une aggravation de ses préjudices par rapport à ceux constatés dans le rapport d'expertise du 21 août 2017 ; - cette rechute lui a causé une aggravation des souffrances endurées, de son déficit fonctionnel et l'a affecté sur le plan psychique, nécessitant la mise en place d'un suivi psychologique au sein de la clinique du stress au travail ; - la qualité de travailleur handicapé lui a été reconnue le 6 août 2020, soit postérieurement à l'enregistrement de sa demande de première instance ; - le 24 septembre 2020, le médecin chargé de la prévention a estimé qu'il n'était pas apte à la reprise de son activité et qu'une nouvelle expertise devait être réalisée. Par un mémoire en défense, enregistré le 9 juin 2023, le garde des sceaux, ministre de la justice, conclut au rejet de la requête. Il soutient que : - les réparations, d'une part, des déficits fonctionnels temporaire et permanent, par l'octroi d'une indemnité globale de 7 500 euros, d'autre part, des souffrances endurées, au titre desquelles M. C... s'est vu allouer une somme de 3 000 euros, comme celle du préjudice d'agrément, ont été correctement appréciées ; - le préjudice de carrière allégué n'est aucunement établi ; - une nouvelle expertise n'est pas utile en l'absence d'établissement de toute aggravation des préjudices de M. C... et de remise en cause des conclusions de l'expertise du 21 août 2017. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Bonfils, - et les conclusions de Mme Viseur-Ferré, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. M. A... C..., surveillant pénitentiaire à la maison d'arrêt des Hauts-de-Seine, a déclaré avoir, le 7 novembre 2015, ressenti une vive douleur dans la jambe droite alors qu'il maîtrisait un détenu. Entre le 7 novembre 2015 et le 16 janvier 2017, M. C... a été placé, à plusieurs reprises, en congé de maladie ordinaire imputable au service. Par une ordonnance du juge des référés du 5 mai 2017, le docteur D... a été désigné comme expert. Le 2 octobre 2017, l'expert a rendu son rapport et a fixé la date de consolidation de l'état de santé de M. C... au 1er juin 2017. Par une décision implicite, née le 13 avril 2018, le garde des sceaux, ministre de la justice, a rejeté la réclamation préalable formée par M. C... le 8 février 2018, tendant au versement d'une indemnité d'un montant total de 23 169, 40 euros en réparation des préjudices résultant de cet accident de service. M. C... relève appel du jugement du 18 mars 2021 en tant que le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a limité le montant de l'indemnisation mise à la charge de l'Etat à la somme de 11 500 euros avec intérêts au taux légal à compter du 12 février 2018 et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande. Sur la responsabilité sans faute de l'Etat : 2. D'une part, aux termes de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983, alors en vigueur : " I.-Le fonctionnaire en activité a droit à un congé pour invalidité temporaire imputable au service lorsque son incapacité temporaire de travail est consécutive à un accident reconnu imputable au service, à un accident de trajet ou à une maladie contractée en service définis aux II, III et IV du présent article. Ces définitions ne sont pas applicables au régime de réparation de l'incapacité permanente du fonctionnaire. / (...) II.-Est présumé imputable au service tout accident survenu à un fonctionnaire, quelle qu'en soit la cause, dans le temps et le lieu du service, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le fonctionnaire de ses fonctions ou d'une activité qui en constitue le prolongement normal, en l'absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant l'accident du service. (...) ". 3. D'autre part, les dispositions des articles L. 27 et L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite et de l'article 65 de la loi du 11 janvier 1984, lequel était alors en vigueur, qui instituent, en faveur des fonctionnaires victimes d'accidents de service ou de maladies professionnelles, une rente viagère d'invalidité en cas de mise à la retraite et une allocation temporaire d'invalidité en cas de maintien en activité doivent être regardées comme ayant pour objet de réparer les pertes de revenus et l'incidence professionnelle résultant de l'incapacité physique causée par un accident de service ou une maladie professionnelle. Ces dispositions déterminent forfaitairement la réparation à laquelle les fonctionnaires concernés peuvent prétendre, au titre de ces chefs de préjudice, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions. Elles ne font en revanche obstacle ni à ce que le fonctionnaire qui subit, du fait de l'invalidité ou de la maladie, des préjudices patrimoniaux d'une autre nature ou des préjudices personnels, obtienne de la collectivité qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice, ni à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre cette personne publique, dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette personne. 4. Il est constant en cause d'appel que l'accident dont M. C... a été victime a eu lieu dans le temps et sur le lieu du service et à l'occasion de l'exercice des fonctions et que la hernie discale dont souffre l'intéressé est en relation directe et certaine avec cet accident de service, ainsi que cela est notamment attesté par les conclusions du rapport d'expertise établi par le docteur D... le 21 août 2017. Par suite, M. C... est fondé à demander à son employeur la réparation des préjudices patrimoniaux et personnels résultant des conséquences sur son état de santé de l'accident de service survenu le 7 novembre 2015. Sur l'évaluation des préjudices : 5. La date de consolidation correspond au moment où les lésions se fixent et se stabilisent et acquièrent un caractère permanent, ce qui permet alors d'apprécier un taux d'incapacité permanente partielle (IPP) résultant d'une pathologie ou d'un accident. La consolidation de l'état de santé ne peut, en revanche, être assimilée à la guérison et ne constitue pas davantage une circonstance impliquant nécessairement la fin des soins nécessités par cette pathologie ou cet accident. 6. M. C... soutient que son état de santé a fait l'objet d'une rechute en 2019, sans toutefois préciser la date de celle-ci, et que, contrairement à ce qui est indiqué dans le rapport d'expertise du Dr D... du 21 août 2017, son état de santé n'était pas consolidé au 1er juin 2017 et l'a été seulement le 2 juin 2019. Au soutien de ses allégations, le requérant produit notamment un certificat médical du 19 août 2019 du Dr B..., médecin agréé exerçant au sein de la maison d'arrêt des Hauts-de-Seine, qui indique que M. C... n'était apte à reprendre ses fonctions de surveillant pénitentiaire qu'à compter du 2 juin 2019, et un avis du médecin de prévention du 24 septembre 2020, qui se montre défavorable à la reprise de l'activité de M. C... au 2 juin 2019 et demande une nouvelle expertise. Toutefois, ces documents ne sont pas de nature à remettre en cause la date de consolidation retenue par l'expert judiciaire, l'imagerie par résonance magnétique (IRM) la plus récente, réalisée le 6 janvier 2020, confirmant les conclusions du rapport d'expertise du docteur D.... En effet, s'il est constant que M. C... a continué de souffrir des douleurs liées à la hernie discale résultant de l'accident de service dont il a été victime, et qu'une opération chirurgicale a été envisagée en 2020, sans cependant que l'intéressé n'apporte dans ses écritures de précision quant à la réalisation de cette intervention, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'aggravation de la seule symptomatologie aurait été telle qu'elle conduirait à remettre en cause les souffrances qui ont été chiffrées par l'expert à 2,5 sur 7. Il n'est pas davantage établi que le besoin d'un suivi psychologique, pour traiter un syndrome post-traumatique lié à l'environnement professionnel, ou la reconnaissance du statut de travailleur handicapé, qui ne fait état d'aucun taux d'incapacité, résulterait d'une aggravation de l'état de santé de M. C... imputable à son accident initial. Dans ces conditions, nonobstant la décision de consolidation du 16 juillet 2020 de la cheffe d'établissement du centre pénitentiaire des Hauts-de-Seine, qui fixe la date de consolidation de M. C... au 2 juin 2019 au vu d'une décision médicale évoquant seulement une inaptitude temporaire aux fonctions jusqu'au 1er juin 2019, et sans qu'il soit besoin, en l'état de l'instruction, d'ordonner une nouvelle expertise judiciaire, M. C... n'est pas fondé à se prévaloir d'une date de consolidation postérieure à celle fixée au 1er juin 2017 et, pour ce seul motif, à réclamer une indemnisation complémentaire à celle d'un montant total de 11 500 euros qui lui a été accordée par le tribunal administratif de Cergy-Pontoise. 7. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a mis à la charge de l'Etat la somme de 11 500 euros à verser à M. C... en réparation des préjudices résultant de l'accident de service survenu le 7 novembre 2015. Par suite, les conclusions indemnitaires de M. C..., ainsi que par voie de conséquence celles qu'il a présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doivent être rejetées. DÉCIDE : Article 1er : La requête présentée par M. C... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au garde des sceaux, ministre de la justice. Délibéré après l'audience du 21 novembre 2023, à laquelle siégeaient : M. Brotons, président de chambre, Mme Pham, première conseillère, Mme Bonfils, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 décembre 2023. La rapporteure, M. -G. BONFILS Le président, S. BROTONS La greffière, S. de SOUSA La République mande et ordonne au garde des sceaux, ministre de la justice, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme La greffière, 2 N° 21VE01388
Cours administrative d'appel
Versailles
CAA de NANCY, 4ème chambre, 28/11/2023, 20NC02859, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme A... B... a demandé, par une demande enregistrée le 5 juin 2018, au greffe du tribunal des pensions militaires d'invalidité du ressort de la cour d'appel de Besançon, d'annuler la décision du 13 février 2018 par laquelle la ministre des armées a supprimé sa pension militaire d'invalidité temporaire et a refusé de lui accorder une pension définitive et d'enjoindre à la ministre des armées de lui accorder le bénéfice d'une pension militaire définitive avec un taux d'invalidité de 12 %. En application du décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018, le tribunal des pensions militaires d'invalidité a transmis, pour attribution, au tribunal administratif de Besançon la demande de Mme B.... Par un jugement n° 1901784 du 6 août 2020 le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 30 septembre 2020, Mme B..., représentée par la Selarl MDMH, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Besançon du 6 août 2020 ; 2°) d'annuler la décision du 13 février 2018 par laquelle la ministre des armées a supprimé sa pension militaire d'invalidité temporaire et a refusé de lui accorder une pension définitive ; 3°) de fixer sa pension militaire d'invalidité à un taux de 10 % et d'enjoindre à l'administration, dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision à intervenir, à liquider cette pension et de la rétablir dans l'ensemble de ses droits et avantages ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - en estimant que son invalidité entraînée par la blessure dont elle a été victime le 15 juin 2003 était devenue inférieure au taux minimum indemnisable de 10 %, la ministre des armées a commis une erreur d'appréciation : . les douleurs continuelles ressenties doivent être prises en compte dans l'évaluation de la gêne fonctionnelle engendrée par son infirmité ; . en écartant le " tableau douloureux de l'affection " en cause, les premiers juges ont commis une erreur de droit et une erreur d'appréciation ; elle subit au quotidien, plus de 17 ans après les faits, une douleur chronique ; - elle est fondée à solliciter un taux d'invalidité à hauteur de 10 %. Par un mémoire en défense, enregistré le 1er septembre 2021, la ministre des armées conclut au rejet de la requête de Mme B.... Elle fait valoir que : - seule la gêne fonctionnelle peut être prise en compte dans l'évaluation de l'invalidité ; les douleurs ne constituent pas en elles-mêmes un critère objectif de cette gêne ; - conformément aux dispositions de l'article L. 151-6 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, la gêne fonctionnelle constatée dans l'expertise médicale en date du 5 décembre 2017 a diminué, par rapport à celle constatée par l'expertise médicale du 15 juin 2015. Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle de Nancy du 15 décembre 2020. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Roussaux, première conseillère, - et les conclusions de M. Michel, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. Mme B..., née le 11 novembre 1979, s'est engagée dans l'armée de terre en 2001 et a été rayée des cadres le 8 mars 2013 avec le grade de capitaine. Le 15 juin 2003, alors qu'elle était en mission au Kosovo, elle a été victime de violences de la part d'un militaire engagé qui l'a blessée, par un coup de pied direct, au niveau de l'épaule et de l'hémiface gauches. En raison de cette blessure, une pension militaire d'invalidité temporaire, avec un taux de 10 %, lui a été concédée, le 16 août 2016, pour la période allant du 14 novembre 2014 au 13 novembre 2017. Le 19 mars 2017, l'intéressée a demandé une pension définitive sur le fondement de l'article R. 121-4 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre. Par une décision du 13 février 2018, la ministre des armées a rejeté sa demande. Mme B... a contesté cette décision et par un jugement du 14 mai 2019, le tribunal des pensions militaires du ressort de la cour d'appel de Besançon a ordonné, avant-dire droit, une expertise médicale, laquelle a été rendue le 9 septembre 2019. Mme B... relève appel du jugement du 6 août 2020 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 13 février 2018 par laquelle la ministre des armées a refusé de faire droit à sa demande de pension militaire d'invalidité définitive. 2. Aux termes de l'article 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre dans sa rédaction applicable au litige et désormais codifié à l'article L. 121-1 : " Ouvrent droit à pension :1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ;(...) ". Aux termes de l'article L. 4 du même code, dans sa version applicable au litige, désormais codifié à l'article L. 121-5 : " Les pensions sont établies d'après le degré d'invalidité. Sont prises en considération les infirmités entraînant une invalidité égale ou supérieure à 10 %. Il est concédé une pension :1° Au titre des infirmités résultant de blessures, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse 10 % ; (...) ". Aux termes de l'art L. 26 du même code, désormais codifié à l'art L. 151-6 : " Toute décision administrative ou judiciaire relative à l'évaluation de l'invalidité doit être motivée par des raisons médicales et comporter, avec le diagnostic de l'infirmité, une description complète faisant ressortir la gêne fonctionnelle et, s'il y a lieu, l'atteinte de l'état général qui justifient le pourcentage attribué ". 3. Il résulte notamment de ces dispositions qu'une infirmité ouvre droit au versement d'une pension d'invalidité, sous réserve que les conditions d'imputabilité au service prévues par le code soient remplies, dès lors qu'elle entraîne une invalidité égale ou supérieure à 10 %. 4. Par ailleurs, la pension militaire d'invalidité doit être regardée comme ayant pour objet de réparer, d'une part, les pertes de revenus et l'incidence professionnelle de l'incapacité physique et, d'autre part, le déficit fonctionnel, entendu comme l'ensemble des préjudices à caractère personnel liés à la perte de la qualité de la vie, aux douleurs permanentes et aux troubles ressentis par la victime dans ses conditions d'existence personnelles, familiales et sociales, à l'exclusion des souffrances éprouvées avant la consolidation, du préjudice esthétique, du préjudice sexuel, du préjudice d'agrément lié à l'impossibilité de continuer à pratiquer une activité spécifique sportive ou de loisirs et du préjudice d'établissement lié à l'impossibilité de fonder une famille. 5. En l'espèce, Mme B... a bénéficié d'une pension militaire d'invalidité temporaire, au taux de 10 %, pour " Séquelles de contusion de l'épaule gauche chez une droitière. Deux arthroscopies : arthroplastie sous-acromiale avec synovectomie sous-acromiale, ostéomie de Neer et libération du ligament coraco-acromial. Raideur articulaire portant principalement sur l'abduction et la propulsion " du 14 novembre 2014 au 13 novembre 2017. Consécutivement à une demande de renouvellement de sa pension, la ministre des armées a, par décision du 13 février 2018, informé Mme B... de ce que l'infirmité initialement pensionnée n'ouvrait plus droit à pension à compter du 17 novembre 2007, son degré d'invalidité étant devenu inférieur au taux minimum indemnisable de 10 %. 6. Il résulte de l'instruction et notamment des pièces médicales produites qu'à l'occasion de son expertise " en renouvellement ", réalisée le 5 décembre 2017, le médecin généraliste, expert agrée auprès de la sous-direction des pensions, a constaté une amélioration de l'état de santé de Mme B... par rapport à l'examen clinique réalisé par ses soins le 17 juin 2015, en relevant, notamment, un gain de 20° de la mobilité de l'épaule gauche à l'antépulsion et à l'abduction soit un passage de 130° à 150° d'amplitude. Il a tenu également tenu compte des douleurs résiduelles lors de certains mouvements et a ainsi fixé un taux d'invalidité à 8 %. Par ailleurs, si l'expert judiciaire, intervenu à la suite de l'expertise médicale ordonnée par le tribunal des pensions militaires de Besançon, a conclu dans son rapport du 9 septembre 2019 à la stabilisation de l'état de santé de la requérante et a fixé son taux d'invalidité à 10 %, il résulte de l'instruction que pour maintenir ce taux à 10 %, le médecin a tenu compte des soins liés au suivi psychiatrique de la requérante alors que la pathologie " stress post-traumatique " est sans lien avec l'infirmité pour laquelle une pension militaire d'invalidité définitive a été sollicitée. Enfin, la requérante ne peut utilement se prévaloir d'une nouvelle expertise du 15 mars 2018, de son examen médical du 14 novembre 2019 ainsi que d'une lettre d'un chirurgien du 2 avril 2020, ces éléments étant postérieurs au dépôt de sa demande de renouvellement de pension militaire d'invalidité du 19 mars 2017, date à laquelle le degré d'infirmité est déterminé sans qu'il soit possible de tenir compte d'éléments d'aggravation postérieurs à cette date. 7. Ainsi, il ne résulte pas de l'instruction que le taux d'incapacité résultant de son accident de service du 15 juin 2003 soit égal ou supérieur à 10 %, condition nécessaire à son droit à la concession d'une pension militaire d'invalidité pour son infirmité à son épaule gauche. C'est par suite sans erreur d'appréciation que la ministre a pu opposer un refus à sa demande de pension pour ce motif. 8. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 13 février 2018 de la ministre des armées lui refusant une pension militaire d'invalidité. Sur les frais liés à l'instance : 9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que le conseil de Mme B... demande sur le fondement de ces dispositions combinées à celles de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. D E C I D E : Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre des armées. Délibéré après l'audience du 7 novembre 2023, à laquelle siégeaient : - Mme Ghisu-Deparis, présidente, - Mme Samson-Dye, présidente assesseure, - Mme Roussaux, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 novembre 2023. La rapporteure, Signé : S. RoussauxLa présidente, Signé : V. Ghisu-Deparis La greffière, Signé : N. Basso La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, N. Basso 2 N° 20NC02859
Cours administrative d'appel
Nancy
CAA de BORDEAUX, 1ère chambre, 23/11/2023, 21BX04236, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler la décision du 12 mars 2020 rejetant sa demande d'attribution de la carte du combattant. Par un jugement n° 2001828 du 16 septembre 2021, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés le 17 novembre 2021 et le 31 mars 2022, M. A..., représenté par Me Moumni, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 16 septembre 2021 ; 2°) d'annuler la décision du 12 mars 2020 par laquelle la directrice générale de l'Office national des anciens combattants et des victimes de guerre a rejeté sa demande tendant à l'obtention de la carte du combattant ; 3°) d'enjoindre à l'Office national des anciens combattants et des victimes de guerre de lui délivrer la carte du combattant ; 4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - le jugement est insuffisamment motivé ; - la décision litigieuse est entachée d'un défaut de motivation ; - il remplit les conditions pour se voir délivrer la carte du combattant sur le fondement de l'article L. 253 ter du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre au vu de son affectation à l'ambassade de Kinshasa de 2009 à 2013 en qualité de secrétaire d'attaché de sécurité intérieure durant laquelle il a exercé une mission entrant dans le champ de plusieurs résolutions des Nations Unies et présentant des liens avec l'opération MONUSCO ; a minima, sa participation de mars à novembre 2011 en qualité de militaire à des opérations de sécurisation du processus électoral en République démocratique du Congo lui ouvre droit à la délivrance de cette carte au vu de l'arrêté du 12 janvier 1994 fixant la liste des opérations ouvrant droit au bénéfice de la carte du combattant au titre de l'article L. 253 ter du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; - le refus qui lui a été opposé est entaché d'erreurs de droit en tant, d'une part, qu'il ajoute au texte une condition qui n'y figure pas tirée de ce que le service ouvrant droit à la délivrance de la carte du combattant ne peut correspondre qu'à une opération extérieure et, d'autre part, que l'administration s'est à tort estimée en situation de compétence liée pour rejeter sa demande ; - l'administration a omis d'examiner sa demande sur le fondement de l'article L. 311-4 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; le refus qui lui a été opposé est également entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ces dispositions compte tenu de la qualité de son parcours. Par un mémoire en défense enregistré le 21 février 2022, l'Office national des anciens combattants et des victimes de guerre, représenté par la SCP Matuchansky Poupot Valdelièvre, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - l'arrêté du 12 janvier 1994 fixant la liste des opérations ouvrant droit au bénéfice de la carte du combattant au titre de l'article L. 253 ter du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Kolia Gallier, - les conclusions de M. Romain Roussel Cera, rapporteur public, - et les observations de Me Clavier, représentant M. A.... Considérant ce qui suit : 1. M. A..., sous-officier de gendarmerie en retraite depuis le 1er juin 2019, a demandé, le 22 novembre 2017, la délivrance de la carte du combattant. Il relève appel du jugement du 16 septembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision de refus que lui a opposé l'Office national des anciens combattants et des victimes de guerre le 12 mars 2020. Sur la régularité du jugement : 2. Il résulte des motifs du jugement que le tribunal administratif de Poitiers a expressément et suffisamment répondu aux moyens soulevés par M. A... dans ses écritures. La circonstance que les premiers juges auraient à tort écarté le moyen tiré du défaut de motivation de la décision litigieuse de l'Office national des combattants et des victimes de guerre n'est susceptible d'avoir d'incidence que sur le bien-fondé du jugement et ne saurait, à la supposer établie, l'entacher d'irrégularité. Sur le bien-fondé du jugement : 3. Aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " (...) doivent être motivées les décisions qui : (...) / 6° Refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir ; (...) ". 4. La décision en litige mentionne l'ensemble des textes législatifs et réglementaires régissant les conditions d'attribution de la carte du combattant et le motif pour lequel la directrice générale de l'Office national des combattants et des victimes de guerre estime que M. A... ne peut en bénéficier. Elle est, par suite, suffisamment motivée. 5. Aux termes de l'article L. 311-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " (...) La reconnaissance de la qualité de combattant dans les conditions prévues par le présent chapitre donne lieu à l'attribution de la carte du combattant. " L'article L. 311-2 du même code, dans sa version applicable au litige, dispose : " Ont également vocation à la qualité de combattant les militaires des forces armées françaises qui ont participé à des actions de feu et de combat ainsi que les personnes civiles qui, en vertu des décisions des autorités françaises, ont participé au sein d'unités françaises ou alliées ou de forces internationales, soit à des conflits armés, soit à des opérations ou missions menées conformément aux obligations et engagements internationaux de la France. / Une durée d'au moins quatre mois de service effectuée au titre des conflits, opérations ou missions mentionnés au premier alinéa est reconnue équivalente à la participation aux actions de feu ou de combat mentionnées à cet alinéa. / Un arrêté conjoint du ministre de la défense et du ministre chargé du budget fixe notamment les périodes à prendre en considération pour chacun de ces conflits, opérations ou missions. Il fixe également les bonifications attachées le cas échéant à ces périodes. " L'arrêté du 12 janvier 1994 modifié, pris en application de l'article L. 311-2 précité et fixant la liste des opérations extérieures ouvrant droit au bénéfice de la carte du combattant mentionne notamment les interventions conduites dans le cadre de l'opération MONUSCO (Mission de l'organisation des Nations unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo) sur le territoire de la République démocratique du Congo entre le 2 juin 2011 et le 1er juin 2015. 6. Contrairement à ce que soutient le requérant, la décision litigieuse ne lui oppose pas que seul le service qualifié d'opération extérieure est susceptible d'ouvrir droit à la délivrance de la carte du combattant. Le moyen tiré de l'erreur de droit ne peut, dans ces conditions, qu'être écarté. 7. La circonstance que l'Office national des anciens combattants et des victimes de guerre ait indiqué, dans ses écritures en défense devant les premiers juges, que l'administration était tenue de refuser à l'intéressé la délivrance de la carte du combattant dont il ne remplissait pas les conditions ne révèle aucune situation de compétence liée, contrairement à ce que soutient le requérant. 8. M. A... se prévaut de son affectation à l'ambassade de France de la République démocratique du Congo à Kinshasa du 1er août 2009 au 31 juillet 2013 en qualité d'assistant de l'attaché de sécurité intérieure et soutient que cette affectation s'inscrit dans le cadre de l'opération MONUSCO, en particulier sa participation de mars à novembre 2011 en qualité de militaire à des opérations de sécurisation du processus électoral en République démocratique du Congo. Toutefois, il ne ressort d'aucune des pièces au dossier, en particulier ni de son ordre de mutation du 12 mai 2009 ni de son certificat de position militaire du 17 avril 2013, que M. A... aurait été détaché auprès de l'ONU pour intervenir dans le cadre de l'opération MONUSCO en République démocratique du Congo. Si les éléments produits par le requérant établissent qu'il a pu participer, en collaboration avec les effectifs de cette mission, à la poursuite d'objectifs communs tel que la sécurisation du processus électoral en novembre 2011, il en ressort également que M. A... est intervenu dans le seul cadre des actions menées par le service de sécurité intérieure de l'ambassade de France pour la coopération bilatérale en matière de police entre la France et la République démocratique du Congo. Dans ces conditions, M. A... n'est pas fondé à soutenir qu'il est intervenu, au sens des dispositions précitées, dans le cadre de la MONUSCO. 9. Aux termes de l'article L. 311-4 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " A titre exceptionnel, les personnes qui ne remplissent pas les conditions d'attribution de la qualité de combattant peuvent obtenir celle-ci sur décision motivée du ministre chargé des anciens combattants et victimes de guerre ". L'article R. 311-18 du même code prévoit : " La décision sur les demandes présentées au titre de l'article L. 311-4 est prise par le ministre chargé des anciens combattants et victimes de guerre, après instruction et avis des services départementaux ou territoriaux de l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre. " 10. Il résulte des dispositions précitées, ainsi que le fait valoir l'Office national des anciens combattants et des victimes de guerre en défense, que l'administration n'est tenue d'examiner la possibilité d'attribuer la qualité de combattant à titre exceptionnel sur le fondement des dispositions de l'article L. 311-4 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre qu'en cas de demande présentée en ce sens. Or, il ne ressort pas des termes de la demande adressée par M. A... aux services de l'Office national des combattants et des victimes de guerre qu'il aurait souhaité voir sa situation examinée sur ce fondement. En tout état de cause, en dépit des qualités professionnelles avérées de l'intéressé, il ne ressort pas des pièces du dossier que le refus opposé sur ce fondement serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation. 11. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande. Sa requête ne peut, par suite, qu'être rejetée en toutes ses conclusions. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... la somme de 1 500 euros à verser à l'Office national des anciens combattants et des victimes de guerre au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DECIDE : Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : M. A... versera à l'Office national des anciens combattants et des victimes de guerre la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la directrice générale de l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre. Copie en sera adressée au ministre des armées. Délibéré après l'audience du 2 novembre 2023 à laquelle siégeaient : M. Jean-Claude Pauziès, président, Mme Christelle Brouard-Lucas, présidente-assesseure, Mme Kolia Gallier, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 novembre 2023. La rapporteure, Kolia GallierLe président, Jean-Claude Pauziès La greffière, Marion Azam Marche La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. N° 21BX04236 2
Cours administrative d'appel
Bordeaux
CAA de VERSAILLES, 5ème chambre, 05/12/2023, 21VE02427, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler la décision du 3 août 2018 par laquelle le président du conseil départemental des Hauts-de-Seine a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de la pathologie dont elle souffre, de désigner un expert et de mettre à la charge du département des Hauts-de-Seine la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens. Par un jugement n° 1810000 du 10 juin 2021, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 10 août 2021, Mme B..., représentée par Me Khamlichi, avocat, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler cette décision ; 3°) de mettre à la charge du département des Hauts-de-Seine la somme de 1 500 euros à lui verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les entiers dépens de l'instance. Elle soutient que : - c'est à tort que le tribunal administratif a écarté le caractère professionnel de sa maladie ; - la décision attaquée est entachée d'une erreur d'appréciation pour cette raison ; - l'activité d'entretien et de nettoyage qu'elle a exercée pendant près de vingt ans, qui suppose des mouvements répétitifs, a provoqué la maladie dont elle souffre ; - la contre-expertise du 20 juin 2017 établit le lien entre sa maladie et le métier très manuel et mécanique qu'elle a exercé pendant près de vingt ans. Par un mémoire en défense, enregistré le 23 juin 2022, le département des Hauts-de-Seine, représenté par Me Bazin, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de Mme B... la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - l'imputabilité au service d'une maladie ne saurait être présumée dès lors que la demande de reconnaissance déposée par Mme B... est antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2017-53 du 19 janvier 2017 ; - en tout état de cause, les conditions fixées par l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale ne sont pas remplies ; - les moyens de la requête ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de la sécurité sociale ; - la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - l'ordonnance n° 2017-53 du 19 janvier 2017 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Houllier, - les conclusions de Mme Janicot, rapporteure publique, - et les observations de Me Poput, substituant Me Bazin, pour le département des Hauts-de-Seine. Considérant ce qui suit : 1. Mme B..., adjointe technique territoriale, fait appel du jugement du 10 juin 2021 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du président du conseil départemental des Hauts-de-Seine du 3 août 2018 refusant de reconnaître l'imputabilité au service de sa maladie. 2. Aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans sa version applicable à la date de la décision en litige : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. (...) / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident (...) Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales (...) ". 3. Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service. 4. En premier lieu, les dispositions de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale instituant une présomption d'origine professionnelle pour toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans des conditions mentionnées à ce tableau ont été rendues applicables aux fonctionnaires relevant de la fonction publique territoriale par l'article 10 de l'ordonnance du 19 janvier 2017 portant diverses dispositions relatives au compte personnel d'activité, à la formation et à la santé et la sécurité au travail dans la fonction publique, qui a introduit un article 21 bis dans la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires. L'application de ces dispositions résultant de l'ordonnance du 19 janvier 2017 est manifestement impossible en l'absence d'un texte réglementaire fixant, notamment, les conditions de procédure applicables à l'octroi du nouveau congé pour invalidité temporaire imputable au service qu'elles édictent. L'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 n'est donc entré en vigueur, en tant qu'il s'applique à la fonction publique territoriale, qu'à la date d'entrée en vigueur, le 13 avril 2019, du décret n° 2019-301 du 10 avril 2019 relatif au congé pour invalidité temporaire imputable au service dans la fonction publique territoriale, décret par lequel le pouvoir réglementaire a pris les dispositions réglementaires nécessaires pour cette fonction publique. Il s'ensuit que les dispositions de l'article 57 précitées sont seules applicables au présent litige. 5. En second lieu, il ressort des pièces du dossier que Mme B..., adjointe technique dans le département des Hauts-de-Seine, a développé une ténosynovite De Quervain au poignet gauche. Le 18 novembre 2015, elle a sollicité la reconnaissance de l'imputabilité au service de cette maladie. Toutefois, si Mme B... soutient que cette maladie est directement imputable aux tâches mécaniques et répétitives qu'elle réalisait en qualité d'agent d'entretien, elle n'apporte pas d'éléments suffisamment précis permettant d'apprécier le lien de causalité entre ses fonctions, décrites de manière très générale, et l'apparition de ses symptômes. En particulier, il ressort des pièces du dossier que si la commission de réforme a initialement donné un avis favorable à la reconnaissance de l'imputabilité au service le 21 novembre 2016, elle a ensuite modifié son avis pour statuer au vu d'un dossier complété et a rendu un avis défavorable le 30 janvier 2017, qu'elle a confirmé lors de sa séance du 23 juillet 2018. En outre, si, lors d'une contre-expertise du 20 juin 2017, le médecin rhumatologue-podologue a indiqué que la maladie de Mme B... était imputable au service, ces indications sont contredites par un autre certificat médical, établi le 26 février 2016 par un autre médecin rhumatologue. A cet égard, le courrier du chirurgien ayant opéré l'intéressée en novembre 2016, se borne à relever que la maladie " peut entrer " dans le champ des maladies professionnelles sans l'établir précisément. Enfin, il ressort des pièces du dossier que Mme B..., qui soutient que sa maladie serait la conséquence directe de tâches mécaniques et répétitives sur une période de vingt ans, a été placée en congé de maladie ordinaire à plusieurs reprises en 2011, puis en congé maternité puis parental du 19 janvier 2012 au 25 février 2015, avant d'être de nouveau placée en congé de maladie ordinaire à plusieurs reprises du 9 mars au 8 septembre 2015 puis en congé de longue maladie à compter du 9 septembre 2015. Dans ces conditions, alors que la maladie n'a été déclarée que le 18 novembre 2015, plusieurs semaines après l'arrêt de ses fonctions, Mme B... n'établit pas que la ténosynovite De Quervain au poignet gauche dont elle souffre serait directement en lien avec l'exercice de ses fonctions d'agent d'entretien. Enfin, à supposer qu'elle soulève également un moyen tiré de la pénibilité de ses fonctions, Mme B... n'apporte pas d'éléments précis de nature à établir le lien entre cette pénibilité et l'apparition de sa maladie. 6. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande. 7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge du département des Hauts-de-Seine, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que Mme B... demande à ce titre. Par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme B... le versement de la somme que le département des Hauts-de-Seine demande sur le fondement des mêmes dispositions. 8. La présente instance n'ayant donné lieu à aucun dépens, les conclusions présentées par Mme B... sur ce fondement doivent être rejetées. DÉCIDE : Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée. Article 2 : Les conclusions du département des Hauts-de-Seine présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au département des Hauts-de-Seine. Délibéré après l'audience du 23 novembre 2023, à laquelle siégeaient : Mme Signerin-Icre, présidente, M. Camenen, président-assesseur, Mme Houllier, première conseillère, Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 décembre 2023. La rapporteure, S. HoullierLa présidente, C. Signerin-IcreLa greffière, T. René-Louis-Arthur La République mande et ordonne au préfet des Hauts-de-Seine en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme La greffière, 2 N° 21VE02427
Cours administrative d'appel
Versailles
CAA de MARSEILLE, 7ème chambre, 24/11/2023, 22MA00148, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Toulon, à titre principal, d'ordonner la désignation d'un expert, à titre subsidiaire, de condamner l'Etat à lui verser la somme de 25 000 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait de l'accident de service survenu le 13 août 2010 et de l'aggravation de son état de santé, et de mettre à la charge de l'Etat le paiement de la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n° 1903698 du 9 novembre 2021, le tribunal administratif de Toulon a rejeté la requête de M. A.... Procédure devant la Cour : Par une requête enregistrée le 14 janvier 2022, M. A..., représenté par Me Moumni, demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon ; 2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme globale de 22 000 euros, sous réserve du déficit fonctionnel permanent, en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis, avec intérêts au taux légal à compter de la réception de sa demande indemnitaire préalable ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement de la somme de 3 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient qu'il est fondé, sur le terrain de la responsabilité sans faute, à solliciter l'indemnisation du déficit fonctionnel permanent, des souffrances endurées, du préjudice esthétique permanent et du préjudice d'agrément subis du fait de l'accident de service dont il a été victime le 13 août 2010 et de l'aggravation postérieure de son état de santé. La requête a été communiquée à la ministre des armées qui n'a pas produit d'observations. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Vincent, - et les conclusions de M. Guillaumont, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. M. A..., quartier maître de 2ème classe, a été victime, le 13 août 2010, tandis qu'il était en service sur un navire en escale à la Réunion, d'une chute sur le barreau d'une échappée verticale à l'origine d'une entorse du ligament latéral externe de la cheville gauche. Cet accident a été reconnu comme étant imputable au service. Par une lettre en date du 28 décembre 2017, M. A... a demandé à son administration, sur le fondement de la responsabilité sans faute, une indemnisation au titre de différents préjudices consécutifs à l'accident du 13 août 2010 et à l'aggravation de son état, non couverts par la pension militaire d'invalidité. Par une décision du 27 décembre 2018, sa demande a été rejetée comme étant prescrite. M. A... a alors exercé un recours administratif préalable obligatoire devant la commission des recours des militaires. La ministre des armées a, par une décision du 22 juillet 2019, estimé que la prescription n'était pas acquise mais a rejeté au fond la demande de l'intéressé. M. A... interjette appel du jugement du 9 novembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté ses conclusions tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 25 000 euros en réparation des préjudices précités. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : En ce qui concerne les conclusions indemnitaires : 2. Aux termes de l'article L.121-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre : " Ouvrent droit à pension : 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; 2° Les infirmités résultant de maladies contractées par le fait ou à l'occasion du service ; 3° L'aggravation par le fait ou à l'occasion du service d'infirmités étrangères au service ; 4° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'accidents éprouvés entre le début et la fin d'une mission opérationnelle, y compris les opérations d'expertise ou d'essai, ou d'entraînement ou en escale, sauf faute de la victime détachable du service ". 3. Eu égard à la finalité qui lui est assignée et aux éléments entrant dans la détermination de son montant, la pension militaire d'invalidité doit être regardée comme ayant pour objet de réparer, d'une part, les pertes de revenus et l'incidence professionnelle de l'incapacité physique et, d'autre part, le déficit fonctionnel, entendu comme l'ensemble des préjudices à caractère personnel liés à la perte de la qualité de la vie, aux douleurs permanentes et aux troubles ressentis par la victime dans ses conditions d'existence personnelles, familiales et sociales, à l'exclusion des souffrances éprouvées avant la consolidation, du préjudice esthétique, du préjudice sexuel, du préjudice d'agrément lié à l'impossibilité de continuer à pratiquer une activité spécifique, sportive ou de loisirs, et du préjudice d'établissement lié à l'impossibilité de fonder une famille. Lorsqu'elle est assortie de la majoration prévue à l'article L. 133-1 du code, la pension a également pour objet la prise en charge des frais afférents à l'assistance par une tierce personne. 4. En instituant la pension militaire d'invalidité, le législateur a entendu déterminer forfaitairement la réparation à laquelle les militaires peuvent prétendre, au titre des préjudices mentionnés ci-dessus, dans le cadre de l'obligation qui incombe à l'Etat de les garantir contre les risques qu'ils courent dans l'exercice de leur mission. Cependant, si le titulaire d'une pension a subi, du fait de l'infirmité imputable au service, d'autres préjudices que ceux que cette prestation a pour objet de réparer, il peut prétendre à une indemnité complémentaire égale au montant de ces préjudices. En outre, dans l'hypothèse où le dommage engage la responsabilité de l'Etat à un autre titre que la garantie contre les risques courus dans l'exercice des fonctions, et notamment lorsqu'il trouve sa cause dans des soins défectueux dispensés dans un hôpital militaire, l'intéressé peut prétendre à une indemnité complémentaire au titre des préjudices que la pension a pour objet de réparer, si elle n'en assure pas une réparation intégrale. Lorsqu'il est saisi de conclusions en ce sens, il incombe au juge administratif de déterminer le montant total des préjudices que la pension a pour objet de réparer, avant toute compensation par cette prestation, d'en déduire le capital représentatif de la pension et d'accorder à l'intéressé une indemnité égale au solde, s'il est positif. S'agissant du lien de causalité : 5. Il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise établi par le Dr B..., médecin en chef des armées, que la consolidation de l'accident de service du 13 août 2010 doit être fixée au 9 février 2011, date à laquelle le médecin de bord ayant examiné le requérant, a pu constater l'absence de séquelles de la blessure, l'intéressé ayant, au demeurant, repris normalement son activité professionnelle ainsi que ses activités sportives et couru, le 21 janvier 2011, le marathon de Dubaï. Si M. A... se plaint de l'aggravation postérieure de son état de santé et notamment de douleurs invalidantes, d'une boiterie et d'un état dépressif, le lien direct et certain entre l'accident du 13 août 2010 et l'aggravation de son état de santé n'est pas établi par les pièces versées au dossier. Si M. A... se prévaut notamment d'un rapport établi par le Dr C..., chirurgien orthopédique, celui-ci ne permet pas, et alors que le rapport précité du Dr B... exclut formellement tout lien entre l'accident initial et l'aggravation de l'état de l'intéressé, de caractériser ledit lien. Il suit de là, M. A... n'établissant pas ni même d'ailleurs n'alléguant qu'il aurait été victime d'un deuxième accident de service qui se serait produit le 5 septembre ou le 5 décembre 2011, que l'appelant est seulement fondé à prétendre à l'indemnisation des préjudices directement consécutifs à l'accident du 13 août 2010. S'agissant des préjudices : 6. Il résulte de l'expertise du Dr B..., que M. A... a, du fait de l'accident du 13 août 2010, enduré des souffrances avant consolidation évaluées à 0,5/7. Il sera fait une juste appréciation de ce chef de préjudice en l'estimant à la somme de 500 euros. 7. En revanche, le préjudice esthétique permanent dont est victime le requérant du fait d'une boiterie, le préjudice d'agrément lié à la diminution de ses activités sportives ainsi qu'en tout état de cause, le déficit fonctionnel permanent de l'intéressé, lequel a vocation à être réparé par la pension militaire d'invalidité, ne présentent pas de lien direct et certain avec l'accident du 13 août 2010 et ne peuvent, dès lors, donner lieu à indemnisation. 8. Il résulte de ce qui précède que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le tribunal administratif de Toulon a rejeté l'intégralité de ses prétentions indemnitaires. Il y a lieu, dès lors d'annuler ledit jugement et de condamner l'Etat à verser à M. A... la somme de 500 euros. Cette somme portera intérêts au taux légal à compter de la date de réception, par l'administration, de la demande indemnitaire adressée le 28 décembre 2017. Sur les frais d'instance : 9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le paiement de la somme de 1 500 euros qui sera versée à M. A... en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D E C I D E : Article 1er : Le jugement n° 1903698 du tribunal administratif de Toulon du 9 novembre 2021 est annulé. Article 2 : L'Etat est condamné à verser à M. A... la somme de 500 euros en réparation des préjudices consécutifs à l'accident de service survenu le 13 août 2010. Cette somme portera intérêts au taux légal à compter de la date de réception de la demande indemnitaire adressée le 28 décembre 2017 par M. A.... Article 3 : L'Etat versera à M. A... la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le surplus des conclusions d'appel et de première instance de M. A... est rejeté. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A... et au ministre des armées. Délibéré après l'audience du 10 novembre 2023, où siégeaient : - Mme Chenal-Peter, présidente de chambre, - Mme Vincent, présidente assesseure, - Mme Marchessaux, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 24 novembre 2023. N° 22MA00148 2 bb
Cours administrative d'appel
Marseille
CAA de PARIS, 4ème chambre, 24/11/2023, 21PA05729, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 11 décembre 2020 par laquelle la directrice générale de l'office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONACVG) a refusé de lui reconnaître la qualité d'ancien combattant. Par une ordonnance n° 2102818/6-3 du 6 septembre 2021, la vice-présidente de la 6ème section du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés le 5 novembre 2021 et le 11 avril 2023, M. C..., représenté par Me Perriez, demande à la cour : 1°) d'annuler cette ordonnance du 6 septembre 2021 ; 2°) d'annuler la décision 11 décembre 2020 par laquelle la directrice générale de l'ONACVG a refusé de lui reconnaître la qualité d'ancien combattant ; 3°) d'enjoindre à l'ONACVG de réexaminer sa demande dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir. Il soutient que : Sur la régularité de l'ordonnance attaquée : - l'ordonnance attaquée est entachée d'une erreur de fait en ce qu'elle retient que la décision attaquée est fondée uniquement sur le motif tiré de ce qu'il ne justifie d'aucun jour de présence en unité combattante sur les quatre-vingt-dix exigés alors que cette décision est fondée sur dix motifs ; - l'ordonnance attaquée a été irrégulièrement prise sur le fondement de l'article R. 222-1 7° du code de justice administrative dès lors qu'il faisait notamment valoir, à l'appui de sa demande de première instance, qu'il a servi l'armée française pendant plus de sept années ; Sur la légalité de la décision attaquée : - il a servi pendant la guerre d'Algérie dans l'armée française, sous le nom de D... B... A..., de novembre 1955 à 1962 (ou 1963). Par un mémoire en défense, enregistré le 9 août 2023, l'ONACVG conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés. M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 11 avril 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Bruston, - et les conclusions de Mme Lipsos, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. M. A... C..., né le 1er janvier 1936 à Illizi en Algérie, a sollicité la qualité de combattant pour avoir servi dans l'armée française durant la guerre d'Algérie. Par une décision du 20 octobre 2020, la directrice générale de l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre (l'ONACVG) a rejeté sa demande de titre de reconnaissance de la Nation. La qualité d'ancien combattant lui a également été refusée par une décision du 11 décembre 2020 de la directrice générale de l'ONACVG au motif qu'il ne remplit pas les conditions d'octroi de la qualité de combattant telles qu'identifiées par le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre. M. C... a demandé au tribunal administratif de Paris l'annulation de cette dernière décision. Par une ordonnance du 6 septembre 2021 dont il relève appel, la vice-présidente de la 6° section du tribunal administratif de Paris a rejeté sa requête en application du 7°) de l'article R. 222-1 du code de justice administrative. Sur la régularité de l'ordonnance attaquée : 2. Aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " Les présidents de tribunal administratif et de cour administrative d'appel, les premiers vice-présidents des tribunaux et des cours, le vice-président du tribunal administratif de Paris, les présidents de formation de jugement des tribunaux et des cours et les magistrats ayant une ancienneté minimale de deux ans et ayant atteint au moins le grade de premier conseiller désignés à cet effet par le président de leur juridiction peuvent, par ordonnance : ( ...) 7° Rejeter, après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire, les requêtes ne comportant que des moyens de légalité externe manifestement infondés, des moyens irrecevables, des moyens inopérants ou des moyens qui ne sont assortis que de faits manifestement insusceptibles de venir à leur soutien ou ne sont manifestement pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé (...) ". 3. Pour rejeter, sur le fondement de ces dispositions, la demande présentée par M. C..., la vice-présidente de la 6ème section du tribunal administratif de Paris a relevé que le moyen invoqué par le requérant tiré de ce qu'il remplit les conditions de présence dans l'armée française pour bénéficier de la carte de combattant, mais que suite à une erreur lors de l'enregistrement de son nom de famille par l'armée française, il se trouve dans l'impossibilité d'en justifier, n'était manifestement pas assorti des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé. Toutefois, il ressort de l'examen de ladite demande que M. C... invoquait notamment à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du 11 décembre 2020 par laquelle la directrice générale de l'ONACVG a refusé de lui reconnaître la qualité de combattant, le moyen tiré de ce qu'il remplissait la condition de présence en unité combattante, en faisant valoir qu'il a servi dans l'armée française sous le nom de A... B... et sous le matricule n° 178, entre 1956 et 1958, dans la région du sud algérien, plus précisément à Djanet, Touat et Tinelkoum. Dans ces conditions, alors même que les circonstances alléguées n'étaient étayées par aucune pièce justificative, ce moyen ne pouvait être regardé comme n'étant assorti que de faits manifestement insusceptibles de venir à son soutien ou comme n'étant manifestement pas assorti des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé. Il s'ensuit que la vice-présidente de la 6ème section du tribunal administratif de Paris, ne pouvait, comme elle l'a fait par l'ordonnance attaquée, se fonder sur les dispositions précitées du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative pour rejeter la demande de M. C.... Ainsi, l'ordonnance attaquée est entachée d'irrégularité et doit être annulée. 4. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. C... devant le tribunal administratif de Paris. Sur la légalité de la décision du 11 décembre 2020 : 5. Aux termes de l'article L. 311-1 du CPMIVG : " Ont vocation à la qualité de combattant les militaires des armées françaises qui ont participé (...) à la guerre d'Algérie (...) La reconnaissance de la qualité de combattant dans les conditions prévues par le présent chapitre donne lieu à l'attribution de la carte du combattant. ". 6. M. C... soutient avoir servi dans l'armée française de novembre 1955 à 1962 ou 1963, sous le grade de caporal (matricule n°178) à Djanet en Algérie, sous le nom de D... B... A.... Il ne produit toutefois aucune pièce susceptible de justifier sa présence au sein d'une unité combattante en Algérie durant cette période, y compris sous un autre nom. Dans ces conditions, ses conclusions à fin d'annulation ne peuvent être que rejetées, sans qu'il y soit besoin de procéder à un supplément d'instruction pour qu'il soit procédé à des recherches dans les archives militaires. 7. Il résulte de ce qui précède que la demande de M. C... devant le tribunal administratif de Paris doit être rejetée. D E C I D E : Article 1er : L'ordonnance n° 2102818/6-3 du 6 septembre 2021 de la vice-présidente de la 6ème section du tribunal administratif de Paris est annulée. Article 2 : La demande de M. C... devant le tribunal administratif de Paris est rejetée. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et à l'office national des anciens combattants et victimes de guerre. Délibéré après l'audience du 10 novembre 2023, à laquelle siégeaient : Mme Heers, présidents, Mme Bruston, présidente assesseure, M. Mantz, premier conseiller, Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 novembre 2023. La rapporteure, S. BRUSTON La présidente, M. HEERS La greffière, O. BADOUX-GRARE La République mande et ordonne au ministre de la défense en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. N° 21PA05729 2
Cours administrative d'appel
Paris
Conseil d'État, 7ème - 2ème chambres réunies, 28/11/2023, 467967, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : M. E... D... a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler la décision du 10 décembre 2020 par laquelle le ministre de l'économie, des finances et de la relance a rejeté sa demande de réversion de la rente d'invalidité de Mme B... B..., ainsi que la décision du 18 janvier 2021 née du silence gardé sur son recours gracieux et d'enjoindre au ministre de lui octroyer une rente d'invalidité à hauteur de 60 % du traitement de Mme B... B... ou, à défaut, de réexaminer sa demande. Par un jugement n° 2100334 du 2 août 2022, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande. Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique enregistrés les 3 octobre et 21 décembre 2022 et 19 mai 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. D... demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le premier protocole additionnel à cette convention; - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - le code de la sécurité sociale ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Audrey Prince, maître des requêtes en service extraordinaire, - les conclusions de M. Nicolas Labrune, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Fabiani, Luc-Thaler, Pinatel, avocat de M. D... ; Considérant ce qui suit : 1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le décès de Mme B... B..., professeure de lycée, survenu le 2 mars 2020, a été reconnu imputable au service par une décision de la rectrice de l'académie de La Réunion du 21 octobre 2020. Par un courriel du 3 décembre 2020, M. D..., concubin de Mme B... B..., a demandé au service des retraites de l'Etat la réversion de la rente d'invalidité due à Mme B... B.... Par une décision du 10 décembre 2020, le ministre de l'économie, des finances et de la relance a rejeté sa demande au motif que le couple formé par M. D... et Mme B... B... n'était pas marié. Par un jugement du 2 août 2022, contre lequel M. D... se pourvoit en cassation, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision par laquelle le ministre de l'économie, des finances et de la relance a rejeté sa demande de réversion de la rente d'invalidité de Mme B... B.... 2. Aux termes de l'article L. 38 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " Les conjoints d'un fonctionnaire civil ont droit à une pension de réversion égale à 50 % de la pension obtenue par le fonctionnaire ou qu'il aurait pu obtenir au jour de son décès. / A la pension de réversion s'ajoutent, le cas échéant : / 1° La moitié de la rente d'invalidité dont le fonctionnaire bénéficiait ou aurait pu bénéficier (...) ". Aux termes de l'article L. 39 du même code : " Le droit à pension de réversion est subordonné à la condition : / a) Si le fonctionnaire a obtenu ou pouvait obtenir une pension accordée dans le cas prévu à l'article L. 4 (1°), que depuis la date du mariage jusqu'à celle de la cessation de l'activité du fonctionnaire, celui-ci ait accompli deux années au moins de services valables pour la retraite, sauf si un ou plusieurs enfants sont issus du mariage antérieur à ladite cessation ; / b) Si le fonctionnaire a obtenu ou pouvait obtenir une pension accordée dans le cas prévu à l'article L. 4 (2°), que le mariage soit antérieur à l'événement qui a amené la mise à la retraite ou la mort du fonctionnaire. / Toutefois, au cas de mise à la retraite d'office par suite de l'abaissement des limites d'âge, il suffit que le mariage soit antérieur à la mise à la retraite et ait été contracté deux ans et au moins avant soit la limite d'âge en vigueur au moment où il a été contracté, soit le décès du fonctionnaire si ce décès survient antérieurement à ladite limite d'âge. (...) ". 3. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 434-8 du code de la sécurité sociale : " (...), le conjoint ou le concubin ou la personne liée par un pacte civil de solidarité a droit à une rente viagère égale à une fraction du salaire annuel de la victime, à condition que le mariage ait été contracté, le pacte civil de solidarité conclu ou la situation de concubinage établie antérieurement à l'accident ou, à défaut, qu'ils l'aient été depuis une durée déterminée à la date du décès (...) ". Aux termes de l'article L. 712-1 du même code : " Les fonctionnaires en activité, soumis au statut général, et les magistrats de l'ordre judiciaire bénéficient, ainsi que leur famille, dans le cas de maladie, maternité, invalidité et décès, de prestations au moins égales à celles qui résultent de la législation relative au régime général de sécurité sociale ". 4. En premier lieu, les dispositions générales de l'article L. 712-1 du code de la sécurité sociale n'ont ni pour objet, ni pour effet, lorsque des dispositions spécifiques propres aux fonctionnaires prévoient une prestation en matière de maladie, maternité, invalidité et décès et les conditions pour l'obtenir, de faire prévaloir celles du régime général sur ces dernières. Par suite, en se fondant sur les dispositions de l'article L. 39 du code des pensions civiles et militaires de retraite pour juger que le droit à la réversion de la rente d'invalidité dont le fonctionnaire décédé bénéficiait ou aurait pu bénéficier était réservé au conjoint de celui-ci et non à son concubin, alors même que les règles du code de la sécurité sociale applicables aux salariés du secteur privé seraient plus favorables, le tribunal administratif de La Réunion, dont le jugement est suffisamment motivé, n'a pas commis d'erreur de droit. 5. En deuxième lieu, il résulte des dispositions citées au point 2 que si le droit à une fraction de la rente d'invalidité du conjoint du fonctionnaire décédé peut s'ajouter au droit à la pension de réversion, ces droits sont soumis à la même condition de mariage. Par suite, en jugeant que la circonstance que le droit du conjoint du fonctionnaire décédé à la moitié de la rente d'invalidité et le droit à la pension de réversion constitueraient des prestations distinctes était sans influence sur la légalité de la décision litigieuse, le tribunal administratif n'a pas commis d'erreur de droit. 6. En dernier lieu, en jugeant que la différence de traitement en fonction du statut de la personne défunte, selon qu'elle avait la qualité d'agent public titulaire ou de salarié du secteur privé correspond à une différence de situation entre assurés du secteur public et du secteur privé et, par suite, ne méconnaît pas les stipulations combinées de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention, le tribunal administratif de La Réunion a suffisamment motivé son jugement sur ce point et n'a, au demeurant, pas commis d'erreur de droit. 7. Il résulte de ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement qu'il attaque. 8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. D E C I D E : -------------- Article 1er : Le pourvoi de M. D... est rejeté. Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. E... D... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. ECLI:FR:CECHR:2023:467967.20231128
Conseil d'Etat